Revue Concurrences
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Concurrences Revue des droits de la concurrence Competition Law Journal Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Tendances l Concurrences N° 1-2013 – pp. 16-37 Emmanuel Combe [email protected] l l Vice-président de l’Autorité de la concurrence Professeur affilié à ESCP Europe PRISM‑Sorbonne Constance Monnier [email protected] l aître de conférences à l’Université de Paris I M PRISM-Sorbonne et ESCP Europe Marcel Boyer [email protected] l Professeur, CIRANO, Université de Montréal François Brunet [email protected] l l Avocat associé, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP Président de la commission Concurrence du comité français de la Chambre de Commerce Internationale Esther Bitton [email protected] l Avocate, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP Tendances Emmanuel CoMbe [email protected] Vice-président de l’Autorité de la concurrence, Professeur affilié à ESCP Europe PRISM-Sorbonne Constance MonnIer [email protected] Maître de conférences à l’Université de Paris I, PRISM-Sorbonne et ESCP Europe Marcel boyer quelleestl’aMPleur de la sous-dIssuasIon des CartelseneuroPe? CoMPléMentssurnosrésultats EmmanuelCoMbeet Constance MonnIer Vice-président, Autorité de la concurrence et Maître de conférences, Université de Paris I [email protected] Professeur, CIRANO, Université de Montréal François brunet [email protected] Avocat associé, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP Président de la commission Concurrence du comité français de la Chambre de Commerce Internationale Esther bItton [email protected] Avocate, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP T Abstract his set of three papers is derived from the conference organized by the Concurrences Journal and the Chambre de commerce internationale of Paris that was held on the 17th October 2012 in Paris. In the first article, Emmanuel Combe and Constance Monnier relying on the latest developments on optimal sanction and on new estimates show that the results of their works of 2007 remain fully valid. In the second paper, Marcel Boyer after reviewing the main issues and significant pitfalls in setting cartel fines, concludes that most fines imposed recently in the EU are above the critical deterrence level. For François Brunet, author of the last contribution, the record-breaking fine imposed by the European Commission against the producers of monitor tubes, revives the economic debate on the fair amount of antitrust sanctions. For him, the Commission should conduct an analysis of the effects of the sanctioned cartels on a case-by-case basis. Ce dossier réunit trois contributions présentées le 17 octobre 2012 à Paris lors d’une conférences organisée par la revue Concurrences et la Chambre de commerce internationale. Emmanuel Combe et Constance Monnier, auteurs de la première contribution, reviennent sur leurs travaux de 2007 et s’appuyant sur les derniers développements en matières de sanction optimale et sur de nouvelles estimations, confirment que les amendes à l’encontre des cartels en Europe sont sousdissuasives. Marcel Boyer, auteur de la seconde contribution passe quant à lui en revue les facteurs à considérer et les écueils à éviter dans la sanction des cartels. D’après lui, les amendes récemment prononcées par la Commission européenne sont dissuasives. Enfin François Brunet, auteur de la dernière contribution, rappelle que la Commission européenne a imposé une amende totale record de 1,47 milliard d’euros qui relance le débat économique sur le juste montant des sanctions antitrust. Selon lui, la Commission devrait accepter de mener une analyse au cas par cas des effets des ententes qu’elle sanctionne, chaque fois que cela est possible. 1. Combe et Monnier (2007) ont développé une méthodologie permettant d’estimer les amendes optimales (restitutives et dissuasives) à infliger aux cartels, compte tenu des principaux paramètres économiques qui influent sur l’ampleur du surprofit illicite, lequel constitue un minorant du dommage causé au marché. Il apparaît que l’amende optimale doit être d’autant plus élevée que le marché affecté est important, la durée du cartel longue, l’élasticité de la demande, la probabilité de détection et la marge concurrentielle faibles, la hausse du prix forte. 2. En comparant les amendes optimales à celles effectivement infligées, Combe et Monnier (2011) concluent que la Commission n’a pas pratiqué, au cours de la période 1969‑2009, la “surdissuasion” : les amendes sont restées souvent inférieures à leur niveau optimal, en particulier lorsque la probabilité de détection est prise en compte. À la suite de la publication de ces résultats, Allain, Boyer et Ponssard (2011), Boyer et Kotchoni (2011) ont cherché à démontrer que les amendes optimales estimées par Combe et Monnier (2011) étaient en réalité trop élevées, compte tenu de certaines caractéristiques relatives au modèle ou aux paramètres retenus (hausses de prix). 3. Après avoir rappelé l’enjeu de ce débat, nous discuterons et répondrons à chacun des arguments de ces auteurs. Nous distinguerons les critiques relatives à la méthodologie et celles portant sur le niveau des paramètres. Nous conduirons de nouvelles estimations en utilisant les hausses de prix de Boyer et Kotchoni (2011) et nous montrerons que, même dans ce cas, nos résultats restent pleinement valides. I. La hausse des amendes n’implique pas nécessairement une “surdissuasion” 4. De nombreux spécialistes – y compris les auteurs – soulignent que le montant des amendes totales infligées à l’encontre des cartels en Europe a significativement augmenté depuis le début des années 2000 (après la nomination de Mario Monti à la tête la DG Concurrence en 1999). La prise en compte du nombre de cartels détectés par année ne remet pas en cause ce résultat : il apparaît en effet que l’amende moyenne par cartel a progressé (voir Combe et Monnier [2011]). De même, la prise en compte de la taille des marchés affectés et de la durée des cartels ne permet pas d’invalider cette tendance à la hausse. Toutes choses égales par ailleurs, on peut donc considérer que la Commission est devenue plus sévère à l’encontre des cartels. 5. Ce résultat, fondé sur une observation réelle, a néanmoins fait l’objet d’une interprétation parfois erronée : le fait que la Commission soit devenue “plus” sévère n’implique en rien qu’elle soit devenue “trop sévère” ou suffisamment “sévère”… Tout dépend du point de départ retenu. En la matière, trois cas de figure sont possibles : Concurrences N° 1-2013 I Tendances 16 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? g cas 2 : la Commission, qui pratiquait la sous‑dissuasion par le passé, serait devenue, au fil du temps, trop sévère et aurait basculé du côté de la “surdissuasion” ; g cas 3 : la Commission, qui pratiquait la sous‑dissuasion, serait devenue plus sévère, sans pour autant franchir la ligne rouge de la “surdissuasion” (graphique 1). Le renforcement des amendes n’aurait pas conduit à l’imposition de sanctions excessives, compte tenu du profit illicite réalisé par les cartels et de la probabilité de détection. En d’autres termes, les amendes étaient trop faibles par le passé et leur hausse récente a simplement permis de se rapprocher du niveau optimal, sans jamais le dépasser. Nos résultats se situent clairement dans cette troisième configuration. 8. Au demeurant, si les amendes étaient véritablement dissuasives, il serait devenu irrationnel de former un cartel en Europe puisque le gain serait inférieur à la sanction espérée. On ne devrait plus observer l’éclosion de nouveaux cartels sur la période récente, ni de récidive. Or, le taux de récidive reste significatif, notamment dans certains secteurs comme la chimie. Ainsi, Combe et Monnier (2012) estiment que ce taux se situe à 24 % en Europe (et 31 % dans la chimie). Selon John Connor (2010b), la récidive en matière de cartels est commune et assez fréquente. Graphique 1 : L’évolution de la politique de sanctions de la Commission 9. En outre, les conclusions de nos travaux, loin d’être isolées, rejoignent celles d’autres économistes, qui insistent également sur l’insuffisance des amendes infligées aux cartels, notamment en Europe (voir notamment : Gérardin et Henry [2005], Connor et Lande [2006], Veljanosky [2007], Buccirossi et Spagnolo [2007])1. 10. Ainsi, considérer que la hausse des amendes infligées aux cartels en Europe équivaut ipso facto à des sanctions “surdissuasives” constitue une erreur d’interprétation et repose sur un raccourci méthodologique. La question qui est posée est celle de l’ampleur de la “sous‑dissuasion” : dans quelle mesure la plus grande sévérité de la Commission a‑t‑elle permis de se rapprocher du niveau de la sanction optimale ? 6. L’appréciation de la hausse du niveau des amendes doit se faire au regard du gain net, puisqu’un agent rationnel met en balance les coûts et les gains avant de prendre la décision de s’engager dans un cartel. Combe et Monnier (2011) ont ainsi estimé le montant de l’amende optimale dans chaque cas de cartel en le comparant au montant de l’amende infligée. Ils montrent que : g l’amende effective n’atteint que très rarement le niveau de l’amende dissuasive (amende plafond), qui prend en compte le fait que tous les cartels ne sont pas détectés ; g dans moins de la moitié des cas, l’amende effective n’atteint pas le montant de l’amende restitutive, égale au gain illicite réalisé par le cartel (amende plancher). 7. Les amendes infligées ne sont donc jamais “surdissuasives” (graphique 2) et se situent systématiquement sous le plafond de l’amende dissuasive. 1 Concurrences N° 1-2013 I Tendances 17 Connor et Lande (2006) montrent que, dans le cas du cartel des vitamines, l’amende infligée s’est élevée à 11 % du profit illégal. Veljanovski (2007) souligne, quant à lui, que l’amende infligée par la Commission est inférieure au dommage subi par les consommateurs dans tous les cartels condamnés, sauf trois (vitamines B2, B5 et D3). Il utilise comme base de calcul de l’amende le dommage subi par les consommateurs, lequel est toujours supérieur au gain illicite réalisé par le cartel. Il fait l’hypothèse que la perte sèche s’élève à 50 % du surprofit des firmes et donc que le dommage total est égal à 150 % du profit illégal. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Graphique 2 : L’ampleur de la dissuasion g cas 1 : la Commission aurait toujours pratiqué la “surdissuasion” et la pratique récente n’aurait fait qu’accentuer cette tendance ; 2. La question de la stabilité interne du cartel 14. Allain et al. (2011) réintroduisent la dimension dynamique du comportement des firmes en développant un cadre théorique dans lequel chaque entreprise réévalue continuellement son choix de rester ou non dans le cartel : elle choisit de rester si les profits futurs de collusion excèdent les profits de tricherie, compte tenu du niveau de probabilité de détection et de l’amende. L’amende devient dissuasive lorsqu’elle est telle que l’entreprise ne participe pas au cartel (ex ante), mais aussi lorsqu’une fois le cartel formé, les entreprises sont incitées à tricher. Leur modèle théorique mélange donc la question de la sanction optimale et celle de la stabilité interne. Ils s’appuient pour se faire sur une analyse en termes de théorie des jeux non coopératifs et répétés : a‑t‑on intérêt ex post et à chaque période à respecter le prix de cartel ? 11. Une première série de critiques concerne le cadre méthodologique retenu par Combe et Monnier (2011), cadre dérivé de l’économie du crime (Becker [1968]). Selon Alain et al. (2011), l’analyse en termes de sanctions optimales doit s’inscrire dans une perspective dynamique et non statique, ce qui pose la question du type de concurrence retenu en l’absence de cartel et de la stabilité interne du cartel. 1. Le prix sans cartel est appréhendé grâce à la marge concurrentielle 15. Plus précisément, les auteurs développent un modèle dynamique (jeu répété sur un horizon infini ou indéterminé) en introduisant, outre le risque de détection à chaque période, un risque de tricherie. Dans leur contexte, ce risque vient réduire le niveau de la sanction optimale permettant de dissuader les cartels. Une telle formalisation du risque de déviation et de la stabilité interne (théorie des jeux répétés non coopératifs) s’applique assez bien à une situation de collusion tacite, mais ne correspond en rien à la réalité concrète des cartels, qui sont des organisations sophistiquées, ayant justement résolu la question de la déviation au moyen d’un système de contrôle interne. 12. Selon Allain et al. (2011), le modèle retenu par Combe et Monnier ne prendrait pas suffisamment en compte le caractère dynamique de la concurrence, ce qui aurait un impact sur le niveau de l’amende optimale. En effet, certaines caractéristiques du marché, telles que les barrières à l’entrée, le degré de concentration, etc., influencent le niveau de prix en concurrence (but‑for price). En outre, en fonction de certaines de ces caractéristiques, la théorie des jeux répétés montre qu’une situation de collusion tacite peut émerger sur un marché (le prix de concurrence devient alors élevé), notamment si les entreprises sont suffisamment patientes. 13. Notre méthodologie prend pleinement en compte le fait que le prix de concurrence puisse exprimer un équilibre de collusion tacite. En effet, nous n’avons pas estimé le surprofit lié au cartel par rapport à une situation hypothétique de concurrence parfaite, dans laquelle le profit serait nul, mais par rapport au profit effectif réalisé dans le secteur concerné par le cartel. En effet, nous avons évalué au cas par cas les taux de marge sans cartel de chaque secteur concerné pour chacun des cartels condamnés. Nos estimations tiennent donc compte des caractéristiques concurrentielles et structurelles du marché, telles qu’elles résultent de l’interaction dynamique des stratégies des entreprises. Ainsi, nous obtenons des taux de marge parfois très élevés dans certains secteurs (tels que le zinc, le ciment ou les ventes aux enchères, ce dernier marché étant en duopole) qui correspondent peut‑être à un équilibre de collusion tacite. Mais à vrai dire, peu importe la provenance de ces niveaux de profits élevés en concurrence, l’essentiel est bien de les prendre en compte dans le calcul de l’amende afin de ne pas la surestimer. Dans les secteurs présentant un fort taux de marge en l’absence de cartel, le surprofit du cartel est réduit d’autant, ainsi que nos estimations d’amendes optimales. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 16. En effet, le traitement de la question de la stabilité interne des cartels doit prendre en compte le fonctionnement concret de ces organisations. Dans leur modèle, Allain et al. (2011), retiennent une punition égale au profit de concurrence (profit avant le cartel ou but‑for price) et un profit de déviation supérieur au profit de cartel, ce qui correspond à une analyse standard en termes de collusion tacite. Or, dans la réalité, les cartels se coordonnent explicitement, ce qui permet de mettre en place des stratégies visant à ramener les profits de tricherie au niveau du profit de cartel, voire en dessous (rachat des quotas d’invendus), et de fixer des punitions qui excèdent le simple retour au profit de concurrence (paiements latéraux). Ainsi, une règle simple consiste à obliger l’entreprise qui a vendu davantage que son quota à acheter une partie de la production des autres participants au cartel qui auraient moins vendu que leur quota : règle de compensation appliquée par exemple dans les cas du cartel des vitamines et de l’acide citrique (voir Combe et Monnier [2012]) et dans le cas du cartel des électrodes en graphites (voir Levenstein et Suslow [2006]), etc. Les guerres de prix (temporaires) sont aussi une punition efficace que l’on retrouve dans le cas du cartel de la lysine (Combe et Monnier [2012]) ainsi que l’extension du champ d’application des sanctions (cartel du sucre analysé par Genesove et Mullin [2001]). Enfin, les transferts latéraux alourdissent directement la punition (voir les analyses de Levenstein et Suslow [2006] relatives au cartel de l’équipement électrique et de Mc Millan [1991] sur l’industrie de la construction au Japon). 18 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. II. La détermination de la sanction optimale doit se fonder sur une approche empirique des cartels et non sur une analyse en termes de collusion tacite adhèrent à un sentiment d’appartenance au groupe tendent à se maintenir dans le cartel (Leslie [2004]). Une fois que l’identité de groupe prévaut, ses membres vont se reconnaître comme dignes de confiance, ce qui rendra toute tricherie coûteuse psychologiquement. Certaines associations professionnelles contribuent à faire émerger ces valeurs communes. Ainsi, certains dirigeants de ces associations, à qui l’on doit la maxime “la concurrence c’est la guerre, et la guerre c’est l’enfer” ont créé des normes contraires à la concurrence. Les organisateurs des cartels ont pour objectif d’encourager la loyauté et l’“esprit de corps” entre participants (Armstrong et Huck [2010]). Ces mécanismes peuvent être illustrés par l’exemple du cartel de l’acier aux États‑Unis, au début du siècle dernier. La coopération a été encouragée par une série de rencontres décrites sous le nom de “Gary’s Dinners” (du nom de l’organisateur du cartel, Elbert Gary). Gary avait pour objectif d’instiller de la confiance entre les partenaires du cartel. Dans ses discours, il faisait allusion à la confiance dans la parole donnée : “(…) nous avons mieux qu’un contrat pour nous guider et nous contrôler, nous, en tant qu’hommes, en tant que ‘gentlemen’, en tant qu’amis, avons atteint un degré d’affinité qui fait que nous entretenons respect et affection les uns pour les autres (…). Nous sommes engagés à nous protéger les uns les autres, et nous ne pouvons agir ou omettre d’agir dans le sens aigu et clair que notre honneur est en jeu”. Nous pouvons aussi prendre l’exemple du cartel de la lysine et du fameux slogan d’un dirigeant d’ADM : “(…) nos concurrents sont nos amis et les consommateurs nos ennemis.” À long terme, les liens d’affaires peuvent s’apparenter à des liens familiers dans lesquels la confiance est intrinsèque. Ce qui commence en confiance “calculée” évolue en confiance “pure” (Podolny et Scott Morton [1999]). 18. Les études en économie comportementale montrent de surcroît que les individus qui participent aux cartels ne se comportent pas selon des modèles théoriques prédéfinis de manière restrictive (jeux non coopératifs répétés sur horizon infini). Les facteurs humains, culturels et sociaux favorisent la stabilité de ces organisations, qui ne peut se résumer à un simple risque de tricherie constant par période. 3. Les facteurs humains, culturels et sociaux inhérents aux cartels 19. Les analyses théoriques relatives à la stabilité interne des cartels excluent les notions de confiance et de réputation. Herold (2010) affirme que l’incomplétude d’un contrat – comme celui qui lie les membres d’un cartel, puisque, étant illicite, il ne peut être complet – apparaît comme un signal de confiance. Or, les individus qui ont perçu de la confiance chez les autres joueurs tendent à coopérer davantage (Huber [1984]). Ainsi, lorsqu’existe un risque d’opportunisme dans un cartel, ces études montrent que les joueurs se font confiance. Connor (2007) souligne ainsi que les relations de confiance au sein des grands cartels internationaux leur permettent de fonctionner de manière efficiente, même en cas d’incitation à tricher. De fait, un certain degré de tricherie peut‑être “tolérable”. Par exemple, dans le cas du cartel de la vitamine B2, l’entreprise Takeda a triché sans que cela remette en cause le cartel. De même, le cartel de l’acide citrique, condamné en 2001, et celui de la lysine ont connu des phases de tricheries qui ont pu être surmontées2. 21. Enfin, le statut social et l’environnement culturel des membres du cartel favorisent la stabilité de ces organisations. À partir d’études expérimentales, Glaeser et al. (2000) mettent en évidence que les individus de même statut social sont plus enclins à coopérer. Dans le cadre du cartel de la construction navale au Royaume‑Uni, Podolny et Scott Morton (1999) montrent que le boycott collectif était plus probable si le nouvel entrant était d’un statut social inférieur aux membres du cartel ou s’il était étranger. 22. Dans ces conditions, l’analyse de la stabilité interne des cartels ne peut se faire dans un cadre non coopératif (au sens de la théorie des jeux), dans lequel l’entreprise effectue à chaque période un arbitrage entre coopérer et tricher. Bien au contraire, le fonctionnement concret de ces organisations relève d’une logique coopérative et complexe, faisant intervenir des facteurs tant culturels que psychologiques. En effet, le participant potentiel au cartel se demande au préalable s’il est bien profitable pour lui de s’engager dans cette activité illicite, compte tenu de l’amende espérée et du surprofit (“le jeu en vaut‑il la chandelle ?”). Mais une fois impliqué, de multiples facteurs viendront consolider son engagement (effet d’habitude, sentiment d’appartenance à un groupe, effet d’engrenage, peur des conséquences résultant d’une sortie de la pratique, etc.), au point de reléguer au second rang les conditions initiales de son choix. 20. De surcroît, les expériences en laboratoire3 mettent en évidence que la collusion est renforcée lorsque surviennent des interactions sociales entre les participants (Armstrong et Huck [2010]). En particulier, le développement d’une identité de groupe et de normes communes permet de cimenter la confiance entre les membres de ces organisations. Les expérimentations montrent ainsi que les joueurs qui 2 Voir Lafay et Monnier (2011) pour une analyse détaillée. 3 L’expérimentation en laboratoire consiste en la reconstitution d’une situation économique simplifiée. Le principe est d’inviter des joueurs à agir dans le cadre d’un jeu prédéfini. Les règles de ce jeu reprennent la structure de la situation économique. Les joueurs ont un rôle d’agent, dont les caractéristiques sont définies par des préférences et des dotations (monétaires et informationnelles). Chaque décision lui procure un gain (ou perte). Le laboratoire permet de définir la sensibilité des stratégies aux variations de l’information ou des conditions de jeux. Il établit comment une modification de l’environnement influence l’issue du jeu. La théorie peut alors être validée, invalidée et/ou modifiée. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 19 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 17. Dans notre étude (2011), nous analysons des cartels qui se sont formés (nous les étudions ex post et après leur condamnation), ont ensuite été détectés, et qui, la plupart du temps, ont eu une durée de vie assez longue (en moyenne supérieure à 7 ans). Il s’agit donc de fixer des amendes qui permettent de dissuader des cartels ayant justement résolu le problème d’instabilité interne. On peut d’ailleurs observer que, de manière quasi systématique, c’est l’intervention de l’antitrust qui permet de mettre fin à ces pratiques ; en effet, sur notre échantillon de 111 cartels détectés, rares sont ceux qui ont pris fin de manière “naturelle”, c’est‑à‑dire à la suite d’une instabilité interne : ces derniers représentent moins de 10 % des cas (Combe et Monnier [2012]). (syndrome du “cygne noir”). Chacun des dirigeants est alors persuadé que lui‑même ne se fera pas attraper. La mise en œuvre des programmes de clémence, qui permet dans une certaine mesure aux cartels de mieux “maîtriser” le risque de détection, ne ferait paradoxalement que renforcer cette sous‑ estimation. 4.1. Quel est le risque pour le manager ? 26. Pour ce qui est de l’aversion au risque en tant que telle, une étude récente menée par Damgaard, Duke, Huck, et Wallace(2012) pour l’Office of Fair Trading montre que le choix de participer ou non à un cartel ne dépend pas seulement des incitations financières, mais aussi du goût pour le risque et des préférences sociales des participants (quant à la minimisation du coût pour les autres acteurs). 23. Les modèles de sanction optimale considèrent l’entreprise comme un tout, sans jamais opérer de distinction entre actionnaires et dirigeants, ce qui suppose que le problème d’agence soit résolu et qu’il soit toujours possible d’aligner les intérêts des dirigeants sur ceux des actionnaires4. Or, ce ne sont pas les managers qui s’acquittent des sanctions administratives, mais les actionnaires. Les managers peuvent être ainsi incités à prendre des risques excessifs afin de surperformer leurs pairs en vue de “monter” dans la carrière. En Europe continentale, contrairement aux États‑Unis et au Royaume‑Uni, ces dirigeants risquent rarement des sanctions pénales. Compte tenu de la durée des enquêtes, le temps que le cartel soit détecté et condamné, les managers qui y ont pris part peuvent avoir quitté l’entreprise. Ces dirigeants seraient donc à l’abri de toute sanction économique (licenciements, etc.). Et même pour ceux qui demeurent dans l’entreprise, si les amendes restent insuffisantes, les actionnaires pourraient même récompenser les managers plutôt que de les punir. Ainsi, Stephan (2011) souligne que l’un des hauts responsables de British Airways a été promu après la condamnation de son entreprise pour cartel alors même qu’il était poursuivi pénalement. Il met aussi en évidence que de nombreux managers impliqués précédemment dans des cas de cartels ont eu des profils de carrière avantageux. La prise en compte de cette problématique devrait alors conduire à l’imposition d’amendes suffisamment dissuasives pour inciter les actionnaires à mettre en œuvre des dispositifs de monitoring et de sanctions internes permettant d’éradiquer ces pratiques (voir Garoupa [2000]). 27. Cette étude expérimentale a fait participer 93 actionnaires, hauts dirigeants ou responsables de la régulation et de la conformité à la concurrence. Chaque participant “actif ” a dû effectuer trois choix en quelques minutes. L’expérimentation a en outre fait intervenir un joueur dit “inactif ” permettant de simuler l’effet négatif du cartel sur les consommateurs (les participants actifs étant prévenus que leurs choix auraient un impact sur les revenus du joueur inactif). L’objectif du jeu consiste à étudier le comportement des participants face à différents niveaux d’amende, de surprofit, de détection, et d’impact sur les consommateurs. 28. Les participants font face à deux options : la première est associée à un gain certain pour le décideur (120 livres sterling) et pour le joueur inactif (160 livres sterling). L’autre option correspond au cartel, dont le risque de détection est estimé à p. Si l’individu (le décideur) choisit cette seconde option, il recevra donc, avec une probabilité 1‑p (quand le cartel n’est pas détecté), un gain supérieur à 120 livres, soit 120 plus un bonus, correspond au surprofit illicite, et l’autre joueur inactif n’obtiendra plus que 160 moins une perte. Avec une probabilité p, le cartel sera détecté et l’individu recevra 120 livres moins l’amende, et l’autre joueur inactif 160. 4.2. Les managers présentent‑ils un goût pour le risque ? 29. Neuf expériences (tasks) sont menées en fonction de la valeur des paramètres : p varie entre un tiers et deux tiers, l’amende entre 30 et 120 livres, la perte est fixée entre 40 et 80 livres et le bonus est toujours égal à 60 livres. Pour ce qui est de l’option 2, soit le bonus soit l’amende ne sont pas spécifiés aux participants alors que la perte pour les consommateurs est toujours connue. Les participants prennent l’une des trois décisions suivantes : 24. Par ailleurs, nous supposons dans nos travaux que les agents sont neutres au risque. Toutefois, plusieurs études concluent que les managers qui forment des cartels peuvent présenter un goût prononcé pour le risque, ce qui devrait conduire à des amendes optimales encore plus élevées. 25. Korobkin et Ulen (2000) montrent ainsi que certains individus tendent à surestimer la probabilité qu’un événement positif survienne, particulièrement lorsque ce risque est perçu comme contrôlable5. Certains managers surestimeraient alors les surprofits potentiels liés à la collusion et sous‑ estimeraient la probabilité de détection, ce qui correspond au réflexe consistant à supposer que les événements négatifs et rares n’arrivent qu’aux autres ou n’arrivent pas 4 Fleckinger, Lafay et Monnier (2013) déterminent le schéma optimal de rémunération permettant de dissuader la fraude d’entreprise et montrent que plus la probabilité de détection est faible, plus les managers sont en mesure d’extraire une rente. 5 Wils (2008) p. 60, § 198, cite un membre de l’Association du barreau américain qui indique que “la plupart des participants au cartel pensent qu’ils ne seront pas attrapés”. Concurrences N° 1-2013 I Tendances g choisir toujours l’option 1 (ne jamais participer au cartel) ; g choisir toujours l’option 2 (toujours participer au cartel) ; g choisir l’option 2 plutôt que l’option 1 si le bonus est supérieur (ou l’amende inférieure) à un certain niveau spécifié par le répondant. 30. Le fait de toujours choisir l’option 1 correspond à un cas de très forte aversion au risque ou à une préférence en faveur des consommateurs (il coûte à l’individu d’infliger des pertes à l’autre participant). Le choix consistant à choisir systématiquement l’option 2 est compatible avec un goût pour le risque élevé. 20 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 4. La formalisation de l’arbitrage coût-bénéfice conduit à sous-estimer l’amende 35. Ainsi, notre étude montre qu’un cartel en Europe dure en moyenne 7 ans, ce qui revient à considérer que la hausse annuelle du prix pratiqué par le cartel aurait été de : Source : OFT + 2,6 % par an pour un cartel ayant augmenté les prix de 20 % (national) ; 31. Comme le montre le graphique 3, 24 % à 35 % des participants effectuent leur choix selon un arbitrage coût‑ bénéfice (bonus/amende). Mais dans un nombre de cas significatifs – presque toujours supérieur à 10 % et qui peut aller jusqu’à plus d’un quart des participants –, les décideurs présentent un fort goût pour le risque. Par ailleurs, les auteurs mettent en évidence que le montant absolu de l’amende (quelle que soit la probabilité de détection) joue un rôle plus important dans la dissuasion que l’amende espérée (qui tient compte de la probabilité de détection). Cela montre qu’il existe, un effet forfaitaire de l’amende : un niveau élevé d’amende marque les esprits. + 3,8 % par an pour un cartel ayant augmenté les prix de 30 % (international). 36. Si l’on compare ces hausses à celles observées sur 11 cas de notre échantillon de cartels, il apparaît que les hausses constatées sont en réalité supérieures à ces 2 ou 3 % par an de hausse retenue dans nos estimations (tableau 1). Tableau 1 : Hausse de prix annualisée pratiquée par 11 cartels européens 32. Enfin, la connaissance du droit de la concurrence ne semble pas associée à une meilleure conformité, mais pourrait même paradoxalement susciter des comportements de non‑ conformité. En effet, les résultats de cette étude montrent que les participants ayant une meilleure connaissance de la législation antitrust sont plus enclins à participer au cartel que ceux qui ne connaissent pas cette législation (47,5 % des participants qui connaissent la législation antitrust choisissent le cartel contre 17,9 % qui n’ont pas ce savoir). Cela pourrait s’expliquer par un sentiment de plus grande maîtrise des risques. III. Les estimations empiriques des paramètres 1. Les limites de l’étude de Boyer et Kotchoni (2011) Note : Nos estimations de hausse de prix se situent en deçà des moyennes retenues par Connor et Lande (2006) et sont très raisonnables au regard de la durée des cartels européens. 33. Boyer et Kotchoni (2011) critiquent les estimations de surprix présentées dans plusieurs études empiriques de référence (voir notamment Connor et Lande [2006], Connor et Bolotova [2009]), qui concluent à une hausse moyenne de 30 à 47 %. Boyer et Kotchoni (2011) révisent à la baisse ces estimations, en repartant de la base de données développée par Connor. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 21 Cartel Durée Hausse de prix constatée apar la Commission Annualisation de la hausse du prix Dyestuff (1969) 3 ans + 15 % + 4,8 % Vegetable parchment (1978) 1 an et 10 mois (arrondi à 2 ans) Entre 5 % et 15 % Entre 2,5 % et 7,2 % Zinc (1984) 13 ans + 15 % par an + 15 % French‑West African shipowners (1992) 5 ans + 34 % + 6 % Containers by railways (1994) 6 ans Entre 20 % et 77 % Entre + 3,1 % et 10 % Cartonboard (1994) 5 ans 8 à 15 % par an Entre 8 % et 15 % PVC II (1994) 4 ans 25 % 5,7 % Fenex (1996) 4 ans 5 à 10 % par an Entre 5 % et 10 % Électrode au graphite (2002) 6 ans 50 % 7,1 % Gaz industriel (2003) 4 ans 5 à 7 % par an Entre 5 % et 7 % Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 34. Précisons d’emblée que par prudence et dans une optique favorable aux entreprises, nous avons systématiquement retenu dans nos travaux sur l’amende optimale des surprix plus modestes que ceux dénoncés par Boyer et Kotchoni (2011). En effet, nous utilisons des hausses de prix de 20 % pour des cartels nationaux, 30 % pour les cartels internationaux, et des hausses inférieures à ces seuils dans les cas où nous avons pu estimer précisément un surprix infligé par le cartel (11 cas) plus modéré que ces deux moyennes. Ainsi, les valeurs que nous utilisons correspondent aux médianes obtenues par Connor. Graphique 3 : Résultats de l’expérience de Damgaard et al. (2012) 40. C’est oublier toutefois que la question de l’asymétrie dans la distribution peut se traiter en utilisant la médiane plutôt que la moyenne. Les médianes obtenues par Connor se situent entre 20 et 30 %, ce qui correspond justement aux valeurs que nous avons retenues pour estimer nos amendes. Plus encore, le choix des valeurs seuils (50 % et 0 %) n’est pas justifié : pourquoi éliminer a priori tous les cartels dont les prix ont augmenté de plus de 50 % ? Les auteurs écartent ainsi près du quart de l’échantillon, alors même que certains cartels sont en mesure d’imposer des hausses de prix supérieures à 50 % (voir par exemple le cas du cartel des électrodes de graphite). Exclure ces cas de hausse significative conduit à ne pas prendre en compte dans l’objectif de dissuasion les cartels qui sont les plus dommageables pour l’économie. Parallèlement, pour les valeurs basses (à gauche de l’échantillon), pourquoi exclure uniquement les cartels qui n’ont pas réussi à accroître le prix (c’est‑à‑dire ceux qui n’ont pas fonctionné) ? Pourquoi ne pas exclure aussi les cartels dont la hausse de prix totale a été de 2 % ou 3 % seulement sur la durée du cartel ? La règle la plus objective, s’il eût fallu réellement exclure les cas extrêmes, eût été de mener une exclusion symétrique en éliminant par exemple les 10 % des hausses les plus élevées et les 10 % des hausses les plus basses. En supprimant près du quart des valeurs hautes et seulement 7 % des valeurs basses, il n’est pas étonnant que la moyenne chute. Tableau 2 : Hausse de prix pratiquée par 11 cartels européens (pour une durée de 7 ans) Cartel Durée Hausse de prix constatée par la Commission Hausse si le cartel avait duré 7 ans Dyestuff (1969) 3 ans + 15 % + 39 % Vegetable parchment (1978) 1 an et 10 mois (arrondi à 2 ans) Entre 5 % et 15 % Entre 19 % et 62 % Zinc (1984) 13 ans + 15 % par an + 166 % 5 ans + 34 % + 50 % 6 ans Entre 20 % et 77 % Entre + 24 % et + 94 % Cartonboard (1994) 5 ans 8 à 15 % par an Entre + 71 % et + 166 % PVC II (1994) 4 ans 25 % + 32 % Fenex (1996) 4 ans 5 à 10 % par an Entre + 41 % et + 95 % Électrode au graphite (2002) 6 ans 50 % + 61 % Gaz industriel (2003) 4 ans 5 à 7 % par an Entre + 41 % et 75 % French‑West African shipowners (1992) Containers by railways (1994) 41. Les auteurs soulignent également l’hétérogénéité des cartels recensés dans la base de données de Connor. Mais cette hétérogénéité est prise en compte par Connor, dans la mesure où il opère ensuite des regroupements (cartels européens par exemple) et qu’il calcule des moyennes sur des sous‑échantillons. C’est précisément cette hétérogénéité et cette exhaustivité qui fait la richesse des études de Connor. Les cartels sont des organisations sophistiquées et diverses, et il n’est donc pas anormal que ces organisations connaissent des différences dans leurs capacités à accroître le prix. Boyer et Kotchoni (2011) postulent sans aucune justification que la forte variance (l’écart type élevé) dans les surprix s’explique nécessairement par des erreurs ou des biais qui seraient liés à des surestimations. D’une part, la variance peut aussi refléter la diversité des cartels étudiés. D’autre part, s’il existe des erreurs ou des biais, il n’y a aucune raison de penser qu’ils conduisent systématiquement à des moyennes trop élevées. 1.1. Le traitement statistique contestable réalisé par Boyer et Kotchoni (2011) 38. Même si nous ne retenons pas des hausses de prix de 40 %, les critiques énoncées par Boyer et Kotchoni (2011) à l’encontre des travaux de Connor et Lande (2006) et Connor (2010a) nous paraissent contestables. 39. La première critique porte sur le problème de l’asymétrie dans la distribution des hausses de prix, qui varient de 0 % à 1 800 %. Boyer et Kotchoni (2011) précisent que, dans 22,6 % des cas, la hausse excède 50 % (avec une moyenne de 137 % de surprix sur ce sous‑échantillon), tandis que dans 7,23 % les hausses de prix sont nulles. Cela conduit les auteurs, dans leurs estimations, à éliminer ces valeurs hautes (les cartels pour lesquels les hausses de prix ont été supérieures à 50 %) et à éliminer certaines valeurs basses (les cartels pour lesquels les hausses de prix sont nulles) : la hausse de prix estimée tombe alors à 17,5 % pour les cartels européens et un peu en dessous de 20 % pour les cartels internationaux6. 6 42. En dernier lieu, Boyer et Kotchoni (2011), reprenant l’argument d’Ehmer et Rosati (2009), estiment qu’il existerait un biais de sélection résultant lui‑même d’un biais de publication : les éditeurs de revues scientifiques seraient plus enclins à retenir des études qui ont un résultat statistiquement significatif et qui concluent donc à une hausse de prix. Cet argument, assez étrange, n’est guère convaincant. Tout d’abord, la mise en évidence d’une absence de hausse de prix constitue en elle‑même un résultat significatif. Par ailleurs, il existe une littérature abondante et variée (dérivée de Stigler [1964]), notamment aux États‑Unis, qui démontre l’absence d’effets des cartels ou leur instabilité intrinsèque. Ce mouvement trouve écho dans de nombreuses revues académiques prestigieuses (plus particulièrement Précisons que les auteurs réintroduisent ensuite ces valeurs extrêmes afin d’estimer ce qu’ils considèrent être un biais. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 22 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 37. Inversement, si l’on estime la hausse de prix totale que ces 11 cartels auraient infligée s’ils avaient duré 7 ans, le résultat apparaît systématiquement supérieur à 20 ou 30 % (voir le tableau 2). 2. De nouvelles estimations qui ne modifient pas le constat global Graphique 5 : Amendes effectives/Borne supérieure d’amende restitutive (e = 0) 43. Bien que nous ne considérions pas que les estimations de Connor soient surestimées, nous avons recalculé nos amendes optimales en utilisant la hausse moyenne retenue par Boyer et Kotchoni (2011) pour les cartels en Europe, soit 17,5 %. Il s’avère que ces nouvelles hausses de prix plus modérées (et peu convaincantes au regard des arguments exposés précédemment) ne modifient pas le sens de nos résultats : la sous‑dissuasion demeure manifeste. 44. Commençons par les amendes restitutives. Un premier cas de figure – le plus favorable aux firmes – correspond à une élasticité prix de la demande très forte (égale à – 2). Il s’agit de la borne inférieure de notre fourchette d’amende. Le graphique 4 représente, pour chaque cartel (classé par ordre chronologique), le rapport entre l’amende infligée par la Commission et le gain illicite. Si ce rapport est inférieur à l’unité, cela signifie que l’amende de la Commission reste inférieure au gain minimal réalisé par le cartel. Symétriquement, lorsque le ratio est supérieur à l’unité, l’amende de la Commission permet de confisquer le gain. 47. Désormais, si l’on tient compte du fait que la Commission est guidée dans sa politique de sanctions par la volonté de dissuader la formation des cartels, l’amende intègre un coefficient multiplicateur, qui vise à reprendre plus que le gain illicite. Ce coefficient multiplicateur dépend de la probabilité de détection : plus la probabilité de détection est faible, plus l’amende dissuasive doit être forte. Nous retiendrons une probabilité de 15 %. 45. Nous constatons que, dans 30 cas seulement sur 64 (contre 33 cas sur 64 en utilisant nos estimations de hausse de prix), ce ratio excède l’unité : au mieux, la moitié des amendes atteint ou excède le montant minimum du gain illicite du cartel. A contrario, on peut considérer qu’un peu moins de la moitié des cartels retirent un bénéfice net de leur pratique, même après s’être acquittés de l’amende. 48. Le graphique 6 représente le rapport entre l’amende infligée par la Commission et l’amende qu’il faudrait imposer pour dissuader la formation de cartels, dans le cas le moins défavorable pour les entreprises : une élasticité de la demande égale à – 2. Si ce rapport est supérieur à l’unité, cela signifie que les amendes acquittées par les entreprises excèdent l’amende dissuasive minimale. Graphique 4 : Amende effective/borne inférieure d’amende restitutive (ε = – 2) 49. Sur l’ensemble de la période, une seule amende se situe au‑dessus de la borne inférieure : il s’agit de l’amende infligée au cartel du bitume aux Pays‑Bas en 2006. L’amende reste toutefois inférieure à la borne maximale de la fourchette (élasticité nulle) : on ne peut donc parler de “surdissuasion” de la part de la Commission, même dans ce cas particulier. 7 50. Pour les 63 autres cas, les amendes se situent toujours sous la borne inférieure, et la plupart d’entre elles demeurent éloignées du bas de la fourchette, à l’exception des amendes infligées à l’encontre des cartels des vitamines (condamnées en 2001). Cela signifie que, même lorsque la Commission manifeste une volonté de dissuasion, elle reste bien en deçà du montant minimal d’amende dissuasive. Voir par exemple, Kobayashi (2002), Armentano (1999) Cohen et Scheffman (1989), Adler et Laing (1997), Denger (2003) et Crandall et Winston (2003). Concurrences N° 1-2013 I Tendances 23 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 46. Considérons à présent le second cas de figure, moins favorable aux entreprises : l’élasticité de la demande est nulle. Ce cas correspond au gain maximal que les entreprises ont pu réaliser grâce au cartel. Le graphique 5 représente le rapport entre l’amende infligée par la Commission et le gain illicite maximal du cartel. Ce rapport nous fournit une première indication sur une éventuelle volonté de dissuasion de la Commission. En effet, si le rapport est supérieur à l’unité, cela signifie que les amendes acquittées par les entreprises excèdent le gain illicite maximal. Cette situation ne se produit que dans 25 cas sur 64 (graphique 5). Dans les autres cas, les amendes de la Commission se situent en dessous du gain illicite maximum. rattachées à l’école de Chicago)7 et professionnelles. Il bénéfice en outre de l’appui et de la participation de think tank, fondations, chaires, ainsi que du financement de grandes entreprises qui subissent la législation antitrust et ont tout intérêt à voir publier des études concluant à l’innocuité des cartels. En réalité, l’argument invoqué par Boyer et Kotchoni (2011) est réversible : les travaux qui mettent en avant des surprix élevés sont au moins tout aussi difficiles à mener et à publier (notamment en raison d’un manque de moyens). 51. Le graphique 7 représente le rapport entre l’amende infligée et la borne supérieure de la fourchette (élasticité prix de la demande nulle), cas le moins favorable pour les entreprises. Si le rapport est supérieur à l’unité, cela signifie que les amendes acquittées par les entreprises excèdent l’amende maximale dissuasive. Aucune amende ne se situe au‑dessus de cette borne, l’idée de “surdissuasion” n’est donc pas vérifiée empiriquement. 54. L’opinion générale s’accorde sur un niveau absolu de probabilité de détection. Or, ce n’est pas le niveau absolu de la probabilité de détection qui importe, mais le niveau perçu par les agents qui envisagent de s’entendre illégalement (Wils [2008]). En l’absence de connaissance de la probabilité absolue de détection, ce taux de 15 % constitue une “valeur commune” qui peut servir de référence aux dirigeants qui seraient susceptibles de former un cartel sur la base d’une analyse rationnelle coûts‑bénéfices. De plus, si les managers ont un horizon temporel limité, ils peuvent accorder davantage d’importance à la probabilité instantanée de détection qu’à la probabilité absolue. Graphique 7 : Amende effective/borne supérieure de l’amende dissuasive (e = 0) IV. Conclusion 55. La prise en compte des critiques formulées par Allain, Boyer et Ponssard (2011) et Boyer et Kotchoni (2011) ne modifie en rien les conclusions de nos études : si la Commission européenne est devenue plus “sévère” au fil du temps, le renforcement des sanctions à l’encontre des cartels n’a pas conduit pour autant à l’imposition de sanctions excessives, compte tenu du profit illicite réalisé par les cartels et de la probabilité de détection. Il nous semble donc peu fondé de considérer que la Commission pratique aujourd’hui la “surdissuasion”. Plus encore, la prise en compte d’éléments comportementaux, tels que le goût pour le risque de certains participants au cartel, la sous‑estimation du risque détection ou l’incitation des actionnaires à contrôler les managers, laisse à penser que nos estimations d’amende optimale sont plutôt conservatrices. 3. La question de la probabilité de détection 52. La probabilité de détection des cartels constitue un paramètre délicat à estimer. Malheureusement, très peu d’études sont disponibles sur ce sujet. L’OCDE (2003) indique qu’un cartel sur trois serait détecté et qu’un sur six serait poursuivi et condamné. Une enquête sur la base d’un questionnaire mené par Beckstein et Gabel (1982) chez des avocats américains spécialisés dans l’antitrust conclut à une probabilité inférieure à 50 %, ce qui demeure pour le moins relativement vague. De nombreux auteurs de renom retiennent des fourchettes de probabilité qui se situent entre 10 et 30 % : g Landes (1983) et Veljanovski (2007) retiennent une probabilité de détection de l’ordre de 20 à 30 % ; 56. Au demeurant, nos résultats entrent en résonance avec une récente étude de Connor et Lande (2012) sur le cas américain, cas pourtant très différent de l’Europe, compte tenu de l’existence de sanctions pénales, de la fréquence et du montant des actions en réparation. Les auteurs tentent précisément d’agréger les différentes formes de “sanctions”, en les monétisant le cas échéant (cas de la prison), pour les comparer ensuite à un montant théorique de sanction, g Werden et Simon (1987) considèrent que cette probabilité s’élève à plus de 10 %. 8 g Connor (2006) estime ainsi que la probabilité d’être découvert pour un cartel se situe entre 10 et 20 % et que la probabilité de condamnation, une fois l’enquête ouverte, est comprise entre 50 et 75 % ; Concurrences N° 1-2013 I Tendances 24 Il faut noter que cette probabilité est très proche de celle obtenue dans des études empiriques sur la détection des vols et qui se situe, selon Polinsky et Shavell (2000), entre 13,8 % et 16,5 %. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 53. Seules deux études ont à ce jour estimé de manière rigoureuse la probabilité de détection : il s’agit des travaux de Bryant et Eckard (1991)8 sur un échantillon de cartels investigués par le Department of Justice américain entre 1961 et 1988, et de Combe et Monnier (2008) sur la base d’un échantillon de tous les cartels condamnés par la Commission européenne depuis 1969 et jusqu’à 2008. Bryant et Eckard (1991) ont introduit un processus statistique de vie et de mort pour caractériser la dynamique qui gouverne le nombre de cartels en vie à un instant donné. Combe et Monnier (2009) introduisent, quant à eux, trois processus : l’un régit la naissance des cartels, l’autre gouverne leur mort naturelle, le dernier s’apparente au processus de détection. Ils montrent que la probabilité de détection d’un cartel une année donnée, sachant que le cartel sera détecté in fine, se situe en Europe entre 12,9 % et 13,5 %, ce qui constitue une borne supérieure de la probabilité absolue de détection. Graphique 6 : Amende effective/borne inférieure de l’amende dissuasive (e = – 2) Connor J., Lande R. (2012), Cartels As Rational Business Strategy: Crime Pays, Cardozo Law Review, Vol. 34 Issue 2, pp. 428‑491. V. Bibliographie Combe E., Monnier C., Legal R. (2008), The probability of getting caught in the European Union, Working Paper College of Europe BEER, no 12‑2008. Combe E., Monnier C. (2007), Le calcul de l’amende en matière de cartels : Une approche économique , Concurrences no 3‑2007, pp. 39‑45. Combe E., Monnier C. (2011), Fines against hard core cartels in Europe : The myth of over enforcement, Antitrust Bulletin, 56, pp. 235‑275. Combe E., Monnier C. (2012), Les cartels en Europe : une analyse empirique, Revue Française d’Économie, volume XXVII, octobre 2012. Adler H., Laing D. (1997), Explosion of International Criminal Antitrust Enforcement, The Corporate Counselor, 11, pp. 1‑24. Crandall R., Winston C. (2003), Does Antitrust Policy Improve Consumer Welfare? 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Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. tel qu’il est appréhendé par la littérature sur les “sanctions optimales”. Sur la base d’un échantillon de 75 cartels, Connor et Lande estiment que le montant effectif des sanctions infligées à un cartel, montant pourtant appréhendé sur une base élargie, ne représenterait en moyenne que 15 à 20 % du montant optimal ; si l’on raisonne en termes de médiane, le niveau des sanctions serait compris entre 9 et 12 % des sanctions optimales. Les auteurs en concluent : “(…) we believe that many or most prospective cartelists share the intuition behind the opinion voiced by Judge Easterbrook (…) that crime pays” (p. 479). Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Lafay T., Monnier C. 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For these cartel cases, decisions often relied on a judgment by the General court which stated that “the Commission was not required precisely to demonstrate the actual impact of the cartel on the market and to quantify it, but may confine itself to estimates of such an effect”.110 1. Anti‑cartel enforcement has been propelled as9 a top priority by antitrust enforcement authorities in the EU and as such several developments have led to a more proactive and aggressive approach to prosecuting cartel behavior. Over the current decade, the Commission has prosecuted several high‑profile cartel cases and imposed some of the largest fines in history on infringing firms. 5. Deterrence uplift was applied in all 13 cartel decisions. This increase varied between 15% and 100% or in the case of multipliers between 1.25 and 3. In some cases, the uplift or multiplier differed for each infringing firm. For instance, in the Hydrogen Peroxide and Perborate case the Commission applied a multiplying factor of 3 to Total and Elf Aquitaine, 1.75 to Akzo and Degussa, 1.5 to Solvay, and 1.25 to Edison based on their worldwide sales turnover in 2005. 2. The European Commission has intensified its prosecutions of cartels as seen in the recent record level of fines and the number of convictions. Recent cartel cases in the EU have involved several European and non‑European firms active across different industries. In 2009, the European Commission imposed its highest fines in history, nearly €1.4 billion, on four glass producers for price fixing and illegal supply strategies aimed at market sharing. In this particular case, a record fine of €896 million was imposed on a single company, Saint‑Gobain of France. 6. Cartel duration was identified in all cases and the basic amount of fines adjusted by a given uplift factor. The basic amount given by the proportion of relevant sales was increased by the number of years of infringement for cartel cases dismantled after 2006. In remaining cases, the basic amount was increased by 10% for each year of infringement and by 5% for periods lasting between six months and one year. 3. An analysis of the Commission’s Decisions on the 13 largest cartel cases reveals the following. Those cartels had an average of 7.7 infringing firms allegedly operating illegal agreements and commercial practices. There were seven cartels cases prosecuted under the 2006 Penalty Guidelines and six pursuant to the 1998 Penalty Guidelines. In five cartel cases where the information was available and which were prosecuted according to the 2006 Penalty Guidelines, the proportion of relevant sales considered was at the higher end of the 0‑30% scale. Cartel participants usually held at least 60% of market shares where they were active. The majority of infringements (69%) covered the whole territory of the EEA while the remaining cartels’ geographic scope encompassed two or more of the Benelux, French, German, Austrian, Italian, Belgian, Dutch and UK territories. 7. In eight out of the thirteen largest cartel cases, the basic amount of fines for infringing firms was increased for aggravating circumstances related to recidivism. The Commission considers that if an undertaking repeats the same type of infringement after having incurred previous penalties, then such previously imposed sanctions were not sufficiently deterrent. This in turn justifies an increase in the basic amount of fines of up to 100% under the 2006 Guidelines on Fines. For instance, in the car glass cartel the basic amount of fines imposed on Saint‑Gobain was increased by 60% for recidivism. In other cases, recidivism under the 1998 Penalty Guidelines was routinely punished with an increase of 50% of the basic amount of fines. 4. However, in assessing the gravity of the offence under the 1998 Penalty Guidelines, the Commission simply stated that such cartel arrangements did have an impact on the market * 8. Leadership or instigator role in cartel activities was considered another aggravating factor in a few (23%) cartel cases. In accordance with the 1998 Penalty Guidelines, the leading role assumed by Hoffman‑La Roche AG and BASF AG justified an increase of their basic amount of fines by 50% and 35% respectively in the Vitamin cartel case. This article was written for this special issue on the Brussels and Paris conferences of October2012onOptimalFinesandSanctionsinCartelCases.Mostof thecontentof this paper comes from my previous works and discussions with Marie-LaureAllain of the École Polytechnique de Paris, Rachidi Kotchoni of Université de Montréal, and Jean-PierrePonssardof ÉcolePolytechniquedeParis,inparticularAllain,Boyerand Ponssard(2011),Allain,Boyer,KotchoniandPonssard(2011),andBoyerandKotchoni (2012).Ifeelindebtedandmostgratefultothem.Moreover,Igreatlybenefitedfromthe assistanceof Anne Concurrences N° 1-2013 I Tendances 10 S eejudgmentsof theGeneralcourtof 18July2005incaseT-24/01SASvCommission, at paragraph 122 and of 25 October 2005 in caseT-38/02 Danone v Commission, at paragraph148. 27 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? II. The Main Issues and Pitfalls in Setting Cartel Fines 9. Mitigating circumstances were found in four cartel cases. The passive and/or minor role of Aventis in the Vitamin cartel and that of Caffaro in the Hydrogen peroxide cartel was considered an attenuating circumstance by the Commission which in return reduced by 50% the basic amount of their fines along the lines of the 1998 Penalty Guidelines. In the Plasterboard cartel, the Commission granted a 25% reduction of the basic amount imposed on Gyproc Benelux NV for its limited role during the infringement. Finally, in the Airfreight cartel, four carriers were granted a 10% reduction for limited participation and all carriers were granted a 15% reduction due to the general regulatory environment that could be seen as encouraging price coordination in this sector. 14. When a group of independent firms collectively agrees to coordinate their marketing policies (prices, supply, markets covered, etc.) in order to raise profits above their respective “natural competitive” levels, it is considered to be a cartel. Depending on the market of interest, the “natural competition” can be pure and perfect, oligopolistic or monopolistic. The “natural competition” price that would prevail absent the cartel conspiracy is called the “but‑for price” and the amount the cartel charges in excess of the but‑ for price is called the “cartel overcharge”. This incremental payoff comes from the pocket of those consumers who are able and willing to pay the higher prices set by cartels. The surplus that accrue to consumers who do not buy at higher prices than the natural competition level is a deadweight loss for society. As the social welfare is generally increased when more competition prevails, one must acknowledge that cartels pursue their goals at the expense of customers’ well‑ being, and as such, are harmful for society. 10. The final amount imposed on an infringing firm should not exceed 10% of its worldwide turnover during the precedent business year. Among the 13 cartel cases reviewed, this legal maximum was attained in four cases and the final amount adjusted in consequence. For instance, in the Hydrogen Peroxide cartel, Solexis had an annual turnover estimated at €256 million in 2005 while its final penalties before leniency adjustments reached €31 million. Therefore, the Commission adjusted the final amounts imposed on Solexis to not exceed 10% of its total turnover, i.e. €25,6 million. 15. The cartel excess profit will depend on the cartel overcharge, the “competitive” mark‑up (hence the but‑for price), and the demand elasticity. The nine main issues in determining optimal fines in cartel cases can be expressed as follows: 11. Infringing firms may benefit from a substantial reduction in fines by cooperating with the Commission under the 2006 Leniency Notice. In fact, investigations on the majority (62%) of cartel cases were initiated following immunity application from infringing firms. Fines were reduced in all but one cartel cases reviewed in accordance with the leniency program. Fines reduction varied across firms in a given cartel. In the majority of cartels (nine out of 13), one or more firms received full immunity against fines. The aggregate amount of fines imposed on the eight cartel cases with available information was €8.1 billion before application of the leniency program. These overall fines were reduced to €5.1 billion after leniency, a 37% reduction. Foregone fines thus totaled €3 billion and were principally granted to whistleblower firms. In one case, the Commission gave full immunity to Aventis a firm involved in the Vitamin cartel although US antitrust authorities had already detected the cartel.� gCharacterizing the “competitive” but‑for price and environment, going beyond the standard static context into the dynamics of cartels and their specific effects on prices, employment, R&D, investments, innovations, etc.; gDetermining the cartel overcharge over and above the dynamic competitive price setting level and conditions; gTaking into account the measure of the likely reaction of customers through the elasticity of demand for the cartel products and services and the potential loss of reputation; gMeasuring the cartel excess profit as the difference between the cartel profit and the cartel but‑for profit; gCharacterizing and measuring the net economic efficiency loss or gain due to the cartel; 12. In five large cartel cases with available information at each stage, we observe that fines are first set based on the gravity of the offence. The basic amount of fines is then significantly increased by the application of uplifts for sufficient deterrence and for duration of the infringement. Fines are further adjusted for aggravating or mitigating circumstances and to meet the 10% limit of the infringing firm’s worldwide turnover in the preceding year. However, the impact of the leniency policy is the most noticeable as fines fall considerably, below the level of fines set for the basic amount. In addition, fines in the case of successful appeals are expected to benefit from a further reduction in fines. Concurrences N° 1-2013 I Tendances gIdentifying the proper (periodic) probability of detection of typical cartels in specific cases; gUnderstanding the determinants of the probability of being found guilty if guilty and innocent if innocent, that is, the efficiency of the court system in avoiding errors of Type I and Type II and its role as incentive to form and maintain cartels; gIdentifying the objective pursued: deterrence and/or compensation and restitution; 28 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. 13. Clearly, the detection and fining of cartels are complex matters that are full of pitfalls. Similarly, Siemens AG, Alstom, and Areva faced an increase of 50% in their basic amount of fines for their leadership role in the Gas Insulated Switchgear cartel. The Commission also applied an increase on the basic amount of fines imposed on Sasol for its leading role in the Candle Waxes cartel in line with the 2006 Guidelines on Fines. gFR defined as the cumulative properly measured illicit gains (the restitution fine), which is typically about 5 to 8 times lower than FS; 16. These are challenging issues and tasks and each could be the subject of a book or a collection of books. My treatment here can only be partial in both coverage and depth. I will not even attempt to cover all of the above. gFD defined as the annual properly measured illicit gains realized by the cartel times the ratio of the annual probability of non‑detection over the annual probability of detection, that is the dynamic deterrence fine level (proposed by Allain, Boyer and Ponssard 2011), which is about the “average duration of the typical cartel” or 6 to 7 times lower than FS; 17. There is disagreement among economists about the optimal level of fines. It primarily reflects the discrepancy between two paradigms. The first one advocated by Cohen and Scheffman (1989) stresses that a good antitrust or more generally anticrime policy (Boyer, Lewis and Liu 2000) should target social welfare maximization by avoiding overdeterrence. This implies that the determination of the optimal fine must incorporate all relevant elements of social benefits and costs. The second more common approach advocated by Connor and Lande (2006) and Combe and Monnier (2009) among others claims that the optimal fine should be set at the minimum amount needed to get back (on average) the total illegal profits of all cartels from only those that have been detected. The latter approach is part of a more general theoretical framework formulated by Becker (1968) to analyze the economic motivation of criminal or illegal activities. In particular, the golden rule of deterrence theory, which asserts that the optimal fine is equal to the harm that a cartel has caused to society divided by the probability of detection, is an implication of the Becker’s model made popular by Landes (1983). In the sequel, we refer to this rule as the Becker‑Landes rule. gFL equal to the total cumulative properly measured illicit gains realized by the cartel divided by the long run probability of detection, which is about 4 to 6 times lower than FS. 21. Hence, the standard most often used fine benchmark FS seriously overstates the optimal deterrence fine level for the typical cartel. 22. Even when correctly specified, the social optimality of the Becker‑Landes rule remains questionable. In the Becker‑ Landes paradigm, a cartel pays not only for his own actions but also for the actions of some other cartels. Furthermore, the optimal rule remains optimal even if it constrains a firm to shut down, thus causing employees who have not participated to the collusion to go unemployed, or to harm its (innocent) shareholders and other stakeholders. 2. The proper characterization of the but-for world 23. There are also problems with the standard use of Becker‑ Landes rules due to improper characterization of the but‑ for world. Indeed, market concentration measures such as Lerner indices and conjectural variations have been widely and improperly converted into cartel overcharges in many empirical studies. Moreover, some methods that have been used to estimate the overcharge appear quite simplistic in regard of the complexity of the factors influencing but‑for worlds. 1. The proper probability of detection 18. However, the Becker‑Landes theory is widely misused in the context of cartel deterrence due to improper definition of the probability of detection. In fact, both the analyses of Becker (1968) and Landes (1983) were developed within static models that do not specify whether the probability of detection is periodic (e.g. yearly or monthly) or aperiodic (over the lifetime of the cartel, that is, in the long run). In Bryant and Eckard (1991) and Combe and Monnier (2011) for example, it is understood that the relevant probability of detection is the annual one. 19. But nearly all cartels will be eventually detected in the long run if the yearly probability of detection is constant, exceptions being cartels dissolved before being caught. This implies that society would be compensated for the harm caused by cartels by forcing each detected cartel to pay its own (cumulative) illicit profit divided by the long run probability of detection. In other words, the probability of detection to use in the Becker‑Landes rule is not the annual probability of detection but rather the long run one. 24. Product differentiation and other industy‑specific factors may generate market power that allows firms to charge significant mark‑ups over marginal or average cost, even in the absence of a cartel. Not accounting for the presence of such non‑cooperative mark‑ups may lead to estimated overcharge estimates that overstate the true cartel overchage by potentially large margins. For instance, wrongly applying Lerner indices may lead to overstating the optimal fines by a factor of up to 10 compared to the level that would prevail with a proper application. These results have important implications because many of the overcharge estimates in the empirical literature are drawn from this methodology. 20. Hence, the deterrent fine level rather than being given by the standard total cumulative illicit gains realized by the cartel divided by the annual probability of detection – let us represent this level as FS – can be more rigourously assessed to correspond to one of the following three levels (Allain, Boyer and Ponssard 2011): 25. Moreover, a fine may be dissuasive even if the cartel has not been detected. Indeed, the fine may induce firms to deviate from the cartel agreement and in so doing may make the cartel internally unsustainable. Let us consider a hypothetical industry where a number of firms set up a cartel. In each period, there is an exogenous annual probability of detection Concurrences N° 1-2013 I Tendances 29 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. gCharacterizing behind all of the above the quality of the data available vis‑à‑vis the significant measurement challenges. 29. In the long run, they compete also by adjusting their respective product offering as well as their respective capacity. Moreover, in dynamic competition contexts, firms naturally take into account the impacts of their decisions on their own and their competitors’ future decisions. This explicit calculus may lead to some form of dynamic seemingly coordinated behavior, which can be either explicit (overt collusion) or implicit (tacit collusion). 26. For convenience, we may regroup and summarize here our main criticisms of the traditional static approach to quantify the restitution fine and the dynamic dissuasive fine using four parameters: k as the relative price increase due to cartelization over the but‑for price; m as the competitive mark up; ε as the price elasticity of the demand; and α as the probability of detection. 30. The coordination is said to be implicit when it arises as the outcome of a natural competition process. In natural competition, firms compete under rules compatible with antitrust regulations. Depending on the market of interest the natural competition may correspond to and result into pure and perfect competition or into oligopolistic or monopolistic or even monopoly pricing (tacit collusion). The expression “tacit collusion” is a misnomer as tacit collusion involves no collusion. More appropriate expressions would be “tacit coordination” or “dynamic competition” as tacit collusion emerges when firms independently design strategies that maximize their respective value over time rather than their short run profits. Tacit collusion refers to the outcome of competition rather than to the process or organization of competition. In any case, “tacit collusion” is an unfortunate expression but since it is the generally accepted one, we can only stick to it. gA first methodological flaw is to forget to take into account the interdependence between those parameters; for instance, if m is high, then basic economics implies that k should be low. gA second methodological flaw is that the traditional static approach cannot be directly used to infer the dissuasive fine in a dynamic situation as the restitution fine will indeed be dissuasive for cartels, except for very short lived ones. gA third methodol gical flaw is to consider that the static competitive equilibrium can be seen as a reasonable approximation of the dynamic competitive equilibrium. 27. In contrast with the Becker‑Landes approach to fining parties guilty of improper behavior, Boyer, Lewis and Liu (2000) showed that increasing fines may be welfare reducing, hence inefficient from a social point of view. They considered the strategic interactions between law enforcers (agency) and potential violators of the law under given legal standards and fine levels as detemined by a benevolent government but suffering from asymmetric information. They found that when enforcers must be induced to monitor compliance, it may be desirable to overdeter or underdeter violations as compared to the surplus maximizing level. The reason for this is that some distortion in deterrence level may be necessary to control the cost of law enforcement. They showed that the Becker‑Landes argument may fail to apply when the enforcer’s effort depends on the probability that the party is in compliance. Their analysis also revealed the importance of setting standards, not only to influence compliance, but also to influence the behavior of enforcers. In circumstances where penalties are fixed, varying standards may be one of the tools policy makers have to monitor compliance and reduce enforcement expenses. In instances where fines can be varied as well, it may be counterproductive to set maximal fines as they may encourage an aggressive, resource‑consuming law enforcement. 2.1. Tacit collusion: Ivaldi, Jullien, Rey, Seabright and Tirole (2003) 31. In the words of Ivaldi et al. (2003): “Tacit collusion need not involve any collusion in the legal sense, and in particular need involve no communication between parties. It is referred to as tacit collusion only because the outcome (in terms of prices set or quantities produced, for example) may well resemble that of explicit collusion or even an official cartel.” This means that during a tacit collusion episode, the natural competitive price can be as high as the monopoly or cartel price. 32. What are the driving factors of tacit collusion? The essential condition for a tacit collusion episode to arise is to have repeated interactions over time. Indeed, it is not rational from each individual firm’s perspective to set the price above the marginal cost in a one shot game. Beside this essential condition, many other economic conditions and industry characteristic that have the potential to hinder or favor tacit collusion have been identified in the literature. 33. It is important that firms put a sufficiently high weight on future profits for tacit collusion to be possible. If the present value of future cash flows is negligible, then firms play each instance of the repeated game independently of the future, as the future has little or no value. By the same token, when 28. When several profit maximizing firms sell the same product on the same market, these firms are natural competitors as each firm seeks to make its profit, value, or Concurrences N° 1-2013 I Tendances 30 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. market share as large as possible. In the short run, firms may compete either by adjusting the quantities that they supply (competition à la Cournot) or by adjusting their prices (competition à la Bertrand), or even by adjusting both their quantity and their price (competition à la Boyer‑Moreaux 1988, 1989). α of the cartel; the firms may either follow the cartel strategy or deviate. If the cartel is detected, each firm will have to pay the fine, assumed constant over time, and the cartel will stop. For each firm, the decision to deviate of not depends on its cartel profit, its deviation profit, the probability of detection and the expected fine level. If the fine is larger than the “dynamic dissuasive fine” FD characterized above, then at least one firm will deviate from the cartel agreement, thereby triggering a chain reaction of deviations leading to the dismantle of the cartel. It is thus preferable to distinguish the two and to conduct a specific analysis accounting for the nature of the investment and the level of irreversibility”. 2.2. The dynamic capacity expansion context: Boyer, Lasserre and Moreaux (IJIO 2012) 39. Boyer, Lasserre and Moreaux (IJIO 2012) (BLM) consider a dynamic capacity expansion game. They claim that “Investment games played by competing firms in oligopolistic markets typically share the following stylized characteristics: (i) the development of the market is uncertain, but firms have similar knowledge of the underlying random process generating the market development; (ii) firms’ production capacities are built over time through additional units of significant size; (iii) investments in real assets are substantially irreversible; (iv) firms compete in the product market, given their installed production capacities, while they can at the same time develop those capacities; (v) any firm may invest at any time as the market develops and as its competitors build their own capacity; (vi) at the industry level, new investments sometimes come in waves with firms building new plants simultaneously and sometimes in sequences with firms investing at different dates; (vii) as the market matures, absent drastic innovations, capacity building eventually comes to an end determined by the potential market size, with capacities remaining essentially the same for an indefinite time.” 34. Tacit collusion is less likely when the market is not transparent. Indeed, when the competitors cannot observe directly each other’s prices and output, it might be difficult (if not impossible) for them to identify the deviant firm from market data. This makes the punishment harder to implement and the tacit collusion harder to sustain. 35. Tacit collusion is less likely when the demand fluctuates due to business cycles. Intuitively, a business cycle introduces more or less periodic variations in the present value of future expected gains. When the demand reaches its maximum at a given point in time, it is expected to fall in the near future. Consequently, the present value of future expected gains reaches its minimum and the cost of retaliation is at its lowest level at that time. Collusion is harder to sustain in times where the present value of future gains is lower. 36. Tacit collusion is less likely when the competitors are asymmetric. Indeed, firms with different cost structure, different production capacities or different market shares do not necessarily perceive the same stakes from the market. Also, asymmetric firms do not necessarily have the same to gain from deviation. This makes the profit maximization objective harder to tacitly coordinate among the firms and consequently, tacit collusion is harder to sustain. In this regard, tacit collusion is less likely in a market where each firm can unilaterally introduce an innovation that reduces its cost production or increase its production capacities if this introduces more asymmetries among the firms. 40. The BLM model is a duopoly model with features (i) to (v) above, which generates results (vi) and (vii) among others. The BLM investment game involves multiple investments and admits one or several investment paths as equilibria. Investment paths will typically be composed of different episodes, each one starting from a state characterized by the current market development and the firms’ installed capacities resulting from past decisions. Two types of episodes may appear along any given investment path: episodes during which firms invest at different times, in a preemption or intense competition mode, and episodes during which firms invest simultaneously, in a “tacit collusion” mode. 37. Ivaldi et al. (2003) performed their analysis within a repeated game framework, which assumes that dynamic interactions can be interpreted as the repetition of static one‑ shot games. In such games, a collusive equilibrium arises once firms realize that lowering their price would trigger a price war. If each firm value future profits enough, the prospect of losing these profits (due to punishment or retaliation from the competitors) deters it from seeking a short term profit that could have been gained from a temporary deviation (price reduction). Hence, a collusive equilibrium corresponds to a long term profit maximization strategy whereas a short term profit maximization strategy pulls the price down toward the marginal cost. 41 . When an episode along an investment path has one firm investing earlier than the other, there is “preemption” during that episode, no matter what the sequence of previous or subsequent investments may be: incremental rents are dissipated and firms have the same incremental value. The first investment occurs precisely at the time when the market development level leaves the other firm indifferent between preempting (investing early) or not (investing later): hence, no firm gains by moving first. If firms start from a symmetric position of zero capacity when the level of market development is low, the first investment episode is necessarily a preemption episode, with only one active firm although both firms have necessarily the same value as incremental rents are equalized but partly dissipated. 38. Finally, Ivaldi and al. (2003) argue that the results outlined above are qualitatively valid if firms compete in quantity rather than in price, and to some extent when firms compete in capacity investment. Regarding the latter type of competition, they warned: “While [tacit] collusion in capacity expansion plans is similar in its nature to collusion under quantity competition, it is subject to more caveats. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 42. When an episode along an investment path has both firms investing simultaneous, there is “tacit collusion” during that episode, no matter what the sequence of previous or subsequent investments may be: such simultaneous 31 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. firms interact more frequently, the present value of future cash flows is higher and thus, tacit collusion is more likely. Tacit collusion is less likely when there are more competitors on the market. Intuitively, the more competitors there are on the market, the smaller the market share accruing to each firm and the more a deviating firm has to gain. As a consequence, tacit collusion is more likely when entry barriers are important. Also, tacit collusion is more likely when demand growth is important as future expected gains under the collusive equilibrium price are higher. 47. In the present context, the median values, 13.6% and 14.1%, are more informative and reliable as representative characteristics of cartel behavior. The corresponding median values are for US cartels 13,7% and 14,0%, for EU cartels 13,3% and 13,8%, for domestic cartels 13,3% and 13,4%, for international cartels 14,0% and 15,4%. For cartels before 1973 the median for all cartels is 13,4%, while for cartels after 1973 it is 14,2%. 43. Boyer, Lasserre and Moreaux show that higher market volatility, faster expected market growth, as well as lower cost of capital enlarge the set of conditions under which tacit collusion episodes exist. 44. The discussion of the conditions under which tacit collusion exists in a repeated game context (from Ivaldi et alii) and in a dynamic capacity expansion context (from Boyer et alii) shows that the determination of but‑for world and prices in particular is a complex task, much more so that is usually recognized in the applied antitrust literature. However, unless those but‑for world are properly characterized or considered, antitrust policies and the determination of optimal deterrent fines in particular are little more than random shots in the dark! 48. Interestingly, the bias‑corrected overcharge estimates reveal a more homogenous behaviour of cartels across different types, geographical locations and different periods than suggested by the raw overcharge estimates: hence, a cartel is a cartel is a cartel. IV. Conclusion 49. To assess the deterrence property of fines recently imposed on individual firms by the EC, we may consider how they compare with the dynamic deterrence fine level FD proposed by Allain, Boyer and Ponssard (2011) and characterized above. Indeed, cartels are dynamic organizations, whose participants reassess their strategies on a continuous basis as current and future benefits and costs (including potential fines) of maintaining the cartel change ove time and are risky. Hence firms evaluate their real options and reassess their values while discounting the future at their respective cost of capital. III. Estimating the representative mean/median of overcharge estimates 45. But how much do cartels typically overcharge? The Boyer and Kotchoni (2012) [BK]analysis of the Connor database, which contains 1120 usable studies/analyses of cartels over different time periods and regions, shows the following: a large number of relatively small overcharge values and a small number of relatively large overcharge values; a number of zero overcharge estimates (7.2% of cartels); a number of large that is ≥50% overcharges (22.6% of cartels with an average overcharge of 137.3%); a sample mean overcharge estimate of 45.5% overall and 49% for strictly positive estimates ‑ when the 5% largest overcharges are left out, the mean overcharge estimate for the latter goes from 49% to 32%; the mean is 20.6% for cartels with positive overcharge estimates less than 50%. 50. The percentage of fines imposed that can be considered to be above the deterrence benchmark depends on four parameters: the elasticity of demand, the cartel overcharge, the but‑for mark‑up, and the probability of detection. Estimating those parameters in a particular cartel case poses significant challenges, but there is no escape from this task if the objective is to develop an efficient antitrust policy towards cartels. 51. Allain, Boyer and Ponssard (2011) showed that most fines imposed recently in the EU are above the critical deterrence level. n 46. Hence, there is significant heterogeneity in the data, including significant outlier observations. This implies that unless appropriate sophisticated econometric techniques are used, the results will suffer from a loss of reliability as well as statistical biases in parameter estimates. A meta‑analysis (analysis of analyses in the spirit of Connor and Bolotova 2006) serves to integrate/combine the different analyses and purge the results from abnormal or contextual influence. The BK meta‑analysis generates bias‑corrected overcharge estimates are obtained by taking out the statistically Concurrences N° 1-2013 I Tendances 32 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. significant effects of bias‑capturing variables (estimation method and publication source). The bias‑corrected mean and median estimates (see Boyer and Kotchoni 2012 for more details) obtained by neutralizing the effects of those bias‑capturing variables suggest that the mean bias‑corrected overcharge estimate for cartels with raw positive overcharge estimates under 50% (the bulk of cartel cases) is 13.6% with a median of 13.6% also, while the mean bias‑corrected overcharge estimate for all cartels of all types is 17.5% with a median of 14.1%. investment takes place at a higher market development level, hence later, than the levels at which firms would invest if they were to invest at different times. Industry supply is then lower during the relevant market development interval than it would be otherwise, thereby generating “tacit collusion” rents for the firms: capacity building is postponed, production is lower, and prices and profits are increased relative to the levels that would prevail otherwise, that is, over the same market development interval if the firms were to invest at different times in a preemption episode. Simultaneous investments generate an investment wave in the industry, which indicates that tacit collusion has occurred and has resulted in a successful exercise of market power. Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. V. Bibliographie M.‑L. Allain, M. Boyer, J.‑P. Ponssard, “The determination of optimal fines in cartel cases: Theory and practice”, Concurrences 4‑2011, 32‑40. [Selected as Best Academic Economics Article ‑ 2012 Antitrust Writing Awards (Institute of Competition Law and George Washington University Law School, American Bar Association, Washington March 27 2012)]. M.‑L. Allain, M. Boyer, R. 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Landes, “Optimal Sanctions for Antitrust Violations”, University of Chicago Law Review 1983, 50, 652‑ 678. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 33 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? lanéCessItéd’undébatéConoMIque sur le nIveaudesaMendesCoMMunautaIres François brunet et Esther bItton Avocats, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP I. Introduction cathodiques depuis 2001. De même, Technicolor, qui connaît des difficultés financières très sérieuses depuis plusieurs années, s’est vu imposer une amende de 38 millions d’euros. 1. La question du juste montant des sanctions pécuniaires en matière d’entente a pris récemment une acuité toute particulière, en raison, d’une part, de l’augmentation très forte des amendes infligées aux entreprises contrevenantes en Europe et, d’autre part, de la crise économique à laquelle ces mêmes entreprises sont confrontées. 4. L’augmentation spectaculaire du montant des sanctions pécuniaires que la Commission européenne a progressivement mise en œuvre depuis une quinzaine d’années s’expliquerait par la volonté de leur assurer un caractère “dissuasif” sur le fondement de la théorie économique de la sanction dite “optimale”3. 2. En dépit de la crise financière actuelle, les régulateurs antitrust – la Commission européenne en tête –, n’ont eu de cesse de proclamer qu’il est absolument nécessaire de maintenir les amendes anticartel à un niveau très élevé, sous prétexte que les amendes élevées sont une solution à la crise, dans la mesure où elles sont les garantes d’une forte intensité concurrentielle et, partant, d’un niveau élevé de compétitivité. Dans un discours de juin 2012 à la Conférence antitrust de Madrid de l’International Bar Association, Joaquín Almunia, Commissaire européen chargé de la concurrence, a ainsi déclaré : “Il ne faut pas anticiper une mise œuvre plus indulgente [de la politique de sanctions antitrust]. Je veux être extrêmement clair sur ce point. Notre lutte contre les cartels n’a pas été et ne devrait pas être affectée par la crise. Les cartels peuvent être plus dommageables à l’économie et au bien‑être des consommateurs en période de crise qu’en période de croissance économique. C’est la raison pour laquelle notre niveau de vigilance devrait même, le cas échéant, être plus élevé” (traduction libre)1. 5. Si les principes généraux relatifs à la théorie de la sanction dite “optimale” font l’objet d’un large consensus parmi les économistes, il existe une controverse très importante sur le montant de la sanction “optimale”. Certains économistes considèrent ainsi que les sanctions européennes sont encore trop faibles ou juste au bon niveau4, alors que d’autres estiment que les amendes européennes sont aujourd’hui trop élevées et obèrent la capacité d’investissement des entreprises sanctionnées5. 6. Pour que la sanction soit proportionnée à l’objectif de dissuasion, il importe d’avoir une connaissance, même approximative, de la “rente” que le cartel a permis de prélever. Ce point ne fait pas débat. Pourtant, les autorités de concurrence européennes ne conduisent aujourd’hui aucune analyse économique visant à estimer le gain illicite généré par les pratiques anticoncurrentielles qu’elles sanctionnent. 7. Or, au vu de l’augmentation exponentielle du montant des amendes, qui paraissent aujourd’hui déconnectées du dommage réel – et non pas seulement théorique – causé 3. Il ne s’agit pas là de simples déclarations. Lorsque l’on regarde la pratique décisionnelle récente en matière d’ententes de la Commission européenne, on ne peut que constater un nouveau durcissement de la politique de sanctions. Dans une décision du 5 décembre 2012, la Commission a imposé une amende totale record s’élevant à 1,47 milliard d’euros à sept producteurs de tubes cathodiques pour téléviseurs et écrans d’ordinateur pour deux cartels ayant duré près de dix ans2. Dans cette affaire, Philips s’est vu imposer une amende de 705 millions d’euros – dont 391 millions d’euros conjointement et solidairement avec LG Electronics –, alors que l’entreprise s’est désengagée de la production de tubes 1 2 Discours de Joaquín Almunia, intitulé Higher Duty for Competition Enforcers, et prononcé à Madrid le 15 juin 2012 à la ConférenceAntitrust de l’International Bar Association,SPEECH/12/453 :“(…)you should not expect a more lenient enforcement in the future. I want to be extremely clear on this point. Our fight against cartels has not been and should not be affected by the crisis. Cartels can do more harm to the economy and to consumer welfare in difficult times than in periods of economic expansion; so our level of vigilance, if anything, should be even greater”. CommuniquédepressedelaCommissioneuropéennedu5décembre2012,n IP/12/1317. o Concurrences N° 1-2013 I Tendances 34 3 V.notammentJ.M.Connor,Determinantsof ECAntitrustFinesforMembersof Global Cartels,présenténotammentàlaconférenceLEARsurTheEconomicsof Competition LawàRome,les25et26juin2009 ;J.M. Connor,Aboutcartelovercharges:Kroesis correct,Concurrences – Law & Economics no 1-2010 ;J.M.Connor,HastheEuropean Commission become more severe in punishing cartels? Effects of the 2006 Guidelines, [2011]ECLR,Issue1,pp.27-36 ;W.P.J. Wils,Theincreasedlevelof EUantitrustfines, judicialreview,andtheECHR,ConférenceNew Frontierof Antitrust,15 février2010 àParis,Concurrencesno 2-2010,p. 74 ;M. Boyer,R. Kotchoni,HowMuchDoCartels Typically Overcharge?, CIRANO 2012s-15 ; M.-L. Allain, M. Boyer, R. Kotchoni, J.-P. Ponssard, The Determination of Optimal Fines in Cartel Cases: The Myth of Underdeterrence, CIRANO 2011s-34 ; M.-L. Allain, M. Boyer, J.-P. Ponssard, The determination of optimal fines in cartel cases:Theory and practice, Concurrences no 4-2011,p.32;E. Combe,C.Monnier,Lesamendescontrelescartels :LaCommission européenneenfait-elletrop ?,Concurrencesno 4-2009,pp. 41-50;E. Combe,C.Monnier, FinesagainsthardcorecartelsinEurope :Themythof overenforcement,The Antitrust BulletinNo 2/Summer2011,Vol. 56,pp. 235-275. 4 J.M.Connor,art.cit. ;E.Combe,C.Monnier,art.cit. 5 M.-L.Allain,M. Boyer,R.Kotchoni,J.-P.Ponssard,art.cit. ;v. égalementC.Ehmer, F. Rosati,Science,mythandfines:Docartelstypicallyraisepricesby25%?,Concurrences – Law & Economicsno 4-2009. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? les économistes retiennent généralement qu’elle se situe dans une fourchette entre 13 et 17 % ; cette estimation est essentiellement fondée sur le résultat de l’étude de Bryant et Eckard de 1991 sur des cartels américains sanctionnés par le Department of Justice entre 1961 et 1988. Dans une étude de 2008, Emmanuel Combe a estimé sur un échantillon européen que la probabilité de détection se situe entre 12,9 % et 13,3 %8. II. La définition économique de la sanction optimale 12. Ces estimations sont critiquables à deux égards : elles ne tiennent compte que des cartels détectés et elles ne tiennent pas compte des effets des programmes de clémence (qui ont très fortement augmenté la probabilité de détection)9. 8. La théorie économique considère que la sanction optimale est une sanction dissuasive, c’est‑à‑dire une sanction qui rend la formation ou la poursuite d’un cartel non profitable. Cette définition de la sanction optimale repose sur la théorie de la dissuasion des activités criminelles développée par Becker (1968) et Landes (1983), qui intègre la probabilité de détection des activités illicites. Dans son expression la plus simple, l’amende optimale est égale au gain illicite divisé par la probabilité de détection. Le gain illicite correspond au surprix pratiqué par le cartel multiplié par la quantité de produits vendus. Ce gain illicite n’inclut donc ni la perte de bien‑être pour l’ensemble de l’économie liée au fait que certains consommateurs renoncent à consommer (perte sèche), ni les effets négatifs du cartel sur l’incitation à innover ou sur la dynamique de marché. III. Le débat entre économistes sur le niveau approprié des sanctions imposées par la Commission européenne en matière d’ententes 13. La littérature économique s’interroge, notamment depuis les travaux de Gary Becker de 1968, sur la question de la “sanction optimale”. John Connor a mené une étude très complète sur le surprix causé par les cartels en référençant des estimations de surprix provenant de nombreuses études économiques, articles de journaux, et documents de travail10. Au terme de cette étude menée en 2006, John Connor indique que la moyenne du surprix qu’il observe se situe dans une fourchette de 31 % à 49 % des ventes affectées, et la médiane du surprix se situe dans une fourchette de 22 % à 25 % des ventes affectées. En ce qui concerne l’Europe, John Connor a publié en 2005 une analyse de 17 décisions de cartels rendues par la Commission européenne et indique qu’il a observé un surprix médian de 33 %11. Il conclut pour l’Europe qu’il est urgent que la Commission européenne augmente significativement le montant des amendes imposées12. 9. S’il existe un vaste consensus parmi les économistes sur la définition de la sanction optimale, les difficultés pratiques d’estimation de la sanction optimale font débat. Pour estimer le gain illicite, il faut en effet pouvoir mesurer, outre la valeur des ventes affectées par les pratiques anticoncurrentielles et la durée de ces pratiques, les trois autres facteurs suivants : g le surprix pratiqué par le cartel, c’est‑à‑dire l’augmentation de prix due à la mise en œuvre du cartel ; g l’élasticité‑prix de la demande ; g la marge concurrentielle réalisée par les entreprises avant la formation du cartel. 14. En 2009, John Connor a réalisé une nouvelle étude sur la base d’informations sur environ 1 040 cartels sur différentes périodes et régions et qui aboutissent à la conclusion que le surprix médian est de 25 % (18,8 % pour les cartels nationaux et 31 % pour les cartels internationaux)13. Ce dernier paramètre permet d’estimer la marge que réalisaient les membres du cartel sur leurs ventes additionnelles avant la formation du cartel et vient en diminution du gain illicite6. La probabilité de détection soulève également des difficultés d’estimation, puisque par définition, le nombre de cartels demeurés secrets est inconnu. 15. Plus récemment, John Connor a considéré que les amendes imposées par la Commission européenne étaient 10. Les économistes ont donc recours à des études empiriques pour estimer le gain illicite et la probabilité de détection. Concernant le gain illicite, il semble que les autorités de concurrence s’appuient essentiellement sur les études de John Connor fournissant des estimations du surprix médian7. Ces estimations font l’objet de controverses entre économistes (voir III). V.E.Combe,C.Monnier,art.cit. 7 C.Ehmer,F.Rosati,art.cit. E.Combe,C.Monnier,R.Legale,Cartels :TheProbabilityof GettingCaughtinthe European Union, Working Document College of Europe, BEER paper no 12-2008, disponibleàl’adressesuivante :http://emmanuelcombe.org/BEER121.pdf. 9 E.Combe,C.Monnier,R.Legale,art.cit. 10 ConnoretLande,2006,citédansM. Boyer,R.Kotchoni,TheEconometricsof Cartels Overcharges, March 21, 2011, disponible à l’adresse suivante http://www.cirano.qc.ca/ pdf/publication/2011s-35.pdf. 11 J.M. Connor, Price-Fixing Overcharges Focus on Europe, Mars 2005, disponible à l’adresse suivante : http://www.agecon.purdue.edu/ staff/connor/papers/PFO_ ENCORE_Draft_3-1-05.pdf. 11. En ce qui concerne la probabilité annuelle de détection, 6 8 12 J.M. Connor, The Size of Cartel Overcharges : Implications for U.S. and EU fining policies,The Antitrust Bulletin,Winter2006,Vol.51,p.983etart.cit. 13 J.M. Connor, Price Fixing Overcharges, Seconde édition, 2009, disponible à l’adresse suivante :http://www.agecon.purdue.edu/staff/connor/papers/index.asp. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 35 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. à l’économie, et surtout au vu de l’impact dévastateur que de telles amendes peuvent avoir sur des entreprises affaiblies par la crise, on peut se demander si les autorités de concurrence européennes peuvent encore se dispenser d’une quantification, même approximative, de la “rente” de cartel, que les entreprises contrevenantes se seraient partagée. En particulier, Paolo Buccirossi et Giancarlo Spagnolo estiment que si un programme de clémence prévoit de ne pas sanctionner la première entreprise qui dénonce le cartel et fournit des éléments de preuve au régulateur permettant d’établir l’infraction, l’amende dissuasive minimum est environ 20 % plus faible que l’amende optimale “béckérienne”20. 16. Ces conclusions sont critiquées par une partie de la doctrine économique, en raison de l’absence de fiabilité des données de John Connor, et de l’existence de biais dans l’échantillon et les méthodes de calcul qu’il utilise, ainsi que de l’existence d’erreurs matérielles dans sa base de données16. 20. Au regard des conclusions opposées auxquelles parviennent les économistes ayant travaillé sur la politique de sanctions récente de la Commission européenne, un travail minutieux sur la fiabilité des données de John Connor, qui constitue le fondement de la majorité des études économiques récentes, et un débat économique sur le niveau approprié des sanctions seraient bienvenus. 17. Marcel Boyer, dans une étude récente fondée sur la base de données de Connor comprenant des informations sur 1120 cartels, est arrivé à une conclusion contraire à celle de John Connor17. Dans son étude, Marcel Boyer a tout d’abord retraité la base de données de John Connor en isolant les points extrêmes (surprix égal à 0 % ou surprix supérieur à 50 %), et a procédé à une méta‑analyse de cette base de données afin de tenter d’identifier les facteurs explicatifs des niveaux de surprix observés. Au terme de cette analyse, il parvient à la conclusion que le surprix médian se situe entre 13 et 14 %18 – contrairement au surprix médian entre 23 % et 25 % avancé par Connor et repris par Combe. IV. Conclusion 21. La question du niveau approprié des sanctions pécuniaires en matière d’entente est un problème ancien, qui est ravivé par le regain d’intérêt que portent les économistes à la politique de sanctions de la Commission européenne. De nombreuses études récentes remettent en cause les conclusions empiriques de l’économiste John Connor, dont les travaux ont exercé une réelle influence sur la politique de sanctions de la Commission. 18. En outre, Marcel Boyer remet en cause l’approche dite “statique” utilisée pour calculer le montant de la sanction optimale – approche qui correspond à la définition de la sanction optimale évoquée en II –, en considérant que les entreprises sont des organisations dynamiques et qu’elles sont donc amenées à réévaluer leur stratégie en permanence pour savoir si elles ont intérêt à demeurer dans le cartel ou au contraire à en sortir, en fonction de valeurs actualisées du gain et du coût des pratiques collusives. À tout instant, une entreprise peut choisir de dévier de la stratégie commune, et lorsqu’une entreprise dévie de la stratégie commune, tous les participants au cartel adoptent une stratégie de concurrence. Sur la base de ces nouvelles hypothèses, Marcel Boyer calcule le niveau optimal de l’amende dite “dissuasive dynamique”. En comparant les amendes imposées par la Commission européenne au niveau de l’amende optimale théorique dite “dissuasive dynamique”, Marcel Boyer conclut que le niveau des amendes imposées par la Commission européenne est en moyenne adéquat, sinon trop élevé19. Selon lui, les amendes imposées par la Commission sont dans 55 % des cas supérieures à l’amende optimale théorique. 22. Face à cette crise de légitimité de sa politique de sanctions en matière d’ententes, la Commission aurait tout intérêt à prendre l’initiative d’un débat contradictoire concernant les effets concrets sur les prix des ententes sanctionnées, en particulier lorsque les entreprises sanctionnées appartiennent à des secteurs à faible marge en raison, par exemple, du pouvoir de négociation des acheteurs et/ou d’un fonctionnement par appels d’offres. 23. La Commission pourrait ainsi introduire le critère de rentabilité du secteur pour déterminer le montant des sanctions. Cette prise en compte pourrait intervenir au stade de la détermination du coefficient de gravité ou au titre des circonstances atténuantes. 24. Par ailleurs, la Commission pourrait utilement envisager de faire des études économiques a posteriori dans les secteurs sanctionnés, afin d’examiner dans quelle mesure les prix ont effectivement baissé et d’apprécier si les estimations ex ante et ex post de la “rente” de cartel sont convergentes. De telles études, qui pourraient demeurer purement internes et confidentielles, permettraient à la Commission d’évaluer la pertinence de son action et renforceraient ainsi la légitimité de sa politique de sanctions. 19. En ce qui concerne la probabilité de détection, certains économistes considèrent que le fait de ne pas tenir compte des programmes de clémence dans le calcul de la sanction optimale conduit à une surestimation de l’optimal théorique. 25. À défaut d’une initiative de la Commission dans ce domaine, il appartiendra alors au juge – ou au législateur – de s’emparer du sujet. Malheureusement, à l’heure actuelle, en dépit de la compétence de pleine juridiction dont jouissent les juridictions communautaires sur les décisions de sanction 14 J.M. Connor, Has the European Commission become more severe in punishing cartels? Effectsof the2006Guidelines,art.cit. 15 E. Combe, C. Monnier, Fines against hard core cartels in Europe : The myth of overenforcement,The Antitrust Bulletin No 2/Summer2011,Vol. 56,pp. 235-275. 16 V.notammentC.Ehmer,F.Rosati,art.cit. 17 M.Boyer,R.Kotchoni,TheEconometricsof CartelOvercharges,art.cit. 18 M.-L.Allain,M.Boyer,R.Kotchoni,J.-P.Ponssard,art.cit. 20 P. Buccirossi, G. Spagnolo, Antitrust Sanction Policy in the Presence of Leniency Programs,Concurrencesno 4-2006,p. 25. 19 M.-L.Allain,M.Boyer,R.Kotchoni,J.-P.Ponssard,art.cit. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 36 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. historiquement sous‑optimales et atteindraient depuis peu un niveau suffisamment élevé pour remplir le critère “béckérien” de dissuasion14. Les travaux d’Emmanuel Combe et Constance Monnier concluent à un niveau sous‑optimal des amendes au regard du même objectif de dissuasion à partir d’une étude économétrique sur 64 cartels européens entre 1975 et 200915. Ce document est protégé au titre du droit d'auteur par les conventions internationales en vigueur et le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992. Toute utilisation non autorisée constitue une contrefaçon, délit pénalement sanctionné jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende (art. L. 335-2 CPI). L’utilisation personnelle est strictement autorisée dans les limites de l’article L. 122 5 CPI et des mesures techniques de protection pouvant accompagner ce document. This document is protected by copyright laws and international copyright treaties. Non-authorised use of this document constitutes a violation of the publisher's rights and may be punished by up to 3 years imprisonment and up to a € 300 000 fine (Art. L. 335-2 Code de la Propriété Intellectuelle). Personal use of this document is authorised within the limits of Art. L 122-5 Code de la Propriété Intellectuelle and DRM protection. de la Commission en matière d’ententes21, la Cour de justice a invariablement jugé que la Commission disposait d’un large pouvoir d’appréciation quand il s’agit de déterminer les éléments à prendre en compte pour déterminer le montant des amendes22. Il est à espérer que les arrêts récents Chalkor et KME23, en rappelant l’étendue du contrôle que peuvent exercer les juridictions de l’Union sur les décisions de sanctions de la Commission, inciteront le Tribunal à mener un “contrôle approfondi” des analyses économiques conduites par la Commission afin de s’assurer que la sanction infligée tient compte, autant que faire se peut, des effets concrets des ententes sanctionnées. n 21 V.article 31durèglement(CE)no 1/2003duConseildu16décembre2002relatif àla miseenœuvredesrèglesdeconcurrenceprévuesauxarticles 81et82dutraité,JO L1du 4janvier2003,pp.1-25. 22 V.notammentarrêtdelaCourdu28juin2005,aff.C-189/02P,C-202/02P,C-205/02P àC-208/02PetC-213/02P,Dansk Rørindustri,Rec.p.I-5425,points240à242;etarrêt delaCourdu10mai2007,aff.C-328/05P,SGL Carbon,point 43,Rec.p.I-3921. 23 ArrêtsdelaCourdu8décembre2011,aff.C-272/09P,KME Germany ;aff. C-383/10P, Chalkor,etaff.C-389/10P,KME Germany,nonencorepubliésaurecueil. Concurrences N° 1-2013 I Tendances 37 Sanctions antitrust : Quel est le juste montant ? Concurrences Concurrences est une revue trimestrielle couvrant l’ensemble des questions de droits de l’Union européenne et interne de la concurrence. Les analyses de fond sont effectuées sous forme d’articles doctrinaux, de notes de synthèse ou de tableaux jurisprudentiels. L’actualité jurisprudentielle et législative est couverte par onze chroniques thématiques. Editorial Jacques Attali, Elie Cohen, Laurent Cohen‑Tanugi, Claus‑Dieter Ehlermann, Ian Forrester, Thierry Fossier, Eleanor Fox, Laurence Idot, Frédéric Jenny, Jean-Pierre Jouyet, Hubert Legal, Claude Lucas de Leyssac, Mario Monti, Christine Varney, Bo Vesterdorf, Louis Vogel, Denis Waelbroeck... Interview Sir Christopher Bellamy, Dr. Ulf Böge, Nadia Calvino, Thierry Dahan, John Fingleton, Frédéric Jenny, William Kovacic, Neelie Kroes, Christine Lagarde, Doug Melamed, Mario Monti, Viviane Reding, Robert Saint‑Esteben, Sheridan Scott, Christine Varney... Tendances Jacques Barrot, Jean-François Bellis, Murielle Chagny, Claire Chambolle, Luc Chatel, John Connor, Dominique de Gramont, Damien Géradin, Christophe Lemaire, Ioannis Lianos, Pierre Moscovici, Jorge Padilla, Emil Paulis, Joëlle Simon, Richard Whish... Doctrines Guy Canivet, Emmanuel Combe, Thierry Dahan, Luc Gyselen, Daniel Fasquelle, Barry Hawk, Laurence Idot, Frédéric Jenny, Bruno Lasserre, Anne Perrot, Nicolas Petit, Catherine Prieto, Patrick Rey, Didier Théophile, Joseph Vogel... Pratiques Tableaux jurisprudentiels : Bilan de la pratique des engagements, Droit pénal et concurrence, Legal privilege, Cartel Profiles in the EU... Horizons Allemagne, Belgique, Canada, Chine, Hong‑Kong, India, Japon, Luxembourg, Suisse, Sweden, USA... Droit et économie Emmanuel Combe, Philippe Choné, Laurent Flochel, Frédéric Jenny, François Lévêque Penelope Papandropoulos, Anne Perrot, Etienne Pfister, Francesco Rosati, David Sevy, David Spector... Chroniques Ententes Michel Debroux Nathalie Jalabert-Doury Cyril Sarrazin Pratiques unilatérales Frédéric Marty Anne-Lise Sibony Anne Wachsmann Pratiques restrictives et concurrence déloyale Muriel Chagny, Mireille Dany Jean-Louis Fourgoux, Rodolphe Mesa Marie-Claude Mitchell Distribution Nicolas Ereseo, Dominique Ferré Didier Ferrié, Anne-Cécile Martin Concentrations Dominique Berlin, Jean‑Mathieu Cot Jacques Gunther, David Hull, David Tayar Aides d’État Jacques Derenne Bruno Stromsky Procédures Pascal Cardonnel Alexandre Lacresse Christophe Lemaire Régulations Hubert Delzangles Emmanuel Guillaume Francesco Martucci Jean-Paul Tran Thiet Secteur public Centre de Recherche en Droit Public Jean-Philippe Kovar Stéphane Rodrigues Jurisprudences européennes et étrangères Florian Bien, Karounga Diawara Pierre Kobel, Silvia Pietrini Jean-Christophe Roda, Julia Xoudis Politique internationale Frédérique Daudret John Marianne Faessel-Kahn François Souty, Stéphanie Yon Revue des revues Christelle Adjémian, Emmanuel Frot Alain Ronzano, Bastien Thomas Bibliographie Institut de recherche en droit international et européen de la Sorbonne (IREDIES) Tarifs 2013 Revue Concurrences l Review Concurrences HT o Abonnement annuel - 4 n° (version papier) 1 year subscription (4 issues) (print version) oAbonnement annuel - 4 n° (version électronique + e-archives) 1 year subscription (4 issues) (electronic version + e-archives) o o TTC Without tax Tax included Abonnement annuel - 4 n° (versions papier & électronique + e-archives) 1 year subscription (4 issues) (print & electronic versions + e-archives) 1 numéro (version papier) 1 issue (print version) (France only) 465 € 474,76 € 445 € 532,20 € 695 € 831,22 € 120 € 122,52 € Bulletin électronique e-Competitions l e-bulletin e-Competitions o Abonnement annuel + e-archives 1 year subscription + e-archives 615 € 735,54 € o Abonnement annuel revue (version électronique + e-bulletin + e-archives) 1 year subscription to the review (online version + e-bulletin + e-archives) 795 € 950,82 € o Abonnement annuel revue (versions papier & électronique + e-bulletin + e-archives) 1 year subscription to the review (print & electronic versions + e-bulletin + e-archives) 895 € 1070,42 € Revue Concurrences + bulletin e-Competitions l Review Concurrences + e-bulletin e-Competitions Renseignements l Subscriber details Nom-Prénom l Name-First name . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . e-mail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 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