ABORIGeNES
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ABORIGeNES
Aborigènes d’Australie Description D’après la définition du gouvernement australien, le terme « aborigène » désigne une personne qui a des ancêtres aborigènes, qui s’identifie elle‐même comme étant aborigène et qui est reconnue en tant que telle par la communauté aborigène. Aujourd’hui, on compterait plus de 500 peuples distincts en Australie, généralement divisés en clans, se distinguant par un nom spécifique, possédant leur propre langue ou dialecte. A noter que d’après les recherches archéologiques, ces peuples auraient la plus ancienne culture survivante sur terre. Organisation sociétale Au niveau de leur organisation sociale, celle‐ci se révèle assez complexe et évoluant au fil du temps. En effet, avant l’arrivée des colons, les aborigènes se déplaçaient essentiellement à l’intérieur d’un espace délimité géographiquement, basant leur mode de vie sur la chasse et la cueillette. La plupart d’entre eux s’installaient ainsi le long des côtes et avaient un mode semi‐sédentaire, vivant essentiellement de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage. Ceux établis à l’intérieur des terres, dans le bush et le désert, menaient une vie basée sur la chasse et la cueillette, pratiquant les techniques de brûlis. Aujourd’hui, confrontés à des problèmes territoriaux notamment, de plus en plus d’aborigènes deviennent sédentaires (comme nous le verrons plus tard). Quoiqu’il en soit, il semblerait qu’à l’époque, « la dynamique sociale y était réglée par des systèmes parentaux et totémiques très élaborés, ainsi que par un principe de réciprocité et d’échange1 ». En effet, les aborigènes étaient en grande partie organisés en tribu, c’est‐ à‐dire en un ensemble d’individus partageant des règles communes ou normes coutumières, vivant sur un même territoire et parlant une même langue. La taille de ces groupes variait d’une région à l’autre allant d’une centaine de membres (comme ceux du Désert de l’Ouest), à plusieurs milliers de personnes (les Warlpiri ou les Aranda par exemple). Ces « tribus » étaient également divisées en clans qui regroupaient les membres descendants d’un même ancêtre (réel ou mythique). En général, les hommes d’un clan épousaient une femme d’un autre clan suivant un schéma d’alliance exogamique sociale et locale ; ainsi, les groupes dans lesquels le père et le fils cherchaient une épouse n’étaient pas les mêmes. Le Dreamtime Comme beaucoup de communautés nomades, la terre est un élément central dans la culture des aborigènes, elle est au centre de leur vie matérielle et spirituelle. Pour autant, malgré cet élément central, l’ensemble des croyances et des pratiques semblent varier d’une région à l’autre et peuvent être caractérisées comme « faites à la fois des fragments d’un catéchisme, d’un fascicule liturgique, d’une histoire de la 1 H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 1 civilisation, d’un manuel de géographie et, dans une moindre mesure, d’un fascicule de cosmographie2 ». En effet, le système de croyances et les mythes qui s’y raccrochent sont très denses, variant d’un groupe à l’autre. Cela s’explique notamment par le fait que ces mythes sont racontés, développés, élaborés et vécus différemment par les membres de chaque groupe. Pour autant, même si les systèmes religieux divergent d’un groupe à l’autre, ces croyances semblent former un système polythéiste et animiste. Comme souvent dans ce type de système religieux, nous pouvons remarquer que les croyances et les pratiques se sont développées à partir de traditions elles‐mêmes basées sur un ensemble de mythologies. En effet, au centre de la culture aborigène, nous trouvons la notion de « Dreamtime » ou Tjukurrpa en langue anangu qui semble rassembler les différentes populations aborigènes autour d’un même élément, « mélange entre la diversité et la similitude des mythes sur l’ensemble du continent3 ». Le Dreamtime se présente ainsi comme un ensemble de récits mythiques présent chez les sociétés aborigènes qui explique notamment les origines de l’Australie et de ses habitants, mais aussi les rituels nécessaires, la cosmologie et les origines des manières de faire et de penser. Les récits du Dreamtime narrent le processus par lequel le Monde vit le jour, au temps où les ancêtres traversèrent le pays et y créèrent la vie, la géographie du territoire, les animaux, les plantes, les roches et toutes formes de vie : ces mythes « décrivent généralement les voyages d’ancêtres, souvent des personnes ou des animaux géants, sur ce qui était alors un monde dépourvu de tout. Les montagnes, les rivières, les points d’eau, les espèces animales et végétales et d’autres ressources naturelles et culturelles ont vu le jour à la suite d’événements qui ont eu lieu au cours du ‘temps du rêve’. Leur présence dans le paysage d’aujourd’hui est considérée par de nombreux peuples autochtones comme étant une confirmation de leurs croyances sur la Création4 ». Parmi ces ancêtres, on trouve la présence notamment d’un pouvoir transcendant qui aurait créé le monde. Cette déité immuable est connue sous différents noms (Balame, Bunfil, Daramulan, Nurelli, Mangela). Elle est présentée sous une forme anthropomorphique masculine et serait présente dans l’ensemble de la création (elle est ainsi reliée à l’humanité toute entière). D’autres êtres « totémiques » sont présents et occupent une place non négligeable dans la mythologie aborigène. Nous trouvons ainsi la présence du Serpent arc‐en‐ciel5, qui représente la force génératrice. Dans ce récit, le Serpent arc‐en‐ciel serait descendu sur Terre depuis la Voie lactée sous la forme d’un arc‐en‐ciel lorsqu’il aurait pénétré dans l’eau ou la pluie. Ce serait lui qui aurait notamment façonné les paysages. Ainsi, la topographie de l’Australie y est interprétée à travers des subtilités culturelles, des interprétations issues de la sagesse et de la connaissance des « anciens » ; les chemins empruntés par les ancêtres, les lieux (comme par exemple Ubirr) sont ainsi 2 A. Van Gennep, Rites of Passage, 1960 C. Berndt (dir.), Mythology, The Encyclopedia of Aboriginal Australia : Aboriginal and Torres Strait Islander History, Society and Culture, Canberra, Aboriginal Studies Press, 1994 4 Dermot Smyth, Understanding Country : The Importance of Land and Sea in Aboriginal and Torres Strait Islander History, Society and Culture, Canberra, Aboriginal Studies Press, 1994 5 Terme que l’on doit à l’anthropologue britannique Alfred Radcliffe‐Brown 3 2 considérés comme sacrés. Il existe d’ailleurs des chants et des cérémonies qui décrivent la façon de les parcourir : « Les routes empruntées par le Créateur au cours du ‘temps des rêves’, à travers les terres et les mers, (…) relient entre eux de nombreux sites sacrés qui forment un réseau de pistes qui sillonnent le pays. Ces ‘pistes du rêve’ peuvent s’étendre sur des centaines, voire des milliers de kilomètres à travers le désert jusqu’à la côte (et) peuvent être partagées par les peuples dont le territoire est traversé6 ». Les aborigènes créent de ce fait une relation particulière entre les individus, les animaux mais aussi avec la terre qui constitue un élément central et sacré (puisque l’esprit des ancêtres serait resté dans la terre, faisant de celle‐ci un lieu sacré pour les peuples aborigènes). La terre, les hommes, les animaux, les plantes… ne sont que des parties d’un grand tout sacré (ce qui explique également les conflits entre les colons et les aborigènes car les notions de propriétés ne sont pas définies de la même manière par les deux camps ; c’est encore le cas aujourd’hui). Ainsi, le Dreamtime marque un lien entre le passé et le présent, les aborigènes et leurs territoires, basant leur système de croyances sur la Nature : les humains sont associés à la terre et à des sites précis, eux‐mêmes en lien avec des ancêtres. De ce fait, préserver ces sites est un devoir pour chaque aborigène, par l’accomplissement de rituels afin de maintenir l’ordre créé par les ancêtres puisque chaque site, chaque élément du paysage mêle le passé et le présent : « ces sociétés sont ethnocentriques, non‐universelles, non‐ prosélytes ; elles sont engagées dans un rapport intime avec leur habitat naturel, rapport qui est vécu comme une parenté spirituelle7 ». Mythologie et fait social Ce système mythologique comporte également un important ensemble de connaissances, de valeurs culturelles et de systèmes de croyances qui se transmettent de génération en génération. Ce savoir est souvent acquis progressivement lors notamment des rites d’initiation qui le dévoilent aux néophytes. Cela constitue une part importante du mode de vie aborigène basée sur des pratiques rituelles, incluant des responsabilités économiques mais aussi écologiques envers leur milieu naturel. Une part importante de ces connaissances est détenue et préservée par différentes personnes nommées « karadjis » que l’on pourrait traduire par « sorciers » ou « chamans ». Comme bien souvent, leur rôle est avant tout de guérir les malades, de défendre la communauté contre la magie néfaste de ses ennemis, d’accomplir les rituels nécessaires au bon équilibre de la communauté (notamment lors des rites d’initiation) mais aussi « de servir d’exemples culturels et spirituels par leur accès aux pouvoirs occultes et leur conservation de l’héritage mythologique et cérémonial8 ». Ces êtres sont également les passeurs entre le monde des hommes et celui des ancêtres. Ils sont d’autant plus importants que la culture aborigène se transmet sans réel support livresque ; ils sont donc les seuls à en connaître les « doctrines ». En plus d’offrir une explication du monde, les mythes aborigènes remplissent également une importante fonction sociale puisqu’ils ordonnent tous les aspects de la vie, en justifiant les règles de vie quotidienne, ce qui est bien et mal, ce qui est naturel ou ce qui 6 Dermot Smyth, Understanding Country : The Importance of Land and Sea in Aboriginal and Torres Strait Islander History, Society and Culture, Canberra, Aboriginal Studies Press, 1994 7 H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 8 H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 3 est vrai. Ils façonnent également le système de pensée aborigène, en incorporant et en « mythologisant » les événements historiques ; les aborigènes y puisent alors les éléments constitutifs de leur mode de vie : « les peuples aborigènes apprennent de ces histoires qu’une société ne doit pas être centrée sur l’homme, mais plutôt sur un territoire. Dans le cas contraire, ils oublient leurs origines et leur raison d’être (…). Les hommes ont tendance à être des exploiteurs si on ne leur rappelle pas constamment qu’ils sont interconnectés avec le reste de la Création, qu’ils ne sont que des incarnations temporelles, et qu’ils doivent inclure les générations passées et futures dans la perception de leur raison d’être (…). Il y a une profonde compréhension de la nature humaine et de son environnement (…). C’est une réalité intangible de ces peuples9 ». → En résumé, le Dreamtime ou Rêve, premièrement, « est un récit mythique de la fondation et de la création du monde par les Ancêtres‐Héros, qui sont eux‐mêmes éternels et incréées. En second lieu, ‘le Rêve’ désigne la manifestation du pouvoir spirituel de ces êtres en certains sites particuliers de leur terre, ainsi qu’à l’intérieur de certains animaux ou de certaines plantes, de telle sorte que ce pouvoir reste accessible, aujourd’hui encore, aux humains. On pourrait dire, en effet, que pour l’Aborigène sa terre ancestrale est une sorte d’icône religieuse, puisque non seulement elle représente le pouvoir des êtres du Dreamtime, mais encore le manifeste concrètement et le transmet. Troisièmement, ‘le Rêve’ englobe tout le mode de vie ou la ‘Loi’ – les préceptes moraux et sociaux, le rituel, les cérémonies, etc. – dont ces mythes constituent le fondement. Enfin, ‘le Rêve’ peut désigner la ‘Voie’ ou vocation personnelle d’un individu, en fonction de son appartenance à un clan, en vertu de sa spiritualité propre, qui le relie à des sites particuliers10 ». Musiques et arts aborigènes D’autres éléments, plus « artistiques », revêtent également une place centrale dans la spiritualité aborigène. C’est le cas notamment de la musique et des arts. En effet, le Dreamtime est souvent ritualisé à travers des danses et des chants, notamment lors du « Corroboree » qui est une réunion commémorative des aborigènes d’Australie. En effet, « au cœur de ces cultures se trouve la croyance en un ensemble de pouvoirs surnaturels auxquels l’homme peut avoir accès, et le monde, dans leur vision spécifique, et tout entier infusé de force spirituelle11 ». Ainsi, lors de cet événement, les aborigènes interagissent avec le Dreamtime à travers la danse, la musique, le costume… Ce type de cérémonie sacrée crée un lien entre les temps anciens et l’époque contemporaine, créant un riche héritage culturel. Les chants sacrés sont donc un élément clé du système religieux aborigène qui s’accompagne également de danses rituelles. Ces chants sont réservés à certaines occasions car leurs paroles se réfèrent bien souvent à des récits mythologiques. 9 C. Morris (dir.), An Approch to Ensure Continuity and Transmission of the Rainforest Peoples’ Oral Tradition, An Identification of Problems and Potential for Future Rainforest Aboriginal Cultural Survival and Self‐ Determination in the Wet Tropics, Cairns, Centre fort Aboriginal and Torres Strait Islander Participation Research and Development, 1995 10 H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 11 H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 4 Pour autant, il existe dans des chants non sacrés mais secrets qui sont uniquement dédiés à des lieux saint et/ou associés à un rituel interdit au profane : « les chants nouveaux sont appris en rêve, ou lors de visions inspirées par les totems ou par les esprits des morts ; les anciens chants et les cérémonies qui leur sont associées, font l’objet d’un véritable troc entre tribus et se marchandent le long des routes commerciales12 ». De plus, ces chants associés à des rites ont des buts divers et variés : initiation, amour, magie, sorcellerie, guérison de malade… Ils peuvent également se rapporter à des activités telles que la chasse ou la guerre. De ce fait, il semble qu’il n’existe pas à proprement parler de distinction entre les choses spirituelles, sacrées et celles profanes : toute vie est perçue comme sacrée et toute action a une implication morale. En outre, les aborigènes sont également de remarquables peintres. L’art aborigène tend ainsi à se faire connaître d’un point de vue mondial. Mais surtout, l’art est un moyen pour ces peuples d’exprimer des réalités spirituelles. En effet, à travers cet art, les vérités métaphysiques s’offrent à l’ensemble de la collectivité sociale : « en évitant les pièges de l’abstraction et du raisonnement trop subtil, il demeurait accessible à toutes les mentalités et, de par son symbolisme, s’adressait à la personne toute entière plutôt qu’au seul esprit, actualisant ainsi l’apprentissage de la tradition13 ». Leurs œuvres peuvent être assimilées à une forme d’écriture et sont essentiellement tournées vers la mythologie du rêve : ils évoquent souvent le Dreamtime qui relate le mythe de la Création selon leur culture. A l’exception des peintures rupestres, la plupart des œuvres aborigènes étaient éphémères. Qu’en estil aujourd’hui ? Durant les siècles passés, les aborigènes ont souffert de nombreuses vagues colonisatrices, notamment de la part des britanniques qui ont décimé une partie de la population aborigène. Chez certains de ces peuples, un mythe narre d’ailleurs que les ancêtres aborigènes auraient rencontré un personnage mythique (du nom de « capitaine Cook ») arrivant de la mer et qui aurait été à l’origine du colonialisme. Bien que la véracité de ce personnage soit discutable, il est certain que ces vagues de colons ont particulièrement marqué l’histoire des aborigènes et que le colonialisme occidental a profondément transformé l’ordre social originel des aborigènes (et ce jusqu’à aujourd’hui). Même si les aborigènes furent méprisés dès le départ par les occidentaux, notamment lors de la colonisation, cette situation semble évoluer depuis plusieurs années. En effet, dès 1967, une plus grande place fut attribuée aux aborigènes par le gouvernement fédéral qui vota notamment des lois pour les protéger, les recenser. Ces lois leur permirent d’accéder à la citoyenneté, à la libre résidence et au droit de vote (même s’ils restent exclus des listes électorales dans le Queensland et en Autralie de l’Ouest). Depuis 1976, une partie des terres spoliées par les colons, a été rendue aux aborigènes qui ont pu retourner vivre sur la terre de leurs ancêtres ou homeland, terres desquelles ils avaient été chassés dès le début de l’invasion britannique. Ces terres sont d’autant 12 E. McLean, Musicales (traditions) ‐ Musiques de l'Océanie, Encyclopédie Universalis H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au‐Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie 13 5 plus importantes pour les aborigènes qu’elles sont intrinsèquement liées à leur identité ; elles sont le lieu de leurs origines, là où vivaient leurs ancêtres. Pour autant, la majorité des terres doivent encore être restituées aux aborigènes pour qui leur perte a eu un effet dévastateur sur le plan social et démographique. En 1992, le premier ministre australien, Paul Keating, reconnut publiquement les torts faits aux aborigènes dans un discours devenu célèbre, celui de Redfern. Ce discours devait contribuer à l’amélioration des conditions de vie des aborigènes : « nous ne pouvons pas imaginer que les descendants d’un peuple, dont le génie et la résistance ont maintenu une culture ici depuis plus de 50 000 ans, qui survécut à 200 ans de dépossessions et d’abus, se voit niée leur place dans la Nation ». En effet, lors de l’arrivée des colons, beaucoup d’aborigènes furent massacrés ou moururent d’épidémies. Les enfants furent vite retirés de leurs parents et placés dans des familles blanches ou dans des institutions missionnaires, le but étant d’effacer toute trace de leur culture et de la langue aborigène. Moins d’un siècle après la première invasion de l’Australie, la population aborigène était tombée à 60 000 alors qu’à la base, elle était de près d’un million d’individus. Suite à ce discours de Redfern, un Sorry Day ou jour du pardon fut instauré et chaque année, un grand nombre d’australiens participent à une marche pour célébrer cette journée. En 2008, le premier ministre Kevin Rudd et le chef de l’opposition Brendan Nelson se sont excusés devant le Parlement au nom du peuple australien pour les crimes commis par le passé envers les peuples aborigènes. Et en 2010, l’Australie accueillit même le premier aborigène élu à la Chambre des Représentants du Parlement fédéral, Ken Wyatt. Toutefois, malgré ces « progrès », la plupart des aborigènes vivent aujourd’hui en ville, en périphéries, dans des conditions souvent effroyables. Beaucoup travaillent comme ouvriers agricoles dans des ranchs, installés sur les terres dont ils ont été spoliés et ils y sont souvent exploités, mal payés. De plus, malgré une politique d’assimilation censée les intégrer, les aborigènes restent en marge de la société et les indicateurs socio‐économique les concernant sont toujours au plus bas : ils subissent en effet les fléaux de l’alcool, du racisme, de la violence et de l’acculturation. Leur espérance de vie serait de 17 ans plus faible que celle des autres australiens, le revenu moyen d’un foyer aborigène s’élèverait environ à 40% de celui d’un non‐aborigène. 22% des aborigènes se retrouvent également dans la population carcérale. Beaucoup dépendent aussi de l’Etat d’un point de vue financier et présentent les pires symptômes de pauvreté : alcoolisme, drogue, fort taux d’incarcération, chômage, faible degré d’instruction, suicide… Malgré ces éléments alarmants, certains peuples comme les Martu, en Australie occidentale, ont réussi à obtenir des titres de propriété sur leurs terres. D’autres encore vivent dans des réserves appelées « communautés » ; il en existerait 70 dans les Territoires du Nord. Et même si on ne peut parler de « nation aborigène » et que les médias associent trop souvent les aborigènes à l’alcoolisme et à la misère, le poids politique de ces populations est de plus en plus important. Fiche rédigée par Aurélie Giovine, 6 Anthropologue spécialisé dans l’étude des systèmes mythologiques et du fait religieux. Référence - B. Antheaume, J. Boissière, B. Bosa, H.J. Frith, Y. Fuchs, A. Huetz de Lemps, I. Merle, X. Pons, Australie, Encyclopédie Universalis - C. Berndt (dir.), Mythology, The Encyclopedia of Aboriginal Australia : Aboriginal and Torres Strait Islander History, Society and Culture, Canberra, Aboriginal Studies Press, 1994 - L. Dousset, Ontogenèse d’un mythe événementiel en Australie (http://tc.revues.org/1128) - B. Glowczewski, Aborigènes australiens, Encyclopédie Universalis - J. Guiart, Kariera, Enclyclopédie Universalis - C. Morris (dir.), An Approch to Ensure Continuity and Transmission of the Rainforest Peoples’ Oral Tradition, An Identification of Problems and Potential for Future Rainforest Aboriginal Cultural Survival and Self-Determination in the Wet Tropics, Cairns, Centre fort Aboriginal and Torres Strait Islander Participation Research and Development, 1995 - E. McLean, Musicales (traditions) - Musiques de l'Océanie, Encyclopédie Universalis - H. Oldmeadow, Mélodies de l’Au-Delà : Perspective schuonienne sur la religion des aborigènes d’Australie - D. Smyth, Understanding Country : The Importance of Land and Sea in Aboriginal and Torres Strait Islander History, Society and Culture, Canberra, Aboriginal Studies Press, 1994 - A. Van Gennep, Rites of Passage, Editions A&J Picard, 2011 - Site du gouvernement australien (http://australia.gov.au/about-australia/australianstory/dreaming) - Site de Survival (http://www.survivalfrance.org/) 7