www.assises-risques.com
Transcription
www.assises-risques.com
actes www.assises-risques.com 1 SOmmaire I pages 4 Liste des inter venants I pages 5 à 12 Introduction et discour s d’ouver ture p. 5 p. 6 à 7 p. 8 à 9 p. 10 p. 11 p. 12 p. 12 Ouverture des 4 èmes Assises des Risques Technologiques Michel Pascal Jacques Vernier Pascale Pavy Pascal Monbailly Philippe Lefait Jean-Louis Borloo I pages 13 à 33 Plénière du matin - Actualité des Risques I pages 34 à 37 Inter vention du grand témoin Patrick Lagadec I pages 38 à 47Atelier s p. 38 à 59 p. 60 à 79 p. 80 à 97 p. 96 à 111 p. 112 à 129 p. 130 à 147 p. 148 à 161 Avertissement Les Actes sont une retranscription des débats qui se sont tenus lors des 4èmes Assises Nationales des Risques Technologiques. Cette retranscription se veut fidèle, même si certains passages ont été raccourcis. Les propos ne sont là que pour refléter les débats et n’engagent pas la responsabilité des organisateurs, ni ne reflètent leur position. Remerciements Les organisateurs des Assises tiennent à remercier tout particulièrement les inter venants, les pilotes des ateliers et plénières, les rapporteurs des ateliers, Cédric Bourrillet, Patricia Blanc, Laurent Michel, Pascal Monbailly, Karine Grimault, Frédéric Baudouin, les partenaires et membres des comités de pilotage pour leur présence, leur investissement et la qualité des échanges, constants tout au long de la préparation des Assises. 2 Atelier Atelier Atelier Atelier Atelier Atelier Atelier 1 2 3 4 5 6 7 - Maîtrise de l’urbanisation La maîtrise du vieillissement Compétences et formation Instances de concertation Evaluation des risques sanitaires Post-accidentel Réforme de l’Etat et ICPE I pages 162 à 169 Restitution des atelier s I pages 170 à 189 Plénière de l’après-midi - Devenir des industries à risques I pages 190 à 195Conclusion I pages 196 à 199 Glossaire 3 Ouverture des 4èmes Assises Nationales des Risques Technologiques Liste des intervenants 4 I Jean-Luc Andr ieux p.102 I Jean-Rémi Gouze p.69, p.177 I Mar yse Arditti p.121, p.171 I André Hermann p.104 I Sandra Ashcroft p.172 I Philippe Hubert p.133 I Claude Barbay p.149 I Jean-Marc Jaubert p.64 I Dominique Becouse p.45 I Aleksandar Jovanovic p.62 I Patr icia Blanc p.112 I Loïc Kerambrun p.130 I Yves Blein p.98, p.175 I Jean-Luc Lachaume p.131 I Pierre Bois p.80 I Patrick Lagadec p.34 I Jacky Bonnemains p.15 I Philippe Lalart p.48 I Jean-Louis Bor loo p.12 I Jacques Le Marc p.85 I Cédr ic Bour illet p.70 I Philippe Ledenvic p.178 I Ber nard Chambon p.15 I Philippe Lefait p.5 I Ian Conroy p.153 I Michel Lesbats p.96 avoir ici une anecdote personnelle. I Jean-Paul Cressy p.66 I Yann Macé p.61 Il se trouve que j’ai été enfant dans I Nicolas De Warren p.176 I Laurent Michel p.17, p.190 cette région et qu’à l’époque tout I Michel Delebarre p.175 I Pascal Monbailly p.11 ce qui s’appelait écologie et déve- I Jean Des Deser ts p.152 I Sébastien Mounier p.116 loppement durable se résumait à un I Jean-Jacques Dumont p.150 I Michel Pascal p.6 I Philippe Essig p. 78 I Pascale Pavy p.10 I Philippe Fanucci p.119 I Philippe Prudhon p.131 I Henr i Forest p.17 I Monique Sené p.132 I Nicolas Fourr ier p.149 I Serge Tarassioux p.45 Grenelle de l’environnement. Vous êtes ici pour faire I Peter Fr ijns p.50 I Jacques Ver nier p.8, p.14 encore avancer les choses , pour faire le point, pour essayer I Chr istine Gilloire p.42 I Jean-Pierre Vidal p.83 de réfléchir ensemble, comme vous l’ont dit les slogans du film vidéo que vous I Gar y Ginsberg p.123 I Jean-Claude Weiss p.148 venez de voir. A la fin de cette jour née, à nouveau, des progrès auront été faits I Jérôme Goellner p.38 I Jean Wencker p.100 et que nous sommes loin, très loin maintenant de ce Monsieur qui se promenait I Dominique Gomber t p.115 I Maureen Wood p.87 Philippe Lefait, Journaliste animateur Mesdames, Messieurs, je suis heureux de vous retrouver aujourd’hui pour ces 4èmes Assises Nationales des Risques Technologiques. Les qua- trièmes, c’est beaucoup. Je voudrais vélo hollandais, à un costume en velours et à une écharpe rouge pour se protéger des frimas. Je me dis que 40 ans plus tard, on a fait énor mément de progrès . De manière emblématique, aujourd’hui, cela s’a ppelle le avec son costume en velour s sur un vélo hollandais . 5 Discours d’ouverture Michel Pascal, 6 Directeur de la DREAL Nord-Pas-de-Calais, Secrétaire général des Assises Monsieur le Sous-préfet de Douai, représentant Monsieur le Préfet de Région, Préfet du Nord, Monsieur le Maire de Douai, Madame la Présidente, représentante de Monsieur le Président du Conseil Régional du Nord-Pas-de-Calais, Monsieur le Directeur général de la Prévention des Risques, Mesdames et Messieurs. C’est un très grand honneur et un très grand plaisir d’ouvrir cette quatrième édition des Assises Nationales des Risques Technologiques. Vous êtes nombreux, plus de 900 inscrits, malgré les difficultés de transport auxquelles vous avez dû et devrez faire face. Je suis donc d’autant plus heureux que vous soyez présents. Cette fois encore les DREAL, héritières des DRIRE, se sont mobilisées pour vous proposer ce temps d’échange, de dialogue, de confrontations d’idées, d’avancées collectives que constitue ce rendez-vous bisannuel. Dans cette région dotée de quatre-vingt installations Seveso, de trois SPPPI, la tradition du dialogue est forte. C’est à ce titre que le Nord-Pasde-Calais accueille naturellement cette manifestation. Nous avons cette année décidé d’ouvrir les Assises à des thèmes nouveaux, comme les risques sanitaires ou encore le vieillissement. Nous avons aussi souhaité donner à ces Assises une touche de parangonnage par la présence d’intervenants étrangers dans presque chaque table ronde ou atelier. Je salue également la présence de notre Grand Témoin, Patrick Lagadec qui nous donnera sa vision élargie sur le thème que nous allons traiter aujourd’hui. Nous avons souhaité également favoriser l’interactivité pendant les tables rondes. Je vous demanderai donc, exceptionnellement, de ne pas éteindre totalement vos téléphones portables, puisque vous verrez qu’ils vous seront utiles pour la bonne marche de celles-ci. Je souhaite excuser l’absence de Jean-Louis Borloo, Ministre d’Etat, Ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer. Il est retenu à Paris mais il a tenu à nous délivrer un message. Il m’a fait savoir combien il aurait aimé être parmi nous pour ce dialogue. Les DREAL, successeurs des DRIRE, des DIREN et des DRE, disposent en leur sein de compétences variées qui permettent de mieux gérer la question du risque. L’organisation de ces Assises est en droite ligne avec ce qu’elles doivent au-delà de leurs missions régaliennes, c’est-à-dire la pé- dagogie, l’information, l’accompagnement qui font partie de leur boîte à outils. C’est aussi montrer la capacité des entreprises à gérer et réduire elles-mêmes les risques. L’année 2010 nous a rappelé de manière dramatique combien le risque était présent dans nos vies. La tempête Xynthia et les inondations dans le Var ont remis brutalement en lumière la nécessité de mieux conjuguer l’urbanisation des territoires et la prise en compte des risques. Plus près de nous, la pollution en Hongrie ou les événements du Chili, nous ont montré combien la préparation aux risques et sa gestion était importante. Les DREAL sont fières du chemin parcouru depuis deux ans. Elles se sont beaucoup mobilisées sur les PPRT, bien qu’il reste beaucoup de travail à faire. Un enseignement important de ces deux années est de montrer que cette démarche permet d’atteindre le premier objectif de la politique des risques, à savoir la réduction des risques grâce à un dialogue approfondi entre les industriels et les parties prenantes (les élus, les associations, les représentants des salariés, les riverains et bien sûr l’Etat). Leurs missions se sont accrues notablement. Les moyens humains ont accompagné cette augmentation des missions, même si souvent des regards extérieurs estiment que ces moyens ne sont pas toujours à la hauteur des besoins. Si le premier responsable de la maîtrise des risques est bien le chef d’entreprise ou le directeur de l’usine, l’Etat est là pour en quelque sorte apporter une garantie supplémentaire dans la bonne gestion de ceux-ci. Et je veux former des vœux pour que les réformes en cours puissent maintenir cette mission essentielle de l’Etat qui concerne la sécurité de nos concitoyens. Je terminerai en remerciant tous ceux qui nous ont aidé, et ils sont nombreux, à préparer ces Assises : les membres du Comité de pilotage, Pascal Monbailly, Président de l’Union des Industries Chimiques Nord – Pas-de-Calais et Président de l’Association Nationale des Risques Technologies, Jacqueline Istas, Présidente de Nord Nature Environnement, Jacques Vernier ainsi que Michel Durousseau pour la ville de Douai, Christian Poiret, pour la Communauté d’Agglomération de Douai, Daniel Percheron, Président du Conseil Régional, tous les industriels partenaires, l’Europe, Laurent Michel, Jérôme Goellner, Patricia Blanc et Cédric Bourrillet de la Direction Générale de la Prévention des Risques, qui nous ont fait confiance pour cette manifestation, toutes les DREAL qui co-organisent les Assises avec la DREAL du Nord-Pas-de-Calais. Je veux vous remercier pour votre présence qui est un formidable encouragement à poursuivre notre action. Et comment ne pas terminer en remerciant les équipes de la DREAL, Frédéric Baudouin et Karine Grimault, et bien évidemment Gustave Defrance, Président du Comité de pilotage toujours attentif à la préparation et dont l’efficacité n’a d’égal que sa bonne humeur. Je vous souhaite une excellente journée. 7 Discours d’ouverture Jacques Vernier, M a i re d e D o u a i , P r é s i d e n t d u C o n s e i l S u p é r i e u r d e l a P r é ve n t i o n des Risques Te c h n o l o g i q u e s Monsieur le sous-préfet, Mesdames, Messieurs. Je voulais vous dire que c’est avec un très grand plaisir que je vous accueille très nombreux comme d’habitude à ses quatrièmes Assises Nationales des Risques Technologiques. Je le fais, vous le savez à un double titre, d’une part comme Maire de Douai et vice-président de la Communauté d’Agglomération du Douaisis, qui vous accueille d’ailleurs dans un lieu qui appartient à la Communauté d’Agglomération du Douaisis. Je voulais excuser le Président de cette Communauté qui sera parmi nous tout à l’heure, mais qui n’est pas là au début de notre colloque pour vous accueillir. Je le fais donc à titre de maire de cette bonne ville et je le fais aussi et surtout au titre, vous le savez, de mes fonctions environnementales nationales, Président de ce qui s’appelait naguère le Conseil Supérieur des Installations Classées et qui s’appelle aujourd’hui le Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Technologiques (le nouveau vocable est d’ailleurs plus en accord avec nos Assises des Risques Technologiques), et comme Président de la Commission interministérielle du Transport des Matières Dangereuses. Nous tenons ce colloque en 2010. 2010, nous ne l’avons peut-être pas assez dit, c’est le bicentenaire de la première grande loi sur les établissements dangereux, incommodes. En 1810, dès cette date là, vous vous rendez compte, on avait pris conscience du danger de certaines installations. Il y aura d’ailleurs dans quelques semaines un colloque célébrant, rappelant le bicentenaire de cette loi de 1810. Un peu de la même manière que lors des secondes Assises, en 2006, nous avions remarqué la coïncidence avec le centenaire de la terrible catastrophe minière de Courrières non loin d’ici, qui est, il faut bien le dire, la plus grande catastrophe industrielle et minière qu’ait connu l’Europe avec vous le savez, environ 1 100 personnes décédées dans cet accident. Des catastrophes qui peuvent encore avoir lieu d’ailleurs au Chili, en Chine, dans les mines, montrent que dans le domaine minier aussi les risques industriels continuent d’être extrêmement présents. 8 Je voulais pour terminer vous donner mon sentiment sur l’évolution de ces deux dernières années qui se sont écoulées depuis les troisièmes Assises. J’en dirai un peu plus tout à l’heure, lors de la table ronde. Il me semble que l’on a beaucoup avancé : les Plans de Prévention des Risques Technologiques ont avancé, les études de dangers qui doivent être faites dans les lieux où il y a une concentration de transport de matières dangereuses vont pouvoir déboucher maintenant sur des prescriptions préfectorales dans les gares de triage (malheureusement il n’y en a plus beaucoup), dans les ports, dans les ports maritimes, dans les ports fluviaux, dans les parkings routiers ou autoroutiers. Nous avons réuni en 2009 après les dernières Assises, une table ronde sur les risques industriels qui a permis de mettre au point et de faire déboucher un certain nombre de modifications législatives ou réglementaires très importantes. Je disais tout à l’heure que le Conseil Supérieur des Installations Classées s’est transformé en Conseil Supérieur de Prévention de Risques Technologiques. Ce n’est pas seulement un changement de vocable, c’est parce que désormais notre Conseil Supérieur intègre aussi la problématique des canalisations de transport de matières dangereuses, et demain celle des installations nucléaires de base. En matière de canalisations, nous sommes en train d’étudier des textes considérables, notamment des textes sur le vieillissement des canalisations, de même qu’il y a des textes d’ailleurs sur le vieillissement des usines dans le cadre du Plan anti-vieillissement, qui a été initié par l’Etat. Puis en matière de canalisations, nous sommes en train de faire des textes sur les risques d’endommagement des canalisations par les engins de travaux publics, tant il est vrai que les grands accidents de canalisations ont été dus à des manœuvres erronées en matière de travaux publics. Ces deux années ont aussi été marquées par le lancement de la nouvelle procédure d’enregistrement pour les installations classées. Je dirai toute à l’heure avec force combien je pense que peut-être cette procédure a été mal comprise et combien je pense que, loin d’être une régression en matière de protection de l’environnement, je pense profondément que cela peut être un progrès. Je dirai tout à l’heure, autour de la table ronde, pourquoi. En tout cas, beaucoup de modifications, beaucoup d’avancées dans les domaines législatifs et réglementaires. Je pense et je suis sûr que cette journée nous permettra d’en attester, d’en faire le bilan et nous permettra aussi de constater qu’il y a peut-être, et encore, un certain nombre de lacunes, car ce sont des domaines dans lesquels il est important de toujours progresser. Je voulais vous remercier toutes et tous dans votre diversité, de votre présence. Je resterai avec vous bien entendu toute la journée. Je suis persuadé que nos débats seront comme d’habitude extrêmement fructueux et productifs. 9 Discours d’ouverture Pascale Pavy, P re m i è re v i c e - p r é s i d e n t e d e l a c o m m i s s i o n a m é n a g e m e n t d u t e r r i t o i re, tour isme, e nv i ro n n e m e n t , p l a n c l i ma t a u C o n s e i l R é g i o n a l Monsieur le sous-préfet, Monsieur le maire,. Monsieur le directeur de la DREAL. Mesdames et Messieurs. J’ai le plaisir de vous accueillir dans cette région Nord-Pas-de-Calais, au nom de notre président Daniel Percheron. Je ne sais pas si la durée de votre séjour vous amènera à pleurer ce soir au moment de partir, perturbés par le regret de nous quitter aussi vite. N’hésitez pas à revenir, vous serez toujours bien accueillis et vous aurez à découvrir une grande diversité culturelle, naturelle, patrimoniale et économique dans cette région. La question des risques technologiques relève d’une compétence de l’Etat. Nous ne développons pas directement de politique sur ce sujet, mais tout se tient. Vous abordez dans vos ateliers l’urbanisation, la formation, la concertation. Tout ceci fait partie de ce qui nous motive. Cette région a vécu une très forte industrialisation qui a apporté des richesses mais qui a été aussi lourde de conséquence, le modèle n’étant pas durable à l’époque. Il y a de lourdes conséquences à la fois pour les femmes et pour les hommes, pour l’environnement, pour l’économie aussi. Aussi ce n’est pas par hasard que notre région a été pionnière dans la volonté de développer des politiques plus soucieuses des êtres humains, de l’environnement, de l’économie et de la concertation. C’est ici qu’est né le premier parc régional naturel de France. C’est aussi ici cette année qu’a été créé le premier observatoire régional de la biodiversité. Toutes nos politiques sont déclinées autour d’un schéma régional d’aménagement et de développement du territoire qui a été travaillé avec tous pendant des années et auquel se raccrochent toutes les politiques : schéma des transports, schéma de la formation, schéma du développement économique qui avait sa plénière avant-hier, Trame Verte et Bleue etc. Tout se tient vers un développement équilibré le plus possible de notre région. Nous avons ici 1 629 établissements soumis à autorisation, dont 116 carrières, 840 établissements soumis à la Taxe Générale sur des Activités Polluantes (TGAP), 75 inspecteurs équivalents à temps plein. Il y a de quoi faire et il y a de quoi échanger. Je vous souhaiterai une très bonne journée et de fructueux échanges. 10 Pascal Monbailly, Président de l’Association Nationale des Risques Technologiques et Président de l’UIC Nord - Pas-de-Calais Monsieur le sous-préfet, Monsieur le maire de Douai,. Mesdames et Messieurs les élus, représentants des collectivités. Mesdames et Messieurs, représentants des services de l’Etat et des associations, chers collègues industriels et leurs représentants. Mesdames et Messieurs. Je tiens à vous rassurer immédiatement. Je ne vais pas vous faire subir un discours supplémentaire. En effet, je crois que comme moi vous êtes impatients de participer activement aux différents ateliers et tables rondes organisés pour vous aujourd’hui. Néanmoins, en tant que président de l’Association de gestion de ces Assises, je me devais de formuler quelques remerciements. En effet, merci aux nombreuses personnalités qui nous font l’honneur d’intervenir dans les ateliers et plénières de ce jour. Merci aux membres des Comités de pilotage national et régional, leur aide a été précieuse afin d’organiser une opération de cette envergure. Merci aux nombreux agents de l’Etat des DREAL et des SPPPI qui ont préparé cette journée et en assurent le bon déroulement. Merci aux nombreux partenaires moraux et financiers sans qui les Assises ne pourraient avoir lieu tous les deux ans et être d’une telle qualité. Surtout merci à vous, participants, qui vous êtes déplacés en nombre malgré les difficultés inhérentes aux grèves actuelles. Nous comptions hier plus de 900 inscrits. Je pense qu’aujourd’hui nous ne devons pas être loin des 800 personnes. Cela montre l’intérêt que tous les acteurs de la prévention des risques que vous êtes, portent aux thématiques qui vont être développées aujourd’hui. Le nombre de participants aux Assises est de plus en plus élevé au fil du temps. Cela atteste le développement d’une culture commune de la sécurité et d’une volonté largement partagée de dialogues. C’est d’ailleurs parce que je partage complètement cette volonté d’échange et de débats sur la prévention des risques que j’ai immédiatement accepté de présider l’Association de gestion des Assises et ce aux côtés de la DREAL, de Nord Nature Environnement et de la ville de Douai. D’ailleurs, merci à Michel Pascal, à Jacqueline Istas et à Michel Durousseau pour leur collaboration. Je terminerai ce propos en tant qu’industriel de la chimie, en vous disant que comme moi, la profession et l’ensemble de mes collègues industriels, sommes en permanence engagés sur le front de la prévention afin de conforter la sécurité sur nos sites. Aussi je veux dire aux industriels présents aujourd’hui dans cette salle, et je sais qu’ils sont nombreux, montrons cet engagement dans les échanges que nous allons avoir durant les travaux de cette journée. À tous ici présents je vous souhaite d’excellents débats, et encore une fois merci pour votre confiance. 11 Discours d’ouverture Philippe Lefait, Journaliste animateur Tout à l’heure, Michel Pascal excusait l’absence de M. Jean-Louis Borloo, le Ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer. La technologie permet aussi tous les rapprochements. La preuve, le Ministre d’Etat est là. Jean-Louis Borloo, M inistre d’Etat, Ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer 12 Tout d’abord, je tiens à saluer et remercier notre directeur régional et toute l’équipe de la DREAL du Nord-Pas-de-Calais, Michel Pascal bien entendu, le président de l’association des maires des communes à risques Yves Blein, les représentants de FNE et de l’UIC, Jacqueline Istas et Pascal Monbailly, et puis bien entendu le maire de Douai, Jacques Vernier, Christian Poiret, Président de l’agglomération, et le Président de la région Daniel Percheron. Organisées par la DREAL du Nord-Pas-de-Calais, sur un sujet qui est complètement dans l’actualité, en tous cas de ces deux dernières années de manière très forte, dans le Nord-Pas-de-Calais, à Douai, c’est-à-dire au bout de la rue pour un Valenciennois, vous imaginez toutes les raisons qui me font regretter de ne pas être là. L’actualité parfois commande. C’est une réunion qui est extrêmement importante. Ce moment d’échange est important parce que c’est l’une des missions des plus compliquées du service public. Elle est compliquée pour plusieurs raisons. D’abord parce que c’est au fond une culture relativement récente dans l’opinion publique et le soutien de l’opinion publique. Ensuite, parce qu’avant qu’un problème se pose, nous sommes forcément un peu attaqués sur notre soi-disant incompréhension des enjeux économiques, des règles jugées tatillonnes qui attaquent notre compétitivité. Après c’est : « mais, nous l’avions tellement dit. C’était tellement insensé de laisser de tels risques. ». Vous et nos équipes ont un travail extraordinairement difficile, mais vital, (dans tous les sens du mot. Je rappelle que nous venons de passer deux années assez difficiles, à la fois sur l’ensemble des risques (je pense à Xynthia et aux crues du Var), mais aussi aux matières industrielles (l’oléoduc de Crau, la plateforme de Carling et quelques incidents dans plusieurs raffineries). Nous voyons bien que le processus qui s’était accéléré ou intensifié plutôt après AZF est évidemment toujours d’actualité. Nos agents sont sur tous les fronts : le plan de lutte contre les risques liés au vieillissement industriel (je rappelle que la moyenne d’âge des canalisations d’hydrocarbures est supérieur à 40 ans), la mise en œuvre des 38 mesures définies avec les industriels et le rôle-clé joué évidemment par l’inspection des installations classées dans ce cadre. Sur les PPRT (un travail très difficile de longue haleine) 335 ont été prescrits sur un total de 420. L’objectif pour 2011 est qu’évidemment les PPRT soient approuvés si possible dans un taux de l’ordre de 60%. En tous les cas, les préfets ont reçu les instructions tout à fait claires dans ce sens, et vous savez qu’ils s’appuient évidemment massivement sur les inspecteurs des installations classées et sur tous les acteurs que vous représentez. Tout ceci nécessite une évolution de notre culture administrative, la transversalité du Ministère. Culture en matière de convenance bien entendu par la généralisation des Commissions Locales d’Information sur les sites à risques. On l’a vu dans la table ronde un peu historique sur les risques industriels avec ces 33 recommandations intégrées dans la loi Grenelle II et les textes réglementaires, puis l’élaboration du plan anti-endommagement des canalisations et des réseaux lors des chantiers. Je ne parle pas du débat public sur les nanotechnologies qui a été extrêmement bien préparé, bien mené mais qui a eu des difficultés que chacune et chacun connaît. Vous faîtes un travail extrêmement difficile qui fait appel à de la prévisibilité (rien de plus difficile que cela, non seulement à analyser, mais à faire partager). Cela s’appuie sur des équipes qui sont scientifiquement de très bonne expertise (ce que personne ne conteste). Il faut le faire partager, c’est ce qu’il y a de plus difficile. Mais vous savez trouver les mots et les formules. On ne peut pas aller au risque zéro. L’objectif est d’être si possible à zéro victime dans tous les cas. On ne peut pas, dans beaucoup de cas, agir sur les causes mais on peut en limiter les conséquences, notamment humaines. Le risque existe, mais n’est évidemment pas une fatalité.J’ai la conviction que dans un certain nombre de cas, cette analyse par le risque entraîne aussi des modifications qui améliorent la compétitivité des sites industriels. C’est un tout difficile à appréhender. Cela fait que j’aurais été ravi d’être au fond un peu à la maison. Je vous souhaite dans tous les cas de bonnes Assises. 13 Plénière 1 moment. Il y a eu des textes sur les sanctions et sur les contrôles. Actualité des Risques I Philippe Lefait Vous nous dîtes que c’est plutôt bien, plutôt actif et cela donne des résultats. Jacky Bonnemains, êtes-vous aussi optimiste ? I Philippe Lefait, Journaliste animateur Nous par lons maintenant de l’actualité des r isques technologiques . Il s’est passé beaucoup de choses depuis deux ans . Dans un ra pide tour de ta ble, je voudrais vous demander, aux uns et aux autres , comment, à votre niveau d’exper tise et de responsa bilité, vous avez perçu l’actualité de ces deux der nières années . Jacques Vernier, vous êtes la puissance accueillante. Nous sommes chez vous . Comment, au-delà des responsa bilités d’élu, avez-vous perçu ces deux der nières années ? Vous souligniez dans votre propos introductif, la qualité et la substance de que ce qui s’était passé depuis deux ans . I Jacques Ver nier, Maire de Douai, Président du Conseil Supér ieur de la Prévention des Risques Technologiques 14 J’ai été chargé par l’Etat de présider une ta ble ronde sur les r isques industr iels réunie juste avant l’été 2009 , i l y a p e u a p r è s 1 5 m o i s . N o u s a v o n s t r a va i l l é a v e c tous les groupes du Grenelle, c’est-à-dire les industriels, les élus, les syndicats de s a l a r i é s , l e s organisations de défense de l’environnement et le milieu associatif. En l’espace de trois mois, puisque nous voulions enfer mer nos travaux dans un délai très bref, nous avons proposé 33 mesures, qu’elles soient législatives, réglementaires, ou même parfois il s’agisse de la rédaction de guides. Nous avons fait le bilan de ces 33 mesures proposées à l’été 2009, un an après, au mois I Jacky Bonnemains, Président de l’association Robin des bois de Juin 2010, en présence de la Secrétaire d’Etat Chantal Jouanno. Pratiquement 90% des mesures proposées étaient soit sur les rails, soit déjà dans la loi Grenelle II, soit dans des décrets. Ces mesures sont diverses. Certaines concernaient les Plans de Prévention des Risques Technologiques, notamment pour combler certaines des principales lacunes de ces PPRT. La très grande lacune qui a été pointée par l’Association des maires concernés, l’Association AMARIS, c’était que lorsqu’on devait faire des travaux dans les habitations proches d’une usine à risques, l’aide financière pour ces travaux était très faible. Il n’y avait qu’un crédit d’impôt de 15 %. Nous avons milité pour que ce crédit d’impôt soit augmenté et pour qu’il y ait des aides des collectivités locales et des industriels, qu’il faut remercier. C’est un exemple. Puis il y a eu des mesures en dehors des PPRT, pour la meilleure infor mation du public. Nous avons proposé par exemple que, quand on lance une enquête publique pour une installation classée, l’arrêté d’enquête, le rapport du commissaire enquêteur et le résumé non technique de ce qu’il va se passer dans cette installation soient mis en ligne. Nous souhaitons aller vers une infor mation plus diffusée avec les moyens technologiques du Je ne suis pas là pour distribuer des médailles ou des blâmes, mais pour relever que depuis deux ans, l’accident qui nous a le plus frappé et qui, à notre avis, a eu le plus de conséquences sanitaires, sociales et économiques, s’est produit dans une installation qui était à peine soumise à déclaration. L’incendie s’est produit dans le département de la Loire en plein été 2008. Ses conséquences ont été découvertes plusieurs mois après. L’incendie de Saint-Cyprien, un vulgaire incendie si l’on peut dire, de bois traités sur un ancien site pollué, a provoqué la ruine de plusieurs exploitants agricoles, l’abattage de 2 300 vaches, de plusieurs moutons et d’un cheval. De mon point de vue, c’est le plus gros incident technologique survenu depuis les dernières Assises Nationales des Risques Le site, très imprégné par les PCB, ne faisait pas l’objet de fiche BASOL, ni d’une communication claire aux pompiers de Saint-Etienne. Les pompiers se sont servis des terres polluées pour éteindre tout doucement l’incendie. Pendant plusieurs semaines, un véritable réacteur à dioxines et à PCB s’est déclenché clandestinement dans ce département urbanisé et dans cette région à la fois urbaine et rurale. A la base, il y a donc une mauvaise information des services de secours, une mauvaise transmission de l’information. Je dois dire, sans vanité aucune, que s’ils avaient lu l’inventaire de l’atlas des sites terrestres pollués de Robin des bois paru au mois de Mai 2008, ils se seraient rendus compte que ce site de SaintCyprien était une véritable bombe à retardement en cas d’incendie. Je m’excuse auprès des syndicalistes ou des directeurs d’usines qui sont éventuellement présents et qui ont été victimes dans leurs sites de blessures ou de mortalités, mais cet incendie de Saint-Cyprien est très représentatif. Le gouvernement en a tiré, on en a tiré tous ensemble les retours d’expér ience. E n c e m o m e n t m ê m e , une circulaire aux préfets est sur le point d’être finalisée. Elle va les inciter à vér ifier que les incendies d’une certaine importance n’auront pas de conséquence sanitaire sur les productions agricoles ou potagères, sur les eaux et sur le bétail. Ce signal de Saint-Cyprien a été identifié par le -inistère. Les incendies en général sont le domaine le moins sur veillé par les instances diverses. Nous en parlons souvent avec Jacques Vernier au sein de l’ex-CSIC. Heureusement, les incendies vont devenir un domaine particulièrement sur veillé, leurs conséquences en particulier. I Philippe Lefait Ber nard Chambon, vous êtes past-président de l’Union des Industr ies Chimiques . Ra pidement, comment jugez-vous ce qui s’est passé dans ces deux der nières années ? I Bernard Chambon, Past-président de l’Union des Industries Chimiques Beaucoup de choses ont été faites au cours de ces deux dernières années. Nous avons parlé des PPRT, des plans pour lutter contre le vieillissement des installations et des canalisations , du Grenelle de l’Environnement… Rarement autant d’initiatives ont é t é l a n c é e s s u r l e fo n d a u c o u r s d ’ u n e p é r i o d e a u s si courte, même si tout n’a pas 15 Plénière 1 16 é t é fa i t . S u r l a fo r m e , i l y a eu aussi une g ro s s e p ro g re s s i o n a u c o u r s de ces deux a n s . Au t o u r d e l a t a b l e , d i ff é rents acteur s p e u ve n t a vo i r d e s d i ve rg e n c e s sur la façon d ’ a p p r é h e n d e r l e s p ro b l è m e s et avoir pour a u t a n t u n e g ra n d e c o nve rg ence dans la p r i s e e n c o m p t e d e l a r é a l i té du r isque e t d e l e u r s re s p o n s a b i l i t é s e n la matière. C e q u i a é t é fa i t a u c o u r s d u Grenelle de l ’ E nv i ro n n e m e n t o u p l u s r é c e mment avec l ’ a d m i n i s t ra t i o n , n o t a m m e n t sur le vieillis s e m e n t d e s i n s t a l l a t i o n s , m ontre que le d i a l o g u e e x i s t e , q u e l e s d i fférentes part i e s p re n a n t e s s e p a r l e n t , a l or s que l’on d i t s o u ve n t , s u r t o u t e n c e m o ment, que le d i a l o g u e n ’ e s t p a s s u ffi s a n t C’est un gros p ro g r è s p a r ra p p o r t à c e q u i existait il y a quelques années. Je remarque en troisième point, que tout ceci s’est fait dans une période économiquement catastrophique. Nous avons connu et nous connaissons encore la plus grave crise économique depuis 1929 qui touche de tas d’autres aspects au-delà de l’économie comme les matières premières et l’énergie. C’est un rapport de force qui change complètement sur la planète. On aurait pu prendre le prétexte de tout cela pour lever le pied, m a i s c e l a n ’ a p a s é t é l e c a s : c h a c u n a assumé ses responsabilités et cela montre qu’il y a une volonté forte. Je ter minerai en disant que comme souvent en France, on a toujours tendance à voir le verre à moitié v i d e . I l y a e n c o r e b e a u c o u p d e c h o s e s imparfaites, les difficultés de la mise en place des PPRT, tout le monde les connaît. Mais il faut voir le bon côté des choses. Tout ce qu’on vient de dire montre la volonté de tous les acteurs et une réalité des efforts qui mériteraient vraiment d’être plus valorisés. M a i s q u a n d o n vo i t , e n p a r t i c u l i e r p o u r l’industrie qui est la mienne, le degré d’hostilité ou de crainte par rapport à cette industrie, il y a encore beaucoup de choses à faire pour convaincre nos concitoyens des efforts que nous faisons en la matière. I Philippe Lefait Pensez-vous que s’engager dans la prévention créé de la compétitivité ? C’est ce que disait Jean-Louis Bor loo en introduction. I Bernard Chambon Oui, tout à fait. Je crois que le Ministre d’Etat a très bien posé le problème. Il y a deux sujets. Il y a un sujet évident, qui est de répondre aux risques et à la population de plus en plus demandeuse et exigeante dans ce domaine, c’est parfaitement légitime. C’est d’ailleurs la condition pour que des industries comme les nôtres se maintiennent dans des pays développés comme le nôtre. Pa r a i l l e u r s , i l y a l e r é a l i s m e é c o n o m i q u e : t o u t n ’ e s t p a s fa i s a b l e a u m ê m e m o m e n t , à l a m ê m e v i t e s s e . O n a u ra l ’ o c c a s i o n d ’ y r eve n i r p a rc e q u ’ à t ra ve r s l a p ro b l é ma tique de l’enregistrement, il y a des débuts de réponses. I Philippe Lefait Je vous entends tous . On est entré fo rc é m e n t d a n s l ’ a i re d u d é b a t , d a n s l’aire de la concertation. Le Grenelle e n e s t l e p ro t o t y p e p a r fa i t . Henr i Forest, vous êtes secrétaire confédéral en charge de la santé au travail à l a C F D T. C o m m e n t a v e z - v o u s p e r ç u ces deux dernières années ? Comment percevez-vous le débat dont le Grenelle 1 et le Grenelle II sont actuellement le prototype, la réussite ? I Henri Forest, Secrétaire confédéral en charge de la santé au travail à la CFDT L’impression que l’on a en tant qu’organi sation syndicale, c’est la place pr ise en ce qui concer ne les débats techniques . Il y a énor mément de progrès sur des problèmes techniques relatifs aux installations . Par contre, à propos de la place de l’homme dans les installations (ce qui anime beaucoup les organisations syndicales , puisque ce sont les salar iés qui font fonctionner les installations), le débat a été un peu juste. Il a commencé pendant ces deux der nières années, au cours des tables rondes, il mér ite encore d’être pour suivi. La place de l’homme dans la maintenance des installations , dans l’exploitation des installations , le rôle des salar iés en tant qu’instance d’aler te lor squ’il y a des dysfonctionne ments , des signaux faibles qui a pparaissent dans les installations , mér ite encore de faire l’objet d’amélioration dans le débat des acteur s . On a été, nous , organisation syndicale, un peu pr ivé de débats pendant ces deux années . I Philippe Lefait On est plus dans la procédure, dans le règlement que dans l’humain. I Henri Forest Peut-être au dépens de ce qui se passe au sein des entreprises, avec la place des hommes au sein des entreprises. Il faut faire les deux. On ne peut pas imaginer qu’une installation fonctionne sans les hommes et avec uniquement des contre-mesures du point de vue technologique. Nous avons un certain nombre de propositions à faire pour améliorer les choses. Dans le débat public autour des installations, la place des orga- nisations syndicales est complexe. On n’a peut-être pas suffisamment abordé, en tout cas de notre point de vue, sur le fond ce qu’elles peuvent a p p o r t e r d a n s l e d é b a t public pour éclairer les citoyens sur ce qui se passe dans les entreprises, avec leur point de vue. Cela mérite d’être aussi creuser dans la suite des débats. I Philippe Lefait Laurent Michel, vous représentez ici le ministère. Comment initiez-vous la politique des risques ? Comment l’avez-vous vécue dans les deux dernières années ? Pouvez-vous aussi intégrer dans votre réponse ce qu’ont dit Messieurs Bonnemains et Henri Forest ? I Laurent Michel, Directeur Général de la prévention des Risques, Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer Sur les deux dernières années, on constate le travail et les avancées, soit sur des cadres qui ont évolué suite à la Table Ronde sur les risques industriels par exemple, concernant des éléments législatifs ou réglementaires, soit sur du concret, comme les études de dangers, les investissements qui en ont résulté au moins jusqu’à 2007-2008, pér iode pour laquelle nous avions les chiffres alors que pour 2009, nous ne les avons pas encore. Sur cette période, il y a eu une forte augmentation, autour de 250 voire 300 millions d’euros d’investissements dans les industries Seveso, ce qui n’est pas rien. Du côté de l’Etat, nous avons poursuivi le renforcement des effectifs d’inspection des installations classées avec 154 postes créés sur trois ans. La production et l’activité de concertation se sont intensifiées. Nous avons cité la Table Ronde sur les risques industriels, le Plan de modernisa- 17 Plénière 1 18 tion d e p r é v e n t i o n d u v i e i l l i s s e m e n t d e s installations . Le Plan de prévention des endommagements autour des réseaux v a b i e n t ô t ê t r e fi n a l i s é , u n d é c r e t e s t e n voie d’être signé et le deuxi è m e s u i t . L e Plan national santé environnement sur le volet « prévention des r i s q u e s c h roniques », que ce soit dans l’industrie ou par d’autres sources , a été adopté. La crise économique n’a pas aidé. Je ne d i ra i s p a s q u e c e l a a a m e n é u n r e c ro q u e v i l l e m e n t d e s a c t e u r s , ma i s c e l a a m è n e c l a i r e m e n t d e s i n t e r ro ga t i o n s e t c e l a s e c o m p r e n d . Certaines entreprises passent la crise à peu près bien, mais même celles-là o n t d e s s i t e s q u i s e d e m a n d e n t s ’ i l s vo n t investir là ou ailleurs, avec plus d’incertitudes en ce moment, ce qui peut rendre les décisions d’investissement ou de participation aux PPRT compliquées. Il en va de même pour l e s fi n a n c e s d e s c o l l e c t i v i t é s l o c a l e s q u i doivent inter venir sur les PPRT. Aujourd’hui, on est un peu devant le mur et on se dit que l’on avance, les études sont faites. On n’est pas dans le meilleur contexte. Dans le fond, la difficulté n’est pas de partager les enjeux, mais de partager les moyens et le tempo. C’est peut-être à cause de ce contexte qu’au niveau des industriels apparaît et ressort la complexité des choses. Les entreprises ont moins de temps pour se pencher sur l’appropriation de la réglementation. Nous avons quelque chose à faire pour aider les uns et les autres à mieux s’approprier les textes, notamment les entreprises qui sont les premiers acteurs à la source. On peut aussi essayer de les simplifier. Sur ce qui a été évoqué par Jacky Bonnemains, le sujet de l’impact post-accidentel était sur les radars depuis un certain temps. Jacky Bonnemains va piloter les travaux sur les déchets post-catastrophes. Nous sommes en train de nous les approprier et nous avons anticipé une circulaire. Désor mais, à chaque fo i s q u ’ i l y a d e g ro s i n c e n d i e s a ve c d e s métaux ou des déchets, il y a des réflexions et nous vérifions les retombées. Au-delà du cas particulier, cela illustre bien le besoin de vigilance et de vérification per manentes. Ce n’est pas que l’énor me montagne qui va vous tomber sur la tête, c’est peut-être la petite branche. C’est un peu le métier des uns et des autres d’être vigilants et attentifs à ces signaux. Sur ce qu’a dit Monsieur Forest, le Grenelle et les diver ses ta bles rondes ont per mis d’intégrer les syndicats de salariés, de plus en plus impliqués avec, pour certains, des découvertes de sujets plus ou moins avancés. Certains sujets sont plutôt bien connus des organisations syndicales, d’autres moins. Au niveau local, beaucoup de syndicats participent aux SPPPI. Il faut s’approprier les uns les autres. Nous avons dérivé de la table ronde des risques industriels un groupe de travail sur l’implication des salariés dans la prévention des risques. Ce groupe est animé par Jacques Vernier. Je vois des éléments intéressants de l’échange de tous les acteur s su r le Plan de prévention des endommagem ents des canalisations ou des réseaux. C’est multi-acteurs : ce sont les exploitants de réseaux, les maîtres d’ouvrage, les entreprises de travaux (la FNTP par exemple est très active) et avec une forte participation des organisations syndicales (du moins certaines) qui s’expriment sur le rôle des salariés dans ces différentes entreprises. Le plan ne satisfait peut-être pas encore beaucoup de monde, mais il prend en compte des aspects sur la for mation des acteurs qui encadrent les chantiers, condui- sent des engins font des cartographies... Ce qui me marque dans ce plan, c’est l’aspect organisation-responsabilité des uns et des autres ainsi que les outils pour faciliter cela. Ce n’est pas le tout de dire que le conducteur d’engins est responsable de ne pas percuter, il faut qu’il puisse être formé et il faut que l’organisation autour de lui donne les bonnes informations. Nous pouvons arriver à faire les choses, même si ce n’est pas toujours simple. Dans un certain nombre de cas, il faut que les uns et les autres s’approprient les sujets et les acteurs. I Jacques Vernier Je voulais dire mot en écho aux propos du représentant de la CFDT. Lors de la table ronde sur les risques industriels, l’implication des salariés dans la prévention des risques a été identifiée comme thème majeur. Les salariés qui travaillent dans une usine sont p a r fo i s l e s p r e m i e r s o b s e r va t e u r s d e c e q u i n e fo n c t i o n n e p a s . C e l a d i t , l e r ô l e d e s salariés dans la prévention des risques est un sujet difficile et lourd. Nous n’avons pas tranché cela dans les 33 mesures dont je parlais tout à l’heure et nous avons créé un groupe de travail post-table ronde industrielle pour étudier ce sujet. Le groupe de travail « implication des salar iés dans la prévention des r isques » s’est réuni quatre fois . Je l’ai per sonnellement présidé. Les agents de la Direction Générale du Travail étaient présents . Le Directeur Général du Travail luimême est venu avec Laurent Michel à l’une des réunions pour lancer ce groupe de travail. Nous avons préconisé des mesures concrètes . Par exemple, première mesure concrète : dans la loi Bachelot du 30 juillet 2003, les représentants du per sonnel et les comités d’hygiène et de sécur ité peuvent déclencher des exper tises en matière de sécur ité du travail. Malgré cette possibilité prévue dans la loi, cela n’était pas mis en œuvre car il manque des décrets d’application. La Direction Générale du Travail s’est engagée à ce que cette possibilité d’expertise devienne une réalité. Pour le reste, nous avons buté sur une difficulté majeure pour faire avancer nos travaux. La Direction Générale du Travail nous a dit qu’il y avait un grand chantier propre au monde du travail, concernant les instances représentatives du personnel. Vous savez qu’il y a les Comités d’Entreprises d’une part, les Comités d’Hygiène et de Sécurité et des Conditions de Travail d’autre part. L’agenda social est en train d’être discuté entre l’Etat, les entreprises et les syndicats. Il y aura une refonte de ces instances, voire une fusion. Certaines des mesures que nous proposons pour donner plus de pouvoirs au CHSCT en matière par exemple de droit d’alerte, de facilité d’horaires doivent donc attendre ces réfor mes. I Philippe Lefait L’Etat temporise… Cela donne un syndicat un peu frustré avec les réser ves exprimées tout à l’heure. I Jacques Vernier Nous aussi nous avons été un peu frustrés de cette épée de Damoclès. I Henri Forest Ce n’est pas une question de frustration de telle ou telle organisation syndicale, le débat ne se pose pas là. Il faut avancer. Les querelles entre les Ministères, c’est important mais il faut avancer sur le terrain. Sans parler de la façon de refaire les textes, il y a, peut-être, à texte constant, certaines pratiques qui peuvent 19 Plénière 1 évoluer par rapport au fonctionnement des organisations syndicales, en relation avec les employeurs et les inspecteurs des installations classées. Le dialogue entre organisations syndicales et inspecteurs des installations classées a énor mément progressé depuis quelques années. Mais ce n’est pas encore un dialogue évident. Les organisations syndicales ont davantage l’habitude de travailler avec les inspecteurs du travail, ce qui n’est pas encore le cas avec les inspecteurs des installations classées. Les syndicats sont des acteurs pouvant faire remonter des infor mations et être courroie de transmission dans un certain nombre de préconisations. A réglementation constante, quelque chose peut déjà évoluer. Les ser vices de la Direction des risques professionnels y travaillent. Nous ne demandons pas plus de réglementation sur les institutions représentatives du personnel. C’est peut être un objectif à atteindre, mais nous portons nos propositions davantage sur la façon dont on met en musique de ce qui se passe. I Philippe Lefait Nous avons le résultat à la question « comment percevez-vous la gestion des risques industr iels au cour s des deux der nières années ? » : 21 % ont voté « très positive », 57% « en progrès », 15 % « inchangée », 7% en recul. Qui veut commenter autour de cette table ronde ces résultats ? Monsieur Bonnemains, avez-vous un commentaire sur les 78 % pour le « très positif » et « en progrès » ? 8 votant sur 10 considèrent que ce qui a été fait est positif. Vous réfléchissez ? I Jacky Bonnemains 20 Non, j’écoute. Je ne suis pas un adepte de ces référendums flashs , mais j’en prends note, j’enregistre. La réaction me semble cohérente. À notre niveau, nous l’avons bien senti. Depuis deux ans , nous passons , les associations de façon générale, un temps fou en réunion inter ministér ielle, du CSIC, du Haut Comité sur le Nucléaire, de suivi des Comités opérationnels , du Grenelle de l’Environnement, du Grenelle de la Mer, en consultations diver ses avec tout le monde, avec le MEDEF, avec la CGT, avec la CFDT, avec les représentants des différents ministères… C’est plus que du débat, c’est de la concer tation, de la discussion, de l’empathie aussi à la longue. C’est la meilleure connaissance des points de vue et des contraintes de chacun. Que ce soit considéré comme un progrès ne m’étonne pas . C’est encourageant. Mais chacun voit encore trop midi à sa por te. En car icaturant, le MEDEF devrait prendre le bleu de chauffe de la CGT et de la CFDT et des autres syndicats pendant plusieur s semaines et la CGT devrait prendre le costume trois pièces des d i r e c t e u r s , d e fa ç o n à c e q u e c h a c u n a p p r e n n e n o n s e u l e m e n t à s e p a r l e r, m a i s a p p r e n n e à c o n n a î t r e l e s d i ffi c u l t é s . Ce serait bien que les gens du MEDEF viennent gérer France Nature Environnement ou Robin des bois pendant 15 jour s ou un mois . C e l a l e u r a p p r e n d ra i t t o u t e s l e s d i ffi c u l t é s q u e n o u s r e n c o n t ro n s . I l n ’ y a p e u t ê t r e p a s a s s e z d e vo l o n t é d e p a r t a g e r n o n s e u l e m e n t l e s c o n n a i s s a n c e s , ma i s l e s c o n t ra i n t e s d e c h a c u n . Le cœur de mon propos , c’est le lien social parce que le développement dura ble c’est l e l i e n . L a p r é ve n t i o n d e s r i s q u e s t e c h n o l o g i q u e s e t n a t u r e l s e s t u n fo r m i d a b l e o u t i l p o u r r e - t r i c o t e r l e l i e n s o c i a l , a ve c l e s collectivités, les exploitants, les ouvriers, les associations et les Ministères. I Philippe Lefait J’ai vu Monsieur Forest et Monsieur Chambon essayer de changer de costume, mais il y a un problème de taille. Les questions de la salle nous arrivent : Le nouveau régime d’enregistrement n’est-il pas un recul en matière de prévention des risques ? Quelle maîtrise d’urbanisation autour des nœuds d’infrastructures ? Considère-t-on les émissions de gaz à effet de serre comme r isque majeur et pr ior itaire, à pré venir, ou plutôt en second ordre ? Arrêtons-nous sur le régime de l’enregistrement. Quand parler ne suffit pas pour faire une politique, quand il faut avancer, on a un régime d’enregistrement. Qui veut dire un mot sur le régime d’enregistrement ? I Jacques Vernier Je ne suis pas l’auteur du régime d’enregistrement. Un certain nombre d’entreprises font partie de ce régime d’enregistrement e t n o u s c o m m e n ç o n s à vo i r a d o p t e r d e s arrêtés de prescriptions pour ces entreprises soumises à enregistrement. On peut en faire l’inventaire. Je comprends qu’il ait fait peur notamment au monde associatif, en tout cas à une partie du monde associatif, à cause des conditions dans lesquelles il a été crée. Vous savez que, c’est ici même, dans cette salle, que le Président de la République a annoncé le Plan de relance de l’économie. C’était en décembre 2008. La création d u r é g i m e d ’ e n r e g i s t r e m e n t fa i t p a r t i e d e s mesures annoncées par le Président de l a R é p u b l i q u e p o u r s i m p l i fi e r l e d ro i t d e s installations classées, pour qu’une partie des installations classées ne soit ni dans le régime de l’autorisation qui est un régime assez lourd, ni dans le régime de la déclaration qui est un régime peut-être trop facile, mais dans un régime inter médiaire. Le péché originel du régime d’enregistrement, dans l’esprit de certains, est de simplifier les choses et par conséquent de protéger moins l’environnement. J’ajoute deux choses : Les prescr iptions , les sécur ités et les protections imposées aux entrepr ises soumises à l’enregistrement sont les mêmes que celles imposées aux usines soumises à autor isation. C’est vér ifia ble maintenant car les arrêtés de prescr iptions pour les installations soumises à l’enregistrement sont publiées. C’est uniquement l a p ro c é d u r e q u i e s t s i m p l i fi é e . L e s p r e s criptions sont les mêmes. J’apprécie ce q u e d i t u n d e s c o l l a b o ra t e u r s d e L a u r e n t Michel pour définir à quoi s’a pplique l’enregistrement. Pour reprendre sa comparaison, e n m a t i è r e d ’ é l e c t r i c i t é , l e s r i s q u e s électriques sont connus de chacun. A c h a q u e i n s t a l l a t i o n é l e c t r i q u e , fa i t - o n une procédure lourde avec consultation de ceci et cela ? En matière d’électr icité, les normes s’imposent urbi et orbi à tout le monde. On publie ces normes et point barre. On peut réglementer un certain nombre d’installations classiques qui sont un peu toujours les mêmes, par l’édition de prescriptions de normes une fo i s p o u r t o u t e s , s a n s e n q u ê t e , s a n s d é b a t , c e l a s ’ a p p l i q u e p o i n t b a r r e . L e fa i t q u e ces nor mes soient éta blies , prescr iptives , i n t a n g i b l e s e s t p a r fo i s u n e a u s s i g ra n d e protection pour l’environnement, plus que des nor mes flexibles comme celles qu’on voit dans d’autres installations . Ce que je dis n’est plus une analyse p r o s p e c t i v e et théor ique, mais une analyse q u e l ’ o n p e u t v é r i fi e r a u v u d e s p r e m i e r s arrêtés de prescriptions pour ces installations soumises à l’enregistrement. 21 Plénière 1 I Bernard Chambon 22 Je partage assez largement ce que vient de dire Monsieur le maire de Douai. Mise à part les conditions dans lesquelles ce nouveau process a été mis en place, c’est typiquement le sujet auquel nous allons être de plus en plus confrontés : le principe du réalisme. Nous avons à la fois des exigences croissantes qui ne sont pas discutables sur le plan de la protection des risques, par ailleurs il y a le réalisme non seulement d’une situation économique mais aussi de la diversité des entreprises qui ont appliqué toutes ces prescriptions. Il va falloir trouver une for mule intermédiaire entre l’autorisation et la déclaration. Je crois qu’il y a 45 000 sites qui relèvent de l’autor isation, 450 000 de la déclaration et il y a 1 100 sites Seveso. Dans le cas de la chimie, nous sommes relativement peu impactés par le procédé d’enregistrement que l’on trouve pour le stockage des polymères par exemple. On est plutôt dans des régimes plus contraignants. Je suis plutôt à l’aise pour en parler mais cela me semble aller dans la bonne direction pour quatre raisons. Cela va dans le sens de la simplification qui est absolument nécessaire. Il est évident qu’un patron de PME n’est certes pas confronté simplement aux problématiques des risques et technologies, mais aussi à une complexité de la réglementation fiscale et sociale considérable. C’est facile pour un représentant d’un grand groupe comme le mien de dire « et bien on gère » parce que nous avons des experts et des équipes pour digérer toutes ces réglementations . C’est totalement différent pour un patron de PME. Or nous savons tous , et la cr ise l’a bien montré, à quel point ce tissu de PME est vital pour l’économie de notre pays. Dans la chimie, 80 % de nos adhérents s o n t d e s e n - t r e p r i s e s d e m o i n s d e 3 0 0 personnes et sont donc confrontées à ces problèmes. La simplification de la procédure et le raccourcissement dans les délais sont très positifs. Même la façon dont le système d’enregistrement a été conçu est positif : l ’ e x p l o i t a n t d o i t l u i - m ê m e d é m o n t r e r s o n aptitude à maîtriser son exploitation, ce n’est pas un tier s qui por te un jugement sur sa capacité à exploiter correctement. C’est intéressant parce que sur le plan pédagogique, c’est beaucoup plus engageant et responsabilisant pour lui. Cela per met aux équipes, en particulier la DGPR, de se concentrer sur les installations à plus haut risque, sans dégrader l’exigence en matière de prévention des risques technologiques. L’effort de prescriptions standardisées fait que, quel que soit le contexte, ces prescriptions seront appliquées. Cela me paraît être une bonne initiative. Elle est en cours de déploiement puisque la circulaire vient de sortir. Il y a un certain nombre d’arrêtés qui vont préciser dans chacun des domaines concernés, les prescriptions technologiques. Il serait intéressant dans trois ans de faire un bilan de ce processus, de voir s’il a effectivement bien rempli les objectifs pour lesquels il a été fait, sans dégrader le niveau d’exigence. Si cela dégrade le niveau d’exigence, il est évident que ce processus sera remis en cause tout de suite. Il y a encore des choses que l’on peut simplifier. Je prends juste un exemple : Le processus de refus tacite fait que si le préfet ne répond pas, c’est un refus. Cela pourrait être inversement un processus d’autorisation tacite. On peut encore améliorer les procédures, mais il faudra d’abord démontrer, pendant cette période de trois ans, que le processus ne dégrade pas le niveau d’exigence technologique. I Jacques Vernier Dans le régime d’enregistrement, non seulement les prescriptions sont aussi exigeantes, mais il y a une révolution administrative : l’entreprise doit justifier, point par point, qu’elle répond à ces exigences et comment elle y répond. Cela est une innovation complète . I Laurent Michel C ’ e s t u n e p ro c é d u r e p l u s s i m p l e e t p l u s rapide. Ce n’est pas la déclaration, c’est une procédure d’autorisation explicite avec une possibilité de refus. C’est une procédure où, s’il n’y a pas d’enquête publique, il y a quand même une infor mation du monde extérieur. Il y a effectivement l’encadrement de ces activités par arrêté ministériel, des prescriptions standards qui per mettent de r e v i s i t e r d e s s e c t e u r s q u i n ’ é t a i e n t p a s forcément prioritaires par exemple qui étaient réglementés dans chaque arrêté préfectoral, sans forcément qu’il y ait des bases. Cela per met finalement de rénover la réglementation. Le point extrêmement important que l’on trouve d’ailleurs dans d’autres textes, dans d ’ a u t r e s p a y s e u ro p é e n s , vo i r e d a n s d e s directives, c’est la possibilité de s’adapter aux circonstances locales, si besoin, s’il y a des enjeux environnementaux, que ce soit par rapport à la nature ou par rapport à la présence d’habitants, tout enjeu environnemental fort, peut permettre au préfet d’exiger le basculement en procédure d’autorisation, avec l’examen approfondi, l’étude d’impact et l’étude de dangers. Même si l’on reste dans une procédure d’enregistrement, on peut renforcer les prescriptions standards dans l’arrêté préfectoral d’enregistrement. En ter mes de contrôle par l’administration, dans nos orientations internes, en plus de la justification du re s p e c t p a r l ’ e n t re p r i s e , ils devront être co n t r ô l é s a ve c l a m ê m e fréquence minimal e q u e l e s i n s t a l l a t i o n s classées soumises à a u t o r i s a t i o n n o n p r i or itaires . On classe le s f r é q u e n c e s d ’ i n s p e ction minimale en fo n c t i o n d e s n a t u re s d e r isques . Les installa t i o n s c l a s s é e s s o u m i s e s à enregistrement seront contrôlées autant q u e celles à autor isatio n . U n c e r t a i n n o m b re d e secteur s vont y ren t re r, n o u s ve r ro n s c o m ment cela marche p o u r t i re r l e s re t o u r s d’expér ience. I Philippe Lefait Je prends une question envoyée par SMS sur la cinquantaine de PPRT approuvé. Combien de convention de financement tripartite ont été signées ? I Laurent Michel Pour l’instant il y en a, je crois, moins de cinq voire guère plus d’une. Le travail est en cours. Après le PPRT, il faut répartir l’addition. Le PPRT fixe les mesures foncières ou les mesures d’investissement de réduction des risques supplémentaires qui peuvent être prises en charge par la convention tripartite. Le mécanisme prévoit que l’Etat se prononce, « lance le jeu ». Les préfets consultent le ministère et ce denier dit une martingale bien connue « 25, 33 ou 40% de prise en charge de l’Etat ». Les travaux sont en cours car bon nombre de ces PPRT sont approuvés depuis fin 2009 ou 2010. Il s’agit pour les préfets d’élaborer la convention tripartite. C’est un des points faibles du dispositif. Il y a eu des réflexions dès le début, dès la loi de juillet 2003, sur la façon de boucler le financement. La convention tripartite à signer n’est pas un arrêté du préfet qui ordonne à un industriel de payer 37%, à l’Etat 37 et à la ville 26. Ce 23 Plénière 1 n’est pas un arrêté préfectoral qui fixe cela. Il y a donc eu des réflexions en particulier dans la table ronde « risques industriels » qui ont amené à valider l’idée suivante : en cas d’absence d’accord au bout d’un certain temps constaté dans les bonnes for mes par le préfet, on aurait une répartition forfaitaire par tiers, les collectivités ayant la répartition au prorata de la contribution économique territoriale perçue. Ceci nécessite une modification législative qui soit le vecteur de portage. La loi dans laquelle on va l’insérer est en cours d’identification. C’est un peu une des fr ustrations que j’ai : le but est tout proche et on est là, on va le toucher, mais il se dérobe un peu. Nous avons ces 56 PPRT a pprouvés aujourd’hui et nous allons en avoir beaucoup d’autres . Il faut que l’on arr ive vite à cette convention tr ipar tite, d’autant plus que ceux-là sont des PPRT petits et moyens . On règle l’urbanisation future, mais derr ière, il a des ha bitants et des activités économiques qui attendent. Certains nous disent que le PPRT étant approuvé, ils sont prêts à partir. Certains ne sont pas contents, mais d’autres comprennent qu’il y a des risques et que, pour leur maison et leur activité économique, ce n’est pas bien de rester. Quand payons-nous ? Si o n u n b l o c a g e d e c e t t e c o nve n t i o n , l e t r i p a r t i s m e n e j o u e p a s s o n r ô l e p a rc e q u ’ i l fa i t p e s e r s u r l e s r i ve ra i n s s o n i n c a p a c i t é à m e t t r e d ’ a c c o r d l e s p a r t e n a i r e s . Au d e l à d u m é c a n i s m e b a l a i q u i p e r m e t t ra i t a u t o r i t a i r e m e n t a u p r é fe t d e c o n s t a t e r l e s a c c o r d s e t d e l ’ i m p o s e r, i l fa u t q u e l e s discussions en cours débouchent vite à la s i g n a t u r e d e c e t t e c o nve n t i o n s u r t o u s l e s P P R T a p p ro u v é s . 24 I Philippe Lefait La troisième partie de ce débat est « demain, comment fait-on ? Comment avancet-on ? ». Nous avons une question de l’association ABRIS SEVESO : un PPRT induit des contraintes aux riverains en rien responsables, leurs biens sont dépréciés. Celui qui cause le risque ne devrait-il pas payer ? Voilà les préoccupations de la salle. Nous avons vu que la concertation et le débat, comme le disait Monsieur Bonnemains il y a une seconde, sont utiles et qu’il y a de bons résultats approuvés par 60 % des personnes dans la salle qui estime qu’il y a du progrès. Le troisième aspect des choses est « que peuton faire dans les deux ans qui viennent ? ». Nous avons fait le bilan des deux ans passés. Dans les deux prochaines années, que faiton ? On nous fait par venir cette question : « considère-t-on les émissions de gaz à effet de serre comme risque majeur et prioritaire à prévenir ou plutôt à second ordre ? ». I Laurent Michel Nous avons la volonté d’avancer en France, en Europe et à l’international mais nous ne maîtrisons pas encore totalement, nous seuls Français, le fait de faire aboutir tous les accords. La ligne directrice fixée par le Grenelle de l’environnement, c’est d’avancer de manière volontariste sur tous les secteurs, les réglementations thermiques par exemple. La loi est là et les décrets vont suivre. Divers dispositifs mélangent incitation et obligation pour faire faire des économies d’énergie. Une deuxième période des certificats d’économies d’énergie va toucher les vendeurs d’énergie et ainsi de suite. Nous essayons de travailler sur tous les secteurs. Pour le secteur industriel, le cadre européen des quotas des gaz à effet de serre, s’étale sur une période qui va j u s q u ’ à l a fi n 2 0 1 2 . Pa r ra p p o r t à l a précédente période, les quotas ont été p l u t ô t s é v é r i s é s e t c o n t i n u e n t à e n t ra î n e r c e t t e d y n a m i q u e d e p ro g r è s l a p a r t d e s entreprises. U n e a u t r e p é r i o d e a é t é vo t é e a u n i ve a u e u ro p é e n . E l l e a é t é a d o p t é e fi n 2 0 0 8 s o u s l a p r é s i d e n c e f ra n ç a i s e . E l l e va é l a r g i r l e champ des entreprises soumises à quotas. N o u s é t i o n s u n p e u t ro p s u r l a b a s e d e s émissions historiques. Les allocations que Monsieur Chambon doit suivre de près, d o i ve n t ê t r e p l u s s u r l e b e n c h ma r k d y n a m i q u e . Pa r ra p p o r t à d e s n o t i o n s , vo u s p ro d u i s e z t a n t d e e t i t s p o i s , vo u s a ve z d ro i t à t a n t d e C O 2 p o u r c e q u e vo u s respectez de meilleures techniques. Cela va r e c r é e r u n e n o u ve l l e d y n a m i q u e d e l a part des entreprises. Ce n’est pas simple selon les secteurs. Il y a des secteurs qui s o n t u n p e u p l u s e n d i ffi c u l t é q u e d’autres. Disons que les marges de progrès coûtent plus cher dans cer tains secteur s que dans d’autres . Le sujet du gaz à effet de serre, j’en ai a bordé quelques facettes , mais il en a d’autres , comme le développement des énergies renouvela bles . I Bernard Chambon Au cours de la période précédente qui va se ter miner en 2012, c’est-à-dire la période Kyoto, l’industrie, en particulier l’industrie chimique, a fait des efforts considérables de réduction de gaz à effet de serre. Nous avons réduit de moitié les émissions de gaz à effet de serre, alors que la production pour la même période a considérablement augmenté. Des efforts très importants ont déjà été faits. De plus, dans le nouveau schéma ETS européen, nous nous sommes engagés sur une base de moins 20 % réduction de gaz à effet de serre, ce qui représente (encore u n e fo i s d a n s u n c o n t e x t e d e r é a l i s m e é c o n o m i q u e ) u n e ffo r t t r è s i m p o r t a n t d e la part des entreprises, notamment des entrepr ises chimiques françaises . C’est un coût d’à peu près 1 milliard d’euros . C e r t a i n s n o u s disent que l’on pourrait aller a u - d e l à , j u s q u ’ à m o i n s 3 0 % . C ’ e s t l e g ra n d débat qui a lieu aujourd’hui. Nous, nous disons que, atteind re c e s 3 0 % s e ra e x t r ê mement difficile te c h n o l o g i q u e m e n t . Cela supposerait des ruptures technologiques fortes que nous n’avons pas la possibilité de faire, sauf encore à mettre beaucoup plus d’argent sur le sujet. On se retrouverait avec les contraintes économiques dont on parlait tout à l’heure. C’est bien que l’Europe soit exemplaire, il faut qu’elle soit suivie par les autres. L’Europe représente 17 % des émissions de gaz à effet de serre de la planète, mais si les pays émergents et ceux qui ont largement émergé comme la Chine ne sont pas dans des efforts identiques, nous nous pénaliserons pour notre industr ie. Nous avons toujour s dit que 30 %, c’est peut-être faisable, mais il faut des accords contraignants pour les grands pays concurrents et notamment les pays émergents. I Philippe Lefait Ce qui s’est passé en Hongrie peut-il arriver en France ? Monsieur Bonnemains avez-vous un avis sur la question ? I Jacky Bonnemains Ce qui s’est passé en Hongrie (je ne parle p a s s e u l e m e n t d e b o u e s ro u g e s , c e l a p e u t ê t r e d e s b o u e s j a u n e s , d e s s a u mu r e s , d e s bassins de décantations d’anciennes ind u s t r i e s m i n i è r e s ) , o u i , c e l a p e u t a r r i ve r e n F ra n c e e t c ’ e s t d é j à a r r i v é e n F ra n c e . 25 Plénière 1 Il suffit pour avoir une vision non pas exhaustive, mais synthétique, de consulter la base Aria du BARPI, de taper « digue », « barrage », « rupture de digues » : une vingtaine de fiches passent à l’international, dont 5-6 en France. Il y un site à Narbonne mettant en œuvre des matières radioactives, puis quelques autres dont je n’ai pas le souvenir précis. Dans le cadre de la directive sur la gestion des résidus des industries, des activités extractives, la France est en train de faire un inventaire de ses sites oubliés, voire abandonnés, qui sont des réser voirs de déchets et qui peuvent dans certains cas présenter dès maintenant, des signes de faiblesse, de fissures et de déversements sur des activités agricoles ou des lotissements, des habitations. Je pense à plusieurs sites, par exemple à ex-Metaleurop, parce que Metaleurop, ce n’est pas que dans le Nord-Pas-de-Calais. Il y a des mines Metaleurop dans les Alpes ou dans les Pyrénées. Je pense à des résidus d’extraction d’uranium ou de mines d’uranium. Le site des Bois Noirs dans le Massif Central présente des risques comparables de submersion et d’inondation. En pratique, oui, cela peut arriver en France. C’est arrivé en France. C’est arr ivé aux Etats-Unis . C’est arr ivé par tout. Là encore, je ne vais pas voler à son secour s , mais c’est un des domaines où le ministère avec les petits moyens qu’il a, est en train de travailler et de faire un inventaire. I Laurent Michel 26 Il y a plusieurs sites de stockage de ce type. Ce sont plutôt des anciennes activités arrêtées. Il y en a d’autres. Ce sont des activités qui tournent. Certaines, ce sont des déchets, d’autres, ce sont des effluents plus ou moins liquides. Nous avons déjà eu il y a quelques années, dans une autre organisation admi- nistrative, des recensements de l’ensemble de ces outils. Ils peuvent être réglementés soit par le Code minier, soit par l’installation classée à laquelle ils sont rattachés. Je ne jurerais pas que cela n’arrivera jamais parce qu’il ne faut jamais avoir cette prétention. Mais nous avons déjà pas mal d’actions, dans chaque site, suivi au travers de l’arrêté préfectoral. Nous sommes face à un risque non nul. Cela doit être sur nos radars, par mi les priorités, utilisées non pas comme u n e c o n t r a i n t e m a i s c o m m e u n e o p p o rtunité. C’est une directive qui demande des inventaires . Il se trouve qu’en s’appuyant sur d’anciennes équipes, des anciennes DRIRE qui contrôlaient les barrages hydroélectriques, nous avions commencé ce travail. Nous rassemblons dans les DREAL l’ensemble du contrôle des barrages qu’ils soient hydroélectriques ou non, des digues le long des fleuves ou l’eau en bord de mer qui nous pose certains problèmes que vous connaissez. Ces équipes vont être renforcées numériquement dans les DREAL et seront à disposition. Elles sont déjà à disposition de leurs collègues des inspecteurs des installations classées dont la compétence technique n’est parfois pas centrée sur cela. J’illustre l’intérêt de bien regarder le sujet sous toutes les facettes et de s’entourer des meilleures compétences et des regards différents. Tout n’est sûrement pas parfait et nous continuerons à faire les inventaires , des contrôles , si besoin des prescr iptions y compr is dans les sites qu’a évoqué Jacky Bonnemains . I Jacky Bonnemains Pas plus tard qu’hier, au siège de l’ADEME, différents sites menaçants ont été passés en revue. En par ticulier, celui de Saint-Lau- rent-Le-Minier dans le Gard présente des r isques impor tants complètement oubliés , de déver sements stér iles très très r iches en ar senic et en plomb, notamment dans un affluent de l’Hérault, du fleuve côtier. Nous nous sommes a perçus qu’il y avait des r isques de fragilisation de digues des bassins de décantation et de pollution de la Vis , affluent de l’Hérault, d’une manière massive. Il faut être attentif sur tout en pér iode de cr ue et d’inondation. Si les gaz à effet de serre sont, comme on le dit, comme on le croit, comme on le pense, responsa bles d’un dérèglement climatique et d’une multiplication des inondations et des cr ues , ces vieilles digues et vieux réser voir s doivent faire en conséquence, dans les années à venir, l’objet d’une sur veillance et d’une maintenance accr ue. Le problème, c’est qu’à Saint-Laurent-Le-Minier, il n’y a plus per sonne. C’était Penarroya, c’était Metaleurop. Il y a simplement l’Etat. Les industr iels sont par tis gentiment. I Philippe Lefait Nous avons justement une question SMS. Monsieur Bonnemains parlait des « petits moyens du Ministère ». Laurent Michel, avezvous les moyens de votre politique ? I Laurent Michel Cette question est toujours difficile. Sur les années 2008 à 2010, dans le contexte que l’on connaît du budget de l’Etat, il y avait déjà dans cette période des questions importantes d’arbitrage à faire entre les priorités. Le ministère a per mis à la Direction Générale de la Prévention des Risques, en particulier à ses ser vices déconcentrés, de créer de l’ordre de 155 postes en inspection des installations classées, une quarantaine d’autres au total sur d’autres risques comme le bruit, les canalisations etc, 90 postes environs sur les risques naturels dont 40 sur le contrôle des digues et barrages. Il y a eu une priorisation forte au niveau des moyens humains et financiers pour accompagner ce mouvement, y compris à l’ADEME, compétente pour les sites orphelins sur lesquels il faut inter venir. C’est malheureux de devoir inter venir, mais l’Etat assume ses responsabilités. Je ne sais pas si il y en a à Saint-Laurent-Le-Minier mais c’est juste à côté à Saint-Sébastien-d’Aigrefeuille où l’ADEME inter vient avec des crédits renforcés par le Grenelle de l’environnement, sur les sites de pollueurs orphelins. On est pass é d ’ u n r y t h m e d e 1 0 à 2 5 m i l l i o n s d ’ e u ro s par an. Nous avons été tout à fait entendu par nos ministres. Quoiqu’il en soit, nous avons des priorités. Nous nous devons d’être le plus efficaces possible, chacun dans nos organisations. Nous devons avoir un système d’infor mation nous per mettant de travailler efficacement. Il faut aussi, comme le disait la question, se déployer à la fois sur l’instruction technique, sur les contrôles et sur la concertation. On peut avoir le sentiment, en centrale ou au niveau local, que tout ceci est beaucoup, que c’est difficile à arbitrer. Sur l’aspect concertation et appropriation au sujet des PPRT, tout le monde a en tête que ce n’est pas qu’une étude technologique. Nous avons bien intégré cela. C’est en essayant de faire de la concertation en amont, d’expliquer en amont que l’on avance. Les moyens in fine sont ce qu’ils sont. Ils ont été renforcés. Comparé à ce que nous avions et à d’autres homologues européens, nous avons atteint un niveau d’une bonne moyenne des pays. Cela ne veut pas dire que cela ne soit pas complexe à gérer au quotidien, il faut 27 Plénière 1 toujours un peu se réorienter dans l’action. C’est cela aussi la réalité. I Philippe Lefait Parlons du transport des matières dangereuses, canalisations de transport de gaz. Quelles suites ont été données aux accidents sur venus sur des canalisations de transport de gaz ? Avance-t-on en la matière ? I Jacques Vernier 28 Je l’ai un peu dit tout à l’heure. Depuis que le Conseil Supér ieur de Prévention des Risques Technologiques inclut non seulement les installations classées , mais aussi les canalisations , nous avançons très for t sur une amélioration de la réglementation dans deux domaines . Laurent Michel et plusieur s autres inter venants ont déjà par lé de la lutte contre le vieillissement de cer taines installations . C’est vrai, pour le vieillissement d’installations industr ielles , d’usines , mais c’est vrai aussi pour le vieillissement des canalisations , qui seront soumises à r ythme plus impor tant à des inspections pér iodiques , pour voir comment elles vieillissent. Des textes impor tants sont en cour s de finalisation, nous les avons discuté ces dernier s mois , sur les r isques , la prévention des r isques d’endommagement des canalisations par les engins de travaux publics . Par exemple, avant de faire les travaux publics , dans un cer tain nombre de cas et pour cer taines canalisations , nous prévoyons de faire une visite de recollement sur le terrain entre l’exploitant de la canalisation et l’entrepr ise de travaux publics pour voir exactement ce que l’on va faire. Pour les entrepr ises de travaux publics , elles devront respecter un guide de bonnes pratiques obligatoires pour faire les travaux de telle ou telle manière. Il y aura un cer tificat de for mation pour les inter venants et conducteur s de travaux qui, lor squ’ils s’a pprocheront des canalisations , devront avoir subi cette for mation cer tifiée. I Jacky Bonnemains De même que la sous-traitance est un fléau en matière de sécurité et de prévention des accidents dans les usines, c’est un grand risque dans l’industrie des travaux publics où il y a une grande fragmentation des responsabilités, des sous-traitants et des intervenants encore moins identifiée que dans les usines. A notre avis, elle est fortement responsable de la méconnaissance des problèmes, des risques et de la méconnaissance des localisations des canalisations de transport de matières dangereuses (gaz, hydrocarbures et autres). Questions de la salle I Daniel Vig ier, Fédération Régionale Auvergne, Nature et Environnement D a n s l e s e n t r e p r i s e s à r i s q u e s , l a d é t e rmination des scénarios d’accident, de l a p ro b a b i l i t é e t d e l a g ra v i t é s o n t fa i t s par l’exploitant, sous la super vision de la D R E A L . N e c ra i g n e z - vo u s p a s q u ’ i l y a i t une partialité dans cette détermination ? I Laurent Michel C’est la qualité de ses analyses que ce soit celles des études de dangers ou les études d’impacts. Il est important de revenir à la base de la responsabilité de l’exploitant dans la prévention des risques chroniques ou accidentels. Rappelons que c’est lui qui connaît son installation. Bien entendu, nous devons avoir un regard critique au sens du questionnement, pas pour le plaisir de critiquer l’industriel, sur la conformité de ses analyses de dangers aux bonnes règles de l’art. Nous avons grandement encadré et facilité cela en travaillant avec des fédérations professionnelles, des experts comme l’INERIS ou des cabinets d’ingénierie, sur les principaux risques que l’on doit identifier dans un GPL etc. Il y a aussi la lecture critique par l’Inspection des Installations Classées, qui a été fortement renforcée au niveau des risques technologiques. Il est possible de faire appel à d’un regard extérieur, la tierce expertise. Certains parfois disent qu’elle a été trop souvent utilisée ou de manière non ciblée, mais nous y tenons car elle permet de regarder tel ou tel point le scénario, même s’il n’y a pas que le scénario qui compte, il y a des mesures de prévention. C’est le système que l’on a : élaboration par l’industriel des analyses de risques, propositions de mesures de maîtrise des risques, regard critique, possibilité de tierce expertise, et in fine, cela nous est arrivé, y compris sur des PPRT, de dire « non. Vous avez oublié tel scénario. Pour nous, il existe. Cela fait une zone de tel ordre de grandeur. Vous estimez que tel risque n’existe pas. On pense qu’il existe et qu’il faut mettre telle mesure de prévention ». N’oublions pas cette faculté de trancher qu’a le préfet sur proposition de ses services. Tout cela est en progrès permanent. Cela ne doit pas être non plus simplement de l’analyse de scénarios, cela doit servir à nourrir les investissements, la maintenance et l’identification des points critiques. Tout cela est un outil. Ce n’est pas pareil qu’il y a 25 ans, quand on découvrait tous cette démarche. Nous avons fait de grands progrès dans ces analyses et nous veillons à ce qu’elles donnent une qualité pas seulement du document de l’analyse, mais pour l’action. Robert Trouvilliez, Représentant de Béthune Nature et secrétaire général de Nord Nature Je représente une association locale, Béthune Nature et je suis en même temps secrétaire général de Nord Nature. En vous écoutant, on a l’impression que les associations ne sont plus utiles puisque tous les risques sont neutralisés. En fait, nous, on aimerait bien avoir les Assises Nationales de la Suppression des Risques. Deuxième chose : il y a 30 ans, l’association Nord Nature existait déjà depuis 10 ans pour lutter à la fois contre les pollutions et les aberrations concernant la nature. A l’heure actuelle, les associations ont encore beaucoup de grain à moudre. Je cite par exemple, l’usine de RECYCO, toute neuve. Les associations ont dû monter au créneau pour supprimer la pollution intolérable au niveau des poussière à Isbergues. C’est une honte parce que c’est une usine qui vient de s’installer. Peut-on penser que l’on manque de prévisibilité quand on va construire une usine électrique qui va déverser 1,4 millions de tonnes de CO2 près d’Arras ? Peut-on admettre cela ? Ne peut-on pas changer de technologies pour avoir des usines propres, même pour les usines en train de s’installer ss? J’aurais encore beaucoup de questions, mais j’arrêterai là. I Jacky Bonnemains Un associatif répond un associatif. Les Assises des suppressions des risques, je n’y crois pas, surtout depuis que j’ai lu qu’un avion de chasse indien s’était crashé sur un camion d’hydrocarbures sur une autoroute entre Bombay et je ne sais quelle ville en 1984, depuis que j’ai lu un dossier sur les déchets dans l’espace, depuis que j’ai appris qu’un bateau allemand avait failli couler en plein océan Pacifique après avoir reçu des dé- 29 Plénière 1 bris de satellites. Les risques et les sources de risques sont tellement innombrables que les combinaisons sont tellement infinies, que la notion de prévisibilité dont parlait tout à l’heure notre ministre, est effectivement très difficile à cerner. La suppression des risques, c’est impossible. Sur la pollution des usines neuves, récentes ou portées par le privilège accordé aux activités de recyclage, c’est une excellente question. Ce n’est pas dans votre région Monsieur, mais en Seine Maritime, il y a une usine que France Nature Environnement, Robin des bois et d’autres, ont dans le collimateur depuis maintenant une vingtaine d’années, qui s’appelle CITRON, Centre International de Traitement et de recyclage des Ordures Nocives. Cette usine, financée par des intérêts suisses, prétend depuis une quinzaine d’années recycler à tout va, tout, l’impossible, l’inutile parfois, les déchets électroniques, les DEEE, les lampes au mercure, tout ce que l’on peut imaginer de moderne comme déchets. Cette usine a été victime en 10 ou 15 ans de cinq incendies au moins. Le dernier a eu lieu la semaine dernière et, semble-t-il, lui à porter un coup mortel, mais c e n ’ e s t p a s s û r, l a b ê t e v i t e n c o r e . L e s industr ies du recyclage, les industr ies de la prétendue moder nité, peuvent être extrêmement dangereuses et contrep r o d u c t i v e s p o u r l ’ e n v i r o n n e m e n t . Il y a des innovations perçues comme des progrès qui ne sont absolument pas maîtrisées et qui peuvent déclencher des risques non-anticipés et des pollutions graves. On pense bien évidemment aux nanotechnologies. I Serge Milville, Association Mazingarbe Demain 30 J’apprécie le développement qui se dé- roule, c’est d’un très haut niveau. C’est utile. C’est nécessaire. Mais je voudrais que l’on revienne sur quelque chose qui est un plus terre à terre. Je représente l’Association Mazingarbe Demain, association locale de Mazingarbe, c’est l’association Citoyenneté 2000. Nous sommes concernés. J’ai travaillé sur le premier PPRT signé en France. C’est peut-être à ce PPRT que l’on faisait allusion tout à l’heure en disant que la première convention financière tripartite a été signée. I l s e m b l e ra i t q u ’ i l n ’ y e n a i t p a s d ’ a u t r e s actuellement. Premièrement, quand nous avons commencé à travailler sur le PPRT, je me souviens que le sous-préfet de Lens, Monsieur Reuter nous a dit qu’il fallait s’adapter aux risques. Je suis désolé, ce n’est pas inscrit dans la Constitution. Quand on y réfléchit un peu et que l’on analyse la situation actuelle, on nous demande de nous adapter à tellement de choses, depuis le risque au traitement des ordures ménagères en passant par les précarités. On est submergé d’obligations d’adaptation et cela finit par faire beaucoup. On n’en peut plus. Bientôt on va craquer. Deuxième chose, il y a une contradiction en ce qui concerne le PPRT. Au début, immédiatement après Toulouse, dans notre commune, à cause des deux sites Seveso, on a laissé entendre qu’il faudrait envisager un plan de protection qui couvrirait peut-être environ 80% du territoire de la commune. Puis, j’ai suivi, j’ai essayé de comprendre les études très intéressantes , ce qui n’était pas toujours facile avec les grands spécialistes du ministère et de la DREAL, des ingénieurs qui répondaient toujours à nos questions. Nous nous sommes aperçus que le PPRT, dans sa conclusion, ne couvrait plus que le territoire occupé par les usines. Comme si, en cas de risques majeurs, d’un seul coup, le tout s’arrêtait aux palissades et aux grillages autour des usines, un peu comme pour Tchernobyl. La contradiction, elle est dans le fait que le plan prévisionnel d’inter vention, lui prend encore en compte les risques majeurs. Le risque majeur est encore considéré comme pouvant se produire, avec des autocar s venant tous azimuts, sortant non seulement des usines, mais aussi du territoire de la commune et qui concernent les communes voisines. On comprend parce que le risques majeur, quant il s’agit de définir le PPRT, c’est tellement rare, c’est tellement exceptionnel qu’on le met à la corbeille. Or, à Toulouse, on ne l’a pas mis dans la corbeille. Les riverains sont les victimes du post-PPRT. Tout ce que l’on a dit jusqu’alors, c’est très bien mais maintenant que nous avons le PPRT et qu’il est signé, figurez-vous qu’une route se trouve dans le périmètre de protection du PPRT. Alors, cette route est maintenant interdite à la circulation. Les gens qui empruntent cette route, très nombreux, à voiture, à bicyclette ou à pied, sont envoyés sur des routes qui elles sont très dangereuses. Pour la route en question, il n’y a jamais eu d’accident. Maintenant interdite à la circulation, on envoie les gens sur des axes routiers extrêmement dangereux. Depuis trois ans que le PPRT est signé, nous n’avons pas de solu tion, nous attendons . Je suis invité demain à la sous-préfecture de Lens , pour discuter avec le Maire de Mazingarbe, le Président du Conseil Général, un représentant de la DREAL pour voir comment pallier cette interdiction de circulation. Dernière chose, un récent article de presse sur la Fédération Nord Environnement ou la Fédération Nationale, évoquait que le riverain est quelque part, passez moi l’expres- sion, le dindon de la farce. Pour améliorer la sécurité de son habitation, il faut qu’il paye les travaux, alors qu’il paye déjà en tant que contribuable dans la commune puisque dans la convention tripartite, la collectivité est partie prenante pour payer. Je n’arrive pas saisir. Je n’arrive pas comprendre. Il n’y a pas de logique. Les installations sont venues se mettre à côté des habitations. On subit le risque. On subit les pollutions. Et il faut payer, payer… C’est encore une contradiction. I Alain Rouzies, Président de l’UFC Que Choisir de Haute-Nor mandie, membre de divers CLIC et membre du CODERST Mon témoignage est aussi une interrogation. Nous avons sur notre territoire à Rouen une usine qui s’appelle Grande Paroisse Normandie. Cela fait écho à AZF. Nous avons constaté une façon d’appréhender les risques à l’intérieur de l’usine et évidemment avec des risques de débordements à l’extérieur, tout à fait peu prévoyante. GPN a été contrôlé il y a un an à peine par les inspecteurs de l’ex-DRIRE qui ont constaté qu’une partie de l’usine risquait de s’effondrer sur un rack d’ammoniac avec tout ce que vous pouvez imaginer autour. Si cette fissure apparue dans cette tour était récente, nous aurions compris. Mais cette fissure datait d’une dizaine d’années. Nous sommes dans une usine qui a connu indirectement dans nos groupes, une catastrophe qui représente un exemple national. Et on continue à ne pas avoir cette culture de prévention quand un dysfonctionnement se présente. Le dysfonctionnement n’est pas tombé du ciel. Il a été constaté. Les syndicats ont joué le jeu. Ils ont fait leur travail d’alerte. Il sera intéressant qu’on arrive à des conclusions qui dépasseront les petits problèmes de for me sur la représentation 31 Plénière 1 des salariés, comité d’entreprise ou CHSCT, peu importe. Il faut donner dès le départ un droit d’alerte pour les salariés. Les salariés, il y a trois ans ou quatre ans, ont demandé des expertises, ils ont alerté. Rien n’a été fait, jusqu’au moment où la DRIRE a mis le paquet et a fini par obtenir que quelque chose soit fait. Mais regardons le raisonnement qu’il y a derrière. C’est le raisonnement qui fait que sur Rouen, juste après Toulouse, on a enfin réussi à trouver une solution au problème de ce fait d’ammoniac énor me qui menaçait l’ensemble de l’agglomération sur une installation qui avait eu une autorisations de la loi de 1976… J’alerte sur l’idée que le risque est déjà à l’intérieur de l’usine et vous en êtes responsable. Ma deuxième remarque est relative à CITRON et à la responsabilité de l’Etat. J’ai assisté au CODERST où l’autorisation d’extension de l’usine CITRON a été donnée. En face de nous , Monsieur le Préfet de région, qui n’a pas un rôle tout à fait anodin au niveau du ministère, nous a mis la pression pour dire « oui » à ce dossier Il a pris à parti les associations parce qu’elles essayaient de voir comment cela se passait réellement dans cette entreprise. C’est inadmissible. Nous ne voulons pas la mort du pécheur mais nous tenons à ce que le pêcheur s’amende. Ce n’est pas ce qui s’était passé puisqu’on arrive à la conclusion actuelle, la mise en cause de responsabilité de l’Etat en l’occurrence. I Philippe Lefait 32 Je voudrais que l’on conclue sur ce qui vient d’être dit. Nous avons tous bien perçu la masse de concer tation qu’il y avait encore à imaginer pour que chacun puisse faire le miel de son combat, notamment s’il est associatif. I Bernard Chambon Je ne peux pas répondre à tout ce qui a été dit dans le détail, d’autant qu’il y a des exemples très concrets qu’il faudrait connaître pour pouvoir en par ler. Sur le plan d e s p r i n c i p e s , l a g e s t i o n d e s r i s q u e s , c o n t ra i r e m e n t à c e q u e p e n s e l e d e r n i e r i n t e r l o c u t e u r, n ’ e s t p a s s i m p l e m e n t d e l a gestion. Il y a un sens de responsabilité visà - v i s d e n o s c o n c i t oye n s e t l a r e s p o n s a bilité sociale d’une entreprise. La gestion du risque, c’est aussi une gestion économ i q u e . S i j a ma i s u n e c a t a s t ro p h e d u t y p e d e c e l l e q u e vous évoquiez se produisait, ce serait une catastrophe pour l’entreprise, y compris sur le plan économique. Intégrer ces risques fait absolument partie du management et de la gestion de l’entreprise. Les Conseils d’administration qui, il y a quelques années se consacraient pour ces sujets, aujourd’hui font des analyses très précises, y compris des risques techniques et industriels. Le plan de la lutte contre le vieillissement des installations répond en partie aux problèmes que vous soulevez. Puis, je rappelle que les CHSCT, depuis quelques années, ont le droit d e fa i r e a p p e l à d e s e x p e r t i s e s p o u r c e s situations. Dernière chose, pour faire prendre conscience de ce que représente les efforts que font les industriels : deux tiers des investissements en France dans l’industrie chimique sont des investissements de maintenance et de mise en conformité hygiène-sécurité-environnement. Cela pose d’autres problèmes par rapport aux investissements de croissance, mais cela montre la réalité d’un effort continu sur de nombreuses années. I Jacky Bonnemains L’usine Grande Paroisse dont Monsieur Rouzies parlait à côté de Rouen, fait partie des dinosaures de l’industrie européenne et française. Comme chacun sait, les dinosaures ont beaucoup de difficulté à s’adapter aux ères modernes. Autant le vieillissement du personnel n’est pas forcément un handicap -puisque le personnel quand il a beaucoup d’expérience dans une entreprise, devient une véritable mémoire, qui ne devrait pas quitter l’usine sans avoir à se débriefer en quelque sorte-, autant le vieillissement des canalisations, des bacs, des vannes et autres infrastructures est un véritable danger. Je ne crois plus à l’argumentation du représentant de la chimie qui dit « vous savez un industriel, il est particulièrement conscient des risques pour son image et pour ses finances ». Quand les usines arrivent à un âge de retraite, les industriels les laissent sans véritablement plan de renouvellement et de maintenance, en sachant bien mieux que les ouvriers à quelle date elle va fermer. Après ils s’en lavent les mains. C’est à l’Etat et aux riverains de se démerder avec des sites qui ne sont plus actifs mais qui restent dangereux, parce que ce sont des sites pollués. I Jacques Vernier J’apporte deux réponses aux deux questions posées. La première c’est que précisément, le Plan anti-vieillissement se traduit par des arrêtés en cours de discussion et d’élaboration. Le Plan anti-vieillissement des usines d’une part, des canalisations d’autre part, vont permettre de répondre à cette problématique de fissure non découverte, par exemple. La deuxième chose que je voudrais dire à la personne de Mazingarbe, c’est que l’on avait bien identifié dans les Assises précédentes et dans la table ronde sur les risques industriels, le fait que les habitants devant faire des travaux chez eux, n’étaient pas suffisamment indemnisés. C’est la raison pour laquelle le crédit d’impôt très faible (de 15%) a été porté à peut-être 36, vo i r e 4 0 % . C ’ e s t a u s s i p o u r c e l a q u e l e s collectivités locales et les industriels ont accepté de participer aux travaux qui seront faits chez les habitants. Nous avons beaucoup progressé par rapport à il y a quelques mois. I Laurent Michel A propos du vieillissement et de la maintenance, on peut avoir des tas de cas : le défaut non détecté pour faute d’organisation ou faute de technique parce que c’est des choses que l’on n’avait probablement pas identifiées. La science progresse encore, le défaut détecté. On peut avoir décidé de détecter ce genre de défaut et on n’y est pas arrivé parce qu’il peut y avoir tel genre de problèmes ou parce que l’on a mal priorisé. Il peut y avoir des cas que j’estime minoritaires, où on décide peut-être de ne pas faire ou de faire plus tard. Cette question n’est pas univoque. On la regarde parce qu’on a lancé un plan en dépit des années, elle existait avant, elle existera après. Il ne faut pas non plus qu’elle masque, je pense, les progrès accomplis. Quand j’étais plus jeune, j’avais un patron qui a débuté sa carrière dans le couloir de chimie à Lyon, à la DRIRE, le ser vice des mines de l’époque. Il me disait qu’une nuit par semaine il allait faire une enquête d’accidents. On en est, fort heureusement, plus tout à fait là. Mais on a des sujets évolutifs complexes où la vigilance, chacun à son rôle, c’est vrai, moi c’est mon métier et je suis persuadé que sans réglementation et sans contrôle, cela avancerait moins bien. Je suis aussi persuadé que sans industriel motivé, ce serait aussi beaucoup moins bien. 33 Grand témoin Patrick Lagadec, Directeur de recherche à l’Ecole Polytechnique 34 J’ai bien conscience de l’ampleur du champ à couvrir en matière de sécurité industrielle, des difficultés à surmonter, de débats à engager et poursuivre. La maîtrise des risques exige un travail patient, multiforme, ouvert, inscrit dans la durée. Pourtant, je vais encore ajouter d’autres défis. Je le fais dans la fonction et la responsabilité qui sont les miennes, à savoir une exploration continue des territoires encore mal cartographiés qui se situent par-delà ces horizons, où la statistique n’a pu s’établir, où les règles du jeu et « best practices » sont encore inexistantes. C’est d’autant plus crucial que ces défis se rapprochent désormais à des vitesses en accélération croissante. Bien entendu, ce type de regard n’a pas à se substituer au premier, plus classique – il vient comme une exigence supplémentaire, de plus en plus vitale car tout défaut d’anticipation a des coûts de plus en plus colossaux. La démarche est ici assez différente de nos logiques conventionnelles, si à l’aise dans nos cultures. Le point essentiel n’est pas d’avoir la cartographie définitive et la somme des bonnes réponses. Il s’agit d’abord d’avoir la faculté de questionnement hors des scripts habituels, une faculté suffisamment entraînée pour qu’elle puisse nourrir à tout moment la capacité à inventer des chemins non tracés lorsque le « hors cadre » fait irruption. Au nombre des questions de départ à toujours entretenir, il y a par exemple celles-ci : Quels sont les nouveaux types de risques ? Quels angles morts : quelles hypothèses de travail spontanées nous empêchent de détecter les signaux ? Quels sont les univers dans lesquels nous devons travailler aujourd’hui ? Quelles conditions générales des contextes dans lesquels s’inscrivent nos activités peuvent-elles profondément transformer la maîtrise des risques, le pilotage des crises ? J’ai trouvé cette photo à Chamonix : « Attention ! Vous quittez la zone balisée ». Autrement dit, pour nous ici : « Attention, à partir de maintenant, nous n’avons plus la carte ». Et il semble bien que, de plus en plus souvent désormais, nos grands systèmes et organisations se retrouvent démunies de repères, avec pour seule défense : « Que vouliez-vous que l’on fît, c’était exceptionnel ! ». Le problème est précisément que la mutation des contextes nous conduit à devoir faire face, de plus en plus souvent, à cet exceptionnel permanent. Et comme ce type de constat ne cesse de se reproduire, de façon toujours plus fréquente, il y a lieu de s’interroger : et si nous étions, effectivement, mal préparés à affronter ces nouveaux terrain de risques et de crises ? C’est précisément le constat de la commission d’enquête de la Chambre des Représentants aux Etats-Unis, qui écrit en conclusion de son rapport sur Katrina : « Mais pourquoi apparaissonsnous toujours en retard d’une crise ? ». Le piège est ici de s’enfermer dans les réponses du passé – plus de statistiques, plus de plan, plus de communication, plus de centralisation, etc. La première exigence est de re-cartographier les problèmes. L’expertise systématique des cas émergents donne déjà quelques points de repères. L’hypercomplexité. Ainsi de Katrina. C’est d’abord un cyclone – le vent. Mais ce n’est pas là l’essentiel. Il faut rapidement comprendre que l’eau est le facteur critique, avec non pas un débordement des levées, mais leur destruction, ce qui est qualitativement différent. Et tout s’enchaîne et s’empile : rupture totale de tous les réseaux vitaux, à commencer par les communications (l’électronique fait très mauvais ménage avec l’eau, ce qui constitua une surprise majeure sur le terrain) ; une trentaine d’accidents dans des installations type « Seveso », avec un épandage de produits pétroliers à la hauteur du tiers de l’Exon-Valdez ; des problèmes de maintien de l’ordre difficiles à qualifier (et qui ne rentraient pas dans les schémas habituels, qu’ils fussent ceux des autorités ou ceux des sociologues des catastrophes) ; des populations abandonnées voire hors écran radar des autorités (mais sur les écrans de télévision dans le monde entier) ; des effets-dominos impressionnants avec par exemple le risque de black-out énergétique sur toute la côte Est des Etats-Unis ; des effets stratégiques comme l’interrogation sur la possibilité de récupérer le Mississipi et le port de La Nouvelle-Orléans… Bref, voici pris à revers notre culture de gestion des catastrophes, le plus souvent (même si on s’en défend toujours) fondée sur des catégorisations d’événements bien spécifiques. Soudain, voici l’hypercomplexité à l’œuvre, qui laisse souvent impuissant. Le « toutes choses égales par ailleurs » ne fonctionne plus. L’inconcevable. Ainsi des Tours Jumelles, le 11 septembre : elles qui étaient tenues pour indestructibles ; elles dont le plan d’urgence stipulait que le seul danger serait une évacuation générale, les voici bientôt qui s’effondrent. Ainsi de l’anthrax, en 2003, lorsque l’on découvre que ce n’est pas tant la lettre contaminée qui pose problème que les machines de tri postal, qui expulsent les spores, et opèrent une contamination générale – « Leur arme, c’est mon réseau ». Que s’ajoute à cela des comportements sociaux aberrants, avec dépôts de milliers d’enveloppes contenant de la poudre blanche, et le tableau devient rapidement ingérable dans les codes habituels. Surtout si les réponses sont totalement contradictoires, volatiles, incompréhensibles, mais médiatisées – avec le nombre des cas de fausses lettres piégées augmentant comme le carré du nombre de reportages télévisés. Le mélange des genres, les interactions surprises. Ainsi cet été de ces feux de tourbes qui font mauvais ménage avec les centres nucléaires russes. La vitesse. Ainsi de ces épidémies qui traversent les océans à la vitesse du jet. Ou, comme on l’a vu voici quelques mois à Wall Street, un problème informatique qui, en 7 millisecondes fait dérailler le système, qu’il faut rapidement débrayer – ce qui, heureusement est possible dans ce domaine, mais ne le serait pas dans d’autres. Les failles sociétales. C’est sans doute une question de plus en plus critique. Des « ondes de mort » incompréhensibles qui conduisent aussi bien à des déchainements de terrorisme, à des ruptures générationnelles, à des cohortes de suicides, à des effacements de liens sociaux jusqu’alors tenus pour donnés. On se retrouve dans un environnement extraordinairement surprenant, que l’on ne sait plus comment aborder. A la Nouvelle-Orléans, on a remarqué que les seuls à pouvoir un peu communiquer étaient les jeunes – ils parlent SMS couramment, le seul vecteur qui survivait encore. Sur tel front de banlieue avec voitures en feu, on tente de faire une leçon civique sur le thème « Il n’est pas bien de brûler des voitures, mettez-vous à la place du propriétaire ». Si la réponse vient : « N’importe quoi, c’est la mienne ! », c’est soudain l’incompréhen¬sion totale, la plongée dans un autre univers. On sait comment « effacer » un aéroport européen, mais on n’a rien de prêt pour un nuage affectant l’ensemble du continent ; et soudain l’expertise se montre bien ténue : on sait des choses sur les cendres volcaniques, mais que sait-on sur ces cendres précises ? Le temps que l’on repose convenablement la question, que l’on s’y retrouve dans les amas d’organisations à « coordonner », il y a déjà des millions de personnes bloquées aux quatre coins du monde, et les autres hubs mondiaux qui se voient asphyxiés – ce n’est plus une question de Business Continuity sur une plateforme, c’est le modèle de fond qui pose problème ; et de cultures organisationnelles par 35 Grand témoin 36 trop décalées pour rester en capacité d’action. Certes, on peut tenter des jokers et des faux-semblants. L’argument désespéré est celui de l’exceptionnel : « C’était véritablement exceptionnel ! ». Le problème, on l’a dit, c’est que lorsque l’exceptionnel frappe tous les mois, chacun finit par se demander si l’exceptionnel est bien dans l’événement déstabilisant ou dans les moments de relative stabilité. L’autre argument pavlovien est de tout rejeter sur le défaut de communication. Il aurait suffi de « communiquer ». Là encore, on sent bien qu’on est loin du but, et l’argument de l’insuffisance de communication risque bientôt de devenir un facteur de basculement dans la perte de confiance. Car chacun sent bien que le décisif n’est pas là. En réalité, nous sommes aux prises avec un monde du risque et de la crise très différent de celui que nous avons connu. Un monde qui suppose d’autres grilles de lecture, d’autres registres d’anticipation et de pilotage, d’autres formes de préparation et d’enseignement. Non à la place des références précédentes, mais en supplément – en dépit de toutes les contradictions que cela impose. Quelques points de référence peuvent être plantés comme premiers pitons-repères. 1. Le questionnement : Ces nouveaux univers n’appellent pas d’abord à réunir toutes les réponses, pour ne pas être surpris, mais bien à ouvrir toutes les questions difficiles, pour s’habituer à naviguer en terre inconnue. Et cela bien entendu, non pour une esthétique de l’esprit mais bien pour conduire des démarches opérationnelles tout à fait concrètes. Et ce questionnement doit d’abord s’exercer sur les angles morts, non sur les sujets tenus hors agendas, ne pouvant pas faire l’objet d’examen, encore moins de débat ouvert. 2. L’expertise : Certes, il est bon d’avoir des connaissances solides. Mais en terrain non conventionnel, le plus crucial est d’avoir des experts entraînés à clarifier au plus vite les limites des connaissances à disposition, et à partager cette expertise de l’incertitude et plus encore de l’inconnu. Ce qui doit changer et la pratique de l’expertise et la relation experts-décideurs. 3. Une autre culture du signal : Nous sommes habitués à considérer que la recherche de signaux faibles est la pointe avancée de l’excellence. C’est exact pour les domaines connus : comment détecter le plus précocement les signaux connus avant qu’ils ne deviennent massifs et difficiles à traiter. C’est piégeant pour les domaines émergents : il ne suffit plus de mettre un amplificateur devant le signal pour pouvoir le mesurer comme habituellement ; le défi est de pouvoir détecter des signaux « aberrants », « sauvages », non repérables avec nos radars habituels. 4. De nouvelles démarches en pilotage des crises : Notre culture de crise est le plus souvent ancrée sur l’idée que l’événement appelle d’abord l’application de plans bien définis, cela protégeant de la surprise. Notre surprise désormais est que les crises ne rentrent plus dans les plans préparés. Le cas du H1N1 est sans doute le plus emblématique à cet égard. Et l’on entend rapidement les acteurs se désespérer : « La crise refuse de rentrer dans les plans ! que voulez-vous qu’on fasse ? ». La rupture à effectuer est d’ordre intellectuel et opérationnel. J’ai ainsi plaidé pour le développement de la démarche de Force de Réflexion Rapide. Un groupe de personnes hybrides, entraînées à réfléchir et proposer sur « feuille blanche », en appui aux décideurs notamment, à partir de quatre interrogations de base : 1. De quoi s’agit-il ? 2. Quels sont les pièges à éviter ? 3. Avec quelles cartes d’acteurs va-t-on travailler ? 4. Quelles sont les quelques initiatives clés que l’on peut engager pour injecter sens, confiance, capacité dans le système en grande difficulté, en perte d’ancrage ? En terrain refusant viscéralement le questionnement, ce type de démarche est inacceptable et on le mesure jour après jour. 5. De nouvelles alliances : Nous avons été habitués à considérer que les populations devaient être « rassurées » – « Tout est sous contrôle ». Nous avons, surtout pour les éventualités lourdes, été habitués à prôner la centralisation hiérarchique. Avec, tout de même, quelque information pour assurer le besoin d’information, devenu politiquement sensible. Il va nous falloir considérer, de plus en plus, des approches bien plus multiples, ouvertes, granulaires, mobilisant des dynamiques bottom-up qui vont devenir vitales. Mais sans démission des étages supérieurs. Les nouveaux moyens de communication Internet ont d’ailleurs d’ores et déjà pulvérisé nos grilles habituelles de lecture et de pilotage. 6. De nouvelles formations, de nouveaux exercices : De façon générale, les préparations offertes en gestion de crise consistent à exposer les principes à appliquer, les pratiques validées, les éléments de langage convenus – à donner toutes les réponses. Il faut opérer désormais largement à l’inverse pour ces nouveaux univers des risques et crises en émergence. Il nous faut entraîner les uns et les autres à ouvrir des questions, à être surpris, à conserver leur intelligence et leurs capacités de pilotage alors que les ancrages et règles usuelles ont été pulvérisés. En matière d’exercice, il nous faudrait ajouter aux tests visant à vérifier des aptitudes de base, des exercices visant le renforcement des capacités collectives de confrontation à l’inconnu, d’invention rapide, de mise en œuvre d’alliances nouvelles avec les acteurs de terrain, les citoyens, etc. Que l’on songe par exemple à des exercices nucléaires qui intégreraient pleinement l’utilisation d’Internet par les acteurs, les jeunes, etc. On pourrait découvrir de stupéfiants horizons qui inviteraient à revoir d’urgence nos repères et fonctionnement habituels. 7. De nouvelles formations initiales : Pour l’heure, ces questions touchant des univers aussi mal stabilisés, aussi mal connus, ne faisant pas l’objet de bibliographies passées à la postérité, ne font guère partie des cursus d’excellence. L’argument le plus fréquent est qu’il y a déjà tellement de contenus solides à faire absorber que l’on n’a guère de temps pour explorer des contrées aussi étranges, qui ne satisfont pas au minimum exigé de toute discipline candidate à enseignement. Faute de préparation de ce nouveau type, le futur dirigeant aura toute chance de « décrocher » brutalement dès qu’il sera en présence de questions pour lesquelles il n’a pas déjà ses réponses, ses réponses d’excellence. Et c’est ainsi que les cercles en charge « craquent » en situation ; ou se protègent de tout questionnement en anticipation – avec rejet fréquent de tout porteur de question, qui s’aventure aujourd’hui à transgresser la règle : « venez avec les réponses connues, ne venez pas nous affoler avec des questions ». Ce sont là, assurément, des perspectives difficiles. Mais nous n’avons guère le choix. Si l’on ne met pas tout en œuvre pour maîtriser ces terres inconnues, elles nous y entraîneront entravés. A la veille du passage au XXème siècle, aux Etats-Unis, un certain nombre de pionniers ont eu une vive conscience de la nécessité de refonder la santé publique pour pouvoir affronter les défis dont on commençait à percevoir les signaux d’approche. C’était peu avant, effectivement, la pandémie de 1918. Ces pionniers durent créer une nouvelle université pour travailler sur le sujet, trop dérangeant pour les enseignes prestigieuses trop sûres de leur excellence. Ils créèrent ainsi Baltimore, et les autres universités finirent par suivre. L’objectif, tel que résumé dans le livre de John Barry sur la pandémie de 1918 était de grande hauteur : « Produire des personnes qui seraient capables de produire de nouvelles pensées, de nouvelles pratiques, pour traiter les nouveaux défis ». Nous avons à l’évidence devant nous, aujourd’hui, les mêmes sauts à franchir. C’est là un défi de toutes les époques ayant à vivre des périodes de mutation. 37 Atelier 1 I Jérôme Goellner Maîtrise de l’urbanisation Investissement • mesures foncières • délaissement renforcement du bâti • expropriation convention de financement tripar tite•loi B ac h e l ot • PLU • u r ba n i s m e n é g a tif • acceptabilité•développement urbain•développement économique I Olivier Pia, Animateur N o u s a l l o n s e s s a ye r d e p l a c e r ce moment s o u s l e s i g n e d u d é b a t . N o u s allons dresser l e d é c o r s u r l e s P P R T, ra p p e l e r comment ils fonctionnent. Nous parlerons des nouveautés. Nous allons commencer avec Jérôme Goellner. En deux mots, les PPRT, pour que tout le monde ait le même niveau d’information dans cette salle, à quoi cela correspond ? I Jérôme Goellner, Chef du ser vice r isques technologiques au Ministère de l’écologie 38 Je pense que tout le monde connaît le d i s p o s i t i f d e s P P R T q u i a é t é vo u l u p a r l a l o i d i t e B a c h e l o t d e 2 0 0 3 . J e ra p p e l l e simplement que les PPRT est ce qui vient u n e fo i s q u e l a p r é v e n t i o n d u r i s q u e a é t é menée au maximum dans les installations industrielles. La première priorité est de réduire le r isque au maximum dans les i n s t a l l a t i o n s i n d u s t r i e l l e s . U n e fo i s c e t ra - va i l fa i t , i l p e u t s u b s i s t e r d e s r i s q u e s r é siduels à l’extérieur de l’établissement. S o u s l ’ a u t o r i t é d u p r é fe t , l e P P R T v i s e à a s s u r e r l a c o e x i s t e n c e e n t r e l e s é ve n t u e l s risques résiduels de l’activité industrielle e t l a v i l l e , l ’ u r b a n i s a t i o n p ro c h e . L e P P R T v i s e à ma î t r i s e r l ’ u r b a n i s a t i o n n o u ve l l e autour des installations industrielles dans c e s z o n e s . C e t t e ma î t r i s e d e l ’ u r b a n i s a t i o n e x i s t a i t d é j à . L a n o u ve a u t é i n t ro d u i t e par le système PPRT de la loi de 2003, c’est la possibilité, si la situation appara î t c o m m e i n a c c e p t a b l e , d e r eve n i r s u r l’urbanisation existante. Cela peut aller j u s q u ’ à i m p o s e r d e s m e s u r e s fo n c i è r e s qui, dans les zones de risques les plus imp o r t a n t e s , p e u ve n t a l l e r j u s q u ’ à l ’ e x p ro p r i a t i o n d ’ h a b i t a t i o n , é ve n t u e l l e m e n t l e d é l a i s s e m e n t o u l e r e n fo rc e m e n t d u b â t i existant. I Olivier Pia Il faut peut-être ra ppeler que les PPR T concer nent 670 éta blissements in dustr iels , plus de 900 communes en France , et cela représente, je crois , 9 millions d’h a bitants , est-ce bien cela ? Non, quand même pas 9 millions d’ha bi tants… il n’y a pas 9 millions d’ha bitants dans les zones de PPR T, heureusement. Je pense que ce sont toutes les zones qui peuvent être concer nées par un plan d’inter vention quel qu’il soit. Les PPR T touchent 900 communes . Il y a 420 PPR T et il y a de l’ordre de 650 installations Seveso. Mais comme il peut y avoir plusieur s PPR T sur le même site, cela fait 420 PPR T. C’est la feuille de route actuelle. I Olivier Pia J’avais cru noter que 100 % des PPRT auraient dû être a pprouvés d’ici la fin 2010. Où en sommes-nous ? I Jérôme Goellner J e dirais même que la loi de 2003 pré voyait l’échéance de 2008. Les par lementaires ont été extrêmement ambitieux. A l’époque, la charge de travail et toute la démarche technique de méthodes néces saires pour l’éla boration de ces PPR T ont été mésestimées . Nous sommes à 337 PPR T prescr its . En matière d’a pprobation, nous en sommes à 56 PPR T. I Olivier Pia La loi précise également que, d’ici fin 2011, 60 % des PPR T devront avoir été validés , avoir été a pprouvés par les préfets . Nous en sommes aujourd’hui, grosso modo, à 15 – 20%. Est-ce bien cela ? I Jérôme Goellner L e M i n i s t r e d ’ E t a t y fa i s a i t a l l u s i o n d a n s son inter vention : les objectifs fixés dans des circulaires envoyées par le Ministre a u x p r é f e t s s o n t e ff e c t i v e m e n t d ’ a r r i v e r à la quasi prescription de l’ensemble des PPRT pour 2011 et à un taux d’approbation de 60 % en 2011. En sachant qu’on en est à 337 prescrits, compte tenu de la durée nor male des discussions, c’est un objectif qui reste ambitieux mais qui est tena ble si tous les e ff o r t s s o n t f a i t s a u n i v e a u l o c a l e n t r e l’ensemble des par tenaires au niveau d e s i n s t a n c e s d e c o n c e r t a t i o n q u i fo n c tionnent autour de l’éla boration de ces P P R T. I Olivier Pia Les démarches de concer tation peuvent prendre un cer tain temps . Dans la mise en place d’un PPRT, si j’ai bien compr is , l’Etat et l’industr iel identifient les r isques . Derr ière ces r isques , on fait une sor te de car tographie, on identifie des zones . En deux mots , quelles sont les zones autour d’un PPRT ? Je crois qu’il y a des couleur s qui ont été identifiées ou des noms , des dénominations . I Jérôme Goellner Je ne vais peut-être pas rentrer dans les détails de la démarche technique. C’est basé comme vous l’indiquez sur les études d e dangers qui sont élaborées par les industr iels , avec un contrôle de l’Etat et a u b e s o i n d e s t i e r c e s e x p e r t i s e s d e c e rtains aspects de ces études. Ces études débouchent sur des cartes d’aléas qui s o n t p r é s e n t é e s p a r l ’ i n d u s t r i e l a u x p e rsonnes qui sont ensuite impliquées dans l’éla boration du PPRT et qui distinguent t o u t u n e n s e m b l e de zones . 39 Atelier 1 I Olivier Pia J’ai lu qu’il y a des zones mor telles . Est-ce bien cela ? I Jérôme Goellner Au p l u s p r è s d e s i n s t a l l a t i o n s , i l peut y avoir d e s z o n e s o ù i l y a d e s r i s q u es plus import a n t s q u e d ’ a u t re s , n o t a m m e nt la zone des e ffe t s m o r t e l s , d e s e ffe t s i r r éver sibles , en fo n c t i o n d e l ’ i m p o r t a n c e d e s danger s prés e n t és p a r l ’ i n s t a l l a t i o n . I Olivier Pia J’ai lu qu’une zone mor telle est une zone dans laquelle l’expropr iation des habitations et des entrepr ises est quasi obligatoire. Une zone de danger s définit la zone où des travaux de protection sont à mener par les r iverains . Les zones de recommandation sont les zones où les travaux sont recommandés mais non-obligatoires . I Jérôme Goellner 40 Il y a tout un guide qui détermine cette d é m a r c h e e t d é fi n i t u n c a d r e d a n s l e q u e l la concer tation peut avoir l i e u . I l n ’ y a p a s u n e fo r m u l e u n i q u e é t a b l i e a u n i v e a u n a t i o n a l q u e l ’ o n a p p l i q u e s a n s r é fl é c h i r. C’est au cas par cas. Sachant que la démarche et la doctr ine choisies au niveau n a t i o n a l d é fi n i s s e n t u n c a d r e c o n s i d é r a n t q u e , q u a n d l e r i s q u e e s t t r è s fo r t , i l fa u t a l l e r n o r m a l e m e n t j u s q u ’ à l ’ e x p r o pr iation des per sonnes les plus proches . Ensuite, quand on s’éloigne, dans le cas où le r isque reste impor tant mais moindre, on peut imaginer une procédure de délaissement. On va ver s la désu r b a n i s a t i o n de la zone sans imposer les départs des h a b i t a t i o n s . U n p e u p l u s l o i n , l e r e n fo r- cement du bâti est éta bli de manière o b l i g a t o i r e o u s i m p l e m e n t c o n s e i l l é . Par ailleur s , il y a des mesures de limitation des constr uctions nouvelles avec, au plus près des installations , l’interdiction str icte de toute constr uction. Un peu plus loin encore, on peut admettre cer tains types de constr uctions moyennant cer taines précautions à prendre. On a donc des doctr ines définies au niveau national mais une par t assez large laissée à la concer tation et aux décisions locales en fonction du contexte. La démarche PPRT, ce n’est a bsolument pas une doctr ine unique qui est éta blie au niveau national et que l’on a pplique bêtement, si je puis dire, sans tenir compte de l’urbanisation existante. Les collègues des Directions Dépar tementales des Terr itoires examinent avec les DREAL au cas par cas la situation de l’urbanisation existante et de la vulnéra bilité du bâti existant pour proposer à la concer tation différents types de mesures envisagea bles . I Olivier Pia L’actualité fait que l’on parle financement, soit en matière d’expropriation, soit d’aide accordée aux riverains des sites concer nés par les PPRT. C’est un sujet d’actualité parce que c’est en cours de lecture à l’Assemblée Nationale, au Parlement. Que peut-on dire aujourd’hui sur le financement des expropriations et des travaux engagés par les riverains ? Il y a un projet de loi qui est à l’étude, qui sera peut-être amendé. Que pouvonsnous déjà dire sur le projet de loi ? I Jérôme Goellner Cela a été évoqué un peu ce matin. Le pr incipe de financement des mesures pré - vues par le PPR T indique d’a bord que les travaux de réduction du r isque dans les installations industr ielles , qui sont prescr its par l’Etat, par l’Inspection des Installations Classées , aux industr iels , ceux-là sont pr is en charge par les industr iels eux-mêmes . Comme le disait Laurent Michel, cela représente des sommes significatives , i l l u s t r a n t la démarche de réduction du r isque qui est menée. Ce n’est pas parce qu’un PPR T n’est pas a pprouvé qu’il n’y a pas eu une démarche lourde préala ble de réduction du r isque dans les installations . Ensuite, pour ce qui est des mesures du PPR T, il y a effectivement les mesures dites fo n c i è r e s , d ’ e x p r o p r i a t i o n o u d e d é l a i s s e m e n t . L a l o i a p r é v u u n c o fi n a n c e m e n t tripartite par l’Etat, les industriels et les c o l l e c t i v i t é s de ces mesures foncières . La loi n’ayant pas défini de manière, dans l’état actuel des choses , une clé de finan cement unique. Et ça doit donc faire l’objet de convention financière au cas par cas . Une des améliorations qui a été décidée et discutée dans le cadre de la ta ble ronde des « r isques industr iels » et qui a reçu un assez large consensus de l’ensemble des par ticipants , c’est que, si effectivement au bout d’un cer tain temps , il n’y a pas de signature de cette convention financière, pour que ça ne s’éter nise pas , il y ait in fine, une mesure forfaitaire qui par tagerait en trois par ts égales ce coût des mesures foncières . C’est un des points qui pourrait faire l’objet de modifications législatives à une cer taine échéance, dans le cadre de la loi de finances pour l’année prochaine. Il y a d’autres types de mesures sur lesquelles la table ronde « risques industriels » a imagi - né une amélioratio n d u d i s p o s i t i f d e fi n a ncement. C’est le ca s p a r e x e m p l e p o u r l e s renforcements du b â t i e x i s t a n t a u x q u e l s j e faisais allusion tout à l ’ h e u re , e n p a r t i c u l i e r pour les ha bitation s o ù a u d é b u t l a s e u l e disposition prévue é t a i t u n c r é d i t d ’ i m p ô t à hauteur de 15 %. Il e s t p l a fo n n é p a r a i l l e u r s assez for tement. La l o i G re n e l l e I I a d o p t é e cet été, a prévu que c e t t e p a r t i c i p a t i o n d e l’Etat à la réalisatio n d e c e s m e s u re s p a sserait à 40 %. C’es t q u e l q u e c h o s e q u i fi gure dans la loi vot é e . Pa r a i l l e u r s , l a t a b l e ronde « r isques indu s t r i e l s » a l a rg e m e n t d é battu de la par ticip a t i o n d e s i n d u s t r i e l s e t des collectivités à c e s m e s u re s d u re n fo rcement du bâti de s h a b i t a t i o n s e x i s t a n t e s et a suggéré qu’il p u i s s e y a vo i r à c ô t é d e cette par ticipation d e l ’ E t a t s o u s fo r m e d e crédit d’impôt, une a u t re c o nve n t i o n , u n e convention de finan c e m e n t b i p a r t i t e e n t re les industr iels et le s c o l l e c t i v i t é s q u i p re ndraient en charge é ga l e m e n t u n e p a r t i e de ces coûts de ren fo rc e m e n t d u b â t i p o u r les ha bitations . I Olivier Pia Si je vous comprend s b i e n , c e l a s e ra i t a u s s i une négociation au c a s p a r c a s , P P R T p a r PPR T, cette conven t i o n b i p a r t i t e ? O u c e l a serait inscr it dans la l o i ? I Jérôme Goellner Cela reste à discute r a u Pa r l e m e n t e t c e l a a été discuté large m e n t d a n s l e c a d re d e la ta ble ronde des « r i s q u e s i n d u s t r i e l s » . Cela doit encore êt re d i s c u t é a u Pa r l e m e n t , peut-être d’ici la fi n d e l ’ a n n é e , d a n s l e cadre de la loi de fi n a n c e s . D ’ a u t re s p e rsonnes autour de ce t t e t a b l e s ’ e x p r i m e ro n t peut-être sur ces p ro p o s i t i o n s . E t i l y a d i f- 41 Atelier 1 f é re n t e s p o s s i b i l i t é s . C e l a p e ut être soit un t a u x fo r fa i t a i re o u p l u s p ro b a blement une fo u rc h e t t e à l ’ i n t é r i e u r d e l a q uelle on doit p o u vo i r t ro u ve r u n e ma rg e d’ada ptation. L à a u s s i l e s s i t u a t i o n s p e u ve nt être diffé re n t e s d ’ u n s i t e à l ’ a u t re . I Olivier Pia C h r i s t i n e G i l l o i re , vo u s ê t e s membre du b u re a u d e l ’ a s s o c i a t i o n I l e - d e-France En v i ro n n e m e n t . Vo u s c o n n a i s sez par ticul i è re m e n t b i e n l e s u j e t d e s P PR T car vous ê t e s , e n t re a u t re , m e m b re d e deux CLIC, l e s C o m m i s s i o n s L o c a l e s d ’ I n for mation et d e C o n c e r t a t i o n . J ’ a i v u q u e l’association F ra n c e N a t u re E nv i ro n n e m e n t avait sor ti un c o m mu n i q u é d e p re s s e , o ù e l l e dénonce le fa i t q u e l e s h a b i t a n t s , s e l o n elle, devront p a ye r p o u r r é a l i s e r d e s t ra va ux dans leur s h a b i t a t i o n s , q u a n d c e t t e d e r nière se situe d a n s u n e z o n e d e d a n g e r s . L’ a ssociation va m ê m e p l u s l o i n , e l l e p a r l e m ême de tr iple p e i n e . J e p r é s u m e q u e vo u s a pprouvez ce c o m mu n i q u é s o r t i p a r F ra n c e Nature Envi ro n n e m e n t ? I Chr istine Gilloire, Membre du bureau de l’association Ile-de-France Environnement 42 Pleinement. L’association que je représente aujourd’hui c’est Ile-de-France Environnement, j’ai aussi un historique très précis en Seine-et-Marne, sur 15 ans de CDH (Conseils Départementaux d’Hygiène), plusieurs années de Conseil Supérieur des Installations Classées et de pilotage du réseau industriel de FNE. J’ai un souvenir très précis des dernières Assises de Douai, il y a deux ans, dont le sujet principal portait sur les questions de financement. J’ai e u l a s e n s a t i o n , j e l ’ a i m ê m e dit à cette tr ibune, d’un jeu de patates chaudes où per sonne ne voulait payer en réalité. Evi demment, on comprend parce que le sujet des PPR T et des conséquences de la loi Bachelot sont extrêmement complexes. J e s u i s e ffe c t i ve m e n t t r è s c o n t e n t e d u d o s s i e r d e p r e s s e s o r t i p a r F ra n c e N a t u r e E nv i ro n n e m e n t . J ’ e s p è r e q u ’ i l y a u ra d e s e ffe t s p o s i t i f s e t j e va i s vo u s e x p l i q u e r u n p e u l e c o n t e n u d e s d e ma n d e s d e F ra n c e N a t u r e E nv i ro n n e m e n t q u e j e p a r t a g e t o talement. Ce que Jérôme Goellner vient d e d i r e à p ro p o s d e s fa m e u x 4 0 % i s s u s d e s p ro p o s i t i o n s G r e n e l l e , n e c o n c e r n e q u ’ u n certain type d’habitants, c’est-à-dire les p ro p r i é t a i r e s r é s i d a n t d a n s l e u r s h a b i t a t i o n s . M a i s é v i d e m m e n t , c e n ’ e s t p a s fo rc é m e n t l e c a s d e c h a c u n . Q u i d d e s p ro priétaires bailleurs et de ceux qui louent, q u i n e s e ra i e n t p a s c o n c e r n é s p a r c e t t e mesure ? Les logements sociaux, les HLM en particulier sont très nombreux autour d e s s i t e s S eve s o e t n e s o n t p a s c o n c e r n é s n o n p l u s . O n vo i t b i e n l e t y p e d e p o p u l a tion que toutes ces mesures concernent. De plus, il n’y a rien de prévu pour les entreprises situées dans les zones. I Olivier Pia Quelles sont les propositions que vous faites ? I Chr istine Golloire C’est d’élargir les fameux 40 %... I Olivier Pia Vous les gardez ceux-là quand même ? I Chr istine Gilloire Oui. Et nous demandons plus . Nous deman dons que les 60 % restants soient financés . Notre demande est basée sur un pr incipe de responsa bilisation. Pourquoi on par le de tr iple peine ? Les per sonnes qui ha bitent à proximité des Seveso subissent les nuisances au quotidien. Il y a des camions , des pollutions diffuses liées au fonctionne ment de ces installations , le r isque d’être victime d’un accident grave. Et le fait de devoir par ticiper financièrement au renforcement de leur ha bitation pour essayer de vivre, je dirai, dans une sérénité un peu plus grande, c’est quand même quelque chose. Se dire « Je suis là aujourd’hui dans ma maison. J’aime ma maison. Je suis dans ma commune. Je suis bien. J’ai mes amis . J’ai mes ha bitudes . Je vis là. Je suis peut-être né là. Puis tout d’un coup pour pouvoir res ter là, il va falloir que je paye », cela paraît totalement injuste socialement. Le pr incipe de responsa bilisation, c’est quoi ? Elle est parfaitement par tagée cette responsa bilité. Les élus qui ont délivré assez souvent des per mis de constr uire sans se poser suffisamment de questions et sont parfois soumis à des pressions impor tantes . Les industr iels peuvent agir sur le r isque, c’est eux qui ont la responsa bilité. Puis , l’Etat a autor isé le fonctionnement des installations Seveso. Donc nous estimons que la responsa bilisation et le financement complémentaire des 60 % doivent être as sumés par l’industr iel et la collectivité. I Olivier Pia Est-ce que l’on connaît le montant moyen des travaux à réaliser pour des r iverains qui se seraient situés dans une zone de dan ger s ? Vous les avez estimé ces travaux ? I Chr istine Gilloire Oui, a bsolument. O n t ra va i l l e d a n s u n c omité de suivi des PP R T a ve c A M A R I S , l ’ a s s ociation des élus de s c o m mu n e s c o n c e r n é s . Nous nous sommes b a s é s s u r l e u r é t u d e q u i estime, dans cer tai n e s c o m mu n e s , l e c o û t des travaux à 10 0 0 0 e u ro s . I l p e u t s ’ a g i r de mesures de renfo rc e m e n t , s e l o n l e t y p e de r isque. S’il s’ag i t d ’ u n r i s q u e d ’ e x p l o sion, il faut renforce r l e v i t ra g e , s o i t m e t t re du tr iple vitrage, s o i t p o s e r d e s fi l m s , s o i t renforcer le cadre, c ’ e s t - à - d i re l a s t r u c t u re de l’installation de l a fe n ê t re d a n s l e mu r. Pour le r isque de n u a g e t ox i q u e , i l s ’ a g i t de prévoir dans l ’ h a b i t a t i o n u n e p i è c e de confinement où l e s p e r s o n n e s , d è s l o r s qu’elles sont infor m é e s d u r i s q u e o u d è s lor s qu’elles le voie n t , p e u ve n t s e r é f u g i e r en attendant que c e l a s e p a s s e . C e n ’ e s t pas évident que, d a n s c h a q u e ma i s o n i l y ait ce type de p i è c e , u n e p i è c e d e s u rvie. Concer nant le r i s q u e d ’ i n c e n d i e , c ’ e s t moins précis dans l a m e s u re o ù i l s ’ a g i t d u temps qu’il faut po u r s ’ e n a l l e r. C e t y p e d e r isque pose plutôt l a q u e s t i o n d e l ’ i n fo r mation des population s . Pa rc e q u e j e m e ra p pelle des fameuses p l a q u e t t e s d i s t r i b u é e s aux populations , je d i ra i s q u e l ’ e ffi c a c i t é de ces plaquettes m e p a ra î t a s s e z fa i b l e . Les gens n’entende n t p a s l e s e s s a i s d e s i rène. Quand il y a d e s e x e rc i c e s d ’ i n c e ndie de sécur ité, les p a re n t s s e p r é c i p i t e n t dans les écoles che rc h e r l e u r s e n fa n t s . I l y a énor mément de t ra va i l à fa i re … I Olivier Pia … d’infor mation et de sensibilisation. Nous allons donner la parole à Dominique B e c o u s e directeur technique raffinage environnement et sécur ité pour l’Union Fran- 43 Atelier 1 çaise des Industr ies Pétrolières . Il représente aujourd’hui le monde assez large des industr iels et les industr iels par ticulièrement c o n c e r n é s p a r l e s P P R T. C ’ e s t un sujet qu’il c o n n a î t b i e n p u i s q u ’ i l a s s u re le suivi des P P R T p o u r l ’ U F I P. Q u e r é p o n d ez-vous à la d e ma n d e d e C h r i s t i n e G i l l o i re et plus larg e m e n t c e l l e d e s a s s o c i a t i o n s soit de prot e c t i o n d e l ’ e nv i ro n n e m e n t s oit des assoc i a t i o n s d e r i ve ra i n s q u i d e mandent que l e s i n d u s t r i e l s m e t t e n t l a ma i n à la poche, a u p o r t e - m o n n a i e p o u r fi n a n cer une par tie d e s t ra va u x q u i s e ro n t à r é a liser dans les z o n e s d e d a n g e r s ? S u r vo s s i tes à propre m e n t p a r l e r, vo u s i nve s t i s s e z p our les rendre p l u s s û r s . M a i s q u ’ e n e s t - i l d es travaux à r é a l i s e r p a r l e s r i ve ra i n s ? I Dominique Becouse, Directeur t e c h n i q u e r a ff i n a g e e n v i r o n n e m e n t et sécurité pour l’UFIP To u t d ’ a b o rd , j e t i e n s à e x c u s er Jean-Louis S c h i l a n s ky, p r é s i d e n t d e l ’ U F IP, qui devait ê t re i c i à ma p l a c e e t q u i s ’ é t ait fait un devo i r d ’ ê t re l à a u j o u rd ’ h u i , mais l’actualité l u i a fi x é d ’ a u t re s p r i o r i t é s . 44 Po u r r é p o n d re à c e s q u e s t i o n s , je dirai que l e m o n d e i n d u s t r i e l m e t d é j à la main à la p o c h e … L e m o n d e i n d u s t r i e l met la main à l a p o c h e d ’ u n e p a r t e n i nvestissant pour r é d u i re l e s r i s q u e s à l a s o u rc e. On évalue a c t u e l l e m e n t à p l u s d e 3 0 0 millions d’eu ro s l e s i nve s t i s s e m e n t s d e c e t te nature de p u i s l a p ro mu l ga t i o n d e l a l o i Bachelot. En c e q u i c o n c e r n e l e s m e s u re s foncières , le m o n d e i n d u s t r i e l m e t l a ma i n à la poche et m e t t ra l a ma i n à l a p o c h e , d ans le cadre d e s c o nve n t i o n s d e fi n a n c e m ent des PPR T, pour par ticiper en gros à hauteur d’un tier s , sur toutes les mesures d’expropr iation et de délaissement. En ce qui concer ne les travaux de renforcement du bâti, nous avi ons fait le même diagnostic :la loi Bachelot 2003 disait que les propr iétaires devaient payer ces travaux avec une aide tout à fait symbolique, puisque c’était 15% d’un maximum de 10 000 euros , sous for me de crédit d’impôt, et que le propr iétaire devait payer tout le reste. On se rendait bien compte que c’était ina pplica ble. Et dans les mêmes groupes de travail que Chr is tine Gilloire, nous avons aussi défendu le pr incipe que le crédit d’impôt soit remonté d’une par t de 15 à 40 %, et que d’autre par t, la par ticipation soit de 40 % de 30 000 euros et non pas de 10 000. Après , il y a le reste. Et nous avons convenu ensemble que l’on pourrait demander effectivement aux industr iels et aux collectivités locales de prendre une par tie de ce complé ment. Pour l’instant, nous avons proposé de prendre, avec les collectivités locales , chacun 20 %. Il restera quelque chose de l’ordre de 20 % qui seraient à la charge des propr iétaires , sauf si l’on trouve mieux loca lement. Si nous mettons du double vitrage, cela va aussi a ppor ter une amélioration de confor t, une valor isation du bien. Il nous semble donc logique que le propr iétaire soit un petit peu intéressé par ces travaux. I Olivier Pia Serge Tarassioux, vous êtes Maire de PierreBénite, ville de 10 000 ha bitants située dans la banlieue lyonnaise. Vous êtes par ticuliè rement concer né par les PPR T avec le site chimique d’Ar kema et le por t Édouard Her- r iot. Qu’aur iez-vous envie de répondre à Dominique Becouse et à Chr istine Gilloire quant à la répar tition des frais qui reste raient à la charge des uns et des autres ? Les collectivités , en tout cas la vôtre, seraient-elles prêtes à prendre en charge une par tie des travaux à réaliser dans un premier temps chez les propr iétaires pr ivés , mais peut-être élargir ensuite ver s les pro pr iétaires bailleur s ? I S e r g e Ta r a s s i o u x , M a i r e d e P i e r r e Bénite et membre de l’association AMARIS Cela ferait une quadr uple peine pour les ha bitants , parce que, aux trois que vous avez ajouté, j’ajouterai les impôts locaux qui seraient plus impor tants . Je plaisante bien évidemment ! Je pense que la loi Bachelot a prévu qu’il y ait une convention tr ipar tite entre l’Etat, l’industr iel et les collectivités locales pour les mesures que j’a ppelle d’urbanisme négatif, c’est-à-dire d’expropr iation et de délaissement. Elle n’a pas inclus ce que j’a ppelle l’urbanisme positif, c’est-à-dire l’ada ptation du bâti à la situation qui est posée. Il me semble qu’il faut regarder les coûts globaux. Et puis il y a tout ce qui n’est pas en core prévu, on a par lé des locataires , des bailleur s sociaux. Ne sont pas prévus les entrepr ises , les équipements publics des collectivités locales . Dans le pér imètre de notre PPR T, il y a la mair ie, l’annexe de la mair ie, des écoles , une salle de spectacle etc. Nous venons de faire des travaux pour constr uire une annexe de la mair ie, j’ai 40 000 euros prévus en plus pour anticiper les travaux à venir. Pour le moment, nous les payons seul. Cela va m ê m e p l u s l o i n , p a rc e qu’on a créé une s a l l e d e r é u n i o n d o n t o n n’a pas besoin, po u r p o u vo i r fa i re l a s a l l e de confinement. D o n c j e p r é f è re u n e a p proche globale de l ’ e n s e m b l e d e s c o û t s qui me semblerait p l u s j u s t e a u s e i n d e l a convention. I Olivier Pia Vous évoquez l’école, peut-être une crèche, un hôpital ou une maison de retraite, situés dans une zone de danger s en ce qui vous concer ne. Qui devrait prendre en charge les travaux de rénovation à vos yeux ? I Serge Tarassioux C’est compliqué à faire… Par exemple, il y a des entrepr ises qui sont en grande difficulté et si on leur demande plus de financement, elles vont par tir. Il faut réfléchir à cette accepta bilité. Il y a d’autres entrepr ises comme Ar kema à Pierre-Bénite qui font des bénéfices et qui ont les moyens de pouvoir investir. Il me semble que cela devrait relever de la solidar ité de l’agglomération et nationale. Ce qui est fa br iqué à Pierre-Bénite ser t à l’ensemble des ha bitants de notre pays . Après , que les collectivités locales puissent payer, elles le payent déjà dans les travaux sur leur s bâtiments , dans le fait que les projets soient retardés , dans le fait qu’on a des contraintes terr ibles parce que dans le centre-ville notamment on ne peut pas détr uire pour reconstr uire et ça coûte plus cher de réha biliter que de reconstr uire… I Olivier Pia Si vous voulez bien, nous allons voir quelques images de Pierre-Bénite. Une première photo 45 Atelier 1 nous permet de comprendre la notion de PPRT chez vous. Quel est le périmètre concerné en ce qui concerne votre commune ? I Ser ge Tarassioux O n vo i t b i e n q u ’ h i s t o r i q u e m ent la ville et l ’ u s i n e s e s o n t d é ve l o p p é e s de manière c o n c o m i t a n t e . O n vo i t l ’ u s i n e dans le fond e t d eva n t l e b â t i m e n t ro u g e , c’est la mai r i e . J u s t e à c ô t é s e t ro u ve n t l es écoles . La s a l l e j a u n e , c ’ e s t l a s a l l e d e spectacle. O n vo i t b i e n q u e l ’ o n e s t e n plein frotte m e n t . J e c ro i s q u e l ’ o n d eva nce peut-être d ’ a u tre s c o m mu n e s . I Olivier Pia O n va vo i r a u s s i u n e a u t re photo qui va n o u s m o n t re r p l u s l ’ e nv i ro n n e ment. I Ser ge Tarassioux L à , c ’ e s t e n fa c e d e l a p h o t o qu’on a vue t o u t à l ’ h e u re . I Olivier Pia U n e t ro i s i è m e p h o t o o ù l ’ o n voit le site. N o u s vo yo n s q u ’ i l y a p a s b e a u c o u p d e l o g e m e n t s s o c i a u x s u r vo t r e t e r r i t o i r e . I Ser ge Tarassioux C ’ e s t l ’ a u t re p a r t i e q u i e s t p r è s de l’usine. Il y a à l a fo i s l e c e n t re v i l l e e t p uis le quar tier d e l o g e m e n t s s o c i a u x p o u r l equel il n’y a p a s d e fi n a n c e m e n t d e p r é v u . I Olivier Pia 46 Vo i l à l ’ u s i n e . Q u e l e s t l e p é r imètre de la z o n e d o n t n o u s p a r l i o n s t o u t à l’heure qui c o n c e r n e vo t re c o m mu n e , l a zone mor telle et la zone de danger ? I Ser ge Tarassioux Cela va évoluer, mais pour le moment l’ensemble du centre-ville est concer né par des mesures soit d’expropr iation (pour le moment 280 logements), soit de travaux. Ce qui est a bsurde, c’est que l’on sait que ces pér imètres vont baisser soit par la pr ise en compte d’une étude en trois dimensions par l’Etat, soit par le confinement de l’ate lier en question. Si l’on compare d’un point de vue économique, aujourd’hui on aurait 120 millions de mesures foncières contre 20 millions de travaux de confinement. Le choix est évident pour tout le monde, sauf que pour des raisons de discussions , d’échanges et d’anticipation des batailles financières qui vont avoir lieu, tout est dans l’attente, sur tout les projets de la ville… Le projet de rénovation du centre-ville, par exemple, est bloqué parce que nous sommes sous contraintes . Aujourd’hui nous avons un projet mais nous avons de grandes difficultés à le mettre en œuvre. L’Etat vient de me refuser l’extension d’un par king de 25 places , alor s qu’il ne s’agit pas d’un ajout mais d’un remplacement de places que nous avions enlevées ailleur s . Un per mis de constr uire pour un commerce en plein cœur du centre-ville vient aussi de nous être refusé. C’est complètement incoh é r e n t p o u r l e s h a b i t a n t s . L e s p ro j e t s d e s particuliers sont aussi bloqués. Il y a des r iverain qui veulent faire des travaux ou qui veulent vendre. Pour autant, nous savons que les pér imètres seront réduits . Il y a une autre incohérence avec l’autoroute A7 : elle passe de l’autre côté de l’usine et elle génère beaucoup de trafic l’été. Ces usagers doivent passer à côté de nous… Der nière incohérence, je viens d’a pprendre qu’il y a une fuite de gaz en plein cœur du centre-ville. Depuis la pr ivatisation de GDF, il n’y a plus d’entretien systématique des réseaux et nous n’avons plus la car te des réseaux. Par conséquent, quand nous fai sons des travaux, nous avons régulièrement, tous les mois ou tous les deux mois des accidents . Pour les r iverains , c’est compliqué de subir des contraintes tout en disant, il y a l’autoroute, il y a ces problèmes-là. C’est très difficile à comprendre. I Olivier Pia Je présume que vous attendez finalement avec impatience que l’on revoit peut-être le pér imètre de ce PPR T et que les négociations , les concer tations reprennent très ra pidement ? I Ser ge Tarassioux Oui, et que l’on réfléchisse peut-être de manière un peu plus globale. J’en par lais sur le financement. J’en par le aussi sur le projet urbain. Aujourd’hui on analyse des situations parcelle par parcelle. Je ne sou haite pas qu’il n’y ait plus d’ha bitants dans le centre-ville. Par contre, pour pouvoir le rénover, pour pouvoir faire en sor te que la ville bouge, il y a des endroits où il faut faire des constr uctions nouvelles ou il faut peutêtre rajouter des ha bitants . Si on réfléchit à l a p a r c e l l e , e t c ’ e s t c e q u e fo n t l e s s e rvices de l’Etat aujourd’hui, on nous int e r d i t t o u t . Nous avons proposé depuis des années , un projet global sur le centre-ville qui per met de dire que l’on va déplacer le centre de gravité de la commune pour l’éloigner petit à petit en faisant en sor te que l’on prenne en compte l’avis des gens . Penser de manière p l u s g l o b a l e , c ’ e s t r é fl é chir aussi à la qual i t é d e v i e d e s h a b i t a n t s parce que dans les n u i s a n c e s , vo u s p a r l i e z de la pollution, ma i s q u a n d o n e s t d a n s une ville qui ne peu t p a s s e r é n ove r, q u a n d les bâtiments publi c s n e p e u ve n t p a s b o u ger, on subit une p e i n e s u p p l é m e n t a i re . J’a ppelle à un dial o g u e q u i r é fl é c h i s s e d e manière plus glob a l e . Te r r i t o r i a l i s e r, c ’ e s t l’espr it de la loi. En c o re fa u t - i l a r r i ve r à l e mettre en œuvre d a n s l a r é a l i t é . I Olivier Pia Est-ce que vous ne re m e t t e z p a s e n c a u s e , quelque par t, le mo d e d e c a l c u l d u r i s q u e qui a été mis en p l a c e d a n s vo t re c o mmune ? I Ser ge Tarassioux Je vous propose d e u x r é fl e x i o n s . L a p remière réflexion s’in s p i re d u b o n s e n s d e s ha bitants . Cer tain s r i ve ra i n s habitent Pierre-Bénite depui s d e s a n n é e s e t t o u t l e monde sait que la s é c u r i t é s ’ e s t a m é l i o r é e . L’entrepr ise a inve s t i d e s m i l l i o n s c h a q u e année. Les r iverain s q u i y t ra va i l l e n t l e voient bien. Et ils on t d u ma l à c o m p re n d re que nous allons a vo i r e n c o re p l u s d e contraintes qu’avan t , a l o r s q u e l a s i t u a t i o n s’est améliorée et q u e l e s r i s q u e s à l ’ i n t ér ieur de l’usine ont d i m i n u é . M a d e u x i è m e réflexion est que la d i re c t i o n d ’ e n t re p r i s e et les représentants d e s s a l a r i é s s o n t d ’ a ccord. J’ai tendance à l e s c ro i re p a rc e q u e cela n’arr ive p a s s o u v e n t . Q u a n d i l s n o u s disent que, sur l’atelier en question, qui est le plus impactant pour la ville, la probabilité qu’il y ait un accident est très fa i b l e m a i s q u ’ i l s v e u l e n t b i e n fa i r e l e s t r a va u x d e c o n fi n e m e n t m ê m e s ’ i l s n ’ e n 47 Atelier 1 voient pas bien l’utilité, je p e n s e q u ’ i l y a aussi besoin de réfléchir g l o b a l e m e n t , en se posant la question de l’acceptab i l i t é d e s r i s q u e s e t l a q u e s t ion de l’intér ê t é c o n o m i q u e . N ’ o u b l i o n s pas que l’on e s t s u r d e s p ro d u c t i o n s q u i vont peut-être s ’ a r r ê t e r s o u s p e u , e n fo n c t i o n de la renta b i l i t é d e t e l o u t e l e n d ro i t . J ’ aimerais que l ’ o n p u i s s e p a s s e r d ’ u n e v i s i on « parcelle p a r p a rc e l l e » à u n e v i s i o n p l u s globale qui p re n d e n c o m p t e l a c o e x i s t e nce du déve l o p p e m e n t u r b a i n e t d u d é veloppement é c o n o m i q u e . E t i l m e s e m b l e que c’est possible. I Olivier Pia P h i l i p p e L a l a r t , vo u s ê t e s l e patron de la D i re c t i o n D é p a r t e m e n t a l e d e s Terr itoires et d e l a M e r d u N o rd . S u r c o m bien de PPR T t ra va i l l e z - vo u s s u r vo t re t e r r i t oire et avec vo s é q u i p e s ? I Philippe Lalar t, Directeur de la DDTM du Nord Sur le dépar tement du Nord, nous avons 16 PPRT prescrits, soit des PPRT sur une entrepr ise, soit des multi-sites . Cela va de l’entreprise isolée à la zone industr ielle de Dunkerque, avec un multi-site assez compliqué. Aujourd’hui trois PPRT sont a pprouvés , quatre de plus seront a p p ro u v é s d ’ i c i l a fi n d e l ’ a n n é e . N o u s e s p é ro n s e n a p p ro u ve r 1 5 a va n t l a fi n 2011 sur les 16 prescrits. I Olivier Pia 48 Vo u s a ve z à c ô t é d e vo u s u n ma i r e q u i e x prime un certain nombre de regrets par ra p p o r t à l a m i s e e n p l a c e d e c e s P P R T, qui connaît des soucis, des blocages. Ave z - vo u s r e n c o n t r é l e s m ê m e s c a s s u r vo t r e t e r r i t o i r e ? I Philippe Lalar t O u i . J e d i ra i s q u e c e t e x e m p l e e s t r e p r é s e n t a t i f. S i l ’ o n fa i t l e p a ra l l è l e a ve c l e s a u t r e s r i s q u e s q u e l a D D T M t ra i t e , à s a vo i r l e s r i s q u e s n a t u r e l s , t e c h n o l o g i q u e s e t m i n i e r s , n o u s i n t e r ve n o n s s u r l a p r i s e en compte de l’enjeu quand l’aléa est c o n n u . L a d i ffi c u l t é d u r i s q u e t e c h n o l o gique, on l’a vu, c’est que l’aléa n’est p a s fi g é . C ’ e s t u n a l é a q u i e s t « n é g o c i é » a ve c l ’ i n d u s t r i e l , c ’ e s t - à - d i r e q u e l ’ i n d u s t r i e l fa i t s e s p r e m i e r s e ffo r t s p o u r g é r e r l e risque au sein de son installation. Ensuite, i l p e u t y a vo i r d e s é vo l u t i o n s . J ’ a i e n t e n d u tout à l’heure par le Monsieur de Mazing a r b e , q u ’ a u d é b u t t o u t é t a i t r e c o u ve r t , e t à l a fi n o n e s t r e n t r é à l ’ i n t é r i e u r d e l’activité, de l’entreprise. C’est quelque p a r t l ’ u n e d e s d i ffi c u l t é s q u e n o u s a vo n s , c ’ e s t - à - d i r e q u a n d o n c o m m e n c e à a vo i r des études d’aléas, on doit commencer la c o n c e r t a t i o n , o n d o i t c o m m e n c e r l e p a rt e n a r i a t , e t t o u t e l a d i ffi c u l t é c ’ e s t q u e c e l a n e fo n c t i o n n e q u e s i l e p a r t e n a r i a t c o m p l e t fo n c t i o n n e , e n t r e l ’ i n d u s t r i e l , l e s r i ve ra i n s e t o r g a n i s m e s a s s o c i é e s , l a C L I C e t c . C ’ e s t t o u t u n t ra va i l d e c o n c e r t a t i o n , d ’ i n fo r ma t i o n , d e p r i s e d e c o n s c i e n c e d u r i s q u e , e t c e n ’ e s t p a s fa c i l e p o u r l ’ h a bitant de comprendre que c’est au mom e n t o ù l ’ i n d u s t r i e fa i t d e s e ffo r t s p o u r gérer son risque, que l’on vient en plus c r é e r u n e c o n t ra i n t e q u i n ’ e x i s t a i t p a s o u p e u a va n t . Ava n t , l e s c h o s e s é t a i e n t b i e n d é l i m i t é e s a ve c d e s z o n e s Z 1 , Z 2 , r e p r é s e n t é e s p a r d e s c e rc l e s . C ’ é t a i t fa c i l e à comprendre. Maintenant les choses sont c o m p l i q u é e s . Pa r e x e m p l e , i l fa u t p r e n d r e en compte les cinétiques lentes, les cinét i q u e s ra p i d e s , l e s e n d ro i t s o ù i l e s t p o s s i b l e d ’ é va c u e r l a p o p u l a t i o n , l e s e n d ro i t s o ù i l n e fa u t p l u s c o n s t r u i r e , l e s e n d ro i t s o ù o n va fa i r e d u d é l a i s s e m e n t . To u t c e l a s e négocie au fur et à mesure. Ce n’est pas p o u r r i e n q u e l e s P P R T a p p ro u v é s d a n s l e Nord sont ceux des petites entreprises assez isolées où il y a peu d’urbains. A mon a v i s , l e P P R T, l e p l u s c o m p l i q u é , c e l u i d e D u n k e r q u e , n e s o r t i ra p a s a va n t 2 0 1 2 . I l est au milieu d’une zone urbanisée un village complètement au milieu des zones de risque. I Olivier Pia Nous avons bien compr is , depuis ce matin, qu’il y avait énor mément de concer tation et d’échange. Néanmoins , sur le terrain, est-ce que vous ressentez des points de fr iction avec les élus , avec les citoyens , avec les industr iels ? Quels sont ces pr inci paux points de fr iction ? I Philippe Lalar t Les élus ont des projets de développement de leur collectivité. Quand nous venons ajouter des zones de contraintes , a l o r s q u e n o u s a vo n s q u e l e s z o n e s d e r i s q u e é vo l u e n t , i l p e u t y a vo i r u n p o i n t de fr iction. Au dépar t, nous bloquons beaucoup de choses en se disant aux é l u s d e n e p a s s ’ e n fa i r e , q u e l a g e s t i o n du r isque sera plus claire et que celuic i va d i m i n u e r. M a i s c o m m e n t e x p l i q u e r à u n e c o l l e c t i v i t é q u ’ i l fa u t q u ’ e l l e r e tarde ses projets parce que nous attend o n s u n e é t u d e va l i d é e ? C e n ’ e s t p a s t o u j o u r s fa c i l e . Po u r l e s h a b i t a n t s , c ’ e s t e x a c t e m e n t c e q u e n o u s a vo n s e n t e n d u . I l s n e s e s e n t e n t p a s r e s p o n s a b l e s d u r i s q u e , p o u rtant ils doivent suppor ter les frais d’amén a g e m e n t , vo i r e l ’ e x p r o p r i a t i o n . U n P P R T réussi qui marche, c’est un PPRT compr is et a pprouvé par l’ensemble des acteur s . Cela prend du temps . Dans l’organisation de l’Etat, la DDTM inter vient parce qu’elle a en charge les projets d’urbanisme, les contacts avec les collectivités et l’accompagnement de celles-ci sur leur s projets d’aménagement. Nous a vo n s l ’ h a b i t u d e d e c e t t e c o n c e r t a t i o n avec les ha bitants et avec les collectivit é s . N o u s fa i s o n s l ’ i n t e r fa c e s u r l ’ a s p e c t technique de spécialistes, d’experts de la DREAL qui gèrent avec l’industr iel le risque lui-même. Nous co-animons et co-pilotons l’aspect concer tation avec la DREAL. La partie enjeu, analyse des projets , accompagnement de la collect i v i t é d a n s l ’ é vo l u t i o n d e s o n p r o j e t d e d é v e l o p p e m e n t , c e n ’ e s t p l u s t o u t à fa i t inclus dans la démarche du PPRT mais c’est nécessaire pour trouver des solutions , des compromis et quelque par t sur le bon choix. I Olivier Pia Nous allons donner l a p a ro l e à n o t re d e rnier inter venant, Pe t e r F r i j n s . Ave c l u i , n o u s allons nous penche r s u r l a fa ç o n d o n t l e s sites industr iels son t g é r é s a u x Pa y s - B a s e t notamment sur cet t e p ro b l é ma t i q u e d e l a maîtr ise de l’urban i s a t i o n . Pe t e r F r i j n s t ra vaille au sein du Min i s t è re d u L o g e m e n t , d e l’Aménagement du Te r r i t o i re e t d e l ’ E nv i ronnement des Pay s - B a s . E x i s t e - t - i l , c o m m e en France, ce que n o u s a p p e l o n s c h e z 49 Atelier 1 n o u s l e s P P R T, d e s P l a n s d e P r évention des Risques industriels ? I Monsieur Peter Fr ijns , Ministère du Logement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement (Pays-Bas) 50 E s t - c e q u e n o u s a vo n s d e s instr uments c o m m e l e s P P R T ? N o n . M a i s je pense que n o u s s o m m e s c o n f ro n t é s a u x mêmes défi s . L a s é c u r i t é c o m m e n c e a u niveau de l ’ u s i n e , a ve c d e s i n s t a l l a t i o n s et des opéra t i o n s s û re s , c o m m e n o u s l ’ a vo ns déjà ment i o n n é . N o u s a p p e l o n s c e l a l e « State of the A r t » . Dans notre système, l’autorisation environnementale est un endroit où vous pouvez mettre en place ce « State of the Art » (les r è g l e s d e l ’ a r t ) . B i e n s û r, n o u s devons gére r c e r i s q u e . A p r è s a vo i r r é u s si à atteindre c e n i ve a u « S t a t e o f t h e A r t », nous choi s i s s o n s d ’ a j u s t e r l e s l o i s e x i s t antes , les lois q u i é t a i e n t d é j à u t i l i s é e s p o u r les nuisances s o n o re s e t p o u r l a p o l l u t i o n de l’air. Aussi, j ’ a i b e a u c o u p d e re s p e c t p o ur votre pays q u i a c e t t e a p p ro c h e g l o b a l e via les PPR T. N o u s a vo n s c o m m e n c é p l u s « petit », en a j u s t a n t n o t re l o i e nv i ro n n e mentale exis t a n t e . N o u s a vo n s c o n s t r u i t et développé u n c a n eva s q u e l e s a u t o r i t é s locales comp é t e n t e s p e u ve n t u t i l i s e r. C e cadre peut ê t re a d a p t é s e l o n l e s b e s o i n s et est régul i è re m e n t a c t u a l i s é . L e s n o u ve lles décisions q u i d o i ve n t ê t re p r i s e s s ’ a d a ptent à notre connaissance des risques. B i e n s û r, n o u s c o n n a i s s o n s quelques an c i e n s c o n fl i t s , d e s e n d ro i t s q u i ne sont pas p a r fai t s , q u i d o i ve n t ê t re rev u s . On ne peut p a s e m p ê c h e r c e l a . E n g é n éral, au final, n o u s d evo n s p re n d re d e s m e s ures complé m e n t a i re s . C e s m e s u re s , l e plus souvent, s o n t t ro u v é e s d a n s l ’ u s i n e p ar l’industr iel. Les industr iels doivent financer beaucoup de choses . Nous avons un système dans notre loi qui per met de réser ver un cer tain espace pour les projets de l’industr iel, qui freine l’urbanisation d’une par tie du pays , spécialement dans les por ts , à Rotterdam ou à Amsterdam par exemple. Cela évite qu’un industr iel déjà installé ne soit forcé à déménager à cause des ha bitations qui s’a pprocheraient de plus en plus . Nous n’avons pas de PPR T mais nous exerçons une préemption dans nos plans régionaux d’urbanisation. I Olivier Pia Est-ce qu’aux Pays-Bas , on est tenu d’in demniser ? Est-ce qu’il y a d’a bord des travaux obligatoires dans cer tain es zones proches des sites industr iels à r isq ue ? Estce que les par ticulier s sont tenus de réaliser des travaux dans leur s ha bitations ? Si oui, qui les finance ? I Peter Fr ijns Nor malement, quand le r isque est trop élevé, les industr iels doivent d’a bord rechercher les mesures à prendre. Comme je l’ai indiqué précédemment, l’industr ie et ses activités doivent être en confor mité avec le « state of the Ar t ». Nous avons un long histor ique et nous avons pu faire évoluer de nombreuses législations . Cela fait 25 ans que nous travaillons sur le sujet, il n’y a plus tellement d’énor mes conflits . Mais lor squ’il y en a un, nous regardons l’usine en premier. Est-ce qu’ils sont en confor mité avec le « state of the ar t » ? Et même s’ils le sont, est-ce qu’il ne serait pas possible de trouver des mesures pour aller encore plus loin ? Cette par tie au delà du « state of the ar t » s’a ppelle l’assainissement. Elle peut être compensée en bout de cour se par le gouver nement. Mais si vous par lez de détr uire des maisons existantes , ça devient plus compliqué. Cela a déjà dit ici, vous vous retrouvez face à une combinaison d’assainissement et d’in vestissement - Du fait qu’il soit possible que la destr uction de ces maisons augmente la valeur du site industr iel, car cet espace supplémentaire offre l’oppor tunité de développer de nouvelles activités indus tr ielles . Dans ce cas , vous êtes confronté à un process très compliqué avec des négo ciations complexes sur qui doit financer et comment. Ce que j’a pprécie le plus à propos des PPRT, c’est qu’ils donnent une stratégie régionale. Je pense que c’est une bonne chose. Nous essayons de faire cela aux Pays-Bas , mais les choses sont très différentes et difficiles . Ce que j’aime dans l’a pproche hollandaise, c’est que nous commençons petit et nous essayons de faire évoluer un système déjà existant. Ainsi, les changements sont déjà en place pour les prochaines décisions . Nous prévenons ainsi l’émergence de nouveaux problèmes et nous essayons de faire cela en étant le moins intr usif possible. Q uestions de la salle I Pierre Dequet, Ecole des Mines de Par is Je ne vais pas vous poser une question sur les r isques technologiques mais sur les r isques inondation qui peuvent induire des r isques technologiques en sachant qu’il y a 13 000 communes et 300 agglomérations touchées par les r isques inondation. J’ai entendu par ler d’u n n o u ve a u s e r v i c e , l e ser vice central d’hy d ro m é t é o ro l o g i e d ’ a p pui à la prévention a u x i n o n d a t i o n s . J ’ a i merais que l’on m’ e x p l i q u e l e fo n c t i o n n ement de ce nouvea u s e r v i c e . I Jérôme Goellner Le SCHAPI est un se r v i c e d e l a D G P R e t q u i est localisé à Toulo u s e . I l fa i t d e l a p r é v i sion, c’est le Météo F ra n c e d e l ’ i n o n d a t i o n . Il s’agit d’un ser vic e d e l ’ E t a t q u i a s s u re l a prévision du r isque i n o n d a t i o n . Vo u s s a v e z q u e l ’ i n o n d a t i o n , d a n s l e temps, se constatait plus qu’elle ne s e p r é vo ya i t . L’ o b j e c t i f e s t d e fa i r e e n sor te que l’inondation puisse se prévoir à l ’ a va n c e , n o t a m m e n t s u r l a b a s e d e données météo et de modèles de calcul, d e fa ç o n à c e q u e l ’ o n p u i s s e i n t e r v e nir en temps et en heure, et avant que l’eau n’arr ive, dans la mesure du poss i b l e . L’ o b j e t d u t r a v a i l d u S C H A P I e s t d e d é fi n i r l a d o c t r i n e , d e d é fi n i r l e s m o d è l e s au niveau national, sachant qu’il existe dans chaque bassin un ser vice de prévision des crues. Ce n’est plus une constatation des cr ues mais un ser vice de prévision des crues, un ser vice de l’Etat assuré soit par la DREAL, soit par une direction départementale. Donc le SCHAPI o rga n i s e c e l a . L’ E t a t e s saie donc de s’occ u p e r d e l a p r é ve n t i o n du r isque inondatio n e t d e s e s é ve n t u e l l e s conséquences , y co m p r i s b i e n s û r s u r l ’ a c t ivité industr ielle. Ce l a fa i t p a r t i e d e s é t u d e s de danger s : les ind u s t r i e l s , p a s s i m p l e m e n t les sites Seveso ma i s t o u t e a c t i v i t é i n d u s tr ielle soumise à au t o r i s a t i o n , d o i ve n t t e n i r 51 Atelier 1 c o m p t e d e s é ve n t u e l s r i s q u e s inondations dans leurs études de dangers. B i e n s û r, o n n ’ i m p l a n t e p a s d’industr iel e n z o n e i n o n d a b l e , ma i s i l y a des install a t i o n s i n d u s t r i e l l e s q u i s o n t en zone inon d a b l e , e t p u i s i l y a a u s s i d e s installations i n d u s t r i e l l e s , q u i p a r n a t u re , ( je pense aux p o r t s ) s o n t q u a n d m ê m e a u b ord de l’eau, e t q u ’ o n p e u t d i ffi c i l e m e n t mettre ailleur s q u ’ a u b o rd d e l ’ e a u , e t d a n s l esquels il faut p re n d re l e s p r é c a u t i o n s a d h oc, y compr is e n c a s d ’ i n o n d a t i o n , ma i s a u s si qu’on peut en cas de séisme etc. I l y a q u a n d m ê m e d e s t e c h n i ques pour as s u re r l a p r é ve n t i o n d e s r i s q u e s inondation, à c o m m e n c e r p a r m e t t re d e s stockages de p ro d u i t s t ox i q u e s h o r s d ’ e a u ; et puis il y a a u s s i t o u t u n e n s e m b l e d e plans d’interve n t i o n . C ’ e s t s û re m e n t a u s si perfectible y c o m p r i s d a n s l e m o n d e i n dustr iel, mais c’est pris en compte. I Monsieur Giannocarro, Directeur de l’Institut des Risques Majeur s (Grenoble) 52 L’inter vention des Pays-Bas est intéressante puisque l’on voit très clairement, et également dans l’histor ique dans la prise en compte des r isques en France dont l’urbanisme, des pratiques de pr ise en compte du r isque technologique hor s procédure PPR. La question que je pose aujourd’hui à l’ensemble des inter venants , c’est qu’on le sait, on a d’une par t les installations fixes, mais on a des gares de tr iages , et prochainement à cour t ter me se posent les problématiques de la canalisation et de leur prise en c o m p t e d a n s l e s d o c u m e n t s d’urbanisme, a ve c l e s e n j e u x q u e c e l a va occasionner pour les collectivités ; et là on ne va plus être à 900 communes concer nées . Quand on connaît les kilomètres qu’il peut y avoir en ter mes de canalisations qui vieillissent, cela a été signalé je crois dans la mati née. Quelle pr ise en compte des r isques hor s procédure PPR ? Et l’enjeu c’est, ne faut-il pas inventer une procédure ra pide pouvant identifier les bonnes pratiques de pr ise en compte de ces r isques hor s pro cédure PPR directement dans les documents d’urbanisme, au regard des bonnes pratiques qu’on a dans cer tains dépar te ments en France, sur la problématique du r isque naturel (Savoie, Haute-Savoie, Isère) qui per mettent for t de car tes des aléas , de pouvoir intégrer dans l e s d o c u m e n t s d ’ u rbanisme (il y a une circulaire de 2004 qui existe pour la problématique r isque n a t u r e l ) ces éléments de connaissance ; sur tout que c’est encore plus compliqué que le r isque naturel. Quid de la pr ise en compte des r isques technologiques hor s procédure PPR ? Je par le de façon élargie, hor s installation fixe. I Philippe Lalar t Dans le dépar tement du Nord, nous avons éta bli des doctr ines de pr ise en compte du r isque dans les documents d’urbanisme et même sans document d’urbanisme, dans l’a pplication du droit des sols pour les r isques naturels , les r isques inondation, les r isques de r uissellement etc. Nous sommes en train de réfléchir à ce que l’on peut mettre en place dans les secteur s du type des gares de tr iages . Il y en a une qui n’est pas loin dont on par le régulièrement juste ment. C’est ce que je disais tout à l’heure, la difficulté, c’est que quand on a connais - sance du r isque, on doit le prendre en compte dans l’urbanisme. Sur les r isques technologiques , aussitôt que l’on a connaissance du r isque et avant de prescr ire le PPR, il faut concer ter, il faut in for mer. Et c’est dans cette pér iode-là alor s que l’on ne peut pas arrêter le temps et où il y a des tas de gens qui en profitent pour déposer un per mis au der nier moment pour essayer de lutter contre l’avancement du temps et avoir des autor isations avant que l’on commence à mettre des contraintes . On a toujour s ce problème-là. Et nous , ain si que les élus , nous sommes demandeur s de doctr ines qui per mettent de gérer les petites pér iodes transitoires , qu’il y ait un PPR T prescr it ou non prescr it, et qu’il y ait une installation identifiée ou non, on ne sera pas dans les mêmes sujets . Sur les infrastr uctures , transpor t de ma tières dangereuses , tout ceci est en cour s de réflexion. On y viendra ra pidement. I Jérôme Goellner La démarche consistant à prendre en compte les r isques dits technologiques di ver s dans l’urbanisme, elle n’est pas nouvelle, elle existe et elle est actée dans le code de l’urbanisme. C’est notamment l’ar ticle R 111-2, qui dit clairement que le maire, responsa ble en matière d’urbanisme, qu’il doit prendre en compte les dif férents types de r isques dans les décisions qu’il prend en matière d’urbanisme. L’Etat, lui, a l’obligation de four nir aux maires les éléments dont il dispose en matière de connaissance des r isques . Cela, c’est la dé marche nor male. C’est celle qui s’a pplique en dehor s des PPR T où la démarche est un peu l’inver se puisque là c’est le préfet qui reprend le relais . M a i s c ’ e s t l a d é ma rc h e qui s’a pplique de ma n i è re h a b i t u e l l e e n matière de canalis a t i o n d e t ra n s p o r t , e n matière d’installati o n i n d u s t r i e l l e n o n - S e veso seuil haut, pou r l e s q u e l l e s i l n ’ y a p a s de PPR T, mais ça n e ve u t p a s d i re q u e o n ne s’occupe pas du r i s q u e . Pour les canalisatio n s d e t ra n s p o r t , i l y a maintenant de ma n i è re s y s t é ma t i q u e , d e s por tées à connais s a n c e p a r l ’ E t a t d e s r isques présentés p a r c e s c a n a l i s a t i o n s d e transpor t tels qu’ils o n t é t é é t u d i é s p a r l e s exploitants de ces c a n a l i s a t i o n s d a n s l e s études de sécur ité – c e l a rev i e n t a u x é t u d e s de danger s . Ces po r t é s à c o n n a i s s a n c e s e font en a pplication d e l a r é g l e m e n t a t i o n . Il y a une plus gra n d e l a t i t u d e p o u r l e s collectivités sur la ma n i è re d e p re n d re e n compte ces r isques . L’Etat donne des c o n s e i l s d a n s c e s p o rtés à connaissanc e , i l i n d i q u e q u e c e n’est pas raisonna b l e d e c o n s t r u i re d e s éta blissements receva n t d u p u b l i c à t ro i s mètres d’une can a l i s a t i o n d e t ra n s p o r t . Mais évidemment, c ’ e s t à l a c o l l e c t i v i t é d e prendre cela en c o m p t e s e l o n l e s c a ra ctér istiques dans les q u e l l e s e l l e e s t . I l n ’ e s t pas raisonna ble d’i n t e rd i re d e c o n s t r u i re à côté d’une canalis a t i o n d e t ra n s p o r t . Pa r exemple, il y a des c a n a l i s a t i o n s d e t ra n s por t d’hydrocarbure s q u i l o n g e n t l a S e i n e à Par is . On n’interd i t p a s d e c o n s t r u i re a u bord de la Seine à Pa r i s . D ’ u n a u t re c ô t é dans une commun e r u ra l e o ù i l y a u n e canalisation de tra n s p o r t , i l e s t b o n q u e l e maire sache qu’il y a u n e c a n a l i s a t i o n l à et qu’il y a des r isq u e s . Q u a n d i l a l e c h o i x , plutôt que de cons t r u i re u n n o u ve a u l o t i s sement au dessus d e c e t t e c a n a l i s a t i o n , i l est mieux de le me t t re a i l l e u r s . 53 Atelier 1 I S e r g e Ta r a s s i o u x J ’ e n t e n d s c e q u i e s t d i t e t j ’ a i m e ra i s b i e n ê t r e d a n s c e p a y s - l à , p a rc e q u e l a l o i B a c h e l o t i n t ro d u i t u n t ro i s i è m e l a r ro n e n t r e l’Etat et l’industriel, c’est la collectivité locale et derrière elle, ce sont les habitants. O n s e s o u v i e n t t o u s d e l ’ a c c i d e n t d e To u louse et de la réaction des habitants. On n e d o n n e q u e d e s c o n t ra i n t e s a u ma i r e e t o n n e s u i t m ê m e p a s s e s p ro j e t s … Pa r e x e m p l e , j ’ a i e nvoy é u n p ro j e t g l o b a l e t o n n ’ a t o u j o u r s p a s e u d ’ a v i s . C e p ro j e t global prend en compte l’urbanisation de d é ve l o p p e m e n t d e l a v i l l e . I l y a l a c a r t e des aléas et la carte des enjeux. La carte des enjeux ne peut pas être que des périm è t r e s o ù l ’ o n p e u t fa i r e c e c i à t e l e n d ro i t e t o n n e p e u t r i e n à t e l a u t r e e n d ro i t . 54 J e c ro i s q u ’ i l y a u n v ra i d i a l o g u e à i n s t a u r e r a fi n d e p r e n d r e e n c o m p t e l ’ a v i s d e s h a b i t a n t s , a i n s i q u e l a t e m p o ra l i t é des projets . Si je suis aussi vindicatif c’est que mon centre-ville par t en « cacahuète » p a rc e q u e l ’ h a b i t a t s e d é t é r i o r e e t l e s c o m m e rc e s s e c o m mu n a u t a r i s e n t . L à , n o u s s o m m e s t o u s d eva n t u n e r e s p o n s a b i l i t é s o c i a l e . L e s p ro b l è m e s n e s o n t p a s s u s p e n d u s , n ’ a t tendent pas. Je ne presse pas pour que le P P R T s e r é a l i s e . I l fa u t q u ’ i l s o i t b i e n r é a l i s é et que les périmètres soient réduits autant q u e p o s s i b l e , ma i s q u e d a n s l ’ i n t e r va l l e , i l fa u t q u e n o u s p u i s s i o n s a vo i r u n e d i s c u s s i o n q u i n e s o i t p a s u n e fi n d e n o n - r e c evo i r à t o u t e p ro p o s i t i o n . S i n o n c ’ e s t i n c o m p r é hensible. Le risque qu’il y a derrière, et qui c o m m e n c e à a r r i ve r c h e z m o i , a l o r s q u e cela n’était pas le cas depuis des décennies, c’est que des gens se disent qu’il fa u t q u e l ’ e n t r e p r i s e s ’ e n a i l l e , a u v u d e s c o n t ra i n t e s . C e l a p o s e u n p ro b l è m e p o u r n o t r e p a y s , e n t e r m e s d e d é ve l o p p e m e n t économique. Je sais qu’en Inde ou les p a y s l i m i t ro p h e s , l e s l é g i s l a t i o n s n e s o n t p a s l e s m ê m e s . E s t - c e q u e n o u s vo u l o n s c e m o n d e - l à ? J e n e c ro i s p a s . N o u s a vo n s d o n c t o u t i n t é r ê t à fa i r e e n s o r t e q u e l e s habitants puissent comprendre et analys e r. E n c o r e fa u t - i l q u ’ i l p u i s s e y a vo i r l e s espaces pour cela. D e r n i è re c h o s e , j e p e n s e q u ’ i l fa u t q u e l’on arrive à prendre en compte -ce sera peut-être la prochaine loi- ce qui e x i s t e s u r l e s t e r r i t o i re s . Q u a n d o n fa i t de la boxe, si on a un masque, on ne reçoit pas le coup de la même manière que si on ne l’a pas. Dans une ville, quand il y a un système automatisé d’alerte, quand les exercices ont été fa i t s , q u a n d l e s b â t i m e n t s s o n t a d a p tés, il y a malgré tout des phénomènes pour lesquels on sait que la crise n’aur a p a s l e m ê m e e ff e t s i e l l e s u r v i e n t . Les scientifiques a ppellent cela la résil i e n c e . M a i s i l fa u t p r e n d r e e n c o m p t e la capacité d’un territoire et celle des h a b i t a n t s à s ’ a d a p t e r. J e c r o i s q u ’ i l fa u d ra i t a r r i ve r à l e p r e n d r e e n c o m p t e s i n o n l e s e ff o r t s q u i s o n t f a i t s s e r o n t vains . Je pense à une école qui est juste à côté de la mairie où on leur demande de remettre en place ce qu’on appelle les PMS, les Plans de Mise en Sûreté. Ils se demandent à quoi cela a ser vi puisqu’ils n’ont r ien vu avancer et qu’au contraire, ils ressentent que l’école est menacée. Je pense qu’il fa u t a r r i ve r à p re n d re e n c o m p t e l ’ a v i s des habitants, leurs temporalités, leurs ma n i è re s d e fa i re , e t c ’ e s t l e d é fi . Au jourd’hui, malheureusement ce n’est p a s l e c a s o u c ’ e s t i n s u ff i s a m m e n t . I Christine Gilloire F ra n c e N a t u r e E nv i ro n n e m e n t , d a n s s o n d o s s i e r d e p r e s s e q u e vo u s l i r e z c e r t a i n e m e n t a ve c a t t e n t i o n , fa i t d e s p ro p o s i t i o n s t r è s p r é c i s e s e t t r è s i n n ova n t e s . J e l ’ e s p è r e e n t o u t c a s . L a C o m m i s s i o n E u ro p é e n n e v i e n t d e r e c o n n a î t r e q u ’ u n e s u bve n t i o n d’Etat à des industries pour les meilleures techniques disponibles n’est pas redeva b l e d ’ a t t e i n t e à l a c o n c u r r e n c e . N o u s voyo n s b i e n l a d i ffi c u l t é i n t e n s e d a n s c e t t e t a b l e ro n d e : i l y a d e s c h o s e s qui sont insurmontables si cela continue c o m m e c e l a . L e s P P R T s e ro n t u n fi a s c o . J e n ’ a i m ê m e p a s e u l e t e m p s d e fa i r e l e t o u r d e s p ro b l è m e s . I l y a a u s s i d e s m e s u r e s d e r e c o m ma n d a t i o n d o n t j e n ’ a i p a s e n c o r e parlées. Au lieu de mettre de l’argent public p o u r e x p r o p r i e r, p o u r f a i r e d e s m e s u r e s préventives , si l’on finançait, si l’on ai dait les entreprises à mettre en place les meilleures techniques disponibles, je crois que tout le monde y gagnerait, absolument tout le monde, toutes les composantes de la société. I Olivier Pia Vo u s vo u l e z d i r e q u e vo u s s o u h a i t e z q u e l ’ o n i nve s t i s s e u n ma x i mu m d ’ a rg e n t , e t n o t a m m e n t p o u r q u o i p a s d e l ’ a rg e n t p u - blic, le plus vite possible directement sur l e s s i t e s p l u t ô t q u e d e r é a l i s e r d e s t ra va u x chez les particuliers ou les écoles. I Christine Gilloire O u i , p a r t o u t o ù c ’ e s t p o s s i b l e . N o u s a vo n s u n e x e m p l e t r è s p r é c i s c o n c e r n a n t l a p ro d u c t i o n d e c h l o r e à p a r t i r d ’ é l e c t ro l y s e à b a s e d e m e rc u r e . C ’ e s t u n d o s s i e r q u i e s t e n c o u r s , j e c ro i s q u e l a c o n c l u s i o n n ’ e s t p a s e n c o r e l à ma i s o n va ve r s c e l a J e ve u x q u ’ i l y a d ’ a u t r e s t e c h n i q u e s n o n p o l l u a n t e s e t q u i p e r m e t t ra i e n t t r è s c e r t a i nement de réduire les zones concernées. C e l a e s t q u e l q u e c h o s e d e p o s i t i f. To u t l e m o n d e a à y ga g n e r. I H e n r i A l l a r d , Président d’une association de défense de l’environnement dans le Gard Je suis président d’une association de défe n s e d e l ’ e nv i ro n n e m e n t d a n s l e G a r d . L e v i l l a g e d e S a l i n d r e s e s t d ’ a i l l e u r s é vo q u é d a n s l e d o s s i e r d e p r e s s e d e F ra n c e N a t u r e E nv i ro n n e m e n t . L e p ro b l è m e e s t l e s u i va n t : l e s ma i r e s a u s s i b i e n q u e l ’ E t a t e t l e s i n d u s t r i e l s o n t u n i n t é r ê t c o m mu n e t c o nve rg e n t , à s a vo i r d é p e n s e r l e m o i n s d ’ a rg e n t p o s s i b l e . E n c e q u i c o n c e r n e l e v i l l a g e d e S a l i n d r e s , n o u s n o u s r e t ro u vo n s a ve c u n e u s i n e R h o d i a S eve s o I I d o n t l e p é r i m è t r e d e p ro t e c t i o n é t a i t d e 1 8 0 0 m è t r e s . Au j o u r d ’ h u i , e n u t i l i s a n t l a l é g i s lation, on a utilisé une modélisation 3D qui limite la zone des dangers à 320-330 mètres. On se moque tout simplement du m o n d e . C e q u e j e d e ma n d e , u n P P R T, q u e l d o i t ê t r e s o n b u t ? L e b u t , e s t - c e d e fa i r e é c o n o m i s e r d e l ’ a rg e n t ? N o t r e va l e u r, l a 55 Atelier 1 v i e h u ma i n e a u n e c e r t a i n e va l e u r. E s t - c e q u e l ’ o n d o i t p ro t é g e r l a v i e h u ma i n e o u p ro t é g e r l e s i n t é r ê t s d e c e r t a i n s ? Vo i l à ma q u e s t i o n . I Marc Senant, France Nature Environnement Je voulais revenir sur la qu e s t i o n q u ’ a posée Christine Gilloire et apporter un ou deux éléments préalables. Sur la réduction du r isque à la source, on nous a n n o n c e u n c h i ff r e d ’ i n v e s t i s s e m e n t d e l’ordre de 300 millions sur trois ans . C’est v r a i q u e l e c h i ff r e p a r a î t c o n s i d é r a b l e . Mais si on le ramène à une année et à l ’ e n s e m b l e d e s s i t e s c o n c e r n é s , c e l a fa i t une moyenne d’investissement de 150 000 euros par site. Cela per met un peu d’avoir une idée plus précise d e c e q u e cela représente. C’est sûr que l’action sur le risque industriel a un coût, mais c’est sans c o m p t e r q u e l e b i l a n fi n a n c i e r d ’ A Z F d é passe largement les 2 milliards d’euros s u r l e s a t t e i n t e s a u x b i e n s . O n vo i t b i e n que l’inaction a un coût qui peut être bien plus élevé. C’est aussi pour replacer le débat. 56 Je souhaite apporter une précision sur l’aspect immoral des travau x s u p p o r t é s p a r l e s p a r t i c u l i e r s . N o u s l ’ a vo n s d é j à l ’ a déjà dit, mais il y a sur tout un r isque, vu l e p r o fi l d e s p o p u l a t i o n s q u i v i v e n t a u t o u r de ces Seveso, que ces trava u x n e s o i e n t jamais menés . Et c’est là le pr incipal problème. C’est pour cela que l’on insiste vraiment sur une pr ise en charge. Sans cela, on risque tout simplement d’ann u l e r l e s e ff e t s v o u l u s p a r l a l o i . C ’ e s t un point vraiment impor tant pour nous . J ’ a u r a i s vo u l u s a vo i r u n p e u p l u s q u e l l e est la position des uns des autres sur la p o s s i b i l i t é d e r é a ff e c t e r l ’ a r g e n t d ’ o r i gine publique sur des mesures de réduction à la source ou sur la conver sion ver s des techniques plus modernes qui sont à mettre en œuvre ? I Dominique Becouse 300 millions, c’est ce qui a déjà été dép e n s é . C e l a n e va p a s s ’ a r r ê t e r l à p u i s q u e l e s m e s u r e s d e r é d u c t i o n à l a s o u rc e , n o u s c o n t i n u o n s à e n i d e n t i fi e r a u f u r e t à m e s u r e q u e n o u s a va n ç o n s d a n s l e s é t u d e s d e d a n g e r s . D o n c , l e s i nve s t i s s e m e n t s n e vo n t p a s s ’ a r r ê t e r l à . S u r l e s m e s u r e s s u p p l é m e n t a i r e s , u n e fo i s q u e l ’ o n a fa i t l e s é t u d e s d e d a n g e r s , q u a n d o n v o i t l e s c o û t s l e s m e s u r e s fo n c i è r e s e t u n e fo i s q u e l ’ o n a m e s u r é c e t enjeu, on se dit que peut-être, en investissant encore plus au sein de l’usine, on va réussir à moindre coût à maîtr iser le risque encore mieux. Ce sont les phases qui sont en cours et sur lesquelles nous avançons . Nous sommes dans le cadre d e s c o n v e n t i o n s d e f i n a n c e m e n t t r i p a rt i t e L’ a r g e n t d u f i n a n c e m e n t t r i p a r t i t e s e r a i t m i e u x u t i l i s é p o u r fa i r e p l u s d e travaux au sein de l’industr ie plutôt que de couvr ir des mesures d’expropr iation p a r c e q u ’ i l y a u r a i t m o i n s à d é p e n s e r, c’est bien ce qui est prévu dans la loi Bachelot. I Jérôme Goellner Sur ces mesures supplémentaires, je confir me qu’il y a des travaux qui doivent être réalisés par l’industriel, qui sont prescrits et qui sont pris en charge complètement par l’industriel. Il est possible que l’on se rende compte dans un certain nombre de cas qu’il est possible d’aller au-delà et aller au-delà, ce n’est pas simplement mettre le confinement que l’ind u s t r i e l d e v r a i t fa i r e . D a n s u n c e rtain nombre de cas, on imagine par exemple le déplacement de l’industriel quand il est trop près d’une agglomération. Collectivement, c’est une meilleure solution que d’exproprier les habitants proches. Dans un certain nombre de cas, c’est possible. Ca ne l’est pas toujour s pour les grosses usines chimiques. Cependant, le déplac e m e n t d e l ’ i n s t a l l a t i o n e s t t o u t à fa i t envisagea ble pour les stockages d’explosif ou de GPL parce que cela représente un coût moindre que les mesures f o n c i è r e s l o u r d e s d a n s u n P P R T. C e t t e démarche est prévue comme cela par l a l o i . L’ E t a t n e p e u t p a s i m p o s e r à u n industr iel la fer meture de son install a t i o n o u l ’ o b l i g e r à s e d é p l a c e r. L a France est un Etat de droit et le préfet ne peut pas ordonner la fer meture d’un site qui serait là depuis 30 ans , même si sa situation vis-à-vis de l’urbanisation n’est pas acceptable. C e p e n d a n t , d a n s l e c a d r e d u P P R T, i l e s t t o u t à fa i t p o s s i b l e , a ve c l e m ê m e fi n a n cement tripartite, d’organiser le déplac e m e n t d e c e t i n d u s t r i e l . C ’ e s t e ff e c t i vement le dispositif que nous sommes en train d’imaginer dans le cas de Jarr y pour citer cette commune. J’ajoute que la loi Grenelle II qui a été i d e n t i fi é e d a n s l e c a d re d e l a t a b l e r o n d e « r i s q u e s i n d u s t r i e l s » , v a n o u s p e rm e t t re d e s i m p l i fi e r g ra n d e m e n t l a p ro c é d u r e d a n s c e c a s . E n e ff e t , t e l l e q u e la loi de 2003 était écr ite, pour arr iver à c e d i s p o s i t i f, i l fa l l a i t f a i r e d e u x p r o c é d u r e s . I l fa l l a i t fa i r e u n p r e m i e r P P R T q u i disait « on expropr ie 500 maisons », pour e n s u i t e e n fa i r e u n s e c o n d p o u r d i r e « n o n , fi n a l e m e n t o n va d é p l a c e r l ’ i n dustriel à l’origine du risque plutôt que d’expropr ier les 500 maisons ». C’était une démarche en deux temps totalement illisible et totalement incompréhensible pour le commun des mor tels . La l o i G re n e l l e e n m o d i fi a n t l a l o i B a c h e l o t sur ce point-là, per met dorénavant de fa i r e u n e s e u l e p r o c é d u r e . D e p l u s , s i l e s décrets d’application sortent à temps, nous pourrons adopter cette démarche p o u r l e c a s d e J a r r y. I Renaud Holt J e s u i s c h a r g é d e p r o j e t s P P R T, n o t a m ment sur le plan de prévention des r isques technologiques EPV Antargaz. Je t r a va i l l e à l a D D T M d u N o r d s o u s l ’ a u tor ité de Monsieur Lalar t. Je voulais rebondir sur les problématiques soulevées p a r M o n s i e u r Ta r a s s i o u x c o n c e r n a n t l ’ i n tégration raisonnée des r isques dans l’aménagement du territoire, chose sur l a q u e l l e j e s u i s t o u t à fa i t d ’ a c c o r d s u r l e p r i n c i p e . J e s o r s d ’ a i l l e u r s d ’ u n e fo r m a t i o n q u i n o u s fo r m e à l ’ a p p r o c h e g é o s y s témique de l’intégration dans les terr i- 57 Atelier 1 toires du r isque. Mais je vois u n p ro b l è m e par ra ppor t à cela. C’est un peu les dél a i s q u i s o n t fi x é s d a n s l a r é a l i s a t i o n d e s PPRT qui sont, je pense, incompatibles avec l’intégration raisonnée du r isque dans les territoires. Sur ce principe de l’intégration raisonnée du r isque dans l’aménagement du territoire, je pense q u ’ i l fa u d ra i t s e ra p p ro c h e r p l u s d e s communautés de communes et des coll e c t i v i t é s a fi n d e s e r é u n i r e t d e p ro fi t e r justement des documents d’urbanisme tels que les Plans locaux d’urbanisme. Cela per mettrait de réfléchir avec les communes dans une démarche globale sur l’aménagement du territoire pour diminuer les risques. ce que j’appelle l’urbanisme du risque. Nous sommes en ce moment en train de tester s u r d e u x s i t e s ; i l y e n a u n d a n s l ’ Av e s n o i s e t u n d a n s l e s F l a n d r e s I n térieures. Nous testons avec des collectivités une approche de projets de développement à grande échelle et la prise en compte du risque. Dans un cas, il y a un PPRI approuvé : dans l’autre cas , nous avons la connaissance des risques et il n’y a pas de PPR. Nous regardons ensemble comment gérer la problématique du risque et l’interface avec les projets de développement de la commune. Nous sommes vraiment sur cette problématique-là en ce moment. Je souhaite dire une deuxième chose sur l’acceptabilité du risque, chose dont on ne parle pas beaucoup. C’est aussi un point à éclaircir car on voit q u e l e s p roba bilités de sur venance des accidents s o n t d e s p r o b a b i l i t é s p a r fo i s q u i s o n t l e s m ê m e s q u e l e s p r o b a b i l i t é s q u e vo u s avez, vous actuellement, de m o u r i r e n c e moment. On se retrouve donc avec des choses que l’on ne comprend pas toujours. I Jean-Bernard Vire I Philippe Lalart Le délai réglementaire est de 18 mois, mais nous avons la possibilité de rep r e n d r e u n a r r ê t é p o u r p r o l o n g e r. N o u s avons déjà signalé à plusieur s repr ises q u e l ’ o n s e ra a m e n é à l e fa i re p o u r l e s cas les plus compliqués. 58 J’ajoute une deuxième précision sur Pezer il, Mairie dure de délaissement c’est la possibilité p o u r u n p r o p r i é t a i r e d e s e d é fa i r e d e s o n b i e n à u n p r i x q u i s e r a é va l u é p a r l e s s e rvices des domaines , sans tenir compte de l’existence du risque. Ceci est donc une protection du propr iétaire contre la n o n - d é va l o r i s a t i o n d e s o n b i e n . tôt tendance à aller dans le sens d’une valor isation du bien. Ce que je dis est cr itiqua ble, je le reconnais bien volontiers. Mais ce que je peux dire, c’est que globalement, on ne constate pas de dépréciation majeure de la valeur du bâti, en dehor s des proximités immédiates . B i e n s û r, q u a n d i l y a e x p r o p r i a t i o n , c’est aussi sans tenir compte du risque. I l y a e n s u i t e e ff e c t i v e m e n t c e q u i e s t plus loin, qui n’est pas soumis à risque nul puisqu’il y a des recommandations o u d e s p r e s c r i p t i o n s d e r e n fo r c e m e n t , l a demande est souvent de dire « mais les biens vont perdre de leur s valeur s . Qui compense les per tes de valeur s de ces biens ? » I S e r g e Ta r a s s i o u x de Le troisième pilier de ce qui vient d’être dit, c’est « et demain ? ». Puisque le français est attaché aux droits de propr iété, d e s t r a va u x vo n t ê t r e m e n é s p o u r a m é liorer les conditions d’habitat et pour le p r o t é g e r. M a i s l o r s q u ’ i l s ’ a g i r a d ’ a vo i r une transaction, qui viendra ha biter à la p l a c e ? O n a fa i t d e s t r a va u x i m p o r t a n t s , la propr iété est grevée avec les r isques qui seront bien connus et per sonne ne v i e n d r a y h a b i t e r. A - t - o n p r é v u u n d i s p o s i t i f p o u r q u e l e fo n c i e r s o i t r e p r i s p a r l ’ i n dustriel, la collectivité ou par quelqu’un d’autre ? I Jérôme Goellner Jusqu’à présent, quand le risque est sig n i fi c a t i v e m e n t i m p o r t a n t , i l y a c e t t e procédure de délaissement. La procé- Il y en a eu pas mal d’études qui ont é t é fa i t e s j u s q u ’ à p r é s e n t p o u r e s s a y e r d’évaluer la dévalor isation de biens q u i s e r a i e n t s o u m i s à d e t e l s c a s . To u t e s m o n t r e n t q u ’ e n fa i t i l n ’ y a p a s v r a i m e n t d e p e r t e d e va l e u r s i g n i fi c a t i ve dans ces cas-là. Ces biens continuent à se vendre. Ce que je vais dire est peutê t r e p r o v o c a t e u r, v e u i l l e z m ’ e n e x c u s e z e t l e p r e n d r e a v e c d e s p i n c e t t e s . C e rtains discours ont tendance à dire que la limitation des constr uctions nouvelles d a n s c e s z o n e s - l à p r o v o q u e u n e c e rt a i n e r a r é fa c t i o n d e l ’ o ff r e d e s b i e n s s u r le marché. Cela peut se traduire par une certaine augmentation du prix. Certains disent même qu’ils ont une maison où il a é t é i n t e r d i t d e c o n s t r u i r e e n fa c e , c e l a fa i t d o n c u n e z o n e v e r t e d o n t o n e s t sûre qu’elle va rester ver te. Cela a plu- Cela doit dépendre sur tout des endroits . Mais il est vrai que l’on n’enregistre pas de baisse. Au contraire, il y a une hausse parce qu’il y a d’autres phénomènes qui fo n t l e p r i x d u m a r c h é e t c e l u i - c i n ’ e s t p a s s i g n i fi c a t i f d a n s l a fi x a t i o n d u p r i x . C e p e n d a n t , l à o ù l e s g e n s o n t d e s d i ff i cultés, c’est dans le temps de l’incertitude : il y a des gens qui se n’achètent pas à cause de l’incertitude. Quand les t ra va u x s e ro n t r é a l i s é s , c e l a s e ra fa i t . Peut-être que la loi changera encore ? C e q u i e s t fo r t p o s s i b l e . M a i s a u j o u r d ’ h u i , l’incer titude pose problème. Les incohérences ne sont pas comprises par les gens. Je parlais tout à l’heure d’autoroute A7, des par kings… Je r igole mais cela m’attr iste parce que les projets de la ville sont bloqués. Les gens, en tant que ha bitant, citoyen et propr iétaire s o u ff r e n t d e l a s i t u a t i o n d a n s l a q u e l l e nous sommes aujourd’hui. 59 Atelier 2 équipements ? Une autre question que l’on pourra se poser porte sur la régulation dans un système où la responsabilité des acteurs doit être recherchée, mais où on peut faire face à des effets indésirables allant parfois jusqu’à des accidents majeurs. LA MAITRISE DU VIEILLISSEMENT obsolescence • maintenance ca n a l i s at i o n • fac t e u r h u m a i n m é c a ni s m e s d e d é gr a d a t ion cinétique • gouvernance • plan d e m o d e r n i s at i o n • r e c h e r c h e L e vi e illi s s e m e n t, d é fini t ion d’un sujet multi-facettes , multi-facteurs I Thomas Ailleret, Adjoint au chef du ser vice prévention des risques, DREAL Lorraine 60 Une installation vieillie est une installation qui ne répond plus aux performances qui sont attendues d’elle. Il peut y avoir plusieurs causes à cela. La première est que les performances ont changé, la deuxième est que les attentes ont changé. Cette différence entre l’attente et la réalité correspond plutôt à un phénomène d’obsolescence, lequel phénomène ne rentre pas directement dans le cadre de l’atelier d’aujourd’hui, mais que l’on évoquera à l’occasion. Nous souhaitons plutôt aborder aujourd’hui le vieillissement comme un phénomène de modification progressive d’un ou de plusieurs constituants d’une installation et qui fait sortir cette installation et l’exploitation de cette installation du champ opératoire prévu. En gros, l’installation ne fonctionne plus comme elle a été prévue. Cette modification et ces changements peuvent entraîner des effets indésirables qui peuvent aller d’un arrêt de production à un incident voire à des accidents. Les différents acteurs qui sont autour de la table aujourd’hui ont des prismes de vision tout à fait différents sur ce sujet : l’expert technique va avoir une vision sur ce qu’est que le vieillissement d’un équipement soumis à un cycle de contraintes. L’industriel, lui, va avoir une focalisation relativement importante sur les arrêts de production et les baisses de productivité que peut subir son installation. L’Etat et, dans des mesures un peu différentes, les associations voire les syndicats, vont se poser des questions sur les incidents, les accidents, sur l’augmentation éventuelle des rejets dans le milieu naturel. Le dernier acteur « grenellien » que je n’ai pas encore cité, ce sont les collectivités territoriales et par elles, le public. Elles vont se poser des questions plus orientées sur des accidents majeurs par exemple. Nous essayerons aujourd’hui de répondre aux questions : que connaît-on du vieillissement aujourd’hui ? Et comment doit-on le réguler ? Nous allons être amenés à nous poser certaines sous-questions : quelle est la nature du vieillissement d’un équipement, quelle relation entre l’équipement et l’installation ? Comment généraliser la compréhension que nous avons du vieillissement d’un équipement au vieillissement d’une installation, tout en sachant que le vieillissement de l’installation est un peu plus que la somme des vieillissements de tous les Vieillissement ou maintien de la condition opérationnelle : un pr oblème complexe I Ya n n M a c é , d i r e c t e u r d e s r i s q u e s accidentels à l’INERIS L’INERIS est un institut national en charge de la prévention, de l’identification et de la maîtrise des risques industriels. Ce que je vous propose, c’est de parler un peu plus dans cet atelier, non pas de vieillissement, mais plutôt de ce que l’on appellerait dans certaines industries, le maintien en condition opérationnelle. Cela met un double éclairage au sujet, qui est l’arbitrage per manent et quotidien : comment maintenir des équipements tout en gardant une efficacité, une productivité, je dirai même plus, une rentabilité des opérations. Pourquoi parlons-nous de cela aujourd’hui ? Il s’agit d’un enjeu à très grande échelle, d’un enjeu national qui a été identifié et clairement établi ce matin. On parle de milliers d’établissements porteurs de risques, de dizaines de milliers de kilomètres de canalisations avec un âge du parc qui peut être très significatif (un âge moyen de plus de 40 ans, avec des installations qui ont parfois plus que 50 ans). On parle d’opérations réalisées par des grands groupes qui ont des moyens, de l’expérience et un retour d’expérience, et qui sont déjà sensibilisés. Mais on parle aussi d’opération réalisées par des PME de parfois de quelques dizaines de per- sonnes et qui doivent traiter les mêmes problématiques. L’enjeu est donc là. Cela nous concer ne tous , soit en tant qu’exper t, soit en tant que professionnel, voire même en tant que r iverain. Alors comment répondre à cet enjeu ? On doit traiter d’un sujet complexe puisqu’un certain nombre d’objets techniques très différents inter viennent (canalisations , tuyauteries, ou systèmes instr umentés de sécur ité, réser voirs atmosphér iques , d’équipements sous pression etc.) et qui mettent en œuvre des technologies très différentes (béton, métallurgie, électronique, mécanique etc.), sans par ler de la diver sité des méthodes d’inspection qui sont associées à ces éléments. Cet enjeu est de grande complexité de par les technologies impliquées . Il peut y avoir une grande complexité pour une même technologie parce qu’elle peut être opérée dans des conditions très diver ses , parce elle est au contact de produits plus ou moins agressifs, plus ou moins corrosifs , avec des températures d’opération qui peuvent aller de moins 100° à plus de 500° selon les cas , dans des environnements pas toujour s très accessibles pour faire de l’inspection et encore moins de la maintenance. Il peut y avoir des canalisations enterrées , des tuyauteries calorifugées ou installées en grande hauteur donc inaccessibles , des éléments dans des milieux encombrés , sur des racks . Plusieurs tuyauteries peuvent coha biter et interagir entre elles. Et donc c’est une complexité qu’il faut gérer. Je ne serai pas exhaustif si je ne parlais pas de la dimension humaine qui est liée à la gestion 61 Atelier 2 de la politique d’exploitation, de la politique de maintenance associée à cela. C’est un facteur de complicité et donc éventuellement un facteur de risque, mais c’est aussi la clé du succès. On est face à un problème complexe. Y a-til une solution ? Je n’ai pas la solution mais je pense par contre qu’on a plusieurs leviers à notre actif, que l’on doit avoir la volonté d’activer. Je partirais en fait de choses qui ont été évoquées dans le cadre du Forum économique mondial de Davos ; en commençant simplement par l’aspect responsabilité. On ne gagnera que si on se sent tous responsables de cet aspect vieillissement, tous responsables au sens du développement durable, c’est-à-dire à la fois en termes de conscience environnementale, mais aussi en prenant en compte la dimension économique qui a été évoquée tout à l’heure, de façon plus ou moins polémique et la dimension humaine. Je voudrais rappeler que l’on parle non seulement de concertation qui implique à la fois les industriels, les pouvoirs publics, les experts, les riverains, mais aussi d’une autre dimension, la dimension historique. Quand on prend des décisions en la matière, il faut avoir en tête que c’est pour des dizaines d’années ; il y a vraiment une conscience à prendre en matière de prise de décision transgénérationnelle, afin de prendre si possible les meilleures décisions sur le très long terme, et non pas avec une simple vision sur le retour sur investissement à court terme. Et là se trouve notre axe de progrès. 62 Il y a un autre volet de l’aspect humain sur lequel il faut que l’on évolue : la maintenance. C’est l’affaire de tous, du manager, des décideurs, des investisseurs etc. Mais c’est aussi l’affaire au quotidien des opérateurs sur le terrain, qui sont là pour détecter les signaux faibles. Malheureusement, je crains que la notion d’opération de maintenance ne soit pas une opération vue comme une valorisation. Ce que l’on valorise, en France, ce sont les gens qui vendent, qui produisent, qui créent. Est-ce que l’on valorise quelqu’un qui maintient un outil dans son état de fonctionnement optimisé ? Je pense que cela peut passer aussi par une valeur d’identification et de mobilisation des gens, mais aussi de reconnaissance et de valorisation de l’effort fait en la matière. I Geneviève animatr ice Hermann, Journaliste Vous avez déjà des débuts de solutions à nous proposer. Je pense que vous avez lancé des pistes. Je vais donner la parole à Aleksandar Jovanovic qui va revenir sur la définition du vieillissement telle qu’on l’entend en Allemagne. Vous avez dit que c’était un problème émergent, pour autant, c’est un problème ancien. Je vous laisse nous dire ce que vous en pensez. L e vi e illi s s e m e n t d e s in s ta l l at ion s : L’ org a ni s at ion d u s u ivi d u vi e illi s s e m e n t e s t u n e nj e u t r è s ac t u e l I Aleksandar Jovanovic, Président directeur général chez Steinbeis A d va n c e d R i s k Te c h n o l o g i e s G m b H Je viens de Steinbeis Advanced Risk Technologies. C’est un organisme en Allemagne, actif aujourd’hui dans à peu près 50 pays du monde, dont le siège est à Badenwürtenberg. Cet organisme a en charge le transfert de technologies. Nous sommes nombreux aujourd’hui à s’occuper de ce problème-là, mais peut-être une chose particulière nous caractérise : avec à peu près 6 000 personnes engagées dans le réseau de Steinbeis, le principe est toujours celui de l’habileté, dans le sens où toutes nos activités sont basées sur des initiatives qui commencent sur une base économique. Notre mission est de faire le transfert de technologies d’une manière durable. Le problème du vieillissement signifie que l’on est toujours très content de travailler avec un groupe de personnes « âgées » sur ce problème. Pourquoi ? Parce que, en principe, cela veut dire que ce sont des experts qui savent de quoi on parle, qui connaissent le problème et qui se demandent comment le public n’arrive pas à comprendre que le vieillissement des installations est un problème. Je pense que tout le monde, à commencer par nous, doit se sentir concerné quand il voit un groupe de jeunes se préoccuper de l’installation qui pose problème. En effet, il est bien probable que l’expérience qui a été mise dans cette installation, dans la connaissance que l’on a d’elle, dans les matériaux, dans les solutions techniques, ne seront pas disponibles à ce moment-là. Et c’est ainsi que l’on commence, comme c’est le cas dans certains secteurs des technologies, à voir le problème du vieillissement non pas comme un « vieux problème des vieux » mais comme un « nouveau problème de risques émergents », et que l’on est surpris de voir à quel point les messages que vous venez d’entendre pendant la session plénière sont actuels. Je vous montre le livre dont vous avez vu le titre lors de la présentation du directeur de la recherche de l’Ecole Polytechnique. Nous devons commencer à penser aux choses qui sont difficiles à imaginer. Je finirai mon intervention en disant qu’il faut se préparer à ces situations inédites. Il faut s’ouvrir et ouvrir l’esprit à ces messages et aux signaux faibles. Ceci est effectivement un paradoxe car les systèmes de sécurité sont faits aujourd’hui pour être sûrs, pour être comme le château où toutes les choses sont en ordre mais les signes faibles ne sont pas nécessairement leurs points forts. Le dernier message est qu’il faut le faire au niveau européen parce que les dangers et les aléas causés par le vieillissement ne vont pas s’arrêter aux grilles d’une usine ou aux limites de la responsabilité des DREAL ou même aux limites de l’Etat. I Geneviève Hermann Existe-t-il des différences de pratiques entre la France et l’Allemagne ? En quoi chaque pays pourrait-il profiter l’un de l’autre ? I Aleksandar Jovanovic Vous connaissez le nom officiel d’Allemagne, c’est RFA, République Fédérale. Cela veut dire que le système de sûreté et de sécur ité est organisé sur un pr incipe fédéral, très décentralisé, des fois très pr ivé. En France, tous les systèmes centraux et centralisés ne sont pas toujours facile à comprendre pour ceux qui viennent d’ailleur s . Les deux ont des a pproches extrêmes parfois et, comme dans la vie, la voie vers la solution ou le compromis n’est peut-être pas fixé mais flexible. Cela peut, surtout au niveau européen, per mettre d’agir en respectant l’intérêt économique privé des personnes d’un côté, l’intérêt public général de l’autre. Cela va être un défi dans le futur aussi dans le domaine du vieillissement. L’exemple de la constr uction de la nouvelle gare de Stuttgar t qui a provoqué des protestations nous donne une bonne idée des surprises qui sont devant nous . 63 Atelier 2 I Thomas Ailleret Je crois que nous pouvons retenir de cette première partie le constat que le problème est à la fois technique et difficile, complexe et qu’il mérite une réflexion pas seulement technique. On retient l’enjeu et la nécessité de réfléchir sur l’implication et la responsabilité de tout le monde. Les transferts de compétence sur ces sujets, à la fois de la technologie vers l’industrie et d’une génération à l’autre, doivent permettre d’avancer sur ce sujet. I Geneviève Hermann Nous allons donner la parole aux gestionnaires et aux personnes qui vivent le problème sur le terrain. Jean-Marc Jaubert, vous êtes confronté au problème du vieillissement. Certains incidents dont Donges ont été dus à un problème de vieillissement sur une canalisation. Vous préférez parler d’obsolescence. Pourquoi ? Obsolescence et vieillissement recouvrent-ils la même chose ? Le vieillissement vu par un gestionnaire Les modes de dégradation concernent plusieurs « fonctions » dans les industries. I Jean-Marc Jauber t, Directeur de la sécur ité industr ielle chez Total 64 Je suis directeur de la sécurité industrielle du groupe Total et je connais bien la chimie puisque j’ai pris ma fonction en tant que directeur de la sécurité industrielle après la catastrophe d’AZF, dans la chimie. Pendant quelques années, j’ai assumé cette responsabilité. Pour faire le lien avec l’obsolescence, j’ai commencé ma carrière d’exploitant, en gérant des unités haute pression de polyéthylène, qui avaient à l’époque une capacité de l’ordre de 100 000 tonnes par an et qui sont aujourd’hui arrêtées ou en cours d’arrêt tout simplement parce qu’elles ont été remplacées par une autre technologie « phase gaz » et basse pression, beaucoup plus performantes, avec une capacité décuplée. C’est le phénomène d’obsolescence qui impacte d’une certaine manière positivement le vieillissement puisqu’il implique un renouvellement les installations, et cela est lié aux investissements, on peut effectivement lutter contre ce qu’on appelle le phénomène de vieillissement. Ce qui nous préoccupe aujourd’hui, ce sont des installations qui ne sont pas renouvelées ou qui restent « en l’état » : comment lutte-ton contre ce mécanisme dit de vieillissement ? Je ferai également une remarque de vocabulaire. Je n’aime pas le terme de vieillissement. En tout cas, je le trouve à la fois trompeur et négatif. Il faut plutôt parler de mécanisme de dégradation. Notre rôle d’industriels est d’abord de connaître et de maîtriser ensuite les mécanismes de dégradation qui peuvent être des phénomènes de corrosion, de fatigue, d’usure, et qui peuvent avoir des cinétiques relativement différentes, des cinétiques rapides ou, plus souvent, des cinétiques lentes. C’est pour cela que l’on aime bien parler du terme de vieillissement. Mais ce terme est réducteur et ne permet pas, me semble-t-il, d’aller au fond des choses. Vous faisiez également le lien avec des accidents récents. Dans la présentation écrite de notre atelier, étaient mentionnés un certain nombre d’accidents. Cette liste est intéressante parce qu’elle illustre la difficulté du propos. Quand on parle de l’accident de Carling qui est arrivé l’an passé, cela n’a strictement rien à voir avec un problème de vieillissement. Quand on parle de l’accident de La Crau SPSE, i l s ’ a g i t e ffe c t i ve m e n t d e p h é n o m è n e s d e fatigue qui étaient parfaitement identifiés. Je ne peux pas dire parfaitement suivis, la preuve est qu’il y a eu un événement, mais en tout cas suivis par des experts, en particulier de l’Ecole des Mines de Paris. Ceci était donc connu, répertorié, suivi, probablement d’ailleurs mal calculé en termes de vitesse de fatigue, puisqu’il y a eu un problème. Dans ce cas, il s’agit de cinétiques longues de plusieurs années. L’accident de Donges a causé une pollution de plusieurs centaines de tonnes de fioul lourd dans la Loire. Il a été un sinistre lourd pour un groupe comme Total puisque il fait écho à ce que tout le monde a vécu avec la catastrophe de l’Erika. Cet accident était lié à un phénomène de mécanismes de dégradation probablement relativement courts, en tout cas pas de l’ordre de plusieurs années. Il y avait une fuite d’eau avec un mécanisme de corrosion accélérée. Vous voyez que le facteur temps peut être relativement différent. Si on adopte un vocabulaire trop simpliste, on peut rapidement louper un certain nombre de problématiques et surtout de bonnes solutions. Ceci dit, notre rôle d’industriel est de faire en sorte que ces accidents n’arrivent pas, il y a donc eu un échec. Notre rôle est de faire en sorte que nous sachions maîtriser justement ces mécanismes de dégradation dont on parle. Pour un industriel, le sujet des mécanismes de dégradation, pour reprendre ce terme que je préfère, est loin d’être un sujet récent. Je dirais même qu’il est au cœur de notre fonction et qu’il est géré de manière relativement pragmatique, par trois types d’organisations dans une usine. La première organisation, celle dont on a parlé il y a quelques instants, est la fonction « exploitation-maintenance ». Nos personnels d’exploitation, nos personnels de main- tenance sont là pour observer la vie de leurs installations et pour intervenir sur les dysfonctionnements et réparer. La deuxième fonction ne dépend pas de la fonction « exploitationmaintenance » ; c’est la fonction « inspection technique », une fonction indépendante, souvent rattachée au directeur de site. Cette fonction regroupe des experts très pointus, qui ont une très bonne connaissance de mécanismes de corrosion et de fatigue de métal. Ils ont pour rôle de regarder sur le long terme l’évolution de l’installation. Ils ont aussi pour rôle de faire des préconisations en matière de prévention. Ces fonctions sont souvent, en tout cas c’est le cas dans les gros sites, composés d’experts reconnus par l’autorité de contrôle. La troisième fonction est la fonction « sécurité », qui, là encore, est indépendante, de « l’exploitation-maintenance ». Elle a pour rôle d’être à l’écoute et de regarder les signaux faibles. Malheureusement, je dois dire qu’il y a souvent des signaux forts qu’il faut traiter en priorité, avant de traiter les signaux faibles. Cette fonction a autorité pour intervenir, pour éventuellement arrêter les installations, pour faire des retours d’expérience et pour analyser les accidents et les quasi accidents. Fort heureusement, il y a plus de quasi accidents. Cela nous permet d’analyser sereinement les dysfonctionnements. Dans cette dernière fonction « sécurité », n’oublions pas le rôle essentiel des Comités d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT), des représentants du personnel et de nos partenaires sociaux. Ils ont, au travers de cette instance extraordinairement impor tante, le rôle de lanceur d’alerte, le rôle de discussion avec la direction de l’usine, et qui est, là encore, totalement indépendant. Les CHSCT, dans les usines où ils fonctio n n e n t b i e n , s o n t d ’ u n e richesse très importante. 65 Atelier 2 Il y a donc trois organisations qui sont autonomes et qui permettent de maîtriser ce mécanisme de vieillissement. I Geneviève Hermann Vous avez fait la transition pour me permettre de donner la parole à Jean-Paul Cressy de la CFDT qui voulait justement mettre l’accent sur ce facteur humain. Pour vous, on voit souvent l’humain comme la source du problème. Mais c’est peut-être aussi la solution, un début de solution. Impor tance du facteur humain et organisationnel besoin de formation et d’émulation I Jean-Paul Cressy, Fédération Chimie Energie CFDT 66 J’appartiens à la Fédération Chimie Energie CFDT qui couvre à peu près 80 % des sites avec servitude, classés Seveso haut ou bas et des centrales nucléaires. Voilà pourquoi nous nous intéressons particulièrement aux risques industriels majeurs dans notre fédération. J’en suis délégué général en charge de ces questions. Nous essayons de pousser nos mandants à se former car si on devient membre de CHSCT par élection, on n’est pas immédiatement compétent sur ces questions. C’est un des axes très forts que essayons de développer. Ce n’est pas toujours facile ; le frein ne vient pas toujours que des directions d’ailleurs, les réticences viennent aussi parfois de nos collègues. Se former, vous le savez bien, ce n’est pas toujours facile, c’est technique… La CFDT pousse à la formation et s’investit dans des réseaux afin de participer aux réflexions avec l’INERIS ou l’ICSI. A côté de cela, nous avons un réseau de militants que l’on anime sur cette question. Notre rôle, bien entendu, est d’avoir une représenta- tion syndicale de l’approche des salariés du risque de façon à le confronter avec la vision de la direction et aux visions du contrôle. Chacun a un éclairage tout à fait respectable, mais nous essayons d’apporter des éléments pour pousser la réflexion. J’ai bien aimé la présentation de Patrick Lagadec, Grand témoin, qui rappelait ce matin le travail qu’il fallait faire sur les fonctionnements et la gestion de l’imprévisible. Je pense qu’il y a beaucoup de plans, de consignes, de certification comme les normes ISO. Mais en fait, là où interviennent fortement la compétence et le professionnalisme des salariés, quel que soit leur niveau, c’est leur capacité à répondre à quelque chose qui n’est pas prévu. Dans une installation, il y a énormément de faits imprévus, certains peuvent en être choqués. Ce qui est important en tout cas, c’est de pousser ceux qui sont opérationnels et ceux qui savent réagir au bon moment, qui empêchent les divergences ; ce sont là les grandes forces que l’on peut développer. Les enquêtes nous fournissent des retours d’expérience sur ce qui n’a pas fonctionné et ce qui n’est pas le plus visible. Nous menons actuellement un gros travail avec plusieurs organismes sur ce qu’on appelle les facteurs humains et organisationnels du travail et de la sécurité, qui sont pour nous absolument essentiels. Une fois que l’on a fait cette analyse-là, on avance sur les questions d’organisation. Je pensais que j’allais être le seul à en parler, mais je vois que d’autre intervenants ont dit des choses sur la maintenance et sur l’organisation de l’entreprise. Effectivement, c’est un domaine que nous souhaitons développer. La CFDT souhaite avoir une vision et apporter un débat dans la discussion, voire négocier sur le sujet. Il y a quelques tensions avec la direction sur cette question, mais c’est un autre sujet. Je pense que quand on dit que l’on veut porter cela, on veut dire que l’on s’y intéresse et que l’on veut se mettre d’accord sur les formes et des choses à améliorer. Quand on se met d’accord sur une organisation , c’est pour pouvoir la juger après. L’idée est de ne pas avoir seulement une vision déterministe ou probabiliste, mais d’être dans un dynamisme qui permet d’intégrer toutes ces dimensions de gouvernance, d’organisation d’entreprise et d’évaluation. C’est sûrement un élément essentiel de la compréhension et de la connaissance sur comment est gérée la sécurité et comment est prise en compte la sécurité de l’entreprise. I Geneviève Hermann Il y a des problèmes techniques, nous l’avons vu. Il y a aussi des problèmes humains organisationnels. Christian Lecussan, représentant l’association francilienne des industriels, va nous expliquer les besoins des industriels pour pouvoir avoir l’organisation, les compétences voulues quand on n’est pas une entreprise comme Total ou quand on ne travaille pas dans le nucléaire. Quel accompagnement pour les petits industriels dans le travail de prise en charge des suites du plan de modernisation des installations industrielles Par Chr istian Lecussan, Directeur de l’AFINEGE Notre association est effectivement francilienne. Toutes les activités sont représentées dans notre association : la chimie, l’industrie du pétrole, l’automobile, l’extraction de granulats, les verriers... Des activités très variées nous ont rejoints. Avant de diriger cette association, j’ai passé un certain temps de ma vie dans la chimie, plus particulièrement dans la chimie pharmaceutique. Je voudrais citer une expérience pour rebondir sur ce qu’a dit Monsieur Jaubert tout à l’heure sur la nécessité d’appréhender non pas le vieillissement, mais les mécanismes de dégradation. Il s’agit donc d’une petite expérience tout à fait personnelle sur un des sites sur lequel je travaillais. On avait des cuves où l’on stockait de l’ammoniac gazeux sous forme liquide. Une était très très vieille, l’autre relativement jeune. Quand on a fait les inspections pour vérifier l’état de ces cuves, on s’est aperçu qu’en fait la très vieille cuve était en très bon état, mais c’était la nouvelle qui ne l’était pas. J’ai appris qu’il y avait des systèmes de fissuration sous contrainte entre le métal et l’ammoniac qui étaient aléatoires et qui ne dépendaient pas du tout de l’âge, au contraire. Tous les experts me l’ont dit : lors que l’on a une cuve qui est en bon état, surtout, il faut la garder, même si elle est très vieille. Cela, je ne l’ai appris qu’après, parce que je ne suis pas du tout métallurgiste. Donc ce n’est pas forcément une question d’âge. C’est bien une fonction, une nécessité de comprendre les mécanismes de dégradation qu’il peut y avoir. Je ne voudrais pas insister plus longtemps sur cela, mais revenir plutôt sur le plan de modernisation des installations puisque c’est notre sujet. Ce plan a démarré au mois de janvier. Il a été annoncé en janvier mais il est plus ancien que cela. Simplement, les réactions que nous avons au niveau de l’association, par rapport à ce plan, est qu’il y a de bonnes choses dedans. Surtout le fait d’avoir impliqué les industriels dans sa mise en œuvre et son déroulement a été appré- 67 Atelier 2 68 cié. Du fait d’avoir associé complètement le monde industriel, il s’est énormément mobilisé. On ne peut que remercier aussi bien les syndicats de la chimie que du pétrole, les entreprises qui ont mobilisé énormément d’experts. Cela a permis la réalisation notamment de guides qui vont servir à mettre en place ces plans de modernisation. Cela nous paraît effectivement une chose extrêmement positive et utile. Par contre, on a quelques inquiétudes et quelques soucis. D’abord les soucis qu’ont les entreprises : je vous l’ai dit tout à l’heure, on a des grandes entreprises, on a des petites entreprises. Toutes nos industries sont extrêmement variées, extrêmement diverses. Il n’y a pas d’homogénéité, il n’y a pas de système unique, il n’y a pas de cause unique pour les uns ou pour les autres. J’aurais tendance à dire, essayons de ne pas de faire d’amalgame ou de comparaison avec le nucléaire. Ce sont deux choses complètement différentes. Vouloir comparer les uns avec les autres ne nous paraît pas une excellente chose. Essayons de ne pas utiliser des rouleaux compresseurs systématiques pour tout le monde. Il y a effectivement des groupes qui ont peut-être plus de moyens que d’autres, mais il y a aussi des entreprises qui sont toute petites. On a parlé des Seveso, le plan de modernisation fait effectivement un lien aussi avec les SGS (Systèmes de Gestion et de Sécurité) des sites Seveso. Mais il y a des sites Seveso qui sont de toute petite entreprise. Monsieur Chambon a rappelé tout à l’heure que, ne serait-ce que dans la chimie, 80% des entreprises ont moins de 300 salariés. Il y a des entreprises dans d’autres secteurs que la chimie qui ne sont pas à ce niveau-là de salariés et qui sont un petit peu craintives. Quelque part, elles se disent : « quel est donc ce mammouth qui va m’arriver sur le coin de la figure, et comment je vais arriver à m’en sortir ? ». Il y a forcément quelques inquiétudes et interrogations. Nous sommes extrêmement favorables à l’arrivée des guides, plutôt qu’avoir un corpus réglementaire comme on a souvent l’habitude de le faire en France. Vous n’avez qu’à prendre les codes que vous pouvez connaître et que vous pratiquez : le code de l’environnement et le code de la sécurité. Vous mettez celui d’il y a 10 ans à côté de celui d’aujourd’hui, en prenant la même édition : vous verrez que l’épaisseur n’est plus du tout la même. Il faut être capable d’analyser et de digérer ce corpus réglementaire. Aussi, l’idée de partir sur un système de guides est très bonne. Mais ces guides vont devoir être mis en œuvre et appliqués. Une des craintes que nous avons est que nous avons besoin de parler le même langage, aussi bien au niveau des industriels qu’au niveau des organismes de contrôle. Il faut que ces guides soient compris dans leur application, de la même façon par tout le monde. Ce que nous aurions tendance à demander, c’est d’ailleurs déjà pratiqué dans un cas ou deux, ce sont des formations et des informations avec des agents de l’administration, avec des salariés de l’industrie afin que l’on ait tous la même compréhension de ce qui est écrit. Les guides doivent être applicables. On n’a pas forcément des équipes complètes pour pouvoir, dans toutes les unités, détailler et décliner tout ce qu’il y a. Donc il faut que ce soit clair, facile d’utilisation. Le dernier point sur lequel je voudrais insister, en ce qui concerne les entreprises, petites et moyennes, c’est qu’elles n’ont pas forcément les ressources en interne pour mettre en œuvre ce plan. Ce qui veut dire qu’elles vont faire appel à des cabinets conseils. Mais rien ne garantit la qualité du travail qui sera fait. Quelque part, c’est quelque chose qui nous embête. On l’a déjà vécu sur un certain nombre de sujets. Je ne sais pas si en Ile-de-France c’est différent d’ailleurs. Le marché est colossal, il y a beaucoup d’entreprises. Même si quelqu’un n’est pas bon, il arrive toujours à s’en sortir. Quelqu’un qui est bon, il est plus facile effectivement de le reconnaître. C’est pour cela que l’on a beaucoup parlé de ces expertises. Laurent Michel est revenu ce matin sur cette notion de tierce expertise. Quelque part, je dirai pourquoi pas, la tierce expertise, mais aussi pourquoi ne pas aller plus loin, pourquoi ne pas aller vers l’accréditation soit de services – on a parlé des services d’inspection ; j’en ai connu quelques-uns dans des usines où il y a des personnes extrêmement compétentes, certainement plus compétentes que dans des cabinets extérieurs-, mais pourquoi ne pas aller jusqu’à l’accréditation de gens qui soient capables effectivement de rendre ce service aux entreprises. I Geneviève Hermann C’est un point important sur lequel nous pourrons revenir tout à l’heure, au moment des débats. On l’a vu, il y a un écart entre les problèmes auxquels les PME et le nucléaire sont confrontés. Mais les industriels peuvent peut-être profiter d’un retour d’expériences du nucléaire. Jean-Rémi Gouze peut peutêtre défendre ce point de vue. Vision et stratégie du nucléaire I Jean-Rémi Gouze, Commissaire de l’Autor ité de Sûreté Nucléaire L’ASN, vous le savez, depuis 2006 est une autorité administrative indépendante. Le collège des cinq commissaires auquel j’appartiens, représente cette indépendance. Nous contrôlons en France à la fois la sûreté radioprotec- tion médicale et ce que nous appelons « les grosses bêtes », la sécurité nucléaire et les 58 réacteurs nucléaires sur le territoire français. Si l’on regarde l’âge moyen du parc français et l’âge moyen du parc mondial, nous voyons qu’il y a des centrales nucléaires qui ont jusqu’à 42 ans dont certaines sont en Allemagne, ce qui est paradoxal puisque c’est un des pays qui voulait arrêter le nucléaire. Pourtant il a les centrales les plus anciennes. En moyenne, le parc nucléaire français est plutôt plus jeune que la moyenne du parc mondial. La caractéristique de notre approche en matière de sûreté dans le nucléaire et de gestion du vieillissement, c’est que les autorisations d’installations nucléaires de base ne sont pas données pour une durée fixe, elles sont valables par période de 10 ans ; et tous les 10 ans, nous procédons à un examen qui tient compte de l’évolution du vieillissement des équipements, et qui nous permet de dire si oui ou non l’installation peut fonctionner 10 ans de plus. Cet examen décennal n’est pas seulement fait à l’année 10, mais il se prépare trois ans avant, et il se poursuit deux ans après. Nous regardons non seulement la conformité de la centrale à la réglementation qui existait au moment où elle a été autorisée, mais nous regardons aussi l’évolution, le vieillissement et l’état de la centrale par rapport aux nouvelles techniques, aux règles de l’art et au retour d’expériences. Dans le nucléaire, nous avons eu des signaux forts comme Tchernobyl, the Three Mile Island et le 11 septembre, qui nous ont amené à faire évoluer les règles de sûreté demandées aux centrales. L’arrêt décennal est aussi l’occasion de remettre à niveau et d’améliorer la sécurité des centrales nucléaires. Une caractéristique de ce parc de 58 centrales est qu’il est extrêmement homogène. Il y a un seul exploitant jusqu’à présent (EDF) et 69 Atelier 2 une technologie générique (l’EPWR) ; c’est intéressant parce que nous pouvons avoir une méthodologie générique de suivi du vieillissement. EDF a très tôt, depuis 40 ans, développé un suivi très compétent et très fort de ce vieillissement. Mais il y a aussi un inconvénient fort : dans l’hypothèse où nous trouverions un défaut générique qui s’applique à la totalité ou à une partie du parc, un peu comme quand une série de voitures doit être rappelée par le constructeur, nous devrions proposer l’arrêt de tout ou partie du parc nucléaire, ce qui serait une décision lourde. En ce qui concerne les équipements dans les centrales, nous avons distingué trois types d’équipements. Ceux qui sont fixes sont impossibles à changer et contribuent à la sûreté du réacteur nucléaire. C’est le cas particulier de la cuve qui contient le réacteur et du bâtiment en béton qui l’abrite. Nous avons un débat important avec EDF tous les 10 ans afin de vérifier si nous ne sommes pas dans la zone interdite de la courbe, en particulier pour les défauts des cuves. Il y a des défauts de fabrication et des défaut qui se créent et l’irradiation augmente les défauts et fragilise la cuve. Et il faut donc regarder tous les 10 ans l’évolution de cette courbe. Il y a par ailleurs les équipements très coûteux, mais que l’on peut changer. C’est un choix économique de la part de l’entreprise. Par exemple, elle continue mais elle change les générateurs de vapeur ou les couvercles de cuves qui sont des équipements coûteux qu’il faut amortir sur une longue durée. Enfin il y a les équipements que l’on change au fil de l’eau, les vannes, les tuyauteries, les moteurs qui eux sont parties intégrantes des programmes de maintenance. 70 Voilà donc la démarche que nous avons. Nous pensons que la méthodologie mise au point dans le nucléaire est un modèle tout à fait intéressant à transposer dans les industries dites classiques, notamment les industries Seveso, et celles qui sont concernées par le plan de surveillance de vieillissement des installations. Nous pensons aussi qu’il est extrêmement important, et je me réjouis de ce qui a été dit par mon voisin, d’avoir une comparaison avec l’étranger. Quand je parlais des retours d’expériences de Tchernobyl, et de the Three Mile Island, nous avons beaucoup d’échanges avec nos homologues, avec l’ambition d’avoir la méthodologie la plus commune possible, même si les normes ne sont pas les mêmes, sur la gestion du vieillissement et sur le niveau de sûreté que nous imposons à nos centrales. I Geneviève Hermann Nous l’avons dit, ce qui était intéressant dans la démarche de ce plan, est qu’il est basé sur des guides professionnels et non sur des corpus réglementaires. Ces guides autour desquels beaucoup d’industriels et de syndicalistes entre autres ont participé. Il y a eu un certain consensus sur cela, ce qui est un bon présage pour la suite de la mise en œuvre. Je laisse donc la parole à Cédric Bourillet pour présenter ces guides, la manière dont ils ont été menés et en quoi ils vont permettre de lutter contre les mécanismes de dégradation, pour ne pas prendre le terme de vieillissement. Genèse et impor tance du plan de modernisation des installations industrielles I Cédric Bourillet, Sous-directeur des risques accidentels au Ministère en charge du Développement Durable A propos du plan vieillissement, pour ne rien vous cacher, je pense que les choses sont parties en 2007-2008 d’un constat d’échec de la part de l’administration et d’un peu des industriels. Nous sollicitons beaucoup le monde industriel et les responsables des risques sur un certain nombre de domaines. Probablement n’avons-nous pas assez regardé les sujets liés aux mécanismes de dégradation, pour reprendre les termes. Il y a des mécanismes de dégradation plutôt rapides et d’autres plutôt lents, mais effectivement, notre portefeuille installations industrielles vieillit… La statistique que l’on a sorti il y a deux ans nous a montré, par exemple, que nos canalisations d’hydrocarbures font 9 000 kilomètres en France et ont 45 ans de moyenne d’âge. Les grosses installations chimiques, les productions d’engrais, les raffineries ont des âges largement comparables, voir largement supérieurs pour certains des sites. Ce vieillissement des installations fait qu’aujourd’hui il peut y avoir des mécanismes de dégradation qui ne présentent pas de risques particuliers pour les deux, trois, cinq, dix premières années de fonctionnement, et qui aujourd’hui nous amènent face à de nouveaux défis qu’il s’agit, pour les industriels, de maîtriser et pour l’administration de contrôler. Il y a eu une série d’accidents en 2008. On a commencé à en citer certains, mais j’en mettrai aussi en 2010. Je prends l’exemple de la Hongrie, l’accident qui a eu lieu sur la digue, pour en avoir parlé un tout petit peu avec que mon homologue hongrois la semaine dernière. Si les conséquences environnementales, humaines et économiques sont bien identifiées, les causes le sont un peu moins. Mais nous avons une certitude : l’accident est grosso modo dû au mécanisme de dégradation, de vieillissement. Toutes les autres hypothèses (les pluies, les contenus) ont déjà été mises à l’écart. Cette série d’incidents, d’accidents et de presque accidents des années 2008-2010, nous ont signifié que nous avions probable- ment sous-estimé un sujet côté administration. C’est peut-être aussi le cas chez certains industriels selon les principes que rappelait Jean-Marc Jaubert. Nous avons voulu mettre en place ce plan qui s’est appelé finalement le Plan de modernisation des installations industrielles, pour éviter le mot le vieillissement pour d’autres raisons encore. Il a été élaboré sur une année complète. Nous avons voulu associer beaucoup les industriels, les experts, les chercheurs. Au total, ce sont 30 personnes qui ont été mobilisées pour cette élaboration. On a eu l’occasion de remercier l’ASN pour son appui, car elle avait beaucoup d’avance, en tout cas côté administration, sur la réflexion et sur l’expertise de ces sujets-là. In-fine, le plan a été complètement achevé le 13 janvier dernier. On l’a dit, il contient 38 actions orientées entre un certain nombre de priorités, environ une dizaine. La première, c’est de valoriser le savoir-faire des professionnels et de laisser un certain nombre d’éléments sous la plume des professionnels dans des guides techniques qui permettront de couvrir le plus intelligemment possible l’intégralité du spectre qui est concerné, en prenant en compte la spécificité des structures et des mécanismes de dégradation. Cette première priorité est de valoriser l’acquis professionnel et de la mettre au centre du dispositif des guides professionnels. Le deuxième axe, c’est le facteur humain. Il y a un certain nombre d’actions qui portent sur la façon dont on doit s’organiser pour « adresser » ces sujets, pour utiliser un anglicisme, mais aussi pour s’organiser au quotidien. Tout à l’heure, on citait les systèmes de gestion de sécurité imposés aux les établissements Seveso Seuil haut ; une des actions est de généraliser ces outils aux canalisations de transport. Troisième axe, ce sont les actions de recherche. Aleksandar Jovanovic et Jean-Marc Jaubert 71 Atelier 2 le disaient, il y a des endroits où nous avons été surpris par ce qui s’est passé, où tout n’a pas été selon les plans voulus. Les industriels se sont proposés de développer des efforts de recherche ; l’Etat s’est proposé d’abonder les fonds qui seront mis en place. Il y aura donc tout un volet « recherche » c’est logique, dans ce plan de vieillissement. Sur le plan international, pour en avoir aussi discuté un tout petit peu avec mes collègues, mon sentiment est qu’il y a un Etat (parmi les grands Etats) qui est plus avancé que nous sur cette réflexion, pour le secteur non-nucléaire, c’est le Royaume-Uni. Ils ont eux-mêmes sorti un plan de vieillissement il y a à peu près de deux ans. De ce fait, le Royaume-Uni puis la France ont présenté leurs démarches. C’est quelque chose qui est en train de prendre au niveau européen. Par exemple, la Commission Européenne nous a présenté la semaine der nière une étude qui n’est pas encore publique (elle le sera dans deux semaines) concer nant l’impact économique des accidents liés au vieillissement, et uniquement au vieillissement, dans les raffineries européennes sur ces 10 der nières années. Un seul chiffre : elle a estimé à 1,6 milliard d’euros le coût qui a été généré par des accidents liés au vieillissement dans ces raffineries. Même au niveau européen, les études et les réflexions commencent. Vous savez peutêtre que la Commission dépose son premier projet de directive Seveso III dans quelques semaines . Nous mettrons cela en musique l’an prochain. Le sujet est lui aussi en train de croître au niveau européen. Questions de la salle 72 I Robert Trouvilliez, Secrétaire général de Nord Nature Environnement, Président de Béthune Nature J’ai plusieurs questions concernant l’obsolescence des industries. On sent qu’il y a des obstacles financiers, des problèmes économiques pour appliquer les solutions. Par exemple, dans la région de Loos-lez-Lille, il y a une industrie qui utilise encore le mercure pour faire du chlore. Or, cette industrie devait arrêter d’utiliser le mercure en 2010. Elle a obtenu un délai supplémentaire, allant jusqu’à 2015. Une autre question : On arrive à étudier le vieillissement des matériaux quand il s’agit de fabriquer un frigidaire, une machine à laver, pour tout à chacun. Pourquoi on n’utilise pas ces techniques pour avoir des usines qui vieillissent beaucoup moins vite ? Pourquoi ne pas utiliser l’acier inoxydable par exemple quand c’est nécessaire. Je sais que la construction du pont de Millau n’a pas utilisé d’acier inoxydable ; et certainement il y aura là un vieillissement qui va coûter très cher. I Jean-Rémi Gouze Je voudrais rebondir sur l’aspect nucléaire. La courbe que j’ai montrée tout à l’heure correspond aux spécificités du nucléaire, des cuves de réacteurs, de l’évaluation de la façon dont la cuve évolue pendant les 30 ou 40 ans, voire plus de sa vie. Il y a eu énormément de recherche et de développement faits en l’occurrence par EDF, sur la façon dont les défauts de fabrication de la cuve ont évolué sous irradiation. La problématique est que ces défauts sont si petits que l’on ne les a pas vus au moment de la fabrication, mais il faut les surveiller en cours d’exploitation de la centrale. C’est un cas très très spécifique. Vous avez raison, c’est vrai qu’il faut énormément de connaissances sur la façon dont les défauts et la cuve en l’occurrence évoluent pour s’assurer qu’il n’y aura pas dans les 10 ans d’exploitation à venir pour les centrales nucléaires, de risques pour la sûreté. Je pense que cela doit pouvoir se transposer aux industries classiques. On est dans des sujets qui peuvent relever de la métallurgie, probablement moins pointus, mais non moins difficiles car il y a tellement de nuances d’acier que cela doit être délicat d’optimiser à chaque coup. I Yann Macé Je pense que la recherche en la matière existe, et depuis de très nombreuses années. Il n’y a pas de problème là-dessus, plein d’instituts sont identifiés. Le problème que le sujet est très complexe et concerne beaucoup de technologies différentes. On n’a pas encore les solutions ou les réponses à tous les problèmes. Mais la recherche existe. Cela apparaît tout à fait évident. Elle est présente à la fois chez les industriels, dans les centres de recherche sur des sujets très spécifiques, dans des instituts du type institut national INERIS ou CETIM ou ce genre de choses. L’autre point dont nous pouvons discuter, c’est effectivement la structure, les modalités ou l’organisation qui met en commun cette recherche. De sorte que si nous arrivions à mutualiser d’avantage les efforts, segmenter un peu plus ou focaliser les efforts des uns et des autres sur des sujets différents mais complémentaires, on arriverait à avancer plus vite. Mais la recherche encore une fois existe. I Jean-Rémi Gouze Je vais donner deux exemples concrets, je pense que cela illustrera mieux la réponse à vos interrogations. On lance un programme de recherche, Cédric Bourillet l’a rappelé, par exemple sur les canalisations, pour mieux connaître les mécanismes de dégradation des canalisations et mieux les inspecter. Aujourd’hui, pour inspecter une canalisation, un des enjeux est de connaître la surface des canalisations. Même si vous savez à quoi vous attendre, il faut détecter l’endroit où vous avez un problème. Quand vous devez détecter l’endroit sur plusieurs dizaines de milliers de kilomètres de canalisations, il faut non pas changer immédiatement tous vos milliers de kilomètres de canalisations, mais développer une technologie qui vous permette de détecter suffisamment tôt des endroits où vous pourriez avoir un problème. On a pour cela des racleurs instrumentés qui sont de grosses « bêtes » bardées de technologies que vous mettez dans le pipeline, et que vous poussez sur des centaines et des centaines de kilomètres. Vous enregistrez les données. Un de nos problèmes aujourd’hui, et c’est sur cela que va porter un des points du programme de recherche lancé avec le MEEDDM dans le cadre du plan de modernisation c’est de mieux analyser les données pour mieux détecter ces phénomènes de corrosion. Un autre exemple : nous nous sommes aperçus récemment que l’on avait eu en France, des fuites sur des bacs de bruts, par exemple sur la raffinerie de Gonfreville l’Orcher de Total en 2009. Ces bacs avaient été inspectés à un moment relativement proche de l’accident. Cela nous questionne énormément. Nos méthodes d’inspection sont-elles fiables ? On s’est aperçu à cette occasion qu’on utilisait des méthodes d’inspection par ultrasons pour mieux détecter justement les faiblesses des bases de nos bacs et que l’on avait probablement des progrès à faire sur l’interprétation de ces méthodes. On pouvait avoir une très bonne trace ultrasons et dire que notre bac est bon, alor s qu’en fait il y avait un problème. Il y a des 73 Atelier 2 choses à connaître dans ces domaines-là, on s’y emploie. I Christian Lecussan Effectivement, je crois que l’essentiel a été dit. C’est vrai qu’il y a beaucoup de recherche qui se fait. C’est vrai qu’on ne sait pas tout. Le rapport qu’il peut y avoir entre l’équipement et les substances ou produits chimiques n’est pas systématiquement connu. J’ai encore un exemple pour illustrer mon propos. On a utilisé un certain nombre de joints qui contenaient certainement de l’amiante sur les canalisations de transport de solvant ou de transport de produit chimique. Quand on a supprimé l’amiante, on a supprimé ces joints-là. On a eu quelques fuites après parce que l’on n’avait pas forcément le bon joint qui allait avec le bon produit sur le bon tuyau. Cela a nécessité d’avancer pas à pas, d’avancer doucement, pour trouver les solutions. On a fini par les trouver. Cette recherche existe, mais il n’y a pas de solution évidente. Il n’y a pas de solution unique. Je crois que c’est une multiplicité de sujets, de problèmes sur lesquels il faut travailler pas à pas. I Yves Guedaden, Adjoint au maire à Notre-Dame-de-Gravenchon, chargé des risques technologiques 74 Je voulais poser une question plutôt à Monsieur Jaubert qui a évoqué la valorisation des métiers de maintenance. Est-ce que nous n’avons pas là un petit signe de l’abandon de la sous-traitance dans les métiers de maintenance qui montrerait que les industriels se rendent compte qu’il y a un intérêt à avoir des métiers pérennisés dans l’entreprise, par du personnel appartenant à cette société, même si il est payé davantage que dans les contrats de maintenance, que l’on est gagnant avec cette fameuse expérience et expertise ? elles n’ont pas de contrats suffisamment longs au sein d’une entrepr ise, le r isque est de perdre cette expér ience. I Jean-Marc Jaubert I Jean-Paul Cressy C’est effectivement une vraie problématique, mais je ne positionne pas le problème tout à fait de cette manière. Il existe des entreprises de maintenance de très bon niveau et de très grande qualité, tout particulièrement dans la zone où vous êtes et où le tissu industriel très fort. Il faut par contre, que les industriels qui font appel aux entreprises de maintenance, soient elles aussi capables de commander le travail avec des gens qui ont l’expertise nécessaire. C’est un débat qui est totalement ouvert ; et c’est très difficile de savoir où on place le curseur du nombre d’experts dans une entreprise. La problématique à laquelle nous sommes confrontés chez Total, aujourd’hui, c’est de valoriser plus le métier de nos experts techniques. Pour avoir une bonne maintenance externalisée ou sous-traitée (je n’aime pas le ter me soustraitance parce qu’il y a un ter me de rapport dissymétrique), il faut avoir aussi, dans l’entreprise, des experts qui soient capables de dialoguer avec elles et de leur demander le bon travail. Et c’est un peu dans le manque de dialogue que, je pense aujourd’hui, nous avons souvent un problème. Je ne peux pas passer à côté d’une question sur la sous-traitance. Je vais essayer de ne pas être dogmatique sur cette question. Ce qui est impor tant quand on regarde un cer tain nombre d’incidents qui se sont passés et qui sont liés à la sous-traitance, c’est que l’on revienne quand même sur la question d’organisation de l’entrepr ise. Je crois que c’est très impor tant de travailler là-dessus , et de regarder comment on ne traite pas la question de la sous-traitance. Il y a quand même un cer tain nombre de salar iés d’entrepr ises sous-traitantes qui sont syndiquées à la CFDT. J’estime tout à fait nor mal de les défendre aussi. I Yves Guedaden Cer tes , l’exper tise ou la compétence des entrepr ises inter venantes est reconnue, sur tout dans ce bassin-là, c’est évident. Je par le plutôt d’expér ience. Et les exper ts c’est bien, mais pour qu’ils acquièrent de l’exper tise, il faut qu’ils passent du temps sur le terrain. Si ces opérations de terrain sont réalisées par des entrepr ises extér ieures , si Par contre, ce qui me pose problème, c’est effectivement le ra ppor t entre le donneur d’ordre, l’entrepr ise utilisatr ice et l’entrepr ise extér ieure, je pense que là on a effectivement un vrai travail à faire sur les choix de sous-traitance. Quand on est sûr de la sous-traitance de technicité, personne n’a de doute. La question derrière, c’est quand on est plus sur de la sous-traitance appelée capacité, ou on sous-traite parce que ce n’est pas l’objectif prioritaire de l’entreprise. J’ai quelque chose en tête, mais j’éviterais d’en parler, parce que sensible et encore en procès actuellement. Je pense que c’est là que se posent les vrais soucis, c’est comment est organisée globalement l’entreprise avec ses différentes fonctions. Pour terminer, au sein de l’ICSI, l’Institut pour une Culture de Sécurité Industrielle, il y a un groupe d’échanges qui a traité de la sous-traitance, où il y avait des syndicalistes, des entreprises et des chercheurs qui ont fait un travail intéressant. Je vous invite à consulter le guide qui en est sorti et à vous appuyer dessus. Si l’on le mettait vraiment en œuvre d’ailleurs je pense que l’on ferait un gros progrès sur l’approche sécurité et l’intégration de la sécurité avec les entreprises extérieures. I Michèle Dupré, Sociologue industrielle Je travaille sur la p r i s e e n c o m p t e d e s fa c teur s humains et o rga n i s a t i o n n e l s d a n s l a prévention des r i s q u e s t e c h n o l o g i q u e s dans la chimie, en l i e n n o t a m m e n t a ve c l’INERIS , mais pas s e u l e m e n t . J e vo u d ra i s faire plusieur s rema rq u e s . D ’ u n e p a r t , u n e remarque sur le ti t re d e l ’ a t e l i e r q u i e s t « la maîtr ise du vie i l l i s s e m e n t » , e t l à i l m e semble que l’on es t a m b i t i e u x . J e p r é f è re la refor mulation pro p o s é e p a r l e re p r é s e n tant de la DREAL, à s a vo i r q u e c o n n a î t - o n du vieillissement ? E t c o m m e n t l e r é g u l e r quand on est acteu r d e l ’ E t a t o u c o m m e n t le gérer quand on e s t a c t e u r i n d u s t r i e l ? C’est déjà une fo r mu l a t i o n b e a u c o u p plus modeste. On vo i t b i e n , a u t o u r d e l a connaissance du v i e i l l i s s e m e n t e t d e l a difficulté de rendre l e v i e i l l i s s e m e n t v i s i b l e dans l’entrepr ise, il y a d e s q u e s t i o n s q u i sont de nature orga n i s a t i o n n e l l e . C ’ e s t - à dire, comment fait- o n p o u r fa i re re m o n t e r la connaissance du v i e i l l i s s e m e n t d e s i n s tallations , du vieill i s s e m e n t d e s c h o s e s ? On a par lé tout à l’h e u re d e s q u e s t i o n s d e s opérateur s , de la re l a t i o n a ve c l a ma i n t e nance. Mais ces qu e s t i o n s d ’ o p é ra t e u r e t de maintenance, l a p o s i t i o n d e s o p é ra teur s par ra ppor t à l a h i é ra rc h i e , l a fa ç o n dont on fait remont e r l e s i n fo r ma t i o n s , t o u t cela c’est tel ou te l m o d e o rga n i s a t i o n n e l . 75 Atelier 2 B i e n é v i d e m m e n t , q u a n d o n e st aux Assises d e s r i s q u e s , c e s o n t e s s e n t i ellement des i n g é n i e u r s . O n vo i t t r è s b i e n que les cherc h e u r s e n s c i e n c e s s o c i a l e s sont très peu n o m b re u x . J e s u i s l à p a rc e que j’ai l’hab i t u d e d e t ra va i l l e r a ve c d e s ingénieur s . Il y a de s e x p e r t i s e s t e c h n i q u e s qui sont sur l e t e rra i n , i l y a d e s e x p e r t i s e s techniques q u i s o n t a u t o u r d e s e n t re p r i ses . Mais il y a p e u d ’ e x p e r t i s e s t e c h n i q u es reconnues j u s q u ’ à p r é s e n t e n ma t i è re d ’ analyse orga n i s a t i o n n e l l e . O r, j e r é p è t e , l a façon dont u n e o rga n i s a t i o n , y c o m p r i s des relations a ve c l a ma i n t e n a n c e q u ’ o n vient d’a bord e r t o u t à l ’ h e u re - e t J e a n - Paul Cressy a fa i t u n e r é p o n s e d ’ u n e n a t u re , il me semble u t i l e e t i n t é re s s a n t e - , o n fa i t i nter venir des s o u s - t ra i t a n t s , o n p e u t l e fa i re sur un mode o rga n i s a t i o n n e l A o u s u r u n m ode organisat i o n n e l B o u s u r u n m o d e o rga nisationnel C. E t c ’ e s t v ra i q u e c e s t ro i s m o des organisa t i o n n e l s n ’ a u ro n t p a s l e s m ê mes effets sur la quantité de vieillissement. Ju s t e u n e p e t i t e r e m a r q u e e n c o r e s u r l e s mécanismes de dégradation ou vieillissement. Moi toute sociologue que je suis, je constate bien sûr qu’il y a des installations récentes qui tombent en panne (je me souviens d’une entreprise chimique dans laquelle les capteurs qui devaient per mettre de mesurer le niveau dans une installation n’étaient pas bons, et que heureusement il y avait les piges qui permettaient de mesurer encore). Il est vrai que l’on constate dans les atelier s anciens l’intensité des inter ventions de maintenance est beaucoup plus élevée, et pose là encore des problèmes organisationnels. 76 I Jean-Marc Jauber t I l n ’ y a p a s fo r m e l l e m e n t d e q u e s t i o n dans vos propos , mais je vais évoquer d e ma n i è re t o u t à fa i t h u m b l e p l u sieurs expériences que nous sommes e s t e n t r a i n d e c o n d u i r e c h e z To t a l o ù o n u t i l i s e e ff e c t i v e m e n t c e t t e s c i e n c e qui est pour nous un domaine tout à fa i t n o u ve a u , q u i e s t l a s o c i o l o g i e des organisations. C’est vrai que l’on s’aperçoit de plus en plus que l’on aurait intérêt à travailler avec ce métier qui nous apporte beaucoup. On a fait travailler une thésarde just e m e n t s u r u n e r a ffi n e r i e s u r c e s u j e t , pour qu’elle obser ve sur plusieurs mois, les relations entre la maintenance et l’exploitation, au niveau des inter venants. Et on apprend des choses tout à fait déca pantes . Deuxième exemple : Suite à deux a ccidents mor tels qui sont arr ivés dans nos raffiner ies en 2009 (en tout début d’année, puisque en janvier à la fois à la raffiner ie de Flandre et à la raffiner ie de Provence, on a connu deux drames humains , deux a ccidents mor tels), on a déclenché une opération avec un professeur en sociologie du Qué bec, d’obser vation de terrain des relations entre les opérateur s et le management, pour essayer de constater quelle était la perception de nos opérateur s en matière de sécur ité et quelle était la perception du management. Bien évidemment, quand on regarde ce genre de choses , on obser ve ce à quoi on s’attend, mais pas à cette in tensité, un décalage profond des percep tions . (et c’est là que c’est i n t é r e s s a n t . I l n’y a pas de recette miracle)… Consta- t e r d e m a n i è r e o ff i c i e l l e c e d é c a l a g e e t le dire, c’est déjà une manière de le rég l e r e t d e fa i r e d i s c u t e r c e s p o p u l a t i o n s . Donc on est à l’aube de l’utilisation de ces techniques. I Une personne de la salle Je voudrais étendre le débat de sociologie des organisations sur au moins de deux axes. On a parlé maintenance dans l’entreprise, je pense que la problématique sociologique dépasse aussi les bords de l’entrepr ise. On fonctionnera mieux si le système global (notamment public privé) fonctionne correctement ; si il y a une troisième partie du type des experts avec laquelle les échanges fonctionnent bien également etc. Donc ceci est la première dimension. Il n’y a pas que l’aspect opérations de maintenance, mais au-delà de ça l’ensemble du système. Et puis, je le verrais aussi sur une autre dimension, l’extension de la problématique sociologique, qui est sur le cycle de vie. Au niveau organisationnel, ce n’est plus de la sociologie de l’organisation. On traitera d’autant mieux les problématiques de vieillissement, de maintien en condition opérationnelle ou de gestion des mécanismes de dégradation, si on traite ces sujets très en amont, c’est-à-dire dès les premières éta pes de l’innovation, donc dès les premières étapes de la mise en place de nouvelles technologies, de la conception de nouvelles installations ou de la gestion des modifications . I Thomas Ailleret Je crois que la question de l’organisat i o n e ff e c t i v e m e n t , o n e s t t o u s d ’ a c cord, est vraiment une question centrale de sujet de vieillissement. On peut retenir que, après une prise de conscience d’un certain constat d’échec, on est aujourd’hui vraiment dans cette pér iode où on élabore la connaissance et où on essaie de voir comment s’organiser pour gérer ce problème, avec comme objectif final d’a boutir à une vision q u i s o i t l a fo i s d y n a m i q u e e t p a r t a g é e e n t r e l e s d i ff é r e n t s a c t e u r s q u i p e u v e n t être des acteur s de maintenance, d’exploitation. Ceci per mettra, quand cette v i s i o n p a r t a g é e a u r a r é u s s i à é m e r g e r, d e fa vo r i s e r fi n a l e m e n t l a r e s p o n s a b i lité des acteur s , dans un cadre qui aura été arrêté, en accord les uns avec les autres. 77 Atelier 3 Compétences et formation société • recherche • enseignement supérieur • code du t r ava i l • I n s p e c t i o n • f o r m a t ion c on t in u e e t ini t i a l e I Olivier Hamoir, Animateur Pour introduire le sujet, j’ai envie de vous faire part d’un témoignage très rapide et vous verrez la liaison avec l’ICSI. Dans les radios de service public, les personnes sont formées pour conserver l’antenne et diffuser les messages des autorités en cas de crise. Le jour d’AZF, à la radio de service public de Radio-France à Toulouse, 40 personnes étaient formées justement pour conserver l’antenne en cas de crise. AZF survient. Sur les 40 personnes présentes à la radio, une vingtaine ont quitté les lieux pour aller s’enquérir, pour aller voir si effectivement leurs proches avaient été victimes de l’explosion. Voilà. Cela pour vous dire que l’on parle de formation, on parle également aujourd’hui de la manière dont on peut appréhender les risques. C’est pour cela que je passe la parole à Philippe Essig pour nous présenter l’ICSI et les travaux qui ont été menés et qui ont commencé après AZF. À quel moment l’ICSI est-il né ? Culture de sécurité I Philippe Essig, Président de l’ICSI 78 L’ICSI, c’est l’Institut pour une Culture de Sécurité Industrielle. On m’a demandé de par- ler de son origine, de son adhérence, de son mode de fonctionnement et surtout comment il peut répondre à la question de notre atelier « qu’attend-t-on en termes de compétence et de formation dans le domaine des risques ? ». En 3 minutes, c’est difficile de répondre à cette question. Vous pourrez le consulter le site www.icsi-eu.org pour avoir tous les détails. Dans mon rapport au gouvernement, après la catastrophe AZF, j’avais pointé un problème de société et d’attitude que nous avons face au risque inhérent à toute vie humaine, comme vient de le rappeler Patrick Lagadec. En un siècle, je crois que l’on est passé d’une culture de la fatalité à celle de l’indifférence confortée finalement par la relative rareté du risque d’incident grave, puis à la révolte si cet incident arrive (et c’est ce que j’ai entendu après Toulouse « plus jamais ça ni ici, ni ailleurs »). Ce n’est pas possible. Comment faire émerger une culture de connaissances responsables et de participation dans un tel environnement ? Nous avons voulu prendre en charge cela. L’ICSI est initialement le fruit de la réflexion de cinq industriels, d’une université de Toulouse, de collectivités territoriales de Midi-Pyrénées, d’associations et de quelques personnalités. Aujourd’hui, nous comptons une cinquantaine d’adhérents, parmi pratiquement tous les grands groupes industriels, toutes les organisations syndicales représentatives, de nombreuses collectivités territoriales et leurs associations, des experts, des ONG, etc. Une petite équipe travaille avec ce que nous appelons des JRD (Jeunes Retraités Dynamiques), qui font participer toute notre formation, notre recherche de l’expérience qu’ils ont acquise en 20 ans ou 30 ans de pratique industrielle. Le problème n’est pas facile à traiter. Nous sommes dans une société qui voudrait s’accrocher au mythe du risque zéro et avec un Etat prescripteur, normalisateur, superviseur et quelque peu moralisateur. N’oublions pas que les industries sont nécessaires à la vie de notre pays. Notre société civile est profondément marquée par tous les dires des médias, surtout quand il y a eu un accident ou un incident. La recherche nationale est un petit peu dispersée à droite à gauche. L’ICSI travaille dans cet environnement. Quels sont nos objectifs ? Nous en avons trois : - A ider à l’amélioration de la sécurité dans les entreprises, par la prise en compte de tous ces aspects, c’est donc une dimension multidisciplinaire. - Favoriser un débat entre la source du risque (l’industrie) et la société civile (l’environnement). - A cculturer l’ensemble des acteurs aux risques de la sécurité. Nous travaillons avec des groupes d’échanges où tous les acteurs peuvent se réunir pour discuter sur des thèmes. Je crois qu’il y a une douzaine de groupes d’échanges qui se sont réunis. Parmi ceux qui ont étaient les plus percutants, je citerai : - Le retour d’expériences. - L a sous-traitance dénoncée tout à l’heure par Jacky Bonnemains, mais nécessaire, et sur laquelle nous avons fait un travail formidable avec les organisations syndicales. Les dernières réunions se sont tenues au siège de la CGT et de la CFDT. C’est vous dire que l’on a travaillé la main dans la main. - Les facteurs humains et organisationnels de la sécurité. 80-90 % des sources des incidents sont de cette origine. - La communication santé-environnement. - Les compétences sécurité. Que produisent ces groupes ? Ils produisent d’abord des demandes de recherche. Nous partons toujours du terrain. Quels sont les besoins du terrain en matière de recherche ? Quelles sont les questions posées par les uns ou par les autres en matière de recherche ? Quels sont les besoins de connaissance pour faire face à la vulnérabilité des systèmes industriels ? Quelles sont les conditions d’une concertation efficace pour vivre ensemble avec ces risques sans traumatisme ? Pour conduire cette recherche, nous avons eu la chance de pouvoir profiter, à partir de 2005, de la création d’une fondation. L’Etat nous aide à la même hauteur les industriels qui avaient créé cette fondation. La fondation, la FonCSI prend en charge toutes les recherches d’intérêt général, en partant d’appels à idées, d’appels à manifestations d’intérêt, sur des thèmes choisis par un comité scientifique de très haut niveau. Nous faisons appel à tous les laboratoires européens. Nous devons avoir une quinzaine de thèses en cours de réalisation ; et évidemment toutes leurs conclusions sont totalement publiques. L’ICSI a conservé les recherches concernant des problèmes particuliers qui nous sont posés soit par un adhérent, soit à la demande une collectivité territoriale. 79 Atelier 3 Une fois que l’on a fait ces recherches ou que les groupes d’échanges ont terminé leurs travaux, il faut diffuser le produit de leur travail. Cette diffusion passe d’abord par des cahiers de la sécurité industrielle que vous pouvez consulter sur notre site. Je vous incite à le faire car nous nous attachons à ce que leur lecture soit vivante, attrayante, accessible et efficace. Puis, apparaissent les besoins en formation. Nous avons deux sortes de formation : des formations diplômantes et des formations courtes. Les premières sont des masters spécialisés, nous en avons cinq, dont l’ICSI est opérateur en partenariat avec des écoles ou des universités prestigieuses : ESCP de Paris, l’INSA de Toulouse, l’Ecole des Mines de ParisTech, l’INP de Toulouse, l’Université, l’Ecole des Arts et métiers de ParisTech etc... Dans le domaine de la formation continue, nous organisons des stages à la demande ou sur catalogue ; ceux qui ont le plus de succès d’ailleurs ce sont ceux qui traitent de la prise en compte des facteurs humains et organisationnels. 80 Pour entrer dans l’application concrète sur le thème de notre atelier, nous nous posons quelques questions. Comment l’évolution de la culture se traduit-elle en termes de compétence et de formation ? Nous sommes partis de l’identification des besoins en compétences nécessaires (savoir, savoir-faire, savoir-être). Nous procédons par enquêtes auprès des entreprises en recherchant la manière dont elles ont procédé pour l’acquisition et le maintien des compétences et quelle est la place de la sécurité dans les parcours professionnels. On est obligé de constater que la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences est trop souvent centrée sur des emplois ou des compétences rares et que la problématique sécurité est en général absente, peu visible ou alors diluée à l’intérieur de réflexions de portée trop générale. Cela nous montre le chemin que nous avons encore à faire. En attendant nous restons fermes dans notre conviction que les facteurs humains et organisationnels sont à la base de la sécurité dans l’entreprise. I Olivier Hamoir Les structures de formation, à savoir l’IRSN et l’Ecole des Mines d’Alès vont nous donner leur point de vue sur la formation dans le domaine des risques. Je donne donc la parole à Pierre Bois qui va nous dresser le portrait actuel de l’Ecole des Mines d’Alès, ainsi que les formations que l’école propose dans le domaine des risques. I Pierre Bois, Directeur adjoint de l’Ecole des Mines d’Alès L’Ecole des Mines d’Alès est une école d’ingénieurs, avec un noyau dur d’ingénieurs de formation initiale, recrutés sur concours et qui vont au diplôme généraliste d’ingénieurs. Comme tout établissement d’enseignement supérieur, elle s’appuie sur des compétences en recherche, qui sont aujourd’hui une partie extrêmement importante de la visibilité, de la crédibilité des établissements. L’offre de formation est également complétée par de la formation continue, tout simplement, parce que la plupart des publics qui ont besoin d’être formés ne sont pas des gens qui démarrent leur carrière, mais des gens qui sont déjà en situation de travail. La formation continue a donc une importance extrême dans le domaine des risques, surtout quand il s’agit de former les nouvelles générations d’acteurs. L’Ecole des Mines d’Alès, membre du groupe des Ecoles des Mines, appartient à une structure plus large qui rassemble, sous la houlette du Ministère de l’industrie, Ecole des Mines et Ecole des Télécoms. Cela donne une visibilité à l’ensemble et une masse critique aujourd’hui recherchée par grand nombre d’établissements supérieurs. Le paysage mondial de concurrence dans l’enseignement supérieur demande d’acquérir une masse critique. Nous partageons un certain nombre de compétences. J’aperçois ici de nombreux représentants de l’Ecole des Mines de Paris qui a un rôle de locomotive à travers un certain nombre de laboratoires particulièrement compétents en matière de maîtrise des risques. Cette école a développé avec beaucoup d’avance l’approche sociologique du risque, ce qui était une nouveauté il y a encore peu d’années. C’est une des thématiques centrales de notre atelier, mais il faut savoir que c’est une thématique nouvelle. L’Ecole des Mines d’Alès, quant à elle, a une offre qui englobe la formation initiale avec une option « risques industriels » pour les élèves, un master spécialisé pour des personnes déjà en situation de travail, un certain nombre de formations continues faites sur mesure pour un public de personnes venant des industries mais qui peuvent également être des élus ou des associatifs. La formation continue s’adresse donc à un public plus large. L’ensemble de ces compétences va bientôt se concrétiser à travers la construction de l’Institut des Sciences des Risques qui sera inauguré au mois de juin prochain. Ce dernier va matérialiser l’existence de la construction d’un pôle de compétences sur les risques, localisé sur Alès, qui aura pour vocation d’abriter un certain nombre de disposi- tifs d’expérimentation : du matériel technique, des équipes de recherche et des partenaires que ce soit du pôle « risques » partagé entre la région du Languedoc-Roussillon et la région PACA, également des partenaires industriels puisqu’une large partie de notre recherche est orientée vers le transfert de technologies et la création d’entreprises technologiquement innovantes. Des filières d’entreprises associées au domaine du risque sont en train d’émerger. Nous souhaitons jouer un rôle dans cette émergence. Voilà en gros le paysage qui s’impose à nous. I Olivier Hamoir Quels besoins identifiez-vous ? Quelle est la demande des entreprises ? I Pierre Bois Les besoins sont extrêmement divers et hétérogènes, et c’est une des grandes difficultés en matière de formation aux risques. D’abord le public est très hétérogène, c’est-à-dire que l’on a besoin de spécialistes techniques. Ils sont assez faciles à former, on sait le faire. On leur donne des compétences et on a du matériel. Il y a beaucoup d’autres acteurs dans le risque. Il y a des élus, des associatifs, des responsables d’aménagement du territoire, donc des personnes qui ont besoin d’être familiarisées avec le risque. Il y a surtout un public très divers qui a besoin de se construire un langage commun si l’on veut que la concertation soit efficace, si l’on veut que la gouvernance à cinq prenne une réalité. Ces publics très hétérogènes ont des besoins différents. En revanche, ils ont au moins un besoin commun, celui d’élaborer un langage commun par une mise à niveau collective. 81 Atelier 3 82 D’autre part, la science du risque elle-même est très pluridisciplinaire. Au-delà des publics, son contenu scientifique est un second facteur d’hétérogénéité. On a de la science dure de la modélisation (nuage gazeux, un front de flammes), on a des besoins de compétences en procédés, en techniques de prévention et en aménagement du territoire, et on doit développer la concertation. Les besoins vont du plus technique au plus sociologique et sont extrêmement variés. tions-là. C’est ce qui continue à alimenter la formation. Certaines entreprises ont pu profiter é ga l e m e n t d ’ u n e b a i s s e d ’ a c t i v i t é p o u r fo r m e r u n p e u p l u s p ro fo n d é m e n t l e u r p e rsonnel, d’autant plus qu’une partie des fo r ma t i o n s s e fa i t à t i e r s - p a ya n t e t n e r e vient pas nécessairement cher à l’entrep r i s e , p u i s q u ’ i l y a d e s c o - p a ye u r s d a n s c e s fo r ma t i o n s . C e l a a p e r m i s d e s t a b i l i s e r l e p u b l i c d e c e s fo r ma t i o n s . N o u s n ’ a vo n s pas obser vé de baisse de fréquentation. Enfin, dernier point, les personnes elles-mêmes et pas uniquement les structures, sont hétérogènes. Selon qu’elles représentent de grands groupes industriels ou des PME par exemple, les besoins sont très différents. Les grands groupes ont besoin de gens qui sachent faire les calculs. Les PME ont besoin d’un « homme à tout faire du risque » qui soit à la fois capable d’implémenter une culture du risque dans son entreprise, mais également d’en parler à l’extérieur et de représenter son entreprise dans des structures de concertation. Les besoins sont aussi très différents selon la typologie d’entreprise à laquelle on va s’adresser. I Olivier Hamoir L’offre de l’Ecole des Mines d’Alès, en matière de formation « risques » est très spécifique, elle jouit d’un marché qui est relativement stable. La baisse de régime d’activité dans le secteur industriel n’a pas diminué l’importance des questions de risques puisque les sites sont toujours les mêmes. La préoccupation en matière de risques n’a pas diminué. Nous avons par ailleurs un public d’élèves, en quelque sorte, le captif, qui, compte tenu de l’ambiance actuelle et de l’importance que prend le risque au niveau sociétal, est attiré par ces forma- Quelles spécificités avez-vous ? A l’Ecole des Mines d’Alès, vous disiez que vous alliez mettre en place des observatoires sur la gestion de crise, avec deux cellules différentes, pour montrer que la manière dont on appréhende une crise peut être complètement différente ou appréhendée différemment d’un groupe à un autre. I Pierre Bois La pédagogie de la gestion de crise est quelque chose de très particulier. On a pu le voir au travers des interventions de ce matin et de la mise en perspective de Patrick Lagadec. Nous allons proposer au travers de l’Institut Sciences de Risques un outil original de formation à la gestion de crise puisque dans une crise et compte tenu de son développement et de l’imprévisibilité d’un certain nombre de choses, il n’y a pas de bonne gestion de crise qui s’apprenne dans une salle de cours. L’idée est donc de présenter des scénarii de crise, des « scénari de réalité virtuelle » - c’est un petit peu oxymorique, mais c’est le mot. On appelle aussi cela « Serious Games ». Deux équipes travaillent sur un même scénario dans deux salles isolées, avec le même timing, avec des rôles et une constitution analogues. On regarde comment évolue le scénario dans chaque équipe. A la fin, les deux équipes comparent l’évolution de leur scénario. Le bénéfice pédagogique ne viendra pas de la comparaison de ce que aura fait une équipe par rapport à une bonne solution idéale, que l’on ne sait finalement pas définir, mais il viendra de l’étude du différentiel du résultat obtenu par les deux équipes, qui auront réagi et traité leur crise différemment. Le fait d’avoir dédoubler la mise en situation pour la gestion de crise permet d’enrichir très largement la pédagogie de l’exercice et de développer de méthodes d’apprentissage. Les quelques expériences que l’on peut commencer à avoir montrent que cela marche extrêmement bien. I Jean-Pierre Vidal, Chef de la Division Délégation aux Enseignements à l’IRSN En quelques mots, l’IRSN est l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire. C’est un établissement public de l’Etat, qui a un statut d’EPIC (Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial). Il est sous la tutelle d’un certain nombre de Ministères, au premier rang figurent le MEEDDM, la santé, l’industrie, la recherche et la défense. Nous avons des missions d’expertise et de recherche dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, complétées par des missions de service public et d’appui aux autorités pour la partie expertise, pour l’Autorité de Sûreté Nucléaire dans le domaine de la radioprotection et de la sûreté nucléaire, mais également pour les préfets et les services qui y sont rattachés quand ils sont confrontés à des problèmes liés au rayonnement. L’IRSN, c’est environ 1 700 personnes. Nous sommes basés essentiellement sur trois gros sites, deux en région parisienne, à Fontenayaux-Roses et au Vésinet, et un autre à côté d’Aix-en-Provence, à Cadarache, en partageant des installations communes avec le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique). C’est un budget d’environ 300 millions d’euros dont à peu près la moitié est consacrée à des activités de recherche sur tous les volets de la radioprotection et de la sûreté nucléaire. Un élément a émergé au fil des années, comme l’ont souligné les intervenants précédents, avec la montée en puissance de l’approche, des réflexions, des recherches sur le facteur humain, qui joue évidemment un rôle tout à fait important dans la maîtrise des risques. Au départ, cette approche « facteur humain » était très concentrée sur ce qui concernait les personnels opérant dans les installations nucléaires, en particulier les réacteurs d’EDF. Au fil du temps, cela s’est élargi pour atteindre aujourd’hui à peu près tous les domaines. Aujourd’hui, un effort important est fait dans le domaine de la médecine, dans certaines applications médicales utilisant les rayonnements immunisants comme radiothérapie. Dans le cadre de nos activités, notre décret de création nous a confié des missions de formation, de contribution aux actions de formation à la radioprotection et à la sûreté des personnels concernés par l’utilisation de ce type d’installation. C’est la raison pour laquelle nous avons développé une activité de formation continue au sein de l’établissement Cette formation propose un certain nombre de formations dans les différents domaines de la radioprotection et de la sûreté, soit pour ré- 83 Atelier 3 pondre à des obligations réglementaires (en particulier dans la radioprotection), soit pour proposer des formations ciblées ou adaptées à tel ou tel type de besoins dans ces domaineslà. A cela s’ajoute une contribution importante des membres de l’IRSN à des enseignements universitaires ou dans des écoles d’ingénieurs. Dans la mesure où l’IRSN n’est pas un établissement comme l’est l’Ecole des Mines d’Alès par exemple, nous fournissons des contributions à un certain nombre d’enseignements du type Master ou formation d’écoles d’ingénieurs. Voilà en quelques mots le panorama de nos activités centrées sur la recherche dans les domaines de la sûreté et de la radioprotection, déclinées dans le cadre de l’expertise technique et de l’appui aux autorités dans les différents domaines et qui s’ouvrent sur l’extérieur via le vecteur de la formation soit continue (que nous organisons), soit par la participation des enseignements dans des structures universitaires ou de l’enseignement supérieur. I Olivier Hamoir Quels sont les besoins que vous avez identifiés auprès des entreprises ? Quelles sont les formations concrètes que vous leur proposez ? I Jean-Pierre Vidal 84 Dans le domaine de la radioprotection, il y a un volet de formations assez importante, qui ont un caractère réglementaire fort, qui imposent un certain nombre d’obligations de formation pour les opérateurs utilisant des rayonnements ionisants ou au sein des structures dans lesquelles elles se trouvent. L’RSN propose donc ce type de formation. Par exemple, une formation est nécessaire dès lors qu’on veut remplir les fonctions des personnes dites compétentes en radioprotection, dans un établissement où l’on utilise des rayonnements ionisants, quel que soit son statut, quel que soit sa structure. Il est nécessaire de former la personne qui va organiser, sous la responsabilité de l’employeur le suivi de la radioprotection dans l’établissement. Pour remplir ces missions-là, il y a une formation obligatoire qui dure environ deux semaines et qui doit être réalisée par des formateurs certifiés. L’IRSN répond à ces critères et assure ce type de formation très demandée. Un autre type de formation à caractère obligatoire s’est développé ces dernières années. Ce sont des formations imposées par le Code de la santé publique pour renforcer l’approche ou la radioprotection des patients. Ces formations sont destinées aux professionnels du monde de la médecine qui utilisent des rayonnements ionisants, que ce soit dans l’imagerie médicale ou la radiothérapie. Elles se sont mises en place par cette obligation réglementaire qui concerne donc tous ces personnels. L’IRSN fait ce type de formation. Depuis deux ans, à la demande du Ministère du travail, l’IRSN est en charge de l’organisation d’un examen national dans le domaine de la radiologie industrielle, le CAMARI (Certificat d’Aptitude à la Manipulation des Appareils de Radiologie Industrielle). Pour se présenter à cet examen, il faut suivre au préalable une formation. Bien évidemment, l’IRSN ne fait pas cette formation puisqu’il fait passer l’examen, mais là aussi c’est un point de passage obligé dans ce domaine d’exercice. I Olivier Hamoir Nous allons aborder maintenant la formation du point de vue des salariés. Philippe Sau- nier, délégué CGT à la raffinerie des Flandres, s’excuse de ne pas pouvoir être présent évidemment en raison du mouvement social. Il a indiqué dans le mail qu’il nous a adressé hier soir que, durant cette période troublée de blocage, on se rend compte que certaines règles de sécurité auxquelles on forme le personnel sont bafouées. Il souhaitait que l’on en fasse part ici. Je pense que vous aurez certainement l’occasion d’en parler ou en tout cas de dire comment vous percevez les formations de ce point de vue. Je souhaite poser une question à Jean-Pierre Vidal sur la perception qu’ont les salariés des formations en matière de sécurité. Comment les vivent-ils ? Est-ce qu’ils les appréhendent ? Quand il y a un caractère obligatoire, les sentez-vous complètement impliqués et réceptifs ? Comment faites-vous passer votre message ? I Jean-Pierre Vidal Dans un certain nombre de formations à caractère obligatoire, il peut y avoir plusieurs approches. Je pense, par exemple, aux formations de personnes compétentes en radioprotection. En général, les salariés qui se présentent à ces formations sont volontaires dans leur entreprise pour venir faire cette formation. A priori, ils sont motivés, ils sont intéressés. Ils sont toujours un peu inquiets parce qu’à la fin il y a un contrôle des connaissances qui valide cette formation, qui leur permet, si cela est nécessaire, de remplir leurs missions par la suite. Mais globalement, la motivation est là. Il n’y a pas trop de difficulté à entrer avec eux dans le panorama de la formation et à leur présenter les différents risques et la façon d’approcher la maîtrise de ces risques. Dans d’autres cas de figures, quand ce sont des formations imposées à un domaine d’activité, les gens viennent d’abord un peu contraints et forcés, nous disant, mitigés : « Qu’est-ce qu’on va apprendre ? Cela nous fait perdre du temps. On a d’autres contraintes. C’est obligatoire, alors on y vient, mais… ». Ils ne sont pas réceptifs, ils sont sur la défensive. Après c’est toute la capacité qu’a l’intervenant à leur faire comprendre qu’il y a effectivement un caractère obligatoire à cette formation mais que celleci présente malgré tout un intérêt pour qu’ils puissent mieux prendre en charge leur sécurité. Il arrive à les intéresser et à les sensibiliser à leur propre sécurité. Une fois que l’on est arrivé à faire passer ce message-là, la mayonnaise a pris ; et on peut considérer que la formation a atteint son objectif premier. I Olivier Hamoir Nous allons voir avec Jacques Le Marc, si la Direction Générale du Travail a la même perception. I Jacques Le Marc, Direction Générale du Travail Je suis de la Direction Générale du Travail (DGT) et je souhaite tout d’abord excuser Monsieur Combrexelles, le directeur général du Travail, qui ne pouvait pas être présent aujourd’hui. Il devait être remplacé par Monsieur Lanouziere qui a été appelé en urgence par le cabinet du Ministre. Je les remplace pour représenter la DGT. La DGT est l’administration centrale du Ministère du travail dont l’objet premier est de mettre en œuvre la politique du travail, y compris la politique en matière de santé et de sécurité au travail. C’est également à la DGT 85 Atelier 3 qu’est élaborée la réglementation du travail et celle en matière de santé et de sécurité au travail. Enfin c’est la DGT qui anime, coordonne l’activité des ser vices déconcentrés, notamment de l’inspection du travail dans les départements. I Olivier Hamoir Dans le domaine des risques, puisque c’est votre domaine et c’est le secteur dans lequel vous exercez, comment les formations sontelles vécues, appréhendées de la part des salariés ? I Jacques Le Marc 86 Je vous apporterai mon opinion sous un double éclairage, celui de l’ancien inspecteur du travail que j’ai été pendant une quinzaine d’années, et qui a été présent dans les entreprises au contact des salariés et des chefs d’entreprises ; mais également celui de la Direction Générale du Travail. Les installations, les équipements dans les entreprises intègrent de plus en plus, dès leur conception, les dispositifs de sécurité maximum. On pourrait se dire qu’à partir du moment où l’ensemble des composants de sécurité et de protection sont prévus à la conception, l’inter vention humaine n’est plus nécessaire. Tout va rouler et il n’y aura pas d’accident. Malheureusement, ce n’est pas du tout comme cela. Il y a toujours des défaillances qui n’étaient pas prévues et des accidents sur viennent. On s’aperçoit que malgré la performance des installations, la formation du personnel demeure naturellement très importante : la formation des opérateurs chargés du fonctionnement les installations et de la maintenance, des responsables de la sécurité, mais aussi la formation de personnes auxquelles on ne pense pas tout de suite mais qui sont pour moi indispensables, à savoir la formation de l’encadrement. Dans une entreprise, il ne peut pas y avoir des personnes sensibilisées à la formation, qui ont à l’esprit chaque jour la sécurité, si les personnes qui leur donnent des ordres, les personnes qui les encadrent, ne sont pas elles-mêmes formées et sensibilisées à la sécurité. Je me suis aperçu de cela régulièrement, quand j’assistais aux réunions de Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) auxquelles sont invités les inspecteurs du travail. Lorsque nous abordions des questions de risques importantes, on remarquait tout de suite les entreprises dans lesquelles la prévention était vraiment une culture et lorsque l’encadrement lui-même était sensibilisé. Si l’encadrement n’était pas sensibilisé, on ne pouvait pas demander aux opérateurs et aux ouvriers d’avoir cette sensibilisation. La formation à la sécurité est importante à tous les niveaux dans l’entreprise. I Olivier Hamoir Vous constatez que ce n’est pas encore aujourd’hui une règle générale. Cette formation du management progresse-t-elle ? I Jacques Le Marc Je pense que cela progresse. Un rapport a été produit par William DAB qui travaille au Conservatoire National des Arts et des Métiers. On lui avait demandé, le Ministère du travail notamment, de faire l’état des lieux sur la sensibilisation ou l’appréhension de la formation à la sécurité dans l’encadrement (les ingénieurs, les cadres) dans les entreprises. Il a fait son en- quête et a produit son rapport qui présentait un état des lieux un peu mitigé. Certes, une partie de l’encadrement est sensibilisée, formée à la sécurité, mais encore de manière insatisfaisante. Dans certaines entreprises, ce n’est pas du tout le cas. Forts de ce rapport, le Ministère du travail, l’INRS, la CNAMTES, le CNAM (et j’oublie peut-être d’autres organismes qui m’en excuseront) ont décidé de mettre en place ce que l’on appelle le Réseau Francophone de Formation à la Sécurité dont l’objectif est de mettre en place, au travers de groupes de travail, un module de formation, un référentiel de formation, qui sera accessible gratuitement à toutes les écoles qui souhaitent le mettre en place, de manière à ce que, dans toutes les formations de grandes écoles, d’ingénieurs, de cadres et de management d’une manière générale, ce module sécurité-santé soit mis en œuvre. Au même titre qu’aujourd’hui l’anglais est indispensable, l’informatique est indispensable dans ces écoles, il faut que la formation à la sécurité devienne indispensable, afin que les jeunes en entreprise aient déjà acquis le réflexe sécurité. I Olivier Hamoir Nous avons eu le regard de l’ancien inspecteur du travail. Quel est celui maintenant de la DGT ? I Jacques Le Marc Il rejoint celui de l’inspecteur du travail. Tout simplement, il faut accorder une place importante à la formation du personnel dans les entreprises. La formation des salariés à la sécurité, c’est d’abord pour leur propre santé, leur propre sécurité et pour celles de leurs collègues de travail. La réglementation sur les risques technologiques dans l’entreprise rejoint cette obligation qui est fixée par le Code du travail, de formation à la sécurité. Lorsque les salariés prennent soin de leur santé et de leur sécurité, ils le prennent au travers des gestes de sécurité. Ils veillent au respect des règles de sécurité pour que les installations fonctionnent bien et pour qu’il n’y ait pas d’accident. Et si il y a un accident, cela va les toucher euxmêmes et leurs collègues de travail, mais aussi l’outil industriel et l’environnement. Les obligations fixées pour les entreprises à risques rejoignent celles qui concernent la formation et la protection des salariés. I Olivier Hamoir Je vous propose d’aller voir les travaux qui ont été menés par la Commission Européenne en matière de formation aux risques avec Maureen WOOD. I Maureen Wood, Attachée scientifique à la Commission Européenne Je suis très heureuse d’être invitée à cette réunion. La France fait une contribution très forte au niveau européen à la politique en matière de risques. Nous fournissons beaucoup d’outils que nous partageons avec les autres pays membres, surtout la recherche. Pour me présenter un peu, j’appartiens au Major Accident Hazards Bureau (MAHB) qui est un centre de commande de recherches de la Commission Européenne. Notre tâche et nos responsabilités sont d’apporter un soutien technique sur la réglementation Seveso. Je suis à ce poste depuis 2000. Je ne suis pas experte de la formation, mais je connais très bien les besoins surtout chez les inspecteurs, parce que je gère l’activité des inspecteurs au niveau européen. 87 Atelier 3 Il y a cinq ans, nous avons créé un groupe de t r a va i l p o u r l e s i n s p e c t e u r s d o n t j e s u i s l a secrétaire. 88 Les risques industriels et les risques technologiques sont bien complexes et variés. La maîtrise des risques dépend d’un ensemble complexe de facteurs, la mise en place d’un procédé, l’entretien, les réparations, les interventions humaines ou celles de l’environnement naturel. On note que les récents accidents graves ont eu des origines communes. Je peux faire référence à quelques exemples comme l’accident à l’entrepôt de Buncefield au Royaume-Uni ou à de Donges en 2008. Tous les deux se sont produits à l’heure d’un chargement ou d’un déchargement. C’est un phénomène très connu et les risques associés à ce phénomène sont connus. Ce type d’accident se produit chaque année. À mon avis il faut réfléchir au « pourquoi » et se demander ce qu’on peut faire pour promouvoir et soutenir les retours d’expériences et les résultats de nos recherches, pour que, nous puissions mettre en œuvre les résultats, d’une façon meilleure. L’existence d’un cadre réglementaire qui va au-delà des frontières nationales apporte des avantages à cet égard. Chaque pays a des points de vue différents et chaque pays membre est un terrain d’essai. Chacun a son expérience, ses outils, ses approches. Les pays partagent leurs expériences avec tous leurs efforts qu’ils portent au niveau européen pour partager leurs résultats. Ils sont disponibles pour que les autres puissent en profiter. A la Commission Européenne, nous concevons notre tâche de réaliser, de faciliter, la réalisation de ces avancées. Nous gérons ces coûts, comme les coûts de travail des inspecteurs. Ce groupe a un programme d’ateliers qui traitent des thèmes prioritaires qui sont sélectionnés. L’atelier de cette année en fait aura lieu la semaine prochaine et portera sur la gestion des systèmes de sécurité : comment les inspectet-on ? Nous traitons aussi des sujets qui sont importants pour les industriels, comme l’analyse des risques. Nous publions les conclusions de ces ateliers. Par exemple, les précédents ont couvert la gestion des risques aux entrepôts de stockage de pétrole, la gestion des risques dans les raffineries et l’application de la réglementation Seveso dans cinq secteurs industriels : les fabricants pharmaceutiques, les entrepôts LPG, les raffineries, les fabricants de substances spécialisées. Nous faisons aussi au niveau européen l’analyse des accidents : nous collectons et diffusons les résultats qui en sont tirés. Tout cela, je sais que vous reconnaissez que c’est très intéressant et qu’il est nécessaire de faire ce travail. Mais nous sommes dans un atelier de formation, je voudrais vous faire réfléchir ; est-ce assez ? C’est un pas en avant d’avoir un rassemblement au niveau européen des retours d’expérience, des recherches, des résultats des recherches qui sont produits à travers tous les pays membres. C’est un véritable avantage. Mais ce n’est pas assez d’avoir seulement un collecte de ces informations. Parmi les inter ventions des inter venants précédents, je me suis sentie très liée à celle du Ministère du travail pour qui il faut avoir une connaissance, une compréhension très forte chez les industriels. Ce défi est réglé. Nous avons l’accès à toutes ces informations beaucoup plus qu’auparavant grâce aux ordinateurs, aux réseaux des risques, à l’inter vention de la Commis- sion Européenne. Nous avons une prise de conscience de la responsabilité de former les gens qui travaillent dans le domaine des risques. Mais que va-t-on faire de ces informations ? Je crois que le point critiquable du point de vue des individus, c’est qu’il faut que les personnes sachent et comprennent bien comment utiliser toutes ces informations qui sont disponibles. C’est un défi très important. Si on voit se répéter les accidents, pourquoi n’ontils pas trouvé la façon d’évaluer les risques comme il le faut ? Des formations, il y en a. Comment peut-on affirmer que l’analyse critique et le résumé de ces informations sont pertinentes à une situation spécifique ? Le point que l’on peut critiquer c’est qu’il faut développer la formation des ingénieurs et des directeurs de ces exploitations. Du point de vue de la recherche, je voudrais que l’on se concentre sur la mise en œuvre. Nous avons les informations et beaucoup de connaissance de notre sujet, mais est-ce que nous savons comment former les personnes pour qu’elles sachent, quand elles sont en face d’une situation qu’elles ne connaissent pas assez bien, les facteurs des risques ? Comment faire pour ce qu’elles analysent mieux le risque qu’elles ont en face ? C’est une question que je me pose. I Philippe Essig À l’écoute des inter ventions qui viennent de se faire, je reviens sur les facteurs humains et organisationnels. Pour le facteur humain d’abord, il y a le facteur au niveau individuel. J’ai commencé ma carrière professionnelle juste au lendemain de la deuxième guerre mondiale. J’ai été formé à ce moment-là avec une méthode Training Working Industr y, qui avait été mise au point par l’armée américaine pour former non pas ses cadres, mais ses soldats. La formation insistait sur trois choses dans l’exécution de chacune des tâches. Il fallait que cette tâche soit faite avec précision, facilement et en sécurité. Il y a donc une formation individuelle, mais la sécurité fait partie complètement de l’exécution de la tâche individuelle. Il y a à la fois ce qui va ressortir de l’humain et de l’organisationnel. C’est toute la chaîne de commandement. C’est la politique, la stratégie de l’entreprise. C’est un système qui est beaucoup plus compliqué parce que la sécurité n’est pas le seul aspect des problèmes posés à tout un chacun. Elle est en confrontation permanente, que ce soit au niveau technique, économique, financier ou social, à tout ce que vous voudrez, avec toutes les autres préoccupations de l’entreprise. C’est là que nous avons pointé dans notre enquête du groupe d’échanges, le fait que la formation sécurité n’est pas perçue en tant que telle dans les entreprises aujourd’hui. Elle est diffuse à l’intérieur de beaucoup de choses. Je vais ajouter une dernière dimension qui m’a été rappelée tout à l’heure par l’intervention de Patrick Lagadec. En matière de sécurité, nous devons de plus en plus prendre en compte l’incertitude. Nous ne sommes pas encore préparés culturellement à cela. Il faudrait une formation à la prise de décision en situation d’incertitude. C’est quelque chose de très compliqué et de très complexe, qui ressort d’ailleurs autant d’une attitude de culture par rapport à la vie, à tout notre environnement, que d’une formation spécifique. 89 Atelier 3 Questions de la salle I Daniel Vig ier, Fédération Régionale Auvergne Nature Environnement Vous avez par lé essentiellement des acteur s inter nes à l’entrepr ise que sont le personnel des fa br ications , la maintenance et les cadres . Or, il existe une autre catégorie d’acteur s qui inter viennent, qui ne sont pas négligea bles du tout, ce sont les ser vices extér ieur s en cas d’accident (la police, les ser vices sanitaires etc.). Il y a une autre catégor ie que sont la population riveraine (ce sont les futures victimes) et les collectivités locales qui prennent des décisions qui peuvent plus ou moins aggraver la situation. Ces trois acteur s dont vous n’avez pas parlé, agissent non pas sur la probabilité que se produise un accident, mais ils agissent sur la gravité. On est ici dans un atelier qui s’occupe de for mation. Ce qui m’inquiète, c’est que ces trois catégor ies d’acteur s , non seulement ne corr igent pas la gravité, mais ils peuvent même accentuer cette gravité. Je pense qu’il faudrait commencer à envisager une for mation justement pour prévenir cela. 90 Je voudrais ajouter un mot concer nant les comités de concer tation. C’est vrai que la gouver nance à cinq par t d’un bon sentiment. Mais il n’empêche que dans la réalité, ce que j’ai constaté, ce ne sont pas des comités de concer tation, ce sont plutôt des comités d’infor mation. On ne pourra rien faire tant qu’il n’y aura pas cette for mation qui est pour moi essentielle pour les associations de r iverains et essentielle pour la collectivité locale. I Philippe Essig Le service de sécurité, pour moi, est une entreprise en soi. Elle a un programme de travail et doit faire face à toutes les situations que l’on peut imaginer. Il y a des formations pour ces services. Je vous corrige tout de suite, il en va de même pour les élus. Justement, l’ICSI a préparé toute une série de formations pour permettre aux élus de réagir de la façon la plus appropriée en cas d’accident ou d’incident. Sur les comités locaux, je partage entièrement votre sentiment. Je considère que la loi n’a pas produit le lieu de concertation - concertation et non information qui serait nécessaire. Je vous renvoie à l’expérience qui a été lancée par le maire de Feyzin, Yves Blein qui a créé autour du site de Feyzin, une conférence riveraine qui fonctionne depuis à peu près un an et demi ou deux ans de façon remarquable avec une présence permanente de riverains qui sont en dialogue avec les responsables de l’usine, les élus et les services de sécurité. Nous souhaitons que l’expérience de la conférence riveraine de Feyzin fasse école dans toute la France. tant de les expliquer. Il me semble donc que l’un des premiers enjeux en matière de formation sur les questions de risques, c’est de permettre aux stagiaires, quel que soit l’origine, le panel (élu, association, technicien etc.), de mesurer et d’appréhender l’ensemble des enjeux collectifs ou individuels, environnementaux, sociétaux, économiques et technologiques. Cette question des enjeux est reliée à une autre question. Même si nous sommes une école technique, nous ne sommes pas insensibles aux questions philosophiques et culturelles. Le moteur de l’action, c’est l’adhésion, l’engagement. Cela ne s’acquiert pas simplement par la maîtrise d’une expertise technique, mais par la référence à un système de valeurs. Pourquoi des événements dangereux se répètent et que l’on ne tire pas les leçons du passé ? C’est parce que l’on perd le sens et on oublie de se référer un système de valeurs qui doit être, autant que faire se peut, un système de valeurs guidé par l’intérêt général. Je pense qu’il est très important de comprendre que le moteur dans cette affaire, c’est l’engagement autour d’un intérêt général compris, appréhendé, partagé, expliqué. I Marc Focret, Directeur de l’Ecole Nationale des Techniciens de l’Equipement I Une personne de la salle L’Ecole Nationale des Techniciens de l’Equipement relève du MEEDDM et forme des techniciens supérieurs qui sont affectés plutôt dans les services opérationnels d’aménagement durable du territoire au sens large. Vous abordez les questions de formation de manière un peu fermée sur cette question des risques et de la sécurité, m’a-t-il semblé. Un des fondamentaux en matière de formation, c’est la recherche de l’adhésion, de la compréhension, en appréhendant les phénomènes et en ten- J’ai passé pratiquement toute ma vie à former des ingénieurs et à monter des écoles d’ingénieurs dans le cadre du Centre de l’Etudes Supérieures Industrielles. Je le dirigeais au niveau national en 2001. Peu de temps après, nous avons été interpellés par la métallurgie, notamment la métallurgie lyonnaise qui nous a demandé de réfléchir à ce que l’on pouvait faire en matière d’appui à l’industrie dans le domaine de la formation, puisque l’industrie lyonnaise quelques mois après 2001 n’a pas été bien. Ce qui m’a amené à faire homologuer par la CGE, le premier master en gestion des risques industriels en France. Depuis, j’ai quitté le CESI, parce que j’ai fait de la formation aux risques mon métier. Cela fait pratiquement 10 ans que je réfléchis essentiellement à cela. Et je vais arriver tout de suite aux conclusions. Ma conclusion est que bien évidemment, nous avons besoin d’un corps d’ingénieurs sérieux, solides, compétents pour continuer à avoir des installations à peu près aussi fiables que celles que l’on a aujourd’hui. Je crois que les systèmes physiques finalement n’ont pas démontré qu’ils étaient terriblement impliqués dans les derniers accidents que nous avons eus. Si on prend les accidents industriels – cela est valable au niveau mondial quand on pense à Tchernobyl ou Bhopal, mais plus particulièrement en France depuis 30 ans, 100 % des accidents industriels, grands ou petits, comme ceux auxquels vous faisiez allusion au niveau des dépotages, ont pour origine des décisions humaines qui ne sont pas nécessairement des décisions liées à l’opérateur final. La personne physique qui a été malheureusement à l’origine de l’accident d’AZF, le pauvre gars, il n’y pouvait rien. Je suis arrivé à la conclusion que l’essentiel des besoins de formation dans ce domaine-là était double. C’est tout d’abord l’encadrement. Je crois que 90 % des accidents industriels pourraient être évités si l’encadrement avait la connaissance : connaissance technique en partie, mais surtout connaissance de sa responsabilité, connaissance organisationnelle et peut-être un peu des comportements humains. L’autre aspect, on l’a évoqué, ce sont les élus. Le maire est responsable en dernier 91 Atelier 3 lieu de toute la gestion des risques sur sa commune. Bien que certaines initiatives existent et bien que cer tains maires soient tout à fait remarquables dans ce domaine-là, on est obligé de dire qu’il n’existe pas encore suffisamment de culture de gestion du risque chez les élus, même si cela commence à venir. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons créé un site Internet qui ne fait que cela, il s’appelle Sécurité Commune Info. On peut être une petite commune et avoir des sources de risques tout à fait importantes sur sa commune, ne serait-ce qu’avec les camions de TMD. Les maires sont complètement démunis de ce point de vue-là. I Olivier Hamoir J’ai une question à poser à la Direction Générale du Travail : Est-ce que les sous-traitants qui travaillent dans ses usines à risques bénéficient de formation au même titre que les employés staffés ? I Jacques Le Marc Je ne l’ai pas précisé tout à l’heure, le Code du travail a fixé une obligation de formation à la sécurité qui est à la charge des employeurs à l’embauche ou au changement des techniques de travail. Il y a une partie du Code du travail qui concerne les établissements à haut risque, essentiellement les établissements classés Seveso. Il est effectivement prévu que le responsable de l’entreprise utilisatrice qui fait appel à des entreprises intervenantes, on va dire des sous-traitants, doive former à la sécurité de manière renforcée les salariés de ces entreprises sous-traitantes. 92 I Olivier Hamoir Quel est votre constat ? Est-ce la réalité ? I Jacques Le Marc N’ayant pas eu un nombre important d’entreprises à haut risque sur le secteur sur lequel j’ai pu être inspecteur du travail, je ne pourrais pas me prononcer. J’avais notamment une raffinerie sur l’un de mes anciens secteurs. Je pense que c’était fait d’une manière générale. Sincèrement, je ne peux pas vous donner plus de précisions. I Philippe Essig Je vous renvoie simplement au cahier de sécurité sous-traitance rédigé par l’ICSI et auquel ont participé de façon très étroite les organisations syndicales. I Monsieur El Mahfoudi, Directeur de l’Institut Spécialisé de Travaux Publics d’Oudja (Maroc) Je suis directeur de l’Institut Spécialisé de Travaux Publics d’Oujda au Maroc et je suis ici en tant qu’invité de l’ENTE de Valenciennes. Ma question a deux aspects. Le premier concernerait plus les interventions de ce matin. Je m’interroge en fait sur la gestion des risques de certaines industries qui explicitement sont des industries faisant partie de la stratégie économique du pays mais qui ont implicitement des effets assez néfastes sur la société et sur l’être humain. Je ne citerai pas l’industrie des arbres et tous les effets qu’elle a sur le monde, je parlerai beaucoup plus de l’industrie des cigarettes. On sait très bien que la cigarette tue, d’ailleurs on l’affiche clairement. On combat la drogue, mais on évite de parler de certaines industries dont on a la preuve qu’elles ont des effets assez rétrogrades sur la santé du public et sur cette vie tellement chère à la terre qu’il faut préserver, qu’il faut sauvegarder. Le deuxième aspect de mon intervention concerne la formation d’une population de bas âge, à savoir les enfants qui sont les plus fragiles face aux risques. Que fait-on pour préserver cette population du risque de mettre en péril carrément la vie humaine et l’intelligence sur terre ? I Y v e t t e T e l l i e r, R e p r é s e n t a n t e d e l’IFFO-RME Je représente aujourd’hui l’IFFO-RME, Institut Français des Formateurs Risques Majeurs Protection de l’Environnement. Nous sommes en grande majorité des membres de l’éducation nationale, mais pas seulement. Nous avons dans ce réseau des spécialistes du risque (toute catégorie) aussi bien des collectivités, des préfectures, tous les services de l’Etat qui ont en charge la gestion des risques. L’une de nos missions essentielles est d’assurer la formation préventive auprès des jeunes dans les établissements scolaires, auprès des populations (à la demande des collectivités si nécessaire). Pour protéger les enfants, nous avons la mise en place des Plans Particuliers de Mise en Sûreté. Chaque école, chaque établissement scolaire, y compris chaque établissement d’enseignement supérieur, doit mettre en place une organisation interne. Cette formation a été également assurée au Maroc à la demande du Ministère de l’éducation nationale du Maroc. Des représentants de l’IFFO-RME sont allés former des personnels au Maroc pour mettre en place les PPMS (Plan Particulier de Mise en Sûreté. Quand on met en place le PPMS, nous les accompagnons d’une éducation au risque pour faire passer le message auprès des enseignants puisque l’on forme les enseignements. Les messages passent aux enfants, ensuite les enfants le passe dans les familles pour essayer de les démultiplier. Le rôle de l’inspection I Olivier Hamoir Dans cet atelier, nous souhaitions aussi aborder la question des services d’inspection. Vous savez qu’ils sont très souvent mis en cause. On parle de la jeunesse des inspecteurs, de leur inexpérience, du fait qu’on leur demande d’intervenir sur différentes problématiques et sur différents schémas alors qu’ils ne sont pas toujours formés. Est-ce un vrai problème au sein des inspections ? I Philippe Essig C’était un problème que j’avais abordé dans mon rapport au gouvernement après l’accident, la catastrophe AZF. Il est certain qu’en France nous avons un réflexe naturel de nous retourner vers l’Etat. L’Etat qui est protecteur. Nous pensons que finalement la réglementation va être notre bouclier. S’il y a eu un accident, une catastrophe, c’est que soit la réglementation a été insuffisante ou soit qu’elle n’a pas été appliquée. Le réflexe est de dire qu’il faut augmenter les inspections. Ce réflexe est typiquement français. Il est finalement mauvais. On a besoin d’un cadre réglementaire, tout le monde est d’accord là-dessus. Ne cherchons pas à ce qu’il rentre dans les mini détails. On a besoin d’avoir un œil extérieur et ça je pense que votre expérience dans le domaine social était très importante. Que cela puisse être aussi un contrôle industriel, cela fera du 93 Atelier 3 bien. Mais ne croyons pas que ce soit une panacée. Il se trouve qu’après l’accident AZF, le Ministère a doublé les effectifs d’inspecteurs de la DRIRE. Il a recruté instantanément je ne sais plus combien, 500 ou 1 000 jeunes ingénieurs. Quel que soit leur bonnes volonté, quel que soit leur formation initiale, ils ne pouvaient pas rentrer avec compétence dans les problèmes complexes d’une entreprise chimique. Cela avait soulevé un certain nombre de problèmes. I Pierre Bois 94 Je ne partage pas complètement ce point de vue. J’ai beaucoup fréquenté et connu les ser vices de l’inspection puisque c’était mon métier avant d’être à l’Ecole des Mines d’Alès. J’étais chef de ser vice régional de l’environnement industriel dans une DRIRE. Pour apporter un peu de détail ou de connaissance de terrain à propos de l’inspection, je dirais que l’Inspection des Installations Classées en France a deux forces et trois faiblesses. Ses deux forces, c’est d’abord un cursus de formation de base qui tient très bien la route. Il y a une semaine technique, il y a une semaine métier, un certain nombre de modules techniques qui sont globalement efficaces et qui couvrent bien l’ensemble des questions techniques qui peuvent se poser quand on est amené à veiller à l’application des cadres réglementaires sur les sites industriels. La seconde force est que, malgré les recrutements qui ont eu lieu récemment, la pyramide des âges est relativement stable. Il y a une faculté de transmission d’expérience très importante dans ces ser vices. On a presque partout une cohabitation assez étroite et un vrai travail d’équipe entre les inspecteurs expérimentés et ceux qui le sont moins. Objectivement, il est très rarement reproché aux ser vices d’inspection d’être incompétents. D’après ce que j’ai pu obser ver, c’est rarement leur compétence qui est mise en cause. En revanche, les ser vices d’inspection ont trois faiblesses. La première qui est la rançon du cumul des générations et de la pyramide des âges, c’est que les générations ont été formées avec des méthodes différentes. Les anciens ont été formés à la nécessité du développement industriel, c’est-à-dire au développement industriel de l’après guerre qui a duré extrêmement longtemps. Ceux qui contrôlaient devaient aussi faire en sorte que les industries se développent. Il y a eu une réaction complètement opposée, c’était le fruit d’une prise de conscience et d’une nécessité objective. Il a fallu mettre fin à une situation souvent brocardée. On a donc une gestion des inspecteurs qui est sur une ligne très dure. Cela excluait en particulier le mot « conseil » qui est devenu un véritable tabou dans les ser vices d’inspection. Par conséquent, les dossiers étaient moins bien ficelés et finalement les exploitants industriels répondaient moins bien aux attentes de l’inspection. On a un moyen terme qui se situe entre les deux problèmes de générations. Le deuxième défaut identifié ou faiblesse, est un problème d’appréhension de la faisabilité, de la notion d’économiquement acceptable, qui aujourd’hui écrite dans la réglementation et très difficile à appréhender sur la réalité économique des sites industriels, et très difficile à concevoir. Troisième faiblesse, c’est qu’il y a une grosse faille, une ligne de fracture méthodologique entre les réglementations relatives à l’usine en fonctionnement (principalement IPPC), et celles relatives à la prévention du risque majeur Seveso. IPPC se réfère à des documents constamment mis à jour par construction, qui sont les Brefs. Tandis que la réglementation, au moins en France, concernant le risque majeur, s’appuie sur un corpus extrêmement serré de circulaires techniques, très détaillées. On a une variété et une richesse de textes à appliquer beaucoup plus grande que pour l’autre. Cela pose des problèmes de méthodologie aux inspecteurs. I Jean-Pierre Vidal L’IRSN par ticipe à la for mation d’inspecteur s de la radioprotection et de la sûreté, mais elle n’a pas la maîtr ise d’œuvre. Ceci étant, je me retrouve assez bien dans les propos de Monsieur Bois pour avoir été dans une vie passée, inspecteur de la radioprotection. Effectivement il y a une activité de for mation initiale, quand on rentre dans la fonction qui est impor tante, qui s’est développée, et qui s’est mise en place dans la radioprotection. Le souci, c’est de pouvoir la maintenir, de l’enr ichir et de l’actualiser au fil du temps par des for mations pér iodiques et des par tages avec (en dehor s du contexte d’inspection) les par tenaires ou les per sonnes qui sont dans les éta blissements qui sont contrôlés , de façon à essayer de faire la par t des choses , de savoir effectivement comment les gens travaillent et a ppréhender cette façon-là, et a près mettre cela en per spective avec les obligations et les contraintes dont les inspecteur s ont la charge. I Olivier Hamoir Madame Wood, quelles sont les actions de la Commission Européenne sur ce sujet ? I Maureen Wood Je n’ai pas de solution. Je fais deux réflexions issues de mon expér ience avec les inspecteurs au niveau européen. Cela s’a pplique à l’industrie et aux inspecteur s . Les compétences exigées par les métier s de la gestion du risque sont très var iées et très complexes . Raffineries, fabricants d’engrais ou d’entrepôts sont très diverses . Je crois qu’un ingénieur, for mé généralement dans une école, qui fait face à un cer tain type d’éta blissements , doit avoir beaucoup de temps pour se for mer afin de bien connaître les r isques auxquels il est confronté. Les spécialistes sont nombreux. Comment peut-on soutenir nos exper ts par ra ppor t à ses var iétés ? Il y a des stratégies mais il faut les disséminer et les mettre en œuvre dans plusieur s pays . Par ailleur s , vous avez par lé de la culture de sécur ité et des facteur s humains . J’ai entendu des inspecteur s qu’ils ne sont pas confiants en matière de science cognitive, ils sont for més en science technique pour la plupar t. Le problème est l’accès à des exper ts de ce genre. Dans les ser vices liés au Seveso, ils ont un assez bon accès à ces exper ts , mais chez les industr iels , je me demande si cela est le cas . 95 Atelier 4 Instances de concer tation SPPP I • p u b l i c • s o c i é t é c i vile • enquêtes publiques c on s u l t a t ion inform a t ion co-décision • dialogue CL I C t r a n s p a r e n c e • L o i TSN I William Giraud, Animateur journaliste Cet atelier est consacré aux instances de concertation et de transparence, à leur efficacité et leurs perspectives d’évolution. Certains mots ont été entendus ce matin : transparence, information, consultation, concertation. Alors nous allons nous demander comment et pour qui mettre en place la concertation. Comment impliquer les non-sachant ? À quel moment du processus peut-on identifier le mode d’implication à retenir en fonction du contexte ? Un nouveau mode de concertation est à l’œuvre et on a beaucoup misé dessus depuis plusieurs années. Quelles premières leçons en tirer ? Nous donnerons la parole à un représentant des Secrétariats permanents pour la prévention des pollutions industrielles, aux élus, aux associations, aux entreprises, sans manquer d’aller voir ce qu’il se fait à l’étranger. Nous débattrons de ces questions ensemble dans une seconde partie. 96 En préambule, nous allons regarder une vidéo de cinq minutes qui a été réalisée par le S3PI Artois. Ce film présente un exemple de mise en place de concertation tout au long de la procédure de la demande d’autorisation. La Commission Nouveau Projet, proposée par le SPPPI, permet à un industriel de se présenter et de présenter son projet aux membres du SPPPI (associations, collectivités, riverains). La vidéo est disponible sur www.assises-risques.com I William Giraud Voilà un exemple de la forme que peut prendre la concertation. Nous le voyons bien à travers cette vidéo, il s’agit à la fois de bien cibler les supports d’information, de sensibiliser le public et de ne pas hésiter à avoir recours aux SPPPI, Secrétariats Permanents pour la Prévention des Pollutions Industrielles. Ces SPPPI ont été créés dans les années 70 et Michel Lesbats, universitaire et responsable du SPPPI Presqu’île d’Ambès, va nous en dire plus. I Michel Lesbats, Animateur Presqu’île d’Ambès du SPPPI Vous vous demandez ce que vient faire un universitaire pour présenter les structures que l’on appelle les SPPPI. C’est la première caractéristique des SPPPI : ils sont « Grenelliens » d’abord par leur composition. Au sein d’un SPPPI siègent tous les acteurs -ou parties prenantes- qui sont impliqués au niveau d’un territoire dans le domaine du risque industriel au sens large. Il y a bien sûr les industriels, les services publics, les DREAL, mais pas que les DREAL, puisqu’il peut y avoir les ARS, les Directions du Travail de l’Emploi, qui ont changé de nom récemment. Il y a donc les services publics, mais aussi les associations de riverains ou de protection de l’environnement, les salariés, sans oublier les élus qui sont garants du territoire, On peut trouver des experts, des universitaires et des étudiants. La caractéristique du SPPPI presqu’île d’Ambès est d’amener les étudiants sur le terrain industriel pour qu’ils travaillent concrètement. Ainsi, cinq ou six acteurs se mettent autour d’une table et discutent. De quoi ? Ils discutent de ce dont ils veulent discuter. C’est la deuxième caractéristique du SPPPI : ce n’est pas une structure régalienne, ils ne s’intéressent pas qu’à la déclinaison de la réglementation. Cela, tous les acteurs du SPPPI savent très bien faire. Souvent les associations « écologistes » sont là pour piquer les gens au vif et faire avancer la situation. Les services publics sont là pour faire des études très sérieuses sur les domaines des risques industriels, les élus, pour diriger leurs communes. Tout le monde sait faire cela. Par contre, travailler ensemble sur des sujets choisis ensemble, sur une zone de cohérence qui est la zone du territoire, c’est déjà un peu plus rare. Comme vous l’avez dit tout à l’heure, cela fait près de 40 ans que les SPPPI fonctionnent. Ils ne fonctionnent pas forcément de façon idéale, mais ils ne fonctionnent pas si mal que cela. Qu’y fait-on, à part traiter des sujets industriels que l’on définit en commun ? On y fait un peu ce que l’on a vu dans le film et je vais proposer d’y faire quelque chose qui nous emmène un peu plus loin. D’abord on y fait de l’information. Vous savez ce que c’est que l’information : c’est transmettre des données d’un émetteur vers un récepteur. C’est un peu ce que j’essaie de faire maintenant. Dans les SPPPI, on fabrique donc des plaquettes pour informer le public. Le public est celui qui ne connaît pas, celui qui est profane, que l’on a besoin d’informer. On peut aussi y faire de la communication. La communication, c’est un petit peu plus compliqué. Il faut échanger des informations qui peuvent être contradictoires. L’émetteur devient le récepteur, et réciproquement. Cette définition de la communication est loin de ce que l’on appelle la communication politique, ou même la communication en situation de crise qui consiste souvent non pas à échanger des informations, mais à dire ce que l’on fait. Or là ce n’est pas cela du tout. Il s’agit d’échanger des données de façon à définir ensemble des objectifs partagés et / ou communs. C’est ce que l’on appelle la concertation. Pour qu’il y ait concertation, il faut de la communication et de la confiance entre les acteurs dont j’ai parlé tout à l’heure. A ce moment-là, on peut espérer avoir de la véritable concertation, qui n’est pas une simple consultation. Nous avons tous connu la consultation : on nous écoute, on nous demande notre avis d’universitaire, d’étudiant… mais cet avis n’est souvent pas pris en compte dans la décision ! Je reviens un peu sur l’idée que j’ai présentée tout à l’heure qui est que les SPPPI ne sont une structure régalienne, contrairement à ce que sont les CLIC, les Coderst, peut-être aussi quelquefois les SCOT, les futures Commissions de Suivi de Site, où l’on traite des problèmes régaliens, des problèmes d’Etat, de responsabilité de l’Etat, à travers la loi et à travers la réglementation. C’est essentiel mais ce n’est pas suffisant pour que l’on puisse avoir une efficacité en matière de gestion du risque industriel. Or, c’est ce que proposent les SPPPI 97 Atelier 4 depuis longtemps : essayer de se mettre sur une piste de concertation. Finalement, c’est quoi ? C’est faire fonctionner la société parce que la société n’est pas un simple agrégat de gens qui défendent leurs propres prés carrés. Elle est aussi une zone où l’on va pouvoir échanger des informations, pour participer à terme à ce que l’on pourrait appeler la codécision. Mais cela, c’est pour demain. La codécision, c’est l’ensemble des partenaires sociaux et sociétaux qui définissent la gestion d’un territoire. Bien sûr nous avons nos élus et n’oublions pas l’Etat qui est garant de la sécurité de l’ensemble des citoyens. Voilà un peu ce que devraient être les SPPPI de demain. I William Giraud La parole est désormais à Yves Blein, président d’AMARIS, vice-président du Grand-Lyon et maire socialiste de Feyzin, grandement impliqué au niveau de sa commune et au niveau des collectivités dans la concertation. I Yves Blein, Maire de Feyzin et Président d’AMARIS 98 AMARIS est une association qui regroupe des communes ayant des entreprises classées Seveso seuil haut sur leur territoire. Le but est de leur permettre de faire circuler l’information entre elles pour qu’elles se dotent et qu’elles échangent les ressources nécessaires qui sont liées à ces situations particulières. Cela peut être lié à l’appréciation de la relation avec les industriels, à la relation avec les habitants ou la façon d’animer le dialogue entre ces parties prenantes qui n’ont pas toujours des intérêts convergents. AMARIS aide à boucler la boucle avec les ser vices de l’Etat et à mettre en place l’ensemble des dispositions que cela peut concerner, dans le respect de la sécurité des habitants qui est une des premières missions des collectivités, tout en liant cela à la question du développement économique et à la question de l’emploi. Le rôle des communes sur la question du risque industriel est souvent réduit à celui de la sécurité. C’est le plus flagrant, celui qui saute aux yeux et qui est sans doute la priorité des priorités, mais il y a aussi dans cette question d’animation et de développement territorial, la question de la présence de l’entreprise, de l’emploi qu’elle représente, de la richesse pour le territoire. Tout ça n’est pas exempt de notre réflexion. I William Giraud Vous abordez toutes ces questions à Feyzin au travers d’une initiative locale : la conférence riveraine. Expliquez-nous quels sont son principe, son fonctionnement et sa genèse. I Yves Blein J’aimerais réagir à l’exposé précédent sur les SPPPI. Plusieurs instances de concertation existent sur la question du risque industriel et de la relation avec les habitants. Le SPPPI en est une. Mais le niveau d’une agglomération, comme c’est le cas pour nous à Lyon, n’est pas un niveau qui permet à l’habitant d’intervenir directement sans être représenté par les élus, les associations ou autre. Il y a, dans la loi Bachelot, les CLIC, les Commissions Locales d’Information et de Concertation. Celle de Feyzin réunit à peu près, autour de la raffinerie, une trentaine de personnes parmi les autorités de l’Etat, les services de sécurité et de secours, les représentants des salariés, les représentants des élus, etc. Il y a deux habitants. Il est inutile de vous dire que c’est compliqué pour eux de prendre la parole. Il faut le dire. Les CLIC sont sans doute un progrès en matière de concertation, mais ils restent un espace de dialogue très réduit pour des habitants qui ont envie de comprendre et de s’intéresser à la question du risque industriel et de la sécurité qui les concernent. C’est pour cette raison que sur ma commune (sur d’autres il peut y avoir des appellations différentes), nous avons installé une conférence des riverains. C’est une conférence permanente qui regroupe une cinquantaine de riverains représentatifs des différents îlots de quartiers qui avoisinent la raffinerie et qui fonctionne un peu comme un cercle de progrès. Elle identifie les questions que les habitants se posent sur la pollution, le risque, l’érosion atmosphérique, les odeurs et le bruit. On parle souvent du risque mais ce n’est pas la première chose qui est perçue par les riverains de l’installation industrielle. C’est souvent un thème pour eux un peu secondaire, un bruit de fond, mais ce n’est pas celui qui jaillit le plus souvent. Cette conférence riveraine est installée pour une durée de trois ans. Une des composantes du risque est qu’il est parfois compliqué à comprendre, qu’il nécessite un fond de formation commun pour pouvoir échanger et progresser utilement ensemble. La première nécessité est celle de la durée, pour que les habitants puissent aussi se former et acquérir les connaissances nécessaires à un dialogue. Les citoyens doivent se former, comme les élus locaux. Je suis de ceux qui combattent l’idée qu’il y a les élus et les citoyens. Les élus sont d’abord les représentants des citoyens. Ils boxent dans la même catégorie. Evidemment ils se forment aussi. Quand on est élu pour la première fois, on est un néophyte complet, sauf à avoir acquis par l’intérêt que l’on porte à la chose publique, un certain nombre de connaissances. Il faut vraiment considérer que, y compris sur cette question du risque industriel, on peut former les gens, et, somme toute, c’est le vrai challenge qui se pose à nous. Quand on parle d’acquisition d’une culture de la sécurité du risque, c’est bien de faire en sorte que cette question soit partagée, ne soit pas vécue seulement comme une question pesante et angoissante quand il y a un accident, puis retombe ensuite dans l’oubli le plus complet. Il faut que nos concitoyens qui sont confrontés à ces situations acquièrent une culture minimum de connaissances de l’entreprise, de ses process, mais aussi de leur capacité à se protéger. I William Giraud Pour conclure Monsieur le Maire, diriez-vous que vous voyez le maire et peut être l’élu d’une manière générale, comme le garant de l’indépendance de cette concertation ? I Yves Blein Oui, parce que d’une certaine façon l’industriel et l’Etat sont soupçonnés par les habitants. L’industriel porte le pêché de vouloir produire à l’abri des regards pour pouvoir conduire tranquillement sa production. L’Etat est soupçonné de vouloir réglementer sans que l’on vienne lui dire comment il faut qu’il fasse. I William Giraud Mais le Maire aussi a ses intérêts… I Yves Blein Oui, mais il est perçu des habitants comme le représentant et le dépositaire de leurs intérêts. Cela le positionne un peu en situation d’animateur du débat et non d’arbitre. Je ne 99 Atelier 4 pense pas qu’il soit de la responsabilité de l’élu, ni de sa ca pacité, d’arbitrer sur des situations comme celles-ci. L’arbitrage final revient à l’Etat qui est d’une certaine façon le seul détenteur de l’intérêt général et de l’intérêt public. Par contre, cela met le maire en situation d’animateur du débat, ce qui doit être une de ses qualités premières dans une telle situation, si tant est qu’il en ait la volonté. Les dispositifs approfondis de concertation nécessitent d’abord de la volonté. Les gens ne se bousculent pas quand vous ouvrez la porte pour venir parler du risque industriel, ce n’est pas vrai. Il faut aller les chercher. Il faut susciter leur intérêt. Il faut leur donner le goût pour cette question-là. Cela nécessite de la durée, de la formation. Le troisième élément sur lequel je souhaiterais insister est que cela nécessite des moyens. La concertation n’est pas une science qui tombe du ciel. Il faut des gens, il faut réunir des moyens qui sont coûteux et qu’il faut assumer pour conduire une concertation de bonne qualité. I William Giraud Nous allons donner la parole à Jean Wencker qui représente les associations. Elles sont nombreuses, nous les avons entendues s’exprimer ce matin en plénière. Vous, au niveau des associations, vous avez deux exemples, j’allais dire, de concertation : l’une réussie, et l’autre plutôt ratée. I Jean Wencker, Vice-président d’Alsace Nature 100 J’ai un complément à apporter : je représente aussi le SPPPI de Strasbourg-Kehl qui a une étendue internationale puisque la ville de Kehl a été associée au SPPPI de Strasbourg. Kehl est une ville d’à peu près 20 000 habi- tants et se situe de l’autre côté du Rhin. Il est évident que les entreprises et les industriels qui sont sur la rive gauche ont aussi une influence sur la rive droite. Lothaire Zilliox, son président, m’a délégué pour vous apporter ses salutations et pour vous prier d’excuser son absence à Douai aujourd’hui. Alsace Nature est une fédération née en 1965. La participation à toutes les formes de concertation est dans ses statuts. Il est donc normal pour notre association de participer aux enquêtes publiques et de donner nos avis au nom du public le plus large. A propos d’enquêtes publiques qui sont souvent très décriées, je vous cite juste deux exemples. L’une à mon sens a été réussie parce qu’il s’agissait en 2005 de se concerter pour la construction d’une double ligne électrique qui devait conduire le courant en Lorraine. Cette concertation a été réussie parce que RTE a contacté le monde associatif largement en amont de l’ouverture de l’enquête publique. Ils ont négocié avec le Conservatoire des sites alsaciens pour définir le tracé afin d’éviter un certain nombre de sites protégés particulièrement importants pour le patrimoine naturel. Par conséquent, une fois l’enquête publique ouverte, il n’y a plus eu lieu de corriger ce tracé. Cette enquête concernait quand même 86 communes, pourtant un seul maire a émis un avis défavorable. Entre-temps, ce maire a mesuré qu’au fond ses objections étaient relativement bien prises en compte. Globalement, ce débat autour de la ligne 400 000 volts Vigy-Marlenheim, a été, à mon sens, une enquête réussie. Par contre, il y a eu l’enquête autour du bar- rage hydroélectrique d’Iffezheim sur le Rhin. Il y a eu de la communication autour de cette affaire. Le rapport Dambrine par exemple faisait le bilan du potentiel hydroélectrique qui demeure. Ce rapport a été présenté à Bercy, je ne sais plus si c’était le 18 ou le 17 janvier 2007, mais cela a été une grande messe où tous les électriciens se sont rencontrés. Le rapport Dambrine mentionne qu’il y avait, sur le Rhin, deux ouvrages hydroélectriques ne comportant que quatre turbines alors que cinq avaient été prévues. La cinquième n’a pas été construite dans les années 70 tout simplement parce que l’investissement d’une cinquième turbine ne fonctionnant que 50 jours par an ne pouvait pas être amorti dans les délais normaux. Iffezheim est une usine allemande. Il y a 10 barrages hydroélectriques sur la partie franco-allemande du Rhin. La première à être équipée est Iffezheim. L’enquête publique pour la mise en place de la cinquième turbine a été ouverte fin 2008. Je me souviens m’y être rendu le 9 janvier 2009. C’est assez cocasse, je me suis retrouvé dans une luxueuse salle d’une commune du nord de l’Alsace où trois enquêteurs m’ont accueilli comme le messie parce que j’étais le premier citoyen qui se rendait à l’enquête au bout de plusieurs semaines. J’ai fait un certain nombre de remarques et j’ai découvert avec stupeur que le projet prévoyait de fermer pendant neuf mois la passe à poissons d’Iffezheim qui avait été inaugurée en grande pompe en 2000. I Jean Wencker Il y a un plan international de restauration des poissons migrateurs du Rhin. Ce plan a déjà coûté plusieurs centaines de millions d’euros ! A cause de ce qui, à mon sens, était de la pure paresse intellectuelle, les ingénieurs voulaient fermer cette passe pendant neuf mois. Au passage je vous signale qu’elle est fermée depuis 18 mois et elle est toujours fermée. Pour moi, c’est absolument scandaleux. La faute est moins du côté des autorités françaises que des autorités allemandes. L’autorité administrative qui aurait dû mettre un cahier des charges sur la passe à poissons sur le chantier, c’était des autorités de Stuttgart et du bas d’Ortenberg. On ne peut pas faire le procès des techniciens du génie civil, ils ne sont pas des experts piscicoles. Mais la responsabilité est aux autorités administratives qui participent aux travaux de la Commission internationale du Rhin et qui ont des experts en matière piscicole parfaitement au courant des modalités de fonctionnement de la passe. Elles se devaient d’attirer l’attention des industriels sur le fait que neuf mois d’arrêt de la passe, est absolument incohérent avec la politique des états sur le Rhin. Il aurait suffit de mettre en place un système de pompes et de tuyauteries pour alimenter en eau la passe en dépit des travaux. Je ne dis pas que ce soit facile, mais cela aurait certainement permis de réduire la fermeture de la passe à, admettons, une semaine, juste pendant le phasage de la mise en place de la turbine. Des tuyaux vous savez, cela se déplace. En tout cas consulter le dossier de l’enquête ne m’a permis de découvrir que les opérateurs avaient réellement cherché des solutions techniques pour maintenir la continuité écologique du fleuve, leur obsession semble avoir été de minimiser les coûts. Pour conclure, c’est quand même un exemple typique de ratage. Les autorités administratives n’ont pas fait leur devoir. On ne peut 101 Atelier 4 pas incriminer l’industriel. Ce qui est positif dans cette affaire, c’est que le même travail va être fait dans l’usine hydroélectrique qui est en amont, à Gambsheim. EDF a sûrement été attentif aux critiques qu’Alsace Nature a faites sur Iffezheim, et sera plus-être plus vigilant quant à minimiser la durée de fermeture. Des centaines de millions d’euros, les efforts de centaines d’experts du monde associatif et d’ailleurs, sur l’ensemble du cours du Rhin, s o n t fi n a l e m e n t c o m p ro m i s à c a u s e d ’ u n e n é g l i g e n c e a d m i n i s t ra t i ve d e s a u t o r i t é s a l l e ma n d e s . parence sur la Sûreté Nucléaire du 13 juin 2006 qui est accompagnée d’une loi sur le devenir des déchets nucléaires. A la suite de cela, il y a eu un décret de procédures en 2007 définissant comment les exploitants devaient communiquer et quel était le rôle de l’Autorité de Sûreté Nucléaire dans la promotion de cette communication et de la transparence. Pour tout ce qui est du domaine des demandes d’autorisation de création ou de démantèlement d’installations, il y a des procédures du même type que celles qui ont été décrites ici avec des enquêtes publiques. I William Giraud Nous avons été amenés à développer deux sujets un peu particuliers dans le monde du nucléaire et nous les alimentons de façon régulière au-delà des Commissions Locales d’Informations. Depuis les années 90, nous avons mis en place des méthodes de travail avec des groupes pluralistes. Le GRNC, Groupe Radioécologique Nord Cotentin fait référence dans le monde du nucléaire. Il a été créé pour amener une solution au grand problème de l’évaluation des rejets de l’usine de la Hague. Je ne vais pas refaire l’histoire, mais il y a eu débat pendant des années sur ces rejets. Je pense que l’Etat a eu la bonne initiative de créer un groupe participatif sur ce sujet-là, piloté par un expert et par une personnalité reconnue. C’était une première initiative où on rassemblait à la fois des industriels, des scientifiques, des experts nationaux ou internationaux et des associations pour essayer de décrire l’objet et de trouver une solution. Il faut retenir qu’après un travail assez long, le GRNC existe toujours en tant qu’institution et il est entretenu. On est arrivé à trouver un modèle pour qualifier effectivement l’impact des rejets de la Hague. Aujourd’hui, on peut Nous allons donner la parole au monde de l’entrepr ise à traver s l’inter vention de JeanLuc Andr ieux. Vous êtes directeur sûreté, santé, sécurité et environnement chez Aréva. I Jean-Luc Andrieux, Directeur sûreté, santé, sécurité et environnement chez Aréva 102 Pour être complètement transparent, je dois dire qu’au-delà de la fonction que j’occupe aujourd’hui, j’ai été longtemps opérationnel, puis directeur opérationnel et directeur de grands sites, notamment dans l’usine d’enrichissement d’uranium Eurodif dans le sudest, à l’usine de la Hague connue par tout le monde dans le nord Cotentin. J’ai aussi été responsable des transports de matières nucléaires et de déchets radioactifs. Pour revenir sur le sujet, vous le disiez, le monde du nucléaire fonctionne depuis toujours avec une réglementation très précise et avec une sur veillance très importante. Je signalerais simplement que, dans ce domaine, la réglementation la plus récente date de 2006. Tout le monde a entendu parler de la loi TSN, Trans- dire que tout ce qui est transmis au grand public sur ce sujet-là se base sur un modèle qui a été établi et inventé de façon participative. C’est un très bel exemple et une très belle réussite qui a d’ailleurs été reprise. Vous avez peut-être aussi entendu dire que nous avions remis cet été - c’est un « nous » très collectif - au Ministre Jean-Louis Borloo, un rapport produit par un groupe un peu du même type, le GEP Limousin. Il traite de l’impact des anciennes mines d’uranium dans le Limousin et en France. Il fonctionne sur un modèle à peu près identique à la composition du groupe dont je vous parlais juste avant. On y a ajouté formellement l’administration. Voilà donc la deuxième initiative dans laquelle nous avons été pleinement associés. Il y a une démarche très importante qui est lancée et qui vient de cette loi TSN de 2006. Derrière cela, il y a des groupes institutionnels qui ont été montés, notamment le Haut Comité à la transparence de l’information sur la sûreté nucléaire. Il y a le Plan national de la gestion des déchets des matières radioactifs. Un certain nombre de groupes de travail sont initiés par rapport à cela. Monsieur Bonnemains qui faisait partie de la table ronde de ce matin, est l’un des membres actifs de ce Haut Comité. Monsieur Lallier qui je pense que n’est pas avec nous, qui représente le syndicat CGT, fait aussi partie de ce groupe. Personnellement, j’en fais partie pour Aréva. Dans l’animation de ce groupe, nous retrouvons l’administration : l’Autorité de Sûreté Nucléaire, la DGPR et les Ministères qui sont représentés en fonction des sujets traités. Il y a aussi bien sûr le monde associatif très largement représenté avec cinq ou six associations à dimension nationale, des syndicats profes- sionnels, des experts, des personnalités internationales et le monde de l’entreprise. Je considère que c’est un travail très positif que l’on fait dans ce genre d’institutions. On est dans l’échange et le partage. On progresse. Une personne comme Jacky Bonnemains est devenu un interlocuteur courant pour moi. Nous communiquons fréquemment et sur tout sujet qui le préoccupe. On sent que l’on peut faire des choses. Par exemple, vous pouvez consulter sur le site du Haut Comité pour la transparence un dossier sur le sujet de l’uranium appauvri, l’uranium de recyclage et la relation avec la Russie. Même si au bout du compte les associations n’ont pas vraiment accepté de signer le document, nous avons été capable de le traiter. Nous avons mené à bien l’ensemble de la démarche qui a duré des mois. On a échangé des mégaoctets de documents les uns et les autres. Nous avons réussi à écrire un document où l’on explique clairement quel est le cycle du combustible, quel est le positionnement de la Russie etc. Je citerai tout de même deux limites du système. La gestion de ces groupes participatifs, et cela est vrai pour les associations comme pour nous, finit par être une charge de travail qui vient non seulement s’ajouter, mais à laquelle il faut faire face. Il faut se donner les moyens de le faire. On ne regorge pas d’experts capables de traiter un sujet comme cela de façon généraliste. Les associations pourraient le dire aussi. La deuxième limite est qu’effectivement, quand on est dans le domaine de la transparence et notamment dans nos métiers, on butte sur des sujets du type confidentiel, défense, industriel et commercial. Je vous cite juste un sujet pour que vous imaginiez les difficultés auxquelles on peut 103 Atelier 4 être confronté. J’ai été amené à présenter devant le Haut Comité le sujet du transport de matières nucléaires plutonium entre l’Angleterre et la France, avec des bateaux anglais, des emballages anglais et des camions français. Comme c’est de la matière de catégorie 1, cela s’est fait sous la protection du confidentiel défense. En plus de cela, l’installation dans laquelle on arrivait en France avait été modifiée. Il y avait donc un dossier de sûreté avec des limites de confidentialité industrielle. Puis le client était allemand. Il a fallu que nous trouvions ensemble les moyens pour échanger suffisamment d’informations. Nous devions aussi le faire au niveau du Haut Comité. Mais réfléchissez à ce cas particulier et demandez-vous comment résoudre cela. Pour assurer la sécurité du transport, on utilise le support de l’Etat qui impose, lui, la nontransparence, la non-communication et malgré tout il faut bien apporter de l’information au public. Il faut prendre le risque de faire un pas. Il y a le sujet des médias ), il y a un risque d’amplification. On peut se trouver en opposition par rapport à la loi de façon très très forte. Il faut aussi respecter son client. I William Giraud 104 On voit le subtil équilibre entre tous ces impératifs. Vous le disiez, on devait accueillir un représentant des syndicalistes. Leur présence en tant que représentants des salariés est importante dans la concertation. Michel Lallier de la CGT, qui d’ailleurs siège au Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité du nucléaire s’excuse de ne peut pas être présent. Ses obligations syndicales, avec le contexte que l’on a évoqué tout à l’heure, le retiennent à Paris. Mais nous pourrons soulever quelques questions qu’il devait aborder tout à l’heure dans la partie débat. Nous allons donner tout de suite la parole à André Hermann pour voir ce qui se fait à l’étranger en matière de concertation. André Hermann est expert en Suisse, consultant et ancien chef du Bureau de protection de la santé et de l’environnement du canton de Bâle, une zone frontalière entre la Suisse, l’Allemagne et la France. Il va expliquer comment cela fonctionne. Ce ne sont pas véritablement les mêmes démarches qui sont entreprises d’un pays à l’autre. Les différences sont vraiment importantes. I André Hermann, Consultant, ancien chef du bureau de la protection de la santé et de la sûreté des installations à risques du canton de Bâle (Suisse) Je suis retraité et j’étais responsable du contrôle des denrées alimentaires et des installations que vous appelez Seveso, c’est-àdire les installations à risques dans le canton de Bâle, avec entre autres toutes les grosses firmes chimiques dont vous connaissez bien les noms. Je travaille dans le groupe Travaux pratiques (TP) EST de RES qui a la particularité d’être composé de membres venant des trois pays du Rhin supérieur. C’est grâce à cette configuration que nous avons pu comparer les approches des trois pays sur les thèmes de la concertation et aborder les problèmes de la communication. Comment font-ils en Allemagne ? Comment font-ils en Suisse par rapport à ce qui est fait en France ? Ce qui m’a beaucoup impressionné en France, c’est la mise en place de ces outils de concertation que sont les CLIC ou encore les Comités d’hygiène des entreprises qui sont très engagés, mais peut-être ne résolvent-ils pas tous les problèmes de confrontation avec le grand public. En Suisse et en Allemagne nous n’avons rien de similaire. Il n’y a aucun outil, aucun moyen décrété par une loi. Cela se fait, j’allais dire, au coup par coup. Les comités ou les groupes de travail se font et se créent en fonction des thèmes qui nécessitent un débat. Il faut peut-être rappeler qu’en Suisse comme en Allemagne nous sommes une confédération de cantons ou de Länder qui jouissons d’une grande autonomie. Ainsi, la police, la santé et l’éducation sont d’abord du ressort des cantons. En fin de compte, ce sont les communes qui ont pouvoir de décision. Autrement dit, on fait du « bottom up » et c’est la population qui décide. Même pour les grands projets, que ce soient des projets ferroviaires, des projets nucléaires ou d’autres, c’est la population qui a le dernier mot. Les associations peuvent lancer un référendum pour s’opposer à n’importe quelle autorisation, à l’aide de quelques milliers de signatures. Pour la Suisse, il suffit de 50 000 signatures récoltées en 100 jours, pour faire obstacle à un projet. Cela étant, les industriels et les grandes entreprises savent très bien qu’il faut d’abord convaincre le public. C’est peut-être la chance que nous avons aussi bien dans les Länder de l’Allemagne que dans les cantons suisses. Cette force décisionnelle du public n’oblige pas seulement à une concertation, mais à ce que l’on doit atteindre : un consensus. C’est parce que l’on cherche à trouver un consensus que les projets sont en fin de compte relativement bien acceptés. Il faut toutefois faire remarquer qu’en Allemagne existe une pression sociale: avec l’ouverture des frontières vers l’est, beaucoup d’industries ont quitté l’ouest, créant un pro- blème d’emplois. Les Allemands sont peutêtre un peu moins critiques vis-à-vis de certains projets comportant des risques puisqu’ils ont besoin de travail. I William Giraud Ce que vous nous expliquez, c’est qu’il y a un aspect pragmatique et économique. I André Hermann Les Allemands sont pragmatiques. Ils sont peut-être un peu plus sous la contrainte que ne le sont les autres parce qu’ils ont ce problème de l’emploi. Mais ils ont aussi un outil que nous n’avons pas en Suisse et que vous n’avez pas en France qui s’appelle le « scoping ». Le « scoping », c’est ce qui a été montré avec la vidéo précédente. Bien avant que le projet ne soit ancré et établi sur plan, il y a une concertation ouverte à tout public. N’importe quelle personne du grand public peut faire ses remarques, faire des propositions ou des oppositions, avant que le projet soit ‘bétonné’: il est encore modifiable. Et ceci, je crois, est la grande force du côté allemand. Par contre, en Suisse nous n’avons pas de « scoping », mais nous créons des groupes de travail spécifiques à des thèmes. Prenons un exemple particulier, celui du dépôt de déchets nucléaires, un thème actuel un peu partout. Depuis plus d’une année, la confédération qui chapeaute le processus a impliqué toutes les communes et tous les cantons, en trois étapes pour informer, sensibiliser à la problématique en général, écouter les doléances et essayer de trouver un consensus bien en amont des concepts d’ingénierie et de construction. 105 Atelier 4 Questions de la salle I Eric Batailler, DREAL Poitou-Charentes J’ai trois remarques. Une première porte sur l’important travail de concertation et d’acculturation qui est fait, notamment dans le cadre des CLIC. Nous avons souvent l’impression que ce travail ne redescend pas vers la population. Comment faire pour que le rôle de chaque membre des CLIC ou des SPPPI soit effectivement mis en œuvre et permette une acculturation générale de la population ? Je retiens le principe de conférence des riverains qui a été mis en place par Monsieur Blein qui est une possibilité de réponse. Mais comment faire pour que le principe de concertation dépasse les portes des CLIC et des SPPPI ? C’est un vrai souci parce que nous nous apercevons lorsque nous organisons des réunions et des débats publics, qu’aucun travail d’acculturation de la population sur ces risques industriels n’a été réalisé. En fait, tout le travail qui a été mené dans le cadre des CLIC est à refaire lors de ces débats publics. I Michel Lesbats 106 Quand on a parlé de concertation ou d’information, on a en fait confondu deux niveaux. Je m’en suis rendu compte à la suite de votre inter vention. Le premier niveau est le niveau de l’association entre les partenaires. L’INERIS vient de publier un document sur la concertation pour réaliser des PPRT au sein des CLIC. Ce document différencie deux choses, ce que nous n’avons pas fait ici : l’association et la concertation entre ceux qui ont l’habitude de discuter, de se concerter, à savoir des représentants des industriels, du public, des élus, etc., et ce que l’on pourrait appeler la concertation directe auprès des citoyens. Donc comment faire ? C’est de l’éducation, c’est de la formation, c’est de la sensibilisation, c’est tout ce que vous voulez… Mais la sensibilisation, c’est « rendre sensible à ». La formation, c’est changer les paradigmes, c’est-à-dire changer les façons de raisonner. C’est un peu ce que nous allons essayer de mener dans le club des SPPPI. 300, 400, 1000 ou 2000 personnes et une installation industrielle, c’est qu’il faut réussir à toucher au final. C’est auprès d’eux qu’il est important de développer une culture du risque. Ceux sont les premiers concernés et les premiers à devoir être conscients de la situation à laquelle ils vont éventuellement faire face. Pour cela, nous sommes dans l’obligation, je dirais, morale, d’inventer des espaces de concertation qui n’existent pas dans les règlements aujourd’hui et qui agissent sur nos postures. Dans ma commune la DREAL met sur la table les décisions qu’elle entend prendre en matière d’études de dangers. Au stade de préparation d’un PPRT, on ne vient voir les élus locaux que quand on commence à parler des enjeux du territoire. Mais si on peut éviter de les voir avant, quand on discute avec l’industriel de l’étude de dangers, on ne se porte pas plus mal. Finalement, tant que c’est une histoire de techniciens, on en discute qu’entre techniciens et on n’est pas « pollué » dans la discussion et les arbitrages, par des néophytes dont finalement on a plus envie de dire « mais de quoi ils se mêlent. C’est un problème qui est trop technique. Ils ne peuvent pas comprendre etc. ». I Yves Blein I Jean-Luc Andrieux Les cadres habituels de la concertation aujourd’hui ne concernent pas le grand public. Nous sommes bien obligés de le constater. Les CLIC ne sont pas des outils de discussion avec les riverains d’une installation industrielle car ces derniers ne sont pas là pour poser des questions et ne sont pas structurés. Quand vous faites référence aux personnes qui prennent part à la concertation, ce sont déjà des éléments structurés, sauf que quand on doit gérer la question du voisinage entre 100, 200, Je suis d’accord avec ce qui a été dit. Une fois que l’on s’est concerté, il faut effectivement que chacun rayonne dans son milieu. La concertation est importante et elle prend forcément du temps parce que c’est à ce stade que le rapport de confiance entre les différentes parties peut s’établir. Après chacun fait ce qu’il veut, ou ce qu’il peut. Il va falloir que l’on invente, en particulier au SPPPI, une façon d’aller plus vers les citoyens. La réponse est qu’il doit y avoir une continuité de la concertation un peu institutionnelle, qui quelquefois n’en est pas, mais qui peut en être, elle doit être estimée. Je suis toujours un peu le représentant de quelque chose quand je suis au SPPPI. Quand j’ai fini mon SPPPI, mes réunions de SPPPI ou de CLIC, quel est mon travail ? Si je suis associatif, le travail c’est d’aller dans les associations, d’aller expliquer ce qui s’est passé, de faire une synthèse. Si je suis industriel, c’est de regrouper de temps en temps les industriels de la région pour discuter de ces sujets. Si je suis maire, c’est d’organiser entre maires, avec l’aide de l’association AMARIS, par exemple, une discussion, comme cela a été le cas je crois hier soir, sur ces sujets. I Eric Batailler Quand nous échangeons avec la population, nous nous apercevons d’un besoin grandissant d’approche intégrée du r isque et cela nous est très régulièrement reproché. Il est difficile d’avoir une a pproche saucissonnée du risque, en par lant simplement du risque d’origine industr ielle et en oubliant d’évoquer les risques d’or igine naturelle, les risques liés au transpor t de matières dangereuses ou les autres types de r isques . Nous manquons d’outils aujourd’hui pour évoquer les risques de façon totalement intégrée et pour répondre complètement aux besoins de la population. Enfin, la confrontation entre l’a pproche individuelle du risque, qui est l’a pproche systématique de la population, et notre discour s plus sociétal de l’approche du r isque est très souvent difficile. Nous avons besoin de faire coïncider les deux a pproches et c’est extrêmement difficile. I Une personne de la salle Je suis présidente d’une association régionale de l’agglomération lilloise qui rayonne aussi au niveau de l’Autor ité de Sûreté Nucléaire. Je suis admirative de ce qui se passe en Suisse et du fait que ce sont les citoyens qui emportent la décision. Nous n’avons pas du tout cette culture. Cer tainement, les gens sont for més dans ce sens et ont leur mot à dire sans doute parce qu’ils reçoivent l’infor mation. On a bien entendu qu’en amont des projets, les gens sont infor més . Ce n’est pas du tout le cas chez nous . Dans les enquêtes publiques, quand un citoyen se rend dans sa mairie et qu’il découvre le dossier d’enquête publique, c’est un parcour s du combattant pour pouvoir lire entre les lignes et voir quel le chapitre va concer ner ses remarques. 107 Atelier 4 108 A propos de la loi de transparence, la TSN, je participe à beaucoup de réunions de l’Autorité de sûreté sur les CODIRPA, Comités Directeurs Post-Accident. Je peux dire que, contrairement à ce qui a été dit, ce n’est pas si idyllique et la transparence n’est pas aussi évidente. Nous avons beaucoup de difficultés à avoir certains documents. Monique Sené, qui est dans la pièce à côté, pourrait en témoigner. Les débats publics sur le choix de l’énergie n’ont pas eu lieu, la gestion des déchets est très particulière. Bien sûr Aréva va dire que c’est dominé et que tout est fait pour que le déchet ultime ne concerne pas un grand volume. Il est grave que pour enfouir des déchets de faible activité à vie longue, l’ANDRA (Agence nationale pour les déchets) n’ait pas pu trouver une seule commune qui puisse accepter un volume d’enfouissement de déchets. Pourquoi ? Parce qu’en amont nous n’avons pas été concertés. Cela tombe sur les gens en disant « chez vous, vous avez de l’argile, on pourra vous déposer des déchets ». Ce n’est pas possible parce les gens n’ont pas été informés en amont du projet. Disons qu’en France nous n’avons pas l’approche du risque. Jusqu’à présent, le risque était géré par d’autres et le citoyen était informé en dernier ressort. C’est là tout le travail qu’il y a à faire : développer l’information et faire participer les gens. c’est que nous, nous voyons une différence depuis la loi TSN. Vous parliez de la problématique des déchets. J’ai évoqué tout à l’heure très rapidement le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs. C’est une institution qui est menée conjointement par l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) et la Direction générale de l’énergie et climat du MEEDDM. Un décret va bientôt paraître sur un plan de travail pour les trois ans à venir. Vous trouvez dans ce groupe l’ensemble des représentants de l’administration, des industriels, des associations... Aujourd’hui on considère que 85 % ou 90% des sujets sont au moins évoqués et posés, depuis les anciennes mines d’uranium du sol français jusqu’au stockage des déchets impliquant l’ANDRA. I Jean-Luc Andrieux I Une personne de la salle Je vous réponds en tant qu’industriel. Votre question s’adresse plus largement à l’industriel et aussi à l’autorité qui définit la loi et qui le sur veille. Je peux comprendre votre remarque. Je n’ai pas vraiment d’avis sur ce sujet-là parce que je n’y ai jamais participé. Mais ce que je peux dire en tant qu’industriel, J’ai beaucoup apprécié l’intervention de Monsieur Blein. Je rêve d’avoir un maire comme lui dans ma commune. Cela simplifierait beaucoup les choses. En ce qui concerne la concertation. Monsieur l’universitaire, vous avez beaucoup parlé de concertation et j’ai beaucoup apprécié votre propos. Mais dans On constate une impulsion dans ce sens-là, si ce n’est une participation aux décisions. J’observe que les associations sont consultées, à la fois sur des sujets comme celui que je viens d’évoquer, et sur l’évolution de la réglementation. L’ASN est en train de revoir aujourd’hui toute la réglementation sur les INB (Installations Nucléaires de Base) et les associations sont sollicitées comme nous pour donner leurs avis. C’est quand même un pas, me semble-til, important. Mais c’est peut-être à l’Autorité de Sûreté elle-même de défendre cette position. le cadre des enquêtes publiques, ce que je souhaiterais c’est que le débat public soit rendu obligatoire. Or il ne l’est pas. Il faudrait revoir de fond en comble les démarches qui permettent d’informer la population et faire en sorte que la population puisse participer et s’exprimer. Ce n’est peut-être pas le cas dans toutes les régions mais il y a chez nous, et en particulier dans le bassin minier auquel j’appartiens, beaucoup à faire pour créer une envie de s’exprimer chez les gens. Il faut créer et développer la culture du débat qui n’existe pas. Malheureusement, il y a aussi des communes où les maires sont plutôt réticents, voire qui souhaitent que les associations de défense de l’environnement n’existent pas. Pour les enquêtes publiques, je répète, il faudrait tout mettre en œuvre dans le bulletin municipal pour prévenir les gens de la tenue de l’enquête publique et du débat, que l’on leur explique comment cela fonctionne, qu’ils soient invités à participer et que des prospectus qui soient distribués. Il y a encore dans ce domaine-là beaucoup à faire pour que la concertation puisse vraiment exister. Une dernière question, si vous me le permettez à Aréva, à propos de la centrale nucléaire de Gravelines. On a parlé tout à l’heure de conduites de tuyaux très âgées et qu’il faut revoir tout cela. La centrale nucléaire de Gravelines n’est-elle pas elle-même tellement obsolète qu’elle peut inquiéter, d’autant qu’il s’y produit régulièrement des incidents ? Savezvous quand sera-t-elle remplacée ? I Michel Lesbats Le débat public pour ce qui concerne le SPPPI, nous pouvons l’aborder dans ce qu’on pourrait appeler une commission qui s’intéresserait en fait aux nouveaux projets. Nous pouvons imaginer que l’industriel vienne au SPPPI par exemple avant de préparer son dossier, avant de faire la demande d’autorisation d’exploiter et avant de lancer l’enquête publique, afin de travailler avec les partenaires sur le terrain, très en amont, le plus en amont possible. C’est la première proposition de ce qu’on appelle les SPPPI. Pour le reste, je n’ai pas de souvenir sur la presqu’île Ambès d’une implication véritablement importante du SPPPI dans une enquête publique. Nous pouvons y être, mais nous essayons d’anticiper. On participe peut-être à certains débats mais nous ne l’animons pas. Nous ne sommes pas là pour l’animer. I Yves Blein Nous parlons de processus, ce n’est pas des choses qui sont le fait d’une génération spontanée. J’ai compris que monsieur faisait allusion à la situation de Mazingarbe. Elle a été une des premières villes, sur l’impulsion du docteur Urbaniak, son maire que je salue, à créer l’association AMARIS pour permettre que les communes se concertent, travaillent entre elles, progressent sur cette question du risque industriel. Elle a été une des premières communes qui a fait l’objet d’un PPRT complexe. C’était évidemment facile, en milieu rural, quand on était un petit dépôt d’explosifs dans un coin, de traiter le problème d’un PPRT parce que finalement cela ne gênait personne. Mazingarbe a fait partie des premières communes qui a mis en œuvre un PPRT avec une grande entreprise et des habitations voisines. Le travail y a été fait d’excellente façon, mais en même temps, quand on est les premiers, on essuie les plâtres. C’est vrai que c’est complexe. La loi Bachelot, dans sa relation avec le projet de territoire pour les com- 109 Atelier 4 munes qu’elles sont invitées à retravailler, à re-réfléchir, fait que l’on est souvent dans des situations compliquées, qui exigent beaucoup de travail et de la transparence de toute part. Ce n’est pas toujours simple de l’obtenir de la part des industriels et de la part des services de l’Etat. Souvent l’élu est un peu à l’articulation de l’ensemble de ces sources et doit les mettre en œuvre, faire en sorte qu’elles soient harmonieusement articulées. Soyez sûr, ce n’est pas toujours simple. Mais je sais que ce travail là se fait à Mazingarbe. I Jean-Luc Andrieux En tant que représentant d’Aréva, je ne me sens ni compétent, ni autorisé pour parler de la centrale de Gravelines. Mais j’en profite pour revenir sur le fondamental et sur la loi TSN. Pour ce qui est de l’état de nos installations nucléaires, il y a toute la procédure d’autorisation d’exploitation et de démarrage qui est imposée avec l’enquête publique. Ensuite la loi TSN de 2006 définit précisément dans quelles conditions des réexamens de sûreté doivent être pratiqués. De mémoire, ce doit être l’article 24 du décret de procédures de 2007 qui précise cela. Il impose évidemment le dépôt d’un dossier très précis qui peut être vu et rendu public dans certaines limites, mais il y a possibilité de savoir. Il y a une règle, des délais, des procédures, et la loi définit dans quelle mesure la transparence se fait. 110 site n’était pas Seveso trois ans auparavant mais il l’est devenu entre temps parce que le stockage a augmenté son tonnage (au-delà de 10 tonnes). Le PPRT a été fait pour 14,5 tonnes, il a été accepté. Aujourd’hui, avec le même PPRT, ils veulent augmenter la capacité et la multiplier par cinq. Il est inutile de dire que les conditions de dangers sont multipliées par cinq, notamment au niveau des transports. Sur le site par lui-même, l’industriel se protège avec son PPRT, mais ne protège pas les habitants autour. Il y a 100 à 150 maisons voisines. On leur demande effectivement de se protéger à leurs frais. Il a bien précisé qu’il ne dépenserait pas un centime même pour mettre un film sur les vitres des maison. Est-ce que le PPRT est obligatoire ou est-ce qu’il est autorisé pour 64 tonnes ? I Yves Blein Chaque dossier a ses caractéristiques, mais je peux faire une précision. Le principe que pose la loi s’agissant des installations existantes, c’est qu’en aucun cas une autorisation nouvelle de fonctionnement ne peut être donnée à une installation classée si elle rajoute du risque au risque existant. C’est le principe de base qui est normalement apprécié, de cette façon-là, par les services de l’Etat, quand ils instruisent une autorisation de fonctionnement, d’extension, d’accroissement, d’une installation classée. Elle ne peut pas rajouter du risque au risque qui existe déjà. IJoseph Zucconi, Membre de l’association Pas d’explosifs dans nos villages I Monsieur Van De Vloet Une question qui nous intrigue à propos des PPRT. Un PPRT est accepté, avec des conditions d’acceptation sous réser ve et ces réser ves ne sont pas levées, il a été demandé ensuite une augmentation de stockage. Le Je suis responsable d’un projet en tant qu’officier de liaison à la province de Hainaut, en Belgique. C’est un projet européen puisque c’est une coopération entre les services de pompiers, de secours, de police du côté belge et du côté français. Ce projet fait suite à la catastrophe de Ghislenghien et vise entre autre, pour l’instant, à faire l’état des lieux des risques transfrontaliers français et belges, et d’autre part, à trouver les moyens d’y répondre. J’aimerais savoir si, dans l’expérience de la Suisse ou dans l’expérience de l’Alsace qui sont concernées par le transfrontalier, il y a déjà eu ce type d’initiatives qui toucheraient la population de part et d’autre de la frontière. I André Hermann Il existe des conventions pour les industries susceptibles de mettre en danger les populations de l’autre côté de la frontière, des conventions de consultation. On consulte le pays voisin, on lui soumet un dossier d’une installation et il prend position sur ce dossier. Il y a eu plusieurs exemples entre Bâle et l’Alsace, respectivement avec l’Allemagne, le Bad-Wuttemberg. Ce n’est que de la consultation qui n’a pas de force d’obligation, mais Je n’ai pas connaissance d’exemples où il n’y a pas eu consensus en fin de partie au-delà des frontières. Je tiens à relever le fait que nous n’avons pas, en tant que pays étranger, le moyen de faire pression quelle qu’elle soit, sur une décision de l’autre pays. I Jean Wencker Lorsqu’une installation a un impact sur l’une des rives du Rhin, la consultation du public sur l’autre rive, je ne sais pas si elle est obligatoire, mais elle se fait. Ce que j’ai mentionné tout à l’heure sur Iffezheim, si moi j’étais averti de la mauvaise façon dont les choses ont été conduites, c’est parce que les allemands ont averti le préfet d’Alsace qui a organisé une consultation du public dans deux ou trois communes en France. J’ai une anecdote. Il y a en face de Strasbourg une aciérie. Un matin, à 10h00, j’ai vu arriver la Mercedes du président de l’aciérie parce qu’un associatif français avait émis une réserve dans un dossier d’enquête relatif à l’extension de l’usine. Cette réser ve avait bloqué l’instruction, c’est la règle en Allemagne. Mais il est évident que si l’on bloque l’instruction d’un projet et qu’il s’avère que les réser ves ne sont pas motivées, il peut y avoir des pénalités financières énormes. Le PDG de l’entreprise allemande était venu me prévenir qu’il est extrêmement coûteux pour l’entreprise d’être arrêtée pendant un mois ou deux mois, mais il m’a aussi prié de prévenir l’associatif qui avait écrit cette réserve dans le registre que si elles n’étaient pas juridiquement défendables, il risquait d’y perdre sa baraque. Il est évident que j’ai fait mon devoir de président d’Alsace Nature. Cet associatif est allé deux jours après modifier son avis. Cela pour vous dire simplement qu’il y a de la concertation des deux côtés du Rhin, dans un sens positif mais parfois aussi coercitif. I André Hermann Si vous me le permettez en tant qu’étranger qui observe de l’extérieur vos institutions et la manière dont elles fonctionnent, j’aimerais faire un constat. Les inter ventions au cours de cet atelier ont montré un point commun: il faut impérativement faire de la concertation avant que les projets ne soient trop avancés, avant d’entamer les processus de consultation très formalisés et structurés, tant que les décisions ne sont pas encore prises et qu’il existe une réelle marge de manœuvre. 111 Atelier 5 Evaluation des Risques Sanitaires br uit de fond • territoire nuisance • modélisation émission atmosphérique • cumul d e p o l l ua n t s • r i s q u e s a n i t a i r e a ppro c h e glob a l e I Jean-Michel Lobr y, A n i ma t e u r 112 Tro i s q u e s t i o n s s o n t t ra n s ve r s es à chacune d e s i n t e r ve n t i o n s d e n o s i nv ités . La pre m i è re , c ’ e s t u n fa i t n o u ve a u e t il est import a n t d e vo i r c e q u e c e l a d o n ne : comment l a p r i s e e n c o m p t e g l o b a l e d es r isques sur u n t e r r i t o i re , d o n c l e c u mu l d e s effets sur un z o n e , p e u t - e l l e a p p o r t e r d e nouveaux ré s u l t a t s ? L a s o m m e d e c h a c u n des r isques e s t c e r t a i n e m e n t d i ff é re n t e des r isques c u mul é s . L e d e u x i è m e p o i n t s e ra d ’ aller voir sur l e t er ra i n . I l e x i s t e d e s e x pér iences et a u j o u rd ’ h u i , o n d é n o m b re une dizaine d ’ é t u d e s r é a l i s é e s o u e n c o u r s de prépara t i o n . N o u s a vo n s d é j à u n p re m ier feed-back s u r c e q u ’ i l s e p a s s e , s u r l e j eu d’acteur s , l ’ o rga n i s a t i o n , l e p i l o t a g e e t les résultats . O n ve r ra a u t ra ve r s d e d e u x exemples , en H a u t e - N o r ma n d i e e t à D u n kerque, com m e n t l e s é t u d e s s e p a s s e n t . Nous avons la c h a n c e d ’ a c c u e i l l i r u n i nv i t é étranger qui p a r t a g e ra s o n e x p é r i e n c e e n la matière. Pa r a i l l e u r s , i l n ’ y a p a s d e c a dre réglement a i re a c t u e l l e m e n t c o n c e r n a nt ces études e t o n s e c h e rc h e u n p e u s u r l es méthodes . C ’ e s t c e l a q u e l ’ o n va e s s a ye r de déblayer. Nous commençons avec Patr icia Blanc qui est chef du Ser vice de la prévention de nuisances et de la qualité de l’environne ment au MEEDDM. Avec vous , nous allons regarder ce qui s’est passé sur si x études de zone. Une analyse a été faite par l’INERIS et vous allez par tager cela. J’ai deux ou trois questions liminaires . Pourquoi se préoccupe-t-on de ce sujet aujourd’hui ? R etour d’expér ience des é t u d e s I Pa t r i c i a B l a n c , C h e f d u S e r v i c e d e l a prévention de nuisances et de la qualité de l’environnement au MEEDDM Le questionnement sur l’impact sanitaire des installations industr ielles ne date pas d’aujourd’hui puisque, depuis des années , les industr iels doivent joindre aux études d’impact, des évaluations de r isques sani taires . Mais ces évaluations de r isq ues sani taires , dans la très grande major ité des cas , concer nent une installation et l’impact sur son environnement, et non pas une zone. Un cer tain nombre de r iverains dans un cer tain nombre de zones (on pense à Fossur-Mer, Dunkerque, Car ling etc. On y re viendra) ont émis des questions légitimes sur l’impact sur leur santé du cumul des pollutions qu’ils subissent, c’est-à-dire pas d’une seule installation industr ie lle, mais de toutes les installations industr ielles d’une zone ; et pas seulement de l’indus tr ie mais aussi des transpor ts . Les transpor ts sur une zone sont à l’or igine d’une par t impor tante de la pollution, notamment des émissions dans l’air. Les activités agr icoles et les activités diffuses résiden tielles ter tiaires peuvent être à l’or igine de pollutions également. Ce questionnement initial des r iverains relayé par les associa tions de protection de l’environnement sur les questions de cumul d’impact pose des questions difficiles sur un plan scientifique que tout le monde peut comprendre. Comment peut-on additionner l’impact du br uit d’une installation avec l’impact de la pol lution chimique dans l’air de cette instal lation ? Les premières études de zone per mettent déjà de constater un cer tain nombre de choses et que dans cer tains cas , on peut effectivement, pour un polluant donné, être en dessous de toutes les valeur s de référence quand on regarde installation par installation et dépasser les valeur s de référence quand on regarde l’ensemble. C’est du bon sens . J’enfonce des por tes ouver tes . Ce questionnement a été relayé au sein d’un plan gouver nemental qui n’implique pas que le gouver nement mais l’ensemble des par ties prenantes . Il s’agit du Plan na tional santé environnement, éla boré en 2009 à l’issue d’une concer tation qui a associé les associations , les industr iels , les syndicats de salar iés , les collectivités locales et l’Etat. Ce plan a une pr ior ité or iginale qui est l’identification et la gestion des points noir s environnementaux. L’idée est qu’il y a, sur le terr itoire, des zones où on cumule des pollutions , des r isques . De plus , il y a parfois des problèmes sociaux dans ces zones , c’est-à-dire que les popu- lations n’ont pas t o u j o u r s a c c è s à l ’ é d ucation à l’environn e m e n t , n i c o n n a i s s a n c e des r isques auxque l s i l s s o n t e x p o s é s . L a difficulté de ce pla n , q u i e s t n o u ve a u p a r ra ppor t au plan pr é c é d e n t , c ’ e s t l a p r i s e en compte de ce s i n é ga l i t é s e nv i ro n n e mentales qui se dou b l e n t s o u ve n t d ’ i n é galités sociales . Les six études de z o n e s q u i o n t fa i t l ’ o b jet d’un retour d’e x p é r i e n c e s a u n i ve a u national, concer ne n t C a l a i s , D u n ke rq u e , Car ling, Fos-sur-Mer, L a c , L a v é ra e t Po r t - J é rôme. Pour l’enseig n e m e n t q u e l ’ o n p e u t en tirer, je m’a ppuie s u r u n e é t u d e r é a l i s é e par l’INERIS. Jacqu e s B u re a u q u i e s t l ’ u n des auteur s de l’étu d e , a a c c e p t é d e ve n i r aujourd’hui. Il pour ra r é p o n d re a u x q u e s tions ou compléter m o n p ro p o s . Du point de vue du M i n i s t è re , n o u s c o n s t a tons que les études d e z o n e a p p o r t e n t d e s éléments intéressan t s q u i s o n t c o m p l é m e n taires des études in d i v i d u e l l e s . I l fa u t d o n c continuer à en réal i s e r. M a i s i l y a u n e c e rtaine pr udence à a vo i r d a n s l a m é t h o d o l o gie et en par ticulie r, i l fa u t fa i re b e a u c o u p plus de vraies me s u re s d a n s l ’ e nv i ro n n e ment et un peu mo i n s d e m o d é l i s a t i o n . C e que je veux dire c ’ e s t q u e d a n s u n c e rtain nombre des é t u d e s q u i o n t d é j à é t é réalisées , nous avo n s t ra va i l l é s u r l a b a s e de données parfois u n p e u a n c i e n n e s s u r l’état des milieux. O n a m o d é l i s é , b e a u coup calculé, mais o n a fa i t a s s e z p e u d e nouvelles mesures d a n s l ’ a i r, d a n s l e s s o l s ou dans les végéta u x . Pa r fo i s , l e s r é s u l t a t s sont un peu entach é s d ’ i n c e r t i t u d e s u r c e point, alor s qu’en fa i t d e s m e s u re s p e r m e t tent de vér ifier, de c o n fi r m e r o u d ’ i n fi r m e r les résultats des mo d è l e s . 113 Atelier 5 I l n e fa u t p a s h é s i t e r à re fa i re des mesures q u a n d l e s m e s u re s s o n t u n p eu anciennes o u fa i re d e n o u ve l l e s m e s u re s sur des subs t a n c e s p o u r l e s q u e l l e s o n n ’ a pas de rés u l t a t s , p a r e x e m p l e , n o t a m m ent dans l’air. C e ra p p o r t s e ra p ro c h a i n e m e nt sur Inter net e t s e ra b e a u c o u p p l u s p r é c i s que ce que j e p e u x d i re a u j o u rd ’ h u i . I l y a un cer tain n o m b re d e z o n e s s u r l e s q u e l l es les r isques i n d u s t r i e l s p r i s i n d i v i d u e l l e ment n’excé d a i e n t p a s l e s va l e u r s d e r é f érence sani t a i re a u x q u e l l e s o n l e s c o m p are. Mais si on a d d i t i o n n e l e r i s q u e i n d u s t r i e l et celui qui e s t l i é a u t ra n s p o r t p a r e x e m ple, quand on p a r l e d e l ’ a i r, q u e c e s o i t l e t ranspor t mar it i m e o u l e t ra n s p o r t ro u t i e r, o n peut arr iver à d e s z o n e s d a n s l e s q u e l l e s le r isque de v i e n t p r é o c c u p a n t a u re ga rd des valeur s d e r é f é re n c e d o n t o n d i s p o s e . I Jean-Michel Lobr y C ’ e s t l e c a s p a r e x e m p l e d e Calais où le t ra fi c t ra n s ma n c h e i m p a c t e énor mément l e s r é s u l t a t s . O n n e l ’ a va i t p as forcément v u d a n s l e s é t u d e s i n d i v i d u e l les . J’en pro fi t e a u s s i p o u r d i re q u e s u r ces six zones , vo u s a ve z q u a n d m ê m e u n e h étérogénéité a s s e z i m p o r t a n t e d a n s l e s r é s u l t a t s . L’ i n t e r- c o m p a r a i s o n n ’ e s t p a s f o r c é m e n t évidente. Une question de mesures , une question de méthodes , une question d’acteur s et une question de pilotage. Avez-vous aussi des éléments sur le financement ? C e q u i e s t i n t é re s s a n t , c ’ e s t que les subs t a n c e s q u i t i re n t l e r i s q u e , c omme on dit, n e s o n t p a s fo rc é m e n t l e s mêmes d’une z o n e à l ’ a u t re . I l fa u t re ga rd er beaucoup d e s u b s t a n c e s . S i o n s e fo c alise que sur q u e l q u e s t ra c e u r s , o n a u ra des résultats s a n s d o u t e t ro p p a r t i e l s e t i n suffisants . Ce q u i es t é ga l e m e n t i n t é re s s a nt mais com - por te sa par t. C’est un tour de ta ble qui est var ia ble d’une zone à l’autre selon la configuration de la zone. Les données dont je dispose sont de l’ordre de 100 à 150 000 euros . Mais c’est une moyenne et c’est assez par tiel. Ce n’est pas forcément représentatif. I Jean-Michel Lobr y Le der nier point, c’est qu’il faut associer les populations , les élus bien sûr de la zone, les industr iels évidemment, l’ensemble des par ties prenantes autour du pilotage de cette étude. C’est un travail qui ne peut pas se réaliser en chambre, mais qui doit associer l’ensemble des par ties p renantes et dans lequel la communication des résul tats vis-à-vis du public est évidemment un élément très impor tant. I Jean-Michel Lobr y I Pa tr icia Blanc 114 pliqué, c’est que ces zones ou ces instal lations industr ielles évoluent énor mément. Ce qui était vrai il y a cinq ans ne l’est plus forcément maintenant parce qu’on ne travaille plus les mêmes substances dans les atelier s , les process ont changé. Il faut réaliser ces études dans un la ps de temps suffisamment cour t pour qu’elles aient un sens au regard des évolutions industr ielles . I Pa tr icia Blanc C’est un des points les plus compliqués puisque, quand on a affaire à une instal lation industr ielle, on a pplique le pr incipe « pollueur-payeur » classique. L’exploitant finance les études et les mesures de pré vention du r isque. Quand on a affaire à plusieur s exploitants industr iels et en plus à sources de pollutions diffuses comme les transpor ts et l’ha bitat, le schéma de fi nancement est beaucoup plus compliqué. Mais dans la plupar t des cas , nous avons réussi à faire un tour de ta ble qui associe les différentes par ties prenantes . L’Etat a p - On lisait aussi dans votre ra ppor t qu’il y en a qui sont tombés à 60 000 euros à peu près parce que cela va se démultiplier. En complément, Dominique Gomber t, les difficultés que l’on rencontre aujourd’hui, quelles sont-elles ? I Dominique Gomber t, Comité national de sécur ité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail En complément de ce qu’a évoqué Patr i cia Blanc, je crois que trois grands enjeux qui mér itent d’être mis en per spective. Il y a un grand nombre d’enjeux techniques autour de l’évaluation des r isques sani taires , autour de ces études de zone. J’en ai identifié huit pr incipaux, sur lesquels je vais passer très ra pidement. Il y a d’a bord les enjeux des terr itoires . Comment définiton une zone ? Il y a tout un problème de définition qui se pose. Quelles installations prend-on en compte ? Jusqu’où on va ? Comment définit-on un terr itoire homo gène en matière de pollution ? Il y a des enjeux assez impor tants dans cette défini tion de la zone. Ensuite, il y a des enjeux impor tants sur les paramètres qu’on va s’attacher à suivre en matière de caractér isation des r isques sanitaires . Quels polluants ? Quels effets ? Je crois que l’on a de gros enjeux concep - tuels , toxicologique s e t m é t h o d o l o g i q u e s en matière de mei l l e u re p r i s e e n c o m p t e de cumul des effe t s d e s d i ff é re n t s p o lluants . C’est de la t ox i c o l o g i e t o u t à fa i t subtile, qui mér ite d ’ ê t re m i s e e n œ u v re pour mieux prendre e n c o m p t e j u s t e m e n t ces synergies entre l e s d i ff é re n t s p o l l u a n t s . Ensuite il y a aussi u n c e r t a i n n o m b re d e difficultés méthodo l o g i q u e s s u r l e s i n c e rtitudes qui sont as s o c i é e s e n g é n é ra l a u x paramètres , aux po l l u a n t s s u r l e s q u e l s o n travaille, à leur gra n d e va r i a b i l i t é a u c o u r s du temps , au cour s d e l ’ a c t i v i t é d e s d i fférents process au x q u e l s o n s ’ i n t é re s s e . Ce sont des param è t re s e x t r ê m e m e n t i mpor tants qui vont p e r m e t t re d e vo i r d a n s quelle « fourchette » d e r i s q u e o n s e s i t u e . Le quatr ième enje u t e c h n i q u e i m p o r t a n t , c’est bien évidemm e n t l a n a t u re d e s s c é nar ii. On doit s’inté re s s e r à d e s p o l l u t i o n s de caractère aigu, ma i s a u s s i a u x e x p o s itions de nature chro n i q u e . O n a v u t o u t à l’heure, au cour s d e l a p re m i è re s é a n c e plénière, qu’il y a a u s s i d e s e n j e u x q u ’ i l faut anticiper, qui n e s o n t p a s t o u j o u r s p r i s en compte dans les s c é n a r i o s q u i s o n t l ’ a n ticipation des cons é q u e n c e s d ’ a c c i d e n t s , et avec la pr ise en c o m p t e d e s e ffe t s s a n i taires qui peuvent ê t re a s s o c i é s à c e s s c é nar ios de nature ac c i d e n t e l l e . Ensuite, il y a un p o i n t q u i a é t é é vo q u é par Patr icia Blanc. Q u i d i t é t u d e d e z o n e , dit aussi vision de c u mu l d e n u i s a n c e s e t de polluants . On s’e s t s o u ve n t i n t é re s s é a u br uit et à la pollut i o n a t m o s p h é r i q u e . O n peut s’intéresser au s s i à l a p ro b l é ma t i q u e d’exposition aux champs électromagnét i q u e s . Au j o u r d ’ h u i , l e s m é t h o d o l o g i e s s o n t a s s e z p e u ro b u s t e s s u r l a p r i s e e n compte de l’ensemble de ces problémat i q u e s sanitaires . C ’ e s t c e q u ’ o n a p p e l l e 115 Atelier 5 116 d a n s c e r t a i n s c a s , l e « b u rd e n of disease », a ve c d e s a p p ro c h e s u n p e u nor mées au niveau inter national mais avec peu d’a pplication au niveau local. C’est un enjeu qui ressor t souvent dans le cadre des discussions publiques. Patr icia Blanc a bien sûr par lé des enjeux d e c a r t o g r a p h i e q u i r e n vo i e n t s o u ve n t à l’outil de modélisation. Elle l’a souligné et c ’ e s t t o u t à fa i t e s s e n t i e l , i l y a u n g ro s e ffo r t d e r é c o n c i l i a t i o n d e s a pproches par modélisation et de la métrologie sur le terrain réel. Ce sont réellement deux outils qui doivent s’adosser l’un à l’autre pour a boutir à une descr iption la plus précise possible des enjeux sanitaires sur une problématique de zone. S e p t i è m e p o i n t , i l y a e ffe c t i ve ment la quest i o n d e l a p r i s e e n c o m p t e de ce qu’on a p p e l l e d u b r u i t d e fo n d , c ’ est-à-dire des i m p o r t s d e s p o l l u a n t s o u d e nuisances qui p e u ve n t c o n c e r n e r l a z o n e d’étude. Ce s o n t d e s p ro b l é ma t i q u e s q u i renvoient à d e s s u j e t s t e c h n i q u e s a s s e z difficiles . Le p o i n t l e p l u s i m p o r t a n t e t q u i cr istallise un c e r t ai n n o m b re d e s d é b a t s l or squ’on rend c o m p t e d e c e s é va l u a t i o n s a u public, c’est l a q u e s t i o n « d e s p a ra m è t re s de caractér i s a t i o n d u r i s q u e » , c e q u e l ’ on a ppelle le q u o t i e n t d e d a n g e r o u l ’ e x cès de r isque i n d i v i d u e l . O n a s o u ve n t t e n dance à dire q u a n d o n e s t e n d e s s u s c e n ’est pas bon, q u a n d o n e s t e n d e ç à c ’ e s t bon. C’est un p e u p l u s c o m p l i q u é q u e c e l a et il y a toute u n e ma rg e d e d i s c u s s i o n e t d ’affinage des s c é n a r i o s d ’ é va l u a t i o n d e s r i s ques qui doit ê t re c o n d u i t e d a n s c e t t e o ptique là. Aud e l à d e c e s e n j e u x t e c h n i q ues , il y a un a u t re p o i n t t o u t à fa i t i m p o r tant, ce sont l e s c o n d i t i o n s d e l a m i s e e n œuvre. Ces g ra n d e s a p p ro c h e s s a n i t a i re s , en par ticu- lier sur des terr itoires complexes , doivent se mettre en œuvre dans un cadre qui implique l’ensemble des par ties prenantes , dans une transparence la plus complète possible. Aujourd’hui même se discute, dans le cadre du Haut conseil de la Santé Publique, un ra ppor t sur cette problématique de mise en œuvre des études de zone. Ce ra ppor t donnera un cer tain nombre de lignes di rectr ices sur les conditions de leur réalisa tion et sur la façon dont on peut les utiliser, les inter préter. I Jean-Michel Lobr y Notre discussion arr ive à point nommé puisqu’a pr ior i, on va commencer à enca drer cette affaire et donner de la méthodologie. Nous allons écouter deux témoignages sur deux zones qui ont réalisé leur évaluation, à savoir Por t-Jérôme, zone en contrebas du pont de Nor mandie, puis on ira sur notre littoral, avec Philippe Fanucci. Pourquoi vous avez lancé cette étude ? Fin alement, puisqu’on en est à l’initiative terr itor iale, cela doit par tir d’un besoin, de la révéla tion d’un besoin. D’où est venu ce besoin ? I Sébastien Mounier, Ingénieur à la DREAL Haute-Nor mandie, Membre du Haut Conseil de Santé Publique Por t-Jérôme est une zone industr ielle portuaire qui se situe entre le Havre et Rouen, plus proche du Havre, et qui présente l’avantage d’être plus petite que celle du Havre, Elle est sur une plaine et elle est as sez compact, restreinte en ter mes de géo métr ie. Comment effectivement l’idée de faire une évaluation des r isques sanitaires sur la zone de Por t- Jérôme est-elle venue ? Il peut y avoir plusieur s faits générateur s . Cela peut être soit un appel sanitaire, soit u n a p p e l e nv i ro n n e m e n t a l p a rc e q u e l ’ o n c o n s t a t e q u e l e s m i l i e u x s o n t d é g ra d é s , s o i t u n a p p e l r é g l e m e n t a i r e . Po u r Po r t J é r ô m e , c ’ e s t u n m é l a n g e à l a fo i s d ’ u n a p p e l e nv i ro n n e m e n t a l e t d ’ u n a p p e l r é glementaire. En 2001 a été déposé au CODERST un dossier de demande d’autorisation d’exploiter de l’usine d’incinération d’ordures ménagères de la zone, en remplacement notamment de celle de Lillebonne. Comme il arrivait assez fréquemment à cette époque (ce n’est pas si ancien, mais les dossiers étaient faits comme cela), les risques exposés dans l’impact sanitaire avoisinaient les niveaux communément admis comme acceptables. S’est posée la question de dire que si l’on autorisait une nouvelle exploitation avec déjà des niveaux de risques proches de ceux du niveau acceptable, qu’en était-il sur le cumul des expositions liées à l’ensemble des rejets de la zone ? C’est là le point d’appel véritable de l’initialisation de la zone. Après est venue la discussion sur les plans régionaux de la qualité de l’air, ont suivi les plans de protection de l’atmosphère et le premier Plan national santé-environne ment, Tout cela a entraîné une dynamique et Por t-Jérôme est tombé à point nommé pour réaliser cette expér ience d’évalua tion des r isques sanitaires de zone. L’évaluation est ter minée et les résultats ont été rendus en comité de pilotage, il y a trois semaines environ. Puisque l’étude a été l’une des premières , le pilotage a été très compliqué à mettre en place. Il fallait i d e n t i fi e r l e s a c t e u r s , l e pilote. Et, vous l’ave z é vo q u é t o u t à l ’ h e u re , il y a la question du fi n a n c e m e n t . L e c o m i t é de pilotage a été m i s e n p l a c e s o u s l a p r ésidence du Sous-pré fe t d u H a v re e t d u p r é sident de la Commu n a u t é d e c o m mu n e s Caux vallée de Sei n e , l a C o m mu n a u t é d e communes de Por t - J é r ô m e . L e p i l o t a g e en lui-même a été a s s u r é p a r l ’ e x - D R A S S , aujourd’hui ARS , le s A g e n c e R é g i o n a l e d e Santé, et l’ex-DRIRE a u j o u rd ’ h u i l a D R E A L . Ce comité de pilota g e a d é c i d é d e m e t t re en place un comit é t e c h n i q u e , q u i l u i d e vait faire les choix e t p ro p o s e r l e s o p t i o n s au comité de pilota g e ma i s d ’ u n p o i n t d e vue technique. I Jean-Michel Lobr y Cela ne doit pas ê t re s i m p l e , j e s u p p o s e que leur s attentes d o i ve n t ê t re d i ff é re n t e s , entre l’industr iel, le s é l u s , l ’ a s s o c i a t i o n s d e r iverains . Comment ma n a g e - t - o n t o u t c e l a , sans r isquer de nive l e r p a r l e b a s ? I Sébastien Mounier Le gros avantage du comité de pilotage, c’est qu’en variant à la fois et les sensibilités et les compétences , on arr ive à faire émerger des idées novatr ices . Les discussions et débats qui ont suivi à l’intér ieur de ces comités de pilotage, ont per mis de faire avancer l’étude et de faire évoluer l’étude au fur et à mesure. La première idée que l’on s’en était faite, ce n’est pas l’idée avec laquelle on ressort aujourd’hui. I Jean-Michel Lobr y Combien l’étude a-t-elle coûté ? Est-on dans la fourchette annoncée par Patr icia Blanc ? 117 Atelier 5 I Sébastien Mounier L’ é t u d e a c o m p o r t é q u a t r e p h a s e s d i s t i n c t e s . O n a r r i ve p l u t ô t s u r l a fo u rc h e t t e h a u t e , a u x a l e n t o u r s d e 1 5 0 - 2 0 0 0 0 0 e u ro s . Mais il a été décidé en cours d’étude de m e t t r e u n e p a r t i m p o r t a n t e s u r l a m é t ro l o g i e e t s u r l a m e s u r e d a n s l e s c o m p a rtiments, notamment les compartiments a l i m e n t a i r e s , p o u r e s s a ye r d e c o r ro b o r e r les résultats de la modélisation et de ce à q u o i é t a i e n t e x p o s é s l e s r i ve ra i n s . R i e n que cette partie-là, c’est entre 50 et 60 0 0 0 e u ro s . C ’ e s t c e q u i e x p l i q u e c e t t e i n fl a t i o n p a r ra p p o r t a u c o û t d e l ’ é t u d e . 118 L e s p l u s g ro s s e s d i ffi c u l t é s s e s o n t p r é s e n tées dans la mise en place même du comité de pilotage et dans la mise en place d u fi n a n c e m e n t . Vo u s l ’ a v i e z é vo q u é , c’était loin d’être simple. D’une part, on ne s’inscrit pas dans un cadre réglementaire où il est entendu que le pollueur est p a ye u r ; e n s u i t e , o n e s t d a n s u n c a d r e d e mu l t i - p o l l u e u r s , a ve c d e s mu l t i - a c t i v i t é s p e u t - ê t r e p a s fo rc é m e n t i n d u s t r i e l l e s d u r e s t e . M a i s p o u r c e c a s , l e c h o i x a é t é fa i t d ’ é t u d i e r e x c l u s i ve m e n t l e s é m i s s i o n s a t mosphériques des industriels. Les attentes s o n t d i ff é r e n t e s , s e l o n q u e l ’ o n e s t i n d u s triel, aménageur du territoire, élu d’une c o m mu n e q u i a b r i t e c e s i n d u s t r i e s , r e p r é s e n t a n t d e l ’ E t a t , c h a rg é d ’ u n e m i s s i o n d e p o l i c e o u d e r é g l e m e n t a t i o n p a r ra p p o r t à la pollution. L a p r e m i è r e d i ffi c u l t é d e l a m i s e e n p l a c e d u p i l o t a g e p a s s é e , i l a fa l l u p a s s e r e n s u i t e l e s c o m ma n d e s p e r m e t t a n t d e r é a l i s e r l ’ é t u d e e t d e m e t t r e e n p l a c e l e fi n a n c e m e n t . E n g ro s , c e l a a d e ma n d é u n e a n n é e . E n s u i t e , u n e fo i s q u e l a t e c h n i q u e s ’ e s t d é fi n i e , c ’ e s t p r e s q u e s i m p l e s i c e n ’ e s t q u e , p l u s o n a va n c e d a n s c e g e n r e d’études et plus on est amené à se poser d e s q u e s t i o n s , à p r e n d r e p o s i t i o n . L a p a rt i e l a p l u s s i m p l e fi n a l e m e n t , m ê m e s i e l l e a u s s i a d e ma n d é u n e a n n é e d e t ra va i l , a été le recensement de toutes les émissions d e s i n d u s t r i e l s . L a p l a t e - fo r m e i n d u s t r i e l l e représente 15 exploitants, essentiellement p é t ro c h i m i q u e s m ê m e s ’ i l y a d ’ a u t r e s a c t i v i t é s c o m m e l e t ra i t e m e n t d e s u r fa c e c h i m i q u e e t i n c i n é ra t i o n d e d é c h e t s i n dustriels ou ménagers. Plus de 150 polluants ont été recensés initialement. Nous e n a vo n s r e t e n u 3 2 c o m m e é t a n t d e s p o l l u a n t s p o u va n t p o r t e r u n e n j e u s a n i t a i r e , p o u r e n i d e n t i fi e r s i x a u fi n a l d e l ’ é t u d e , q u i e u x s o n t v ra i m e n t p o r t e u r s d ’ i n t é r ê t s a n i t a i r e e t s u r l e s q u e l s i l c o nv i e n t e ffe c t i ve m e n t d e p o r t e r n o t r e a t t e n t i o n . U n e fo i s q u e l ’ o n a fa i t c e t t e é t u d e , a ve c t o u t e s l e s d i ffi c u l t é s e ffe c t i ve m e n t t e c h n i q u e s c o m m e l a d é fi n i t i o n d e l a z o n e (Qu’est-ce qu’une zone ? Comment la d é fi n i t - o n ? O ù a r r ê t e - t - o n d e fa i r e c e s é va l u a t i o n s ? C o m m e n t fa i t - o n l e s p r é l è ve m e n t s ? Q u e l l e s s o n t l e u r s r e p r é s e n tativités ? A quel moment de l’année ? Q u a n d p r é l è ve - o n d e s l é g u m e s a ve c l e s c o n t ra i n t e s s a i s o n n i è r e s ? ) , u n e fo i s q u e tout cela a été mis, si j’ose dire, dans la m o u l i n e t t e d e l ’ é va l u a t i o n q u a n t i t a t i ve des risques sanitaires, on a abouti à un rés u l t a t . I l c o nv i e n t d e c o m mu n i q u e r c e r é s u l t a t p a rc e q u ’ o n e s t a l l é c h e z l e s g e n s p o u r p r é l eve r i c i u n b o u t d e s o l , l à u n œ u f. C e n ’ e s t p a s s i m p l e ma i s c e l a a é t é a s sez bien accepté. Les bureaux d’études c h a rg é s d e c e s a ffa i r e s o n t a u s s i l ’ h a b i t u d e d ’ a l l e r vo i r d e s p e r s o n n e s p o u r fa i r e l e s p r é l è ve m e n t s . M a i s l a c o m mu n i c a t i o n et l’explication, l’expression des résultats, p a r c o n t r e , c ’ e s t t o u t u n a u t r e m é t i e r. I J e a n - M i c h e l L o b r y, Il n’y a pas de boîte à outils qui vous aide ? I Sébastien Mounier N o n . I l y a e u d i ff é r e n t e s fa ç o n s d e fa i r e . Il y a le retour d’expérience dont on s’inspire plus ou moins , mais les sensibilités sur une zone, par exemple sur celle de Dunk e r q u e o u s u r c e l l e d e Po r t - J é r ô m e n e s o n t p a s n é c e s s a i r e m e n t l e s m ê m e s . L’ i n dustrie présente n’est pas la même. Ce ne sont pas non plus les mêmes enjeux. Po u r t o u t d i r e , n o u s s o m m e s e n c o r e à l a phase d’éla boration de la stratégie de communication. Nous nous demandons : « que dire ? Et comment le dire ? Estc e q u ’ o n p r é s e n t e e n b r u t l e s c h i ff r e s d’indice du niveau de r isque ? ». Au niveau du comité de pilotage, les membres s o n t p a r t a g é s . S i o n p r é s e n t e l e s c h i ff r e s , c o m m e n t l e s g e n s vo n t - i l s l e s p e r c e vo i r ? Faut-il les associer à une échelle de référence, par ra ppor t à des r isques encour us de la vie courante ? Comment expliquer l e s n i v e a u x d ’ i n c e r t i t u d e ? S u r u n c h i ff r e « br ut », il y a un niveau du r isque qui est aujourd’hui connu, admis et acceptable ou pas, selon que l’on est au dessus ou en dessous d’un seuil, on passe ou on ne passe pas. Or la vérité est beaucoup plus complexe. Quand on connaît les incertitudes liées aux calculs, liées à l’expression même des valeur s qui ser vent de référence au niveau psychologique, on e s t e n d r o i t e ff e c t i v e m e n t d e s ’ i n t e r r o g e r s u r l a v a l i d i t é d e s r é s u l t a t s e t l a fa çon dont on l’exprime. I Jean-Michel Lobr y C ’ e s t u n p o i n t t r è s i m p o r t a n t . Vo u s , P h i l i p p e Fa n u c c i , s u r l e l i t t o ra l F l a n d r e , a ve z vo u s r e n c o n t r é l e m ê m e p ro b l è m e ? Y a ve z - vo u s a p p o r t é d e s s o l u t i o n s ? I P h i l i p p e Fa n u c c i , R e s p o n s a b l e H Q S E , S o c i é t é d e l a R a ffi n e r i e d e D u n ke r q u e Naturellement, nous a vo n s rencontré l e m ê m e t y p e d e p ro b l è m e . Po u r n o u s , l ’ é t u d e a é t é r é a l i s é e e n 2 0 0 4 . N o u s a vo n s été, je pense, les pionniers vis-à-vis de ce g e n r e d ’ é t u d e à a u s s i g ra n d e é c h e l l e . D u point de vue du territoire, cela représent a i t 7 0 0 k i l o m è t r e s c a r r é s a ve c u n e p o p u l a t i o n é q u i va l e n t e à 2 1 0 0 0 0 h a b i t a n t s , t o u t e l a z o n e D u n ke r q u e e t s a c o u ro n n e . L’ é t u d e c o n c e r n a i t 2 6 s i t e s i n d u s t r i e l s , 2 9 3 points de rejet. C’est une étude à très g ra n d e é c h e l l e q u i r e g ro u p a i t d e s i n d u s t r i e s a u s s i d i ff é r e n t e s q u e l a m é t a l l u rg i e , l e s i n d u s t r i e s c h i m i q u e s o u p é t ro l i è r e s . D’un point de vue pilotage, dans le dunke r q u o i s , i l y a u n e s t r u c t u r e t r è s fo r t e , l e S P P P I , q u i a é t é l e m o t e u r. D a n s c e g e n r e d’étude, les SPPPPI sont le moteur car ils o n t l ’ a va n t a g e d e d é j à r e g ro u p e r l e s p a rties prenantes. I Jean-Michel Lobr y Insistons sur cela : partir du SPPPI amène à l ’ a p p ro c h e g l o b a l e q u i e s t u n e ga ra n t i e d ’ e ffi c a c i t é . C ’ e s t u n b o n m o d e d ’ e m p l o i . I P h i l i p p e Fa n u c c i C ’ e s t l ’ a va n t a g e . O n n e s ’ e s t p a s r é e l l e ment posé la question du comité de pilotage. On utilisé au mieux le SPPPI, puisque c ’ e s t u n é l é m e n t f é d é ra t e u r e t u n ga g e d e t ra n s p a r e n c e . 119 Atelier 5 I Jean-Michel Lobr y J e vo u s p o s a i s l a q u e s t i o n d e la communi c a t i o n e t d e l a d i ffi c u l t é d e communiquer. C o m m e n t ç a s ’ e s t p a s s é p o u r vous , au nive a u d e s p a r t i e s p re n a n t e s ? I Philippe Fanucci L a c o m mu n i c a t i o n s ’ e s t fa i t e via le SPPPI e t v i a d e s r é u n i o n s q u i o n t p u être menées . O n pa r l a i t t o u t à l ’ h e u re d es problèmes d ’ a c t u a l i s a t i o n . A p a r t i r d u m oment où on a va i t d é j à l e s o u t i l s d e s i mu l a tion, on a fait u n e a c t u a l i s a t i o n e n 2 0 0 7 s u r les données d e 2 00 6 . C e l a p e r m e t d e vo i r un peu quelle é t a i t l ’ é vo l u t i o n , q u e l s é t a i e n t les résultats e t d ’ a m é l i o re r fi n a l e m e n t n o tre méthode e t n o t re a p p ro c h e . I Jean-Michel Lobr y O n n o t e t o u j o u r s l e s p o i n t s d e progrès . Vous , vo u s a ve z l a c h a n c e d ’ a vo i r des écar ts et vo u s vo u s ê t e s re n d u c o m p t e que de six i n d i c a t e u r s a u d e s s u s , vo u s êtes tombé à d e u x . C ’ e s t d u b o n h e u r à communiquer quand même. I Philippe Fanucci 120 O n va d i re q u e c ’ e s t d u b o nheur à com mu n i q u e r, p o u r re p re n d re vo t re expression. M a i s , a va n t t o u t , c e s o n t d e s p hotogra phies à u n i n s t a n t T d ’ u n e s i t u a t i o n donnée. Avoir l a p o s s i b i l i t é d e fa i re d e s m e sures , des si mu l a t i o n s , o n p e u t t o u j o u r s j o uer ou discu t e r s u r l ’ a s p e c t s i mu l a t i o n o u incer titude. C ’ e s t a va n t t o u t u n e p h o t o qui peut être u n p e u fl o u e , ma i s q u i re s t e u ne photo. Fa i re r é g u l i è re m e n t d e s m e s ures et avoir l e s o u t i l s q u i p e r m e t t e n t d e faire réguliè re m e n t d e s p h o t o s , a i d e à voir si on évo l u e , s i l a t e n d a n c e e s t b o n n e ou si elle est p l u t ô t ma u va i s e . D a n s l e s d i fférentes pho - togra phies , quand on regarde un peu les deux études qui ont pu être menées , on a constaté sur cer tains polluants (je pense en par ticulier au benzène) des énor mes progrès . Vis-à-vis des industr iels qui ont réalisé ces mesures ou qui ont réalisé ces investissements , c’était la preuve que leur s investissements ont por té leur s fr uits . vous un commentaire, une réaction tout d’a bord sur ce que vous avez entendu ? Je vous demanderai a près de nous dire comment peut-on prendre la décision de lancer ce type d’étude. Enfin, pouvez-vous identifier les faiblesses de ce type d’étude ? I Jean-Michel Lobr y J’ai une première réaction d’étonnement que je vais illustrer avec un exemple. Si je travaille dans une usine qui utilise du ben zène et si je fume, simplement cela, r ien d’autre, quel est mon r isque d’avoir un cancer du poumon ? On peut me dire pour le benzène tout seul qu’est-ce que cela serait, et pour la cigarette toute seule, qu’est-ce que ça serait. Mais j’additionne les r isques , je les multiplie ? Y a-t-il une synergie ? On ne sait pas . Vous comprenez du coup mon étonnement complet. Comment peut-on dire quel est l’excès de r isque pour avoir un cancer à 30 ans lor sque l’on a une exposition à 25 polluants alor s que l’on ne sait même pas le dire lor sque j’ai deux polluants dont, en plus , je connais la courbe des effets de chacun, alor s il y a plein de polluants pour lesquelles on ne connaît pas la courbe ? Est-ce que l’on note des incer titudes dans ces études ? Sur l’échelle « temps », elle est à 20 ou 30 ans . On n’a pas d’histor ique. I Philippe Fanucci C’est justement cela. Le problème de ces études est que l’on fait une photogra phie aujourd’hui avec des rejets qui sont ce qu’ils sont aujourd’hui. On essaie d’extra poler l’impact de ces rejets actuels dans 10, 20, 30 ans ou 50 ans . Sachant que dans 10, 20, 30 ou 50 ans , les rejets ne seront plus ce qu’ils sont, les mesures ou l’impact sa nitaire auront évolué. Un polluant pour le quel on pense qu’il n’a aucun impact, on s’a percevra peut-être dans 15 ans qu’il avait finalement un impact. Inver sement, nous allons nous projeter par ra ppor t aux progrès de la médecine. Aujourd’hui, un polluant peut avoir un impact sur la santé, tel maladie est incura ble alor s que dans 10 ans ce ne sera peut-être plus le cas . C’est toujour s le r isque d’avoir ces photographies et de se projeter dans une échelle de temps futur. I Jean-Michel Lobr y Après ces deux témoignages et ces points qu’on a identifiés en matière de pilotage, de méthode, de communication, d’interprétation des résultats , Mar yse Arditi, avez- I Mar yse Arditi, Responsa ble r isques et impacts industr iels , FNE En 2006-2007 (ce ne sont pas des temps préhistor iques) a été réalisé le ra ppor t Tubiana, que d’autres a ppellent ra ppor t d’académie des sciences , plus académie de médecine, plus la Fédération nationale de lutte contre le cancer, plus l’InVS… Il y avait encore quelques trois autres aussi im por tants que ceux-là… Tout l’esta blishment français , on va dire, a par ticipé. Le ra ppor t cherche les causes du cancer en France. C’était il y a trois ans . Le ra ppor t dit « l’es- sentiel des causes v i e n t d u c o m p o r t e m e n t de l’individuel. » Messieur s les citoyens , vous mangez mal, vo u s f u m e z t ro p , vo u s buvez trop et vous n e fa i t e s p a s a s s e z d e spor t. C’est de vot re fa u t e . L e ra p p o r t d i t également que mo i n s d e 0 , 5 % d e s c a n c e r s sont dûs à la pollu t i o n d e l ’ a i r, d e l ’ e a u , des sols et à l’env i ro n n e m e n t . L e ra p p o r t dit une troisième ch o s e ( e t j e m ’ a r r ê t e ra i l à parce qu’il faisait 2 0 0 p a g e s ) , 8 5 % d e s c a n cer s pour les non-f u m e u r s o n t d e s c a u s e s inexpliquées . Moi, u n p e u s c i e n t i fi q u e , j e me demande comm e n t i l p e u t d i re q u ’ i l y en a moins de 0,5 % q u i s o n t d û s à l ’ e nvironnement, si il y e n a 8 5 % d o n t i l n ’ a pas expliqué les ca u s e s . C e ra p p o r t e s t u n scandale en soit. C’ e s t u n t i s s u s c a n d a l e u x , mais ce qui est imp o r t a n t c ’ e s t q u ’ i l e s t s igné par tout l’esta b l i s h m e n t f ra n ç a i s , i l y a seulement trois ans . Q u a n d vo u s a ve z b esoin d’un exper t, vo u s a l l e z vo i r s o i t l ’ a c adémie des science s , s o i t l ’ a c a d é m i e d e médecine, soit de l ’ I N V S e t i l s vo u s d i s e n t tous « mais de quo i vo u s vo u s o c c u p e z , i l n’y a pas de cance r d e l ’ e nv i ro n n e m e n t » . Autre élément : Qu e d e ma n d e n t l e s g e n s autour des sites ? Ils o n t d e u x t y p e s d e s o ucis . Ils ont le souci d u q u o t i d i e n , l e b r u i t , l a fumée, les odeur s . C ’ e s t d é s a g r é a b l e . I l s n e savent pas si cela a u n i m p a c t s u r l e u r s a nté, mais cela per tur b e l e u r v i e q u o t i d i e n n e . Ils demandent que l ’ o n e s s a i e d e fa i re d e s choses . Par exemp l e , a u t o u r d e s c i m e n t e r ies , on essaie d’a r r ê t e r u n ma x i mu m d e poussières . Puis , ils o n t t o u s u n d e u x i è m e souci très profond d a n s l e u r t ê t e : « ma i s enfin ce que je resp i re t o u s l e s j o u r s , e s t - c e que ça ne me filera p a s u n c a n c e r d a n s 2 0 ans ? » C’est un so u c i t r è s p ro fo n d p a rc e que tout le monde l e s a i t q u e , c ’ e s t l a d i f- 121 Atelier 5 fi c u l t é d e c e g e n re d e ma l a die, même si vo u s a ve z p r i s u n e t r è s fa i b l e dose mais , p a s d e c h a n c e , c ’ e s t s t a t i s t i q ue, vous avez l e c a n c e r, l a g ra v i t é d u c a n c er n’a aucun ra p p o r t a ve c l a d o s e . Vo u s pouvez avoir u n c a n c e r e x t r ê m e m e n t a g re ssif, pour une d o s e t r è s fa i b l e . Pa s d e c h a n ce. C ’ e s t u n s o u c i r é e l d a n s l a t ê t e des gens , en p a r t i c u l i e r p o u r l e u r s e n fa n t s . Je vous ra pp e l l e q u e l q u e s n o m s q u i d i s e nt des choses . A G i l l y - s u r- I s è re , d e s c i t oye n s ont nommé u n e r u e « l a r u e d u c a n c e r » , celle qui était s o u s l e s f u m é e s d e l ’ i n c i n é ra t eur, qui a poll u é d a n s d e s c o n d i t i o n s a b s o lument scand a l e u s e s p e n d a n t d e s t e m p s i mmémor iaux. J e vo u s ra p p e l l e l ’ é c o l e d e Vincennes qui é t a i t s u r l ’ a n c i e n n e u s i n e Ko dak, avec le n o m b re d e c a n c e r s a n o r ma u x . Je vous ra p p e l l e L a H a g u e , o ù u n j o u r d a ns une école, d e u x ga m i n s o n t e u u n e l e u c émie dans la m ê m e c l a s s e . O n e n p e n s e ce qu’on en ve u t . O n p e u t d i re a ve c u n t on très docte e t t r ès e x p e r t , c ’ e s t u n c l u s t e r, c’est un ha s a rd ; ma i s ç a n e ra s s u re p a s les r iverains . E x c u s e z - m o i , ma i s i l y a d e s choses que j ’ a va i s e nv i e d e d i re q u a n d même sur ce que l’on a entendu. I Jean-Michel Lobr y 122 Vo u s a v e z r e p l a c é l e s u j e t a u n i v e a u du citoyen, de l’ha bitant. C’est là où il fa u t l e p l a c e r d ’ a i l l e u r s . A u v u d e s e s a t t e n t e s d ’ i n fo r m a t i o n p o u r s o n c o n fo r t de vie quotidien et sa santé, et de toute l’ignorance qu’il a par ra ppor t à ce qui se passe réellement dans son environnem e n t , à q u o i d o i v e n t s e r v i r c e s é va l u a tions et notamment les résultats de ces évaluations ? I Mar yse Arditi I Mar yse Arditi Ce à quoi elles doivent ser vir, c’est évidemment à faire tomber dans l’environnement les produits les plus toxiques. C’est simple. On dit le benzène. « oh la, il y en a vraiment beaucoup, on va faire un effort pour faire tomber le benzène ». Mais c’est une étude environnementale de la pollution de l’environnement. Je persiste à penser que ces études ne peuvent pas aller jusqu’à un niveau sanitaire et dire « vous habitez là, donc votre excès de cancer supplémentaire est ça ». Nous n’avons pas les bases scientifiques pour le dire. Si c’est ce que demande le citoyen, il faut lui expliquer qu’il n’y a pas d’étude pertinente pour lui répondre. Avant de savoir comment on la finance, il y a aussi la pertinence de l’étude. Une étude qui essaie de regarder à quel niveau de pollution est l’environnement « eau, air, sol » et qui indique qu’il y a quatre produits vraiment préoccupants sur lesquels il faudrait faire un effort, c’est intéressant. Le temps où il fallait prendre trop de précautions pour essayer de dire est passé. J’incite tous ceux qui ont cinq minutes à aller regarder l’exposition de France Nature Environnement sur le bicentenaire. C’est trop tard pour essayer d’imaginer que le citoyen pourrait rester gentil, sympa, et ne rien comprendre. Il y a la convention de la rue qui donne tous les droits aux citoyens. Il y a la charte des citoyens. Maintenant vous avez intérêt à avoir un citoyen informé, avec qui vous discutez et avec qui vous concertez, plutôt qu’un citoyen où vous vous dites que s’il ne savait rien ce serait mieux. C’est trop tard. J ’ a i e nv i e d e d i r e u n e c h o s e t r è s i m p o rt a n t e , p a rc e q u e c e n ’ e s t p a s fo rc é m e n t toujours ce à quoi on pense. Il y a deux c h o s e s . L a p r e m i è r e , e n t a n t q u e c i t oye n , c ’ e s t d e s a vo i r q u e « l e F ra n ç a i s m oye n » n’existe pas. Il existe pour tous les types d e ma l a d i e s , d e s c h o s e s q u e l ’ o n a p p e l l e « d e s g ro u p e s à r i s q u e s » . Pa r e x e m p l e , fa c e à l a p o l l u t i o n d e l ’ a i r, s i vo u s ê t e s a s t h ma t i q u e o u i n s u ffi s a n t r e s p i ra t o i r e , vo u s ê t e s u n g ro u p e à r i s q u e . C ’ e s t vo u s q u i r i s q u e z l e p l u s g ro s p é p i n e n c a s d e p o l l u t i o n l o u r d e . S i vo u s é t i e z u n e n fa n t à T c h e r n o by l , p a s d e c h a n c e . L e s 4 0 0 0 c a n c e r s d e l a t hy ro ï d e , c e s o n t l e s e n fa n t s q u i l e s o n t e u p a rc e q u ’ i l s é t a i e n t u n g ro u p e à r i s q u e p o u r c e q u i s ’ e s t p a s s é à T c h e rn o by l ( j e l a i s s e d e c ô t é l e s l i q u i d a t e u r s ) . C’est très important de se dire que c’est c e u x - l à q u ’ o n v i s e p a rc e q u e s i c e u x - l à s o n t p ro t é g é s , o n p ro t è g e l ’ e n s e m b l e d e la population. Deuxième élément, ce qui est le signal d ’ a l a r m e e t q u e l e s c i t oye n s o u b l i e n t p a rfo i s c e q u e l ’ o n n e s a i t p a s e n c o r e a u j o u r d ’ h u i c ’ e s t l a t ox i c i t é d e s p ro d u i t s . S i l ’ E u ro p e n o u s a m i s R E AC H , c ’ e s t p a rc e q u e i l y a 1 0 0 0 0 0 p ro d u i t s d o n t o n n e c o n n a î t p a s l a c o u r b e d e s e ffe t s . O n n e s a i t m ê m e p a s c o m b i e n o n a u ra d e r i s q u e s s u p p l é mentaires de cancer si on a absorbé cela toute la vie. La chose essentielle est de se dire que les gens les plus exposés à chacun des p ro d u i t s s o n t ma l g r é e u x l e s s e n t i n e l l e s d e l a t ox i c i t é d e c h a q u e p ro d u i t . I l fa u t être d’une vigilance extrême sur ce qu’on a p p e l l e l e s ma l a d i e s p ro fe s s i o n n e l l e s c a r c ’ e s t e l l e s q u i n o u s a l e r t e n t s u r l a t ox i c i t é . E t s i o n a l e r t e à t e m p s e t s i o n ga r d e I Jean-Michel Lobr y En deux mots, qu’avez-vous à nous dire du jeu d’acteur local, citoyen, élu, industriel ? d e s t a b l e a u x d e ma l a d i e s p ro fe s s i o n n e l l e s p a r fa i t e m e n t m i s à j o u r d e s n o u ve l l e s c o n n a i s s a n c e s , l e s s a l a r i é s s e ro n t p u r e m e n t p ro t é g é s e t l ’ e n s e m b l e d e s p u b l i c s d e r r i è r e s e ra m i e u x p ro t é g é . I Jean-Michel Lobr y C’est important à ce stade de notre é c h a n g e d e r e p l a c e r c e l a a u n i ve a u d e la population, de sa situation, de ses att e n t e s , d e s e s r é a c t i o n s a u s s i p a r ra p p o r t à c e s é va l u a t i o n s q u i s e d é p l o i e n t . N o u s a l l o n s ma i n t e n a n t e n t e n d r e n o t r e i nv i t é q u i a c e t t e e x p é r i e n c e a u s e i n d e s o n E t a t . J u s t e a va n t q u ’ i l n o u s e x p l i q u e c e q u ’ i l fa i t e t c o m m e n t i l l e fa i t , e s t - c e qu’il a une ou deux questions à poser à nos acteurs ? I G a r y G i n s b e r g , Tox i c o l o g i s t e à l ’ U n i ve r s i t é d e Ya l e . C o n n e c t i c u t , Etats-Unis Dans un premier temps, je suis désolé de n e p a s m ’ e x p r i m e r e n f ra n ç a i s . C e l a p r e n d ra p e u t - ê t r e u n p e u p l u s d e t e m p s , j e suis néanmoins très heureux d’être ici et d ’ a vo i r é t é i nv i t é p o u r p a r l e r d e c e s u j e t . J’ai entendu ici des résultats extrêmement i n t é r e s s a n t s , u n t ra va i l d e r e c h e rc h e e x c e l l e n t , e t j ’ e s s a i e ra i d e vo u s a p p o r t e r m o n p o i n t d e v u e e t l ’ a p p ro c h e a m é r i c a i n e e n l i e n a ve c t o u t c e q u i v i e n t d ’ ê t r e d i t . L o r s d e l a s é a n c e p l é n i è r e , n o u s a vo n s e s sentiellement entendu parler d’incidents, d ’ a c c i d e n t s q u i fo n t l a u n e d e s j o u r n a u x , d e s a c c i d e n t s n a t u r e l s , d e s c a t a s t ro p h e s n a t u r e l l e s d e t y p e o u ra ga n o u d e s é m i s s i o n s d e P C B , d e c e g e n r e d e c a t a s t ro p h e s . J e vo u d ra i s m e d é ma r q u e r p a rc e q u ’ a u x E t a t s - U n i s , l ’ é va l u a t i o n d u r i s q u e n ’ a b o r d e 123 Atelier 5 p a s d u t o u t c e g e n re d e p roblématique. Au x E t a t s - U n i s , n o u s a b o rd o n s plutôt tous l e s a u t re s c a s . C ’ e s t l e c a s de problèmes d e ma l a d i e s re p ro d u c t i ve s inexpliquées , l e s c a u s e s d e ma l a d i e s d e type cancer i n e x p l i q u é é ga l e m e n t . I l fa u t savoir qu’il y a é n o r m é m e n t d e ma l a d i e s aux Etats-Unis d o n t l e s c a u s e s s o n t v ra i m e nt inconnues . N o u s n o u s c o n c e n t ro n s p l u t ô t sur cela. Au x E t a t s - U n i s , n o u s a vo n s une agence g o u ve r n e m e n t a l e q u i e s t l ’ A gence de la p ro t e c t i o n d e l ’ e nv i ro n n e m e n t, qui a éta bli u n e m o d é l i s a t i o n d e l a p o l l u t i on atmosphér i q u e s u r l ’ e n t i è re t é d u t e r r i t o i re amér icain. To u t à l ’ h e u re , l a p re m i è re i n ter venante a a b o rd é l a m o d é l i s a t i o n . Po u r nous , c’est v ra i m e n t u n e p re m i è re é t a p e, éta blir un m o d è l e d e l a p o l l u t i o n a t m o s phér ique. Une a u t re é t a p e t o u t a u s s i i m p o r t ante dans un p re m i e r t e m p s , c ’ e s t d ’ e s s a yer de contrô l e r t o u t e s l e s é m i s s i o n s . S i vo us voulez da va n t a g e d ’ i n fo r ma t i o n s s u r c e programme N ATA , vo u s p o u ve z a l l e r s u r I nter net. vous t a p e z « u s a n a t a » , q u i e s t d o nc l’associat i o n a m é r i c a i n e d e s t ox i q u e s . 124 A u x E t a t s - U n i s , n o u s a vo n s l a p o s s i b i l i t é , g r â c e à c e t r a va i l d e m o d é l i s a t i o n , d e r é pertorier tous les rejets, toutes les émissions de toutes les usines sur le territoire américain, mais pas uniquement des u s i n e s . N o u s a vo n s é g a l e m e n t l a p o s s i b i l i t é d e t r a c e r d ’ u n e c e r t a i n e ma n i è r e l a pollution atmosphérique qui vient de la c i r c u l a t i o n r o u t i è r e , d u t r a fi c ro u t i e r. N o u s p o u vo n s t r a c e r a u n i v e a u l o c a l , d e ma nière beaucoup plus précise, la pollution q u i p o u r r a i t p r ov e n i r d e p e t i t s g a ra g e s , d e p e t i t d é p ô t , p a r e x e m p l e , p a r fo i s m ê m e des séchoirs chez soi. On identifie ainsi des points noir s . On en a par lé également précédemment. Grâce à l’identification de ces points noir s , on dispose d’un vér ita ble plan national. Nous uti lisons également un processus de bio moni tor ing au niveau local. Ce qui veut dire que nous prélevons des échantillons sanguins , des échantillons d’ur ine, parfois même des cheveux, pour essayer de déter miner les niveaux des degrés d’exposition de la po pulation. C’est finalement là l’inconnu numéro 1, c’est justement d’analyser le degré d’exposition pour les citoyens . Ce travail de bio monitor ing nous a per mis de tirer quelques conclusions , à savoir que la major ité des polluants viennent de notre maison, de notre domicile, de notre environnement proche. Il s’agit des polluants que l’on peut trouver dans le maquillage, dans les cosmétiques , dans la nourr iture, parfois même dans le lino, le parquet que l’on peut trouver au sol sur lesquels les bébés a pprennent à marcher, également dans les poêles anti-adhésives que l’on utilise pour la cuisine. Malheureusement, nous n’avons pas vraiment de contrôle sur tout ce qui rentre dans ces produits de grande consommation. Vér ita blement, nous avons trouvé que, au niveau du maquillage que l’on por te toute une jour née, il y a pas mal d’exposition assez impor tante. Un des grands défis que nous avons à rele ver, c’est d’étudier davantage la susceptibilité de l’exposition de la po pulation. C’est le sujet qui m’occupe plus par ticu lièrement. Nous savons , suite à des études , que la pér iode pér inatale, la pé r iode inutero et les quelques mois qui suivent la naissance, sont des pér iodes extrêmement sensibles pour plusieur s agents . Nous es sayons de comprendre les degrés d’expos i t i o n p e n d a n t l a g ro s s e s s e e t p e n d a n t la phase d’allaitement. Ce sont des périodes essentielles et cruciales. Ces sont les sujets qui m’occupent, les risques ass o c i é s a u t o u t d é b u t d e l a v i e . N o u s a vo n s t o u s é v i d e m m e n t n o t r e p ro p r e A D N . N o u s s o m m e s t o u s d i ff é r e n t s . N o t r e c a p a c i t é à m é t a b o l i s e r e s t d i ff é r e n t e . N o t r e c a p a c i t é à r e c o n s t i t u e r n o t r e A D N e s t d i ff é r e n t e é g a l e m e n t . P a r l e p a s s é , o n a va i t pour tendance d’étudier le cas classique d’un homme moyen de poids moyen, de 70 kilos . Aujourd’hui, nous introduisons également la génétique pour analyser la susceptibilité dans la population. Par le passé, on l’a encore entendu d’ailleurs ici, on par lait d’un niveau de référence, c’est-à-dire qu’au-delà de ce niveau de référence, on est dans une zone dangereuse, en dessous on est plutôt dans une zone sûre. I l fa u t s a vo i r q u e l ’ a p p ro c h e a m é r i c a i n e fa i t fi t d e c e c o n c e p t d e c e s e u i l p a rc e q u ’ e n fo n c t i o n d e l a p o p u l a t i o n , e n fo n c t i o n d e l ’ â g e , s i vo u s a ve z u n e p e r s o n n e â g é e , u n j e u n e , u n b é b é , c e s s e u i l s fl u c t u e n t e t va r i e n t c o m p l è t e m e n t . N o u s a vo n s a n a l y s é q u e , m ê m e à d e s d o s e s p a r fo i s t r è s fa i b l e s , t r è s m i n i ma l e s , d ’ u n c e r t a i n p ro d u i t c h i m i q u e q u e c e s o i t d u m e rc u r e , d u p l o m b o u d u P C B , o n p e u t s e t ro u ve r d a n s u n e z o n e a s s e z d a n g e r e u s e e n fo n c t i o n d e q u i e s t e x p o s é . N o u s vo u lons supprimer cette notion, ce concept d e s e u i l , a u - d e l à d u q u e l t o u t va ma l e t e n d e ç à d u q u e l t o u t va b i e n . O n a n a l y s e u n e p e n t e ma i n t e n a n t p a rc e q u e n o u s s a vo n s q u e m ê m e à d e s d o s e s m i n i ma l e s , i l p e u t y a vo i r p ro b l è m e . I Jean-Michel Lobr y S i vo u s t a p e z G a r y G i n s b e r g s u r I n t e rn e t , vo u s t o m b e r e z s u r u n e p r é s e n t a t i o n exhaustive, récente - elle est de mar s qui reprend de manière très précise ces q u e l q u e s i n fo r m a t i o n s . Q uestions de la salle I Thierr y Dubuis , DREAL Calais Nord-Pas-de- Je suis en charge d e l ’ a n i ma t i o n d u S P P P I Cote d’Opale Fland re . N o u s a vo n s é t é l e s premier s à nous lan c e r d a n s c e s fa m e u s e s études de r isques s a n i t a i re s d e z o n e . Po u r l’aspect financeme n t , c o m m e n o u s é t i o n s les premier s , l’Etat e t l e C o n s e i l R é g i o n a l ont été très génére u x . D o n c n o u s n ’ a vo n s pas eu ces problèm e s . Simplement, je suis c o n t e n t d e l ’ i n t e r ve n tion de Gar y Ginsbe rg . L o r s q u e l ’ o n p o u s s e les évaluations de r i s q u e s s a n i t a i re s d e zone jusqu’au bout , q u e l ’ o n e s s a i e d ’ i n t égrer au mieux ce qu e l e s g e n s re s p i re n t ( l e s rejets industr iels ce r t e s , ma i s a u s s i l e re s t e , la pollution automo b i l e ) e t c e q u e l e s g e n s mangent (ce que l’ o n a p p e l l e l a p a r t i e i ngestion), quand les e x p e r t s vo n t j u s q u ’ a u bout, on s’a perço i t q u e t o u t l e d u n ke rquois est en rouge. L e s e x p e r t s n o u s o n t d i t « rassurez-vous (en fi n c ’ e s t u n e fa ç o n d e par ler), la France e n t i è re e s t e n ro u g e » . On leur a demand é p o u rq u o i . L e s e x p e r t s ont répondu : « r i e n q u e s i o n p re n d e n compte ce que ma n g e n t d e s g e n s , c e q u ’ i l y a dans leur s réf r i g é ra t e u r s , l ’ a l i m e n t ation nous fait dépa s s e r p a r t o u t c e q u ’ o n a ppelle les seuils ». C e l a a é t é l a p re m i è re remarque qui nous a i n t e r p e l l é s . 125 Atelier 5 L a s ec o n d e re ma rq u e , c ’ e s t une question d e m é t h o d o l o g i e . N o s é t u d e s montrent que l e s rej e t s a c t u e l s s o n t c e n s é s ne pas avoir d ’ e ffe t s u r l a s a n t é d e p e r s o nnes qui nais s e n t a u j o u rd ’ h u i s u r l e l i t t o ra l et vont y vivre 3 0 o u 4 0 a n s . Q u e s t i o n l é g i t i m ement posée p a r l e s h a b i t a n t s : « q u i d d e s gens qui ont 4 0 a n s a u j o u rd ’ h u i , vo i re p l u s et qu’ils y ont v é c u q u a n d l e s re j e t s i n d u s t r iels et l’act i o n d e l a D R E A L n ’ é t a i e n t p as ceux d’au j o u rd ’ h u i » . C ’ e s t u n e q u e s t i on à laquelle o n a d u ma l à r é p o n d re . Po u rquoi ? Dans n o t re e s p r i t , l ’ é va l u a t i o n d e s r isques sanit a i re s c ’ e s t t ro u ve r l e s i n t e ractions entre l e s é m i s s i o n s , u n e q u a l i t é d e l’environne m e n t ( l ’ a i r, l e s s o l s ) e t l a s a n t é de la popu l a t i o n . Au t a n t o n a r r i ve à ma î tr iser bien les d e u x p re m i e r s ( o n c o n n a î t b ien les rejets i n d u s t r i e l s , o n p e u t a p p r é c i e r la qualité de l ’ e nv iro n n e m e n t e n fa i s a n t des analyses , c e l a c o û t e c h e r ma i s b o n c e n’est pas le p ro b l è m e i c i ) , a u t a n t p o u r l ’ é tat de santé, o n a t r è s p e u d e d o n n é e s q ui per mettent s o i t d e c o n fi r m e r q u ’ e ffe c t i vement il n’y a p a s d e r i s q u e , s o i t a u c o n t ra i re de dire « att e n t i o n d a n s l a r é g i o n , i l y a des gens qui o n t l e c a n c e r d e … » . O n ma nque de données sur les aspects santé. I Daniel Florence, Ecole des Mines de Par is L e s r i s q u e s n a t u re l s s o n t - i l s p r is en compte p o u r é va l u e r l e r i s q u e g l o b a l sur la zone ? I Pa tr icia Blanc 126 N o n , r i e n q u ’ a ve c p o u r l ’ i n s t a nt les r isques a n t h ro p i q u e s , o n a e u u n p eu de travail. Po u r l e s r i s q u e s n a t u re l s , o n p eut avoir des s u j e t s i n t é re s s a n t s c o m m e l ’ a miante natu re l o u l e ra d o n q u i p o s e n t a ussi des quest i o n s i n t é re s s a n t e s . Po u r l ’ i nstant, je ne connais pas d’études de cas où on a réussi à cumuler les deux. I Pierre Douche, Etudiant en aménagement du littoral et urbain J’ai l’impression que c’est un peu dans l’air du temps (par exemple, avec la taxe carbone) de faire de faire tous les échantillons et recherches atmosphér iques . Je me pose la question aussi des r isques plus anciens , du contrôle des anciens , peut-être des erreur s du passé, notamment de l’infiltration dans les sols de cer taines toxicités . Certains problèmes peuvent être liés notam ment à l’enfouissement des déchets qu’on a pratiqué pendant toutes les années 60 à 80, notamment dans la boucle de la Seine, des ordures ménagères de toute l’Ile-deFrance. Y a-t-il des prélèvements autres qu’atmosphér iques qui sont effectués ? » I Pa tr icia Blanc Oui bien sûr. Nous ne sommes pas entrés dans les détails , mais bien sûr l’étude n’est pas que atmosphér ique. Elle regarde l’en semble des compar timents , les so ls , la vé gétation, la chaîne alimentaire etc. Cela fait par tie d’une étude globale de zone. Dans une par tie, la moitié je c rois , des études , nous avons regardé le br uit de fond. On est allé rechercher des pollutions histor iques par des prélèvements dans les sols et on a bien additionné les retombées des rejets actuels avec les pollutions histo r iques . Cela fait bien par tie à mon sens du champ d’une étude de zone, de regarder les pollutions histor iques qui se trouvent être dans les sols et dans les eaux. I Gar y Ginsber g Nous savons aussi qu’à cer tains endroits la pollution du sol peut déboucher sur des produits chimiques volatils qui vont se retrouver dans les foyer s , dans les maisons et dans les bâtiments . Par exemple quand vous avez des sites de mise en décharge, il subsiste encore des produits chimiques parfois toxiques . On sait que, lor sque des terres agr icoles sont transfor mées par exemple en parcelles destinées à des ha bitations , on trouve encore des résidus d’engrais , de pesticides qui peuvent avoir un effet toxique même si ces pesticides avaient déjà été interdits il y a 20 ans . Il en subsiste encore un tout petit peu dans le sol. I Une per sonne de la salle Je suis fra ppé en ayant écouté les inter ventions du début de l’atelier à la fin, du grand écar t entre l’inter vention initiale sur les études de zones qui dit « Il y a une for te demande du public. Par tout il y a des études de zone pour qu’il y ait à la limite plus de mesures et pour que l’on sache un peu mieux effectivement près de chez moi, dans mon jardin, ce qu’il se passe », et l’inter vention de Monsieur Ginsberg à la fin qui dit l’impor tance de connaître le br uit de fond. Le sujet de Saint-Cypr ien a été évoqué ce matin. L’une des questions que l’on s’est posée en per manence, c’est la pression publique. Là je me place du point de vue du gestionnaire du r isque. Le public de mande toujour s plus de mesures pour être rassuré ou pour être cer tain de la situation. Mais on est largement démuni par ra ppor t à la connaissance du br uit de fond au sens large dans toutes ses composantes telles qu’elles ont été décr ites . La question na turellement se posera. Il faut améliorer la connaissance, c’es t a b s o l u m e n t i m p é ra t i f. Mais face à cet éta t d e fa i t , c o m m e n t fa i t on en gestion du r i s q u e , p o u r e s s a ye r d e s’améliorer et pour q u e l ’ o n s o i t m o i n s d é muni la prochaine fo i s ? I Une per sonne de la salle Je souhaitais faire u n e re ma rq u e . E n fa i t , o n pourrait essayer d ’ a m é l i o re r l e s c o n n a i s sances . On débute u n e é t u d e s u r l e t e r r itoire de Dunkerque e t s u r l e t e r r i t o i re d e Lille à l’institut auq u e l j e fa i s p a r t i e , l ’ l n s t i tut de recherche e t d e l ’ e nv i ro n n e m e n t industr iel. On arr ive à re g ro u p e r p l u s i e u r s études en une à pa r t i r d e m e s u re s p hy s i c o chimiques . Avec d e s p e r s o n n e s q u i t ravaillent en toxicolo g i e , e n é c o - t ox i c o l o g i e et en sociologie, no u s fa i s o n s u n e e n q u ê t e à l’échelle du dunke rq u o i s à p a r t i r d e p r élèvements de végé t a u x , d e p r é l è ve m e n t s classiques en physi c o - c h i m i q u e s , d e p r é l è vements sanguins o u d ’ u r i n e . N o u s fa i s o n s des tests à par tir d e s n o u ve a u - n é s s u r l e s tests de Guthr ie. O n p e u t re p é re r l e s m é taux lourds . On essa ye d ’ é t a b l i r u n e c a r t e de la population. Cette étude est fina n c é e d a n s l e c a d re d u contrat de projet Et a t - R é g i o n d u N o rd - Pa s de-Calais , elle com m e n c e c e t t e a n n é e e t durera trois ans . I Nicolas Pacault, Inspecteur des Installations Classées, DREAL de Picardie J’avais une question pour Sébastien Mounier. J’aurais aimé savoir, dans le cadre de l’étude menée à Port-Jérôme, quelle a été l’attitude des industriels. Etaient-ils moteurs pour faire cette étude de zone ? A-t-il fallu un peu les contraindre ? Deuxième partie de ma question : quelles suites seront données à cette étude ? 127 Atelier 5 I Sébastien Mounier I l n ’ y a p a s e u d e c o n t ra i n t es de la par t d e l ’ I n s p e c t i o n d e s I n s t a l l a t i ons Classées s u r l e s i n d u s t r i e l s . J ’ e n t e n d s par là qu’au c u n a r r ê t é p r é fe c t o ra l n ’ a é t é pr is ni pour r é c o l t e r l e s d o n n é e s d ’ é m i s s ions , ni pour fa i re d e s m e s u re s p e n d a n t la durée de l ’ é t u d e . J ’ a i l e s e n t i m e n t q u e les industr iels s u r Po r t - J é r ô m e o n t b i e n c o mpr is tout l’in t é r ê t q u ’ i l s a va i e n t à fa i re c e s études . Pour c e r t ai n s , p e u t - ê t re l e b u t e s t de dire « vous voye z , o n n ’ a p p o r t e p a s p l u s de r isques », p o u r d ’ a u t re s c e s e ra p o u r d ire : « on est c e r t ai n d e t ro u ve r c e r t a i n e s choses (et d ’ a i l l e u r s ç a a é t é l e c a s ) e t de toute faç o n d a n s l e c a d re n o r ma l d e vos missions , vo u s , I n s p e c t i o n d e s I n s t a l l a t i ons Classées , q u e l’ o n fa s s e c e t t e é t u d e ou non, vous a l l e z n o u s d e ma n d e r d e r é d uire nos rejets n o t a m m e n t s u r d e s s u b s t a n c es identifiées e t re p r i s e s d a n s l e P l a n n a t i o nal Santé-en v i ro n n e m e n t , e t d a n s l e P l a n régional san t é - e nv i ro n n e m e n t » . N o u s p a r l i o n s d ’ é t a t i n i t i a l . L’un des gros a va n t a g e s , d e s g ra n d s a p p or ts de ces é t u d e s d e z o n e , e s t d ’ a p p or ter un état i n i t i a l. C e q u i p o u r ra i t ê t re s ouhaita ble à l ’ a ve n i r, l o r s q u ’ u n e n o u ve l l e installation s o u h a i t e s ’ i n s t a l l e r s u r l a z o n e, c’est de se s e r v i r d e c e t t e é t u d e c o m m e état initial et d e c o m p a re r c e q u ’ e l l e va a ppor ter par ra p p o r t a u b r u i t d e fo n d s u r l a zone. 128 D u c ô t é d e s i n d u s t r i e l s , c e t t e démarche e s t b ie n c o m p r i s e . E n s u i t e s u r l’état des rés u l t a t s , s i x s u b s t a n c e s p o r t a i ent un intérêt s a n i t a i re . J e p a r l e d ’ i n t é r ê t s anitaire, je ne p a r l e p a s d e s u r- r i s q u e p a rc e que les résul t a t s , s a n s re n t re r d a n s l e s va l e ur s chiffrées c e l a n ’ a u ra i t p a s d ’ i n t é r ê t - , montrent que l’on est juste à la limite de ces niveaux considérés comme accepta bles . De plus , c’est quelque chose qui va évoluer dans le futur grâce ou à cause du ra ppor t du Haut Conseil de Santé Publique et de l’a p propr iation qui sera faite ou pas par les pouvoir s publics . D’ores et déjà, il y a des actions d’amélioration de la connaissance qui sont entrepr ises par des mesures réelles dans l’air de la concentration de cer tains composés qui ne sont pas suivis ou qui ont été suivis de manière très par tielle par le passé, justement à cause des incer titudes liées à l’expression des résultats . Avant de prendre des décisions parfois dures , on est obligé d’en connaître davantage sur l’ex position, sur le niveau de la concentration réelle dans l’air de cer tains composés . Dans d’autres cas , ce sont des mesures de réduction qui sont programmées . Que ces substances aient une expression de niveau de r isque par tiel en VTR (Valeur Toxique de Référence) ou qu’elles n’en n’aient pas (je pense par exemple au dioxyde d e soufre, et qu’il n’y a pas de VTR, on ne peut pas calculer d’indices de r isques là-dessus . Pour tant là aussi, nous avons eu des réduc tions qui sont planifiées sur Por t-Jérôme jusqu’en 2018 ou 2020. I l y a à l a fo i s d e s a c t i o n s d ’ a m é l i o r a t i o n de la connaissance avec des mesures réelles des émissaires et de la concent r a t i o n r é e l l e d a n s l ’ a i r, e t d e s a c t i o n s d e réduction des rejets. I Une per sonne de la salle Je voudrais faire un petit commentaire en tant qu’industr iel. Je pense qu’il faut garder en tête qu’un industr iel, c’est avant tout un citoyen. Il est citoyen au sens collectif du ter me par ce qu’il a ppor te au niveau de la collectivité (nous par lions tout à l’heure de la compétitivité), mais un citoyen aussi d’un point de vue individuel. D’un point de vue per sonnel, quand j’ai fait mes heures de travail, je deviens un citoyen qui a une femme, des enfants , et qui est intéressé par ce qui se passe à l’extér ieur. On a souvent tendance à dire que l’industr iel est « le mé chant », c’est avant tout un citoyen, aussi bien individuel que collectif. I Inspectrice des Installations classées sur la zone d’Ambès Je suis inspectrice des installations classées sur la zone d’Ambès, aussi visée par u n e E R S b i e n a va n c é e . J e va i s m e l i m i t e r à la question que j’ai sur les particules e t l e s N OX . C o m m e vo u s ve n i e z j u s t e d e l e ra p p e l e r, c e l a fa i t p a r t i e d e s p a ra mètres comme le SO2 qui n’ont pas de V T R . Pa r a i l l e u r s , l a z o n e d e B o r d e a u x e s t e n c o n t e n t i e u x e u ro p é e n s u r c e s d e u x p a ra m è t r e s . J e m e p o s a i s c e t t e q u e s t i o n : a ve c t o u t c e q u e vo u s m ’ a ve z d i t a u j o u r d ’ h u i : n o u s n ’ a vo n s p a s d e V T R ( Va l e u r To x i q u e d e r é f é r e n c e ) , n o u s n ’ a vo n s p a s p ro b a b l e m e n t d ’ e ffe t d e s e u i l , o n a d e s i n c e r t i t u d e s e x t ra o r d i n a i r e s s u r l ’ é t a t d e c e s é t u d e s . N e fa u t - i l p a s a u fi n a l u t i l i s e r n o t r e é n e r g i e à s e l i m i t e r à i d e n t i fi e r l e s ma x i ma d a n s l a z o n e , q u e c e s o i t e n P N o u e n N OX e t les populations sensibles dans la zone. Ne va u t - i l p a s m i e u x u t i l i s e r l e p e u d e t e m p s q u e l ’ o n a p o u r r é d u i r e l e s s o u rc e s d ’ é m i s s i o n q u i s o n t à l ’ o r i g i n e d e c e s ma x i ma ? O u fa u t - i l c o n t i n u e r à d é ro u l e r t o u t e l a d é ma rc h e E R S s u r c e s p a ra m è t r e s - l à ? D e p l u s , c e s p a ra m è t r e s ( q u i s o n t P M e t N OX ) o n t l a c h a n c e d e n e p a s ê t r e d e s t ra c e u r s i n d u s t r i e l s . I l fa u t q u e l ’ o n s o i t c a p a b l e e ffe c t i ve m e n t , c o m m e vo u s l e d i s i e z , d e ra j o u t e r t o u t e s l e s é m i s s i o n s d ’ o r i g i n e t ra fi c e t a g r i c o l e . O n a u n e r é g i o n q u i n e b é n é fi c i e p a s d ’ u n i n v e n t a i r e d ’ é m i s s i o n s r é g i o n a l e s . L’ i n v e n t a i r e d ’ é m i s s i o n s n a t i o n a l e s n ’ a p a s é t é fi n a l i s é , n o u s n e p o u vo n s d o n c p a s s ’ a p p u y e r d e s s u s p o u r a j o u t e r l a p a r t N OX e t l a p a r t PM10 issus du secteur agricole et du sect e u r t ra fi c . Q u e d o i t - o n fa i r e ? D e vo n s n o u s n o u s l i m i t e r a u b r u i t d e fo n d p u i s q u e p o u r c e s p a ra m è t r e s , ç a n ’ a u r a i t p a s d e sens de se limiter aux émissions industrielles ? I Gar y Ginsberg Au x E t a t s - U n i s , o n e s s a i e v r a i m e n t d e t r a va i l l e r a u s s i a u n i v e a u d e l a p r é v e n t i o n du risque. Plutôt que de passer des années à analyser l’exposition par ra ppor t u n c e r t a i n p ro d u i t , à u n e c e r t a i n e s o u r c e , n o u s e s s a yo n s v ra i m e n t d ’ a p p l i q u e r t o u jours les meilleures technologies dispon i b l e s s u r l e ma rc h é à c e m o m e n t - l à . E t ensuite, on mesure le risque. 129 Atelier 6 I Jean-Luc Lachaume, Directeur général adjoint de l’Autorité de Sûreté Nucléaire Post-Accidentel nucléaire • r a d i oac t i v i t é d é c h e t • r é pa r a t i o n • m a r é e n o i r e • i m pac t é c o l o g i q u e e t s a n i t a i r e • p o s t t r au m a t i c s t r e s s d e s o r d e r • i n d e m n i s at i o n I A l a i n S i m o n e a u , A n i ma t e u r 130 Le sujet qui nous est proposé est la gest i o n d e s e ff e t s s a n i t a i r e s e t d e s i m p a c t s d i ff é r é s d e s c a t a s t r o p h e s . N o u s a vo n s avec nous le pilote de l’atelier qui a défi n i l a p r o b l é m a t i q u e , i l s ’ a g i t d e D a n i e l Fauvre, directeur adjoint à la DREAL Languedoc-Roussillon. Av e c n o u s , p o u r p a r l e r d e c e s u j e t , P h i l i p p e H u b e r t , d i r e c t e u r d e s r i s q u e s c h ro n i q u e s à l ’ I N E R I S , l ’ I n s t i t u t n a t i o n a l d e l ’ e nv i ro n nement industriel et des risques. Philippe Hubert a un passé dans le nucléaire, not a m m e n t p a r u n t r a va i l s u r T c h e r n o by l e n é p i d é m i o l o g i e . L o ï c K e ra m b r u n , d u CEDRE, responsable du ser vice de suivi des pollutions au Centre de Documentation de Recherche et d’Expér imentations sur les pollutions accidentelles des eaux. O n a b e a u c o u p e n t e n d u p a r l e r d e vo u s à propos de l’Er ika. C’est à ce moment que l e g r a n d p u b l i c a c o n n u vo t r e e x i s t e n c e . Vo t r e o r g a n i s m e a é t é a c c u s é , a u d é p a r t , d ’ ê t r e u n e é m a n a t i o n p u r e m e n t p é t ro lière, une sor te de composés organiques vo l a t i l e s e n fo r m e i n s t i t u t i o n n e l l e . M a i s c e n ’ e s t p a s t o u t à fa i t c e l a . I Loïc Kerambr un, Responsa ble du ser vice de suivi des pollutions au Centre de Documentation de Recherche et d’Expér imentations sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre) Non, ce n’est pas tout à fait cela. Mais c’est vrai qu’une par tie de notre financement vient du secteur pr ivé et notamment du secteur pétrolier et chimique. En cas de cr ise, nous sommes exper ts , avec avant tout une mission de ser vice public pour les autor ités . Sachant que Total fait par tie de notre Conseil d’Administration et de notre conseil de comité stratégique comme beaucoup de financeur s , quand il y a un accident comme l’Er ika, il est dit que nous sommes à la solde de Total, ce qui est complètement faux. Nous sommes très contents d’avoir de l’argent de Total, cela nous per met d’aller sur des sites étranger s en cas d’accidents , s u r l e s s i t e s d e To t a l e t s u r d ’ a u t r e s p é t ro l i e r s , e t d e fa i r e b é n é fi c i e r e n r e t o u r le ser vice public et les collectivités. Nous a vo n s u n e m i s s i o n d e s e r v i c e p u b l i c 2 4 heures sur 24. I Alain Simoneau J e a n - L u c L a c h a u m e , vo u s ê t e s d i r e c t e u r g é n é ra l a d j o i n t d e l ’ Au t o r i t é d e S û r e t é N u c l é a i r e . Nous n’avons pas le temps de décr ire dans le détails ce qu’est l’ASN, mais ce que j’en retiens en tant que jour naliste, c’est qu’elle est une autor ité indépendante. Oui, nous sommes une autorité administrative indépendante chargée de la réglementation du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection e n F r a n c e . Po u r fa i r e u n p a r a l l è l e , n o u s s o m m e s u n p e u l ’ é q u i va l e n t d e l a D G P R au Ministère de l’écologie. I Alain Simoneau J’ai aussi retenu que depuis 2005, et c’est p o u r c e t t e ra i s o n q u e vo u s ê t e s d a n s c e t a t e l i e r, vo u s vo u s ê t e s e n ga g é s d a n s u n e énor me étude, une étude tentaculaire sur le post-accidentel dans le domaine n u c l é a i r e . J e m e s u i s d e ma n d é e n voya n t l e d o c u m e n t q u i m ’ a va i t é t é c o n fi é s i c e n ’ é t a i t p a s u n s u j e t v ra i m e n t s p é c i fi q u e ment nucléaire. Est-ce qu’il y a quoi que c e s o i t q u i e s t t ra n s p o s a b l e d a n s l ’ é t u d e q u e vo u s a ve z l a n c é e ? J e n e vo u s d e ma n d e p a s d e r é p o n d r e d e fa ç o n c o m p l è t e , ma i s j u s t e u n p e t i t é c l a i ra g e . M o n idée est que, quand on parle du nucléaire, on parle d’isotopes qui durent. I Jean-Luc Lachaume Il y a des isotopes qui durent très longt e m p s , ma i s i l y a d e s p ro d u i t s c h i m i q u e s qui durent aussi très longtemps. Nous nous sommes lancés non pas une é t u d e , ma i s d a n s d e s t ra va u x v i s a n t à mieux se préparer à répondre à une s i t u a t i o n p o s t - a c c i d e n t e l l e , à s a vo i r u n e fo i s q u e l ’ a c c i d e n t p u r e m e n t i n d u s t r i e l e s t t e r m i n é . N o u s a vo n s e n ga g é c e s t ra va u x d e p u i s 2 0 0 5 , n o u s p o u r ro n s y r eve n i r d e fa ç o n u n p e u p l u s d é t a i l l é e . E s t - c e q u e l’on en tire des enseignements ? Ou est-ce q u ’ i l y a d e s c h o s e s q u i p e u ve n t ê t r e a p pliquées ou retirées d’autres situations acc i d e n t e l l e s ? Tr è s s û r e m e n t , p u i s q u ’ i l s ’ a g i t a va n t t o u t d ’ a c c i d e n t s i n d u s t r i e l s . I Alain Simoneau J ’ a i o u b l i é d e l e fa i r e , j e d o i s e x c u s e r n o t r e i n t e r ve n a n t a m é r i c a i n C h r i s Po u l e t , q u i t r è s g e n t i m e n t e t a ve c m ê m e u n c e rt a i n e n t h o u s i a s m e , a va i t a c c e p t é d e ve n i r a u j o u r d ’ h u i , ma i s s a h i é ra rc h i e n e l u i a p a s p e r m i s d e t é m o i g n e r. C ’ e s t u n e q u e s t i o n p u r e m e n t a d m i n i s t ra t i ve . Po u r t a n t i l e s t e n F ra n c e e n c e m o m e n t . J e p e n s e m ê m e q u ’ i l e s t q u e l q u e p a r t i c i , ma i s i l n e p e u t p a s i n t e r ve n i r. Philippe Prudhon est directeur des affa i r e s t e c h n i q u e s à l ’ U n i o n d e s I n d u s t r i e s C h i m i q u e s , o rga n i s a t i o n p ro fe s s i o n n e l l e , l ’ u n e d e s p l u s p u i s s a n t e s f é d é ra t i o n s p ro fe s s i o n n e l l e s f ra n ç a i s e s . Vo u s ê t e s d a n s c e t t e o rga n i s a t i o n d e p u i s q u a t r e a n s . Ava n t c e l a , vo u s a ve z e u u n p a s s é c l a s s i q u e d ’ i n d u s t r i e l . Vo u s a ve z a u s s i v é c u un certain temps à la SNPE, à la Société N a t i o n a l e d e s Po u d r e s e t E x p l o s i f s . Vo u s a ve z é t é u n m o m e n t p ro c h e d e l ’ a ffa i r e A Z F e t a u j o u r d ’ h u i vo u s m e n e z u n t ra va i l s y s t é ma t i q u e s u r l e p o s t - a c c i d e n t e l . O n va a b o r d e r t o u t à l ’ h e u r e l e s q u e s t i o n s d ’ é va l u a t i o n . I Philippe Prudhon, Directeur des a ffa i r e s t e c h n i q u e s à l ’ U n i o n d e s Industries Chimiques J’ai vécu plus de 20 ans dans l’industrie chimique directement. Par ra ppor t au d r a m e d e To u l o u s e , j e n e l ’ a i p a s v é c u d i r e c t e m e n t , ma i s é t a n t s a l a r i é d u g ro u p e ( à l ’ é p o q u e j ’ é t a i s e n I l e - d e - F ra n c e ) n o u s 131 Atelier 6 l ’ a vo n s v é c u d e t r è s p r è s , n o t a m m e n t d a n s l a r e l a t i o n a ve c l e s t o u l o u s a i n s q u i présentait des intérêts particuliers en ter mes de retour d’expérience. Le retour d ’ e x p é r i e n c e d a n s n o t r e m é t i e r e s t p a rticulièrement impor tant dans tous les doma i n e s . M ê m e s ’ i l fa u t s e p r é p a r e r à ê t r e surpris, la base du retour d’expérience est ma j e u r e p o u r t i r e r d e s l e ç o n s d e c e q u i a p u s e p a s s e r. I Alain Simoneau Monique Sené, quand nous nous sommes parlé au téléphone pour préparer cet atel i e r, vo u s a ve z b i e n i n s i s t é s u r l e fa i t q u e vo u s n ’ ê t e s p l u s c e q u e vo u s f û t e s . Vo u s ê t e s t o u j o u r s p hy s i c i e n n e n u c l é a i r e , ma i s vo u s n ’ ê t e s p l u s c h e rc h e u r a u C N R S , vo u s ê t e s r e t ra i t é e . Au j o u r d ’ h u i vo u s r e p r é s e n tez parmi nous la société civile. I Monique Sené, Physicienne nucléaire J e fa i s d e l ’ e x p e r t i s e p l u ra l i s t e p u i s q u e c ’ e s t l e m o t a d a p t é d e p u i s 1 9 7 5 . J e t ra va i l l e a u n i ve a u d e s C o m m i s s i o n s l o c a l e s d ’ i n fo r ma t i o n , e n p a r t i c u l i e r a u n i ve a u d e l’Association Nationale des Commissions e t C o m i t é s L o c a u x d ’ I n fo r ma t i o n ( A N C L I ) . Les comités sont autour des installations n u c l é a i r e s d e b a s e s e c r è t e s . Pa r l a l o i d e 2 0 0 6 e t d e s d é c r e t s , l a D S N D o u l a d é fe n s e souhaite que les comités locaux adhérent a u x C L I . C ’ e s t e n e n t ra i n d e s e fa i r e . N o u s pouvons espérer que ces installations s e c r è t e s l e s e ro n t u n p e u m o i n s , ma i s c ’ e s t s a n s ga ra n t i e . 132 I l y a u n p e t i t e s p o i r p a rc e q u e l ’ e x t é r i e u r n’est pas secret. Ce sont des habitants comme vous et moi qui ont le droit de s a vo i r c e q u i va s o r t i r d e c e t t e i n s t a l l a t i o n s ’ i l y a va i t u n p ro b l è m e , m ê m e d e t o u t e fa ç o n s ’ i l n ’ y e n a p a s . C a , c ’ e s t p o u r l e s installations secrètes. Po u r l e s I N B n o r m a l e s , l e s i n s t a l l a t i o n s nucléaires de base, les commissions locales fo n t d e l ’ i n fo r ma t i o n . E l l e s s o n t ma i n t e n a n t h a b i l i t é e s à d o n n e r l e u r a v i s s u r l e s enq u ê t e s p u b l i q u e s s ’ i l y a u n e m o d i fi c a t i o n de l’installation ou s’il y a une construct i o n n o u ve l l e . E l l e s s o n t a u s s i h a b i l i t é e s à p i l o t e r o u à d e ma n d e r d e s e x p e r t i s e s p o u r s a vo i r c o m m e n t fo n c t i o n n e l ’ i n s t a l l a t i o n e t p o u r fa i r e d e s m e s u r e s d a n s l ’ e nv i ro n nement. C’est très important. Elles sont aussi concernées par le post-accidentel, je pense qu’elles ont beaucoup à dire. I Alain Simoneau L e s u n s a p r è s l e s a u t r e s , j e va i s d e ma n d e r à c h a c u n s i vo u s a ve z u n r e s s e n t i s u r l e p o s t - a c c i d e n t e l . E n c l a i r, e s t - c e q u e vo u s ê t e s a l l é s s u r d e s s i t e s q u i o n t é t é a ffe c t é s p a r u n a c c i d e n t , q u e c e s o i t T c h e r n o by l , A Z F, u n e p l a g e d e l ’ A t l a n t i q u e a p r è s l a c a t a s t ro p h e d e l ’ E r i k a ? E s t - c e q u e c e l a vo u s p e r m e t d ’ é c l a i r e r l a d é fi n i t i o n d e c e qu’est le post-accidentel. Qu’entend-on e n t e r m e s d e t e m p s ? Po u r q u o i i l fa u t s e poser la question du post-accidentel et pourquoi c’est si important ? I Monique Sené J ’ a i u n r e s s e n t i d u p o s t - a c c i d e n t e l p a rc e que je le vis dans le questionnement qui m ’ e s t p o s é , s u r l e s p ro b l è m e s d e T c h e r n o by l p a r e x e m p l e . Po u r A Z F, j ’ a i u n e b e l l e fi l l e q u i é t a i t d a n s l a v i l l e d e To u l o u s e q u a n d l ’ a c c i d e n t s ’ e s t p ro d u i t . L e t ra u ma t i s m e e s t i m p o r t a n t . D ’ u n p o i n t d e v u e h u ma i n , c ’ e s t v ra i m e n t d i ffi c i l e à s u p p o r t e r. E n g é n é ra l , i l y a u n c e r t a i n n o m b r e d e c o n s i g n e s q u i p e u ve n t être données et qui sont absolument inaud i b l e s p o u r l ’ e n s e m b l e d e s g e n s ; p a rc e q u e ç a a r r i ve t e l l e m e n t b r u t a l e m e n t ! To u t e l a p ro b l é ma t i q u e p o s t - a c c i d e n t e l l e , c ’ e s t c o m m e n t o n va p o u vo i r r é p a r e r e t a s surer une suivi de ce qui s’est passé. D’une fa ç o n t r è s c l a i r e , s i vo s v i t r e s o n t vo l é e n é c l a t s e t s i vo u s d eve z fo u r n i r t o u t e s l e s fa c t u r e s p ro u va n t q u e c ’ e s t e ffe c t i ve m e n t l’accident qui en est la cause, et non autre chose, ce n’est pas évident. E n c e q u i c o n c e r n e a u s s i l a r é p a ra t i o n , c o m m e n t fa i r e ? T c h e r n o by l , c ’ e s t l a m ê m e c h o s e . L e s g e n s q u i v i ve n t l à - b a s o n t d e s t e r ra i n s t o u j o u r s c o n t a m i n é s e t i l fa u t q u ’ i l s a p p r e n n e n t à v i v r e a ve c . C ’ e s t l e g ro s g ro s p ro b l è m e . I Alain Simoneau P h i l i p p e H u b e r t , a ve z - vo u s e u l ’ o c c a s i o n d ’ e n q u ê t e r s u r l e t e r ra i n ? I Philippe Hubert, Directeur r isques chroniques à l’INERIS des J ’ a i e u e ffe c t i ve m e n t l ’ o c c a s i o n d ’ a l l e r à T c h e r n o by l p o u r d e u x ra i s o n s , p o u r fa i r e deux séries d’études ; une série d’études épidémiologiques pour connaître l’état de santé des gens, une autre série d’études q u i é t a i t u n é n o r m e p ro j e t e u ro p é e n s u r la réhabilitation des territoires contamin é s . J e s u i s a l l é a u s s i d a n s l ’ O u ra l p a rc e q u ’ a va n t T c h e r n o by l , l e s r u s s e s a va i e n t eu d’autres accidents nucléaires, notamm e n t à p ro p o s d u s t o ck a g e d e s p ro d u i t s d e r e t ra i t e m e n t . J ’ a i e n s u i t e q u i t t é l e n u - cléaire pour aller ver s le chimique. Puis , je suis arr ivé à l’INERIS. Assez ra pidement, n o u s a vo n s é t é i m p l i q u é s d a n s c e q u e j e c ro i s ê t r e l a p r e m i è r e s i t u a t i o n p o u r l a quelle des études post-accidentelles ont é t é fa i t e s , à s a vo i r l ’ i n c e n d i e d e l a S B M à B é z i e r s . N o u s a vo n s é t é m o b i l i s é s p o u r vo i r c e q u i s e p a s s a i t . C e l a a c o n t i n u é puisque il y a eu Saint-Cyprien et entre les deux, Redon. L a d é fi n i t i o n d u p o s t - a c c i d e n t e l c o m m e n c e a ve c l e m o m e n t o ù l ’ o n d é c i d e de prendre en charge les conséquences de l’accident, de prendre en charge la g e s t i o n d e t e r ra i n s c o n t a m i n é s . Q u e l q u e fo i s c ’ e s t u n e h e u r e o u q u a t r e m o i s , c i n q a n s e t q u e l q u e fo i s c ’ e s t 1 5 a n s . U n d e s enjeux est justement de réduire ce temps. L a p r e m i è r e ra i s o n d e l ’ i m p o r t a n c e d u p o s t - a c c i d e n t e l , c ’ e s t c e l l e - l à . L e fa i t d e n e p a s d é ma r r e r t o u t d e s u i t e l e p o s t - a c cidentel peut-être une catastrophe dans l a c a t a s t ro p h e . U n e a u t r e ra i s o n e s t q u e , q u a n d u n t e r r i t o i r e e s t ma l m e n é , o n n e s a i t p a s q u e l l e e s t la par t de l’accident par ra ppor t à l’état i n i t i a l . Pa r e x e m p l e , p o u r l e s d i o x i n e s , i l y en a toujours un peu partout, ce n’est p a s fo rc é m e n t l ’ i n c e n d i e d ’ à c ô t é q u i fa i t q u e l ’ o n a a b a t t u d e s va c h e s . D a n s l a q u e s t i o n d e S a i n t - C y p r i e n , c e l a fa i t p a rt i e d e s c h o s e s q u e n o u s a vo n s é l u c i d é e s . Malgré l’importance de Saint-Cyprien, tout n’était pas dû à Saint-Cyprien. C’est un deuxième point important. Le troisième point est que l’on n’antic i p e p a s d u t o u t l a fa ç o n d o n t o n va gérer et les populations et les territoires, par conséquent, on met très longtemps à r é a g i r. 133 Atelier 6 I Alain Simoneau L’ i m p o r t a n t e s t d e c o m p r e n d r e e t d ’ a n t i c i p e r. J e a n - L u c L a c h a u m e , e s t - c e q u e vous , vous avez un vécu du p o s t - a c c i d e n t e l ? Q u e l l e e s t v o t r e d é fi n i t i o n ? E t pourquoi est-ce important ? I Jean-Luc Lachaume 134 Q u a n d o n t ra va i l l e d a n s l e n u c l é a i r e , i l y a fo rc é m e n t l ’ a c c i d e n t o u l a c a t a s t ro p h e q u i v i e n t à l ’ e s p r i t e t q u i fa i t r é f é r e n c e , T c h e r n o by l . C ’ e s t u n v é r i t a b l e d ra m e h u ma i n e t e nv i ro n n e m e n t a l . E n c e q u i m e concerne, le post-accidentel n’est pas u n e a p p ro c h e p u r e m e n t t e c h n o c ra t i q u e , a ve c l ’ i d é e d e fa i r e u n é n i è m e p l a n . C ’ e s t d ’ e s s a ye r d e fa i r e e n s o r t e , n o n p a s d e réparer puisque l’on ne peut pas réparer l ’ i r r é p a ra b l e , ma i s c ’ e s t d e fa i r e e n s o r t e q u e l ’ o n p u i s s e q u a n d m ê m e s ’ e n s o r t i r. E n quand je dis cela, je prends en compte ce qui existe et ce qui s’est passé autour de Tcher nobyl, qui est l’accident de réf é r e n c e ma j e u r. L e p o s t - a c c i d e n t e l p e u t commencer tout de suite, dès l’accident. I l n ’ y a p a s d e d é fi n i t i o n u n i ve r s e l l e . C ’ e s t quand l’accident technique se termine. Po u r u n a c c i d e n t n u c l é a i r e , o n d i t q u e cela commence quand les rejets mass i f s s e t e r m i n e n t . Po u r T c h e r n o b y l , l e s r e j e t s ma s s i f s o n t d u r é u n e d i z a i n e d e j o u r s , ma i s c e l a p e u t ê t r e d e q u e l q u e s h e u r e s à q u e l q u e s j o u r s a va n t d ’ e n t r e r d a n s u n e p h a s e q u i , e l l e , s e ra e x t r ê m e m e n t l o n g u e . En ce qui concerne mon vécu personnel, je suis allé comme d’autres dans la rég i o n d e T c h e r n o by l p o u r vo i r c o m m e n t l e s choses se passent. J’y suis d’ailleurs allé i l y a d e u x s e ma i n e s . Au - d e l à d ’ u n e a p p ro c h e q u i p o u r ra i t ê t r e t e c h n o c ra t i q u e , c e q u i e s t i m p o r t a n t , c ’ e s t d ’ e s s a ye r d e r e t ro u ve r d e s c o n d i t i o n s d e v i e q u i p e rmettent de continuer à vivre. C’est un peu c e q u ’ i l s e p a s s e q u a n d o n r e ga r d e a u t o u r d e T c h e r n o by l , h o r m i s u n e z o n e d ’ e x c l u s i o n o ù o n n e p e u t p a s y v i v r e p a rc e q u e l a ra d i o a c t i v i t é e s t t ro p i m p o r t a n t e . C ’ e s t c e q u i s e ra l e p l u s d i ffi c i l e à fa i r e d a n s l e s t ra va u x q u e l ’ o n m è n e e n F ra n c e . D e p u i s c i n q a n s e nv i ro n , o n e s t s u r d e s t ra va u x u n p e u i n t e l l e c t u e l s q u i v i s e n t à e s s a ye r d e d é fi n i r u n c e r t a i n n o m b r e d e c h o s e s à fa i r e o u à n e p a s fa i r e . M a i s l e p l u s d u r s e ra d ’ a r r i ve r à fa i r e e n s o r t e q u e l e s c h o s e s p u i s s e n t ê t r e p r i s e s e n ma i n a u n i ve a u l o cal, et pas uniquement par des décisions a d m i n i s t ra t i ve s . C o m m e l e d i s a i t M a d a m e S e n é , c e l a p a s s e ra p a r l ’ a p p ro p r i a t i o n d e s c h o s e s a u n i ve a u l o c a l , p a r e x e m p l e , p a r l’association des commissions qui existent e n F ra n c e , d e s C o m m i s s i o n s l o c a l e s d ’ i n fo r ma t i o n . I l y a t o u t u n t ra va i l à fa i r e p o u r a r r i ve r à d é c l i n e r c e t ra va i l u n p e u i n t e l lectuel que l’on mène depuis cinq ans. I Alain Simoneau P h i l i p p e P r u d h o n , ê t e s - vo u s r e t o u r n é à A Z F après l’accident? I Philippe Prudhon J’ai visité le site très peu de temps après l’accident. Étant salarié SNPE, j’y ai rencontré des collègues, mes homologues et b e a u c o u p d e s a l a r i é s p a rc e q u ’ i l y a e u des reclassements. Dans un premier temps j e n e va i s a b s o l u m e n t p a s p a r l e r d e t e c h n i q u e . J e vo u d ra i s p a r l e r d u c o u p l e t e m p s personne. Dès la première minute jusqu’à q u e l q u e s j o u r s , l e s é q u i p e s s o n t s o u ve n t b i e n e n t ra î n é e s p o u r fa i r e fa c e . I l y a u n e question de sur vie aussi des personnes qui fo n t fa c e à l a s i t u a t i o n . I l fa u t é va c u e r d e s b l e s s é s , vo i r e p i r e . I l fa u t m e t t r e d e s i n s t a l lations à l’arrêt immédiatement. Les gens s o n t s o u ve n t b i e n e n t ra î n é s e t s o n t d a n s l ’ a c t i o n . M a i s p a s s é s q u e l q u e s j o u r s , a r r i ve le vide sidéral. On n’est plus dans le domaine de l’action et on regarde. I Alain Simoneau D ’ a p r è s vo u s c ’ e s t l à q u e c o m m e n c e l e post-accidentel ? I Philippe Prudhon Non, il y a deux phases. La première partie e s t i m p o r t a n t e e t s i e l l e t ra i t é e , l a g ra v i t é de l’accident est réduite. Les premières m i n u t e s s o n t d o n c ma j e u r e s , à l a fo i s s u r l e p l a n t e c h n i q u e q u e d e l ’ e n t ra î n e m e n t d e s é q u i p e s . I l n e fa u t s u r t o u t p a s n é g l i ger cette partie-là. Le retour d’expérience b i e n e n t e n d u e s t l à p o u r n o u s a i d e r. B e a u coup d’études nous permettent justement d e fa i r e fa c e à c e t t e p a r t i e - l à . Mais le deuxième point qui est extrêmem e n t d i ffi c i l e p o u r l e s p e r s o n n e s , c ’ e s t q u e , u n e fo i s q u e , t o u t a é t é m i s à l ’ a r r ê t et que la gestion du début du post-accid e n t e l a r r i ve , i l y a u n v i d e s i d é ra l a ve c l e sentiment d’être seul. C’est au point que ceux qui ont vécu la crise dans leur chair fo r m e n t u n e e s p è c e d e « c l u b » o ù i l fa u t être extrêmement attentif quand on s’exp r i m e p a rc e q u e o n p e u t t r è s v i t e ve x e r et générer de la colère. Ces personnes se r e t ro u ve n t fa c e à u n e nv i ro n n e m e n t e x t r ê mement agressif puisque bien entendu il y a d e s d é g â t s e t d e s d é g â t s h u ma i n s . I l y a une agressivité extrêmement importante. Puis le temps passe, des clients partent, les a t e l i e r s vo n t fe r m e r. L e d eve n i r d e s p e rs o n n e s e s t l à . Au t a n t s u r l e p l a n p hy s i q u e , s ’ i l e s t p o s s i b l e d e r é p a r e r, a u t a n t l a r é p a - ra t i o n p s y c h i q u e e s t a u t r e m e n t p l u s l o n g u e . D e s p e r s o n n e s p e u ve n t e n c o r e 3 - 4 a n s a p r è s l ’ a c c i d e n t r é a g i r d e fa ç o n é p i dermique à une sirène ou à un bruit suspect. Honnêtement, nous sommes moins a r m é s p o u r fa i r e fa c e à c e t t e p a r t i e . Po u r l ’ a s p e c t t e c h n i q u e , o n p o u r ra y r eve n i r. L a p r e m i è r e p h a s e , c ’ e s t d e l ’ e n t ra î n e m e n t , d e s m oye n s t e c h n i q u e s p o u r fa i r e fa c e à l ’ a c c i d e n t . J e n e va i s p a s r eve n i r s u r l ’ a m o n t q u i e s t d ’ é v i t e r, ma i s c e n ’ e s t p a s l ’ o b j e t d e c e t a t e l i e r. M a i s v ra i m e n t les premières minutes sont essentielles. Si o n e s t c a p a b l e d ’ a r r ê t e r t r è s ra p i d e m e n t l e s i n s t a l l a t i o n s , d ’ é v i t e r q u e l e s p ro d u i t s partent dans l’atmosphère ou qu’un inc e n d i e s e p ro p a g e , c ’ e s t m i t i g e r l a g ra v i t é , r é d u i r e l a p a r t i e g ra v i t é à l a p l u s s i m p l e expression. Il n’empêche que l’on est dans la phase de crise. I Alain Simoneau E s t - c e q u e fi n a l e m e n t i l n ’ y a p a s d e l i m i t e précise dans le temps entre l’accident et le post-accidentel ? Il y a une sorte de continuité. I Philippe Prudhon Il y a quand même quelques discontinuit é s e n t r e l ’ i m m é d i a t p o u r p o u vo i r a g i r e t l’après, quand on n’est plus dans l’action. Concernant les personnes, on ne peut pas dire, deux ans après sur un accident c o m m e c e l u i d e To u l o u s e , « c ’ e s t fi n i » . I Alain Simoneau, Le Cedre a été sur la brèche pendant l ’ a ffa i r e E r i k a p o u r p a r l e r d e c e q u i a t o u c h é l e s c ô t e s f ra n ç a i s e s . L o i c Ke ra m b r u n , a ve z - vo u s s u i v i c e q u ’ i l s ’ e s t p a s s é d a n s l e s s e ma i n e s , d a n s l e s m o i s , e t d a n s l e s a n - 135 Atelier 6 n é e s q u i o n t s u i v i ? O u ê t e s - vo u s r e s t é s e u lement sur le moment de l’accident qui a quand même été très long ? I L o ï c Ke r a m b r u n 136 O n s u i t l ’ a c c i d e n t n e s e ra i t - c e q u e d e p a r la mission du CEDRE. Nous sommes dans la réponse instantanée 24 heures sur 24. L e C E D R E a a u s s i u n e m i s s i o n d ’ a rc h i va g e q u i n o u s a é t é c o n fi é e s u r t o u t a p r è s l ’ a c cident d’Erika, dans le but de ne pas rec o m m e n c e r l e s e r r e u r s q u i o n t é t é fa i t e s a u p a ra va n t . L’ a rc h i va g e , l e r e t o u r d ’ e x périences et l’exploitation d’expériences fo n t p a r t i e d e n o t r e m i s s i o n . L e d e r n i e r e x e m p l e e n d a t e c ’ e s t l e D e e p wa t e r H o r i z o n , l a p l a t e - fo r m e d a n s l e g o l fe . O n a r e s sorti ce qui s’était passé dans l’Ixtoc 1 en 1 9 6 7 d a n s l e g o l fe d u M e x i q u e , p u i s q u ’ i l s’agit de quelque chose de similaire. Nous s o m m e s d a n s l e g o l fe d u M e x i q u e , a ve c t o u t e s l e s d i ffi c u l t é s q u e l ’ o n s a i t , à 8 0 m è t r e s d e p ro fo n d e u r à l ’ é p o q u e ( c o n t r e 1500 mètres pour l’Erika). C’est à nous de ressortir ces éléments. C’est un peu sans c e s s e u n r e t o u r, u n e e x p l o i t a t i o n d e s r e t o u r s d ’ e x p é r i e n c e p o u r p o u vo i r d o n n e r des idées, des orientations sur les réponses. Je prends un dernier exemple personnel. Ce mois-ci, je suis allé sur une ancienne fo s s e d e d é c h e t s s u r l e l i t t o ra l , j u s t e à l a s o r t i e d e l a r i v i è r e d e Tr é g u i e r, l e Ja u d y, s u r l a p e t i t e Î l e d ’ E r. D a n s c e t t e fo s s e - l à , s e t ro u ve n t e n c o r e p l u s d e 1 0 0 m è t r e s c u b e d e p o l l u a n t s q u i d a t e n t d u To r r ey C a nyo n en 1967. Il s’agit d’un petit îlot privé qui a fa i t l a u n e i l y a q u e l q u e s m o i s d e s j o u rn a u x e t d e s é m i s s i o n s d e t é l é v i s i o n , ma i s q u i é t a i t d é j à c o n n u . I l fa i s a i t p a r t i e d e s points noirs dressés par Robin des bois. Il é t a i t d é j à c o n n u , ma i s a va i t é t é o u b l i é . I l r eve n a i t r é g u l i è r e m e n t d a n s l e s d e ma n d e s d e fi n a n c e m e n t p o u r l e t ra i t e r, ma i s n ’ a j a ma i s é t é t ra i t é . J e d é fi n i s l e p o s t - a c c i d e n t comme quelque chose qui dure quelquefo i s l o n g t e m p s ma i s q u i n e d ev ra i t p a s d u r e r a u s s i l o n g t e m p s e t q u i p o u r ra i t n e p a s durer aussi longtemps. Cet exemple illustre bien que dans le post-accident, on oublie c o m p l è t e m e n t c e q u i r e s t e u n e fo i s q u e l e d i s p o s i t i f d e g e s t i o n d e c r i s e e s t fe r m é , n o t a m m e n t ( e n fi n à l ’ é p o q u e ) t o u t c e q u i était les déchets. Après les choses restent, l ’ a d m i n i s t ra t i o n c h a n g e , a l o r s q u ’ i l y a u n p o t e n t i e l d e d a n g e r e t q u ’ i l fa u t b i e n t ra i t e r c e p ro b l è m e . M a i n t e n a n t , i l va ê t r e t ra i t é , n o u s l ’ e s p é ro n s , p a rc e q u ’ i l y a u n a p p e l d ’ o ff r e l a n c é p a r l ’ A D E M E . C ’ e s t l e c a s t y p i q u e d u p o s t - a c c i d e n t q u i n ’ a u ra i t pas dû être. I Alain Simoneau N o u s a l l o n s e s s a ye r d e n o u s d e ma n d e r s u c c e s s i ve m e n t c o m m e n t é va l u e r e t s u i v r e l e s e ffe t s e nv i ro n n e m e n t a u x , s a n i t a i r e s e t s o c i o - é c o n o m i q u e s d e s c a t a s t ro p h e s ? C o m m e n t t ra i t e r l e s d é c h e t s e t p r é ve n i r les pollutions post-accidentelles ? Comment remettre en état les milieux ? Quand l’accident est déjà arrivé, comment évit e r d e s s u r- a c c i d e n t s , d e s c o n s é q u e n c e s supplémentaires ? Comment accompagner les populations ? Comment les associer à la reconstruction, si reconstruction il p e u t y a vo i r ? Po u r r é p o n d r e à l a p r e m i è r e q u e s t i o n s u r l ’ é va l u a t i o n d e s e ffe t s e nv i ro n n e m e n t a u x , J e a n - L u c L a c h a u m e vo u s t ra va i l l e z d a n s u n g ro u p e d e t ra va i l s u r l e post-accidentel nucléaire. Combien de p e r s o n n e s t ra va i l l e n t s u r l e s u j e t ? I Jean-Luc Lachaume Au t o t a l , p l u s i e u r s c e n t a i n e s d e p e r s o n n e s sont impliquées sur le sujet. I Alain Simoneau Ave z - vo u s d é fi n i u n e m é t h o d e d é va l u a tion et de suivi ? I Jean-Luc Lachaume période, il y a un certain nombre de zones e n t a c h e s d e l é o p a r d s q u i fo n t q u ’ à d e s d i s t a n c e s t r è s g ra n d e s , u n c e r t a i n n o m b r e d e z o n e s p e u ve n t ê t r e p l u s o u m o i n s i m p a c t é e s . I l fa u t d o n c ê t r e c a p a b l e d e l e s r e p é r e r. C e l a p a s s e p a r l a m e s u r e d e ra d i o a c t i v i t é p o u r s a vo i r o ù s o n t l e s z o n e s les plus concernées pour déterminer après c e q u ’ o n p e u t y fa i r e . D a n s l e c a d r e d e s t ra va u x q u e l ’ o n m è n e , i l s ’ a g i t d e s a vo i r c o m m e n t o n p e u t m e s u r e r, q u e m e s u r e r, dans quel délai et qui est capable de mes u r e r. I l fa u t ê t r e c a p a b l e d e m o b i l i s e r l e ma x i mu m d e m oye n s e t d e m e s u r e s p o u r l e fa i r e d a n s u n t e m p s ra p i d e . O n a b e s o i n d ’ a vo i r d e s r é p o n s e s q u i s o i e n t l e p l u s ra pides possible. S u r l e s a s p e c t s s a n i t a i r e s e t e nv i ro n n e mentaux, il existe des choses. Simplement l ’ o b j e c t i f e s t d ’ a r r i ve r à m e t t r e c e l a e n fo r m e d e fa ç o n à l e m e t t r e e n œ u v r e l e m o m e n t ve n u . Pa r e x e m p l e , i l y a d e s q u e s t i o n s d e m e s u r e d e l a ra d i o a c t i v i t é p o u r s a vo i r o ù e n s o n t l e s z o n e s c o n t a m i n é e s e t comment elles sont contaminées, à quel n i ve a u . C e l a p e r m e t e n s u i t e d e s a vo i r c e q u ’ i l y a l i e u d e fa i r e e t s ’ i l e s t p o s s i b l e d e continuer à vivre dans ces zones ou non. Si o n d é t e r m i n e q u e l ’ o n p e u t y v i v r e , i l fa u t d é fi n i r u n c e r t a i n n o m b r e d e c o n d i t i o n s . U n c e r t a i n n o m b r e d e m e s u r e s s o n t fa i t e s à T c h e r n o by l p a r l e s a u t o r i t é s l o c a l e s . I l fa u t s a vo i r q u ’ a u j o u r d ’ h u i , a u t o u r d e T c h e r n o by l , i l y a u n e z o n e d ’ à p e u p r è s 3 0 k i l o m è t r e s d e ra yo n q u i e s t e n e x c l u s i o n . I Alain Simoneau I Alain Simoneau I Alain Simoneau Les équipes sont-elles locales ou internationales ? I Jean-Luc Lachaume I l y a u n p e u d e t o u t . C o m m e l a F ra n c e e s t un pays très nucléarisé, il y a beaucoup d ’ é q u i p e s c a p a b l e s d e fa i r e d e l a m e s u r e d e ra d i o a c t i v i t é . E s t - c e q u e l ’ o n y va h a b i l l é c o m m e u n c o s m o n a u t e o u p e u t - o n y a l l e r e n ve s t o n ? Qu’en est-il en Biélorussie ? I Jean-Luc Lachaume E n B i é l o r u s s i e , i l y a va i t p e u d ’ é q u i p e s , ma i s l e s é q u i p e s s e s o n t fo r m é e s a u c o u r s d u t e m p s . D e s é q u i p e s c i t oye n n e s s e s o n t mobilisées puisque les gens, les acteurs loc a u x s e s o n t p r i s e n ma i n p o u r ê t r e à m ê m e d e fa i r e e u x - m ê m e s d e l a m e s u r e , p a s d e l a m e s u r e ra d i o a c t i ve s o p h i s t i q u é e , ma i s d e l a m e s u r e s u ffi s a m m e n t r u s t i q u e . E l l e p e r m e t q u a n d m ê m e d ’ a vo i r u n e i d é e e t J’y suis allé habillé comme cela, ce n’est p a s v ra i m e n t l e s o u c i . S i m p l e m e n t , o n n e peut clairement pas y vivre et utiliser les p ro d u i t s l o c a u x , l e s p ro d u i t s d u s o l . Mais la question se pose pour les zones p l u s é l o i g n é e s e t m o i n s i m p a c t é e s vo i r e p a s i m p a c t é e s d u t o u t . Ave c l e s c a p r i c e s d e l a m é t é o e t l e s p l u i e s i n t e r ve n u e s s u r l a I Jean-Luc Lachaume 137 Atelier 6 d e s a vo i r c e q u ’ o n fa i t , e t o ù o n v i t . C e l a fa i t p a r t i e d e s c h o s e s s u r l e s q u e l l e s n o u s t ra va i l l o n s d e fa ç o n à p o u vo i r m o b i l i s e r l e j o u r ve n u l e ma x i mu m d ’ a c t e u r s . L e ma x i mu m d ’ a c t e u r s , c ’ e s t l e s a c t e u r s d e s p o u vo i r s p u b l i c s q u e c e s o i t a u s e i n d e l ’ I R S N , au sein de l’unité spécialisée de pompiers. Ce sont tous les industriels du nucléaire p u i s q u ’ i l s o n t é ga l e m e n t d e s é q u i p e s d e mesure. Il y a tous les acteurs du milieu a s s o c i a t i f, q u i e u x a u s s i , o n t d e s m oye n s d e m e s u r e s q u i s e ra i e n t n é c e s s a i r e s e t q u i s e ra i e n t d e t o u t e fa ç o n s o l l i c i t é e s l e j o u r ve n u . I Alain Simoneau, M o n i q u e S e n é , a ve z - vo u s c o n fi a n c e d a n s c e q u i e s t e n ro u t e ? Y p a r t i c i p e z - vo u s d ’ u n e fa ç o n d ’ u n e a u t r e ? I Monique Sené 138 J ’ a i m ê m e p a r t i c i p é p o u r l e s p ro b l è m e s de calculs. J’y ai participé dans le cadre d u C O D I R PA , C o m i t é D i r e c t e u r Po s t - A c c i dentel. J’ai participé en particulier à un g ro u p e q u i s ’ o c c u p a i t d e s c o n t a m i n a t i o n s a fi n d e vo i r s i o n é t a i t c a p a b l e d e fa i r e quelque chose. On est arrivé à la conclus i o n q u ’ i l fa l l a i t c o n t i n u e r l e s é t u d e s e t q u ’ i l fa l l a i t c o n t i n u e r fo r t e m e n t d e s a vo i r c o m m e n t l e s p ro d u i t s ra d i o a c t i f s p a s s e n t d a n s l ’ e nv i ro n n e m e n t , d a n s l e s o l . I l y a e f fe c t i ve m e n t u n d é fa u t d e c o n n a i s s a n c e , on modélise une pêche comme une toma t e . C e n ’ e s t p a s fo rc é m e n t l a m e i l l e u r e des choses. C e c i d i t , n o u s n ’ a vo n s p a s p a r l é d u fa i t q u ’ i l fa u t a s s o c i e r l e s g e n s . L e g ro s p ro blème est là. Comment dans des choses extrêmement techniques p o u ve z - vo u s a vo i r a c c è s à l a p o p u l a t i o n , e s s a ye r d e d i s c u t e r a ve c e l l e e t d e r é fl é c h i r à c e qu’il peut y avoir dans le post-accidentel ? C e n ’ e s t p a s t o u t à fa i t fa c i l e . L’ A N C L I a c r é é u n g ro u p e q u i e s s a i e , à p a r t i r d ’ e x p é r i e n c e s m e n é e s à G o l fe c h , d e s a vo i r c o m m e n t l e s g e n s r é a g i ra i e n t à u n a c c i d e n t . N o u s e s s a yo n s d e vo i r l e s ma i r e s , t o u s l e s c o n s e i l l e r s mu n i c i p a u x , t o u t e s l e s a s s o c i a t i o n s e t c e q u ’ e l l e s d ev ra i e n t fa i r e p e n d a n t l ’ a c c i d e n t . To u t e m e s u r e ma l p r i s e i m p a c t e d e t o u t e fa ç o n l e p o s t - a c cidentel. C e q u e vo u s fa i t e s a u m o m e n t d e l ’ a c c i d e n t i m p a c t e fo rc é m e n t l a s u i t e d e s c h o s e s . F o rc é m e n t vo u s a l l e z l o u p e r q u e l q u e c h o s e p a rc e q u e vo u s fa i t e s c e q u e vo u s p o u ve z . Vo u s a ve z b e a u a vo i r fa i t d e s s c é n a r i o s , u n a c c i d e n t n e s e p a s s e j a ma i s c o m m e vo u s l ’ a ve z c a l c u l é . Po u r l ’ e x t é r i e u r, c ’ e s t p a r e i l . I l fa u t q u e l e s g e n s p u i s s e n t a vo i r a u m o i n s c o m p r i s q u ’ i l s r i s q u e n t d e s e t ro u ve r e n a c c i d e n t . E t i l fa u t s ’ ê t r e p o s é l e s q u e s t i o n s : c o m m e n t va t - o n l e s é va c u e r ? Q u ’ e s t - c e q u ’ o n va fa i r e ? C o m m e n t e u x , vo n t - i l s r é a g i r ? I l fa u t v ra i m e n t d i s c u t e r a ve c l a p o p u l a t i o n . N o u s e s s a yo n s d ’ a l l e r s u r l e t e r ra i n e t d e mobiliser l’ensemble des gens et des adm i n i s t ra t i o n s . C e l a n e va p a s s e fa i r e t o u t seul. I Alain Simoneau J’ai appris que, dans la zone d’exclusion à T c h e r n o by l , i l y a va i t d e s g e n s q u i fa i s a i e n t pousser des poireaux. I Monique Sené I l s s o n t r eve n u s . A l ’ e x t é r i e u r, i l s é t a i e n t e n t o u r é s d ’ u n e b u l l e . I l s é t a i e n t l e s « T c h e rn o by l i e n s » . Q u a n d o n vo u s r e ga r d e , vo u s ê t e s c o n t a m i n é , vo u s n e p o u ve z p a s t ra - va i l l e r, vo u s n e p o u ve z r i e n a vo i r. Pe n d a n t un moment, on leur a donné des subsides, ma i s c e l a n ’ a p a s d u r é . I l s o n t p r é f é r é r e tourner en se disant « après tout qu’estc e q u ’ o n va p e r d r e ? Q u e l q u e s a n n é e s d e v i e ? » . I l y a m ê m e d e s e n fa n t s . Po u r l e s a n i ma u x , a p p a r e m m e n t , i l s p ro l i f è r e n t j u s t e m e n t p a rc e q u e c ’ e s t u n e z o n e o ù i l n ’ y a p a s t ro p d e f u s i l s . C e c i d i t , c o m m e n o u s n ’ a vo n s p a s i d é e d e c e q u ’ i l y a va i t a va n t , d e m ê m e p o u r l a fa u n e e t l a fl o r e , n o u s n e s o m m e s p a s c a p a b l e s d e d i r e q u e l l e a é t é v ra i m e n t l ’ é vo l u t i o n d e l ’ e n d ro i t . L e s s o u r i s n e v i ve n t p a s l o n g t e m p s , n o u s a vo n s d o n c u n p e u d e ma l à s a vo i r s i l a ra d i o a c t i v i t é ra c c o u rc i t l e u r v i e o u p a s . I l e n va d e m ê m e p o u r l e s ve r s d e t e r r e . C ’ e s t u n s u j e t d i ffi c i l e à é t u d i e r. I Alain Simoneau Nous allons sortir du nucléaire. Philippe P r u d h o n , p e u t - o n é va l u e r e t s u i v r e l e s e f fe t s e nv i ro n n e m e n t a u x d a n s l e d o ma i n e de la chimie ? I Philippe Prudhon N o u s o n a t ro i s p h é n o m è n e s d a n g e r e u x : l ’ e x p l o s i o n , l e t h e r m i q u e e t l e t ox i q u e . J e n e va i s p a s p a r l e r d e l ’ a m o n t p u i s q u e c ’ e s t fa i t a u t i t r e d e l a p r é ve n t i o n , e t s i t o u t é t a i t b i e n fa i t a u n i ve a u p r é ve n t i f, n o u s n ’ a u r i o n s p a s l ’ a va l . M a i s u n e fo i s q u e l e p h é n o m è n e r e d o u t é a l i e u , o n p r é vo i t b i e n e n t e n d u d e s b a r r i è r e s p o u r fa i r e e n s o r t e q u e l a g ra v i t é s o i t m o i n d r e . P r e n o n s p a r e x e m p l e l e s r e j e t s l i q u i d e s , o n va p r é vo i r d e s r é t e n t i o n s p o u r p o u vo i r r é c u p é r e r ces rejets liquides. S’il y a un incendie, on va m e t t r e e n p l a c e d e s b a s s i n s p o u r r é c u p é r e r d e s e a u x d ’ i n c e n d i e d e fa ç o n à c e qu’elles ne sortent pas du site. I Alain Simoneau M a i s q u a n d t o u t c e l a e s t fa i t , e s t - c e q u e l ’ o n p e u t e n c o r e é va l u e r l e s d é g â t s ? Quand l’accident est terminé, est-ce q u ’ o n p e u t s u i v r e e n s u i t e l e s e ffe t s ? I Philippe Prudhon C’est pour dire que tout ce qui a été pris e n c o m p t e , c e n ’ e s t p l u s à fa i r e . N o u s s o m m e s p l u s ma l à l ’ a i s e s u r c e r t a i n s i n c e n d i e s n o t a m m e n t d e ma t i è r e s p e u c o m b u s t i b l e s o ù c e l a va d é p e n d r e d e l a g é o m é t r i e d u b â t i m e n t , d u t a u x d ’ ox y g è n e , vo i r e d u ve n t . D a n s c e c a s - l à , ç a n e s e ra p a s u n i q u e m e n t d e l ’ e a u e t d u C O 2 , vo u s a l l e z a vo i r d ’ a u t r e s p ro d u i t s . M o n c o l l è g u e d e l ’ I N E R I S p e u t e n p a r l e r é ga l e m e n t : d a n s l e c a d r e d u p ro g ra m m e O R G AC TO U P O S T, u n c e r t a i n n o m b r e d e c h o s e s p e u ve n t ê t r e s i mu l é e s p o u r vo i r, e n fo n c t i o n d e l a n a t u r e d u fe u , q u e l s p e u ve n t ê t r e l e s i m p a c t s , n o t a m m e n t e n t e r m e s d e p ro d u i t s p o u va n t être émis dans l’atmosphère. I Alain Simoneau Vo u s m ’ a ve z p a r l é d ’ u n e c i n q u a n t a i n e d e g ro u p e s d e t ra va i l s u r l e p o s t - a c c i d e n t e l . C ’ e s t u n t r è s j o l i s i g l e « O R G AC TO U P O S T » : O rga n i s a t i o n d e s a c t e u r s e t d e s o u t i l s p o u r la gestion des impacts post-accident des accidents industriels non nucléaires sur l e s p o p u l a t i o n s e t l ’ e nv i ro n n e m e n t . E s t - c e q u e c e t ra va i l l e c o n c e r n e l ’ é va l u a t i o n e t l e s u i v i d e s e ffe t s e nv i ro n n e m e n t a u x ? I Philippe Prudhon C e t ra va i l e s t fa i t s o u s l ’ é g i d e d e l ’ I N E R I S . J e l a i s s e ra i l ’ I N E R I S e n p a r l e r p u i s q u e c ’ e s t eux qui coordonnent ces études. Bien ent e n d u , n o u s e n fa i s o n s p a r t i e p a rc e q u e c e s o n t d e s s u j e t s d e p l u s e n p l u s i m p o r- 139 Atelier 6 t a n t s . Il faut acquér ir encore plus d’informations sur un cer tain nombre de points , en par ticulier sur cer tains feux où il n’est pas toujour s facile de caractér iser avec précision la nature des substances qui vont être émises parce que cela va dépendre d’un cer tain nombre de cr itères que l’on n’aura pas obligatoirement au moment de l’étude. I Alain Simoneau Philippe Hubert, est-ce qu’il y a une mét h o d e d ’ é va l u a t i o n e t d e s u i v i i n s t i t u t i o n nalisée ? I Philippe Hubert 140 L’ I N E R I S t ra va i l l e d e p u i s 4 o u 5 a n s s u r c e sujet, notamment à partir de l’accident d e B é z i e r s . N o u s t ra va i l l o n s d a n s l e c a d r e d e s t ra va u x q u e l e M i n i s t è r e r é a l i s e s u r c e s s u j e t s - l à . O n p a r l a i t d ’ u n e c i rc u l a i r e t o u t à l’heure, c’est dans cette optique que l’on a va i t t ra va i l l é o u e n t o u t c a s c ’ e s t l e r é s u l t a t d e s t ra va u x q u e l ’ o n fa i t . O n l ’ a d é j à d i t p l u s i e u r s fo i s , ma i s j e va i s l e r e d i r e a ve c u n e a u t r e i ma g e . L e p o s t - a c c i d e n t e l , c ’ e s t c o m m e u n ma ra t h o n q u e l ’ o n p o u r ra i t p e r d r e a u m o m e n t d u c o u p d u p i s t o l e t d u s t a r t e r. S i o n ra t e l e d é p a r t , o n a b e a u a vo i r 4 2 k i l o m è t r e s d eva n t s o i , c ’ e s t q u a n d m ê m e fo u t u . D a n s l ’ é va l u a t i o n , p o u r n o u s , i l y a d e u x étapes. La première étape, c’est l’étape d u d é p a r t . C ’ e s t d ’ a vo i r u n c e r t a i n nombre de guides précis pour dire aux g e n s q u i s o n t e n t ra i n d e g é r e r l ’ u rg e n c e « Vo i l à c e q u e vo u s d eve z fa i r e . Vo i l à , o ù vo u s d eve z ra ma s s e r d e s é c h a n t i l l o n s » . Dans l’opuscule réalisé pour nos collègues d e l a c e l l u l e d ’ a p p u i a u x s i t u a t i o n s d ’ u rgence, deux pages indiquent quelles sont l e s q u e s t i o n s q u ’ i l fa u t p o s e r i m m é d i a t e - m e n t p o u r p r é l eve r a u b o n e n d ro i t d e l a t e r r e o u d e s f r u i t s , d e fa ç o n à c e q u e l ’ o n sache ce qui est dû à l’accident et ce qui é t a i t l à a va n t . L e g ro s p ro b l è m e , q u a n d o n p a r l e d ’ i n c e n d i e q u e c e s o i t a ve c d e s p e s t i c i d e s , q u e c e s o i t a ve c d e s d i ox i n e s , q u e c e s o i t a ve c n ’ i m p o r t e q u o i , n o u s n e s o m m e s j a ma i s e n t e r ra i n v i e rg e . N o u s n e s a vo n s j a ma i s e x a c t e m e n t d ’ o ù c e l a v i e n t . D a n s l e n u c l é a i r e , n o u s a vo n s u n p e u p l u s d e c h a n c e s s i j e p u i s d i r e , p a rc e q u ’ i l y a c e r t a i n s ra d i o - n u c l é i d e s q u i s o n t m o i n s f r é q u e n t s d a n s l ’ e nv i ro n n e m e n t . E n s u i t e , l ’ é va l u a t i o n e l l e - m ê m e , c ’ e s t l ’ é va l u a t i o n d e l ’ i m p a c t . Po u r c e l a , i l y a d e u x é t a g e s , j e c ro i s q u ’ i l fa u t ê t r e a s s e z clair là-dessus. Il y a un premier étage où n o u s s o m m e s e n t ra i n d e fa i r e l a m ê m e é va l u a t i o n q u e c e l l e q u e l ’ o n fe ra i t s u r u n s i t e p o l l u é . O n a d e s g e n s q u i vo n t v i v r e sur un territoire et des terres contaminés. O n a p a r l é d e M e t a l e u ro p à u n m o m e n t , nous sommes à peu près dans la même sit u a t i o n . C ’ e s t l ’ é t a g e d e l ’ é va l u a t i o n p o u r l e q u e l i l y a d e s m é t h o d e s q u i s o n t é p ro u vées depuis assez longtemps. P u i s i l y a u n d e u x i è m e é t a g e , c ’ e s t l ’ é va l u a t i o n d e s c o n s é q u e n c e s d i ff é r é e s d e l ’ a c c i d e n t l u i - m ê m e . O n a p a r l é d ’ A Z F, i l y a d e s a c o u p h è n e s p a r e x e m p l e . L’ i n s t a n t T 0 va g é n é r e r d e s c o n s é q u e n c e s s a n i t a i r e s p l u s t a r d . I l fa u t y p e n s e r. C ’ e s t u n e a u t r e l o g i q u e d ’ é va l u a t i o n q u i v i e n t s e s u p e rposer à la précédente, les acouphènes, le Po s t - t ra u ma t i c S t r e s s D i s o r d e r, q u i e s t u n point assez important. Quand on est dans d ’ a u t r e s d o ma i n e s , d e s c a n c e r s p e u ve n t s e p ro d u i r e . C ’ e s t d e u x t e m p s : l e t e m p s T 0 o ù i l fa u t b i e n c o n n a î t r e c e q u i e s t s o r t i e t l e t e m p s u n p e u p l u s d i ff é r é , d a n s l e q u e l i l fa u t à l a fo i s r e ga r d e r c e q u i s e p a s s e s u r le site pollué et ce qui se passe en termes de conséquences. I Alain Simoneau L o ï c K é ra m b r u n , d a n s l e d o ma i n e d e l a p o l l u t i o n ma r i n e p é t ro l i è r e , i l e x i s t e u n fo n d s d ’ i n d e m n i s a t i o n m o n d i a l , l e F I P O L (Fonds internationaux d’indemnisation p o u r l e s d o m ma g e s d u s à l a p o l l u t i o n p a r l e s hy d ro c a r b u r e s ) . J ’ i ma g i n e q u e l e s a s s u ra n c e s p r i v é e s v i e n n e n t e n c o m p l é m e n t o u s e r é f è r e n t a u x d é c i s i o n s , a u x é va l u a tions qui sont prises par le FIPOL. Dîtesnous comment cela se passe. Sur quel p r i n c i p e d ’ é va l u a t i o n e t s u r q u e l l e m é thode de suivi s’appuient le FIPOL et les c o m p a g n i e s d ’ a s s u ra n c e p o u r i n d e m n i s e r les personnes lésées ? I L o ï c Ke r a m b r u n Je ne suis pas le meilleur spécialiste en la ma t i è r e . L e F I P O L , c ’ e s t v ra i , s e r t à i n d e m n i s e r u n i q u e m e n t l e s b i e n s ma rc h a n d s , c’est-à-dire tout ce qui est lié à des pertes, pour la pêche, des choses comme ça. Si un pêcheur ne peut pas sortir pend a n t t ro i s s e ma i n e s o u u n m o i s , l ’ i n d e m n i s a t i o n va ê t r e b a s é e s u r l e s fa c t u r e s q u ’ i l a va i t d e s a n n é e s p r é c é d e n t e s , q u ’ i l p e u t m o n t r e r e t s u r c e q u ’ i l p e u t p ro u ve r. Po u r l e s r e s s o u rc e s n a t u r e l l e s , c ’ e s t u n p e u p l u s c o m p l i q u é . C e l a é vo l u e a u s s i , ma i s d i s o n s que cela ne rentre pas dans le FIPOL qui va fi n a n c e r c e r t a i n e s é t u d e s p o u r é va l u e r l’impact. C’est un peu compliqué et je ne suis pas expert. Il y a eu le plein de choses d e p u i s l ’ E r i k a e t l e s c h o s e s vo n t e n c o r e é vo l u e r. I Alain Simoneau Vo u s r eve n e z d e s E t a t s - U n i s d a n s l e c a d r e d e l ’ a ffa i r e M a c o n d o d u « d e e p wa t e r h o r i z o n » . Vo u s m ’ a ve z p a r l é d u N a t u ra l R e s o u rc e D a ma g e A s s e s s m e n t ( N R DA ) . Qu’est-ce que c’est ? I L o ï c Ke r a m b r u n J ’ e n a i p a r l é p a rc e q u e c ’ e s t à l ’ o p p o s é d u F I P O L , q u i l u i e s t u n e c o nve n t i o n i n t e rn a t i o n a l e s i g n é e p a r l e s E t a t s a ve c d e s règles et des seuils, des limites (ce qui a été j u s t e m e n t l e g ra n d d ra m e p e n d a n t l ’ E r i k a , c ’ e s t u n fo n d s l i m i t é ) . A p r è s , i l fa u t p a r t a ger pour que toutes les victimes aient 60% ou 40% de la somme. Cette limite est aussi d i s c u t é e a u n i ve a u d e s E t a t s m e m b r e s . L e N a t u ra l R e s s o u rc e D a ma g e A s s e s s m e n t ( N R DA ) e s t c o m p l è t e m e n t d i ff é r e n t . L e s américains n’adhèrent pas au FIPOL. C’est u n d e s ra r e s E t a t s à n e p a s c o t i s e r o u a d h é r e r. I l s n ’ o n t p a s s i g n é c e t t e c o nve n t i o n i n t e r n a t i o n a l e . I l s o n t l e u r p ro p r e s y s t è m e q u i e s t « p o l l u e u r- p a ye u r » . D a n s c e c a s , l e fo n d s n ’ e s t p a s d u t o u t l i m i t é . L e s s o m m e s qui ont été dépensées à la suite de l’Exxon Va l d e z e t ma i n t e n a n t a ve c B P s o n t c o m p l è t e m e n t à l a c h a rg e d e s p o l l u e u r s . I l y a t o u t e u n e p ro c é d u r e . S e l o n l e s c r i tères, des enquêtes sont conduites sur le t e r ra i n a ve c d e s b i o l o g i s t e s e t d e s é c o nomistes. Ils ont un système qui leur est p ro p r e p o u r d ’ é va l u e r l a p e r t e d u m i lieu naturel (Combien coûte un canard ? C o m b i e n c o û t e l e m è t r e c a r r é d e ma ra i s ? e t c . ) a ve c d e s c r i t è r e s é c o n o m i q u e s . I l s s e mettent ensuite d’accord sur un coût. Puis, l e p o l l u e u r d o i t p a ye r. I Alain Simoneau Le CEDRE est-il mis à contribution ces d e r n i è r e s a n n é e s p o u r s u r ve i l l e r l ’ é t a t d e s fo n d s ma r i n s , e n p a r t i c u l i e r d a n s l e s 141 Atelier 6 quelques milles nautiques auprès des c ô t e s e t s u r l a c ô t e e l l e - m ê m e , p o u r vo i r l ’ é vo l u t i o n d a n s l e t e m p s e t l e s e ffe t s d e s pollutions du Prestige et de l’Erika ? I L o ï c Ke r a m b r u n Non, la mission du CEDRE n’est pas de fa i r e d e s é t u d e s d ’ i m p a c t s é c o l o g i q u e s . Il y a l’IFREMER et plein d’instituts beaucoup plus armés et dont c’est le métier et l e s a vo i r- fa i r e . N o u s , à c e t i t r e - l à , a u s e rv i c e d e s u i v i d e s p o l l u t i o n s , n o u s e s s a yo n s d ’ o p t i m i s e r l e s u i v i m i s e n p l a c e e t l e p ro gramme de suivi à par tir d’un constat tout simple. Si on remonte à l’Amoco-Cadiz, le programme de suivi écologique a été mis en place dans les 15 jours. Donc tout d e s u i t e l e s g e n s s o n t a l l é s s u r l e t e r ra i n . I l s o n t fa i t d e s é t u d e s e t d e s é va l u a t i o n s . A u n i v e a u s c i e n t i fi q u e , c ’ é t a i t u n e é t u d e très riche. Il a été mis en place plein de c h o s e s p o u r b i e n o b s e r v e r e t ra p p o r t e r les pollutions. I Alain Simoneau To u t l e m o n d e y a a c c è s ? I L o ï c Ke r a m b r u n 142 B i e n s û r. I l y a e u p l e i n d e c o n f é r e n c e s e t des articles de journaux. Quand on comp a r e a ve c l ’ E r i k a , i l a fa l l u u n a n a va n t d e m e t t r e e n p l a c e u n p ro g ra m m e . Pe n d a n t un an, on a perdu plein d’échantillons p a rc e q u e l ’ e nv i ro n n e m e n t a b e a u c o u p c h a n g é . L e s s c i e n t i fi q u e s o n t ma i n t e n a n t d e s p ro g ra m m e s d e r e c h e rc h e . I l s n e vo n t pas partir comme ça sur un événement. I l s n e p e u ve n t p a s a b a n d o n n e r l e s t ra va u x s u r l e s q u e l s i l s vo n t ê t r e é va l u é s à l a fi n d e l ’ a n n é e . I l s n ’ o n t p a s d e fi n a n c e m e n t non plus pour inter venir sur un événe- m e n t a c c i d e n t e l . C e q u i fa i t q u e l ’ o n a perdu beaucoup de choses pendant l ’ É r i k a . M a i s i l fa u t d i r e a u s s i q u e l ’ É r i k a , ce n’était pas non plus l’Amoco-Cadiz. L’ É r i k a , c ’ é t a i t u n a u t r e t y p e d e p o l l u a n t . La pollution n’était pas catastrophique. Po u r e n a vo i r d i s c u t é , c e l a a é t é r e c o n nu. Ce n’est pas un impact énorme, en comparaison. Je l’ai dit dès le départ. La ministre l ’ a va i t d i t t o u t d e s u i t e , c e n ’ é t a i t p a s une catastrophe écologique par ra ppor t à c e q u ’ i l a va i t p u y a vo i r. O n n ’ a j a m a i s vu d’hécatombes de tas d’animaux, de ver s , d’inver tébrés sur les plages , comme cela a été le cas pendant l’Amoco-Cadiz. Il y a eu bien sûr des impacts, principalement sur les oiseaux. I Alain Simoneau M a i s c e l a n ’ a p a s p u ê t r e é va l u é , m e s u r é e t s u i v i a u s s i e ffi c a c e m e n t q u ’ a p r è s l’Amoco-Cadiz, pour des raisons si j’entends bien humaines et organisationnelles. I L o ï c Ke r a m b r u n Oui, d’organisation. Ce n’est plus les mêmes choses. Ce n’est plus le même fi n a n c e m e n t n o n p l u s . A u b o u t d ’ u n a n , c e r t a i n s s c i e n t i fi q u e s s a va i e n t d ’ e u x m ê m e s q u e l e s é va l u a t i o n s s e r a i e n t d i f fi c i l e s . A c t u e l l e m e n t , n o u s e s s a yo n s d e trouver des cibles per tinentes , de s’ent e n d r e a v e c l e s d i ff é r e n t s s c i e n t i fi q u e s sur le type de pollution, le type de milieu, e t c e q u ’ i l fa u t fa i r e , p o u r p o u vo i r r é a g i r immédiatement, pour éviter aussi qu’il y a i t d e s é t u d e s e t d e s fi n a n c e m e n t s q u i ne soient pas pertinents. I Alain Simoneau I Alain Simoneau J’ai une deuxième question à propos du s u r- a c c i d e n t . C o m m e n t é v i t e r e t p r é v e nir des pollutions supplémentaires quand l’accident proprement dit est arr ivé à ce qu’on pourrait a ppeler son ter me (je ne sais pas si dans le cas de Tcher nobyl il y a un terme) ? Comment remettre les m i l i e u x e n é t a t ? Q u e p e u t - o n fa i r e d a n s c e s c a s - l à ? E s t - c e q u e vo u s a v e z , l e s u n s e t l e s a u t r e s , t r a va i l l é l à - d e s s u s ? J e a n Luc Lachaume, la question n’est-elle pas un peu subtile ou futile quand on parle d’une zone d’exclusion ? La pollution continue, elle n’est pas éliminée. P h i l i p p e H u b e r t , vo u s a ve z t ra va i l l é s u r l e s r i s q u e s c h ro n i q u e s q u i s u i ve n t u n a c c i d e n t . I Jean-Luc Lachaume Dans le cas d’un tel accident, cette question n’a pas vraiment de sens , vu l’amp l e u r. I l p e u t q u a n d m ê m e s e p o s e r d e s problèmes . Par exemple, cet été lor s de l a va g u e d ’ i n c e n d i e s d e fo r ê t s e n R u s s i e , nous nous sommes évidemment posé les q u e s t i o n s d e s a vo i r c e q u i s e p a s s e r a i t s i l e s fo r ê t s i m p a c t é e s v e n a i e n t à b r û l e r et à remettre en suspension des matières radioactives . Cela passe au moins par u n e n t r e t i e n d e s z o n e s d e fa ç o n à é v i t e r, d a n s l e c a s d e s fo r ê t s , l a p r o p a g a t i o n d’incendies. Il y a des mesures simples d ’ e n t r e t i e n d e l a fo r ê t q u i n e g a r a n t i s sent pas qu’il n’y aura pas d’incendie, mais au moins s’il y a un incendie, cela peut permettre d’en limiter les conséquences. Il n’y a pas qu’un accident de t y p e T c h e r n o b y l q u i p e u t a r r i v e r. I l p e u t y a vo i r d e s a c c i d e n t s m o i n s g r a v e s . C e q u ’ i l fa u t é v i t e r d a n s c e s c a s - l à , c ’ e s t qu’après un accident, un deuxième se produise et vienne surajouter à la situation accidentelle. I Philippe Hubert Il y a un certain nombre de gestes qu’il fa u t é v i t e r o u a u x q u e l s i l fa u t p e n s e r a u moment même où on gère l’accident. N o u s a vo n s e nvoy é l ’ u n d e n o s e x p e r t s e n H o n g r i e r é c e m m e n t . Pa r e x e m p l e , i l a é t é d é c i d é d ’ a r ro s e r l e s b o u e s p o u r n e p a s que cela remette en suspension. C’était c l a i r e m e n t u n a r b i t ra g e e n t r e d e s i m p a c t s à long terme et des impacts à court terme. Les conséquences ont été l’augmentation d e s vo l u m e s d ’ e a u x p o l l u é e s . C e t i m p a c t a l l a i t p l u s l o i n . E n m ê m e t e m p s , i l y a va i t u n a va n t a g e à c o u r t t e r m e q u i é t a i t d e ne pas exposer les gens au moment où les boues séchaient. Il est important de réfl é c h i r à l ’ a va n c e à c e t y p e d ’ a r b i t ra g e q u ’ i l y a u ra à fa i r e , q u a n d o n g è r e l ’ a c cident lui-même. C’est une des recomma n d a t i o n s fa i t e s d a n s l e c a d r e d e l a r e c h e rc h e O R G AC TO U P O S T d o n t o n p a r l a i t tout à l’heure. C’est bien d’intégrer dans l e s p l a n s d ’ u rg e n c e e t d a n s l e s é t u d e s d e dangers ce genre d’analyses pour être capable de prendre la bonne décision, pour aller un peu plus loin que l’accident luim ê m e e t s e d i r e « s i j e fa i s ç a , q u e va - t - i l se passer dans deux mois ? ». Cela peut se fa i r e a u m o m e n t o ù o n fa i t l a p r é p a ra t i o n . J ’ a i u t i l i s é l e m o t « p l a n d ’ u rg e n c e » d e fa ç o n à u t i l i s e r u n l a n ga g e u n i ve r s e l e n t r e l e nucléaire et le non-nucléaire puisque les mots ne sont pas les mêmes. C’est le plan q u e vo u s a p p l i q u e z q u a n d i l y a u n a c c i dent dont les conséquences sortent d’une i n s t a l l a t i o n . L’ a u t r e t e r m e q u e j ’ u t i l i s e , c e s o n t l e s é t u d e s q u i s o n t fa i t e s a p r i o r i s u r 143 Atelier 6 les impacts potentiels des accidents. Ce n’est pas exactement la même chose. S u r u n e i n s t a l l a t i o n d a n g e r e u s e , vo u s fa i t e s une étude sur les impacts potentiels d’un a c c i d e n t . P u i s vo u s a ve z a u s s i d e fa ç o n b e a u c o u p p l u s o p é ra t i o n n e l l e c e q u e l ’ o n a p p e l l e u n p l a n d ’ u rg e n c e , l e P P I e ffe c t i ve m e n t . M a i s l e s t e r m e s d é p e n d e n t d e s s e g m e n t a t i o n s a d m i n i s t ra t i ve s . I Alain Simoneau P h i l i p p e P r u d h o n , vo s a d h é r e n t s s o n t - i l s e n t ra î n é s à c e t e x e rc i c e - l à ? S o n t - i l s e n t ra î n é s à ve i l l e r a p r è s u n a c c i d e n t à c e qui n’ait pas de pollution supplémentaire, à fe r m e r t o u t e s l e s va n n e s e n c l a i r. I Philippe Prudhon L a p r e m i è r e c h o s e e t c e l a d o i t ê t r e fa i t à f ro i d , c ’ e s t d e d é fi n i r l e s s c é n a r i o s t y p e s p o u r p o u vo i r d é fi n i r l e s m e s u r e s à m e t t r e e n p l a c e p o u r d i m i n u e r l a g ra v i t é . I Alain Simoneau Pa t r i ck L a ga d e c n o u s a d i t t o u t à l ’ h e u r e q u e l e s s c é n a r i o s n e ma rc h a i e n t j a ma i s . Fa u t - i l q u a n d m ê m e e n fa i r e ? I Philippe Prudhon 144 S i vo u s n e l e s fa i t e s p a s , c ’ e s t p i r e . I l a e x p l i q u é q u ’ i l n e fa l l a i t p a s é l i m i n e r c e socle-là. Ce socle-là doit rester présent. Pa r c o n t r e , i l fa u t s ’ h a b i t u e r à d e s c h o s e s q u e l ’ o n n ’ a p a s l ’ h a b i t u d e d e vo i r. C ’ e s t p l u t ô t u n e r é a c t i o n p a r ra p p o r t à l ’ i n c o n n u , ma i s j e n e va i s p a s r eve n i r s u r c e t t e partie. Au n i ve a u d e s i n d u s t r i e l s , d a n s l e c a d r e des études classiques, un certain nombre d e s c é n a r i i s o n t à d é fi n i r. Pa r ra p p o r t à c e s s c é n a r i i , q u e d o i t - o n fa i r e ? Pa r e x e m p l e , a u n i ve a u d e s r é t e n t i o n s , s i o n c a l c u l e q u ’ i l va y a vo i r 8 0 0 m è t r e s c u b e d ’ e a u p o l l u é e p a r d e s e a u x d ’ i n c e n d i e s , i l fa u t ê t r e capable de récupérer 800 mètres cube d’eau. Si en plus de cela, l’appui décennal ou centennal doit être pris en compte, on calcule la quantité d’eau et là aussi elle doit être prise. On est un peu moins à l ’ a i s e s u r c e r t a i n s fe u x o ù i l n ’ y a p a s q u e d e l ’ e a u e t d u C O 2 , ma i s a u s s i d e s s u b s t a n c e s p e r s i s t a n t e s p o u r l ’ e nv i ro n n e m e n t . C e s e ra p l u s d i ffi c i l e d e l e s g é r e r p a rc e q u e c e t t e fo i s - c i ç a va d é p e n d r e d ’ u n c e rt a i n n o m b r e d e c o n d i t i o n s . O n a u ra b e s o i n d’apprendre un peu plus sur ces types de fe u x , a u t r e s q u e l e s fe u x d ’ i n fl a m ma b l e s , pour lesquels on est plutôt bien armé. I Alain Simoneau C e l a va - t - i l c o n d u i r e l e s i n d u s t r i e l s à c h a n g e r l e u r i n s t a l l a t i o n , à i nve s t i r e t r é i nve s t i r a l o r s q u ’ i l o n t d é j à s u ffi s a m m e n t d e f ra i s sur le dos ? I Philippe Prudhon L a d é ma rc h e e s t c o n t i n u e , c ’ e s t - à - d i r e q u e l e s a u t o r i t é s a d m i n i s t ra t i ve s ( o n e s t d a n s l a p a r t i e p o s t - a c c i d e n t e l l e , u n e fo i s q u e l ’ a c c i d e n t a e u l i e u ) vo n t i m p o s e r à l’industriel un certain nombre de prescript i o n s p o u r d é p o l l u e r, é l i m i n e r l e s d é c h e t s , récupérer les eaux polluées dans les bacs d e r é t e n t i o n p o u r t ra i t e r c e s e a u x . Q u a n d je parlais tout à l’heure de, admettons, 8 0 0 m è t r e s c u b e d ’ e a u x p o l l u é e s , i l va fa l l o i r l e s r e c h a rg e r o u l e s t ra i t e r s u r p l a c e p o u r fa i r e e n s o r t e q u ’ e l l e s s o i e n t a p t e s à être rejetées dans la nature. Ce sont des coûts. La question ne se pose pas de savo i r s i l ’ o n ve u t o u s i l ’ o n n e ve u t p a s . L’ a c c i d e n t e s t l à , i l fa u t fa i r e fa c e fi n a n c i è r e - ment à cet accident, ce qui peut être très p ro b l é ma t i q u e p o u r l ’ e n t r e p r i s e . C ’ e s t l a d e r n i è r e q u e s t i o n q u e vo u s a v i e z a b o r d é , il n’y a peut-être pas d’après, c’est-à-dire q u e l ’ e n t r e p r i s e fe r m e . I Alain Simoneau Mais il y a un « après » pour les populations vo i s i n e s . I Monique Sené C ’ e s t ma n i fe s t e m e n t l ’ a p r è s p o u r t o u t e s l e s a u t r e s p e r s o n n e s . C e s o n t l e s c i t oye n s q u i s e p a ye n t l ’ a c c i d e n t . I Philippe Prudhon C e n ’ e s t p a s ç a q u e j ’ a i vo u l u d i r e . N e m e fa i t e s p a s d i r e p a s c e q u e j e n ’ a i p a s d i t . I Alain Simoneau Po u r u n a c c i d e n t s u r u n r é a c t e u r, c e l a m e p a ra î t u n m o n t a n t a s s e z r i d i c u l e . I Philippe Prudhon C e s o n t e ffe c t i ve m e n t l e s m o n t a n t s p r é v u s p a r l e s c o nve n t i o n s i n t e r n a t i o n a l e s . M a i s le montant en lui-même est assez ridicule. I l c o u v r e l a t o u t e p r e m i è r e u rg e n c e . L e s m o n t a n t s s o n t t r è s i n s u ffi s a n t s . I Alain Simoneau 30 kilomètres de zone d’exclusion, 30 morts i m m é d i a t s d a n s l e c a s d e T c h e r n o by l . E t après, on ne sait pas. I Philippe Prudhon S i vo u s ê t e s p a r t i , q u i r é c u p è r e l e s b a c s ? O n n e s a i t p a s . N o u s d i s i o n s a ve c P h i l i p p e H u b e r t q u ’ a u j o u r d ’ h u i i l n ’ y a p a s d ’ é va l u a t i o n va l a b l e d e s c o n s é q u e n c e s e n t e r m e s fi n a n c i e r s . I Philippe Prudhon I Monique Sené I Monique Sené Vous pouvez ne pas avoir d’activité. Vous pouvez payer tout ce qu’il y a à payer pour faire en sor te que ce soit dépollué, que les déchets soient éliminés dans des conditions extrêmement propres . Pour au tant, l’activité industr ielle peut ne pas re démarrer. Vous avez perdu vos clients . Vous ne pouvez pas faire face à vos obligations commerciales . Vous perdez la r ichesse que vous avez créée. Et les salar iés perdent leur emploi. C’était uniquement mes propos . I Monique Sené Je suis d’accord, vous parlez d’un démantèlement. Ce n’est pas évident à faire. Ceci dit, dans le nucléaire par exemple, ce qui est à peu près prévu, c’est un milliard de frais. Alors je peux vous garantir que Tchernobyl, c’est plus que ça. On ne les a pas , c’est sûr. Mais Tcher nobyl, ce n’est pas ter miné, alor s il faut attendre. Pour la population, le gros problème est effectivement que si l’usine fer me, leur vie va complètement changer. Mais elle est déjà complètement changée parce que nous sommes en train de par ler d’accidents graves . Cela veut dire qu’il faut avoir prévu et discuté avec la population pour qu’elle fasse ce qu’il faut faire. Par exemple, si vous dites que vous devez calfeutrer vos fenêtres , que fait-elle en fait ? Quand vous expliquez qu’il faut arrêter toutes les ventilations , que faites-vous quand vous avez un élevage de poules ? Si vous arrêtez, elles meurent et a près vous aurez tout cela à évacuer. Il y a vraiment toute une sér ie de conséquences à prendre en charge avec la population. 145 Atelier 6 I Alain Simoneau I Monique Sené M o n i q u e S e n é , q u e l l e s s o n t l e s r eve n d i cations des populations et celles des CLI, lorsque l’on parle d’accompagnement a ve c l a p o p u l a t i o n e t d e r e c o n s t r u c t i o n ? O u i , m a i s c ’ e s t l e t e m p s q u ’ i l fa u t . C e l a fa i t 1 4 a n s e t m a i n t e n a n t i l fa u d r a a u s si une dizaine d’années pour mettre en place une stratégie du post-accidentel qui sera acceptée par les populations e t s u r t o u t q u i s e r a p r i s e e n c h a r g e . Vo u s n’êtes pas en train de leur donner des l e ç o n s , vo u s ê t e s e n t r a i n d e l e u r e x p l i q u e r c e q u ’ i l s d o i v e n t fa i r e . I l fa u t a r r i v e r à ce que ce soit une participation, que les gens puissent s’a ppropr ier le sujet, b i e n l e c o m p r e n d r e e t vo u s r e p o s e r d e s q u e s t i o n s e n vo u s e x p l i q u a n t c o m m e n t ils vivent. I Monique Sené L’ a c c o m p a g n e m e n t d e l a p o p u l a t i o n demande qu’il y ait des réunions avec les gens, des explications et qu’on essaie d e c o m p r e n d r e c e q u ’ i l fa u t fa i r e . E n p a r t i c u l i e r, i l fa u t q u e l e s m a i r e s s a c h e n t c e q u ’ i l s o n t à fa i r e , c o m m e n t i l s p o u rront répondre à leur population et comment ils pourront prendre en charge ce q u i v a s e p a s s e r. Po u r l e p o s t - a c c i d e n t e l , ils ont besoin d’être aidés ne serait-ce q u e p o u r l e s m e s u r e s à fa i r e s u r l e t e r r a i n pour savoir quelle est la pollu t i o n . Les CLI participent aux réunions du Com i t é D i r e c t e u r Po s t - A c c i d e n t e l d e l ’ a u torité de sûreté nucléaire. Ils ont créé un groupe pour s’occuper de cela, c’est-àdire qu’ils discutent avec les commissions locales pour savoir comme n t l e s g e n s r é a g i s s e n t s u r l e u r t e r r i t o i r e d e va n t u n accident et comment discuter avec eux. N o u s l e fa i s o n s a u s s i a v e c l ’ I n s t i t u t d e Radioprotection et de Sûreté Nucléaire. Rien ne peut aller vite. Les accidents ne demandent pas , ne préviennent pas . Mais ces questions ont commencé à être sur la place publique depuis Tcher nobyl, même si la pr ise en charge a été longue. I l a fa l l u a t t e n d r e l e s a n n é e s 2 0 0 0 p o u r q u e l e s g e n s c o m m e n c e n t à r é a g i r. I Alain Simoneau Tcher nobyl 86, pr ise en charge 2000. 146 I Alain Simoneau Peut-on accompagner des populations e t l e s fo r m e r, fo r m e r l e u r s é l u s , l e s m a i r e s et les corps intermédiaires qui encadrent ces populations , dans des domaines beaucoup plus « anecdotiques » ? I Monique Sené N’oubliez pas l’argent. Ce n’est pas tout d e fo r m e r, i l fa u t a u s s i s a vo i r q u ’ i l y a u r a d e l ’ a r g e n t à d i s t r i b u e r e t q u ’ i l fa u d r a p r e n d r e e n c h a r g e t o u t c e q u i va s e p a s ser sur le terrain. I Alain Simoneau Jacky Bonnemains par lait tout à l’heure d’une usine à Saint-Cyprien, qui n’est pas vraiment un monstre chimique auquel tout le monde aurait pu penser pour un accident. Dans ces cas-là, peut-on se préparer quand même ? I Philippe Prudhon To u t à l ’ h e u r e , vo u s n o u s i n t e r r o g i e z s u r comment entraîner les r iverains . Je crois q u ’ i l fa u t ê t r e b i e n c o n s c i e n t q u e s i vo u s avez un accident sér ieux, a près ce n’est p l u s d u t o u t c o m m e a va n t . I l y a u n p r o blème d’acceptabilité. Ce n’est plus une question d’entraînement, c’est : « peuto n r e fa i r e u n e a c t i v i t é s u r u n t e l s i t e ? » C’est en ces termes que cela se discute. M ê m e s i vo u s d i t e s a u x p e r s o n n e s « vo u s a l l e z a vo i r d e s e x e r c i c e s d ’ e n t r a î n e m e n t . N o u s a l l o n s fa i r e d e s m e s u r e s s u r l e b â t i » , c e l a n e s u ffi t p l u s . L’ a r g e n t n e s u ffi t p l u s . I l fa u t r e p a s s e r l e c a p d e l ’ a c c e p t a b i l i t é . O r, s u r l e s a c c i d e n t s g r a v e s , c e n ’ e s t p a s possible. Questions de la salle I Jacky Bonnemains , Robin des Bois l’environnement en France. En ce qui concerne la Hongrie, il y a un problème énor me. Il y a 700 000 tonnes de déchets dans la nature qui ne sont p a s i n e r t e s e t q u i s o n t t o x i q u e s . Q u e fa i t on ? Sachant qu’en période de sécher e s s e , i l s vo n t d e v e n i r p u l v é r u l e n t s e t a t taquer les gens au niveau respiratoire. Il y a un autre problème aussi, ce sont les brûlages . Après les marées noires , sans d o u t e a p r è s l a H o n g r i e s i o n l a i s s e fa i r e et après Xynthia, les gens ou les communes brûlent les déchets sans connaître l e u r t o x i c i t é . C ’ e s t u n s u r- a c c i d e n t e t c’est une pollution atmosphérique. I Une personne dans la salle Président de I l y a u n fa c t e u r t r è s i m p o r t a n t a p r è s l e s phases accidentelles ou catastrophes , ce sont les déchets . Revenons plus modestement en France. Xynthia, en une nuit, c’est 12 ans de production de déc h e t s p o u r l e s c o m m u n e s d e l a F a u t e - s u rMer et l’Aiguillon. Les attentats de 2001, en quelques heures, c’est deux ans de d é c h e t s , d e g r a va t s , d e d é m o l i t i o n p o u r l ’ é t a t d e N e w Yo r k . J e n e p a r l e p a s d e s marées noires . Quelles que soient les catastrophes , leur ampleur ou leur s causes , il y a un problème de gestion des déchets . Il est crucial de le prendre en compte p o u r fa c i l i t e r l e r e t o u r à l a n o r m a l e d a n s la tête des gens, pour diminuer le stress traumatique parce que se sont leur s déchets , leur s photos , leur s archives , leur canapé. La gestion des déchets après l e s c a t a s t r o p h e s d o i t v r a i m e n t fa i r e l ’ o b jet d’une recherche et d’une doctr ine. Cela est en cours après le Grenelle de N o u s a vo n s g l i s s é d u p o s t - a c c i d e n t a u post-catastrophe. Je ra ppelle que des accidents pour lesquels il y a du postaccidentel, c’est plutôt de l’ordre de un par mois que de un tous les 10 ans. Certes, l’ampleur n’est pas la même, m a i s l e s r é fl e x e s à m e t t r e e n p l a c e s o n t les mêmes . On a de plus en plus systématiquement des instructions judiciaires qui d e m a n d e n t d ’ é va l u e r l e s c o n s é q u e n c e s post-accidentelles. C’était exceptionnel e t c e l a d e v i e n t , n o n p a s r o u t i n i e r, m a i s c’est nor malement associé à un accident. La circulaire qui est préparée n’est p a s fo r c é m e n t fa i t e p o u r « T c h e r n o b y l I I I l e r e t o u r » . E l l e e s t a u s s i fa i t e p o u r c e q u e l ’ o n r e n c o n t r e d e fa ç o n t r è s r é g u l i è r e malheureusement. Elle concer ne aussi des accidents plus ordinaires mais sur l e s q u e l s i l y a d u p o s t - a c c i d e n t à g é r e r. 147 Atelier 7 C’est un peu plus complexe pour nous, mais on se connaît depuis tellement longtemps que l’on y arrive. Il y a forcément des perfectionnements à apporter. C’est une organisation en cours, même si c’est un travail en commun de la part de ces services qui n’est sûrement pas parfait. Ce n’est pas encore le guichet unique que l’on pourrait imaginer, mais cela va dans le bon sens. Réforme de l’Etat et ICPE Réforme • inspection • animat i o n • r é g u l at i o n • c o n t r ô l e p é dag o g i e • DREAL • DRE • D I REN DR I RE • D I RECCTE IPhilippe Lefait, Journaliste animateur Nous sommes réunis pour discuter de l’Inspection des Installations Classées pour la protection de l’environnement et de la réforme de l’Etat. Monsieur le Maire, j’ai envie de vous demander de commencer. Exposez votre perception d’élu local en matière d’Inspection des Installations classées pour la protection environnement. IJean-Claude Weiss, Maire de Notre-Damede-Gravenchon, membre de l’AMARIS Ma perception d’élu local est un peu particulière parce qu’à Port-Jérôme cela fait longtemps qu’on le fait, qu’on perçoit les choses les uns des autres. J’ai bien aimé la phrase qu’a prononcée Jacky Bonnemains tout à l’heure. Il disait qu’il serait intéressant de faire des jeux de rôles pour comprendre les préoccupations et les contraintes des partenaires. Ce serait intéressant. On pourrait essayer de le faire un jour pour s’amuser. 148 J’ai l’impression d’avoir toujours œuvré à PortJérôme pour essayer de « partenarier » tout le monde de manière à ce que ça se passe au mieux. Je constate que c’est un peu le sens de la réforme. On peut la percevoir comme cela puisque la prise en compte des contraintes ou des problèmes environnementaux aujourd’hui est telle que l’on ne peut pas faire l’économie d’une réflexion systématique sur l’environnement à chaque fois que l’on réfléchit dans n’importe quel domaine, que ce soit en urbanisme ou dans les risques. C’est une nécessité. Je suis forcé de constater que même si tout n’est pas parfait, il y a un effort manifeste des uns et des autres. Dans cette nouvelle configuration des services, il y a quelques difficultés pour trouver dans l’organigramme la bonne personne, il n’y a pas non plus toujours le même site géographique pour tout le monde. Tout cela complique un peu, mais on est tous contraints par des choses matérielles de ce genre. Pour ma part, ma perception est que c’est un effort qui va dans le sens que j’aurais pu souhaiter tel qu’on le vit à Port-Jérôme. C’est plutôt positif. IPhilippe Lefait Vous trouvez que l’inspection fonctionne bien et qu’elle est efficace quand on a trouvé la bonne personne ? IJean-Claude Weiss On a peut-être un peu de mal à trouver le bon interlocuteur depuis la fusion DRIRE-DIREN-DRE. IPhilippe Lefait Claude BARBAY, sur l’Inspection des ICPE, comment percevez-vous, à votre niveau d’expertise et de responsabilité, la difficulté, si il y en a, l’état actuel des choses en tout cas ? IClaude Barbay, Coordinateur environnement Haute-Normandie Nature Environnement Des agents de l’inspection générale nous ont interrogé sur la première intégration, celle des DIREN et des DRIRE. Si à cette époque le bilan était plutôt positif, aujourd’hui, j’ai une impression plus mitigée. Je comprends ce que dit Monsieur Weiss et ce que souhaitent d’autres, comme le guichet unique. Mais il semble que l’on touche les difficultés qui étaient prévisibles et que nous avions soulignés. On se trouve face à des moyens de moins en moins importants. On sent les insuffisances. On commence de se dire que certes on va avoir les gens les mieux formés, on va avoir un cadre réglementaire tout à fait adapté, mais auront-nous toujours les gens disponibles pour faire ce qu’il faut au bon endroit au bon moment ? Il suffit de reprendre, par exemple, les priorités gouvernementales en matière d’inspection pour se dire : « alerte là-dessus ». Il y a des questions qui sont laissées sous le boisseau et qui n’apparaissent qu’après un accident. On a évoqué tout à l’heure la question des canalisations. C’est l’un des thèmes que l’on retrouve systématiquement au SPPPI, dans chaque conseil d’orientation. Tout le monde est d’accord, il faut surveiller les canalisations. Mais depuis quand sommes-nous conscient de cela ? Depuis l’accident de La Crau. Auparavant, il était impossible d’aller au-delà de la réponse traditionnelle, à savoir : « c’est pris en charge » et on avait un discours de la méthode. Ce qui a été dit par le Grand Témoin me semble vraiment essentiel. Il faut aller dans l’imprévisible, en particulier pour tout ce qui est exercice, pas pour le plaisir. On a évoqué les PPI, que ce soit pour le nucléaire, les incidents, les accidents chimiques ou autres, nous sommes toujours dans des exercices précontraints, extrêmement limités. On a minimisé les risques. Cela donne quand même un enseignement puisque cela oblige les services à travailler entre eux. Mais il n’y a aucun élément inattendu. Or, dans une crise par définition, on aura de l’inattendu qui nous mettra à mal. IPhilippe Lefait Nicolas Fourrier, j’aimerais que vous me parliez de votre métier, en tout cas de la manière dont vous l’envisagez aujourd’hui. Avec les réformes et avec cette réglementation de plus en plus pressante et de plus en plus élaborée, comment votre métier évolue-t-il ? INicolas Fourrier, Secrétaire national du Syndicat National des Ingénieurs de l’Industrie et de Mines Les ingénieurs de l’industrie et des Mines sont des fonctionnaires d’Etat qui exercent pour par- 149 Atelier 7 tie, mais pas seulement, une mission d’inspection des Installations Classées. Ils ont aussi un rôle d’animation et de régulation économique plus large. La problématique de réduction des risques est majeure. On est sur un sujet sérieux sur lequel la société a de vraies attentes, sur lequel les industriels ont des engagements et sur lequel la réglementation se complique et se durcit. Cela nécessite de professionnaliser le métier, de garder un nombre suffisant d’inspecteurs et ce n’est pas moi qui a parlé le premier de l’inéquation de mission-moyens, j’en suis content. Cela oblige aussi à élargir et à aller plus dans la concertation et dans l’acceptabilité, dans le partage. C’est le principal changement de l’inspection : Faire connaître et être pédagogue sur nos décisions, proposer au préfet des choses raisonnables, tenir compte du possible quand on doit appliquer les textes. Cette nécessité de mieux faire comprendre les décisions de l’Etat, de mieux expliquer les postures techniques, de mieux identifier les dangers et de mieux faire comprendre les mesures de prévention ou de réaction, c’est le principal changement dans l’inspection depuis Toulouse. IPhilippe Lefait Est-ce que chez vos interlocuteurs vous vous apercevez la même croissance ou la même évolution de l’expertise, notamment chez les associations qui sont de plus en plus expertes dans la matière traitée ? INicolas Fourrier 150 Absolument. On a un effet « taille ». Les grandes entreprises et les grandes associations ont développé une réelle expertise extrêmement utile dans les contrepoids ou les contre-pouvoirs qui sont nécessaires dans toutes formes de compromis. Mais nous avons aussi de grands vides où l’inspection porte seule l’expertise et où l’acceptation par les riverains ou par les usagers locaux, par les décideurs est extrêmement importante. L’inspection a pris, depuis quelques années, une posture plus pédagogue, plus au contact du terrain et de proximité. Nous parlons de toutes les instances de concertation, les PPRT ont mis l’accent là-dessus. Ce n’est pas nouveau pour le corps des Ingénieurs de l’Industrie et des Mines puisque de tout temps, on a alterné les phases de développement économique dans nos carrières et les phases de contrôle plus strict. La bonne idée, je pense, était de séparer sur un même poste les deux missions. Mais pouvoir continuer dans une carrière à alterner les postes d’animation, de régulation et les postes de contrôle, cela rend aussi plus facile une vision à la fois stricte de l’application des textes, mais aussi de mesurer et être pédagogue dans nos propositions. IPhilippe Lefait Jean-Jacques Dumont, vice-président délégué du Conseil Général de l’industrie, de l’énergie et des technologies, quel est votre point de vue ? IJean-Jacques Dumont, Vice-président délégué du Conseil Général de l’industrie, de l’énergie des technologies Je vous remercie de me donner l’occasion avant tout de rappeler brièvement ce qu’est le Conseil Général pour ceux qui ne le connaîtraient pas puisqu’il est encore très jeune. Il a été créé au début 2009, par la fusion du Conseil Général des mines et du Conseil Général des technologies de l’information et ce, dans le cadre de la fusion des corps des mines et des télécommunications. Comme le Conseil Général des mines avant lui, cet organisme de conseil, d’inspections qui est placé auprès du Ministre de l’économie qui le préside, est mis à disposition permanente du Ministre de l’écologie. Nous avons un sujet très important dans cet atelier, en liaison avec des changements majeurs qui sont intervenus dans l’organisation administrative de ce morceau d’Etat déconcentré qui comportait jusqu’à il y a peu de temps, un certain nombre de services, les DRIRE, les DIREN, les DRE. Il a été bouleversé et « re-structuré » par la création des DREAL. Mais il n’y a pas que les DREAL. Il ne vous a pas échappé que les DRIRE ont été coupés. Il y avait en gros 80% qui s’occupaient de questions régaliennes, de contrôles réglementaires, et parmi lesquelles bien sûr l’Inspection des Installations Classées, puis 20% qui s’occupaient de développement économique, pour faire court. Les 80% avec les DIREN et les DRE ont constitués les DREAL. Les 20 % autres ont été intégrés dans d’autres nouveaux services de l’Etat, que sont les Directions Régionales des Entreprises de la Concurrence de la Consommation du Travail et de l’Emploi (DIRECCTE) et qui visent à réunir tout ce qui touche ou s’adresse à l’entreprise d’un point de vue économique. Il y avait au sein des DRIRE une fonctionnalité qui était présente par construction. Cette interface entre les approches environnementales et les approches économiques. C’est quelque chose qu’il faut que l’Etat conserve en tant que fonctionnalité dans la nouvelle organisation. Qu’on le veuille ou non (et je crois qu’on le veut, on parle de développement durable), les questions dont on parle ici sont au carrefour de plusieurs logiques : une logique de protection de l’envi- ronnement, de protection du public, de la santé publique etc., puis une logique économique. Il me paraît tout à fait important que l’Etat s’attache à faire fonctionner la nouvelle organisation de façon à maintenir cette interface. Cela veut dire faire travailler ensemble sur des sujets d’intérêts communs les DREAL et les DIRECCTE. Cela passe, bien entendu, par une action volontariste des préfets de région et de département et par des impulsions données par les niveaux centraux. Cela passe aussi par de la mobilité des personnes entre les deux familles de services. Actuellement cette mobilité existe et il faudra veiller à la préserver. Il y a un deuxième sujet puisque nous en sommes à regarder quelles sont les implications des changements importants d’organisation administrative. Cela a été un sujet fort débattu. C’est le lien entre le niveau régional et le niveau départemental au sein des services de l’Etat. Cela me paraît être un sujet crucial, parce que l’Inspection des Installations Classées entremêle de façon absolument indissociable des composantes régionales, des apports des structures régionales voire parfois interrégionales quand il y a des problèmes techniques pointus, et puis des apports et de la présence sur le terrain. Le bon fonctionnement et l’efficacité de l’inspection sont liées en particulier au bon fonctionnement de cette articulation, ce qui implique que les préfets et les DREAL veillent particulièrement à cela. Encore faut-il veiller à ce que les administrations déconcentrées de l’Etat en département continuent d’offrir aux agents de l’Etat des postes intéressants, des responsabilités avec des initiatives. 151 Atelier 7 IPhilippe Lefait IJean Des Deserts Jean Des Deserts pourriez-vous nous faire une synthèse de vos idées majeures sur le thème du jour ? BP dans le golfe du Mexique a donné un contreexemple majeur : pour gagner 1 million de dollars ils ont perdu 100 milliards. Le calcul est vite fait. Même si vous êtes en crise, si vous faites des impasses de ce type-là, à mon avis vous avez tout perdu. Le mécanisme d’un industriel responsable est de s’auto-assurer, d’avoir des mécanismes internes. Monsieur a dit qu’il fallait une réglementation par exemple pour les canalisations, pour éviter qu’il y ait des surprises. Ce n’est pas faux. Pour reprendre l’exemple de l’accident de La Crau, il y a un an (cette canalisation s’est ouverte le 7 août 2009), on a tout de suite donné notre accord pour implanter un système de gestion de la sécurité pour les canalisations. C’est imposé dans les ICPE, mais ça ne l’était pas pour les canalisations. En tant qu’industriel, quand je suis arrivé à ce poste il y a juste un an, le jour même de l’accident, je ne comprenais pas que cela n’existait pas. S’il y avait eu un bon système de gestion de la sécurité bien appliqué, peut-être que cet incident (je ne le garantis pas non plus) aurait pu être évité. IJean Des Deserts, Responsable sécurité risques industrielle de l’Union Française des Industries Pétrolières Je remplace et représente Monsieur Gantois, délégué général de l’UFIP, retenu par une crise dont vous avez sans doute entendu parler en ce moment d’approvisionnement de certains produits pétroliers. Je représente de facto un peu les industriels. J’ai retrouvé une enquête qui avait été menée par le MEDEF sur la perception de 660 sites Seveso qui avaient répondu à celle-ci. Elle portait sur leur perception des DREAL (les DRIRE à l’époque). De façon surprenante, 71% des gens considéraient qu’il y avait de bonnes relations entre les industriels et les DREAL. C’était quelque chose d’assez encourageant. Je voudrais faire un détour d’ordre général. Un industriel responsable (peut-être qu’il y en a qu’ils ne le sont pas) doit toujours s’attacher à réduire les risques à la source. Cela a été dit plusieurs fois, je le rappelle mais le danger fait partie de la vie. Le risque zéro n’existe pas. IPhilippe Lefait 152 En la matière, une question SMS a été posée ce matin sur l’idée qu’en période de crise l’industriel pouvait être plus préoccupé par gagner de l’argent encore que de protéger l’environnement. Le deuxième point est très général, il y a des mécanismes auto-assurantiels, ils sont absolument nécessaires, mais il faut qu’ils soient aussi économiquement justifiés. L’analyse coût-bénéfice nous semble indispensable. Ces derniers temps, nous avons discuté des arrêtés ministériels, notamment de l’arrêté « vieillissement ». Je participe à ces discussions et je peux dire que nous avons une oreille qui a été jusqu’à présent assez attentive de la part de la DGPR et du sous-directeur des risques accidentels, pour intégrer cette analyse coût-bénéfice, pour ne pas demander des choses qui n’auraient pas de bénéfice, inférieur à un niveau de 10 moins 5, la probabilité de risques résiduels qui de toute façon, à mon avis, fait partie de la vie. En préparant cette réunion, j’ai calculé notre probabilité à chacun d’entre-nous de mourir aujourd’hui. Quel est le risque que l’on meurt aujourd’hui. Il est de l’ordre de 10 moins 4 à 10 moins 5. Si vous vivez 100 ans, cela fait 36 500 jours. Un événement certain, c’est notre mort. On va mourir 1/36500, cela fait à peu près 2 à 3 fois 10 moins 5. C’est le risque de la vie… J’avais un autre point, par rapport aux jeunes inspecteurs des Installations Classées. On apprécie beaucoup leur assistance. Je pense qu’on mène un combat commun. J’appellerai cela l’adversité. Nous sommes preneurs de tout ce que pourraient nous apporter les ingénieurs. Mais nous trouvons parfois qu’il y a des gens très jeunes (c’est normal, tout le monde a commencé une carrière) qui vont un peu trop vite. Il y a eu dans le passé des mises en demeure ou des procès-verbaux un peu par manque de compétences. On souhaiterait qu’ils soient bien cornaqués par des ingénieurs plus chevronnés. IPhilippe Lefait Le tutorat est nécessaire chez les inspecteurs. Je vais demander à Ian Conroy qui représente ici l’agence écossaise de protection de l’environnement, de bien vouloir parler de sa perception de l’inspection des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement. IIan Conroy, Process Engineering Manager de SEPA (Royaume-Uni) Excusez-moi d’abord, je vais prendre la parole en anglais parce que quand j’étais à l’école j’ai dû choisir entre le français et le désir d’être un ingénieur, et j’ai décidé d’être un ingénieur. Vous n’êtes pas les seuls à être dans la situation où vous êtes, puisque nous, en Ecosse, nous avons exactement les mêmes problèmes concernant les relations avec l’administration et les sites classés. Pour l’instant, nous sommes confrontés au problème de la perception que le public a de l’environnement et de la protection de l’environnement. Et la crise économique est apparue. Nous venons d’apprendre que nous aurons une réduction de 18% des coûts consacrés à la protection de l’environnement et à la sécurité dans les installations. Nous avons développé une nouvelle vision. Cela veut dire que nous allons nous occuper avant tout des risques élevés. Pour cela, nous devons avoir de nouveaux instruments, de nouveaux outils et de nouvelles initiatives. Nous avons pour un outil qui est un moyen d’impliquer l’industrie. Nous l’appelons les « 6 C ». Si vous voulez, c’est une échelle. Elle commence avec ce que l’on appelle le « champions » que nous montrons en exemple de bonnes pratiques. Ensuite, ceux qui sont « compliant » (conciliants) respectent les termes de leur permis. Il y a le « confused » (qui est confus), c’est celui qui devrait savoir qu’il peut mieux faire, mais ne le sait pas (même s’il est de bonne foi). Vous avez le « careless » qui connaît les règles, mais malheureusement n’arrête pas de faire des erreurs. Vous avez le « chancer »(qui tente sa chance), celui que s’il pense qu’il peut s’en tirer, il va essayer, qui suit la politique du « pas vu pas pris ». Enfin, il 153 Atelier 7 y a le « criminal » qui passe outre les industries légales en opérant sur le marché noir. Ce sont ces entreprises-là que nous cherchons à épingler. IPhilippe Lefait Avez-vous des listes d’entreprises dans chacune des cases ? Les entreprises ont-elles envie, dans l’état actuel du système, de changer de case, de progresser ? IIan Conroy Nous avons introduit un système pour évaluer les entreprises. Les « very poor », ceux qui ne réussissent vraiment pas bien, ce sont les « chancer » ou les « careless » qui s’en fichent. Les vraiment bons, ce sont « champion ». Nous ne prenons pas en compte les « criminal » parce que de toute façon ils n’auront pas de permis. IPhilippe Lefait Est-ce que ce sont des outils dont les résultats seront rendus publics ? Est-ce que ce sont des outils qui impliquent des obligations aux entreprises ? IIan Conroy Ce système d’évaluation a été publié l’année dernière pour la première fois, il y a à peu près un an. Il y a eu des initiatives prises dans le cadre du IPPC et dans le cadre des directives cadre sur les déchets et sur l’eau. Ceux qui sont dans la case « poor » ou « very poor », ceux qui ne concurrentiels. Les inspecteurs doivent réaliser un travail très intensif, qui couvre beaucoup d’aspects comme, par exemple, les relations qu’ils ont avec le public et avec toutes les parties prenantes. En parallèle de ces inspections, il y a un travail important que représente la réglementation. Nous avons l’intention de simplifier la législation en passant d’une centaine de lois à peu près une dizaine. Ce qui est important, et le message que je voulais vous faire passer, c’est que nous sommes tous dans le même cas. On est dans cette crise économique avec pas mal de difficultés au niveau du secteur public et du secteur privé. Nous avons tous les mêmes défis. Si vous voulez d’autres informations, vous avez l’adresse du site Internet (www.sepa.org.uk). IPhilippe Lefait Qui plus est, j’ai cru comprendre que la GrandeBretagne s’était engagée dans une période de rigueur assez dure. C’est comme dans les journaux télévisés, quand il y a un sujet à faire sauter, c’est la culture. On peut imaginer encore aujourd’hui, que dans certaines politiques gouvernementales, l’environnement n’apparaisse pas comme étant tout à fait et toujours prioritaire. Questions de la salle réussissent pas très bien, vont devoir payer da- IUne personne de la salle vantage à la SEPA s’ils veulent conserver leur J’adresse ma question à Ian Conroy, à propos de la classification, la matrice des classifications des industriels, si je peux l’appeler ainsi. Appliquez-vous le régime d’enregistrement pour les permis. S’ils sont excellents, ils bénéficient d’une réduction. Même si maintenant nous regardons 154 que nous regardons avant tout, c’est s’ils sont toutes les qualifications pour les inspecteurs, ce « bons » citoyens, les industriels qui ont un bon classement ? Leur donnez-vous le régime d’auto-surveillance tel que nous le pratiquons en France ? IIan Conroy Nous appliquons différents systèmes selon qu’il s’agisse d’un haut risque, d’un risque bas ou de ce que nous appelons les risques très bas. Pour hauts risques, il y a une gamme unique qui s’applique à cette catégorie-là. Les risques bas sont soumis à une licence standard. Les risques très petits doivent suivre des règles générales ; il y a des enregistrements. Nous n’en entendons pas parler avant qu’il y ait un problème. En ce qui concerne votre question sur l’auto-surveillance, la plupart des entreprises s’en occupent ellesmêmes, elles font cette auto-surveillance pour les émissions dans l’air. Lorsqu’il s’agit d’émissions dans l’eau, c’est la SEPA qui s’en occupe. IUne personne de la salle Il aurait été intéressant que chacun d’entre vous puisse revenir sur un des grands succès français en matière d’installations classées, qui est un succès commun. Je veux parler des Secrétariats Permanents pour la Prévention des Pollutions Industrielles. Il serait intéressant au moment où le système se redimensionne d’avoir aussi en tête comment se positionne ce moyen de débord. Faut-il considérer qu’il conserve sa dimension actuelle et qu’il constitue un moyen de souligner les priorités et de faciliter la compréhension ? Ou bien, faut-il aller dans le sens des évolutions administratives actuelles et élargir le champ des SPPPI de façon à ce qu’ils puissent contribuer à une meilleure intégration des dimensions, non seulement « environnement industriel », mais aussi urbanisme et transports, sur des problématiques que l’on retrouve dans les PPRT ou dans des problématiques de pollution de l’air ? Ou, à l’inverse, faut-il considérer (ce n’est pas mon avis, mais je le mentionne quand même), que les SPPPI ont été un épisode de l’histoire qui a été utile, et qu’il faut maintenant dire que c’est quelque chose qui appartient au passé et qu’il faut réinventer complètement quelque chose ? Cela me paraît un sujet sur lequel élus, industriels, associations et pouvoirs publics ont potentiellement un champ d’accord. Cela ne peut pas être indifférent non plus à Monsieur Conroy dans la mesure où une des expériences cinglantes de l’environnement en Ecosse de ces dernières années a été l’échec du référendum d’Edimbourg pour créer à Edimbourg, le péage urbain, qui est à l’image de ce qui se pratiquait à Londres. IClaude Barbay Votre question est tout à fait justifiée, mais vous venez précisément le lendemain du forum des SPPPI que nous venons de tenir à Dunkerque et où nous avons essayé de clarifier ce que pouvait être l’avenir. Nous avons eu deux jours de débat où nous avons constaté une très grande diversité des situations, à la fois des choses communes et des choses qui sont particulières à certaines régions. Par exemple, ici, dans le Nord-Pas-deCalais, il y a trois SPPPI. Nous, nous n’avons qu’un SPPPI. Par conséquent, les problématiques sont très différentes. Je suis désolé mais allez voir sur le site des SPPPI, sinon nous allons glisser en dehors de notre thème d’aujourd’hui. Je partage votre avis. C’est un thème important. 155 Atelier 7 Pour revenir sur notre thème actuel, Grande Paroisse Toulouse avait certes des problèmes de gouvernance manifestement mais de toute façon la catastrophe s’est passée sur un endroit qui n’aurait pas fait l’objet d’une autorisation. C’était simplement le lieu du stockage de rebuts de fabrication. Il faut faire très attention. C’est de l’inattendu. C’est au coin du bois que nous attendent les problèmes. Quand nous parlons des dangers des transports des matières dangereuses, depuis Toulouse, les postes de chargement-déchargement sont pris en compte par des études de dangers, alors que l’élément mobile, que ce soit le bateau, la barge fluviale, le wagon ou le camion, ne sont toujours pas pris en compte en tant que tel. Chacun sait qu’une citerne ou un bateau non dégazés à partir du moment où il est à demi déchargé, si jamais malheureusement il y a un coup au but, c’est la catastrophe assurée. 156 Il y a autre chose. Je suis un économiste retraité et les naturalistes m’ont fait découvrir que j’avais tort de mettre l’économie d’un côté et l’écologie de l’autre. Pourquoi ? Parce que l’économie fonctionne exactement sur les mêmes fondamentaux que fonctionne la croissance de la lentille d’eau sur la mare. Tant que nous n’auront pas intégré et réfléchi à cela, nous n’avons pas d’issue. Nous croyons que nous avons une crise actuelle. Non, c’est l’état normal. Simplement, nous percevons plus précisément, avec plus d’acuité, les difficultés parce qu’elles sont chez nous. Nous sommes sur la planète Terre, avec des jeux sommes zéro. Tant que l’on peut exporter ces problèmes, il n’y a pas de problème pour nous, nous étions les pays riches, nous exportions nos problèmes. Aujourd’hui, les problèmes sont pour tout le monde. Nous n’aurons pas une autre planète à notre disposition. Il faut que l’on gère ici maintenant avec nos moyens dans nos limites et de façon à préserver l’avenir pour les générations futures. Les plus jeunes ici ont des raisons de nous demander des comptes. Mes petits-enfants, mes arrièrepetits-enfants nous demandent des comptes ! Le rapprochement économie- écologie, c’est très bien, mais il faut aller plus loin. Il ne faut pas que cela soit un supplément d’âme, mais une contrainte forte. IUne personne de la salle Les représentants de la profession d’inspecteur des Installations Classées ont dit qu’ils étaient partisans pour que le métier d’inspecteur alterne avec des fonctions d’animateur de l’économie et disons, les autres fonctions des DRIRE traditionnelles. En même temps, le métier d’inspecteur des Installations Classées devient de plus en plus compliqué, les études de dangers demandent de plus en plus de technicité et de plus en plus de réglementation implique justement de plus en plus de technicité. Alors n’y a-t-il pas de contradiction entre la position que vous défendez et le fait que le métier devienne de plus en plus complexe ? D’ailleurs, il me semble qu’au RoyaumeUni, il y a des inspecteurs qui sont spécialisés et qui restent spécialisés sur la question de « Health and Safety » et ils ne repassent pas à d’autres fonctions d’animation de l’économie. INicolas Fourrier C’est une question compliquée parce que la gestion de l’imprévu n’est pas synonyme de la professionnalisation à outrance et du per- fectionnement dans un ou l’autre des thèmes techniques. Les risques, il faut les réduire. Nous sommes tous d’accord ; les industriels en premiers responsables, l’inspection pour faire appliquer les lois décidées par le pays. Mais il faut aussi les faire comprendre et les faire partager avec l’environnement. Cela nécessite effectivement une grande rigueur dans l’application des textes. Pour le coup, je vous répondrai plutôt formation, compétence, formation continue sur un métier d’inspecteur, poste éventuellement plus long sur un endroit ou sur un autre. Mais spécialiser au point que l’inspecteur devienne le spécialiste de tel ou tel sujet et en perdre l’éclairage plus global et la compréhension globale du fonctionnement économique, j’y vois un grand danger. Je rebondis d’ailleurs sur une expérimentation qui peut apparaître comme une bonne idée mais que je considère comme l’une des plus mauvaises, de séparer les instructeurs d’un côté, ceux qui ne feraient qu’instruire des dossiers et donc proposer aux préfets des prescriptions, et de l’autre côté des contrôleurs. Il n’y a pas pire que cela. On ne peut pas avoir d’un côté des gens hyper spécialistes de l’étude de dangers, de l’étude d’impacts, qui vont réglementer à tour de bras, en négligeant complètement toute l’approche « terrain », toute la discussion et tout le partage ; et d’un autre côté, des inspecteurs qui auront un texte et qui débouleront dans l’installation sans comprendre, sans se former, sans être confrontés à l’applicabilité des règles, et donc du coup, incapables de partager. Je crois beaucoup plus à une approche équilibrée qui alterne une extrême rigueur dans l’application des textes et d’autres postes dans une carrière qui permettent une ouverture d’esprit. Une appréhen- sion plus globale du fonctionnement de l’économie, l’application globale du développement durable nécessite cela. Nous parlons ici de techniques d’environnement et d’économie, n’oublions pas le volet social. C’est extrêmement important. On en parlait en plénière, l’homme reste un des grands acteurs. Le dialogue au sein des entreprises avec les salariés dans la conduite du process, c’est aussi un élément sur lequel d’ailleurs la réforme de l’Etat n’a pas apporté grande réponse. IUne personne de la salle C’est un commentaire et peut-être une question qui fait directement suite à ce qui vient d’être dit. La catégorisation des entreprises en « champion », des gens qui se conforment un peu, des gens qui sont paresseux, des gens qui sont carrément criminels, vient d’être critiquée. Pourtant, je trouve qu’elle a le mérite d’avoir un a priori assez réaliste sur les industriels. La population des industriels est très diverse, comme la population des automobilistes, pour faire un parallèle. Je trouve cela positif de partir du principe que l’on a une population effectivement diverse et qu’il faut s’adapter à cette diversité, au lieu de partir du principe que tout le monde est extrêmement motivé, ce que nous avons plutôt à entendre à la fois de la part des représentants du Ministère et des représentants de l’industrie. Ma question s’adresse à Monsieur Conroy. Penset-il que, si les inspecteurs britanniques avaient la possibilité de faire parfois de l’animation industrielle, du soutien à l’innovation, cela améliorerait ou au contraire compliquerait le travail des inspecteurs ? 157 Atelier 7 IIan Conroy Chez nous, nous avons toutes sortes d’inspecteurs qui font toutes sortes de choses, qui ont toutes sortes de devoirs. Nous avons parmi eux des spécialistes qui évaluent. Nous partons du principe qu’il est impossible pour un inspecteur de tout faire. Nous n’avons pas ce qui ressemblerait à des « supers inspecteurs », même si nous essayons. Dans le recrutement, nous cherchons des inspecteurs qui peuvent s’impliquer dans un très vaste domaine. Pour les domaines les plus complexes, nous recrutons plutôt des industriels qui connaissent bien la vie des entreprises. Notre devise est que même les « criminal » peuvent devenir des chouettes types. Nous avons également un système de contrôles, d’audits intensifs qui fait que tous les industriels sont vérifiés, non pas par une seule personne, mais par un ensemble de contrôleurs. IClaude Barbay 158 Je voulais utiliser l’exemple qui a été donné tout à l’heure, le cas de GPN, qui veut dire Grande Paroisse Azote (le N pour azote). Si on cherche à savoir s’ils sont supers ou s’ils sont « pauvres », en fait nous trouverons les deux. Dans le même temps où GPN, sur son site de Haute-Normandie, laissait une tour – la tour de Prilling qu’a signalée ce matin à juste titre mon collègue de Haute-Normandie – se détériorer au point qu’il y avait un danger pour les populations alentour, il était en train d’ériger l’atelier nitrique huit tout neuf, un élément super. Selon le regard que l’on porte, les critères que l’on va établir, les cases, on va arriver à une entreprise exemplaire. Jacky Bonnemains a à la fois raison et tort, ce site a été épouvantable. Il ne l’est plus. Je me plais à le souligner. Ils ont des imperfections encore, mais ils ont fait d’énormes progrès. Ils ont récupéré un site coupé par deux grands axes de circulation. Je crois que c’est une trentaine de kilomètres de clôture. Il faut imaginer des habitations à 150 mètres. Tout cela avec des sphères d’ammoniac sous pression etc. Sous certains critères je trouve qu’ils sont exemplaires. Par contre, sur l’histoire de la tour Prilling, j’ai été avec l’UFC à faire la une de Paris-Normandie. On voit alors la complexité aussi, qu’il ne faut pas oublier. Grande Paroisse, c’est le groupe Total. Grande Paroisse investissait sur nitrique 8 et était manifestement dans l’incapacité d’avoir les moyens de, en même temps, d’investir sur Prilling. Donc en fait, notre mise en cause publique a fait que Total a débloqué des fonds et que Grande Paroisse a les moyens de faire ce qu’il devait faire, depuis quand même 2004. Donc vous vous rendez compte. J’ajoute un deuxième point sur les évolutions générales, avant ou après DREAL. Avant la DREAL, l’évolution de l’inspection a été une vision plus globale des choses. Par exemple, les PPRT, c’est un peu nouveau comme démarche. On s’intéresse à ce qui se passe autour de l’usine. Autre exemple, dans la directive cadre sur l’eau, on s’intéresse à ce qui se passe à l’échelle d’un bassin. Il en va de même avec les SPPPI. Après la DREAL, il y a une étape supplémentaire construite sur cette vision globale et sur l’interaction ou l’inter-transversalité avec d’autres politiques. Quand une infrastructure passe à côté d’un établissement Seveso, je fais cela tous les jours et les chefs de services ont le même réflexe, nous mettons en relation l’impact des risques industriels, qu’ils soient technologiques ou autres, avec d’autres thèmes comme l’urbanisme ou l’aménagement. Nous avons une vision globale sur le territoire. IPhilippe Ducrocq, DREAL de Haute-Normandie IJean-Claude Weiss Deux petites réactions sur ce qui a été dit. Premièrement, cela a été évoqué par plusieurs participants, ce que moi j’appelle la culture industrielle issue de la DRIRE avec le mélange des fonctions protection de l’environnement et développement industriel. Cette image est restée au sein de la DREAL parce que les gens sont câblés comme cela. Vu de l’extérieur, notamment par les préfets, nous sommes toujours vus de cette manière-là. Je ne sais pas si l’évolution fera que le service en charge du développement industriel prendra le pied, mais pour l’instant il est acquis que c’est encore l’inspecteur qui est dans un grand établissement qui connaît le mieux l’entreprise, y compris sur le plan économique. Je voulais rebondir sur ce que vous dites et expliciter ce que je disais tout à l’heure. Quelles sont les attentes d’un élu dans ce domaine ? C’est d’abord d’avoir des choses relativement simples et claires, un discours qui soit une analyse commune des différents services avec une réponse si possible unique et qui ne soit pas complexe. J’ai subi les périmètres Z1 et Z2 et suis en ce moment dans la phase finale d’un PPRT. Il faut que je puisse appliquer cela ensuite. Pour pouvoir l’appliquer au quotidien, il ne faut pas que la matière, même si elle mouvante, qu’elle évolue à un rythme tellement rapide que je n’ai pas le temps de réviser mon PLU. Il faut que j’ai le temps d’appliquer les règles parce que je fais tous les jours l’urbanisme opérationnel comme je dois le faire, avec des règles relativement stables. C’est une difficulté. Je ne dis pas que je ne trouve pas un écho dans les services de l’Etat à mes préoccupations, mais j’espère le trouver d’une façon plus simple. J’ai 2 000 hectares de zones industrielles, avec des zones humides, des compensations, etc. L’analyse commune me paraît intéressante. La deuxième chose que je voulais dire, c’est que j’ai entendu tous les intervenants aborder l’environnement et les contraintes. Mais, l’environnement, ce n’est pas une contrainte, c’est une chance. Nous avons fait un Grenelle de l’estuaire, par exemple. Nous allons nous revoir dans 15 jours pour en reparler. Malheureusement, je n’ai pas beaucoup avancé dans l’écologie industrielle, je lance l’étude seulement maintenant. Les soi-disant contraintes environnementales qui vont être imposées aux uns et aux autres, ce sont une chance pour nous de se développer autrement. Et c’est une chance de pouvoir continuer à se développer, aussi bien en urbanisme d’habitat, comme dans l’élaboration d’un SCOT. Nous devons trouver dans cette nouvelle façon de réfléchir des solutions à nos problèmes d’occupation de l’espace, de préservation des milieux que nous n’aurions pas trouvé sans ces soi-disant contraintes. Je ne veux pas employer le mot contrainte, je veux employer le mot chance pour nous dans le développement. IUne personne de la salle J’aurais souhaité que l’on évoque un des problèmes qui n’ont pas été complètement gérés en France et c’est peut-être dans un lieu de débat qu’il est judicieux de l’évoquer. Au Royaume Uni, ce sont des inspecteurs « Health and Safety » 159 Atelier 7 qui, comme dans la plupart des pays du monde, assurent à la fois l’environnement industriel et la sécurité du travail. De fait, quand il y a un accident, cela menace aussi bien les gens qui sont dedans que les gens qui sont dehors. Ça a été longtemps le cas en France jusqu’à Feyzin. Depuis Feyzin, on ne peut pas dire qu’il y ait eu une grande inter-compréhension entre les deux structures que sont l’inspection du travail et l’inspection des Installations Classées. Cela reste peut-être une faiblesse. IJean-Jacques Dumont 160 Cette question me permet de revenir sur un point que Philippe Ducrocq a évoqué, à savoir, cette relation que je signalais comme très importante pour l’avenir entre les DREAL et les DIRECCTE. Philippe Ducrocq nous a dit (je vais caricaturer bien entendu) que tout allait bien, que la DREAL a recueilli l’héritage des DRIRE et que l’inspecteur des installations classées reste celui qui connaît le mieux les installations. Mon souci est plutôt à terme. Les structures, comme leur nom l’indique, ont un effet structurant et si on n’y prend pas garde, il y aura deux entités qui auront chacune leurs priorités, leurs politiques, leurs contraintes. Et entre les deux, il y aura soit des trous, soit des conflits. Il est très important de créer des habitudes coopératives entre ces deux nouveaux services de façon à préparer la relève, parce que ce que dit Philippe Ducrocq est vrai maintenant, le système continue sur sa lancée. Mais dans 10 ans il y aura eu des rotations et les DRIRE ne seront plus qu’un souvenir. Le deuxième point est le problème de l’inspection du travail et de l’Inspection des Installations Classées. Il se trouve que l’Inspection des Installations Classées relève désormais des DREAL, que l’inspection du travail relève désormais des DIRECCTE. C’est une raison de plus pour mettre en place ces coopérations. Il faut les inventer et explorer tous ces champs qui sont désormais dans les deux grands systèmes. INicolas Fourrier Les Ingénieurs de l’Industrie et des Mines sont là pour ça, ils sont câblés pour ça. Ils sont présents dans les deux structures, en alternance entre des missions très régaliennes que peuvent être l’Inspection des Installations Classées ou l’inspection du travail puisqu’on en fait aussi dans les installations nucléaires, et les missions plus d’animation. L’Etat a une chance avec les IIM de garder, de cultiver ces compétences et de les utiliser sur ces sujets extrêmement sensibles. IJean Des Deserts Un industriel responsable prend soin d’abord de ses salariés, et cela est plutôt géré par le code du travail. Nous voulons simplement que les riverains ne subissent pas de risques supérieurs aux salariés (ça serait quand même bien le diable). Mais cette logique n’est pas intégrée parce que ce n’est pas les mêmes personnes qui traitent les mêmes problèmes. Il y a un souci chez les industriels, petites et gros d’une harmonisation locale des déclinaisons régaliennes nationales. Quand il y a des arrêtés ministériels, nous aimerions qu’ils soient à peu près traités de la même façon localement, ce n’est pas toujours le cas. Je lance peut-être une question pour l’avenir : est-ce qu’ il y aura un jour une harmonisation européenne ? IUne personne de la salle En tant qu’industriel, dans la réforme de l’administration et la fusion des différents services, j’aurais aimé trouver en fait plus de conseils. Aujourd’hui, nous sommes dans des procédures qui font que l’on dépose un dossier, on nous donne une recevabilité, c’est bon ou ce n’est pas bon. On nous donne des prescriptions réglementaires. Mais le système écossais apporte plus de conseils pour faire monter en compétence les industriels et ne pas être trop avec le bâton. Le collègue de l’UFIP l’a dit, nous avons parfois des mises en demeure rapides, avant de dire : « voilà le problème que l’on a relevé. Comment vous répondez ? Comment on peut faire ensemble ? » Nous avons beau être un grand industriel, nous n’arrivons pas toujours à trouver une solution tout seul. La part conseil des DREAL et des DIRECCTE (c’est effectivement un ensemble), nous ne l’avons pas beaucoup. Par rapport au modèle écossais, pourrions-nous avoir plus d’échanges sur comment répondre aux exigences réglementaires ? Il y a une fuite de certains industriels vers l’étranger parce qu’il y a tellement d’imposition réglementaire que l’on ne va pas s’en sortir. IClaude Barbay Vous avez vos structures professionnelles. Cela dépend du secteur dans lequel vous êtes, mais par exemple l’UIC peut donner des conseils. Ils sont là pour cela. Les structures du MEDEF, où qu’elles soient, sont faites pour cela. Nous ne pratiquons pas les services de l’Etat de cette façonlà. Nous les rencontrons en CLIC ou en CODERST. L’industriel y explique qu’il a élaboré tel dossier avec la DRIRE autrefois, la DREAL aujourd’hui. Là, il y a confusion des genres ! Il ne peut pas y avoir cela. Par contre, dans une étude de dangers, la DREAL va effectivement poser un certain nombre de questions, éventuellement donner des conseils, mais ce n’est pas un audit, ce n’est pas une structure extérieure qui, vous rend des services. Non, il ne faut pas attendre cela d’eux. IJean-Jacques Dumont Le mot conseil est un mot redoutable parce que, si on n’y prend pas garde, on franchit une frontière. On ne sait pas trop où elle est cette frontière, mais on voit bien en tout cas qu’on l’a franchie. L’inspecteur est amené, constatant des écarts indiscutables par rapport au règlement, à sanctionner ou a proposer des sanctions. C’est son devoir. Il est nommé, payé par le contribuable pour cela. S’il ne le fait pas, le juge pénal saura aller le chercher. Le contrôleur ne peut pas techniquement se substituer à l’opérateur qu’est l’industriel. En outre il ne le doit pas parce que c’est susceptible de devenir complètement illégal. Pour le conseil, il y a un marché du conseil. Il y a des conseilleurs en matière d’environnement ou dans d’autres domaines. C’est un secteur de services aux entreprises tout à fait important. Il y a aussi les structures professionnelles. Tout cela doit être utilisé. Cela dit, je ne suis à l’aise pour dire qu’il ne faut pas se satisfaire d’une situation que j’appellerai « bureaucratique », dans laquelle on dit « c’est le règlement, voilà les imprimés, débrouillez-vous ». Cela ne va pas du tout. Ça peut aller à la rigueur pour une grosse entreprise qui a des services juridiques, mais on voit bien que plus l’entreprise est petite, moins cela va. Il faut creuser les ressources nouvelles que nous donnent les technologies d’information. Il doit être possible d’avoir une relation beaucoup plus interactive en temps réel avec le demandeur, de façon à ce qu’il sache presque en temps réel précisément où en est son dossier, sur quoi il bute éventuellement et qu’il puisse donc aller chercher de bons conseils, sur le fond. 161 Restitution des Ateliers Atelier 1 : Maîtrise de l’urbanisation Atelier 2 : Maîtrise du vieillissement I Stéphane Reiche, Chef du service Risques, DREAL PACA I Thomas Ailleret, Chef du Ser vice Risques, DREAL Lorraine Nous avons essentiellement parlé de PPRT, mais il a aussi été question de risques naturels. A propos des PPRT, je retiens trois points. En premier lieu, il est nécessaire d’avancer avec beaucoup de pédagogie et d’enclencher un processus de concertation caractéristique du Grenelle, qui se concrétise au niveau des PPRT partout ce processus de CLIC, de personnes et organismes associés. Je n’irai pas plus loin dans cet aspect de concertation vu que cela a été le sujet d’un atelier en soi. Le deuxième point, c’est l’importance de finaliser les accords de financement. Cela a été l’un des sujets les plus débattus autour de ce sujet du PPRT, qui paye quoi ? Sur l’urbanisation négative (comme l’a été formulée au cours de l’atelier. C’est-à-dire, l’expropriation et le délaissement), la vision est à peu près claire. Un tiers entre industriels, collectivités et Etat. Par contre pour l’urbanisation positive, c’est-à-dire les travaux de mise à niveau de bâtis etc., c’est encore débattu, mais on commence à voir le bout du tunnel. C’est-à-dire qu’on est enfin passé à ces 40% de crédit d’impôt. Les différents acteurs s’approchent d’un accord, 20% les industriels, 20% les collectivités, et si tout se passe bien, 20% des riverains. Le dernier point que je retiendrai de l’atelier, c’est l’impact sur l’urbanisme. Je retiens une formulation qui est apparue au cours de l’atelier. Dans certaines villes, on peut avoir l’impression que le centre ville part en « cacahuètes ». D’un autre côté, on constate un phénomène intéressant, c’est qu’en limitant l’urbanisation sur certaines zones, d’autres zones acquièrent une valeur plus importante. En conclusion, je dirais que nous sommes dans une phase de transition où beaucoup de personnes se posent des questions et que les délais sont connus (fin 2010, 100% de PPRT prescrits. Fin 2011, 60% d’approuvés). Le sujet était mal connu il y a quelques années, il a fait l’objet en début d’année d’un plan vieillissement lancé le 13 janvier 2010. Il y a un relatif consensus pour dire que l’on connaissait mal le sujet les années précédentes, mais qu’un certain nombre de per sonnes se posaient déjà des questions. Il y a également un relatif consensus sur le plan lui-même. Les industriels font remarquer qu’ils ont été associés de manière anticipée aux réflexions sur ce plan. Pour eux, se sont des pratiques agréables qui portaient de bonnes choses . Nous sommes aujourd’hui dans une phase de montée en compétence sur tous ces sujets : Montée en compétence à la fois sur notre compréhension de ce qu’est que le vieillissement et sur l’organisation du fait d’être capable de traiter ce sujet. Chacun a déjà réfléchi. I Philippe Lefait Une question SMS demandait ce matin pourquoi cela prend autant de temps de mettre en place les PPRT. Cela a-t-il été évoqué dans votre atelier ? Nous avions autour de la table un certain nombre d’acteurs de collèges différents du Grenelle et un peu plus. Chacun avait réfléchi sur le sujet et réussissait à par ler avec les autres . Il y a un constat relativement partagé d’un besoin de compétence, d’un besoin d’organiser cette montée en compétence et sur le fait d’être capable de par ler ensemble sur ces sujets. Une idée qui est ressortie pendant le débat, est le fait que, pendant la phase montante de réflexion, les bureaux d’études pourraient favoriser la prise en main de ces sujets par les PME qui sont souvent demandeuses d’aide pour réussir à comprendre un nouveau sujet réglementaire. Un sujet plus général a été abordé : comment s’organise-t-on pour le transfer t d’infor mations et le transfert de compétences, à la fois en inter-métiers, c’est-à-dire entre des agents qui assurent l’exploitation, la maintenance et parfois le régulateur qui n’est pas très loin derrière), mais aussi en ter mes de transfert intergénérationnel. Le but de cette phase de montée de connaissance et de compétence sur ce sujet est d’arr iver soit sur une vision à la fois dynamique et partagée entre différents acteurs et qui per met une responsa bilisation des acteurs, avec l’Etat qui doit certainement proposer et imposer un cadre dans lequel l’exploitant pourra assurer sa responsabilisation. Le sujet des sous-traitants a été beaucoup abordé : l’exploitant doit organiser la responsabilisation, sa responsa bilité vis-à-vis des exploitants et la responsabilisation des sous-traitants. I Stéphane Reiche Nous n’avons pas précisément formulé la question comme cela, mais je renvoie au premier point : c’est la concertation qui prend beaucoup de temps. 162 163 Restitution des Ateliers Atelier 3 : Compétences et formation dans le domaine des risques 164 Atelier 4 : les instances de concer tation et transparence Her vé Vanlear, Directeur de la DREAL Auvergne François Rousseau, Chef du Service Risques, DREAL Alsace Tout d’a bord, il faut indiquer que l’ensemble des par ticipants ont reconnu que le facteur humain était essentiel en matière de gestion des r isques et qu’il y a du travail. L’intervenante de la Commission Européenne a ra ppelé que de nombreux accidents se répétaient, c’est-à-dire que des accidents impor tants avaient des causes bien identifiées . Deux contr ibutions ont été mises en évidence. En matière de for mation en entrepr ise, tant au niveau de la GPEC que dans les plans de for mation, on ne retrouvait pas vraiment cette notion r isque-sécur ité, pour tant fondamentale. Plus positif, les for mations en cour s se développent. Le public est attiré notamment par la for mation continue. On constate une cer taine adhésion, même si il faut chercher à la développer. Cinq points sur les pr incipaux points de vigilance voire de difficultés : - C ’ e s t t o u t d ’ a b o r d l ’ a s p e c t t r è s p l u r i d i s c i p l i n a i r e e n ma t i è r e d e g e s t i o n d e s r i s q u e s . I l fa u t u n e b a s e t e c h n i q u e , ma i s c e n ’ e s t p a s s u ffi s a n t . I l y a u n a p p o r t d e s s c i e n c e s s o c i a l e s n o t a m m e n t e n ma t i è r e d e s o c i o l o g i e . - L’impor tance d’assurer l’adhésion des gens au sujet. Pour avoir cette adhésion, il faut définir un socle de valeur s que sont la défense de l’intérêt général et la sécur ité des populations . - L e facteur fondamental, c’est la mobilisation de l’encadrement. En matière de r isques , il y a un facteur humain évident mais aussi des facteur s organisationnels et il est fondamental de mobiliser l’encadrement. Ce n’est pas toujour s le cas . - U n e re ma rq u e s u r l a n é c e s s ité d’intégrer des per sonnes extér ieures , par exemple les r i ve ra i n s , l e s é l u s q u i o n t u n rôle impor tant non pas pour maîtr iser le r isque, mais pour en limiter les conséquences. - Enfin, nous avons relevé une difficulté impor tante, on l’a vu ce matin avec l’inter vention d e Patr ick Lagadec. La gestion des r isques c’est aussi faire face à l’imprévu. Qu’est-ce qu’une for mation qui a pprend à faire face à l’imprévu ? Des méthodes pédagogiques commencent à se mettre en place. La gestion des risques en fait au 21e siècle, ce n’est plus tellement une question d’experts qui vont débattre de points techniques, c’est également la gestion de la transparence de l’information et de la concertation. C’est d’autant plus important que les risques vont mettre autour de la table des acteurs différents, des élus, des industriels, l’Etat, les riverains etc., qui vont voir les risques à travers leur prisme qui est différent. Il est donc important qu’ils aient l’occasion d’échanger ensemble. Au cours de cet atelier, il y a eu des points forts, des progrès mis en évidence. Notamment, nous avons eu un témoignage de notre expert suisse, qui nous dit que les suisses sont impressionnés par nos outils de concertation. En France, on dispose d’une enquête publique, de SPPPI, des CLIC, des CLI, des CLIS. Ceci est le bilan positif. En parallèle il reste des progrès à faire pour améliorer, d’une part l’efficacité de la concertation, de la prise en compte des diverses opinions et également pour répondre aux attentes. Je relève plusieurs points : - L e premier qui a été mis en évidence, c’est qu’il manque une étape pour que la concertation aille jusqu’aux riverains. On a du mal à dépasser la porte des CLIC ou des SPPPI. Cela s’arrête « aux gens bien élevés ». Tout le monde ne peut pas être membre du CLIC. Le citoyen ne va pas forcément avoir l’occasion, même s’il est suffisamment sensibilisé pour avoir envie de s’impliquer dans la concertation. - L e deuxième point mis en évidence, c’est que la concertation telle qu’elle est organisée actuellement, n’intervient pas assez en amont. Elle intervient quand le projet est déjà un peu ficelé, un peu bétonné. En tout cas, c’est le sentiment qu’en ont les divers acteurs. Lorsque la concertation est organisée plus en amont, on arrive à déminer les problèmes. Un exemple a été donné avec la création d’une ligne haute-tension où la concertation très en amont a permis au projet de passer très facilement. -Troisième point : Pour amener les informations jusqu’aux citoyens, il faut, d’une part les former ( la gestion du risque demande une certaine connaissance. Ce n’est pas accessible a priori à tout le monde.), et il faut développer la culture du risque, c’est-à-dire faire en sorte que les gens s’y intéressent, qu’ils participent lorsqu’on leur donne l’occasion de se concerter. - E nfin les quelques limites de la concertation, c’est qu’elle donne une charge de travail supplémentaire. De temps en temps, on se heurte à des problèmes de confidentialité. Puis, la France n’est pas le seul pays et des projets étrangers peuvent avoir des impacts sur le sol français, ceci est moins difficile à gérer.Des pistes de progrès ont été soulevées, à savoir des choses à faire pour répondre à ces divers problèmes identifiés : - D ’une part, il faut mettre les choses davantage en amont. Dans le film du SPPPI Artois, il a été proposé une réunion de concertation où l’industriel présente son projet très en amont avant 165 Restitution des Ateliers l’enquête publique. L’expertise a indiqué qu’en Suisse, si on réunit 50 000 signatures pour faire tomber un projet, le projet tombe vraiment. Cela donne un véritable pouvoir aux citoyens et incite l’industriel à communiquer et à expliquer beaucoup plus son projet. - U ne deuxième piste a été avancée par Monsieur Blein, Maire de Feyzin. C’est la conférence riveraine qu’il a mis en place chez lui. Il nous a expliqué que la CLIC est difficile pour les riverains pour plusieurs raisons : ce n’est pas facile de prendre la parole face à des gens impressionnants de par leur position sociale, leur maîtrise technique. Puis le CLIC est limité à un petit nombre de citoyens. La conférence riveraine permet de pallier ce problème. - E nfin, la dernière piste évoquée est le Scooping en Allemagne. Il permet cette concertation très en amont, avant l’enquête publique, avant que le projet soit ficelé. Atelier 5 : Evaluation des risques sanitaires Patricia Blanc, Chef de service de la Prévention des nuisances et de la qualité de l’environnement au ministère en charge du développement durable 166 Nous avons traité des évaluations de risques sanitaires et plus particulièrement des études sanitaires de zones. C’est un sujet un peu nouveau pour ces Assises puisque c’est la première édition qui l’aborder. C’est sans doute une expérience à renouveler pour les éditions suivantes. Nous avons constaté qu’il se développait un peu partout des études sanitaires de zones. On en a recensé une dizaine soit terminées, soit en cours et qui visent à répondre aux questions des riverains voulant savoir quelles conséquences le cumul des pollutions qu’ils subissent, que ce soient des pollutions industrielles ou des pollutions des transports, ou voire de l’agriculture, a sur leur santé. Un premier retour d’expérience a pu être tiré de ces études, au sein de l’atelier. Il subsiste des difficultés méthodologiques évidentes puisque l’on ne connaît pas encore très bien les mécanismes qui font qu’il y a synergie entre tel ou tel polluant, et qu’il paraît encore plus difficile de cumuler des impacts liés au bruit à des impacts liés aux substances chimiques, qu’il y a des incertitudes évidemment très importantes dans ce domaine. Mais ces incertitudes ou difficultés ne doivent pas nous empêcher de faire de ces études de zones. Maryse ARDITI l’a d’ailleurs très bien dit : si ces études de zone permettent d’identifier trois ou quatre polluants sur lesquels on peut porter une action efficace prioritaire, il faut le faire même s’il faut rester humble sur les évaluations quantitatives d’excès de risques ou de risques sanitaires. L’autre point développé est la nécessité d’associer l’ensemble des parties prenantes autour du pilotage d’une étude de ce type et les difficultés liées à la communication des résultats. Il a encore beaucoup d’incertitudes dans ces domaines et les chiffres bruts ne sont pas toujours parlants quand on parle d’excès de risques individuels, d’excès de risques sanitaires. Il demeure des questions à travailler sur la communication mais l’impérieuse nécessité de rendre public ces résultats sous une forme la plus pédagogique possible. Enfin, nous avons constaté la nécessité d’avoir à la fois plus de mesures dans l’environnement sur un certain nombre de substances, d’améliorer un peu les connaissances, de ne pas travailler uniquement à partir de modélisations ; mais aussi de mieux connaître les phénomènes de bruits de fond. On se rend compte que, quand on regarde individuellement l’impact d’une installation, on est souvent dans des zones acceptables, mais il est vrai que le cumul et notamment quand on additionne aux pollutions du transport voire des pollutions historiques (par exemple un bruit de fond sur les sols), on peut dépasser des niveaux de référence et modifier sensiblement le résultat de l’étude. Pour terminer, je voudrais indiquer aux personnes que cela intéressent, le Conseil de Santé Publique travaille sur ces sujets et doit rendre un avis aujourd’hui ou demain, précisément sur cette question. Vous pourrez vous le procurer assez rapidement sur le site Internet du Conseil de la Santé Publique. Atelier 6 : Le post-accidentel Daniel Fauvre, Directeur adjoint, DREAL Languedoc-Roussillon Pour la gestion post-accidentelle, j’ai une petite remarque sur la forme, sur le faible nombre de participants à cet atelier. Leur qualité et leur écoute attentive se sont nullement remises en cause mais je me demande si c’est lié au fait que ce sujet est encore un sujet en devenir, même si c’est un vieux sujet en devenir. En tout état de cause, l’ensemble des intervenants était d’accord pour conclure qu’il y avait urgence à s’y intéresser. Définir la gestion post-accidentelle reste un exercice difficile. Si ce n’est de conclure qu’il faut la démarrer au plus tôt, l’ancrer au plus tôt dans la gestion de l’accident. Une image à ce titre a été donnée : c’est comme un marathon pour lequel tout se gagne ou plutôt tout peut être perdu si le démarrage n’est pas réussi. Ensuite, nous avons de balayer trois questions sur cette gestion post-accidentelle : - Comment évaluer et suivre les effets environnementaux, sanitaires, et socioéconomiques des accidents ? Il ressort que des méthodes existent, notamment des méthodes de mesures. Reste à savoir comment s’organiser pour les mettre en œuvre quand l’accident arrive. Des doctrines sont en cours sur ce sujet, notamment dans le domaine du nucléaire. Ensuite comment décliner toutes ces réflexions très larges, très lourdes, engagées dans le domaine nucléaire sur les activités industrielles plus conventionnelles ? Il est rappelé la nécessité d’établir des repères au plus tôt pour permettre de connaître la situation de l’environnement avant l’accident et donc par différence, apprécier les conséquences propres de l’accident sur l’environnement, les territoires et les populations touchées. - La deuxième question, c’est, comment prévenir les sur-accidents ou la surpollution. Comment traiter les déchets ? Il ressort des échanges la nécessité dans les instants qui suivent la gestion de crise elle-même, d’organiser des arbitrages entre court terme et long terme, dans le traitement des pollutions et des impacts issus de l’accident. On peut se retrouver dans des situations où, pour minimiser l’impact sur les populations ou les territoires, il peut y avoir des actions à conduire à court terme, 167 Restitution des Ateliers alors que ces actions peuvent avoir des impacts importants à long terme. Ces arbitrages, s’ils peuvent être réfléchis a minima lors de la préparation à la gestion de crise, ce sera autant de gagner. Il faut également souligner que dans la plupart des accidents, on se retrouve à devoir faire face à des quantités relativement importantes de déchets, plus ou moins toxiques, qu’il convient de traiter dans la gestion de l’accident. Il ne faut pas les laisser, les abandonner sur les territoires et auprès des populations concernées, parce que ces déchets renvoient directement auprès de ces populations, l’image même de l’accident. - Comment accompagner les territoires, les populations dans leur reconstruction, dans leur réparation ? La conclusion qui fait consensus, c’est que ce n’est pas de l’accompagnement qu’il faut envisager, c’est comment organiser l’appropriation par les populations et les territoires, de leurs réparations. Si ce ne sont pas les gens eux-mêmes qui organisent leurs reconstructions, il y a de grandes chances qu’elles ne réussissent pas. Atelier 7 : Réformes de l’inspection des ICPE et nouveaux visages de l’Etat Philippe Ducrocq, Directeur de la DREAL Haute-Normandie 168 L’atelier s’est principalement intéressé à ce que devrait être l’inspection, plutôt qu’à faire une analyse de son évolution historique. Il faut signaler qu’elle n’est pas mince. Trois idées majeures dans le cœur du sujet, puis deux considérations plus générales ressortent. Concernant les idées qui ressortent de l’atelier, ce sont : - C ’est la nécessité du partenariat qui est partie prenante. Il est suggéré que l’inspection soit informative, pédagogique, qu’elle ait le sens de la politique, du dialogue, et de la concertation ; qu’elle soit capable d’expliquer aux parties prenantes, aux collectivités, aux associations, ce qui est très compliqué, que ce soit sur le plan technique ou sur le plan réglementaire. Dans cette concertation, il a été noté qu’avant le Grenelle, il y avait les S3PI qui avaient concouru à ce dialogue. - L e deuxième point est la compétence et l’expertise des inspecteurs. C’est un métier de plus en plus technique, de plus en plus difficile, avec des nouveaux métiers qui apparaissent, avec de nouvelles analyses que ce soient des études de dangers ou les nouveaux risques. Un intérêt particulier est à apporter sur la formation, le tutorage, l’habilitation, surtout l’habilitation et l’expérience, lorsqu’il s’agit de donner à un inspecteur des pouvoirs de sanction. Sur ce sujet, notre collègue écossais a exprimé les mêmes préoccupations. Le fait d’avoir une inspection avec des inspecteurs aux formations multiples, diversifiées, avec différents niveaux de spécialités est important. - L a troisième idée de cet atelier, c’est ce que j’appelle la culture industrielle qui vient de la jux- taposition dans les DRIRE, de l’approche « protection environnement industriel » et « développement industriel ». Pour l’instant, les DREAL bénéficient de cet héritage parce que l’ingénieur ou inspecteur qui connaît l’entreprise à tous les points de vue, la question se pose de l’avenir, quand tous les services auront perdu leur historique, au fur et à mesure du renouvellement des générations. D’où l’intérêt de soigner le travail avec l’autre direction régionale en charge des entreprises qu’est la DIRECCTE. Nous avons fait deux considérations générales : - O n commence à s’intéresser à un sujet et on commence à donner des moyens pour le traiter lorsqu’il y a eu un accident. Les retours d’expérience des accidents font évoluer l’inspection. Mais localement, on est surtout opérationnel. On cherche à faire de la prévention, mais il est extrêmement difficile de faire de la prospective. D’où l’intérêt des groupes de travail multipartite, multi-catégorielle et des Assises de ce type. - Il ait été dit par un membre, représentant dans la table ronde, que l’environnement n’est pas une contrainte mais une chance. C’est une nouvelle façon de réfléchir, une nouvelle façon de chercher à se développer autrement, à trouver des solutions que l’on n’aurait pas trouvé s’il n’y avait pas eu ce problème. C’est une opportunité d’avoir un nouveau développement au travers notamment des SCOT et de la gestion et de l’occupation de l’espace. Puisque le sujet était l’évolution de l’inspection au travers de la réforme de l’Etat, et pour ce qui nous concerne, au travers de la création des DREAL, j’ai une forte impression, compte tenu des différentes politiques qu’elles conduisent et cette vision globale du territoire et de son aménagement, qu’elles peuvent apporter une réponse à cette question. 169 Plénière 2 Le devenir des industries à risque en France I Philippe Lefait, Journaliste animateur Nous allons passer à la table ronde sur « le devenir des industries à risques ». Ce sera d’une certaine façon, une manière de conclure ces quatrièmes rencontres. Vous avez en ce début d’après-midi, la possibilité de répondre à une question sur le contexte actuel en matière de risques technologiques : l’acceptabilité du risque vous semble aujourd’hui par rapport à 2008 « beaucoup plus forte » « un peu plus forte » « identique » ou « moins forte ». Donc 31005, vote1, vote-2, vote-3… on étudiera le résultat de cette question tout à l’heure. A préciser ce matin que, par rapport aux réponses que nous avions, vous saviez qu’il y avait à peu près huit réponses sur dix qui étaient plutôt favorables aux évolutions des 170 deux dernières années. Sachez que ces huit réponses sur dix portent sur un panel de réponses qui correspond à peu près à 20 % de l’audience de ce matin. Il y a donc deux personnes sur dix ce matin qui ont répondu à la question. Et parmi ces deux personnes sur dix répondants, on a eu les résultats que vous avez pu voir s’afficher. Notre sujet, « Le devenir des industries à risques », va nous permettre de parler d’économie locale, d’acceptabilité du risque, d’implantation des industries à risques sur les territoires -Monsieur Borloo a évoqué « le risque zéro » ce matin-, la place des risques dans les délocalisations de l’industrie, prévention, précaution, information du citoyen. Est-ce que trop d’information tue l’information ? L’information permet-elle des choix responsables de la part des citoyens ? C’est ce dont nous allons parler cet après-midi, avec un premier tour de table où chacun se positionnera par rapport à l’avenir des industries à risques. Je vais commencer par Maryse Arditi puisque j’ai dit que l’on parlerait de l’information du citoyen. Madame Arditi, vous êtes responsable des risques et des impacts industriels à France Nature Environnement. Comment vous situez-vous par rapport à l’avenir des industries à risques et à toutes ces questions que je viens de balayer, sur « le risque zéro », l’acceptabilité, la délocalisation et l’information ? I Mar yse Arditi, Responsable risques et impacts industriels à France Nature Environnement Je vais commencer sur la notion de délocalisation. A France Nature Environnement, nous ne sommes pas du tout pour que l’on envoie les usines à risques ailleurs, en particulier dans les pays où elles seraient moins contrôlées et donc moins bien gérées. L’idée, c’est au contraire d’essayer d’améliorer la situation. Il y a deux outils qui pourraient aider à placer l’industrie en meilleure position, à se renouveler et à aller vers une industrie de plus en plus propre et de plus en plus performante. Premièrement, il y a une réflexion globale sur le vieillissement. Certes, il y a un certain nombre d’usines en train de vieillir. Il est intéressant de savoir si ces usines vieillissantes sont dans une industrie obsolète dont on voit bien qu’à l’échelle de 5 à 7 ans, elles vont s’arrêter et qu’il est temps de trouver et de mettre en piste des usines modernes, innovantes, voire d’autres produits, ou si qui au contraire, il faut les maintenir, avoir une meilleure maintenance et si elles vont durer encore assez longtemps. Le deuxième élément, ce sont les PPRT. C’est le choc de l’urbanisation et des usines à risques. On parle beaucoup de l’expropriation des gens, mais je vous rappelle que dans la loi, il y a les « mesures supplémentaires ». C’est une réflexion complémentaire sur la diminution du risque à la source où l’on cherche, en mettant de l’argent, à réduire le risque de telle sorte que les ronds rouges, les ronds bleus, les ronds verts et les expropriations diminuent de manière drastique et de sorte que cela coûte autant, voire moins cher que l’expropriation. C’est moins traumatisant. C’est donc un outil à utiliser. Ces deux outils sont une réflexion sur la modernisation, la mise en place des meilleures techniques disponibles et sur la re-modernisation de l’outil industriel. Cela marche de paire avec le fait que l’on ne veuille pas délocaliser, mais que l’on va donner ici des emplois et des outils et qu’il y a des moyens possibles pour aider les industriels à le faire. Je comprends que, de temps en temps, une association locale veuille se bagarrer avec une usine, mais globalement la vision, la politique et la méthode ce n’est pas du tout cela. Par ailleurs, quand on parle d’acceptabilité du risque, on a tout de suite une idée extrêmement forte : comment les risques sont-ils perçus ? La perception du risque est un truc très clair. En général, on dit qu’il y a les risques réels et les risques perçus. En gros, pour les experts, le risque est le risque réel. Dans l’esprit de tout un chacun, les risques réels sont les risques expertisés par les experts. Puis de l’autre côté, il y a ce que perçoit le citoyen. Je voudrais juste pendant un ou deux minutes, vous expliquer, qu’en réalité, l’expert et le citoyen fonctionnent exactement pareil. Que se passe-t-il en réalité ? Vous connaissez tous les analyses que l’IRSN fait depuis 10 ans sur les risques réels et perçus. Il y a des risques perçus par tout le monde comme importants : la drogue chez les jeunes par exemple. Il y a des risques de 60 ou 70 % de risques pointés par tout le monde, comme les accidents de la route, mais le citoyen met en plus, presque dans le même paquet, des risques industriels, la pollution de l’air, la pollution de l’eau. 171 Plénière 2 En réalité, quel est le raisonnement ? C’est que, pour les uns comme pour les autres, le risque est évalué à peu près logiquement, mais on a une petite tendance à sous-estimer le risque sur lequel on peut avoir une action, sur lequel on est acteur. En d’autres termes, si vous êtes un acteur du risque industriel, un expert, un ingénieur, un industriel qui fait tout son possible pour faire le mieux qu’il peut, bien entendu ce risque, vous le connaissez et vous avez tendance à le minimiser. Vous dites « on a fait tout ce qu’il faut pour qu’il soit vraiment bien géré. Il n’y a pas de problème ». Le citoyen a ce truc à côté. Il n’y comprend rien. On essaie de lui expliquer que c’est parfaitement transparent. Il n’a aucun pouvoir dessus. Si cela pète un jour, il ne saura pas pourquoi. Il n’a aucun moyen d’éviter que cela pète. Si maintenant je parle, au contraire des risques de la route, le risque est un peu baissé pour « Monsieur tout le monde ». Il sait que c’est un risque important, mais il se dit que s’il fait attention à la route, tous les jours, il y a moins de risques. Le raisonnement de l’expert, comme celui du citoyen, est le même. Je minimise le risque sur lequel j’ai un impact propre et sur lequel je peux agir. C’est le même fonctionnement. I Philippe Lefait 172 Vous faites penser au colloque singulier, entre un patient et le médecin. Le médecin peut tout savoir et à un moment un échange se passe et le patient peut être aussi un des grands acteurs de sa maladie, s’il a la connaissance que lui donne le médecin avec lequel il partage. Par rapport à l’information du citoyen, Sandra Ashcroft va inter venir sur cette idée, et plus précisément de la manière dont le citoyen britannique perçoit cette notion de risque. I Sandra Ashcroft, Directrice des politiques de prévention des risques majeurs chez Health and Safety Executive, Royaume-Uni Je suis la conseillère principale et directrice des politiques de prévention des risques. Je travaille pour l’exécutif Santé et Sécurité. Il s’agit de l’organisme responsable de la santé et de la sécurité des travailleurs, également responsable de la protection du public, des citoyens de toute activité liée sur le lieu de travail. Mon organisation travaille en étroite colla boration avec des agences environnementales en Angleterre, en Ecosse, au Pays de Galles , sous la coupe de la directive Seveso. Je voudrais vous parler essentiellement de la consultation avec le public, les riverains et les citoyens qui vivent autour de ces sites dangereux. Ce sont des sites dans lesquels on trouve des substances dangereuses qui tombent sous la portée de la directive Seveso. Au RoyaumeUni, nous avons deux législations qui ont pour but de mettre en œuvre cette directive Seveso, de la transposer en législation nationale. Elles ont parmi leurs exigences, la consultation du public. La première s’appelle la COMA. C’est la réglementation qui contrôle les dangers et les accidents graves. La deuxième se situe dans la loi de l’urbanisme, c’est une loi qui aborde les substances dangereuses dans l’urbanisme. La réglementation COMA utilise les meilleures pratiques disponibles afin de protéger les travailleurs, le public et de main- tenir l’environnement, de le protéger de tout incident. La réglementation COMA s’applique aux sites qui présentent des quantités importantes de substances dangereuses, ayant la possibilité à terme de nuire. Deux dispositions dans la réglementation COMA abordent le principe de consultation du public. Ce sont les plans d’urgence et l’information à apporter au public. Plusieurs groupes sont engagés dans ce travail de consultation : le public, les citoyens eux-mêmes, les riverains par le truchement de leurs représentants, les élus locaux ou les personnes en charge de l’élaboration des plans d’urgence. De temps à autre, le public est également impliqué par le truchement de groupes de pression, de lobby ou d’autres représentants de la communauté. La communication envers le public, les citoyens, les riverains est évidemment très importante. Le public, à ce niveau, peut être impliqué à deux égards : dans un premier temps, dans le test des arrangements de communication avec les parties prenantes au niveau local, toutes les personnes qui sont situées dans une zone où une catastrophe pourrait se produire ; puis lors des exercices en situation réelle où on teste les différents aspects des plans d’urgence. Informer le public est une obligation prévue par la réglementation COMA au RoyaumeUni. Cette réglementation exige des opérateurs qu’ils fournissent des informations précises aux citoyens qui pourraient un jour être touchés par un accident grave, y compris sur les actions qu’ils sont censées entreprendre en cas d’incident. Cette information doit être revue au moins une fois tous les trois ans. Mais la question qui se pose est de savoir ce que l’on entend par information appropriée. Les différents opérateurs de sites ont pour responsabilité de fournir des informations mises à jour sur les activités des sites industriels et sur toutes les mesures à prendre en cas d’urgence. On peut y arriver par différentes méthodes : par une distribution de brochures de manière périodique, par la mise en place de groupes de liaisons avec la communauté en utilisant des moyens de communication innovants ou tout simplement en diffusant de l’information sur Internet. En ce qui concerne les rapports de sécurité, la législation britannique exige que cette information soit rendue disponible aux citoyens. L’objectif est de travailler en toute transparence, de donner un certain sentiment d’assurance au public pour lui faire comprendre que toutes les mesures sont prises pour garantir sa sécurité. Dans quelle mesure toutes ces informations données sont-elles utiles ? Très souvent, il faut être technicien soi-même, voire professionnel pour pouvoir interpréter correctement ces informations. En outre, je dirais qu’au Royaume-Uni, en ce moment, il existe un embargo sur la diffusion d’informations émanant de ces rapports de sécurité, pour des raisons de sécurité nationale, étant donné le climat politique qui règne actuellement. L’entreprise Dow Corning est ici un exemple assez frappant. Ils ont en leur sein une équipe d’employés spécialisés dans les relations avec les riverains. Ils répondent ainsi aux exigences de la réglementation COMA et ils organisent la consultation par un large éventail de moyens. Ils ont fait un calendrier annuel par exemple, reprenant toutes les informations 173 Plénière 2 174 d e s é c u r i t é ; i l s p u b l i e n t d e s b u l l e t i n s , o rganisent des visites dans les écoles , des j o u r n é e s p o r t e s o u v e r t e s . I l s o n t t ro u v é d e s fa ç o n s innovantes d’impliquer le public. Cette entreprise Dow Corning, en cas d’urgence, arrive à notifier les riverains par le retentissement d’une sirène, par les médias, par le téléphone à condition que les personnes se soient préalablement inscrites. J’ai entendu récemment qu’ils utilisaient les SMS. J’ai quelques mots à dire sur l’urbanisme. L’urbanisme au Royaume-Uni est un domaine tout à fait ouvert. Les autorités publiques publient tous les documents liés aux demandes. Les riverains, les résidants reçoivent des notifications lorsque des sites doivent ouvrir tout près de chez eux. Tout est disponible dans la presse, y compris la presse locale. En ce qui concerne les sites dits dangereux, il existe en fait un processus de consultation qui se déroule en deux étapes. Dans un premier temps, ces sites dangereux doivent demander une autorisation à l’organisation que je représente. Ensuite, l’autorité locale cherche un conseil auprès de notre exécutif. Puis l’autorité locale demande l’avis dans son processus de prise de décision. Si l’autorisation est octroyée, nous pouvons rédiger un plan de consultation de zones qui aborde également les arrangements de consultations et les exigences qu’il faut satisfaire. Pour la deuxième partie, il y a un intérêt du public parfois important dans le processus de prise de décision, quand il s’agit d’autoriser la construction de deux nouveaux terminaux ou d’un pipeline qui importe et transporte du gaz GPL par exemple. Qui aurait envie de vivre tout près d’installation semblable ? Le débat s’installe, l’intérêt général du public versus l’intérêt du public au niveau local. C’est une procédure absolument ouverte, extrêmement transparente. Toutes les décisions sont placées sur Internet par l’autorité locale d’urbanisme. S’il y a des appels, il est possible de les lire. Le public a la possibilité de s’engager et de s’impliquer. I Philippe Lefait J’ai une question. On parlait de ce seuil d’acceptabilité. Est-ce que toutes ces procédures mises en place en Grande-Bretagne contribuent à faire baisser ou à faire monter le seuil d’acceptabilité ? Autrement dit, est-il plus facile en Grande-Bretagne de faire accepter des industries à risques ? I Sandra Ashcroft C’est un sujet d’actualité parce que le Royaume-Uni est une petite île et il n’y a pas énormément de place. Il y a des terrains en friche que l’on pourrait utiliser. Sur ces terrains se trouvaient préalablement des usines, des sites qui utilisaient des substances dangereuses. Nous ne pouvons pas utiliser ces sites pour de nouveaux développements, de nouveaux projets d’urbanisme ou des logements sociaux. Il y a un débat actuellement chez nous. I Philippe Lefait À vos côtés, je laisse la parole à Yves Blein, Maire de Feyzin et président d’AMARIS. Vous êtes-vous au cœur du problème et j’aimerais demander votre avis sur l’acceptabilité : les riverains, dans le couloir de la chimie, acceptent-ils mieux le risque parce que des procé- dures de concertation et d’information ont été mises en place, comme en GrandeBretagne ? I Yves Blein, Maire de Feyzin, Président d’AMARIS Je crois que l’on est dans une image assez paradoxale. Les riverains, ceux que je connais bien, ne se posent pas autant la question de l’acceptabilité. Ils vivent à côté d’une entreprise à risques, ils en ont l’habitude. D’une certaine façon, ils sont plus inquiets sur la stratégie industrielle, ils sont plus angoissés par la perspective du chômage éventuel si l’entreprise quitte le territoire que par son maintien et par l’inquiétude que peut générer le problème de la sécurité. La sécurité et le risque industriels, ce sont plus un bruit de fond auquel ils sont attentifs et ils remarquent les initiatives prises pour les protéger. Bien sûr, ils y attachent de l’importance. Mais ce n’est pas ce qui va conditionner le fait qu’ils résident ici ou ailleurs. Ils ont l’habitude de vivre ou de voisiner ces risques. I Philippe Lefait Michel Delebarre, êtes-vous d’accord avec ce que dit votre confrère de Feyzin ? On vit avec et on pense à l’économie locale ? I Michel Delebarre, Ancien Ministre d’Etat, Député-maire de Dunkerque, Président de la Communauté Urbaine de Dunkerque Oui. Je crois que c’est un élément important de la manière dont réagissent les populations concernées par ces sites. Je m’exprime au titre de la Communauté Urbaine de Dun- kerque qui est un des sites reconnus dans la région Nord-Pas-de-Calais pour avoir énormément d’avantages en termes d’implantations Seveso, quantitativement, certes, avec la proximité de la plus grande centrale européenne. C’est un environnement que je vous invite à venir voir d’ailleurs. Et ma présence ici prouve que l’on peut y vivre ! J’ai une obser vation sur l’évolution de ce critère : il suffit parfois de quelques articles de journaux sur une annonce d’éventuelle arrivée d’une implantation Seveso ou d’un reportage télévisé sur telle ou telle problématique liée à une entreprise à risques, pour que le degré d’acceptabilité varie. Je veux dire que cela n’est pas une constante. C’est un domaine où les gens sont attentifs, mais ils vivent à côté et ils vivent avec. Et je crois que l’on sous-estime la médiation des personnels qui travaillent dans l’entreprise. Je me souviens avoir eu un certain nombre de débats dans un site du territoire dunkerquois, qui s’appelle Mardyck et qui est entouré d’entreprises concernées par la directive Seveso. Dans ces débats publics, vous aviez des représentants syndicaux et des représentants du personnel. Ce sont eux qui effectuent la plus grande médiation à l’égard de la population. Il faut savoir que ces personnels sont les premiers à avoir le souci des garanties pour l’avenir et des protections indispensables. Je ne dirais pas que c’est une constante intangible, l’air du temps peut faire des variations. I Philippe Lefait Nicolas De Warren, je vais vous demander de réagir à ce qui vient d’être dit. A propos de 175 Plénière 2 l’information, à quoi sert-elle ? Sur la délocalisation, vous, seriez-vous prêt à délocaliser si vous êtes surchargé de réglementation ou s’il est plus facile de vous installer ailleurs ? I N i c o l a s D e Wa r r e n , D i r e c t e u r d e s r e l a t i o n s i n s t i t u t i o n n e l l e s , A r k e ma 176 Je vais d’abord expliquer du point de vue de l’industriel ce que représente le PPRT. Arkema est le numéro 1 de la chimie en France. Mais au niveau mondial, nous sommes un groupe assez moyen, nous devons être 30e ou 40e. Nous avons 80 usines dans le monde et 35 en France (35 ICPE bien sûr). Sur ces 35, nous avons 19 Seveso Seuil haut et donc 19 PPRT. Nous avons donc déjà une expér ience acquise sur la question. Depuis 2005, j’ai fait un recensement, nous avons dû mener 120 compléments aux études de dangers, c’està-dire pratiquement 120, voire 125 nouvelles études de dangers. Il faut savoir qu’une étude de dangers, c’est a minima deux ingénieurs par an à temps complet. Sur les cinq dernières années, nous avons donc mobilisé 50 ingénieurs par an sur la question. Ce sont de gros investissements. Je ne dis pas que ces sont des investissements trop chers. Je dis que ce sont de gros investissements. Je veux simplement faire toucher du doigt les efforts que cela représente. Je ne parle que de l’étude elle-même. Il y a par ailleurs, après la mise en place des mesures complémentaires, des mesures supplémentaires et bientôt les mesures sur le bâti. Voilà pour une réalité qu’il faut percevoir. Quant au sujet de la maîtrise du risque et de la stratégie industrielle, la délocalisation est un terme qui ne correspond pas à la réalité. En matière de choix de localisation de l’in- vestissement pour un groupe mondial comme le nôtre, vous avez des causes immédiates et des causes profondes. Il y a ce que les sociologues appelleraient des megatrends, puis des éléments plus immédiats. Le risque ne fait pas partie des megatrends. Qu’est-ce qui détermine aujourd’hui le choix de la localisation de l’investissement ? C’est une tendance, mais ce n’est pas un megatrend. C’est bien évidemment le marché, la proximité du marché. Le deuxième élément fondamental pour la chimie, c’est l’accès aux matières premières. Le troisième élément absolument déterminant, ce sont les infrastructures. Des infrastructures portuaires, routières, la qualité de la logistique, les pipelines, c’est un sujet absolument majeur. Je n’ai pas le sentiment qu’il soit suffisamment pris en compte pour les industries chimiques ou pétrolières. On raisonne beaucoup « usine », « site ». On raisonne moins « plate-forme », « connexion entre les plates-formes » et « connexions entre les chaînes logistiques », alors que c’est ce qui détermine fondamentalement une décision de localisation d’un investissement. Quant à la politique de risques, je dirais qu’une politique de risques, de maîtrise des risques intelligente, une bonne politique, c’est une politique qui d’abord est stable. L’industriel a absolument besoin de visibilité et de stabilité. Il a horreur de l’incertitude et en particulier de l’incertitude réglementaire. Une bonne réglementation, c’est une réglementation stable surtout quand elle est complexe. Une fois qu’elle a été adoptée, il faut qu’elle soit stabilisée. Vous voyez l’effort que représente pour nous la mise en œuvre des PPRT. Tous nos ingénieurs y travaillent avec détermi- nation et enthousiasme. Mais nous avons besoin de cette stabilité. A contrario, une mauvaise politique de maîtrise des risques, une politique inexistante, changeante, aléatoire, incertaine, soumise à l’aléa d’un décideur local est un facteur répulsif en termes d’investissements. De ce point de vue, nous sommes, avec les politiques des PPRT en France, un facteur d’attractivité pour l’investissement industriel en France. Nous avons encore des espaces industriels disponibles, contrairement peut-être à l’Angleterre. Nous avons encore de grandes plates-formes industrielles à consolider où il reste des espaces d’accueil. Pour des startup ou des groupes étrangers qui veulent installer des capacités, il y a un espace naturel d’accueil qui sont ces grandes plates-formes Seveso II, dans un environnement de maîtrise des risques quasiment total. I Philippe Lefait Quel est votre rapport aux citoyen qui vivent dans l’entourage de vos usines ? Quelle est votre politique d’information ? Est-ce qu’il y a un nécessaire de transparence par exemple ? I Nicolas De Warren Je souscris tout à fait à ce qu’a pu dire Monsieur Delebarre et Monsieur Blein. D’une façon générale, il y a une bonne communication, une bonne compréhension, même si le lien territorial s’est distendu. Nous ne sommes plus dans le couple, voisin-usine qui existait dans la configuration du 19e. Tous nos employés habitent probablement dans des cercles qui font entre 50 – 70 – 80 kilomètres de nos usines. Cette réalité du lien physique, humain et familial entre l’usine et les populations est moindre. Ceci est contrebalancé par une bonne compréhension, une bonne participation et un grand d’intérêt. J’en veux pour preuve ; nous organisons depuis des années des opérations, les « Terrains d’Entente ». Ce sont une boîte à outils de communication de proximité, non pas seulement de communication mais également d’échange et de partage et qui marchent très bien. Ce sont des lieux de vrais débats, d’échanges. On fonctionne dans une vraie atmosphère de compréhension. I Philippe Lefait Jean-Rémi Gouze, on ne peut plus faire sans le nucléaire. C’est là et pour très longtemps. Peut-être, c’est tant mieux, mais il y a de temps en temps des réser ves émises. Par rapport à ces différentes questions qui ont été abordées, dans le comparatif avec l’Angleterre par exemple, que pouvez-vous dire en tant que représentant de l’Autorité de Sûreté Nucléaire ? I Jean-Rémi Gouze, Commissaire à l ’ Au t o r i t é d e S û r e t é N u c l é a i r e Je dirais d’abord que pour l’électricité d’origine nucléaire, la question de la délocalisation ne se pose pas. Il faut produire près des lieux de production et donc le nucléaire ne se délocalisera pas. Il faut, et c’est notre doctrine, être d’autant plus vigilant sur les conditions dans lesquelles ce nucléaire est autorisé et fonctionne. C’est pourquoi notre doctrine est de regarder, avec des examens de sûreté tous les 10 ans, comment les installations nucléaires ont vieilli, comment elles se com- 177 Plénière 2 portent. Nous ne regardons pas seulement si elles sont conformes à la réglementation de l’époque à laquelle elles ont été autorisées, mais aussi si elles sont conformes aux nouvelles règles de l’art. On tient compte du retour d’expérience comme Tchernobyl, Three Mile Island et le 11 Septembre. Au regard de ce réexamen, nous sommes amenés à autoriser une nouvelle tranche de 10 ans. Les citoyens et les élus demandent ce type de vigilance pour avoir confiance dans les décisions qui sont prises. J’ajouterai un deuxième élément qui est l’approche internationale. La France est le deuxième pays nucléaire au monde. Nous avons une responsabilité au plan international. Nous regardons, en liaison avec nos collègues de l’Autorité de Sûreté et notamment les britanniques, à faire en sorte que le niveau de sûreté soit le plus élevé possible dans le monde. Il ne faut pas qu’il y ait un nucléaire à deux vitesses, avec un nucléaire sûr en France et un nucléaire qui serait moins sûr dans d’autres pays. Il faut éviter des distorsions de concurrence puisque l’on a parlé emploi et soutien de l’économie. Pour nous aujourd’hui, le critère de sûreté pour les réacteurs existants ou pour les réacteurs nouveaux, c’est l’EPR. Nous pensons que cette technologie doit être pratiqué dans le monde. Cela étant, il serait intéressant de réfléchir en termes d’acceptation du public, à la façon de gérer en France la cohabitation de quatre générations successives de réacteurs nucléaires, depuis les 900 mégawatt conçus dans les années 60 jusqu’à l’EPR en cours de construction. I Philippe Lefait 178 Il y a parfois des notes discordantes chez certains Verts. Le débat est toujours ouvert. Mon- sieur Ledenvic, comment, vous, représentant de l’administration, avez-vous entendu ce qu’il se dit depuis 40 minutes ? I Philippe Ledenvic, Directeur de la DREAL Rhône-Alpes Je me retrouve pleinement dans ce qu’ont dit Mar yse Arditi, Yves Blein et Michel Delebarre. Il se trouve qu’en 2008, en Rhône-Alpes, la décision a été prise de faire une campagne d’information du public, comme cela se fait autour de tous les sites à risques, mais avec la particularité de la faire sur tous les sites dans l’ensemble de la région, en même temps, pour que le message ait plus de force et soit mieux entendu, mieux perçu. Il y a eu de multiples réunions. Suite à cela, six mois après, une enquête de perception a été menée pour savoir de quelle façon les gens avaient perçu et vécu la campagne. Le but était de voir d’une part si les gens avaient bien entendu les messages, mais surtout de voir ce qu’il en sortait. On peut confirmer ce qui a été dit autour de la table depuis le début : il y a des sujets qui reviennent toujours. Celui qui revient en premier dans la perception du risque, c’est la pollution atmosphérique. On parle du bruit de temps en temps, mais la pollution atmosphérique reste un sujet important. Les gens sont le plus souvent tout à fait conscients qu’ils sont à côté d’installations à risques et il n’y a pas de saturation, de refus ou de rejet par rapport à cela. Il n’y a pas non plus de sur-interprétation du risque. Par contre, et cela a été frappant, ce sur ce quoi ils posaient le plus de questions, c’était sur les PPRT. L’étude a été menée fin 2008-2009, c’était au moment où les PPRT commençaient à être prescrits. C’était sur cela qu’il y avait le plus de questions. Pour résumer, sous forme de boutade, tel que cela ressortait des échanges, le risque le plus important, c’était plus le risque des PPRT que le risque tout court. C’est totalement paradoxal, mais on peut comprendre en approfondissant. D’abord, et on rejoint ce que Mar yse Arditi a dit, ce que les gens craignent le plus, c’est ce qu’ils ne connaissent pas bien. Finalement, ces usines sont à côté, ils connaissent le risque. Le PPRT c’est un nouveau machin, on ne sait pas très bien ce que c’est et ce que cela va nous apporter. De plus, le risque technologique est un risque que l’on ne peut pas toucher, c’est quelque chose qui existe (on le sait), mais cela n’a pas de traduction concrète. Le PPRT peut avoir des traductions concrètes : c’est ma maison que l’on va racheter, c’est le foncier qui va baisser etc. Le risque est réel pour un PPRT : paradoxalement, alors c’est un outil de réduction des risques et de protection supplémentaire (au moins la première approche) et à défaut d’explication, il peut être vécu directement comme le risque concret auquel on est exposé. Voici la première explication que l’on peut donner sur cette notion de risque et de PPRT. Cela fait émerger de toute évidence la nécessité de faire de la pédagogie. Comme dans tous les domaines des risques, il faut expliquer pour que les gens n’aient plus peur. Au moins ayons peur mais en sachant. Il y a une autre perception, j’ai entendu un certain message, de même nature qui peut expliquer « le risque du PPRT ». Il y a des voix qui s’expriment très fermement et très explicitement sur le fait que ce sont les PPRT qui mettent en péril l’avenir des sites industriels. Au lieu d’apporter des solutions, le PPRT devient le risque y compris pour le site industriel lui-même. Il y a de toute évidence un gros problème d’explication, de confusion par rapport au concept de ce nouvel outil. Dans l’enquête de perception faite en 2009 et dans les réunions locales, cela a été ressorti très clairement. I Philippe Lefait Que dit-on à Feyzin de cela ? Etes-vous d’accord avec ce que dit Philippe Ledenvic ? Ce que je vous entends dire, c’est : localement, on vit plutôt avec, et d’un seul coup, il y a risque supplémentaire pourtant c’est de la protection qu’on vous apporte. I Yves Blein Oui, c’est de la protection que l’on nous apporte effectivement. Mais la question, c’est qui paye ? On veut bien être protégé davantage du risque dont on est voisin, mais qui paye ? I Philippe Lefait Il ne faut pas vous s u p p r i m e r l a t a x e p ro fessionnelle ? I Yves Blein La taxe professionnelle, c’est quelque chose qui est installée dans le paysage. Nonobstant, je pense que tout le monde a en tête la richesse que cela représente pour les territoires. Il y a aussi la richesse en termes d’emploi et il y a le coût que cela génère pour les populations. Imaginez un peu que l’on doive dire à une population (si les choses n’avaient pas évolué récemment et elles viennent en- 179 Plénière 2 core d’évoluer à nouveau, mais si on était resté sur la loi promulguée il y a quelques années), à des habitants : « vous devez faire 10 ou 15 000 euros de travaux et vous avez royalement 15 % de crédit d’impôt plafonné à 10 000 euros pour les payer. Vous payez donc les 85 % restants, vous habitez à côté d’une usine qui génère un certain nombre de difficultés et de risques, et voilà la note ». On vous la présente mais on contribue à hauteur de 15 %. Il fallait un cer tain cynisme de la par t des réglementaires . I Philippe Lefait Jusqu’où aller, sans aller trop loin, dans la prévention des risques ? C’est un peu ce que vous dites ? I Yves Blein Une nation ne peut pas revendiquer et souhaiter des entreprises sur son territoire, des industries dont il est logique qu’elles soient installées là ou ailleurs (peu importe de toute façon), qu’elles aient leur place dans le process industriel français et ne pas prendre en compte le fait que ce n’est pas aux riverains qui y habitent et qui souvent n’y sont pour rien, de payer l’ardoise de leur sécurité. Il est logique que la nation, par devoir de solidarité vis-à-vis d’eux, prenne en charge les travaux qui leur incombent. I Michel Delebarre 180 Je suis d’accord. Je disais à mon voisin que le problème, ce n’est pas l’entreprise à risques, c’est le PPRT qui est la plus grande zone de risques. Ce n’est pas l’entreprise. Pour l’habitant, c’est le PPRT. Avant le PPRT, il vivait bien, à côté de l’entreprise. Puis voilà, on a inventé le PPRT. Et il vit beaucoup moins bien, surtout quand il essaie de réfléchir à l’avenir. D’abord, ce pays ne veut plus d’industries. On ferait bien de prendre cela en considération. Beaucoup pensent que la France va se développer sans capacité industrielle. C’est une erreur totale. C’est répandu sur beaucoup de bancs de l’Assemblée et dans beaucoup de milieux. Ne voulant plus d’industrie, on ne veut surtout pas d’industrie à risques. Or, il y a des créneaux industriels sur lesquels l’absence de risque me paraît être une utopie totale. Seveso est une mesure positive, vécue négativement. Quand on vous annonce l’implantation d’une entreprise Seveso, cela n’est pas traduit comme étant un site industriel où toutes les mesures de protection vont être prises et obligatoirement prises. C’est vécu comme un site industriel qui va apporter la plus grande quantité de risques inimaginables. C’est un peu comme cela dans l’opinion publique. Ce n’est pas facile de redresser le courant. Je sais bien que la taxe professionnelle est la fiscalité la plus imbécile que l’on ait pu trouver, sauf pour les territoires concernés. Mais on a tout de même inventé l’absence de la taxe professionnelle, c’est-à-dire qu’il n’y a plus de lien entre l’activité industrielle et le territoire. Vous allez voir la conséquence pour les agglomérations industrielles de ce genre. Pour moi, ce n’est pas compliqué, la taxe professionnelle, c’était 164 millions d’euros par an, la nouvelle fiscalité : 40. La différence entre les deux, on me la garantit sous forme de dotation la première année. Merci. Vous savez un mandat municipal dure 6 ans. Cela veut dire que vous terminez dans une drôle situation par rapport à la première année du mandat. Ce n’est pas sérieux. Vous verrez qu’il y aura des conséquences à ce refus de prendre en considération le fait que l’industrie se fait sur des territoires. A chaque fois que l’on m’a retiré 10 millions de taxe professionnelle, je n’ai pas réussi à faire prendre en considération qu’il fallait déplacer une entreprise Seveso. Puisque j’ai moins de taxe professionnelle, autant déplacer les entreprises Seveso. J’en verrais bien une sur la place de la Concorde ou à Neuilly. Je suis prêt à ce qu’elles se répartissent ailleurs sur le territoire, mais nous avons vocation à accueillir, nous, ce type d’entreprises. On parlait tout à l’heure de la chimie, nous avons vocation à accueillir ce type d’entreprises. Nous avons toutes les caractéristiques en termes d’accueil, de méthode de gestion, d’accueil et d’implantation de ces entreprises, depuis 20 ans, notamment à travers le SPPPI, en toute transparence, avec toute négociation, tous les types de publics. Que fait-on de tout cela ? On est en train de nier les contraintes et l’exigence industrielle dans ce pays. Je crois que le rendez-vous sera terriblement perturbant. I Mar yse Arditi Il y a huit jours, le 15 octobre, nous fêtions le bicentenaire du premier texte de Napoléon sur les ateliers incommodes, dangereux et mal odorants. Qu’est-ce que cela veut dire ? Quelqu’un vit autour d’une usine. Elle marche, elle fonctionne, il a l’habitude. Si elle ne lui envoie pas trop de gaz toxiques de temps en temps, si elle ne pollue pas trop, il a l’habitude. Que signifient les PPRT aujourd’hui ? C’est la loi qui signe deux siècles d’échec. Deux siècles pendant lesquels on a écrit, les uns après les autres, dans toutes les lois, que l’on va faire attention de ne pas mettre l’urbanisation trop près des usines à risques. Cela existait en 1810. Autrement dit, pendant deux siècles, on n’a pas réussi à appliquer la loi. Du coup, est arrivé AZF. C’est un traumatisme fort pour tous, élus, Etat, riverains. Du coup, la loi a été très loin et a décidé ne pas s’attaquer seulement à l’urbanisation existante, mais de s’attaquer aussi à l’urbanisation future . Nous devons achever le divorce entre l’urbanisation dense et les usines à risques. Vous savez, un PPRT, c’est deux kilomètres. Ce n’est pas très difficile quand vous avez une grande plate-forme de décider qu’à deux kilomètres, il n’y aura pas d’habitation. Je mets encore une fois en garde. En tant qu’association, je veux bien aller mouiller ma chemise pour convaincre, quand cela se justifie, les riverains que des efforts sont faits et que cela vaut la peine. Mais je suis incapable de convaincre un riverain quand je lui explique qu’il y avait un modèle, le cercle rouge faisait deux kilomètres et demi, mais on a changé le logiciel et il ne fait plus que 500 mètres. Allez gagner la confiance de vos riverains, cela va être un peu dur. Je m’adresse aussi aux élus car si les usines sont près des habitations, c’est que quelqu’un a donné l’autorisation de construire l’habitation et l’usine et l’autorisation d’exploiter l’usine. L’industriel n’est pas seul en cause. Il a eu toutes les autorisations. I Philippe Lefait Pour Xynthia, il y avait des maisons construites là où il ne fallait pas. Il y a eu des autorisations aussi. 181 Plénière 2 I Mar yse Arditi I Philippe Ledenvic C’est Toulouse qui a rattrapé AZF. Il y a un élu qui n’a pas su s’arrêter à temps et décider qu’à trois kilomètres, on ne construirait plus. On a laissé rattraper AZF. Qu’il y ait au moins un point d’accord autour de cette tribune, même si c’est difficile, même si cela va s’échelonner dans le temps, prenons l’engagement d’avoir en vision et de dire « on ne rapprochera plus ». Deux à trois kilomètres suffisent, ce n’est quand même pas très difficile. On n’est pas en Grande-Bretagne. On n’est pas en Belgique. Après avoir exposé la perception qui existe sur le terrain, je vais essayer de réhabiliter les PPRT. Sur le fond, il a été rappelé à quoi cela ser vait. Et cela sert à quelque chose, sous réser ve de le financer. C’est utile, mais, dans l’élaboration (et on est un peu partout dans les phases d’élaboration, et en Rhône-Alpes, nous avons des PPRT compliqués), le premier réflexe est le déni du risque. Cela revient à dire d’une autre façon ce que vient de dire Mar yse Arditi. Je suis désolé de le dire parce que l’on a beau faire tout ce que l’on veut en termes d’explication du risque, de le concrétiser, de le quantifier, de l’expliquer, la première réaction, c’est le déni du risque. Une fois que l’on a réussi à faire passer l’idée qu’il y a quand même un risque et qu’il sort des limites d’une usine, on vous dit : « écoutez. Il faut réduire le risque à la source pour que cela reste à l’intérieur de l’usine ». Effectivement, on essaie de faire tout ce que l’on peut et on y met du soin. On exploite les études de dangers. On y travaille. On arrive parfois à trouver des mesures supplémentaires qui peuvent permettre d’apporter des améliorations. Mais on se retrouve quand même avec des patatoïdes. Après, on commence à avoir d’autres idées, pour dire : « il faut impérativement que vous trouviez des solutions pour faire rentrer les bouts de patatoïdes qui sont dehors, pour les faire rentrer à l’intérieur ». C’est un peu la saucisse que vous indiquiez. Il se trouve que tout ce débat là, avant les PPRT (et c’est pour cela que moi je considère que c’est une des vertus), on pouvait rester durablement dans le déni sans bouger. Avec un PPRT, on ne peut plus. La réalité est concrète- I Philippe Lefait Et s’il y a du vent ? I Mar yse Arditi Il ne fallait pas poser cette question. Je vais vous dire pourquoi. Nous sommes dans une région où le vent est comme cela : vous prenez la rose des vents, elle fait cela chez nous. Il n’y a que deux côtés et tout est sur les deux côtés. On fait le PPRT, la zone rouge (elle est ronde). Alors je lève la main et je dis : « et le vent ? ». Je n’ai toujours pas d’explication. Alors après quoi il y a un riverain qui arrive qui dit : « mais c’est drôle. Et le vent ? ». Et après il y a un troisième qui arrive et qui dit : « mais le vent ? ». Et on en est toujours là. Cela aussi c’est un problème. Vous m’avez tendu la perche. Ce que je voulais dire, c’est que vraiment là on a un problème. Donc il y a une crédibilité à faire. I Philippe Lefait 182 Pourquoi ne pas imaginer un PPRT en saucisse plutôt qu’en rond ? ment sur la table. Après, on étudie techniquement les choses, le plus honnêtement possible. C’est effectivement un peu difficile dans des agglomérations sur lesquelles on dit : « non, il y a des cercles qui resteront dehors et nous n’y pouvons rien. Cela sera comme cela ». Le PPRT a pourtant une vertu, une fonction, qui est d’aller vers une construction commune de l’acceptabilité, si l’on veut. Et si on ne le veut pas, il faudra prendre la décision ensemble. I Philippe Lefait Parmi ceux qui ont voté dans la salle, il y a une forte majorité qui pensent que l’acceptabilité est de moins en moins évidente. 60 % pensent que l’acceptabilité du risque est beaucoup moins for te qu’en 2008. Encore une fois , tout ceci ramené aux gens qui ont voté dans la salle. I Michel Delebarre Je vais essayer de défendre ce thème un peu difficile, mais Jacques Vernier va m’aider. Ce n’est pas évident, mais cela mérite d’être dit tout de même. J’ai deux obser vations Madame. Premièrement, je voudrais faire un rappel historique. La maîtrise des décisions d’urbanisme historiquement a appartenu pendant des générations à l’Etat dans ce pays. Je veux bien que l’on pointe du doigt les élus, mais je vous signale que la décentralisation d’un certain nombre de décisions d’urbanisme remonte à 20 ou 30 ans, pas beaucoup plus. On ne peut tout de même pas leur faire porter la conséquence de décisions qui leur a échappé. La deuxième est une illustration. Ce n’est qu’un témoignage, je prends Michel Pascal Directeur de la DREAL dans notre région à témoin. Depuis près de 13 ans, dans l’agglomération que je pilote, la Communauté Urbaine de Dunkerque, nous avons un schéma d’environnement industriel. Toutes les entreprises ont pris l’engagement de ne pas faire d’investissement à risques qui mettent en cause, d’une manière ou d’une autre, les sites d’urbanisme dans notre agglomération. Tous les élus ont pris l’engagement de ne pas réaliser d’opération d’urbanisme qui mettent en cause l’installation industrielle. Par une volonté de toutes les parties prenantes et en toute transparente avec les associations et tous les acteurs, nous nous sommes dit : « si l’on veut vivre ensemble, il faut accepter d’anticiper sur ce que serait éventuellement les secteurs à risques ». Quand une nouvelle entreprise veut s’implanter, elle doit tenir compte des préconisations du schéma d’environnement industriel. I Philippe Lefait Une sorte de grenelle à la dunkerquoise. I Michel Delebarre Je ne sais pas comment ils font en GrandeBretagne. Ils ont l’air de faire des choses pas mal mais ils n’ont pas de Grenelle. Je ne sais pas comment ils peuvent y arriver. Vous savez sur le Grenelle, les phénomènes de mode ont du mal à passer chez nous (c’est le vent qui doit nous aider un peu). Hier, nous avons fêté le 20e anniversaire du SPPPI Côte d’Opale Flandre. Cela fait 20 ans que l’on travaille en transparence, tous autour de la table, en mettant toutes les questions y compris les problèmes de conséquences sur la santé, dans 183 Plénière 2 le cahier des charges du SPPPI. Le Grenelle est peut-être l’enfant naturel du SPPPI. Ce n’est pas l’inverse. J’ai fait remarquer à un représentant des autorités nationales qui ont enfanté le Grenelle, qu’il est écrit dans leurs textes issus d’une des décisions du Grenelle, que l’on va inventer des commissions locales. Je leur demande de faire un décret dont l’article premier sera, là où il existe un SPPPI, on n’y touche pas et on ne met rien d’autre en place. Dans les endroits où il n’y en a pas, on fait un certain nombre de recommandations. Cela je le comprendrai. Mais ce serait l’une des premières mesures d’économie d’environnement, à mon avis, nécessaire ». I Philippe Lefait Nicolas De Warren, je voudrais vous poser deux questions car elles concernent les industriels. Ce sont des questions qui ont été envoyées par SMS depuis la salle. Quand on est dans une période de crise, l’industriel a-t-il plutôt tendance à investir pour récupérer de l’argent qu’investir pour protéger l’environnement. Deuxième question : « crise économique, pause réglementaire ? ». I Nicolas De Warren 184 Sur le premier point, je voudrais illustrer ce que me paraît être le PPRT, pour abonder dans le sens de ce que disait Philippe Ledenvic. Il paraît que le PPRT est la meilleure illustration d’un aphorisme célèbre du président Queuille sous la IVème république qui disait que l’on sort toujours de l’incertitude à son détriment. C’est vrai qu’aujourd’hui, tant les collectivités locales, que les riverains, quand on rentre dans le dur d’une discussion, d’un côté de la route, on va peut être exproprié et de l’autre pas. On rentre dans le dur et on sort de l’incertitude à son détriment. Il faut faire en sorte que le détriment soit le plus faible possible, bien évidemment. Deuxième point sur le processus des PPRT. Je crois que c’est un processus très positif. C’est vrai que l’on est en plein dans les discussions. Nous avons besoin de vous, les élus, pour avancer sur la conclusion. Il y a déjà dans l’opinion publique une amorce de compréhension de ce que c’est un PPRT. Il faut, par l’accélération du processus (et je crois que c’est ce que le Ministère a senti), faire en sorte que l’on passe cette étape psychologique pour que les gens voient les aspects positifs et les aspects concrets, et qu’on les sorte de l’incertitude, du fait de savoir s’il auront à payer une nouvelle fenêtre, faire un local de confinement, s’ils sont en zone rouge, bleue ou verte. Nous avons besoin de vous , les élus , pour a boutir le plus ra pidement possible sur ces conventions tr ipar tites en par ticulier. Sur les deux questions, que fait-on en temps de crise ? Un groupe comme le nôtre, investit sensiblement 5 % de son chiffre d’affaires, 300 millions d’euros par an dans le monde. Sur ces 300 millions, plus de la moitié, 55 % sont des investissements de maintien et de sécurité et environnement. En 2009, nous avons eu une baisse du chiffre d’affaires de 21 %. Nous avons perdu 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Nous avons baissé nos investissements de 300 à 200 millions. Nous n’avons pas touché à nos investissements maintien sécurité et environnement, nous avons coupé nos investissements et nous n’avons pas touché, parce que l’on ne veut pas toucher à nos investissements maintien, sécurité et environnement. d’une globalisation, d’une mutualisation européenne de l’approche, sinon de sa totalité ou du moins de ses meilleurs éléments. I Philippe Lefait I Philippe Lefait Trop de réglementations tue l’économie ? La salle nous pose la question classique : le principe de précaution risque-t-il de tuer l’économie ? A partir de quel moment un risque peut-il être considéré comme acceptable ? C’est une bonne question. I Nicolas De Warren Non, je le disais tout à l’heure, une réglementation intelligente, proportionnée à ces objectifs est importante. Le principe de proportionnalité me paraît absolument déterminant. C’est pour cela que le législateur dans la conception des textes doit toujours avoir ce réflexe de l’étude d’impacts. Maintenant, les missions d’évaluation, de contrôle et d’études d’impacts qui commencent à se faire aux niveaux national et communautaire, doivent bien propor tionner les outils aux objectifs . Quand le législateur, peut-être dans l’enthousiasme d’un vote au petit matin en 2003, a dit qu’il fallait que les PPRT soient adoptés dans les cinq ans, il y avait un petit manque de réalisme. C’est l’ambition du législateur. Il ne faut pas oublier la proportionnalité des objectifs, des moyens et des outils. Dernier point qui est important, c’est la différence, l’éventuelle handicap compétitif par rapport à nos voisins qui n’ont pas de réglementation PPRT. Transformons ce que certains pourraient considérer comme un handicap en un avantage. Nous avons maintenant disons deux ans de recul sur les PPRT. Nous avons suffisamment capitalisé sur l’expérience pour que nous portions au niveau communautaire le concept du PPRT. On peut se retrouver tous, élus, industriels, associatifs pour porter l’idée I Nicolas De Warren C’est une question de quantification : Quand il est compris, le risque est mesuré. Je crois que là encore l’incertitude suscite l’angoisse, l’inquiétude. Nous avons des outils de mesures, nous avons des indicateurs. C’est toute la logique de la politique d’information de transparence, la mesure. I Philippe Ledenvic J’ai peut-être une autre réponse dans la suite de ce que je disais tout à l’heure. Quand on aura fini, approuvé et signé le PPRT et que l’on aura signé une convention financière, on aura deux documents dans lesquels le risque sera connu, il sera accepté dans ses conséquences en termes d’organisation. Avec la convention financière, il y aura un accord pour financer un certain nombre de mesures quelle qu’elles soient pour que ce soit mis en œuvre. Ce sont deux marques d’acceptabilité qui ne sont pas négligeables. Cela ne veut pas dire pour autant que l’on accepte le risque ad vitam æternam et que l’on se refuse à faire des progrès. Mais quand nous aurons franchi ces deux étapes, partout où il y a des PPRT, je trouve que c’est un signal. Collective- 185 Plénière 2 ment, il y aurait eu un accord entre l’industriel, l’Etat, les collectivités et avec la concertation et la consultation de la population, sur un point d’équilibre avec lequel on va vivre, même si ce n’est pas parfait, ni idéal. Si on peut le faire progresser, on le fera, mais vivons au moins avec cela pendant que l’on peut. I Maryse Arditi L’acceptabilité du risque, ce n’est pas seulement l’usine Seveso et les PPRT. Je sais qu’aujourd’hui, c’est omniprésent mais je voudrais que l’on ait une vision plus générale. Quels risques êtes-vous prêt à accepter à un endroit donné ? La réponse normale, c’est quel avantage j’en ai. Tous les salariés d’une usine sont les meilleurs médiateurs pour que les gens dans l’environnement acceptent l’usine. Il y a leur famille, ils la font vivre, puis il y a tous les gens autour, cela fait vivre toute une activité. Eux, ils voient bien leur avantage. La seule chose qu’ils souhaitent, c’est bien évidemment que l’on réduise les risques au maximum parce que de toute façon si il y a un pépin, c’est eux qui payent en premier. Vous avez aussi prononcé le mot « principe de précaution ». Quand un nouveau produit émerge, quel risque le public accepte-t-il ? I Philippe Lefait Sur le téléphone portable, il accepte actuellement tous les risques. I Maryse Arditi 186 Il accepte des risques sur le téléphone portable, mais il demande que l’on fasse attention aux antennes et que l’on y diminue le risque. Sur les nanotechnologies, pour l’instant, il est plutôt contre parce qu’il n’a pas encore vu quel en est l’avantage. Il commence à entendre des bruits sur les inconvénients. Sur les OGM, il est clairement contre. Je vais vous dire quelle est la vraie traduction. Tout ce qui relève du principe de précaution, le vrai, (arrêtons d’appeler principe de précaution n’importe quoi), c’est un principe sur des risques de dangers que l’on ne connaît pas, que l’on cerne mal. Pour moi, l’évidence, c’est quand un risque est innassurable par un assureur. Vous pouvez être sûr que l’on est dans le principe de précaution. I Philippe Lefait C’est un bon signe. I Mar yse Arditi Cela veut dire que lui est incapable. Si lui ne peut pas l’évaluer, personne ne peut l’évaluer. Dans ces conditions, il ne peut pas l’assurer. Si il y a un risque sur lequel on ne peut pas savoir quel est le risque et si l’intérêt pour le citoyen est nul, il va vous dire que le risque qu’il va accepter est nul, lui aussi. Et le risque zéro n’existe pas. Essayez de garder cette idée en tête. S’il y a un inconvénient je veux bien, mais j’en tire un petit intérêt. C’est quoi l’intérêt ? Si je n’ai que des inconvénients et pas d’avantage, je ne vais pas marcher. Questions de la salle I Fabrice Delhomme, Association Denain Ecologie Avant de poser mes questions, je voudrais d’abord étayer deux exemples que l’on vit à travers notre association. Le premier, c’est un site sur lequel était prévu de mettre des décharges de classe 1, 2 et 3. Le rapport réalisé par l’entreprise propriétaire du site disait que c’était un milieu rural. Le sol était apte à recevoir ce type de construction. Seulement, ce milieu se trouve quasiment en plein cœur de ville et le terrain n’est pas du tout approprié. Suite à différents débats, différents combats, le projet est donc abrogé. Le deuxième exemple concerne le canal de l’Escaut que l’on veut élargir pour tout un réseau commercial. Il y a le problème de stockage des boues, sans compter les pollutions historiques qui sont au fond du canal qui vont couler tout le long, avec tous ces travaux. Par rapport à ces boues, l’entreprise qui a eu le contrat pour le stockage de ces boues fonctionne déjà actuellement en surcharge d’exploitation. Pourtant elle va le faire, ce qui m’inquiète. Quand on parle d’entreprise à risques, ne serait-il pas plus judicieux de parler de situation à risques plutôt que d’entreprise à risques ? I Nicolas De Warren On raisonne sur des établissements bien évidemment, des sites industriels voire des ateliers à l’intérieur d’un site ou d’une plateforme. I Une personne de la salle J’ai écouté les débats et à cet instant précis, je n’y comprends plus rien. J’ai entendu parler de PPRT. J’ai moi-même participé à l’élaboration du PPRT des installations Seveso près de chez moi. J’ai entendu dire qu’il fallait accélérer le mouvement pour les terminer. On a dit beaucoup de bien sur la convention financière tripartite. D’un autre côté, j’ai aussi entendu la tribune dire que le danger ce n’était pas l’usine Seveso, c’est le PPRT. Je me pose des questions. Maintenant, je voudrais quand même dire à Monsieur Delebarre que j’ai beaucoup apprécié ses grandes qualités d’orateur qu’on lui connaît. J’ai même entendu dire, près de moi : « on voit que c’est un politique ». C’est une qualité que l’on vous reconnaît. Mais Monsieur Delebarre, j’ai eu l’impression de comprendre à travers à vos propos qu’une installation Seveso, ce n’est pas dangereux, comme s’il n’y avait jamais eu d’accident et que l’on peut espérer qu’il n’y en aura jamais. Je le souhaite, à Dunkerque en particulier. Mais je me pose des questions, parce que j’ai eu l’impression qu’en ce qui vous concerne, la perte de la taxe professionnelle, c’était une sacrée tragédie. I Michel Delebarre Je voudrais réajuster les choses. La tragédie n’est pas que pour moi. Elle est pour 220 000 personnes qui vivent dans l’agglomération. La taxe professionnelle, c’est des moyens financiers qui sont recyclés en équipements collectifs, en solidarité sur un territoire et cela concerne des milliers de personnes. A propos de Seveso, peut-être me suis-je mal exprimé. Je dis simplement que quand vous ou la presse annonce qu’une entreprise Seveso va s’installer dans l’agglomération dunkerquoise, les personnes le vivent comme un risque supplémentaire. Or, je voulais rappeler que la directive Seveso ne fait qu’imposer le maximum de précautions à l’égard de l’entre- 187 Plénière 2 188 prise qui va s’implanter. Ce n’est pas comme s i o n n i a i t l e c a ra c t è re d a n g ereux de l’en t re p r i s e . M a i s l e s d i re c t i ve s européennes , re l a y é e s par les lois françaises, disent que cette entreprise devra prendre toute une série de précautions par rapport à son activité. Il y a une forme de contresens derrière Seveso et il faut expliquer que ce sont les éléments de précaution qui garantissent que cette entreprise pourra fonctionner sur un territoire avec un minimum de risques. A propos des PPRT, je reconnais avoir dit que le risque industriel, je me demande si, dans certains cas, ce n’est pas le PPRT qui est la plus grande zone de risques. Parlons par exemple d’une commune de mon agglomération, Saint-Pol-sur-Mer, juste à côté de Dunkerque. 50 % du territoire est compris dans la patate. 50 % du territoire d’une commune qui fait 22 000 habitants. Cela signifie que vous commencez à dire à, à peu près 10 000 habitants : « vous savez les travaux dans votre maison, vous allez pouvoir les revoir parce qu’il va falloir prendre beaucoup plus de précautions, sans compter celles qui ne seront plus négociables parce que vous êtes dans une zone de PPRT ». Le PPRT, c’est comme faire mijoter quelque chose : vous laissez sur le feu et après quelques mois il bonifie. Il bonifie parce que la DREAL a fait des études et la patate est devenue une frite. Le périmètre est revu. La seconde perception du PPRT, quand la zone a été revue, finit par concerner beaucoup moins d’habitations et est vécue tout à fait différemment. Toutes les entreprises ne sont pas encore dans le coup et puis les collectivités hésitent encore beaucoup. Prenons le temps d’expliquer et d’affiner les PPRT. Il y a quelque chose qui a été dit dans la table ronde précédente que j’ai trouvé très intéressante. Le PPRT est déterminé en fonction des risques actuels de l’entreprise implantée. Mais l’entreprise et les gérants de l’entreprise peuvent aussi faire des efforts pour diminuer les risques qui existent dans cette entreprise. Dès lors, le PPRT change de configuration parce qu’une partie des risques sont carrément intégrés dans l’entreprise et n’ont plus les mêmes conséquences sur l’environnement. C’est un travail de coproduction qu’il faut faire assez vite, mais qui doit être approfondi. I Nicolas De Warren Cela peut devenir dans ce cas-là une chips, pour prolonger votre métaphore. Ce sont ce que l’on appelle les mesures supplémentaires. Cela consiste à travailler sur la réduction des risques à la source. C’est ce qu’on fait, dans les PPRT. I Représentante de Lyondell Basel Je trouve que les industriels, et je remercie la personne qui est sur scène, ont été peu bavards, c’est pour cela que je prends la parole. Je représente le site Lyondell Basel dans le midi, sur l’étang de Berre. Monsieur Ledenvic le connaît bien. J’apporte un petit témoignage. La première raffinerie de pétrole avait été installée dans les années 1929, très loin de la ville. Aujourd’hui, nous avons des riverains justes contre les grillages. Donc je rejoins làdessus ce que disait Madame Arditi. Un deuxième point. Nous avons mis en place une politique de transparence au niveau de notre site industriel et avant AZF (c’est un point très important), nous avons mis en place les premières CLIC. Ce qui est important, c’est cette volonté de dialoguer avec nos riverains. Un point qui me paraît important, c’est de souligner que les industriels ont été extrêmement touchés par la crise. Le milieu industriel a perdu des milliers d’emplois. C’est un élément que nous devons prendre en compte. Je voudrais rebondir sur ce que disait Monsieur, quand il parlait de politique constante par rapport à la législation. Cela me paraît être un point très important. Si demain on dit qu’il faut réduire de 20%, de 30% etc. il y a des enjeux financiers importants. L’industriel veut ce dialogue, veut cette transparence, mais également un engagement avec le législateur dans ce cadre-là. I Philippe Lefait Une réciprocité du gagnant-gagnant. I J o s e p h D u c o d y, M e m b r e a c t i f d e l’association Pas d’explosifs dans nos villages Je rebondis sur les PPRT. Nous avons accepté un PPRT pour une société de stockage, devenu un magasin, c’est une grande surface de dynamites et de produits explosifs. Le PPRT est à 14,5 tonnes. Il y a une nouvelle demande d’augmentation du tonnage multiplié par cinq. Je trouve aberrant que le PPRT de 14,5 tonnes reste valable pour les 64 tonnes. Le rayon d’action, la patate comme vous le disait Monsieur le Ministre Delebarre, n’a pas augmenté. La capacité était limitée aux camions de trois tonnes. Aujourd’hui nous sommes avec des camions de six tonnes, voire huit tonnes, le camion et la remorque font 16 tonnes). De plus, je pense que la société ne veut pas dépenser un centime. Elle ne voit que son intérêt financier. C’est un groupe étranger qui exploite et fait plusieurs dizaines de millions de bénéfices par an. Elle avait proposé, lors d’une réunion intercommunale, de mettre des films sur les vitrages. Le directeur de la réunion d’après, a dit : « il n’était pas question que je dépense un centime, pour protéger vos habitations. Je me protège moi ». Il est question qu’il rachète du terrain pour ne plus passer avec ses camions devant l’école où il passe actuellement. I Philippe Ledenvic Je n’irais certainement pas prendre position sur ce cas que je ne connais pas. Mais, si l’aléa nouveau généré diffère de l’aléa existant, si on a un risque qui a augmenté, il est prévu dans la loi ce qui s’appelle les ser vitudes d’utilité publique sur les territoires nouveaux qui seraient impactés. Le PPRT a pour vocation de régler l’existant. J’ai connu d’autres dossiers où effectivement, en plus du dossier de demande d’autorisation, il y avait la demande d’institutions de ser vitudes d’utilité publique, pour compenser l’effet de l’aléa nouveau ou de l’aléa supplémentaire. I Philippe Lefait Le débat reste ouvert. Je trouve que, cette table ronde et celle de ce matin ont été particulièrement riches. Mais c’est ouvert. Cela reste à discuter. Laurent Michel va conclure cet après-midi. 189 Clôture Laurent Michel, Directeur Général de la Prévention des Risques, Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer Il me revient le redoutable honneur, mais qui est aussi un plaisir, de conclure ces Assises. Ce sont des Assises qui ont été riches et ont permis de continuer des échanges sur des sujets déjà traités lors des éditions précédentes et échanges qui sont renouvelés puisque les sujets avancent dont les PPRT. Cela nous a permis aussi et on en avait longuement discuté avec Michel Pascal et ses équipes, d’enrichir avec un certain nombre de sujets, entre autres, autour des impacts sanitaires ou du post-accidentel par exemple. Nous n’avons pas oublié l’ouverture aux experts et aux acteurs étrangers européens en particulier, c’est quelque chose d’important pour ce type de travaux. Je ne vais pas reprendre tout ce qui a été dit dans ce colloque, ni reprendre toutes les politiques en cours. Je crois qu’on a bien vu les progrès, les actions en cours et à venir. 190 Je retiens quelques enseignements et quelques messages pour finir. Nous avons bien identifié aujourd’hui un certain nombre de consensus sur ce qui avance, mais aussi sur les difficultés. Nous avons beaucoup parlé de la concertation. On voit bien que le consensus est que la concertation doit aller au-delà des structures, qu’on a un dialogue qui soit compréhensible. J’ai aussi entendu dans l’atelier sur « les instances de concertation » en y assistant un peu et dans son compte-rendu, l’importance d’aller au-delà du premier cercle car il se forme un cercle de divers représentants des acteurs qui commencent à approfondir, mais on doit aller au-delà de ce premier cercle. Sur la concertation, nous avons des outils qui ont été imposés ou rendus possibles par les différentes lois successives. Vous connaissez les divers comités d’information, les plaquettes que l’on distribue, l’information des acquéreurs et des locataires. Au-delà des approches qui sont forgées au fur et à mesure de l’histoire, sur des territoires plus larges qu’un simple site, nous avons des approches volontaires dont les Secrétariats Permanents de Prévention des Pollutions Industrielles (celui de Côte d’Opale Flandre a fêté son 20e anniversaire, certains ont presque 40 ans)… De nouveaux se créent et dans des visions encore plus larges que les seuls sujets industriels, comme à Grenoble, où a été créée une structure pluri-partite de concertation sur la globalité les questions de risques et d’environnement en connexion avec l’aménagement. Ceci est extrêmement important. On a vu aussi que ces lieux institutionnels sont en plus des lieux de construction (je l’ai entendu dans l’atelier sur les études sanitaires de zone), des endroits où on peut faire émerger le sujet. On peut, comme cela a été dit sur le dunkerquois, développer des visions à long terme, comme l’accueil des entreprises, les schémas. Je voudrais rassurer le Ministre Michel Delebarre. La loi Grenelle II n’impose rien. Elle permet au préfet de créer, évidemment s’il y a un besoin, des commissions de suivis de sites, y compris autour de sites non Seveso (c’est obligatoire pour les Seveso). Le préfet peut aussi les créer pour des zones multi-sites. Il n’est pas obligé de le faire. Cela n’implique pas de remplacer les SPPPI existants par ces commissions de suivi de site. On a d’ailleurs un décret sur les SPPPI. J’en ai une forte conviction, sur la concertation, il n’y a plus besoin de créer de nouveaux outils obligatoires et bien léchés tel que le génie français sait le faire. Il y a besoin de progresser encore dans l’appropriation des bonnes pratiques, dans ce dialogue encore plus élargi. Je crois qu’on peut dire que l’on réussit à dialoguer dans un premier cercle de gens qui, au fur et à mesure s’y connaissent (les élus les plus intéressés, le conseil municipal ou l’adjoint au maire ou le maire qui a pris à bras-le-corps le dossier, les associatifs s’y investissent depuis des années, les syndicats de salariés, évidemment l’administration et l’entreprise). Je crois qu’on l’a assez bien réussi et il s’agit d’aller encore au-delà. On a vu aussi dans les consensus, lors de la première table ronde, l’importance de l’implication des salariés au quotidien, puis plus globalement les sujets organisationnels, par exemple sur la maintenance et le vieillissement. Sujet aussi qui pour l’administration doit traverser toujours notre action : la question de comment anticiper. Quelles sont les nouvelles technologies qui peuvent présenter des risques ? Avec le risque qui a été dit de révéler le risque. Nous travaillons actuellement avec d’autres directions du ministère sur l’appréhension des risques du véhicule électrique. Le véhicule électrique présente des risques, comme pour les véhicules à essence, simplement ils sont un peu différents. Par ailleurs, il ne faut pas que cela pénalise le véhicule électrique Le problème, ce n’est pas d’en parler, c’est que le risque existe. C’est comme pour le PPRT. Le panneau solaire aussi, on s’en préoccupe parce qu’il peut brûler. En même temps, Patrick Lagadec l’a bien dit : il faut essayer de se préparer à tout, mais aussi se préparer à l’imprévu. C’est loin d’être simple. Quelles capacités à identifier des signaux aberrants ? 191 Clôture 192 Et puis les situations un peu imprévues qui génèrent les risques. Comme la question des dérives de pollution à partir d’incendie, qui ne sont pas très gros, mais qui finalement génèrent des choses. Tout ça, ce sont des champs de travail et de réflexion qui doivent sous-entendre l’action. Quelques retours pour finir, sur des grands chantiers. On va parler du PPRT. On va bientôt appeler le PPRT une « passion française », comme un livre bien connu. Je voudrais redire que l’idée initiale, c’était d’avancer sur ce qui est peut-être un échec que de deux siècles, mais ce qui est un fait aujourd’hui, sur le sujet de la coexistence entre l’urbanisme et un certain nombre de sites à risques, sans culpabiliser quiconque. On part d’une situation. On renonce d’ailleurs à savoir si l’usine était là avant les habitations, si elle les a rejoints si le risque a diminué ou pas, depuis que les habitations sont venues, on essaie d’avancer. La démarche a apporté de vrais plus, j’en suis intimement persuadé, par des faits et non pas par des convictions théoriques. Il y a eu la réduction des vrais risques à la source induite par les études et par ailleurs, par les investissements et pas par des changements de modèles même s’il évidemment que l’on est amené à affiner les modèles. Mais nous sommes très vigilants à ne pas ramener les risques à la clôture du site par un changement de modèles, mais bien par des investissements. Si cela ne ramène pas la clôture du site, nous le disons. Les calculs de mes services montrent qu’entre le moment où il y avait de grands patatoïdes, et le moment où l’on commence à avoir des frites, comme le disait Monsieur Delebarre, les superficies des zones impactées de ces cartes sont réduites de plusieurs centaines de kilomètres carrés. Cela avait été comparé à la superficie d’un département de la petite couronne parisienne. Si on réduit fortement les zones, c’est parce que l’on a réduit les risques. Le plus, c’est que l’on aborde le sujet en se disant que l’on va le résoudre peut-être pas pour la nuit des temps, parce que les choses évolueront, les sites évolueront, mais que l’on va faire des progrès. Il y a de vraies difficultés. Je ne les nierais pas. Il y a une complexité inhérente à cet exercice. Il y a eu une instabilité du référentiel national ou local parce qu’on avançait. C’est un peu inévitable. Ce n’était nullement une tactique. C’est l’affinage de la meilleure vision de ces risques. L’autre difficulté, c’est que la dimension n’est pas que technique bien sûr, elle n’est pas que technique des risques, elle est d’aménagement de vision globale du territoire, de ces zones industrielles, de ces zones d’habitations. On voit de plus en plus qu’elle est humaine. Elle est humaine collective, mais aussi humaine individuelle. Une personne disait ce matin « ça fait une chose de plus le PPRT à laquelle on doit s’adapter. Et dans la vie, on a beaucoup de choses auxquelles s’adapter ». Je suis tout à fait d’accord avec cette analyse, même si je crois que, au bout d’un moment, petit à petit la compréhension, l’intérêt du dispositif avance. Il est évident que c’est quelque chose d’éminemment complexe et perturbant. Je ne sais pas si c’est une sortie d’incertitude, mais en tout cas c’est une entrée d’incertitude, parce que c’est une autre difficulté, la durée du processus est nécessairement longue, à un moment certainement trop longue, mais bien nécessaire. On a eu aussi d’autres difficultés dont j’espère que l’on va voir le bout, c’est le financement des travaux chez les riverains. Le crédit d’impôt de l’Etat a été relevé, il était nettement insuffisant et c’est pour cela que la Loi Grenelle II a fait un progrès. Nous ne sommes, je pense, plus très loin, et ce que j’ai entendu d’expressions publiques des représentants industriels à la table ronde, me laissent bien penser qu’on va finaliser les apports complémentaires des collectivités et des industriels. Néanmoins, cela restera difficile. Malgré ces difficultés, il faut avancer. Il faut résoudre les incertitudes. Il faudra peutêtre à un moment arrêter un certain nombre de décisions. Elles pourront être douloureuses. Elles pourront peut-être ne pas être tout à fait l’idéal que l’on aurait souhaité, côté administration, en termes de réduction du risque. Mais il faut avancer. Nous ne pouvons être ni dans le déni du risque, ni dans des tergiversations, surtout quand il ne reste plus que la convention tripartite à faire, que les cartes sont figées, que le préfet a adopté le PPRT après l’enquête publique, après l’expression de tout le monde, et qu’on a même des gens me disent : « écoutez, après tout cela nous aimerions partir ». Il faut avancer. Le risque n’est pas le PPRT. Le PPRT est sûrement une incertitude. La direction dont j’ai la charge fait d’autres PPR, avec les DREAL et les Directions Départementales des Territoires, les PPR inondations. On a aussi, même si cela est différent, ces difficultés, quand on l’enclenche, le PPR inondations apparaît comme quelque chose qui ne colle pas. Ce n’est pas lui qui ne colle pas, c’est notre politique globale qui doit permettre que malgré quelque chose qui sera toujours les inondations, ça colle un peu mieux. Pour finir, je rebondirai sur ce sujet. Malgré la crise, l’Etat a prévu de proposer au Parlement (ce sera examiné en projet de loi de finances) une séquence triennale de 100 puis 150 puis 200 millions d’euros d’engagement sur notre budget, ce qui est en hausse. Cela marque donc une priorité très forte, malgré la crise qui touche l’Etat autant que nous tous. Je ne suis pas sûr que dans deux ans aux prochaines Assises, nous aurons adopté tous les PPRT. Mais je souhaite vraiment que, maintenant on 193 Clôture 194 puisse concrétiser tout cet important travail qui a été fait. Ce travail qui déjà depuis de nombreux mois, n’est pas que technique, mais qui est de discussions avec tous. D’autres grands chantiers, on en a bien sûr. Je redirai un mot sur le plan de modernisation maîtrise du vieillissement, que les uns et les autres ont beaucoup évoqué. C’est une réflexion qui a démarré il y a deux ans, vers novembre 2008, présentée par Madame JOUANNO, notre secrétaire d’Etat chargée de l’écologie, le 13 janvier 2010. On en a parlé en plénière. Il y a eu aussi un atelier qui a réuni énormément de monde. C’est un sujet important. Il ne s’agit pas pour l’administration de dire que rien n’était fait. Il ne s’agissait pas de dire qu’uniformément il y a des problèmes partout de vieillissement. Il s’agissait de dire que c’est un sujet important qui peut-être doit nous amener à changer un peu un certain nombre de regards, parce que quand certaines installations deviennent un peu plus anciennes que la moyenne, les phénomènes de dégradation ne sont pas tout à fait les mêmes. Cela illustre aussi globalement la complexité des phénomènes, il y a des phénomènes techniques, physiques, mais il y a aussi des questions d’organisation, des orientations de maintenance, il y a des questions économiques. J’ai l’impression maintenant qu’après cette maturation, on va avancer. Je voudrais d’ailleurs saluer les acteurs en particulier les experts techniques du public, du parapublic ou des entreprises ou des fédérations qui sont investies dans des groupes de travail nationaux. On fait un point là-dessus la semaine prochaine, pour constater globalement l’avancement des méthodes, qui nous permettront ensuite dans chaque entreprise de décliner tous ces inventaires, de renforcer certains contrôles sur les points critiques, où il y a le plus de risques. Je pourrai citer bien d’autres chantiers, comme celui des canalisations ou du plan national santé environnement. Tout ceci, ce sont des chantiers lourds. Mais on voit vraiment qu’ils avancent. On voit aussi qu’ils avancent parce que le dialogue en amont, mais après aussi. En terme de concertation, on a des progrès à faire, que ce soit nationalement ou localement dans ces dialogues. Parfois, on met toute l’énergie, pour élaborer quelque chose, il faut le suivre. Donc je conclurai en rappelant l’importance du dialogue, du respect mutuel dans ce sujet, en ayant conscience que c’est difficile pour tous. Ce sont des dialogues totalement dissymétriques pour tout le monde. D’ailleurs Jacky Bonnemains disait qu’il faudrait mettre le bleu de chauffe des uns et des autres. C’est difficile pour tout le monde, y compris pour les sachant parmi lesquels on a un peu l’administration. Croyez bien, si vous êtes parmi les riverains, que ce n’est vraiment pas facile non plus pour l’administration, parce qu’elle perçoit bien les difficultés, mais elle ne sait pas toujours comment faire passer le message, ni même répondre à des questions complexes. Donc ce dialogue avec le respect mutuel, c’est ce qui peut nous permettre de progresser, sans exclure bien sûr qu’à un moment il n’y ait pas d’accord, que nous sommes dans des affaires régaliennes où l’Etat a une responsabilité en termes de sécurité publique (qui est à mon sens totalement indissociable des territoires et des entreprises). Cette responsabilité qui nous revient d’assumer sans faille, par les contrôles et parfois par les sanctions. Le dernier point, c’est qu’on sent bien dans tout cela, le besoin exprimé de lisibilité, de stabilité, de simplification. Nous sommes prêts au niveau du ministère à simplifier les procédures, là où c’est possible, à condition expresse de ne rien abaisser en termes d’exigences, en termes de protection de l’environnement et de sécurité. Tout cela nécessite un accompagnement pour la mise en œuvre au quotidien. Il est clair que c’est un mille-feuilles, et que dans le mille-feuilles il y a parfois la pâte qui peut être un peu sèche même si la crème est bonne. Même si on va essayer de réduire le nombre de feuilles, cela restera compliqué. La dimension d’accompagnement est importante. Je pense aux actions que l’on a avec les fédérations professionnelles pour expliquer la réglementation, tout cet accompagnement est nécessaire. Je voudrais finir en remerciant bien chaleureusement, bien sincèrement, l’ensemble des organisateurs des Assises et de l’Association Nationale des Risques Technologiques, avec deux pensées particulières : une pour la DREAL Nord - Pas-de-Calais, une autre tout aussi particulière, pour tous ceux qui s’impliquent, qu’ils soient industriels, associatifs, dans l’Association Nationale des Assises des Risques Technologiques, pour monter le programme. J’adresse aussi des remerciements à tous les intervenants, entre autres à nos collègues étrangers qui n’ont pas finalement tant de problèmes de transport que cela, et qui ont accepté de venir s’exprimer. Merci à tous ceux qui ont participé à faire de ces Assises un moment d’échanges riches. Je ne pourrais pas tous les citer, je vais en oublier. La dernière fois, j’avais conclu en disant que les prochaines se tiendraient à Douai. Je propose que nous continuions, si le Maire de Douai et la DREAL du Nord-Pas-deCalais souhaitent nous accueillir encore, à rester à Douai, probablement toujours sur le rythme d’une fois tous les deux ans. 195 Glossaire 196 ADELFA : Assemblée pour la Défense de l’Environnement du Littoral Flandre-Artois DEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie - Etablissement puA blic à caractère industriel et commercial, placé sous la tutelle conjointe des ministères en charge de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. Participe à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines de l’environnement, de l’énergie et du développement durable. A MARIS : Association nationale des communes pour les maîtrise des risques technolo giques, anciennement ANCMRTM A NCLI : Association Nationale des Commission Locales d’Information des activités nu cléaires ANDRA : Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs ARS : Agence Régionale de Santé ASN : Autorité de Sûreté Nucléaire. AZF : AZote Fertilisants, usine de la société Grande Paroisse, qui a détruite en 2001 B ARPI : Bureau d’Analyse des Risques et Pollutions Industrielles, structure spécifiquement chargée du retour d’expérience au sein de la Direction générale de la prévention des risques au MEDDTL B ase ARIA : Base de données qui recense plus de 37 000 accidents ou incidents surve nus en France ou à l’étranger BASIAS : Inventaire des anciens sites industriels en France B ASOL : Base de données des sites et sols pollués ou potentiellement pollués appelant une action des pouvoirs publics, à titre préventif ou curatif B uncefield (accident) : Incendie d’un dépôt de carburant de Buncefield (nord de Londres) en décembre 2005 CA MARI : Certificat d’Aptitude à la Manipulation des Appareils de Radiologie In dustrielle CDH : Comité Départementaux d’Hygiène CEA : Commissariat à l’Energie Atomique CE DRE : Centre de Documentation, de recherche et d’expérimentations sur les pollu tions accidentelles des eaux CETIM : Centre Technique des Industries Mécaniques CFDT : Confédération générale du travail CGIET : Conseil Général de l’Industrie, de l’Energie et des Technologies CGT : Confédération générale du travail CHSCT : Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail CLI : Comité Locaux d’Information CLIC : Comité Locaux d’Information et de Concertation CLIS : Commission Locale d’Information de surveillance CNAM : Conservatoire National des Arts et Métiers CNAMTS : Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés, définit la politique de l’assurance maladie et pilote les organismes chargés de la mettre en œuvre C NRS : Centre National de Recherche Scientifique. Organisme public de recherche à caractère scientifique et technologique, placé sous la tutelle du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche C ODERST : Conseil Départemental de l’Environnement et des Risques Sanitaires et Tech nologiques, anciennement le conseil départemental d’hygiène ou des carrières, CODIRPA : Comité Directeur pour la gestion de la phase Post-Accidentelle CS PR T : Conseil Supérieur de la prévention des risques technologiques (Anciennement CSIC, Conseil Supérieur des Installations Classées) CSS : Commission de Suivi de Site) D DTM : Direction Départementale des Territoires et de la Mer D EEE : Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques D eepwater Horizon : Plate-forme pétrolière louée par la compagnie pétrolière BP pour forer dans le golfe du Mexique le puits le plus profond jamais creusé en offshore. DGEC : Direction Générale de l’Energie et du Climat au sein du MEDDTL DGPR : Direction Générale de la Prévention des Risques au sein du MEDDTL D IRECCTE : Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consomma tion, du Travail et de l’Emploi D IREN : DIrection Régionale de l’Environnement D onges (accident) : Accident survenu le 16 mars 2008 à la raffinerie de Donges (Loire Atlantique) suite à une fuite de canalisation et qui a provoqué un déversement de plus 400 tonnes de fioul lourd au cours du chargement d’un navire DRE : Direction Régionale de l’Equipement D REAL : Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement. Ces directions sont issues des fusions entre les DRIRE, DIREN et DRE entre 2009 et 2010 DRIRE : Direction Régionale de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement EPIC : Etablissement Public à Caractère Industriel et Commercial ERSZ : Etude de Risques Sanitaires de Zone F IPOL : Fonds internationaux d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Il s’agit de trois organisations intergouvernementales (le Fonds de 1971, le Fonds de 1992 et le Fonds complémentaire) qui ont pour vocation l’indemnisation en cas de pollution par des hydrocarbures persistants à la suite de déversements provenant de pétroliers. FNE : France Nature Environnement. Fédération d’associations de défense de l’environ nement créée en 1968, reconnue d’utilité publique depuis 1976, agréée par les pouvoirs publics pour mener des actions en justice dans le domaine de l’environnement F NTP : Fédération Nationale des Travaux Publics FonCSI : Fondation Culture de sécurité industrielle (Créée en 2005) G hislenghein (catastrophe de) : explosion d’une conduite de gaz à Ghislenghien (Bel gique), survenue le 30 juillet 2004. La catastrophe a fait 24 morts et 132 mutilés et grands brûlés. 197 Glossaire 198 GPEC : Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences GPN : Grande Paroisse Ammoniac (NH) GRNC : Groupe Radioécologie Nord-Cotentin ICSI : Institut pour une Culture de Sécurité Industrielle IFREMER : Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer INB : Installation Nucléaire de Base I NERIS : Institut National l’EnviRonnement industriel et des rISques. Créé en 1990, Établis sement Public à caractère Industriel et Commercial placé sous la tutelle du Ministère de l’Écologie I NRS : Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles INSA : Institut National des Arts Aplliqués I NvS : Institut de Veille Sanitaire IPPC (Directive) : Integrated Pollution Prevention and Control (Prévention et réduction intégrées des pollutions). La directive IPPC est un ensemble de règles européennes ayant pour but de minimiser la pollution émanant de différentes sources industrielles. I RSEM : Institut Stratégique de l’Ecole Militaire. Etude sur la perception des risques réels et perçus depuis 10 ans. IRSN : Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire I SO : International Organization for Standardization, organisation internationale de nor malisation K atrina : Ouragan qui a touché les Etats Unis en août 2005, qui a fait officiellement plus de 1830 morts et qui a provoqué la plus grave catastrophe naturelle de l’histoire du pays L a Crau (accident) : Accident survenu en août 2009 suite à la rupture d’une conduite de la Société du pipeline sud-européen (SPSE) qui a entraîné le déversement de près de 45000 m3 d’hydrocarbures dans la plaine de la Crau (PACA) M EDDTL : Ministère de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Lo gement MEDEF : Mouvement des entreprises de France MEEDDM : Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer NATA (programme) : NRDA : Natural Ressource Damage Assessement ORGACTOUPOST (Programme) : ORGanisation des ACTeurs et des OUtils pour la gestion des Impacts POST-accidentels des accidents non nucléaires sur les populations et l’environnement PCB : Polychlorobiphényles PLU : Plan Local d’Urbanisme PMS : Plan de mise en Sûreté POI : Plan d’Opération Interne Post-traumatic Stress Disorder (Trouble de stress post-traumatique) : type de trouble anxieux sévère qui se manifeste à la suite d’une expérience vécue comme traumatisante PPI : Plan Particulier d’Intervention PPMS : Plan Particulier de Mise en Sécurité PPRI : Plan de Prévention des Risques Inondation PPR T : Plan de Prévention des Risques Technologiques R EACH : Règlement sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et les restrictions des substances chimiques R éseau Francophone de Formation à la Sécurité (RFFST) : Créé suite aux recomman dations du rapport du professeur William Dab remis en juillet 2008, a pour objectif de donner aux cadres, une formation minimale dans le domaine de la santé au travail. R isque Technolog ique (majeur) : Evénement accidentel se produisant sur un site in dustriel et entraînant des conséquences immédiates graves pour le personnel, les populations avoisinantes, les biens ou l’environnement. Risques Accidentels : SCHAPI : Service Centrale d’Hydrométéorologie et d’Aide à la Prévision des Inondations SC OT : Schéma de Cohérence Territoriale. Document d’urbanisme qui fixe, à l’échelle d’une commune, ou d’un groupement de communes, SEPA : Scottish Environment Protection Agency Seveso : Directive européenne SGS : Système de Gestion de Sécurité SNIIM : Syndicat des Ingénieurs de l’Industrie et des Mines SNPE : S PPPI ou S3PI : Secrétariat Permanent pour la prévention des Pollutions Industrielles. Les SPPPI sont au nombre de 15 en France et sont réunis dans le Club des SPPPI. extranet. club-spppi.org TGAP : Taxe Générale sur les Activités Polluantes T hree Mile Island : Nom d’une île de Pennsylvanie aux États-Unis, associé à un accident nucléaire produit le 28 mars 1979 sur cette l’île. Cet accident a été classé au niveau 5 de l’échelle internationale des événements nucléaires (INES). TMD : Transport de Matières Dangereuses T orrey Canyon : Naufrage du pétrolier d’une compagnie américaine, survenu le 18 mars 1967, chargé de 120 000 tonnes de brut et qui s’est échoué entre les îles Sorlingues et la côte britannique. Plusieurs nappes de pétrole sont venues toucher les côtes britanniques et françaises. Certains des dispersants utilisés étaient plus toxiques que le pétrole. Cet accident donne naissance aux premiers éléments des politiques française, britannique et européenne de prévention et de lutte contre les grandes marées noires. TSN (Loi) : Loi du 13 juin 2006 relative à la Transparence et à la Sécurité en matière Nucléaire T ubiana (rapport) : Rapport sur les causes du cancer, coordonné par Maurice Tubiana en mai 2009 UFIP : Union Française des Industries Pétrolières UIC : Union des Industries Chimiques VTR : Valeur Toxique de Référence 199 Tel : 03 27 71 22 99 Fax : 03 27 88 30 36 [email protected] www.assises-risques.com Organisées par les DREAL 200 avec le soutien de : Air Liquide, Aluminium Dunkerque, Anios, Arcelor, Dunkerque LNG, GPN, GRT Gaz, Minakem, Polimeri, Tessenderlo Groupe partenaires : UIC, FNE, INERIS, SPPPI, AMARIS, UFIP, SNIIM Conception et réalisation RL Event, www.rlevent.com - 2011 Assises Nationales des Risques Technologiques Service Risques • DREAL 941, rue Charles Bourseul - BP 20750 - 59507 Douai