Pédagogie nomade - Périple en la Demeure

Transcription

Pédagogie nomade - Périple en la Demeure
ͿΠΥΦΝΖΤ͑
Mise en page: Cha S.
Illustraon 68ardes de l’Atelier Populaire
photos de Siggi et Guillaume
Récits écrits, collectés, mis en
page, imprimés et reliés entre le
6 et 8 septembre 2010
Limerlé, le 4 septembre 2010
Chers amis, collègues, voisins,
À Pédagogie Nomade, le début d’année scolaire s’annonce tendu et musclé. À peine le
temps de nous consacrer à des questions pédagogiques qu’un vent de panique politique
souffle de façon violente parmi nous. Rien à voir avec une perquisition bruyante, ni
une visite maussade d’inspection. Tout au plus un courrier froid et distant, qui signe la
fin de la relative autonomie pédagogique et institutionnelle de PN. L’exclusion d’un
membre de la communauté éducative remet en effet en cause un dipositif central sur
lequel repose la possibilité de cette école différente : la cooptation. Plus profondément,
elle marque la reprise en main du fonctionnement de PN par les autorités – de la
préfète de l’Athénée de rattachement à la ministre de l’enseignement. Commence,
lentement mais sûrement, le démontage progressif des conditions d’existence de PN.
Avant de réagir, il nous faut agir. Avant de répondre à nos maîtres, il nous faut montrer
que nous existons par nous-mêmes, et pour nous-mêmes. Nous n’avons pas manqué,
depuis l’ouverture de l’école, de nous saisir de ce qui nous empêche de travailler pour
faire ce que nous voulons faire : apprendre. L’écriture en est le moyen privilégié : elle
nous permet d’être ensemble, en des lieux et des temps différents ; elle permet de faire
exister Pédagogie Nomade ailleurs que Pédagogie Nomade ; elle est une possibilité
d’égalité et de diffusion de la puissance commune.
Ce lundi de rentrée sera donc consacré à un atelier d’écriture: c’est quoi PN?
Chacun y cherche quelque chose, mais personne ne sait ce qu’il y trouvera;
Chacun est en mesure de raconter ce qu’il y cherchait et ce qu’il a trouvé;
De quoi est-ce que PN nous libère? Qu’est-ce que PN nourrit en nous?
Qu’est-ce que son existence met en évidence?
Qu’est-ce que la normalisation, c’est-à-dire l’inéluctabilité de sa disparition, ferait
apparaître?
Or, il est important qu’un grand nombre de textes nous parvienne avant ce mercredi
8 septembre, puisque le recueil de textes est destiné à être posé sur la table lors d’une
entrevue qui aura lieu au cabinet ce jeudi matin.
Merci à ceux qui prendront le temps d’écrire quelques lignes ou quelques pages à
propos de ce que Pédagogie Nomade veut dire, pour eux et pour les autres.
Première production du
cours de français,ou
comment mettre des mots
sur ce que Pédagogie
Nomade change dans leur
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vie ...
Témoignage
Si PN arrêtait cette année je serais triste car tous mes espoirs sont placés dans cette
école. La seule option possible sera de me lever chaque matin à 5h afin d’aller ranger
les rayons d’un quelconque Super Marché. Tandis que si jamais cette école continue, je
tenterai d’acquérir un diplôme pour entamer des études de français et qui sait, un jour, à
mon tour enseigner.
Je ne suis pas en accord avec cet enseignement statique que vous nous obligez à suivre
les yeux fermés ou bien sertis d’œillères.
Je veux sentir les choses et les esprits en mouvement autour de moi, prêter l’oreille aux
étudiants qui font vivre les AG, marcher en plein cours de français le long des champs
et des bois, goûter aux livres et puis au voix des gens instruits, cultivés.
Si PN se normalise cette année je serai triste car tous les cerveaux deviendront figés.
La seule option possible sera de se lever à 7h afin d’aller, dans les bras de Morphée, au
bahut qu’un prof aura rendu quelconque. Tandis que si jamais cette école continue, je
tenterai de toucher les innombrables flux artistiques et poétiques et qui sait, un jour, les
partager.
Je ne suis pas en accord avec ces formes dans lesquelles vous aimeriez probablement
que l’on se fonde aveuglément ou serti d’œillères.
Je veux m’émerveiller encore devant les dessins d’art, regarder tous ces profs qui sont
là par plaisir, palper la saine angoisse; rater, réussir ?
Vous savez nous ici, c’est Gainsbourg pas Gainsbarre...
Arnaud Scheen
l’école, une chance trop vite devenue une obligaon !
Tuut- tuut- tuut, il est déjà l’heure !
La grimace s’affiche déjà sur mon visage encore bien endormi. Une nouvelle journée
emplie de figures presque emblématiques, où même leurs postillons déteignent le
savoir, que nous petits élèves auront l’immense joie de devoir emmagasiner mot après
mot. Histoire d’être le plus plagiste sur la feuille vierge nommée interro. Les réponses
coulent avec ardeur de leur plume. Tout est là, mais pour combien de temps? Une
semaine en restant optimiste, avouons le!
Le glas salvateur de la fin du cours nous sort de ses quatre murs à l’odeur pestilentielle
de craies usées sur le tableau. Les arbres enfin, réapparaissent dans mon champs de
vision, mes révolutionnaires (à petite échelle) d’amis aussi.
Les couleurs se mélangent, les mots, les idées, les avis prennent le même chemin,
celui de la discussion, du débat qui instruit. Certes, pas de logarithmes ou la vie de
Baudelaire (quoi que), mais juste un échange. Apparemment pas assez scolaire pour l’éducateur, qui
nous hurle de loin quelque méchancetés formelles sur la coupe de cheveux trop rebelle d’un ami ou encore
sur le langage un peu trop cru, d’un autre compatriote.
Haut en couleur, on ne rentre pas dans les rangs.
La langue bien pendue sur l’atmosphère électrique qui règne, on ne rentre pas dans
les rangs
Deux jours de retard pour faire signer l’autorisation de se faire injecter un vaccin
miracle en cas d’épidémie de grippe, on ne rentre pas dans les rangs.
Des anecdotes de situations « hors rang », je pourrais en faire un bouquin, mais là non
plus, je ne serais pas dans les rangs. Apparemment pour avoir une scolarité sans trop
de problème, il faut être politiquement correcte, rentrer dans les rangs moutonneux et
un peu bourgeois que nous dictent profs et éduc ! Dommage,
je n’avais pas
lu les petits caractères en m’inscrivant. L’école se résumerait elle à une
avalanche de savoir déglutit tant bien que mal ? Ou alors à des prises de têtes , pour
savoir ce qui est acceptable comme tenue, coiffure, discussion dans l’enceinte de
l’école ?
Je ne pense pas ! Et je pense bien !
Les textes de lois décrètent que l’épanouissement et l’autogestion de chaque élève
est un rôle de la scolarité! Mais j’ai vraiment du mal à me sentir émancipé dans cette
atmosphère. Tandis qu’ici, c’est plutôt , vraiment devrais-je dire ce que l’école doit
nous apporter. Quand je dis ici, c’est de Pédagogie Nomade que je veux parler. Vous
savez cette petite école ( de farfelus, peut-être le pensez vous ...) au fin fond des
Ardennes.
Cette école où le personnel n’existe pas !
Qu’il soit d’entretien, administratif ou encore de cuisine. Mais il faut bien manger,
répondre au téléphone et laver les toilettes, et ça je suis d’accord, ce n’est pas dans le
programme scolaire de la communauté française, mais ça le sera dans celui de notre
vie future.
Qui a dit que les cours devaient être donnés par un prof plein
de savoir, qui aura la bonté de le partager ? Personne, enfin je crois.
Le savoir peut très bien se transmettre d’élève à élève et même d’élève à professeur tenez ce que vous lisez, c’est moi qui l’ai mis en page, mais si vous avez eu l’occasion
de lire « Dissonance », et bien, ça fut mis en page dans le même programme, mais
pas par mes soins. Et non, j’ai transmis le savoir que j’avais quant à l’utilisation dudit
logiciel, à Marie, prof de morale.
L’avantage de ce processus, si je puis dire, n’est pas seulement de répartir les tâches,
mais surtout que la matière entre dans l’hémisphère responsable de la chose.
Les ados, c’est bien connu, ont une imagination plus que fertile, les idées fusent, les
projets tout autant. Osez dire dans l’enseignement traditionnel que vous souhaitez
écrire un livre ou apporter votre pierre à l’édifice de l’écologie en construisant des
toilettes sèches, on vous dira certainenement que c’est très bien, mais pas à l’école!
Par contre à P.N. ( Pédagogie Nomade), tu dis ça et tu ne fais que lancer l’engouement
collectif !
Pour passer au pratique, tu dois tout d’abord commencer par le théorique, et la encore
tu apprends.
Tu apprends que l’école peut être autre chose.
Emplie de plaisir ! De frustration aussi!
Mais tu ne cesses d’apprendre, ... parfois simplement à te construire toi même !
Charlo"e S.
Il y a ceux qui rêvent les yeux ouverts et ceux qui vivent les yeux fermés
Je suis venu a PN, anxieux a l’idée de rejoindre une utopie qui ne conrespondrait pas à
mes attentes.
Cette école a dépassé mes rèves les plus fous, malgré les fréquents retour a la «réalité»
dus aux exigences de la communauté françaises, perquisition et autres.
Je m’y suis senti bien, j’ai appris énormement de choses (bonnes et mauvaises)
dans cette école différente, loin des files d’élèves déprimés entrant en classe pour se
faire assomer pendant 8 heures par des cours dirigés par un prof sans aucune envie
d’enseigner.
PN est la lueur d’espoir de milliers d’élèves en décrochage, ne leur enlevez pas.
Arthur Devroye
Je ne trouve pas de mots assez puissants pour expliquer ce que l’idée de la fin de
Pédagogie Nomade évoque pour moi...
Tout d’abord sur le plan émotionnel, c’est la déception. Depuis toujours, j’ai ce
sentiment de ne pas exister pleinement. Depuis toujours on me dit comment parler,
comment agir, en somme, comment exister.
Pourquoi exister, parler et agir si les motivations de mes actes ne sont pas les
miennes ?
Et ici, je pense avoir trouvé un endroit hors-norme, où en effet le contrôle (des
cerveaux ? ) n’est pas une priorité... Une île perdue, où le mot liberté prend déjà
plus de sens qu’ailleurs. Certes la liberté peut effrayer mais il faut apprendre à vivre
avec, et non à la détruire. Je ne suis encore qu’un nouveau, je ne connais pas encore
l’entièreté du fonctionnement de cette école mais... Je connais celle de ces politiques
qui ne pouvaient m’accepter comme je suis. Je ne hais personne, j’accepte les gens
comme ils sont mais c’est si rarement réciproque. Les Adultes m’ont toujours vu
comme si avant ma majorité j’étais incapable d’être intellgient, de faire mes propres
choix et ici, les profs me parlent déjà comme si nous nous connaissions depuis
longtemps, ici, je n’ai plus peur d’être simplement moi...
Ici j’ai l’impression d’exister.
Voilà pourquoi je suis venu à P.N., pas pour glander, délirer ou ne rien faire d’autre que
m’amuser, je suis venu ici pour exister.
Je suis nouveau et je ne connais pas encore entièrement l’école, mais chose sûre, je me
sentais mal ailleurs, j’avais l’impression de perdre mon temps...
Voilà pourquoi sur le plan global, ce que j’ai appris aujourd’hui me désole.
Que faisons nous de mal, à part demander d’apprendre et d’exister, à notre manière ?
Pourquoi encore une fois certaines personnes ne peuvent-elles nous accepter comme
nous sommes ?
Je suis triste de constater qu’encore une fois, on rejete la différence...
Cet école dégage quelque chose de magique, pour le peu que j’y suis allé, et si cette
fois encore, l’on décide de rejeter l’étrange, et que l’on veut tout contrôler, il ne fait
aucun doute que j’arrêterai l’école. Si le seul endroit où l’on m’acceptait ferme, je ne
chercherai plus à croire que je trouverai ma place quelque part.
J’ignore encore beaucoup de choses sur moi, et sur ma vie mais je grandis un peu
chaque jour et ce qui est sûr, c’est que si l’on détruit encore une fois ma différence, je
n’existerai toujours qu’a moitié...
Laissez nous vivre, et acceptez nous comme nous le faisons. Nous sommes ensemble,
enfin dans un lieu où nos différences prennent un sens.
Pourquoi pour une fois ne pourrions nous pas essayer de nous accepter chacun comme
nous sommes, de notre côté ?
Pourquoi certaines personnes auraient le droit d’être elles-mêmes et pas d’autres ?
Je n’ai pas choisi d’être différent, mais j’ai choisi de m’accepter tel que je suis,
pourquoi pas les autres ?
Je pense que je vais me répéter si j’en ajoutais encore...
Comprennez simplement que nous voulons juste exister, comme nous sommes,
ensemble...
Si la différence devenait normale, elle n’existerait plus.
Arthur M.
Mon dégoût dans les écoles traditionnelles devenait de plus en plus intense. Le
problème n’était pas les professeurs, même si il faut avouer que certains étaient
spéciaux, très spéciaux… Mettre des bons ou des mauvais points à la tête de l’élève,
ne pas vouloir réexpliquer le cours par fainéantise, ne jamais sourire mais surtout, se
permettre de juger un élève par plaisir et refuser de l’aider tout simplement parce que
ce professeur pense qu’on ne pourra jamais faire quelque chose de bien avec cet élève.
Le pire était l’ambiance dans les classes ! Toi je te rejette parce que tu vas t’habiller
chez Zeeman, toi je ne t’aime pas parce que tu traines avec elle, toi ton père est au
chômage nous n’avons rien à faire ensemble et toutes des gamineries de ce genre. Se
prendre un ballon en pleine face tout simplement parce que certains trouvent ça drôle
ou bien se prendre des claques en classe quand le professeur a le dos tourné. J’étais
dégoutée à un tel point que j’ai même voulu rentrer à l’armée, histoire de partir bien
loin et d’oublier tout ça. Mais heureusement qu’entre temps ma mère m’a parlé de
Pédagogie Nomade…
J’avoue qu’au début je n’étais pas trop partante, il faut dire qu’avec tout ce qu’on
entend sur cette école, on a de quoi vouloir s’en méfier. Mais je me suis dit que ça ne
me coûterait rien de juste venir voir et d’apprendre à connaître cette école. J’y suis
donc allée accompagnée de ma maman. Je fus très surprise.
Une élève est venue directement me parler et m’a proposé de me faire visiter l’école.
J’ai directement accepté, tout le monde me disait bonjour, me demandait comment
j’allais et me souriait. Je me suis aussitôt sentie à mon aise, il faut dire qu’ils ont le
truc pour qu’on s’y sente bien. Le système me plaisait beaucoup et j’ai donc décidé
le jour même de m’y inscrire. J’étais persuadée que j’avais fait le bon choix et
aujourd’hui, je le suis encore plus.
Quand on arrive dans une nouvelle école, tout le monde te fixe comme si tu étais un
extraterrestre et tu as le choix : soit tu te fais directement mettre sur le côté et pour
arriver à s’intégrer c’est la misère, soit bien des gens viennent te parler ce qui j’avoue,
ne m’est encore jamais arrivé. Je suis donc arrivée à PN, accueillie par tous les élèves.
J’étais convaincue que cette école était l’école parfaite. On y apprend plein de choses,
en plus des cours nous apprenons ce qu’est l’autonomie, l’autogestion, l’amitié, la
solidarité, la frustration mais aussi le ménage, la cuisine, savoir tenir l’administration,
etc.…
Vous allez peut-être vous demander pourquoi je dis que cette école est frustrante.
En fait, quand on s’inscrit, enfin pour ma part, on pense qu’on n’aura jamais de
problèmes. Puis finalement, après quelques semaines de cours, on se rend compte que
cette école est encore plus difficile que les autres. Il faut apprendre à se débrouiller,
à gérer toute une liste de travaux à faire qu’on nous donne au début de l’année et à
terminer avant la fin. Tout en ayant les cours à coté. Il y a aussi cette liberté qu’on nous
offre, comme nous ne sommes pas obligés d’aller en cours, quand il y a un cours qu’on
n’aime pas, il est dur de se dire soi-même : allez, mets-y du tien et vas-y… Mais il
faut le dire, cette école est magique. Il y a eu des hauts et des bas mais comme partout,
c’est ça la vie, tout n’est pas toujours rose. Tout le monde t’accepte tel que tu es. Et
même si mes amis et certains membres de ma famille continuent à penser que cette
école ne sert à rien et n’accueille que des drogués, je me battrai jusqu’au bout pour
prouver le contraire ! Moi j’aime PN, c’est comme une deuxième famille dont j’avais
besoin pour survivre dans cette drôle de réalité.
Petit à petit, je me rends compte que cette école en a aidé beaucoup et en aidera
encore plein. Elle a le don de redonner l’envie et la joie d’apprendre. Cela n’a pas
toujours été facile, il y a eu des erreurs mais de celles-ci nous ne retiendrons qu’une
leçon. Le proverbe dit : C’est en se trompant qu’on apprend et nous en avons la
preuve vivante à PN. Je crois que cette école à toutes les bonnes raisons pour exister
et a le droit à sa chance. Je ne dis pas cela pour essayer de faire la lèche-botte ou du
chantage mais sincèrement, si cette école devait fermer ses portes, demandez-vous ce
que deviendraient tous ces élèves qu’elle a pu aider et qu’elle aidera jusqu’au bout.
Demandez-vous, même si nous sommes un petit nombre, combien d’élèves sur une
soixantaine auraient envie de retourner dans une école traditionnelle… Pas moi en tout
cas, c’est certain que jamais je ne voudrais y remettre les pieds ! Ma place est à PN
et nulle part ailleurs. Et j’ai du mal à imaginer tous ces élèves, avec qui je vis tous les
jours, retourner à la rue ou remettre les pieds dans leurs anciens problèmes. Je ne veux
pas ça pour eux, je sais que PN est une expérience unique pour tous, et à quel point ils
y tiennent, à quel point ils y tiennent à cette dernière chance.
Aurélie V.
Moralité
Moquerie : Ici, à Pédagogie Nomade, les moqueries n’ont pas leur place. Allez
n’importe où, toujours des gens vous jugeront. Que ce soit pour votre coupe de
cheveux, votre rondeur imposante, votre style vestimentaire ou tout simplement parce
que vous n’êtes pas comme les autres. Trop de gens jugent sans connaître et ici à PN,
on apprend justement à ne pas commettre ces erreurs.
Obligations : Dans cette école, rien n’est obligé. Si nous n’avons pas envie d’aller
en cours parce que nous avons déjà vu la matière ou que l’on a déjà bien compris
ce cours, nous ne sommes pas obligés d’y être mais dans ce cas, il faut prévenir le
professeur référant et négocier pour prévenir qu’on fera autre chose à la place. Car oui
nous devons faire quelque chose d’autre mais d’intelligent à la place.
Rêve : Trop de gens croient en leur rêve et ils ont raison mais il faut faire la part des
choses, la vie ce n’est pas toujours un conte de fées. A Pédagogie Nomade, on apprend
ce que sont la réalité et la vie. Au début on arrive en pensant que c’est l’école la plus
facile du monde puis au fur et à mesure, on se rend compte à quel point elle est encore
plus difficile que les autres… Difficile dans le sens où rien n’est obligatoire et que la
plupart des élèves sont livrés à eux-mêmes.
Aristocratie : L’aristocratie n’existe pas ici. Tout le monde ici est sur un pied d’égalité.
Il n’y a pas de directeur, pas de sous-préfet, pas de cuisinière, de femme de ménage
ou encore de secrétaire. Ce sont uniquement les professeurs ainsi que les élèves qui
effectuent toutes ces tâches, et toujours ensemble ! Les professeurs et les élèves sont
égaux, ils se tutoient entre eux et ont généralement une très bonne entente entre eux.
Personne ne pourra dire que ce système n’est pas judicieux. Bien au contraire, quand
on a plus d’affinités avec un prof, on n’a pas peur de poser des questions ou d’aller le
trouver par après pour lui redemander une explication ou un conseil.
Lointain : A Pédagogie Nomade, la majorité des élèves viennent de loin. Certains
de Liège, d’autres de Bruxelles, ou encore de Paris et Marseille. C’est pour cela
que la plupart des élèves ont loué un appartement ou une maison dans la région ou
que certains vivent chez l’habitant. Leurs logements sont indépendants de l’école, à
17h30 chacun retourne à sa vie. Une bande de jeunes vivants sans adultes et livrés à
eux-mêmes, ce n’est pas toujours facile. Mais pourquoi ? Tout simplement pour se
débrouiller pour faire leurs courses, pour des conseils de ménage, pour s’obliger à
faire leurs devoirs et que personne ne soit derrière pour les y forcer à la place. Il faut
vraiment se prendre en main et c’est un vrai apprentissage de la vie. Je pense que peu
de jeunes tiendraient le coup aussi longtemps sans personne derrière eux mais ici, on y
fait face et on tient le coup !
Idée : Cette école est encore remplie d’idées toutes neuves. Pour exposer ses idées, il
existe l’Assemblée Générale Décisionnelle ou encore, nous pouvons les transmettre
au Conseil Institutionnel qui est un petit groupe composé de 2 profs et 4 élèves qui
« gère » le bon fonctionnement de l’école pendant une période de 6 semaines. Chacun
a le droit de donner son avis, de faire de nouvelles propositions et surtout, d’avoir la
parole quand bon lui semble.
Travail : A PN, on a une tonne de travail à faire comme la cuisine, l’entretien,
l’administration, les productions, etc,… Mais le plus grand travail à effectuer est le
travail sur soi-même. Car oui dans cette école, il y a toujours des remises en question
de soi-même, souvent un état de frustration. Une chose que nous apprenons aussi et
l’une des plus importants, c’est la maturité et l’esprit simple.
Equilibre : Savoir différencier la vraie moralité de l’immoralité
Aurélie V.
Je m’appele Léopold De neve et je suis nouveau a Pédagogie Nomade . Pour moi cette
école est une immense ouverture pour tout profil d’élèves souhaitant étudier . Elle
a été créée pour aider les élèves à réfléchir , à apprendre dans un systeme different
des autres systemes (général et technique) . Dans cette école je crois que je vais
redécouvrir l’envie d’aller à l’école car pendant une certaine période , j’en ai perdu
l’envie, je ne voulais plus voir personne et je faisais toute une histoire pour ne pas aller
à l’école .
Pour moi cette école est une chance inouïe car dans mon autre école , ils
veulent juste une école élitiste avec des élèves studieux ayant des parcours parfaits et
non des élèves ayant des cotes médiocres . Grâce à cette école je vais enfin me lever
en me disant « chouette , une nouvelle journée de cours qui commence » alors que si
j’étais resté dans mon ancienne école ça serait sûrement « Oh non ! pas encore une
journée de cours assis sur une chaise coincé entre des murs blancs »
Si cette école ferme , je ne saurai pas quoi faire de mes études car plus aucun type
de fonctionnement scolaire ne me conviendrait. Je devrais donc aller dans une école
où je me sentirais moins bien qu’à Pédagogie nomade et ce n’est pas ce que je veux.
Cette école va m’apprendre à mieux me gérer seul ou avec d’autres personnes . Je
crois qu’ici je vais découvrir ce que signifie le mot autogestion .
Léopold
Pédagogie Nomade a été construite il y a deux ans. Ma mère a trouvé cette école sur
internet et m’en a parlé car j’avais doublé deux fois ma troisième: je crois que comme
la théorie était plus importante, je ne voyais pas le sens pratique, et quelle chose
concrète pouvait servir.
Je suis arrivé le 1er septembre 2008, il y avait une façon différente d’apprendre, plus
attractive. J’ai retrouvé un sens à l’école et à ma vie; je me suis construit chaque jour,
comme mon école, car j’ai trouvé ma place et ce que je voulais en faire. Grâce à ce
fonctionnement différent j’ai pris des responsabilités car si tu veux être indépendant, il
faut des responsabilités, ça va ensemble.
Les gens ont été honnêtes et c’est en étant honnête qu’on avance dans la vie.
Maintenant j’ai repris le goût de me battre et de me défendre.
Iannis
Madame la ministre nous vous envoyons cette lettre en espérant qu’elle sera lue.
Notre école PN est pour nous un lieu de confiance et d’entente où la pédagogie n’a pas
de mal à trouver sa place.
Avant de la connaître l’école traditionnelle représentait pour nous le monstre vert
en dessous du lit d’un enfant. Honnêtement, madame la ministre, PN a redonné le
goût d’apprendre à bon nombre d’entre nous et a permis à plusieurs de retrouver une
fréquentation régulière au cours. Nous ne prétendons pas dire que l’école PN est une
solution pour tous ( autant professeurs qu’élèves) mais elle en reste une pour ceux qui
s’y ont impliqués.
Aujourd’hui notre monstre vert est de perdre nos professeurs et un dénaturement total
de notre projet.
Chaque professeur est pour nous tout d’abord un ami avec qui nous avons tissé des
liens, une complicité. L’efficacité des cours est dans un premiers temps un respect
mutuel, une confiance, qui sont les fruits d’une construction permanente. Dans
un second temps, plus que des amis nos professeur sont des alliés ; autant dans la
construction de l’ école que dans les cours et dans notre tête.
Dans certains nous trouvons l’autorité paternelle, dans d’autres l’affection maternelle
ainsi que des conseillers, des psychologues, ...
Enfin cette « belle petit famille » nous aide à construire une autonomie et une
personnalité.
Je m’appelle Camille, quand j’étais petite l’école me faisait peur, le fait de devoir
rester assise, lever le doigt et de réfléchir entre deux lignes m’ennuyait profondément.
Le jours où la psychologue de l’école m’a demandé de dessiner l’école de mes rêves,
j’ai dessiné Pédagogie Nomade. Bien sûr je n’avais que 8 ans et il me restait encore
quelques années à subir un rythme de vie et de réflexion imposée. Quand je suis
arrivée l’an dernier à PN je n’étais plus qu’une éponge désinvolte, ayant perdu l’espoir
d’avoir un jour une quelconque utilité ou place dans le monde, je meublais mes
journées à faire la fête.
PN m’a appris le sens des initiatives et m’a redonné l’envie d’apprendre. Mon
quotidien ne se résume plus à attendre qu’on me dise ce que je dois faire. Il fallait que
je prenne les choses en main. Aujourd’hui je crois avoir pris un bon rythme, une bonne
position, tant au niveau de mon travail scolaire, que de la gestion de mon argent, de
mon amour propre.....
Moi, c’est David. A 16ans voyant l’ennui qui m’habitait à lécole traditionnelle j’ai
décidé d’arrêter pour travailler. J’ai donc trouvé un job dans l’eureka avec des horaires
de fou, un salaire misérable et un mépris constant de la part de mes supérieurs. Mes
16 ans on été une chute personnelle qui m’a mené dans le gouffre, je n’arrêtais pas de
penser des solutions mais ce trou avait les paroies glissantes.
Puis j’ai pris connaissance du projet Pédagogie Nomade à Limerlé. Quand je suis venu
voir la première fois, l’école n’était encore qu’un chantier, je me suis donc investi dans
les travaux de maçonerie plusieurs fois avant son ouverture. Comme j’ai construit cette
école de mes mains, elle a pour moi énormément de sens. Je m’y suis attaché et ne
tiens pour rien au monde la voir devenir une école comme les autres.
J’ai pris goût à l’école mais pas n’importe laquelle; une école humaine qui m’a donné
confiance en moi où je me suis rendu compte que j’étais capable d’aimer lire ou
d’étudier, enfin d’apprendre quoi.
Le cadre m’a même permis de me découvrir une passion pour la course à pied, certains
diront même un talent qui a remplacé mon assuétude à la « fumette ».
Si l’école devait être amenée a disparaître où à se dénaturer, notre réaction ne serait
pas celle d’une victime. Notre vision de la situation est lucide, la détérioration de notre
projet n’engendrera pas un comportement futile.
« Notre château de sable est plus haut que la marrée,
La mer n’y pourra rien si il est emporté ».
Camille & David
Je prends la plume
Et oui, deux ans ici et tellement de choses!
Choses incertaines , compliquées, déstabilisantes mais si enrichissantes!!
Une bouffée d’air frais, découverte de soi, l’envie d’apprendre et toujours aller plus
loin, se battre , garder la tête sur les épaules et
sourtout y croire encore et encore...
Un projet de vie où chacun est maitre de son destin ; croire en ses capacités et pouvoir
les développer en toute liberté.
C’est ça pour moi PN.
Alors, vous pensez bien que les simples mots ‘’fermeture» ou «nouvelle mesure» me
fond perdre le Nord !!!!
Clarisse
Construcon
Ce monde m’est inconnu, il me pousse à découvrir.
Il se forme sous mes pas, j’y vais doucement, était-il fiable?
Je m’adapte petit à petit à ces planches, à peine le temps de m’y habituer, il n’y en a
plus pour continuer à avancer, on pose du lino.
Je reprends ma marche incertaine et voila la moquette qui vient consolider mon pas.
Je trébuche, j’ai appris a m’en réjouir, je commençais a m’enliser, cette moquette
abondante devenait poussiéreuse, ces poils me sanglaient au sol.
Il m’apprend alors que je peux oser, que j’ai les armes pour devenir une aventurière.
Je marche franchement! Peut-être un peu trop à leurs yeux.
Ma chute ne se fait pas attendre, j’atterris lourdement mais je me relève.
Il me l’avait promis.
Fanny Plessers
La fin de Pn frapperait-elle à notre porte? Mais quelle fin? Pas celle de l’école telle
qu’elle, mais la fin d’un nouveau projet social. L’intérêt même de Pédagogie Nomade
est donc menacé.
A quoi auront servi toutes ces heures passées en AG? Des heures de discutions
mouvementées pour appliquer ce concept qui nous touche tellement, un concept appelé
démocratie. Quels seront nos repères lorsque les lois et règlement autrefois repensés
pour notre bonheur ressurgiront pour faire régner « L’ordre et le Discipline » dans nos
murs?
Nous craignons de ne plus reconnaitre notre école, le valeurs que nous prônons
risquent de disparaitre. A qui la faute? Qui blâmer? Sommes nous responsables de
notre propre échec?
Certains d’entre nous n’ont pas pris au sérieux la responsabilité qui se trouve entre
leurs mains.
D’autres, plus nombreux, défendent encore et toujours nos valeurs pour crédibiliser
aux yeux extérieurs un endroit où l’on se sent bien.
Peut importe son histoire, son passé ou ses convictions, chaque élève est entrainé
positivement à se réconcilier avec l’école, à retrouver le gout de l’apprentissage,
l’envie de connaitre et d’apprendre aux autres. Chaque élève est poussé à exploiter son
potentiel créatif et intellectuel. Chaque élève est unique, comme notre école. Et chaque
élève ou prof de Pédagogie Nomade à choisi d’être ici, de faire partie de l’aventure, et
cela personne ne pourra nous l’interdire.
En vous souhaitant une bonne rentrée et une fructueuse année scolaire.
Jimmy J.
Assis, tais-toi, à ta place, dehors...
«L’école est une dictature, mais pour ton bien.»
Ce sont les termes exacts que mon prof de maths/physique de quatrième année a
utilisés.
J’aime bien ce professeur. C’était le seul à assumer sa place dans un système qu’il
pensait et pense encore déficient.
C’est à pas feutrés que l’on rentre à Pédagogie Nomade, on est venu pour y trouver
quelque chose que l’on estimait introuvable ailleurs. On cherche.
Néanmoins, il nous faut très vite faire face à un système différent à bien des égards.
Le prof debout parlant, l’élève assis, faisant semblant pour ne pas être sanctionné, est
remplacé par un dialogue, des propositions. Les sanctions deviennent des consensus
d’où l’on tient un interêt.
Pédagogie Nomade n’est pas un rêve où tout le monde trouvera ce qu’il cherche.
Mais, sauf exception, on y trouve des choses précieuses, ou simples, qu’importe.
Pour ma part cette école m’a permis de trouver des vérités par rapport à moi-même
mais aussi par rapport à des choses simples et devant moi depuis longtemps mais
cachées ou imperceptibles par ma vision d’autrefois.
Mais la route est longue...
La normalisation de cette école rendrait cette école “normale” et traditionelle donc
signifierait aussi la suppression de toutes les motivations qui ont poussé les élèves à
venir, donc à y rester.
De plus à mon avis il s’en suivra un décrochage général et une nouvelle chute au fond
du puits pour un grand nombre d’élèves.
Pour moi, Kévin, si PN n’existait pas, j’aurais quitté le système scolaire et n’aurais
plus d’espoir d’acquérir un CESS.
Kevin Strickman
Protuberence exubatoire
Voulant améliorer les bases d’un système d’éducation rendu caduque par l’abandon
des valeurs primaires de l’apprentissage et des composantes humaines au sus d’un
modèle d’enseignement orgueilleux se prenant pour le messie des attentes-désir,
soustrayant la personnalité individuelle en noyant la diversité de ses maillons dans une
marre populaire opérant un brassage des capacités conformant l’individu à un modèle
prédéfini de son rôle futur, à l’accomplissement d’une vie active broyant rêve et folie
en morne lassitude de ne pas être l’écrou branlant qui dévisse la mécanique, Pédagogie
nomade se fixe comme devoir d’inverser la tangente et d’être en accord avec la
diversité de ses sujets à l’inverse de prôner le modèle d’un idéal de vie.
Laissant a l’élève le choix d’établir sa propre vision ; lui fournissant de la matière
à réflexion lui faisant acquérir son propre savoir, pour autant qu’il sache dissocier
ses attentes de leur enveloppe et les mettre en pratique, l’école n’est plus le collet se
refermant sur le cou d’un être rendu docile mais bien la porte s’ouvrant sur le carrefour
des routes du savoir........( protocole de l’exil.)
Kosmos P.
Je suis arrivée ici ce matin, les poumons dans la gorge et le cœur serreé J’ai découvert
une école, une organisation, un espoir. Après une brève présentation de l’horaire et du
fonctionnement si particulier de l’école ; nous sommes entrés dans le vif du sujet. « La
situation problème » comme ils disent ici. Et quand j’ai appris que tout pourrait se
jouer jeudi, une seule phrase m’est venue en tête : ne me volez pas mon rêve. Bien sur
ce n’est pas mon rêve, mon école, mon espoir d’apprendre autrement. Mais dans un
sentiment de survie, dans un désespoir primitif ; je n’ai pensé qu’à moi. Je n’ai pensé
qu’à ma perte. Comment faire ? Cette école est mon dernier espoir, ma dernière carte,
ma bouée de secours.
Chaque silhouette qui me sourit, chaque regard m’est encore inconnu. Mais je n’aurais
jamais cru que l’opportunité de m’y attacher n’aurait pas pu exister.
On me demande : qu’est ce que serait Pédagogie Nomade normaliséé ? Je pourrais
faire une grande réflexion sur cette question, écrire nombre de « si…alors ». Mais
ma première idée serait que ce ne serait plus Pédagogie Nomade, tout simplement. Si
cette école fonctionne dans un cadre si spécial, c’est parce qu’elle n’est pas normale,
parce que des gens ont voulu y croire. Certains me parlent d’utopie. Dans les
écoles normales, où l’utopie est bannie, où le respect va de soi avec la soumission et
l’obéissance, où l’épanouissement est réservé aux meilleurs ; beaucoup se retrouvent
submergés. Combien de jeunes ai-je vu perdus, désespérés, par le système qui ne
les prend pas en compte. J’ai traversé des couloirs remplis de jeunes. Mais moi je
ne me suis pas arrêtée aux élèves studieux, aux élèves modèles qui sont promus
à une brillante carrière d’avocat. Moi j’ai vu des regards perdus, des démarches
déséquilibrées, des zéro pointés dans le cœur. J’ai vu des jeunes devant la grille,
enchainant clope sur clope. Parce que leur impuissance ne les voue qu’à cela. Fumer,
se brûler la gorge pour oublier un instant que l’enfer se trouve derrière la barrière
noire.
Nous étions en cours, débarrassé des dernières feuilles à compléter, nous entamons
alors une discussion plus libre avec notre professeure. Lorsque que je la tutoie,
oubliant se stupide et faux respect, elle me reprend directement : « vous ! ». Je n’ai
pas compris. Je ne l’ai pas agressé, je ne l’ai pas rabaissé en la tutoyant. Pour moi, ce
« tu » étais ma marque de respect, plus véritable et intense que la leur. C’est si mal
que ça de vouloir comprendre les gens ? De passer au travers du masque pour vraiment
faire quelque chose ? Est-il nécessaire d’augmenter la mythomanie des gens ? Je ne
crois pas, je crois que c’est juste du bourrage de crâne, qu’il n’y a rien à retirer des
mots des professeurs. Que dans les questionnaires vrai ou faux, on nous ment aussi.
On nous ment et on hoche la tête, oui-oui j’ai assimilé. Mais qui sont ceux qui pensent
non-non dans leur tête ? Qui sont ceux qui, dans le silence des regards, disent non à
tout cela ? Peut être les élèves de cette école, peut être ces professeurs qui nous tutoie
et nous respecte en soit. Parce que ce « vous » obligatoire n’a pas raison d’être. Ce
n’est pas du respect d’obliger ce vulgaire vouvoiement, c’est de la soumission et de
l’abus de pouvoir.
Il y a deux ans, je suis entrée dans une
école artistique. Je me suis découverte,
je me suis épanouie, je suis devenue plus
sociale, je me suis fait mes premiers amis.
Mais les points, les interrogations me
criblaient. Je n’avais que des mauvaises
notes ou presque. Je n’ai pas voulu,
trois mois avant les examens, tenter le
tout pour le tout. Même en commençant
depuis le début ; l’année scolaire est un
véritable combat. Rendant mes examens
vides, j’ai pris mes responsabilités et ai
accepté les réprimandes et de redoubler
mon année. L’année suivante, j’ai décidé
d’entrer dans leur système, de m’y
plonger corps et âme ; ne me demandez
pas pourquoi. Mais l’esprit n’y était pas,
le corps restait là, sur la chaise, conforme
aux demandes. Les points ne sont que fictifs, il faut juste que je réponde présente à
leur appel. Je fais acte de présence et je peux me frotter les mains ensuite. Mais ce
qu’il s’est passé, c’est que j’étais en rage. En rage contre eux en premier, tous ces
professeurs, ces directeurs et leurs supérieurs. Parce qu’ils sont cons dans un sens
global, dans un manque de vulgarité plus profonde. Parce qu’ils m’ont bouffée, ils
m’ont tuée à coup de bâton invisible. Ce qu’ils ne savaient pas c’est que je les sentais,
je sentais chaque coup, chaque martèlement sur mon esprit. Je ne pouvais rien faire.
J’étais entrée dans le système, je m’étais cousue la bouche et je copiais en silence. Je
me suis résignée à me taire, j’ai signé le contrat ; j’ai vendu mon âme. J’ai négligé
son utilité, j’ai oublié qui j’étais et j’ai signé d’un coup distrait. Plus tard, j’ai pris
conscience de mes actes et je m’en suis mordu les lèvres. J’étais en cage dans une
classe aux volets fermés, aux esprits torturés, aux températures invivables, aux éclats
de voix qui me blessent. J’aurais aimé pouvoir plaquer mes mains sur mes oreilles,
avoir le choix de ne pas écouter. Mais à l’école on n’a pas le choix, on a signé pour une
année d’enfer et on assume. C’est peut être cela être adulte ; signer sans discernement
et assumer nos erreurs. Vivre dans l’enfer avec une fierté absurde de ne pas avoir fuit.
Mais rester devant le train qui te fonce dessus ce n’est pas mature ; c’est con !
Il y avait quelque chose qui me bouffait, c’était le virus, c’était la bactérie de
l’esclavage. Et je voyais tous ces gosses, ces gosses de merde, ces gosses immatures,
ces gosses perdus, ces gosses cassés. Et puis les professeurs, avec leurs « vous », leur
politesse absurde, leurs regards et puis leurs gorge qu’on tordrait bien. On les tuerait
bien ; on l’a tous rêvé. Mais pourquoi tant de haine ? Pourquoi on ne pose pas cette
question ? Pourquoi les gens nous mettent en prison ? Peut être nous habituent-ils au
futur ? Parce qu’au fond ils n’ont pas d’espoir pour nous. On est des merdes, on ne
vaut rien et seuls eux semblent le savoir, y croire.
« Qu’est ce qu’on fait si l’école s’arrête ? Vous restez, vous ? Et s’ils nous mettent
des nouveaux profs, avec des interrogations ? ». Sur le banc couleur arc-en-ciel, on
s’est tous regardé. Du jour au lendemain, nous deviendrions des orphelins. Chacun
retournerait de son côté, quelques uns resteraient, par dépit. Les liens créés, les heures
de rires, les sourires autour du café disparaitraient peu à peu. L’école cesserait d’être,
laissant juste la nostalgie sur l’escalier. Au début on se battra, c’est sûr. Mais au fil du
temps, la volonté disparaitrait surement. Et tous ces projets, tous ces efforts n’auront
servi à rien. Même les fonds que vous avez débloqué n’auront servi à rien ou presque.
Juste un sentiment d’inachevé.
Mais je vous pose la question ; que ferrez vous de tous ces jeunes en colères, frustrés
et perdus ? Les enfermerez-vous ? Voulez-vous vraiment nous voir revenir dans vos
écoles traditionnelles alors que nous avons trouvé notre bonheur ?
Peut être que votre décision est déjà prise et que ces quelques lignes ne servent à rien.
Mais peut être que j’ai réussi à défendre notre cause. Peut être que ce recueil vous ferra
comprendre ce que vivent les jeunes d’ici. Il n’y a pas que ces journaux mensongers
à lire, il y aussi la vie, les pensées des élèves de cette école. Ouvrez le recueil et lisez
notre vie de tous les jours.
Louise L.
Je m’appelle Diane et étant nouvelle à Pédagogie Nomade ,je ne peux pas parler de ce
que ça m’apporte mais je peux expliquer mon choix et ce qu’un changement dans cette
école signifie pour moi .
J’ai donc choisi cette école pour sa différence et pour moi ,Pédagogie Nomade est le
projet qui pourrait m’aider par ses méthodes à avancer dans mon parcours scolaire et à
me sentir plus à ma place que dans l’enseignement traditionnel .
Lorsque j’ai appris l’existence de Pédagogie Nomade et que j’ai été m’informer de
son fonctionnement, c’était une sorte de soulagement de me dire que je pourrais enfin
être dans une école qui me convienne réellement et qui pourrait m’apporter plus qu’un
simple programme .
Si cette école reste comme à son origine, cela m’aidera dans mon parcours scolaire
comme dans ma vie .
Personnelement je vois Pédagogie Nomade comme une école et bien plus …
Pour moi PN peut m’apprendre énormément d’un point de vue pédagogique ; mais
c’est aussi une expérience humaine, un apprentissage de la vie, devenir autonomne …
Tout ce qu’une école classique ne peut m’apporter .
Une fermeture ou une normalisation de PN signifierait UN retour à UN type
d’enseignement qui ne me convient pas .
J’ai choisi cette école pour sa différence et j’estime que la normaliser serait changer sa
raison d’être et en faire une école absente des raisons qui m’ont poussée à l’intégrer .
En conclusion si j’avais voulu choisir une école spéciale à laquelle on enlève son âme
en la normallisant, j’aurais choisi une école traditionnelle .
Diane Hanon
Le"re à Madame la Ministre de l’enseignement
Madame la ministre ;
Que dire ?
Que dire devant tant d’incongrulité ,de débauche ,de vagues rumeurs funestes qui
parcourent les lieux de Pédagogie Nomade ?
Que dire ,moi, élève crédule mais non naif ,devant ces hypothétiques désastres à
l’horizon ; soufflant,murmurant la venue d’un taiseux mais néanmoins implacable
massacre ?
Massacre pédagogique ,certe , mais massacre tout de même …
Alors que dire ?
Au commencement ,une simple présentation des faits s’impose .
Présentation des faits et gestes .
Je suis encore vierge de toute expérience au sein de Pédagogie Nomade ,je n’ai pris
connaissance de son existence qu’au printemps dernier .
Immaculé de toute influence professorale ,parentale ou autre ,je peux donc exprimer
sans crainte et sans faillir mon jugement ,qui se veut loin de tout préjugés péjoratifs .
Mon premier jour passé officielement à Pédagogie Nomade ,ce 06/09/2010 , ne fut pas
chaotique (ne sombrons pas dans les extrèmes ) ,mais cependant tumultueux .
Quel stupeur en effet de découvrir à la place de mon école ,d’ordinaire lieu d’ententes
et de créations ,un lieu agité de rumeurs effrayantes, de nouvelles tout aussi terrifiantes
, plein de spasmes d’inquiétude effervescents et de paniques attisées !
Car j’apprends ,ainsi que la totalité des élèves , qu’un de nos enseignants est cette
année littéralement éjecté de notre corps professoral .
Pire encore ,la préfête de l’Athénée Royale de Vielsalm ,avec qui nous avons quelques
relations administratives (malheureusement ouis je déjà des mauvaises langues ) ,a cru
bon de désigner et imposer un remplaçant afin d’assurer les cours nécessaires .
Cet acte,que l’on pourrait juger de banal dans un établissement commun affecte
pourtant directement le bien être et le destin même de notre école .
Conclusion et autres conséquences d’une condamnation
Je vous l’accorde ,en tant que nouvel élève je ne peux décemment pas décrire l’école
de fond en comble mais les quelques journée passées en son enceinte m’ont permis
d’apprendre et comprendre bien des choses .
Tout d’abbord ,rappellons que Pédagogie Nomade est un établissement dit spécial .
Même si les homologues européens ne sont pas rares ,la façon de procéder ,propre à
l’école , est nouvelle au sein de l’enseignement belge , notre pays présentant un léger
retard en la matière .
Toutes ces particularités (priorité à la liberté d’agir et de pensée ,participation des
élèves ,etc … )
présentent bien sûr la méfiance des riverains (les événements aussi absurdes qu’inutile
que sont la perquisition et les vagues d’inspecteurs pessimistes,véritables facteurs
de catatonie, restent les meilleurs exemples ) ; mais surtout une multitude de points
positifs .
Mais les décisions prises récemment modifient radicalement les bonnes intentions de
Pédagogie Nomade .
En effet le choix d’un enseignant se faisait jusqu’ici ,et depuis l’origine de l’école ,par
un consensus.
Cette particularité qui a été l’une des condition de l’existence de Pédagogie Nomade
et qui a été accepté par les autorités de l’Enseignement ,est clairement bafoué en ce
moment .
Et je vous laisse deviner ce que signifie un tel acte ,ce n’est autre que la normalisation
d’une école riche de différence ,fleuron de l’enseignement belge en terme d’originalité
et d’évolution .
Or toutes les personnes présentes ,élèves et professeurs , n’acceptent pas de regarder
sans rien faire leur école ,fruit de leur travail et de leurs idées ,sombrer peu à peu vers
la banalisation .
Je doute qu’une école Pédagogie Nomade puisse survivre à une normalisation ,aussi
subtile fut-elle .
Moi ,ma vie ,celles de beaucoups d’autres .
Je n’affirme pas être une généralité ,je n’en aurais pas la prétention ,mais je m’estime
être dans le même cas qu’un grand nombre .
J’ai la présence d’esprit d’avoir une certaine estime de soi .
Cela engendre quelques symptomes comme ne pas s’identifier à un numéro ,penser par
moi même ,faire des choix et avoir une autonomie d’esprit .
S’ensuit quelques problèmes dans le milieu scolaire ,lorsque lassé de m’adapter aux
exigences totalitaires , je me suis bloqué à toute forme d’apprentissage .
Doubleur,marginale,sans avenir … Pédagogie Nomade fut pour moi une révélation
ainsi qu’une chance inespérée … Quel bonheur de découvrir une école qui s’adapte
aux élève et non l’inverse !
Les quelques cours que j’y ai passé expliquent mieux que n’importe quelle théorie :
D’un côté des élèves attentifs,motivés,actifs ,ravis d’être autre chose que des numéros
impersonnels …
De l’autre un professeur surpris de tant de volontarisme ,n’ayant aucunement besoin
d’une quelconque autoritée .
Et partout une entente et une solidarité loins de toute l’agressivité habituelle des écoles
moyennes belges .
Or ,si l’école se normalise ,quel intérêt d’y rester ?
Et si je me retrouve à nouveau dans une école traditionnelle ,que se passera-t-il ?
Je ne vois alors qu’un avenir sombre jonché de désobéissance,règles absurdes,blocages
scolaires ou autres .
In fine Pédagogie Nomade est le catgut qui me relie à la scolarité ,et surtout au
plaisir d’apprendre ,et entraver un si bel objectifs,nous retirer à tous un tel dictame
pédagogique serait à n’en point douter désastreux .
Je vous conjure donc de prendre des décisons adaptées et loin de tout archétypes vus et
revus ,dignes des inertes écoles classiques .
Veuillez accepter madame ,mes sentiments distingués .
Alexandre Vanhalewyn
Je suis nouvel élève à PN, donc je n’ai pas encore toute l’expérience que je pourrais
avoir de ce projet.
Si j’ai voulu venir à PN, c’est parce que à moi, l’idéal social qu’on nous impose ne me
dit rien.
En moi, il sonne creux, je ne m’y retrouve pas.
Je sais que je ne suis pas fait pour une vie normalisée, idéalisée, j’ai envie de sortir des
carcans, des cases, je voudrais au final être libre parmi des gens libres, mais bref.
Souvent, je m’engage dans quelque chose, sans nécessairement d’idée précise, ou du
moins un vague projet, une envie de découvrir, et c’est seulement avec le recul que je
me redécouvre, que je me comprends...
Pour moi, PN c’est un peu un rêve, c’est le désir de changer le monde, parce que en
fait, je veux que le monde puisse changer, ou au moins que nous nous en donnions la
possibilité, de le rendre plus accueillant, plus beau, moins triste.
Alors, normaliser PN, c’est un peu empêcher les gens de rêver, et empêcher l’idéal
d’une démocratie d’être pris au sérieux.
Détruire, ou faire plier PN serait un acte en fait tyrannique. Ce serait triste, dommage,
décevant.
Bruno B.
En arrivant à Pédagogie nomade on cherche quelque chose de diffèrent, avant d’y
entrer tout parait abstrait on se demande comment c’est possible que cela fonctionne.
Si on s’arrète à se jugement c’est sr que ça n’en vaux pas la peine. Il faut vivre avec
le projet, être impliquer. Même en une journée à l’école on se rend compte de son
importance, de se qu’elle représente.
Les élèves de Pédagogie Nomade ne sont peut être pas «conventionnel». Pourquoi ne
pas accepter que tout le monde ne fonctionnent pas de la même façon. On a tous notre
vécu, notre vie est peut être différente ou on cherche autre chose. on a pas envie d’aller
dans une école classique où la plupart des gens se cachent et ne se montre pas comme
ils sont. Quel est l’interet si on ne peut pas être qui on veut être. Pourquoi être différent
serai quelque chose de mal ou à éviter...
L’école a un aspect obligatoire qu’on ne peut pas oublier. On doit aller à l’école
jusqu’a se que l’on soit majeur ou que l’on ai fini nos humanité, Donc on est dans
l’obligation de passer 12ans à l’école. Il y a des élèves pour qui ça ne pose aucuns
problèmes mais pour d’autre c’est plus compliqué. Quelqu’un qui a des problèmes de
concentration ou autre ne peut pas réussir dans un enseignement traditionel.
Moi personellement, j’ai fait un an dans l’enseignement classique, ça ne m’a pas
apporté se que j’attendais. j’attends d’une école des expériences de vie, pas seulement
rester devant ses bouquins a étudier sans donner un sens réel à se que l’on lit. Ne
pas sortir de l’école en n’ayant pas évolué personellement s’être remis en question,
pouvoir se débrouiller seul. Les écoles traditionelles n’aide pas à aller dans se sens la.
Pédagogie Nomade n’est pas seulement une école, on vient ici pour trouver un cadre
diffèrent de se que l’on nous propose habituellement. je veux dire par la qu’on y trouve
des enseignants disponible pour écouter nos questions et y répondre, près a nous
soutenir. iols ne sont pas seulement la pour nous donner des cours, ils font bien plus.
On se demande comment tout cela peut fonctioner, c’est grace au corp enseignant, ils
s’entraident, ils s’impliquent à font dans le projet. Les élèves jouent un role important
eux aussi.
Il faut tenter l’expérience avec Pédagogie Nomade, c’est a se moment la que l’on
comprend vraiment sont importance.
Marylou
cher lecteur, lectrice, voilà une lettre d’appel au secours adressée à la communauté
française.
Qui que ce soit, ayez l’amabilité d’en faire une lecture attentive...
Pédagogie nomade, une école qui a prit naissance le premier septembre 2008. Partis
de rien, nous, professeurs et élèves avons commencés l’année sans savoir vraiment
ce qu’il allait en devenir. D’ailleurs nous vous remercions pour avoir permit cette
expérience qui maintenant est belle et bien en marche.
De l’extérieur nous sommes toujours vu comme une école marginale mais ce n’est
pas le cas. Nous avons un fonctionnement interne qui engage chacun à participer
collectivement à un projet qui nous tiens à cœur. Notamment les assemblées générales
où nous pouvons proposer des solutions aux problèmes interne et cela chacun y est
invité. Nous parlons, proposons, écoutons et trouvons des solutions ensemble. là nous
sommes au cœur d’une politique engagée au sein de notre école. N’est-ce pas un
apprentissage riche pour notre vie de citoyens?
Nous, élèves, prenons donc conscience qu’on est un pion dans notre société, un
pion parmi tant d’autres, mais qui a certainement sa place dans l’immensité du
monde. Un système qui nous projète d’emblée dans la vision du possible. Voyez ça
comme les poupées russe: au cœur, l’apprentissage de nos assemblées générales et
autour celui-ci s’agrandit de plus en plus et s’emboîte dans des espaces plus grands.
Malheureusement, nous avons pu connaître des problèmes de vol, de présence de
drogue douce, mais la perfection n’existe pas et cela se produit chaque jours partout
ailleurs. Voilà d’ailleurs l’exemple d’un problème concret: lors d’une perquisition, de
l’herbe à été retrouvée sur quelques personnes. Au lieu d’avoir sanctionné, nous avons
tout simplement discuté ce qui a donné pour suite une visite de l’association Infor
drogue. La sanction peut fonctionner mais pas à tous les coups. Pour moi la sanction
efficace est pour ainsi dire un oxymore. Je suis donc venue à Pédagogie Nomade pour
prendre un bouffée d’oxygène. Les sanctions, retenues dû à des retards ainsi que les
punitions s’accumulaient et rendaient mon parcours scolaire difficile à suivre. Petit
à petit, je sentais que l’on voulait m’éliminer de cette école pour ne garder que les
meilleurs éléments. Est-ce de cette manière d’amener une personne à la réussite?
Mais ici à Pédagogie Nomade ce n’est pas le cas, la preuve je réussis avec un
parcours plus qu’enrichissant. J’y trouve du sens et des réflexions qui me font
avancer. Aujourd’hui j’ai 20 ans, presque 21. Je suis en sixième et compte bien avoir
mon diplôme, chose pour laquelle j’ai cherché longtemps une manière d’apprendre
adéquate à mon fonctionnement. Maintenant je suis près du but... Malheureusement la
situation actuelle ne pourrait que l’éloigné. Mais est-ce que cette école aura encore lieu
de vivre dans notre démocratie?
Amener un personne, notamment un professeur, contraire à notre projet aura donc
que des effets néfaste et aboutira sûrement à sa disparition. Est-ce un manière de faire
disparaître les choses qui ont du sens et qui font évoluer la marche du monde?
je vous remercie d’avance pour cette lecture.
Audrey Jorion
Sauvez Ben
Salut cher lecteur potentiel, potentiel parce que considérant les circonstances mon
public sera composé uniquement de gens qui n’ont aucun intérêt à lire mon texte ; ou
alors parce qu’ils connaissent déjà les faits ou alors parce qu’ils sont beaucoup trop
occupés à veiller au « bien » de l’école. Ce qui nous amène à la question : « pourquoi
est-ce que je me fais la peine de rédiger ce texte ? » La réponse paraît évidente
mais je dois admettre que ce n’est pas pour le bien de l’école. Mes motivations
sont tout à fait égoïstes : il s’agit ici d’une production de français. Et donc je saisis
l’occasion ; bien que cela me déplaît je suis bien obligé de vous fournir des traces.
Puisque l’avis de notre plus compétent professeur n’y compte pour rien aux yeux de
ceux qui « assurent » la formation adéquate de la future génération. Vous excuserez
ma franchise ; je sais qu’elle ne fait pas partie des valeurs contemporaines mais ca
donne plus de poids à mon choix, vous ne trouvez pas ? Mais j’ai mal fait de choisir
d’introduire le texte par 10 lignes qui mettent en évidence le conflit de nos valeurs
qui ne pourront être conciliées donc je vais vite dévier sur le thème que je comptais
aborder avant que je sois distrait par la question d’une introduction.
Vous connaissez les faits, après tout ils en ont même parlé dans les journaux, mais
je vais vous l’exposer pour le plaisir de remplir cette page : notre professeur de
français, Benoît Toussaint, s’est fait virer de notre école. Pourquoi ? Parce que la
préfète aimerait tellement se débarrasser de cet élément qui ne cesse de mettre en
cause son autorité. Oh pardon excusez-moi, j’oublie tout le temps que je ferais bien
de m’inscrire dans le schéma hypocrite qui est à la mode mais si vous voulez la
version contemporaine vous n’aurez qu’à lire le rapport de Marie-France, il doit être
bourré de pseudo arguments et d’hyperboles... Quel indomptable ce Benoît : il s’est
fait dévaloriser pour avoir rebellé contre les forces de l’ordre, quel horrible exemple
pour la génération qu’il était sensé instruire et dompter. Laissons de côté le fait que les
choses ont étés dramatisées et que Benoît avait toute raison de s’indigner considérant
que lors d’une descente dans une école conventionnelle, la dernière idée qui viendrait
à l’esprit des policiers serait de traiter les professeurs comme des criminels potentiels.
Pourquoi je vous parle de cela et en quoi consiste le problème ? Benoît était un
élément extrêmement important de l’école, aussi pour mener les « combats » avec
l’autorité (ce qui est une explication très plausible pour sa démission btw) mais
surtout en tant que source d’inspiration pour les autres professeurs : c’est lui qui a
su résoudre la question du vol dans notre école (chose qui ne peut être dite de nulle
école traditionnelle). Et les gens qui « assurent » notre formation aimeraient bien s’en
débarasser.
Et voilà que se pose le véritable problème : il nous faut un professeur de français. Et la
préfète aimerait bien nous l’imposer. Ce qui équivaut à une baffe pour notre principe
de cooptation. Le corps instituteur a besoin d’un énorme soutien à l’intérieur de luimême pour pouvoir surmonter un projet d’une si grande complexité. Et si les collègues
sont imposés il est très probable que l’unanimité tombe en miettes ; la démission de
nombreux profs serait la conséquence. Et ils sont peut-être remplaçables en tant que
professeurs mais pas en tant que membres de notre communauté. Donc je vous prie
juste de prendre en considération que vous mettez en péril le futur de 60 élèves.
Marvin G.
Je m’apelle natael husquinet, j’ai 18 ans et je suis un ancien nouveau a PN. Ce terme,
je vais y revenir, mais tout d’abord je vais faire un bref récit de mon parcours scolaire
pour expliquer un peu mon point de vue par rapport a l’école en général.
J’ai découvert l’école en deuxième maternelle. A cet âge là j’étais, pour le peu de
souvenirs qu’il me reste, un garçon très curieux et plutôt cultivé ( j’en remercie
d’ailleurs mes parents pour l’éducation qu’ils m’on fournie).
J’étais très aprécié de mes professeurs car je voulais toujours aprendre plus et je
m’intéressais a beaucoup de choses. L’innocence infantile je suppose.
Vinrent ensuite les primaires. J’étais un élève plutot moyen. Environ 70% à 80% de
moyenne dans tous les cours sans vraiment étudier.
Ensuite arrivent les humanités. Les 2 premières années se sont plutôt bien passé. Ma
capacité d’assimilation me permettais d’avoir la «moyenne» sans vraiment me fouler
niveau étude.
Mais à partir de la 3ième j’ai commencé à avoir du mal car, en plus de la matière
de plus en plus corsée, je commençais ma «crise d’ado». En classe, je pensais plus
a m’amuser qu’à écouter les profs. Ce qui fait qu’aux interros je tombais sur des
matières dont je n’avais jamais entendu parler. Conclusion, 3ième à recommencer.
A partir de là commence mon «calvaire» scolaire. J’accumule le retard, je change
plusieurs fois d’école, d’option. Ma seconde 3ième je la réussis in extremis grâce au
courage de mes parents qui étaient toujours derrière moi pour me pousser à étudier.
Mais rien n’y fait. Je commence à me pauser des quetsions : «Est-ce bien néscessaire
tout ça?», «A quoi les maths ou autres matières me serviront plus tard?», «pourquoi
étudier par coeur des matières que l’on est sencé aprendre et connaître?». Bref, je finis
par sécher les cours et rester chez moi sans rien faire ou presque. Je me levais à 12h et
me couchais a 3h. J’étais en pleine dépression. Un jour ma mère me parla d’une école
à pédagogie différente, PN. Franchement pour tout vous dire, je n’étais pas vraiment
emballé. Pour moi une école en valait une autre...
Ma mère me poussa encore une fois ( et oui :p ) à venir assister a une journée portes
ouvertes. Malgré moi je l’y accompagnai et arrivé là-bas j’étais bluffé...
Ou sont donc passées toutes ces barrières, ce beton, ces murs couverts de graffiti, ces
classe en piteux état orné d’un tableau noir? Où est donc cette image de prison propre
à toutes les autres écoles?
tCet endroit respirais la vie, la liberté... Des panneaux de couleurs où sont écris des
proverbes humanitaires, des poules en liberté, des clapiers à lapins, un petit étang, ça et
là des fleurs aux couleurs vives.
LA PAIX !!
C’est ce que j’ai ressenti en voyant cette école pour la première fois. Et les personnes
présentes, très aceuillantes, habillées comme bon leur semble. Fini ces «jeuns» copiés
collés sapés G-STAR ou Kalvin Klein.
Je n’ai pas une seule fois fait la différence entre profs et élèves. Tout le monde se parle
sur le même ton. Le respect est le mot d’ordre.
Impressionné je m’y inscrivais.
C’était en Mai 2009 , l’an 1 de Pédagogie Nomade.
Je m’installai donc dans un gîte à quelques pas de l’école, déja occupé par quelques
élèves. Las bas je fis la rencontre d’autres nouveaux qui comme moi, venaient de
s’incrire à PN. J’étais plein de bonne volonté mais l’accumulation d’années à ne rien
foutre me ratrappait et je sombrais encore une fois dans la passivité.
Je me souviens que les premiers jours j’avais du mal à vraiment saisir l’esprit car, je
le dis franchement, c’était la première fois que je devais être autonome. Le fait qu’il
n’y aie pas de règlement à proprement parler et que nous avions une totale liberté
de nos choix m’a encore plus motivé. Mais malheureusement j’en ai profité. Je dis
malheureusement parce que j’en faisais encore moins que d’habitude. Je n’allais
pratiquement plus à l’école, je ne faisais presque rien pour elle non plus. J’en suis
encore plus honteux car je jouais au pauvre garçon a problèmes qui se disait motivé
pour passer son année mais qui à côté de ça n’en foutait pas une. A la fin de l’année, le
conseil avec sa bonté m’a fait passer de la 4ième a la cinquième 5ième ( ce qu’entre
nous je n’avais vraiment, alors là vraiment pas mérité ) .Il m’ont fait confiance car
je leur avais promis qu’en cinquième je m’impliquerais plus. Sur le moment je le
pensais vraiment mais je suis retombé dans la paresse et la passivité. L’année suivante
fut encore plus catastrophique. Pour exemple je m’y suis pris vraiment à la dernière
minute pour le logement ( je dis «je m’y» mais pour être honnête c’est plutôt mes
parents qui ont fait la démarche ) . Bref encore une demi année à ne rien foutre. A la
fin je n’allais même plus en cours et j’étais totalement absent à la gestion.
Ce qui fait qu’en milieu d’année j’ai choisi de réintégrer l’enseignement
«traditionnel». Là bas au début je faisais pareil qu’à PN. C’est-à-dire : rien. Et puis
petit à petit j’ai commencé a travailler. Difficilement il est vrai, parce qu’après 2 ans
d’inactivité scolaire les miracles n’existent pas, il faut prendre sur soi. Mais mon
école n’était pas du même avis, pour elle c’était tout ou rien. Le fait que je fasse des
efforts ne changeait en rien la façon de me coter. T’as la «moyenne» tu passes, tu l’as
pas, rebelote tu recommences. De plus là-bas j’étais sidéré. La plupart des élèves ne
prenaient même pas la peine d’étudier: la triche était le mot d’ordre et, pour les autres,
le «par cœur». N’étant adepte d’aucunes de ces méthodes, j’essayais de comprendre
la matière avec des mois si pas des années de retard. Mais aux interros j’étais recalé.
Pensez-donc, le moindre mots a côté était compté comme une faute. De plus le
«comportement» de l’élève était coté avec les cours. Par exemple j’ai eu un -2 a ma
période, motif : « fume une cigarette dans la cour de récréation» . Résultat j’ai été
recalé ( je m’y attendais ).
Bref tout ça pour dire que les méthodes de l’enseignement traditionnel ne sont pas
faites pour moi ( ni pour quiconque d’ailleurs ) et que PN est une école où la réflexion
et la recherche de l’ammélioration ont une place concidérable.
Donc je vous en prie ne cassez pas ce que nous avons construit après tant d’efforts.
Car si PN disparaît je ne saurais plus où aller... J’ai trouvé en cette école ce que je
n’avais pu trouver ailleurs. L’écoute, le respect, l’égalité, la liberté, la solidarité, la
découverte... En bref le bonheur.
cordialement,
Nataël Husquinet
Premier jour à P.N.
Je suis parti de mon école classique pour une multitude de raisons :
-Il y regnait toujours une mauvaise atmoshère en raison des punitions, des règlements
inutiles et de la masse de travaux que l’on devait faire à domicile.
-On ne pouvait avoir aucun lien avec les profeseurs qui mettaient des barrières entre
eux et les élèves.
-les professeurs imposaient leurs désirs et idées indiscutables en usant de leur pouvoir
hiérarchique.
J’y étais démotivé, j’avais perdu l’envie d’apprendre, ce n’était plus qu’une obligation
qui se terminait à 16h.
En arrivant à P.N., j’espère retrouver ma soif de connaissances et ma motivation.
J’aimerais régler des problèmes réels et ne pas me contenter de la théorie tout en
m’autogerant et en participant au bon déroulement de cette école.
Dès mon premier jour dans cette école, je remarque qu’il y règne une bien meilleure
ambiance et que le dialogue avec les professeurs est possible.
Pour que P.N. fonctionne , j’ai compris qu’elle doit s’auto-gérer car les affaires qui y
surviennent, nous les vivons, il est donc normal que nous les règlions tous ensemble.
Mais voilà qu’une autorité extérieure veut gérer et s’occuper de l’école. Cela ruine le
projet car s’auto-gérer constitue justement toute la nouveauté de l’école.
Nicolas Vandermissen
PéPédagogie Nomade m’a interpellée
Une envie de créer autre chose, d’apprendre autrement, d’une évolution dans une
société stagnante.
Une sortie de l’ordinaire pour être capable de faire des choix et d’en assumer les
conséquences, prendre ses responsabilités.
Un projet qui nous permet de nous mettre en recherche de nous mêmes et de nous
confronter à nos limites.
Un éloignement de la société dans laquelle on vit pour mieux la comprendre, ainsi que
voir le monde tel qu’il est.
Une découverte, un échange perpétuel des idées.
Un retour à l’essentiel, toujours en mouvement, une expérience de vie.
Nikita Rosenberg
Pédagogie Nomade, une école pas comme les autres ...
Pédagogie Nomade m’a interpellée justement parce que son fonctionnement est
différent des autres écoles. Si j’étais restée dans une école normalisée un an de plus,
je pense que je n’aurais pas été très efficace, j’avais besoin de changement et la seule
école dans la région qui pouvait me le donner était PN.
De plus, PN est une des seules écoles qui nous apprend à être « autonomes ». Dans les
autres écoles, on est toujours derrière nous, à nous obliger à travailler et venir en cours,
à nous dire ce qu’il faut faire, etc. Et ce n’est pas un bon plan. Certes on apprend ainsi
à travailler, à étudier, … mais une fois aux études supérieures, on ne sait pas se prendre
en main, se gérer. Et alors dans ce cas, avoir appris à étudier, ne sert strictement à rien,
si on n’a pas envie ni la volonté de s’y mettre.
Ensuite, dans chaque école (ou presque), il y a des profs, certes pas tous, qui ne
pensent qu’à boucler leur programme, et si les élèves ne suivent pas, ce n’est pas
important. Les élèves ce ne sont que des points sur pattes à leurs yeux. A PN, les profs
ont déjà une relation beaucoup moins superficielle avec les élèves, du coup ils sont
plus attentifs à l’élève. Ils prennent le temps nécessaire.
Et puis, l’ambiance à PN est conviviale. On s’intègre beaucoup plus facilement que
dans les autres écoles. Les gens sont ouverts. Ca aide à se trouver (ou à se retrouver), à
prendre confiance en soi.
Noémi Leyens
Ma le"re de movaon
Je m’appelle Boulam Omar, je viens de finir ma première année de bep vente action
marchande. Cette année est passée assez vite, je pense avoir bien suivi le déroulement
de l’année scolaire ainsi que le programme.
Mais le nombre d’absences accumulées pendant l’année n’a pas plus à mes parents, ce
que je peux comprendre.
Malgré mes absences répétées, ma moyenne est restée stable.
Au jour d’aujourd’hui, mes parents me laissent le choix de venir dans votre lycée ou
d’aller travailler avec mon père.
Bien que le BEP vente me plaise beaucoup, je pense que je pourrais poursuivre mes
études dans la vente en passant par votre lycée.
C’est donc une chance pour moi d’être accepté parmi vous.
Le 11 juin, je suis venu visiter le lycée. Les méthodes d’apprentissage avec les
professeurs n’étaient pas celles auxquelles j’ ai eu afffaire pendant toute ma scolarité.
Bien que plus libre, il exige plus de responsabilités de la part de l’élève, ce qui je pense
est une bonne préparation aux études supérieures ou même à la vie active.
Cette expérience me permettra d’arriver à mes fins, qu’elle soit positive ou négative.
Je veux dire par là que si je n’obtiens pas mon diplôme, j’aurai accumulé des
connaissances qui me serviront tout les jours.
Si au contraire elle est positive, ce que j’espère, alors j’aurai réussi à m’ auto-gérer et
je serai prêt pour les études supérieures ou la vie active.
Dire que tout le programme de générale m’intéresse ne serait pas honnête de ma part,
mais des matières comme l’histoire, le français et la philosophie sont des matières qui
me passionnent vraiment; et qui bien entendu dans le BEP ne sont pas approfondies et
qu’en partant vivre chez mon père je n’apprendrais surement pas.
Dans les lycées d’enseignement général qui se trouvent dans la régions, je serais recalé
dans les matières comme les math, la chimie, l’anglais et même le français; car j’ai des
lacunes dans ces matières, qui se sont accumulées d’année en année.
C’est pour cette raison que je n’ai pas poursuivi mes études dans les écoles générales
qui se situent dans les environs.
C’est pourquoi votre lycée me semble le plus adapté pour reprendre et finir mes
études.
Je vous demande alors de me laisser cette chance d’intégrer votre établissement.
Ceci était ma lettre de motivation présentée à PN en juin 2009. Depuis, je viens de
réussir ma 4eme et je commence cette année ma 5eme. L’école Pédagogie Nomade,
par le fait qu’elle se construise grâce aux élèves et aux professeurs, demande une
certaine implication, qui elle-même demande une certaine discipline (non pas instaurée
par l’école mais par soi-même). Nous apprenons ici à vivre en communauté: savoir
respecter le travail des uns et des autres, savoir parfois faire passer les besoins des
autres avant les siens, la cogestion... Les programmes de la communauté française sont
respectés, bien qu’ils soient abordés de manière différente (suivant les besoins et les
envies de l’élève et du professeur). Nous apprécions le fait d’apprendre et de partager
nos savoirs (professeurs et élèves donnant cours).
Malgré tout ça, nous avons quelques freins à notre charmant projet. Nous pouvons
parler sans honte des problèmes de comportement de la part de certains élèves
(problèmes de vols, de consommation de produits illicites ..) mais il n’y en a pas
plus ici qu’ailleurs. Les vrais problèmes de PN, ce sont les autres structures qui, ne
connaissant rien au projet, le condamnent à l’échec. Je leur dis alors: « Le succès
ne peut être atteint qu’après une succession d’échecs et d’introspections. En fait, le
succès représente 1% de votre travail qui comporte lui, 99% de ce qu’on peut appeler
échec.. » (Soichiro Honda)
Omar Boulam
Pédagogie Nomade,... une école et bien plus encore
Je suis venue à Pédagogie Nomade dans l’espoir de trouver une école différente.
Dans le sens où dans l’école traditionnelle je n’avais pas de problème spécifique sauf
celui de l’ennui. Une des raisons qui faisaient que je m’ennuyais était que ma classe
avançait trop lentement pour mon rythme et j’avais l’impression de perdre mon temps.
En entrant à PN j’étais d’abord très soulagée d’y avoir été acceptée. Car PN était
ma seule chance de m ‘évader de cet enseignement qui me déplaisait dans tous ces
points. Mais j’avais aussi très peur, peur du nouveau car il faut le dire cette école sort
de l’ordinaire. Peur de ne pas être à la hauteur de cette école que je ne connaissais
que trop peu. Mais une fois l’année démarrée mes peurs s’estompèrent peu à peu.
Au début de l’année j’étais cette petite fille modèle qui ne parle que quand on l’y
autorise,.… Et ici justement on me demandait de me libérer, de m’exprimer, d’oser
m’exprimer. Et petit à petit j’ai appris et j’ai osé et maintenant j’ose parler devant les
autres, j’ose dire ce que je pense tout bas sans honte. Ce pas, je l’ai fait grâce à PN, et
je pense que seule cette école pouvait m’aider à le franchir aussi bien qu’elle l’a fait.
Mais PN ne m’a pas seulement appris les savoirs qu’on peut retrouver dans les
programmes, elle m’a appris bien plus sur le plan humain que mon ancienne école.
Et elle continue tous les jours à m’apprendre comme ce savoir-faire que seul PN peut
nous offrir c’est à dire celui de la cogestion de l’école qui m’a tant appris. Dans le
bureau administratif comme en cuisine où continuent les cours de langues ensemble
car cuisiner en anglais c’est bien mieux ! Et le fait de dépasser les programmes dans
certains cours était une expérience géniale que je ne manquerai pas de refaire au cours
de ma prochaine année à Pédagogie Nomade.
En tant que élève à PN on a de vraies responsabilités, car nous sommes le noyau de
l’école, celui qui la fait vivre, on décide de tout ensemble avec les professeurs, on gère
tout du téléphone en passant par le bois de chauffage à la bonne soupe du midi jusqu’à
l’organisation de toute l’école. C’est vraiment notre école puisque on l’a construite
brique par brique.
Si PN venait à fermer ce serait horrible pour moi, car j’adore cette école, elle m’a tant
donné et tant appris. L’idée de changer d’école dans un futur plus ou moins proche me
procure un sentiment hostile car après PN le retour dans une école traditionnelle va
être difficile : passer de « vas- y parle, dis ce que tu penses » à « Tais-toi et assiedstoi » ne sera pas facile.
\
Merci PN pour tout ce que tu m’as appris pendant cette première année et longue vie à
toi !!
Mathilde Vissers
L’importance de PN pour moi.
Pédagogie Nomade a été créé pour répondre à un besoin de certains jeunes à se
raccrocher à l’école qui pour eux n’était devenue qu’une obligation. Elle est basée sur
une égalité professeurs- élèves, une forte implication de ceux-ci au sein de l’école, au
niveau administratif, de la gestion de l’école, de l’intendance mais aussi sur base que
l’élève apprend ici à s’autogérer; à découvrir ce qui lui donne envie de venir à l’école.
Pour ma part, quand j’étais dans l’enseignement « traditionnel » tout ce
que je savais c’est que je venais à l’école par obligation, autant de mes parents que
légale, je devais rester sur un banc pendant huit heures pour être en règle; mais j’avais
perdu tout désir d’apprendre car les professeurs ne répondaient qu’aux questions qui
étaient en lien direct avec le programme. Bien sûr, cela convient à certaines personnes
mais cela ne peut convenir à tous car nous sommes tous des individus différents
auxquels un seul type d’enseignement ne peut convenir, tout le monde ne peut pas
se fondre dans le moule et renoncer à son identité, ses particularités qui en font un
individu à part entière.
Je pensais même à me diriger vers le technique lorsque j’étais dans le « traditionnel »,
faute de trouver satisfaction, mais cela ne me laissais pas un panel de choix
correspondant aux études supérieures qui m’intéressent, ce qui doit malheureusement
être le cas de beaucoup de ceux qui vont en technique, ils font des études qui
correspondent à une abnégation d’eux-mêmes, ce qui ne devrait jamais arriver. On doit
faire ses choix par intérêt personnel et non par dépit...
J’ai entendu parler de Pédagogie Nomade et j’ai découvert leur projet qui m’a
intéressé, je me suis donc inscrit et j’y ai rencontré des élèves qui avaient eu des
différends avec l’école comme moi voire plus, des professeurs et des élèves vraiment
à l’écoute de tous et les uns des autres. J’y ai passé une très belle année pleine de
découvertes et y ai repris goût à l’apprentissage mais par manque de motivation
personnelle, je n’allais pas toujours en cours de mathématiques; ce qui bien sûr était
suicidaire pour l’avenir, malgré cela, j’ai réussi mon année et je pris la décision de
retourner dans le « traditionnel » pour être à niveau en maths et pouvoir faire les
études qui m’intéressaient. Cependant, n’ayant plus droit ni à la parole ni à l’attention
des professeurs, j’ai ressenti un manque grandissant tout au long de l’année ainsi que
la frustration de mes questions qui ne trouvaient pas de réponse. Je me suis dit que
maintenant j’avais la maturité nécessaire pour revenir cette année dans ce cadre qui me
convient mieux avec la motivation de prendre en main ma scolarité et de profiter de
cette grande disponibilité des professeurs.
Théophile Hendrick
Que Pédagogie Nomade vive encore de nombreuses et heureuses rentrées...
Depuis toujours, mes parents sont à la recherche d’écoles à projet différent des
écoles traditionnelles.
Pédagogie Nomade est la plus ambitieuse.
Suite à un début de primaire compliqué, c’est ma mère qui s’est occupée de mon
éducation scolaire en cinquième primaire en enseignement à domicile. J’ai ensuite
réussi mon CEB et suis entré en secondaire à l’athénée de Houffalise. Je suis resté dans
cette école jusqu’à ma quatrième secondaire. C’est une petite école certainement moins
stressante que beaucoup d’autres et pourtant j’y ai souffert d’humiliations, j’ai dû me
soumettre en assistant à des évènements révoltants et injustes et j’ai surtout appris à me
dégouter d’apprendre. Chaque jour était une épreuve à surmonter. La vie à l’école était
source d’angoisses me rendant réellement malade.
Pour finir mes secondaires, après ma quatrième année, j’envisageais de m’inscrire au
Jury Central car il ne m’était plus possible de continuer dans cette même voie. Mais, un
miracle surgit, car une nouvelle école alternative venait d’éclore: Pédagogie Nomade.
Voilà la troisième année que je m’y inscrit, et je m’en trouve comblé. Je n’ai
jamais autant appris, ni avec autant de plaisir. Jamais plus je ne me suis sentis mal le
matin avant de partir à l’école. Je me sens bien mieux dans ma tête et dans mon corps.
Cette école donne l’image d’un énorme centre de connaissances et d’apprentissages
inépuisable et ce dans tous les domaines.
C’est cela que certains s’apprêtent a détruire en la « normalisant ».
Sébasen Vandermissen
Je cherchais à finir mes études dans un cadre différent, où j’ai vraiment l’impression
d’évoluer et d’apprendre; et celà n’est pas qu’une impression. J’ai 20 ans et celà fait
assez de temps que je fréquente l’enseignement secondaire, et la seule chose que j’en
ai tiré c’est qu’on n’apprennait rien. Qu’on nous formattait pour un futur. PN offre un
beaucoup plus grand panel d’apprentissage, pas juste être assis, écouter le prof précher
son cours, son cours qui lui est donné par l’enseignement, on nous fait apprendre ce
qu’on veut (des conneries). Quand on sort de l’enseignement normal on ne sait rien,
capables de rien, comme s’il avait peur de développer le sens critique et pratique des
jeunes. Je sais que quand je sortirai de PN je me sentirai plus grand et plus accompli.
L’enseignement normal me frustrait, m’abbattait. Si PN ferme, c’est la fin d’un combat
pour améliorer l’enseignement belge et je serai fort déçu de voir qu’on nivelle tout par
le bas.
Séraphin Geeroms
Limerlé, le 6 septembre 2010
Chère ministre,
J’ai été élève à PN durant les deux premières années. Ce projet m’a énormément
apporté, d’une manière incomparable à mon ancienne école.
Pour ce qui est des cours « traditionnels », j’ai enfin pu avancer à mon rythme et
diriger mon savoir vers ce qui m’intéressait plutôt que d’attendre la fin des cours en espérant
apprendre quelque chose.
En plus de ça, PN m’a appris à vivre en autonomie avec d’autres élève, ce qui nous a
appris à gérer une maison, à nous gérer nous-même.
Mais plus encore, la structure institutionnelle (qui fonctionne par consensus) m’a
appris à comprendre l’autre – ou du moins essayer, à sortir de mon point-de-vue.
Cette structure institutionnelle est un pilier de l’école pour deux raisons.
La première est le processus décisionnel en lui-même : les débats, les réflexions
collectives et individuelles, la recherche du compromis, etc. permettent un apprentissage
énorme sur la démocratie (la vraie!) et sur autant de sujets que ceux débattus.
La seconde est la conséquence, l’application des décisions : il est beaucoup plus facile
d’apprendre dans un cadre et d’une manière que l’on a choisis et plus formateur aussi. On
apprends alors à assumer les conséquences de ses choix et à les remettre en question.
Mais si les décisions ne sont pas prises par les concernés, le jeu est faussé.
Et si en plus ces décisions sont complètement absurdes (demandez à n’importe qui de
comparer la qualité des cours de Benoît avec ses profs précédents...), il n’en vaut peut-être
plus la chandelle : si PN se voit dicter des règles, toute la partie institutionnelle perdra son
sens...
J’ai terminé mes études secondaires et quitte donc l’école cette année mais je continue
à soutenir le projet le plus sensé auquel j’ai eu l’occasion de participer.
Alors je vous en supplie, madame la ministre, laissez l’équipe éducative se constituer
comme elle l’entend, laissez PN souverain et libre, laissez vivant un petit espoir de
construction d’une société démocratique et humaine.
Simon Hanin.
Pédagogie Nomade est une école différente des autres.
Dans cette école il y a différents projets, de la gestion, des ateliers, et les cours, ça
apprend à l’élève à devenir autonome et à faire les projets qu’il a envie de faire.
Dans cette école j’y ai trouvé beaucoup de choses mais qui n’ont pas été faciles.
C’est une école motivante qui apporte beaucoup aux élèves et qui est même mieux que
l’enseignement traditionnel.
Dans cette école j’ai retrouvé la joie de vivre, le plaisir de reprendre gout à travailler
même si cela est dur pour moi, mais justement je continue à m’acrocher et rester forte
parce justement je tiens beaucoup à une école comme celle-ci et aux projets et je ne
veux pas qu’elle lâche!!!
L’existance de pédagogie Nomade apporte beaucoup aux élèves qui s’y trouvent, les
projets.. et surtout l’importance de son existance.
Les professeurs sont toujours présents et prennent le temps à tous moments de la
journée pour t’apprendre, t’expliquer les différentes matières, pour dialoguer..
La disparation de pédagogie Nomade serrait un drame pour moi, mais pas seulement
moi: pour nous tous.
Cette école n’a vraiment pas le droit de disparaître, elle a le droit d’exister.
Ce n’est pas une école traditionnelle et justement il faut respecter cela pour les jeunes
en difficultés ou qui ont du mal ou justement qui s’ennuient dans l’enseignement
traditionnel. Tous ces élèves ont droit à leurs chances pour avancer, pour approfondir
leurs envies ou reprendre goût à l’école.
Si l’école meurt, les élèves devront quitter leurs logements qui ont un bail: qui c’est
qui va continuer à payer pour rien pendant 1an ? les parents.
Delphine Dumancic
Pédagogie Nomade
Qu’est ce que ça m’a apporté ?
Qu’impliquerait sa digeson par le système tradionnel ou « normal » ?
La question est: Qu’est-ce que j’ai trouvé à Pédagogie Nomade ?
Simple, non ? Et pourtant...
Si on trouve quelque chose c’est qu’on cherche. Cela semble évident.
Qu’est-ce que je cherchais en venant à P.N. ? C’est ici que ça commence à devenir
intéressant ...
J’ai mis plus ou moins un an a trouver cette réponse, qui pourtant, n’est vraiment pas
compliquée.
Je vous la livre en un mot: Moi.
Hé bien non je ne suis pas venue chercher la facilité, le moindre effort, l’éloignement
des parents, l’air pur de la campagne ou l’alcool et les clopes moins chères au
Luxembourg.
Évidemment en débarquant je l’ignorais mais , je me demandais un peu ce que
je venais faire dans cet îlot perdu en plein milieu de rien dont je ne saisissais pas
vraiment le sens. L’essence.
J’ai déboulé un peu sur un coup de tête, une envie de changement. Une recherche
d’autre chose.
Je ne veux pas exagérer en affirmant que j’ai trouvé ma voie, mon identité, que j’ai eu
une illumination subite sur ma place dans le monde ou n’importe quelle banalité dans
le genre.
Mais P.N. m’a véritablement ouvert des chemins, indiqué des portes, éclairé des
directions. Vers ma liberté, mon libre arbitre. Ma conscience ? Elle m’a offert certaines
réponses et fait me poser une multitude de questions.
J’ai trouvé une place qui me convient. Où je peux être tout simplement.
On compare souvent P.N. à une bulle coupée de tout, qui n’est qu’un reflet déformé du
monde extérieur, mais en écrivant ces lignes, je me rends compte que que cette école
est pour moi plus comme un cocon.
Un cocon qui me donne les composés nécessaires pour évoluer, pour me construire. En
tant qu’individu.
Elle m’aide à me compléter, me préparer. Elle me nourrit , m’alimente, m’abreuve. De
connaissances, d’expériences. De vie.
Une bulle élastique en somme. Qui nous apprend à accepter ce qui nous entoure, à
l’intégrer dans notre monde et à en faire partie en même temps.
Qu’est ce que j’aurais perdu (ou à perdre) si P.N. venait à se fondre dans la masse de
l’impersonnel, du standard, de la copie conforme et donc du sans intérêt ?
Le droit d’être différent et de l’assumer j’imagine ?
Mais ai-je vraiment besoin de répondre à cela après m’être étendue là dessus de
diagonal en vertical ?
Je perdrais un monde de possibilités.
Déjà celle de réussir un parcours scolaire.
En effet, quel intérêt aurais-je à faire ma dernière année dans un milieu qui ne
m’apporte pas grand chose après avoir goûté au fruit défendu de la liberté ?
P.N. à l’état naturel cela peut apporter tellement si on prend la peine de lui faire
confiance, de l’accepter.
Je comprends que cela puisse faire peur. Mais c’est comme une nouvelle relation,
il faut juste apprendre à la connaître, accepter ses mauvais côtés, essayer de faire
ressortir les bons...
Simplement lui laisser une chance
Morgane D.
PN, c’est une école différente, qui se vit différemment. Elle se vit, déjà, pas comme les
écoles tradionnelles qui bien trop souvent se subissent. Quand on se rend à PN, c’est
par plaisir, avec le désir d’apprendre. On oublie un peu que l’on est là dans le but de
respecter l’obligaon scolaire. On est à l’école, on y apprend, évidemment, mais celà
nous change tellement de ce qu’on a vécu auparavant que l’on oublie un peu.
Personnellement, en allant à PN je désirais trouver un enseignement différent, qui
me conviendrait. J’y ai trouvé bien plus que ça, de la confiance de la part des autres,
mais également en moi-même. J’y ai aussi trouvé des enseignants qui étaient là pour
m’aider, m’apprendre, pas pour me contrôler ou me formater.
PN m’a permis et me permet au jour le jour de mieux savoir ce que je cherche, ce
que je désire et surtout me permet le plus souvent de le trouver. Ce qui fait qu’à PN,
je me sens bien et je me suis encouragé à me senr mieux en faisant ce que j’ai envie
tout en gardant les pieds sur terre.
PN offre une alternave à l’école tradionnelle, qui, il faut bien l’adme"re, ne
convient pas à tout le monde. Une normalisaon avec des enseignants tradionnels
enlèverait ses cotés alternafs et le projet perdrait tout son interêt.
Thibault L.
Ces deux dernières années, Pn nous a ouvert de nouvelles portes vers quelque chose
de nouveau, de beau, d’enrichissant... Une école dans laquelle nous avons trouvé un
sens au mot «enseignement», au mot «envie» et «surpassement de soi».
PN c’est pas toujours une franche organisation, une motivation sans précédent, ou des
gens qui tendent vers un mieux dans un premier temps. Dans l’enseignement traditionnel ces trois choses sont censées être un acquis, dans notre institution ces concepts
s’acquièrent ou se confirment. Nous n’agissons pas par obligation mais par désir, celui
de grandir, de s’épanouir, de se forger des opinions et d’apprendre tout simplement.
Cette rentrée ne nous apporte pas la sensation des années précédentes, certaines idées
clés de ce qu’est PN sont mises de coté au profit des traditions dans lesquelles nous
ne nous retrouvons pas. Comment serait-il possible que des professeurs qui ne sont
pas nourris par la motivation propre à notre école prennent part à l’ensemble de nos
concepts ? ceux-ci donnent tellement à cette école au jour le jour, heure par heure, que
seul quelqu’un qui a «foi» pourrait prendre place dans une telle équipe éducative...
Tout autre entrée dans ce système sans s’y donner à fond serait un réel sabotage et
nous contraindrait à des idées auxquelles nous n’adhérons pas.
Puis il y a Benoît... Un des principal fondateur de ce qu’est PN et de ce
qu’aujourd’hui elle est ! L’homme à qui l’on reproche tous les agissements de la communauté, pourquoi ? Il a toujours été décreté que PN n’a pas de responsable fixe, que
chacun menait sa barque comme bon lui semblait jusqu’à ce qu’il trouve ses repères et
se lance dans ce délicat projet. Bien sûr tous n’ont pas trouvé leur place et c’est pourquoi d’ailleurs après un moment, ils ont pris d’autres chemins. Mais Ben’ n’est en rien
l’instigateur de leurs méfaits, leur défaite. De surcroît c’est un professeur de français
qui donne 100% de lui-même à chaque cours. Il sait transmettre les connaissances,
donner la flamme, la fougue nécessaire pour y croire, sans rien même imposer (c’est
impressionant le nombre d’élèves que l’on pouvait retrouver à chacun de ses cours
alors que ceux-ci n’étaient pas obligatoires).
Il nous a offert la possibilité de nous racheter envers nous-même, de nous trouver un
but, une conscientisation.
Sa perte dans la vie de tous les jours risquerait d’engendrer la perte du sel de notre
projet.
Vous nous avez donné votre confiance pendant 2 ans. A cette idée, ce style de vie,
pour beacuoup (et nous disons celà en connaissance de cause car nous sommes là
depuis la naissance de Pédagogie Nomade) ce système a changé leur vie, redonné de
l’espoir...
Aujourd’hui, nous, avons l’espoir que ces mots vous auront interpellé.
Thomas Culot & Arnaud Bara"o.
Avant de venir à Pédagogie Nomade, j’étais en «guerre froide» avec l’école traditionelle. Ce système scolaire où toute démarche, aussi minime soit-elle, entraîne une
masse de «paperasserie» (par exemple un billet de retard, signé par un éducateur, remis au professeur, le remettant lui-même au service «contabilité des présences», etc...
; quand j’arrivais à 8h37 au lieu de 8h35) et où le rôle de chacun est clairement défini
très précisément dès le début. Un système rigide où n’a raison que celui qui a le droit
d’avoir raison. Je me souviens avoir été puni injustement (à de longs travaux sans
interêt comme du «bête» recopiage), simplement car c’est le prof’ qui a tout pouvoir
sur sa classe. Je comprends que cette structure soit nécessaire pour une école de grande
taille (entendons plusieurs centaines d’élèves), même si je la désapprouve, mais je n’ai
aucune solution alternative à proposer pour l’instant pour ces méga-centres scolaires.
Dans le monde de l’informatique, un programme n’est jamais parfait à sa sortie.
Alors, on corrige petit à petit les imperfections, les bugs, les effets de bord et on distribue ces corrections sous formes de mises à jour (le terme technique est «patch»,
rustine/pansement en anglais). Mais il arrive un moment où la majorité du programme
est contenue dans ces mises à jour. Le système est lourd à maintenir (car on passe plus
de temps à tenir compte des mises à jour au lieu du programme en lui-même), plutôt
désagréable à améliorer; alors on réécrit une nouvelle version du programme en repartant de zéro. J’ai le sentiment que le procédé est le même pour l’école: l’école pour
tous est une très belle idée à la base. Petit à petit, on comble les (prétendues) failles du
système actuel, jusqu’à arriver au système tel qu’on le connaît actuellement.
Certains trouvent ce système lourd et peu pratique; ils recréent une nouvelle école à
partir de zéro, en repartant des concepts essentiels, et celà donne Pédagogie Nomade,
par exemple.
A Pédagogie Nomade, ce qui importe, c’est ce que j’apprends et ce que j’apporte à
la communauté, et non ce que je suis ou ce que je fais. Encore un exemple parlant:
je rédige actuellement ce document sur mon ordinateur, avec de la musique dans les
oreilles, ce qui me permet d’avoir ma «bulle», mon espace de concentration. Dans une
école traditionelle, ma façon de travailler aurait déjà été réprimandée. J’ai maintenant
«un an de PN» à mon actif, et je pense que ce fut l’année scolaire la plus enrichissante
de toute ma vie. J’ai découvert qu’apprendre n’était pas une obligation légale (puisque je suis majeur), mais un plaisir. J’ai aussi découvert mes capacités, mes limites, de
nouvelles envies, de nouveaux horizons. A Pédagogie Nomade, on ne m’a pas appris à
vivre, mais on m’a permis de le découvrir et de l’expérimenter.
Voici une anecdote que je raconte souvent quand on me demande pourquoi Pédagogie
Nomade est une école tellement géniale: quand je suis arrivé à PN, j’ai suivi presque
à la lettre tout ce qu’on m’avait enseigné jusqu’ici: se lever le matin, aller à l’école,
faire ses travaux, ... Et puis après quelques semaines de ce régime, je me suis dit «finalement, personne ne me contrôle ici, personne ne va rien me dire si je ne suis pas
à l’école», et pendant toute une période, je n’ai rien fait, j’étais juste chez moi à faire
autre chose que du travail scolaire. Mais un jour, je ne saurais expliquer comment ni
pourquoi, j’ai «compris». C’est agréable de se lever de bonne heure, de passer une
journée enrichissante à l’école, et de rentrer chez soi le soir; finalement de prendre sa
vie en main. Et nulle autre école ne m’a donné cette possibilité.
Si on devait mettre un terme à ce projet, c’est le travail (majoritairement bénévole) de
plusieurs personnes qu’on passe tout simplement à la trappe. C’est aussi laisser des dizaines d’élèves en cours de cheminement vers eux-mêmes, fragilisé par leurs mauvaises expériences avec le système scolaire traditionnel. Abandonner Pédagogie Nomade,
c’est casser notre miroir, celui qui nous aide à nous trouver, qui nous fait avancer, et
modifier le projet sans tenir compte de ceux qui y sont impliquer, c’est abandonner le
projet Pédagogie Nomade.
Titouan C.
Récit d’une épopée scolaire
Il y’a deux ans, je suis arrivé dans un petit patelin paumé près de la
frontière luxembourgeoise.
Mon père ayant piqué une crise de colère à cause de mes résultats
scabreux m’a jetté de la maison
et comme ultimatum je devais avoir trouvé un internat.
Ce qui a été vite fait, grâce à de bons amis qui s’épanouissaient trés
bien ici .
Aprés quelque mois difficiles je me suis bien acclimaté car l’autogestion
ne s’apprend pas en un claquement de doigt .
J’ai trouvé ici des profs super géniaux!! qui ne te cassent pas dans tes
actions mais t’enccouragent à aller plus loin encore que ce que je ne
m’imaginais.
ils m’ont procuré la force d’aller j’usqu’au bout des choses avec une
envie inlassable d’en apprendre plus, de pouvoire toucher à tout et une
liberté d’expression que je n’ai vue nulle part dans les autres écoles.
La possibilité de se plaindre et de trouver un arrangement commun c’est
génial non ?!! principe de consensus!! je l’ai apris ici héé oui .
quoi d’autre encore AH !! le fait de pouvoir cumuler la musique et
quelques heures d’école pendant des ateliers d’écriture par exemple .
Depuis que je suis ici c’est à peine si mes parents me reconnaissent .
Je n’ai qu’une chose a rajouter.
Merci PN
Antoine Louyet
sont
Ils nous confient leurs enfants ... et
tout aussi engagés pour le projet!
1BSPMFBVYQBSFOUT
Bruxelles, le 7 septembre 2010.
A toute personne concernée
Pédagogie Nomade est un projet un peu utopique, d’accord.
Ce projet, ultra nécessaire, puisqu’il apporte enfin aux adolescents en révolte contre
notre société une réponse constructive, ouverte et efficace, s’est révélé aussi à nos
yeux un exemple remarquable de qualité pédagogique.
Nous sommes les parents d’un élève qui vient de passer deux années à Pédagogie
Nomade.
Notre fils a été auparavant élève à la Ville de Bruxelles, dans l’un des meilleurs
lycées du pays : Emile Jacqmain. Puis il est passé à l’Athénée d’Uccle 1. Encore
une de ces écoles réputées excellentes, et pour lesquelles les demandes d’inscription
excèdent de très loin les places disponibles. Il n’était pas en décrochage scolaire,
même s’il était mort d’ennui sur les bancs de l’école et un élève très médiocre. Il vient
de sortir de rhéto à PN. Nous sommes formels et il est formel : la qualité des cours
dispensés à PN dépasse de loin ce qu’il a pu vivre ailleurs. Le niveau demandé est très
élevé, tant en Français qu’en Sciences ou en Mathématiques. Et les cours proposés
sont, en général, passionnants.
Pourquoi ?
C’est toujours la même histoire : c’est d’abord parce que les professeurs sont tous
passionnés… par leur branche, par le projet, par les adolescents, avec toutes leurs
difficultés. Ils ont choisi de venir vivre à Limerlé, ils se sont choisis entre eux pour
former une vraie équipe, ils inventent au jour le jour ce qui – nous en sommes sûrs
– porte en graine le futur de l’enseignement.
Dans le monde d’aujourd’hui, on ne peut plus se contenter de former des citoyens
obéissants et silencieux. D’abord, ils le refusent. Et puis le monde du travail a besoin
de gens responsables et proactifs, pas de béni-oui-oui bien disciplinés. A PN, les
élèves sont invités à prendre en main leur destin eux-mêmes, ils peuvent prendre une
part active à l’organisation de l’école. A PN, les professeurs sont pour les élèves des
guides vers des savoirs divers, pas des juges. A PN, pour plein d’aspects de la vie
quotidienne, élèves et professeurs sont à côte à côte, en parfaite égalité. A PN, les
professeurs travaillent infiniment plus d’heures que dans n’importe quelle école :
ils sont quasi tous disponibles, quasi tous les jours, pour toutes les questions, tous
les élèves, et tous leurs collègues ! A PN, l’acquisition de compétences n’est pas
un concept creux : quand, en tant que parent d’élève, vous recevez des courriers
administratifs (paiement de cotisation, rappel des congés, etc ) qui sont signés par
l’un des élèves de la «gestion », vous savez que cet élève a acquis les compétences
suivantes : rédaction, traitement de texte, orthographe, suivi administratif, etc. Pour
un gamin qui, quelques mois plus tôt, se vivait comme « bon à rien », vous ne pensez
pas que c’est une victoire ?
Et s’attaquant froidement, administrativement et par écrit à cette communauté
enseignante d’exception, pour leur signifier des modifications fondamentales à leur
projet, sans discussion ni appel, on risque le pire : la démotivation de l’équipe. Et,
sans cette équipe, PN n’est rien qu’une toute petite école de 70 élèves, perdue dans les
frimas ardennais. Sans cette équipe, PN mourra.
Et la Communauté Française perdra-là un « laboratoire » exceptionnel. Si vous
voulez faire évoluer l’enseignement dans notre pays, vous devriez multiplier les
PN --- et observer bien soigneusement leurs réussites et leurs échecs – pour en
tirer une réflexion salutaire. Mais pour cela, il faut une chose : faire confiance aux
équipes qui se lancent. L’innovation est incompatible avec la normalisation. Dégagez
éventuellement votre responsabilité administrative en faisant signer un document
par tous les parents d’élèves inscrits, précisant qu’ils sont bien conscients de l’aspect
novateur du projet, qu’ils savent que toute innovation comporte des risques, et qu’ils
sont prêts à les assumer. Mais par pitié, laissez l’équipe de Limerlé continuer leur
expérience, comme ils la veulent. Sans cela, elle perd tout sens. Et elle mourra très
vite.
Et les adolescents, de plus en plus nombreux, qui ne voient plus rien pour eux dans le
monde que nous leur proposons, se retrouveront sans cette petite lueur d’espoir….
Nous pensons sincèrement que le message qu’enverrait au pays la disparition de PN
serait un message désastreux. Tant d’yeux suivent cette expérience. Comme le dit très
bien notre fils Simon : « Tous les élèves rêvent de mon école … » ( il ajoute qu’ils
ne sont pas conscients des difficultés : l’isolement, le climat, l’absence des parents, le
fait de « koter » très jeune, le manque de logements adéquats, l’absence de magasins
et de transports en commun dans les villages, les difficultés relationnelles entre élèves
d’une toute petite structure, etc, etc …. mais ceci est une autre histoire). Simon dit
aussi : « Si cette école était à Bruxelles , (où nous vivons ), ce serait la meilleure école
du monde ! ». Il y a, en tous cas, pris confiance en lui et en ses possibilités. Il en
sort décidé à poursuivre des études supérieures. Et quand aux compétences qu’il y a
acquises, voyez par exemple son « chef d’œuvre » : un travail d‘une centaine de pages
sur un sujet de psychologie sociale, la manipulation.
Marianne Defay. Romaniste, ULB. Master of Arts, UC Berkeley. Ex-Enseignante
à la Ville de Bruxelles. Ex-Directeur Général Adjoint de la société Initiative Media,
SA.
Rue Fernand Neuray, 49. 1050 Bruxelles.
Alain Flausch. Fils d’enseignants. Docteur en Droit, ULB. Master in Law, UC Berkeley.
Ex-Avocat. Ex-Directeur Général Adjoint de Prayon Ruppel, SA. Administrateur
Directeur Général de la STIB. Président de l’UITP (Union Internationale des Transports
Publics).
Avenue den Doorn,1. 1080 Bruxelles
Marianne Defay & Alain Flausch
Et si l’on pouvait remonter le temps… Moi cela m’aurait bien plu une expérience
comme celle que vit mon fils Antoine à Pédagogie Nomade. Il y a ici, en 2010, une
odeur d’autonomie et de développement personnel qui lui va très bien et qui n’était
pas vraiment de mise dans les années 60. A l’époque, dans le même temps où l’on
coupait les cheveux (et plus qu’en quatre) il fallait ingurgiter l’ensemble des matières,
l’ensemble du programme et tout cela dans l’ensemble d’un carcan fait d’autorité et
de non reconnaissance des gamins que nous étions. On nous parlait d’Humanités mais
je peux vous assurer que je n’y ai pas souvent rencontré d’humanité. Il nous fallait
la moyenne dans toutes les matières avec le choix entre les classes mathématiques,
commerciales ou scientifiques. Pas de chance, je me sentais plutôt littéraire... Dans
ma première rétho il m’a manqué un point en math que le prof, qui ne m’avait pas à
la bonne et dont je tairai le nom par charité, ne m’a pas mis. J’ai longtemps cru qu’il
y avait pris du plaisir ! J’ai refait une deuxième rétho dans un autre bahut et ensuite je
n’ai plus jamais approché ces territoires inconnus, et pour moi tellement rébarbatifs,
que sont les mathématiques. Un an de perdu, en partie parce que je ne devais pas être
un élève du premier banc, mais le dialogue avec ce prof de math avait-il jamais eu
lieu…
Bref, quand je vois comment Antoine vit à présent son adolescolarité j’éprouve un
sentiment mêlé de soulagement et de fierté. Je le sens nettement mieux dans sa peau,
dans sa manière de rentrer dans la vie et dans l’approche des autres. Sur ce point, c’est
déjà gagné… et ce, pour une part non négligeable, grâce à Pédagogie Nomade.
Il faut répéter que ce projet est novateur et courageux. Malheureusement, comme
toutes les expériences de ce type qui œuvrent dans l’action la réponse se trouve
souvent dans la réaction. Pourtant, d’autres essais pédagogiques, qui furent fort décriés
lors de leur mise en place, font partie actuellement de méthodes d’enseignement dont
on ne remet plus en compte le bienfondé. Ne faut-il pas laisser du temps au temps.
Je ne sais pas ce qu’il va advenir du projet de Pédagogie Nomade. La machine à
broyer est tellement puissante qu’il faudra s’accrocher. Mais je ne doute pas de la
volonté des personnes qui croient à cette aventure autant humaine que pédagogique
ainsi qu’à nos jeunes « adultes » qui y participent et la vivent pour la faire perdurer. Et
tant qu’il y a de la vie et des personnes pour lui donner le souffle…
J’y souscris, bien évidemment
Marc Louyet
Mon fils vient de s’inscrire à Pédagogie Nomade, en 6e en plus. Autant dire que le
choix de lui laisser tenter l’expérience n’a pas été facile, qu’il y a eu de nombreuses
nuits blanches et que ce n’est apparemment pas fini !
Voici l’extrait d’un mail que j’avais envoyé à sa grand-mère fin juin. Un petit
instantané du chemin que nous étions en train de parcourir...
“Je ne sais pas encore si Bruno décidera d’aller là-bas, mais le chemin et la réflexion
que nous sommes en train d’accomplir autour de ce projet sont très enrichissants pour
lui et pour nous.
Pour la première fois, je le sens en train de réfléchir sur ce qu’il souhaite pour luimême de façon positive. L’idée qu’apprendre est surtout un moyen pour construire son
projet est apparemment en train de faire son chemin. Je pense donc que le fait de rester
dans un enseignement plus traditionnel lui poserait moins de problème (d’autant qu’il
a largement les moyens de réussir ).
Le bilan de cette fin d’année est d’ailleurs très bon (pas en terme de résultats, mais en
terme d’investissement ).
Nous avons rencontré hier son titulaire et ses professeurs de math et de langue. Ce
dernier a été particulièrement élogieux sur le chemin parcouru par Bruno depuis
janvier et sur son examen d’anglais. Le professeur de math est convaincu de ses
capacités et lui donne un examen de passage pour consolider une matière dont il
aura besoin l’année prochaine. Dans l’ensemble, le Conseil de classe a trouvé ce 2e
semestre positif.
Pour ma part (et je l’ai dit à Bruno), je suis très contente de ce 2e semestre. Il s’est
vraiment pris en charge.
Face à un tel bilan, on pourrait se dire «mais pourquoi pédagogie nomade» ? En ce qui
me concerne, je pense que cette expérience serait surtout intéressante du point de vue
humain. Je la vois comme un voyage (un peu comme Marco lorsqu’il est parti 1 an en
Angleterre).”
J’ajouterais aujourd’hui que le temps est pour moi un enjeu central. Notre société, dont
l’institution scolaire, vise de plus en plus l’efficacité. Il faut à tout pris former le plus
rapidement possible des gens aptes à s’adapter à notre grande machine économique.
Mais où sont les êtres humains dans tout cela ?
Pédagogie Nomade, c’est donner la possibilité à Bruno de prendre son temps,
d’emprunter un détour.
Catherine Gérard
Il est né, et, à la façon dont il a crié on a tout de suite compris qu’il
était en colère. Toute son enfance on lui a dit, fais ça, fais pas ça, va
par là, sois ceci, sois cela, et lui avec une application extrême s’est
efforcé de faire systématiquement le contraire de ce qui lui était demandé.
Et de rébellion en refus , plein d’incompréhension face à ce qui lui était
demandé, il a fini par se faire devancer par tous ses copains, les petits
frères de ses copains et tous les autres qui avaient vu le jour bien après
lui.
La situation était devenue désespérée.
Jusqu’au jour où on a vu à la télé un reportage sur pédagogie nomade.
Pédagogie nomade est un lieu de vie et d’enseignement différent, un
endroit où on apprend à apprendre, où on essaie d’acquérir des savoirs
plutôt que de devoir prouver chaque seconde face à un professeur tout
puissant qu’on n’est pas qu’un petit con incapable. Bref, un endroit idéal
pour un inadapté scolaire et depuis c’est la métamorphose ! Le rebelle
s’est calmé, le blasé s’est intéressé, le paresseux s’est mis au travail...
Pédagogie nomade c’est le travail de toute une équipe d’enseignants qui
fait un travail formidable pour sauver quelques jeunes, pour leur donner un
avenir, les empêcher de tourner en rond et être des adultes responsables .
Alors si tout ce travail accompli par une équipe d’enseignants passionnés
et motivés n’est qu’une goutte d’eau face à quelques gouttes de café,
alors, alors ........on ne peut que s’interroger sur l’avenir de notre
société ....
Dominique Boon
Cette année, Pédagogie Nomade entame sa troisième année. Mon fils fait partie de
ces élèves qui ont connu cette école différente à ses premiers pas. Actuellement, il
commence sa 6ème secondaire dans le but d’obtenir son diplôme.
En rapport avec le décrochage scolaire, il faisait partie de ces jeunes qui ne trouvaient
pas de sens à l’école, ni à l’intérêt qu’elle pouvait lui apporter tant pour son avenir
que concernant sa construction personnelle. Tout au long de son parcours scolaire, il
a été qualifié par les écoles fréquentées auparavant, d’enfant hyper actif, ce qui vous
le savez pose problème dans l’enseignement tel il existe. Il y a deux ans, il faisait son
deuil de l’école et c’est avec beaucoup de scepticisme qu’il s’est inscrit à Pédagogie
Nomade. En quelques mois, j’ai vu ce jeune gagner confiance en lui et prendre en
maturité. Une évolution à laquelle je ne m’attendais pas dans un lapse de temps aussi
court.
A ce jour, je suis forcée de constater qu’il a appris le goût de l’apprentissage, et ce que
signifiait « avoir des perspectives d’avenir ». Pédagogie Nomade a ouvert une porte
qui pour lui était inexistante voire inespérée.
En tant que parent, Pédagogie Nomade représente l’espoir. Elle œuvre pour un
apprentissage constructif en partant de l’acquis de chacun de ses élèves. Sans préjuger
aucun, un défi monstrueux que je n’ai vu entrepris par aucune des écoles que j’ai
côtoyées à Bruxelles.
Elle suscite également la motivation qui effectivement est un ingrédient majeur pour
entreprendre des études comme toutes autres choses dans la vie. Cette motivation
est générée entre autre par son mode de fonctionnement participatif qui implique
professeurs et élèves à dialoguer pour mieux travailler ensemble. Ce dialogue est
crucial pour communiquer et comprendre ce que nous pouvons construire en société
afin que chacun trouve sa place et donne un sens à ce qui est entrepris.
Elle déclenche le sens critique par le choix des décisions à prendre pour faire évoluer
une école nouvelle qui appartient aux élèves et aux enseignants.
Elle donne le goût d’apprendre. La manière d’enseigner implique directement l’élève
à participer à son savoir. Par différentes méthodologies proposées et mises en place,
l’élève choisit sa manière de travailler de façon à ce qu’il trouve une part de plaisir
dans la construction de son savoir. C’est cette notion de plaisir qui pousse la curiosité
d’un élève à chercher plus loin pour satisfaire une soif de compréhension et de
connaissances.
De mon point de vue, l’enseignement y est de qualité. J’argumente cette idée d’un œil
extérieur en me basant sur des observations concrètes que j’ai constatées chez mon
fils. Pédagogie Nomade a donné le goût de la lecture à un élève qui à chaque fois qu’il
ouvrait un livre n’était pas capable d’en lire plus de 20 pages tellement l’ennui était
grand. Actuellement, il lit plus de livres que le programme de français ne l’exige.
Auparavant, des travaux de recherches pour constituer une production demandée
par l’école représentait un calvaire auquel je devais participer avec lui pour que ce
travail aboutisse. Aujourd’hui, c’est en autonomie qu’il effectue ses travaux. Ce qui
d’un point de vue de l’apprentissage fait évoluer sa méthode de travail personnel en
étoffant ses connaissances.
Pour quitter l’aspect protocolaire qu’exige l’écriture, je donne en quelques mots, le
sens que représente pour moi Pédagogie Nomade à ce jour.
P comme Projet innovateur
E comme Espoir
D comme Dialogue
A comme Apprentissage
G comme Gestion
O comme Opportunité
G comme Goût
I comme Investissement
E comme Engagement
N comme Nébuleux
O comme Ouverture
M comme Motivation
A comme Accompagnement
D comme Difficulté
E comme Ensemble
Autant de mots qui peuvent occasionner des maux et/ou des bonheurs. Le principe
même de l’éducation, soit, de la vie tout simplement. Insurmontable ! Certainement
pas. Intéressant ! Je le pense sincèrement.
Exploitable à souhait pour ériger ce que nous possédons et nous sommes en y
cherchant chacun notre rôle à jouer et la place que l’on peut y tenir.
J’ai vu dans cette école différente, dont je fais l’éloge tellement le défi me paraît
grand, une équipe d’enseignants soudés et travaillant pour les mêmes objectifs. Des
professeurs engagés, impliqués, ne mesurant pas les heures de travail à fournir et
déployant sans relâches les efforts nécessaires au soutien scolaire de leurs élèves. Une
qualité de la relation humaine dans le travail qui dans le contexte sociétal actuel se fait
de plus en plus rare.
Depuis sa naissance, Pédagogie Nomade rencontre des difficultés à être comprise de
part le simple fait qu’elle a un mode de fonctionnement qui ne correspond pas à ce
que nous avons l’habitude de rencontrer dans le milieu scolaire. Ce qui selon moi,
représente un handicap à son évolution constructive. On l’attaque sur la forme alors
qu’il faudrait se pencher sur le fond pour l’aider à grandir. Et pourtant, je pense que
ce projet d’école apporterait beaucoup au domaine de l’enseignement francophone de
Belgique qui au vu des pourcentages de décrochages aurait bien besoin de réformes
humaines pensées et intelligentes. Je n’ai à ma connaissance jamais vu un projet de
cette envergure fonctionner comme sur des roulettes du jour au lendemain. Pédagogie
Nomade a besoin de temps pour trouver sa vitesse de croisière et renforcer ses racines
mais également, pour s’adapter au mieux aux besoins de la jeunesse actuelle. Et pour
y parvenir, elle a besoin du soutien et de la bonne volonté de la part de nous TOUS.
Dominique Van Rampelbergh
Pédagogie Nomade !
Un nom qui résonnait comme une promesse aux naufragés de l’école que nous
sommes.
Nous sommes nouveaux à Pédagogie Nomade.
Je dis « nous » pour mon fils Léopold, nouvel élève et moi, nouveau parent.
Nous étions tous les deux impatients d’y entrer, de participer à un tel projet.
Cela faisait presque un an que nous en parlions, que nous en rêvions !
Et voilà que la rentrée 2010 le voit franchir l’escalier de bois de la Rue du Roy à
Limerlé.
Les vacances de Léo auront été, pour la première fois, depuis des années, différentes.
Plus détendues.
Si l’appréhension de la nouveauté le titillait, il était au moins sûr de rentrer dans une
école qui lui correspondrait.
Après un parcours difficile, stressant, phobique, être élève dans cette école est pour
lui la promesse d’un renouveau et, pour moi, l’assurance que mon fils va trouver des
conditions de fonctionnement humaines, conviviales, adaptées.
Je suis moi-même enseignante dans une école de la région bruxelloise. Je vois tous les
jours les limites de notre enseignement avec des élèves dits « différents ».
Que dire aussi de l’esprit de compétition, de la réussite à tout prix, des préjugés, des
discriminations qui « poussent » des jeunes à se retrouver sur le carreau parce que
l’école leur ferme des portes plutôt que de leur en ouvrir ?
Pédagogie Nomade ouvre des portes, (re)donne une chance, rend sa place au vrai
apprentissage, celui que l’on fait pour soi.
Dans Pédagogie, il y outils, sérieux, professionnel, soucis et respect de l’élève.
Dans Nomade, il y a ouverture, changement, progression, renouvellement, inspiration,
(re)construction.
Dans la bâtisse de la rue du Roy, il y a de la chaleur humaine, du respect, de l’accueil,
de la créativité, de l’espoir, une fameuse dose d’énergie et de bonne volonté.
A Pédagogie Nomade, il y a de la place pour tous : profs, parents, élèves. En toute
égalité et c’est précieux !
Bien plus qu’une simple école, PN est un véritable lieu d’apprentissage pour la vie
entière.
Elle nous propose d’aider nos enfants à devenir des adultes autonomes, non-formatés,
citoyens responsables, capables de penser par eux-mêmes.
Je ne peux qu’être d’accord avec un tel objectif et espérer que PN demeure telle
qu’elle est.
Je n’ai qu’un regret : que Pédagogie Nomade ne soit pas née plus tôt pour pouvoir
accueillir mes aînés et qu’elle n’ait pas de nombreuses petites sœurs en
Wallonie et à Bruxelles, on en a bien besoin.
Nancy Quadflieg
Ainsi donc, les instance officielles ont décidé de liquider le projet «Pédagogie
Nomade»…
Car c’est de cela qu’il s’agit.
Existe-t-il une école parfaite ?
Et les garants de l’enseignement traditionnel ont-ils des leçons à donner à ceux qui ont
l’audace de tenter d’autres voies ?
Avec quelles références ? Les jeunes «shizophrénisés» par les injonctions paradoxales
Fais des études/Sois au chômage?
Il n’y a peut-être pas d’école parfaite, mais il y a des projets (avec des êtres!) honnêtes,
vivants, interpellants. P.N. est de ceux-là.
Je le sais pour l’avoir côtoyé depuis son ouverture. Je le sais pour avoir vu mon «fils»
s’épanouir, retrouver sa dimension, oser déployer ses ailes. Et… donner ! Partager !
Oui.
Vous en connaissez beaucoup des écoles comme ça ?
Des écoles où les enseignants sont reconnus, respectés, comme enseignants référents
ET comme humains. Et aimés sans doute.
Où donc ailleurs ? Ne cherchez pas, il y en a si peu...
Je maintiens que le but de la prise en main de la part des instances officielles est de
liquider ce projet.
Parce qu’il dérange l’idée que ces instances se font de l’autorité.
D’une part une autorité distante et déconnectée du vécu -qu’incarne merveilleusement
Madame La Préfète De Vielsam, d’autre part l’autorité issue de l’engagement total des
enseignants, sur le terrain, au jour le jour. Et même la nuit.
Prétendre défendre ce projet novateur en lui appliquant les restrictions et contraintes
inhérentes à l’enseignement traditionnel est un non-sens.
Pour soutenir ce projet, il faut oser lui donner TOUTES les chances et moyens, oser
se décaler des mécanismes en place -marchent-ils ?- qui ont conduit les jeunes à se
diriger vers ce projet.
Injecter les mêmes ingrédients de l’enseignement traditionnel dans ce projet revient à
remettre le cadre qui à conduit les élèves vers l’échec.
Cette démarche me semble un aveu d’impuissance.
Il n’y a pas d’école parfaite.
Il y a des lieux où des adolescents peuvent se confronter aux questions essentielles
de l’existence. Et, dans ces lieux, il y a peu de place pour la tricherie et les fauxsemblants.
P.N. est un de ces lieux-là.
Manuel Fernández Vázquez
En cherchant à ne pas m’égarer (et ne pas rester garée) dans ma responsabilité en
temps que parent à faire respecter un droit à la scolarité, quand à bout de souffle de
maintes exclusions et pressentant le chemin de l’école buissonnière pour mon fils
de 16 ans, au détour du chemin ou tout droit en cliquant « Pédagogie Alternative »,
l’alternative figurait PRESENTE dans la pédagogie, j’ai nommé PEDAGOGIE
NOMADE dont je peux vous chanter les louanges.
Car il s’agit bien d’un chant, une harmonie, une substance qui se crée et qui s’exprime
pour mieux se comprendre et se définir. Une substance qui comme dans le Tao utilise
le mot souplesse comme Maître-mot et ceci afin que la substance de l’être adolescent
en pleine alchimie créatrice de sa personnalité puisse évoluer harmonieusement.
Ne l’oubliez pas, l’évolution est une expansion perpétuelle, et la demande (quête)
du commun des mortels se renouvelle avec elle. Demande il y a eu… et des
efforts incomparables ont été mis en place, de l’esprit, de la réflexion mentale et
philosophique, ils sont parvenus à ne pas s’égarer à ne pas rester garé mais à créer de
la matière (une école) qui elle même assure la réflexion perpétuelle et donc la création
de matière …
Où va-t-on (certains se le demandent ???) et pourtant la demande (quête) me semble
être la plus naturelle du droit existentiel, être écouté, être entendu de par ce que l’on
est et non pas de par ce que l’on voudrait bien que l’autre soi : des élèves, qui par
leur présence signe leur droit d’intégration à une Pédagogie Nomade en perpétuel
exercice d’évolution : l’équilibre se crée avec le Yin et le Yang. Un jour noir, un jour
rose, un jour bleu, un cou de gueule, un sourire, une étincelle telle une source créative
impossible à tarir, tout au plus l’assécher, la laisser périr, pourrir…vous vouliez rire
j’espère. Le mouvement perpétuel est intarissable, il retrouve d’autres sources qui
se mélange pour alimenter leurs croyances qu’un monde où les genres se mélangent
s’infusent et se manifestent est possible et où tous les savoirs sont transmissibles
comme une épidémie (ah ah ah).
Tout au plus si par hasard vous aimez vous entendrez non plus le chant, mais la
puissance du son d’un tambour qui fait entendre la voix de son cœur ou peut-être le
rugissement d’un lion qui défend son territoire.
Alors… écoutez, du fond de votre cœur : quel est le véritable appel ???
Marion Delforge
Concernant le projet nomade:
La nouveauté, c’est oser. Oser sortir des sentiers communs. Voilà pourquoi croire à
cette aventure, c’est avant tout, semer une graine qui germera dans une terre fertile, où
tout le monde l’enrichira.
Le projet nomade, c’est aller au-delà de ce qui existe. Pourquoi ne pas changer
d’optique, voire de façon de modifier ce qui est ancré depuis de longues décennies
dans un inconscient collectif.
Voilà pourquoi ce projet mérite toute l’attention requise. Il est conçu pour permettre
un avenir florissant à nos enfants, un avenir aux propriétés différentes, mais ô combien
révélatrices d’un objectif commun.
Les grands projets ont depuis tous les temps, d’abord été une utopie dans l’esprit de
certains.
Pour ensuite se concrétiser.
Longue vie et beaucoup d’enthousiasme au projet nomade. Voilà ce que je souhaite.
Marne Delvaux
LETTRE OUVERTE POUR MADAME LA MINISTRE
Voyez-vous Madame la Ministre, dans notre pays (pays ?), et je ne vous apprends rien,
notre enseignement (secondaire) est un des plus médiocres d’Europe. Ne serait-il pas
temps d’ouvrir les yeux et les oreilles vers ceux qui, contre vents et marées, déploient
toute leur force et leur énergie pour construire une autre école ? Une école qui
récupère quelques ados (à peine 60) (et quelques profs aussi) perdus dans les dédales
de « notre » enseignement, ne sachant plus sur quel banc être obligé de s’assoir 7 à 8
heures par jour pour apprendre, des ados écœurés par la rigidité d’un système qui ne
leur propose aucune alternative, des ados blessés par des adultes sourds et aveugles à
leurs difficultés.
Voyez-vous Madame la Ministre, dans notre pays, l’enseignement traditionnel basé sur
une pédagogie sédentaire convient à la majorité, mais pas à tous.
Voyez-vous Madame la Ministre, Pédagogie Nomade se veut être bien plus qu’une
école simplement différente. C’est une école qui soigne les cœurs meurtris des ces
ados que des adultes considèrent comme des cas désespérés, voire bons à rien. Une
école qui propose d’apprendre autrement et qui redonne du sens et l’envie d’apprendre.
Une école qui redonne confiance en soi et l’envie de refaire le monde. Une école
« pas chère à l’Etat » puisqu’il n’y a ni directeur, ni secrétaire, ni surveillants, ni
personnel d’entretien, ni cuisiniers car c’est l’ensemble des professeurs et des élèves
qui s’occupent de la gestion et de l’intendance de l’école. Une école de la vie en
démocratie où la discrimination n’a pas de place.
Voyez-vous Madame la Ministre, si on casse le projet PN, ce n’est pas 60 ados qui se
retrouvent sur la rue (car croyez bien que s’ils ont fuit la pédagogie sédentaire ce n’est
pas pour y retourner), c’est des générations d’ados qui se retrouveront aujourd’hui et
demain sur la rue parce que quelques personnes obtuses n’ont pas leur cœur ouvert sur
le monde.
Madame la Ministre, je vous demande d’ouvrir votre cœur de mère pour entendre
notre voix unanime de détresse pour sauver nos jeunes de la déchéance et qui ne
demandent qu’une seule chose à notre société, que l’on croie en eux.
Béatrice Szapu
Betre: Pédagogie Nomade (PN)
Beste leraren en leerlingen van PN, beste collega-ouders,
Ik schrijf deze brief omdat ik begrijp dat Pédagogie Nomade of PN onder vuur ligt en
steun kan gebruiken om te overleven. Ik schrijf deze brief in het Nederlands omdat ik
me in deze taal - mijn moedertaal - het best kan uitdrukken en omdat het een taal is die
velen in België beheersen.
Mijn dochter Mathilde heeft zich in juli 2009 ingeschreven in het vierde jaar van
PN. Ze heeft het schooljaar met plezier doorlopen, met succes ook - ze is over naar
de vijfde - en heeft ontzettend veel geleerd. Ze heeft naast het reguliere programma
van het vierde jaar, ook sommige vakken op het niveau van de vijfde gevolgd, een
taalstage in Engeland beleefd, een kinderboek getekend, vele vergaderingen over het
reilen en zeilen van de school meegemaakt en organisatisatorische taken in de school
op zich genomen.
Waarom heeft ze zich aan het eind van de derde klas ingeschreven in PN? Ze deed
het toch goed op Saint Remacle, een gerenommeerde school te Stavelot? Bovendien
moet ze langer reizen naar PN? Zij had haar eigen redenen om op zoek te gaan naar
een andere school: ze was het schoolse karakter van het onderwijs beu, ze vond het
leertempo te laag, en vond het niet prettig om een passieve consument van onderwijs
te zijn.
Ik ben trots op PN en trots op mijn dochter. In een kleine dynamische groep hebben
leraren en leerlingen een systeem opgezet waar leren à la carte mogelijk is, waarin
vraaggestuurd leren een belangrijke plaats inneemt naast aanbodgestuurd leren.
Mijn dochter vaart er wel bij. Dit jaar heeft gaat ze zich voorbereiden op de
universiteit: ze orienteert zich in eerste instantie op diergedragswetenschappen, in
Utrecht (Nederland) of Rennes (Frankrijk). Ze gaat zich verdiepen, naast het reguliere
programma van PN, in vakken die ze later nodig heeft: wetenschap, wiskunde,
Nederlands en Duits. Ze leert haar eigen mening te vormen en mondig te zijn in een
actieve gemeenschap met mensen van allerlei pluimage. Ze leert ook dat heel veel kan,
als je je er tenminste voor inspant. Zelf dingen oppakken in plaats van zaken op je af
laten komen.
Ik zou het heel jammer vinden als PN verdwijnt. Niet direct voor mijn dochter, zij zal
haar weg wel vinden, haar ondernemende karakter zal niet één twee drie uitdoven, zij
heeft afgelopen jaar de kans gekregen om dit karakter aan te scherpen. Nee, ik zou het
jammer vinden voor andere leerlingen, voor leerlingen die deze kans niet krijgen. Voor
het onderwijs in Wallonië en België, dat de kans niet krijgt om een experiment in volle
bloei te zien komen.
Mijn stellige overtuiging is dat PN volledig in de lijn ligt van hoe onderwijs er in de
toekomst uitziet. Gericht op het ontwikkelen van competenties bij leerlingen en het
motiveren van deze leerlingen om te leren, zoveel mogelijk, daar waar hun interesse
ligt, steeds verder, dieper, concreter. Dit bereidt voor op een maatschappij die drijft op
continue leren en ontwikkelen. Natuurlijk heeft het concept van PN nog kinderziektes;
dit is echter tijdelijk.
Ik wens PN en alle nauw betrokkenen veel succes toe in de komende tijd, en wil
iedereen bedanken voor het prachtige instituut dat gecreeërd is!
Peter Vissers
L’Ecole actuelle me désole. Elle fabrique trop d’élèves stressés, en manque d’estime
d’eux-mêmes. Ce sont ceux qui n’ont pas résisté à l’évaluation, au jugement, aux
critiques, aux incohérences, aux « faites ce que je dis, pas ce que je fais » et au trop
souvent entendu : « Tu es NUL ! ».
En juin 2009, ma fille aînée faisait partie de ces exclus. Elle devait redoubler son
année en grande partie parce qu’elle s’était rebellée ne supportant plus que son
professeur de mathématique la traite de « conne ». Comment en était-elle arrivée
là ? Dès le début de sa scolarité, c’était une petite fille très intelligente, mais ayant
quelques troubles légers de l’apprentissage (dyscalculie et dyslexie). En Finlande,
elle aurait bénéficié d’une aide appropriée au sein de l’école et on l’aurait encouragée
pour les efforts supplémentaires qu’elle fournissait. Ici, les efforts se faisaient après
l’école et les samedis. Au fil des ans, les professionnels externes à l’école qui lui
apportaient un support étaient tous d’accord : de grandes capacités mais de moins
en moins d’estime d’elle-même. Même si quelques personnes l’aidaient au sein de
l’école, il suffisait de quelques paroles désobligeantes, quelques punitions injustes,
quelques moqueries pour qu’elle se dévalorise. Un thérapeute lui faisait-il prendre
conscience de sa valeur : c’est la révolte qui l’habitait alors: comment être en paix
et ouvert à l’apprentissage dans de telles conditions ? Depuis toute petite, elle rêvait
d’une autre école, où il ferait bon APPRENDRE, où elle aurait du plaisir à partager des
connaissances, où elle ne serait pas jugée sur autres choses que des compétences ou
des connaissances apprises, où le stress ne la rongerait plus et surtout où il y aurait du
RESPECT entre les différents acteurs.
Et elle découvrit PN. Dès notre première visite, ce fut une évidence. Au bout de quinze
minutes de dialogue avec Benoît Toussaint, une petite lumière s’alluma dans ses yeux.
Elle avait trouvé des gens qui pensaient comme elle, qui voulaient apprendre pour
le plaisir, pour grandir et non pas pour des points ou par spéculation. Elle lisait les
phrases affichées dans l’école, elle parlait librement, de tout, sans tabou. En qualité
de mère, empreinte de mes vieux réflexes, je pensais : « elle ne devrait pas parler
de cela, elle va déjà se faire mal voir… Projet pédagogique alternatif, oui, mais ils
restent des profs. Elle est trop jeune, trop naïve... ». Mais déjà des élèves l’avaient
emmenée visiter des logements, elle devrait se trouver une colocation, il n’y avait pas
d’internat… Nous étions fin juin, la plupart des écoles de la communauté française
étaient déjà fermées et, ici, profs et élèves étaient encore là : ils construisaient leur
école, avec ciment, pierre, mots, respect, idéal et espoir. Le projet me fut expliqué en
long et en large, travaux d’élèves à l’appui. Ma fille remplit une fiche de préinscription
et le lendemain matin sa lettre de candidature était rédigée.
Inscrire son enfant à PN est une grande aventure mais je ne regrette pas.
Je me sens même intimement liée au projet. Ma fille s’est épanouie et responsabilisée.
Si l’ancienne école l’avait un peu poussée vers les chemins défendus où l’on oublie
son mal-être, PN lui a redonné le goût d’une vie saine, active et positive. Cette année,
elle entre en Rhéto. Depuis la mi-août, elle partage une petite maison avec son ami,
élève à PN également. La propriétaire m’a contactée : elle est très heureuse, ils ont très
bien aménagé la maison et sont très sympathiques. Ma fille a de beaux projets pour
l’après PN : s’inscrire en « fac de philo »!
Alors, quand j’entends que l’on veut évincer un professeur comme Benoît, traîner en
justice un autre professeur comme Gil, faire inspecter plusieurs fois cette petite école
qui fonctionne bien, où les profs se dépensent sans compter… alors que tant d’autres
professeurs, ailleurs, harcèlent ou découragent nos enfants, je pense à ce livre que
je lis à ma dernière: « Pourquoi les éléphants ont-ils peur des petites souris ? » ,
dans cette histoire, Philippe Genet raconte pourquoi, selon une croyance populaire,
les éléphants ont peur des souris: chatouillé à la trompe par une souris, un éléphant
se mit à éternuer, provoquant la chute de ses compagnons. Depuis ce moment, les
pachydermes ont tellement peur que lorsqu’ils croisent ces petites bêtes, ils font demitour.
Arianne Moureaux Henrist
Ecoutez braves gens :
Que dire ? Oui, que dire ? Pour moi tout est dans le regard. Celui de mon enfant
devenu élève et aussi jeune adulte. Le regard des autres aussi, celui des élèves croisés
dans tous les coins de cette école qui porte son nom comme un défi à l’immobilisme :
Pédagogie Nomade.
C’est voir dans ces regards de multiples questionnements mais aussi une
détermination : celle de prendre son futur, aussi incertain soit-il, en mains. Ces mains
qui ont façonné des lieux extravagants et exigeants comme un défi à l’ordre des
choses établies.
Une révolution culturelle, n’ayons pas peur des mots, une petite révolution qui se veut
nomade, partagée et ouverte à la société qui prône pourtant le sur-place comme modèle
de développement.
Un lieu ouvert et généreux, une école qui n’hésite pas à montrer sa différence. Celle
qu’elle revendique comme projet pilote porté par ses enseignants, ses élèves, ses amis
et parents. Une école où la question existentielle -qui va faire la vaisselle ?- côtoie
avec autant d’importance celle de savoir qui va organiser l’atelier qui évoquera Don
Quichotte ou Georges Brassens …
Une école où l’expérience est partagée, un lieu exigeant où chacun, me semble-t-il, a
pu se construire selon une confiance gagnée sous le regard des autres.
Avec Pédagogie nomade, il n’y aura pas de constats ou d’analyses communes : nous
sommes, parents, amis, élèves et professeurs si proches et si différents.
La disparition par la normalisation (tous en ligne) d’un projet qui « ose » porter le
nom de Pédagogie Nomade ne laisserait rien. Les lieux seraient vides, inoccupés. La
vacuité pourrait tenter d’y établir son domicile, elle n’y arriverait cependant pas.
Par ailleurs, dans les regards croisés en ces lieux depuis plus de deux ans, une
plénitude et une volonté de porter le projet pédagogique nomade plus loin et plus
fortement encore s’y exprimera, tout simplement et pour longtemps…
Michel Hanin
Ottré, le 5 septembre 2010.
Madame la Ministre,
Permettez-moi de vous adresser ces quelques lignes en ma qualité de
parent d’élève fréquentant Pédagogie Nomade.
Je suis père de quatre garçons: les trois aînés ont fait leurs
« humanités » au Collège Saint-Remacle, à Stavelot, où ils ont pu suivre les cours de
Benoît TOUSSAINT, titulaire du cours de français. La personnalité de ce professeur a
-ce sont leurs mots- éclairé leur parcours scolaire et contribué fortement à révéler leur
personnalité.
C’est donc avec un vif intérêt que nous avons appris la création
par ce même professeur d’une école ouverte à une pédagogie différente. Après nous
être informés sur le projet, nous avons décidé, en parfaite convergence avec lui, d’y
inscrire notre plus jeune fils, qui se révélait être un élève boulimique d’informations et
d’enseignements, mais frustré dans ses questionnements lors de son parcours scolaire
traditionnel.
La première année d’existence et d’expérience de Pédagogie
Nomade fut riche en enseignement: pour notre fils, et pour nous-mêmes, ses parents,
qui reconnaissions dans cette expérience la scolastique au sens platonicien.
Cette « expérience » rentre dans sa troisième année: année de mise
au point, d’expériences riches, nourries même de balbutiements et de tâtonnements,
mais surtout couronnée -nous l’avons constaté auprès de notre fils mais aussi auprès
d’autres élèves- d’éveil et de révélation..
Nous faisons appel, élève et parents, à votre perspicacité, à votre
intelligence et à votre conscience pour soutenir ce projet dans lequel tant de gens,
responsables et volontaires, s’impliquent sans compter.
Au-delà, et vous connaissant pour avoir suivi votre carrière lors de
débats et d’exposés sur votre programme pédagogique, il me paraît essentiel et vital
que vous dotiez cette démarche innovante et cette expérience pédagogique délicate
d’une caution structurelle qui s’engage dans le soutien et la collaboration, non dans
une opposition juste motivée par une incapacité profonde de compréhension: élèves et
enseignants de Pédagogie Nomade ont des engagements, des objectifs, des intérêts et
des paris à tenir, qui ne peuvent souffrir de mesquines et stupides querelles intestines.
Si votre intervention s’avère nécessaire, c’est sur ce point qu’elle sera pertinente et
salutaire : j’ai oui dire -de mes propres oreilles- Madame la Préfète clamer « qu’elle
avait déjà assez de travail sans PN. ». Soulagez-la, je vous en supplie, libérez et
confortez Pédagogie Nomade.
Découvrir, investir et innover seront les bases fondatrices et
régénératrices de la société de demain: osez, Madame la Ministre, en vous fiant à
la sensibilité des enfants inscrits à Pédagogie Nomade et qui in fine souscrivent à
ce projet, en croyant à la conscience responsable et bienveillante des parents qui
parrainent le projet, et en découvrant la compétence et l’investissement des enseignants
qui s’impliquent -sans compter- dans l’ouverture et l’élévation de ces jeunes. Votre
soutien sera demain récompensé par la révélation d’identités riches et fortes, qui ne
pourra qu’être bénéfique à l’ensemble du corps enseignant et du système pédagogique
dans son ensemble.
Je vous prie d’agréer, Madame la Ministre, l’expression des
sentiments inquiets mais confiants de parents diligents.
Sabine & Alain HENDRICK
Lierneux, le 7 septembre2010
Rentrée des classes,
L’invité de matin première sur la’ une radio ‘énumère les difficultés vécues dans
l’enseignement :
Un taux d’échec époustouflant qui atteint maintenant toutes les couches sociales, y
compris les élèves avec un bagage culturel et intellectuel qui ne laissait pas pressentir
ce genre de problèmes, absentéisme, exclusion sociale, différences de niveau entre
les écoles, redoublement, triplement et exclusion, désaffection de la profession
d’enseignant par les jeunes ; le bilan est lourd, à la mesure de la force d’inertie qui
paralyse le monde scolaire.
Les jeunes n’arrivent pas à se projeter, à se construire, à trouver les convergences entre
leurs intérêts et ce que l’école leur propose. Douze longues années assis, à écouter des
professeurs qui ont choisi les thèmes, prédigéré les matières, effectués tous les choix
concernant les élèves : type d’activité, pédagogie, mode d’expression, aménagement
des locaux, etc.
Néant aussi en ce qui concerne : le développement personnel des élèves, les projets
individuels ou de groupe, la vie sociale transversale à l’intérieur du groupe scolaire.
La citoyenneté, la responsabilisation sonnent comme autant de mots creux.
L’apprentissage à la démocratie : cette farce rejouée chaque année au conseil de
participation, où le directeur à la lourde tâche de s’acquitter de l’obligation légale
de consulter une fois par an les délégués des parents et des élèves, et où chaque
suggestion même la plus simple (pourrait-on mettre des micro ondes à la cafétéria ?)
ébranle le fragile équilibre de la grande Dame (réponse : non c’est impossible !).
En terminant mon déjeuner, je me disais que le projet développé à Pédagogie Nomade
s’attaquait précisément à tous ces défis et relevait le gant de manière magistrale.
Combien d’enseignants en manque d’oxygène n’étaient pas passés cette année à
l’école et repartis plein de l’espoir qu’un changement est possible, et qu’une école
conviviale, faite d’échanges et de créativité est possible dans une structure scolaire,
jusqu’à l’excellence.
De l’extérieur, Pédagogie Nomade à l’air d’un grand capharnaüm, de l’intérieur, c’est
une école bouillonnante de projets et de réalisations, des élèves heureux de partager
une tranche de leur vie avec des adultes. Chacun cheminant vers ses propres projets,
certains avec leurs difficultés, d’autres lancés comme des satellites, mais tous, sur le
même bateau.
L’année 2009/2010 avait été riche et intense, nous attendions tous la rentrée du 6
septembre avec impatience.
La joie des retrouvailles à été remplacée par l’annonce du renvoi de Benoît !
Nous les parents, avions été atterrés par la violence et l’agressivité du contrôle de
la police des stupéfiants, et par l’arrestation de Benoît. Incrédules, face aux charges
retenues contre lui : rébellion et outrage, au vu des faits, et du nombre de témoins
pouvant témoigner en sa faveur !
Les amis policiers que nous consultons nous assurent que dans les interventions
quotidiennes les plus banales, ils subissent d’autres types d’outrages autrement plus
graves et qui ne donnent pourtant jamais lieu ni à PV, et encore moins à condamnation.
Les opérations » coups de filet » dans les écoles même les plus huppées rapportent
régulièrement : héroïne cocaïne, drogues de synthèse de toutes sortes. Les deux fois
trois gramme d’herbe trouvés ne les inquiète pas.
Reste alors une drôle d’impression, un scénario à la Costa Gavras, un magistrat zélé,
une machinerie qui s’emballe et qui, incontrôlable laisse les débris des dégâts
collatéraux derrière elle.
Ma fille revient de l’école lundi soir à 6h45, le visage défait : Maman, ça fait tout
drôle, on était si content de rentrer à l’école, et on dirait qu’on veut nous la fermer…
Dominique Leens
un peu d’ethnologie
Nous avons rencontré des Nomades. Ils ont croisé notre chemin.
Ils ont accueilli notre fils qui s’était quelque peu arrêté.
Ils ont décidé de faire un bout de chemin avec lui et lui réapprendre à regarder les
étoiles, à se donner une direction.
Nous les suivions de loin ne sachant pas toujours où ils allaient mais nous étions
rassuré… ils avançaient. Et nous constations plein de jeunes sur le bord de la route,
regardant cette caravane avec envie, avec espoir. Nous rencontrions beaucoup de
parents inquiets à l’idée de laisser leur progéniture entre des mains inhabituelles. Mais
cette contagion de la méfiance nous a épargné. Et lorsque notre fille a souhaité suivre
à son tour ces étranges enseignants nomades, nous savions qu’elle n’allait pas partir
dans le désert sans eau mais avec une soif d’apprendre, d’expérimenter.
Nous ne craignons pas les nomades mais bien ceux qui mettent des bâtons en travers
des pattes de leurs chameaux. Qu’ils se rendent bien compte qu’ils risquent de faire
également trébucher nos enfants.
des parents ... ceux d’Arthur et Liza Devroye
Gouvy, le 7 septembre 2010.
Madame la Ministre de l’Enseignement,
Nous sommes les parents comblés de quatre enfants dont deux réussissent déjà
brillamment leurs études universitaires.
Persuadés de l’importance de l’enseignement dans la vie citoyenne et démocratique,
nous avons recherché dès les maternelles un enseignement qui ouvrirait les enfants au
monde, encouragerait leur créativité, nourrirait l’enthousiasme naturel des plus jeunes
envers les apprentissages, leur donnerait peu à peu les clés de la vie dans notre société
démocratique afin qu’ils deviennent des adultes épanouis, cultivés, toujours curieux du
monde et d’autrui, prêts à prendre leur place dans la société.
Nous avons eu la chance de leur permettre de fréquenter des écoles se rapprochant de
cet idéal dès leur plus jeune âge et nous en félicitons au vu des résultats scolaires de
nos enfants mais aussi devant les belles personnalités qu’ils ont chacun développé.
Pourtant les parcours scolaires n’ont pas toujours été un long fleuve tranquille.
En effet, il arrive que des enseignants désignés par les Pouvoirs Organisateurs n’aient
aucune affinité avec le projet particulier de l’école, qu’une direction soit imposée sans
qu’elle adhère aux idées de pédagogie active. Nous avons pu mesurer à quel point la
réussite d’un tel projet d’école peut être hypothéquée si tous les acteurs ne se sentent
pas impliqués par la philosophie du projet scolaire en question.
A certaines périodes, nos enfants ont fréquenté des écoles « traditionnelles » pour des
raisons géographiques. Ici, pas de projet pédagogique particulier (les directions sont
d’ailleurs étonnées que les parents les interrogent à ce sujet !). Quelques « slogans »
affichés en guise par exemple d’ouverture au monde extérieur qui consisteront en une
ou deux activités annuelles extra-scolaire . Pas de projet particulier en ce qui concerne
l’apprentissage de la démocratie, peu (pas) de possibilité de progresser à son rythme,
ni pour les élèves en difficulté, ni pour ceux qui s’ennuient et voudraient avancer
plus vite. L’ambiance de la vie scolaire est ternie par l’infantilisation à outrance des
élèves jusqu’en rétho. Dans les écoles traditionnelles que nos enfants ont fréquentées,
certains professeurs se démarquaient : ils rendent leur cours attractifs, parviennent à
intéresser même les ados réputés cancres, soutiennent les jeunes en difficultés, gagnent
leur confiance,... Malheureusement, ces professeurs ne sont pas nécessairement les
plus soutenus par leurs collègues et hiérarchie!
D’autres « enseignants » voient apparemment leur mission comme une suite de notions
à imprimer « par coeur » dans les jeunes cerveaux, sans leur accorder le droit d’être
des personnes, sans voir en eux de futurs adultes responsables : ça passe ou ça casse!
Souvent, ça casse. Parfois ça passe ...en s’ennuyant. Le comble à une période de la
vie où l’être humain est le plus énergique, créatif, en quête d’apprentissage!
Avec nos enfants, nous avons vécu ces différentes expériences.
Ils ont souffert quand ils ont dû subir les humiliations s’ils avaient des difficultés,
quand ils ont vu leurs amis souffrir de ces humiliations. Ils ont été découragés
quand l’école les empêchait d’apprendre parce qu’il « fallait attendre » , ils étaient
démoralisés de subir l’ambiance scolaire dans laquelle l’élève n’est pas une personne.
Il nous a fallu régulièrement veiller à leur redonner confiance, jusqu’en fin de rétho
quand l’école leur disait « ne pensez pas aux études supérieures, vous verrez que vous
regretterez cette école l’an prochain! ».
Ils ont aimé apprendre dans les milieux qui leur ouvraient des fenêtres sur le monde,
qui leur permettaient de s’exprimer, leur apprenaient à s’exprimer, qui les respectaient
en tant que personne, leur montrant que le respect est mutuel, leur donnaient les outils
pour progresser et s’instruire et qui n’exigeaient pas seulement de restituer les matières
telles quelles, comprises ou pas. Ces expériences scolaires ont joué un rôle important
dans la capacité qu’ont acquise nos aînés à se responsabiliser, se cultiver, s’organiser
pour réussir leurs études supérieures.
Certains de nos enfants ont parfois joué de malchance dans leur parcours scolaire et
l’expérience nous a démontré qu’un enfant en difficulté n’est pas forcément aidé dans
le parcours classique qui aime étiqueter les élèves entre bons et mauvais. Un problème
de dyslexie entraîne le rejet de nombreux enseignants (heureusement pas tous!), les
moqueries sont encouragées, le moindre faux pas est souligné, les progrès sont parfois
mis en doute, la confiance en soi devient alors une gageure!
En janvier 2008, nous apprenons la probable prochaine ouverture à Limerlé, d’une
école pilote dont le projet correspondait à notre conception de l’enseignement. Proche
de notre domicile! Enthousiastes, nous avons soutenu le désir de notre fils de s’y
inscrire.
En effet, quelle belle expérience scolaire que ces deux années vécues à Pédagogie
Nomade!
Notre fils y a retrouvé le goût et le plaisir d’apprendre, il évolue dans une ambiance
agréable, sans problème d’agressivité entre élèves ni entre élèves et professeurs. Ses
progrès ont été encouragés, il a appris à devenir responsable de son apprentissage,
à se documenter de manière critique. Il ne vit pas dans un milieu scolaire refermé
sur lui-même, mais bien ouvert sur le monde. Il a pu expérimenter diverses notions
théoriques et comprendre leur utilité lors de divers projets concrets. Il est peu à peu
formé à la vie d’adulte par la pratique de la gestion de l’école et les divers aspects que
cela implique et à la vie de citoyen par la pratique de la démocratie comme base de
fonctionnement de l’école.
En juin 2010, notre plus jeune fils s’inscrit également.
Nous sommes heureux qu’il puisse, lui aussi, bénéficier d’un enseignement riche
culturellement et humainement où il pourra être acteur de son évolution et ne plus
seulement subir et s’ennuyer.
Septembre 2010 : « chouette c’est la rentrée »!
Rentrée ternie par les dernières informations concernant l’école de nos enfants. Un
professeur, Benoît Toussaint, est radié de l’équipe suite à ce fameux épisode de
descente policière et journalistique musclée dans les murs de l’école qui reste un
traumatisme pour les élèves confrontés à un aspect de la police bien éloigné de l’image
de protection de la démocratie . Rappelons que les photos prises par les élèves ont été
détruites alors que la presse a pu continuer à « opérer » impunément. Un déploiement
policier démesuré et agressif. Un professeur menotté devant ses élèves pour un
café! Moi-même, licenciée en philosophie et lettres, j’apprécie énormément les
qualités humaines et pédagogiques de cet enseignant : donner le goût de la littérature
à des jeunes parfois plutôt allergiques à l’écrit, chapeau!!!! Il serait remplacé par
une personne non cooptée par l’équipe de PN alors que ce point est une garantie du
bon fonctionnement de l’établissement. Il semblerait d’ailleurs que c’est l’autonomie
même du projet qui est mise à mal!
Aïe,!
Nous l’avons déjà vécu ; que de belles expériences ont été mises en péril lorsque des
membres de l’équipe éducative non motivés par le projet pédagogique sont désignés et
imposés à l’équipe!
Des projets pilotes sont découragés alors qu’ils sont en plein envol, des projets pilotes
dont a bien besoin notre enseignement malade ....
Des projets pilotes qui n’obligent personne à les imiter mais proposent autre chose....
Aïe!
Ce ne sont pas seulement des belles idées innovantes qui sont menacées d’extinction....
Ce sont des jeunes qui, grâce à PN, ont pris ou repris goût à l’apprentissage, qui voient
leur enthousiasme assommé, qui sait, leur avenir compromis!
Nous l’avons déjà vécu, des décisions hiérarchiques ont non seulement fait échouer
des projets pédagogiques mais ces décisions malheureuses ont aussi sacrifié des
élèves.
Les jeunes et les enseignants qui construisent Pédagogie Nomade ne comptent pas leur
énergie afin de créer une école active. Pourtant le parcours de cette jeune expérience a
déjà été semé d’embûches. Ensemble, ils les ont affrontées, surmontées.
Il faut d’ailleurs noter qu’en tant que parents, l’annonce de l’annexion de l’école à
l’athenée de Vielsalm nous avait quelque peu surpris car la philosophie pédagogique
de la nouvelle direction est très différente de celle de PN. Nous étions dubitatifs quant
à une collaboration entre les deux écoles, d’autant plus si elles devaient avoir un
rapport hiérarchique! Expérience.
Madame la Ministre, nous sommes des parents qui désirent voir leurs enfants
évoluer positivement dans une école qui leur permet, les encourage à devenir des
adultes épanouis, cultivés, responsables.
Une école qui « permet aux élèves de disposer des informations afin d’organiser
son apprentissage en toute connaissance de cause, en établissant avec lui un contrat
de travail et en engageant un dialogue pour amorcer la conduite du jeune vers
l’autonomie »
Une école qui, « au lieu de se résigner à l’échec de certains élèves, met en oeuvre les
moyens d’aider chacun. »
Une école qui sachant « que tout être humain éprouve le besoin de se sentir accepté,
intégré, valorisé et autonome, établit avec les élèves des contacts harmonieux, adopte
à leur égard des attitudes et des comportements positifs qui tiennent compte des
différences de sensibilité, d’intérêt et de niveau socio-économique ou socioculturel.
Ses comportements reflètent une attitude positive, la confiance dans les possibilités de
chacun pour atteindre, s’il y est adéquatement aidé, les objectifs visés. »
Une école qui veille à « responsabiliser les élèves dans la vie quotidienne, en fait les
acteurs de leurs propres progrès ce dont l’intérêt pédagogique est bien démontré. »1
Nous avons trouvé à Pédagogie Nomade, enfin, une école qui a intégré ces
prescriptions officielles de la Communauté Française!
Madame la Ministre, nous sommes des citoyens attentifs aux actions concrètes
des responsables politiques qui, soucieux de faire évoluer l’enseignement en crise,
sachant qu’il est un pilier de notre société démocratique, favorisent l’éclosion de
projets pilotes et leur donnent les moyens humains et matériels de se construire.
Il est important que des initiatives soient créées et soutenues pour offrir un lieu
d’apprentissage positif à des jeunes en souffrance avec l’école traditionnelle.
Madame la Ministre, nous vous encourageons à prendre les décisions qui
permettront à l’équipe de Pédagogie Nomade de persévérer dans leur projet sans
devoir subir régulièrement des tentatives de sabotage comme ce fut déjà trop le cas
lors de ces deux premières années.
(Footnotes)
1
Extraits de « Projets pédagogique et éducatif de l’enseignement organisé par la
Communauté Française » www.enseignement.be
M & Mme Vandersmissen
Métamorphose d’un Simon...
Avant:
Les quatre premières années du secondaire, cet ado à l’esprit rapide, sans difficulté
dans les matières scolaires, a fréquenté l’école à contrecœur, arrivant en retard,
bavardant là où il fallait se taire, exprimant un ennui et un désintérêt grandissants.
Les retenues se sont accumulées. Interpellés, les professeurs, titulaire, proviseur
n’expriment qu’une demande à Simon: ne pas déranger. C’est un peu court pour lui...
Nous le sentons désespéré, à deux doigts du décrochage.
Et puis le projet Pédagogie Nomade a débarqué dans nos vies.
Le 31 août 2008, c’est un garçon timide, taiseux, malheureux que nous confions à ces
inconnus.
Après:
Septembre 2010: un jeune adulte, la peau tannée par le grand air, le soleil et le gel, les
mains rendues calleuses par les chantiers et le potager. Musclé, souriant. Confiant en
lui et en l’avenir, des projets plein la tête.
En vrac, des ingrédients:
Tout de suite, le sentiment d’être écouté, reconnu, respecté
Une mise à contribution de ses compétences
Des professeurs qui ne comptent pas leur temps, leur énergie
Des ateliers philo
Un site internet sur les relativités
Des affiches sur le mécanisme de la bombe nucléaire
Une brochure sur les éoliennes
De l’errance cognitive
La peinture du gîte des prés
Ainsi parlait Zarathoustra
Les brassins de l’Oxymore
Un miroir: «Et toi, que fais-tu de ta liberté?»
Un jeu de cartes sur la crise économique
Un hussard sur le toit
Beaucoup de patience
Des toilettes sèches
Des balades dans la neige
Une phrase comme un leitmotiv: «on apprend aussi de ses erreurs»
Quelques textes qui parlent de lui
Des pages de maths
Des conseils de progrès
Une vache qui ne se laisse pas traire
Des chèvres qui donnent du fromage
Des rencontres d’intelligences
Des matches de foot
Un marathon de français
Des épinards qui poussent devant la maison
Des cours en bonnets, écharpes et gants
Une animation flash sur le cycle de l’azote
Des remises en question
Une biche qui traverse la route, la nuit
Un prof de langues qui devient élève au cours de français
Un chef d’œuvre sur l’armée
Un film d’animation en plasticine, sur Galilée
Une guitare pour le cabaret Brassens
Une jeune femme qui en a bavé, fière d’obtenir son CESS
Une basse pour notre besoin de consolation
Danemark, Italie, Slovénie, des rencontres en anglais
A la Croix du Chaîneux, un ciel étoilé
Des petits tests appelés testicules
Des photos de demandeurs d’asile
Des chantiers de construction d’école
Un jeune agité qui se calme et découvre qu’il apprécie la lecture
Des soirées slam parents admis
Une caravane immobile
Une république nomade qui fait sécession
Des élèves qui mûrissent plus vite que des fruits
Une cabane dans le potager
Des réflexions sur la démocratie
Des préparations de repas
Des maladies d’enfance
Des créations sonores
Les échecs et le go
La gestion d’un logement en colocation
Des réunions officielles
Des moments institutionnels forts et interpellants
Difficilement parfois, la confrontation d’une utopie à la réalité...
Manu Berquin
Ecrire un texte... pas évident, j’ai tant parlé du projet tout azimut que j’ai tout le temps
l’impression de me répéter. C’est pourtant manifestement utile, voire indispensable
face à ce qui semble être un mur d’incompréhension plus ou moins de bonne foi.
Et alors, je retombe sur une petite interview dans une publication de l’AGERS,
l’Administration générale de l’Enseignement et de la Recherche Scientifique, soit celle
qui est responsable du projet et de son devenir, celle aussi qui lui a donné les moyens
de voir le jour.
C’est une rencontre avec Benoît Toussaint, je cite : « cheville-ouvrière de l’école
alternative de Limerlé qu’il a co-fondée »... « Question : Quelle place l’éducation à la
citoyenneté occupe-t-elle dans votre école ? Benoît Toussaint : Il n’y a pas de cours sur
la démocratie. On la vit. C’est la seule façon d’apprendre. On n’apprend pas à marcher
avec un cours sur la marche!... La démocratie est au coeur de l’école.
Question : Quels sont les principes sur lesquels repose votre projet? Benoit Toussaint :
Nous avons trois principes fondamentaux : relation non autoritaire; égalité prof/élève;
cogestion. Ici il n’y a pas de violence. « la violence c’est de la parole non aboutie»
disait Lacan. C’est le point de départ de notre projet. Tout passe par la parole. »...
Question : Vous innovez de manière radicale!
Benoit Toussaint : L’école est malade. Il faut entrer dans les fondements pour accueillir
l’innovation pédagogique, sinon, on ne fait que greffer des organes sains sur un corps
malade. On travaille le corps. Ça fait peur! Il faut accepter de descendre de l’estrade. »
Aujourd’hui, on s’aperçoit qu’effectivement ce projet en effraie certains au point de se
sentir menacés par son existence.
Ce projet qui a remis nos enfants debout, ce projet qui a su nous séduire, nous parents,
malgré nos craintes. Ce tout petit bout d’utopie réelle (oxymore bien plaisant) que les
conformismes veulent réduire en poussière.
J’ai peur qu’une fois de plus, la loi de la pesanteur écrase tout. Et pourtant, les nuages
volent dans le ciel!
Pierre MOUREAUX <[email protected]>
Parent d’élève
Ceux sur qui on peut compter!
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Enseignante retraitée, j’ai suivi avec intérêt l’expérience de « pédagogie nomade ».
De manière plus restreinte, j’avais aussi pratiqué (au début du rénové) une
pédagogie où les élèves étaient de vrais acteurs de leur formation. J’avais espéré le
développement d’un style d’enseignement dans cet esprit mais les conditions ont
rapidement changé et l’enseignement est redevenu autoritaire et dogmatique. Je n’ai pu
continuer que très partiellement et avec quelques collègues motivés continuer à garder
un peu de l’esprit qui m’animait au début de ma carrière
Je me réjouissais donc de la création de votre école et je pensais qu’en la considérant
comme une expérience constructive et améliorable, le Ministère de l’Enseignement
pouvait s’en servir pour créer des changements indispensables puisqu’on parle sans
cesse de la démotivation des enseignants, de l’absentéisme des élèves, des mauvais
résultats de l’enseignement en communauté française etc…
Ce serait vraiment dommage de perdre votre école autant pour les élèves qui peuvent
ainsi reprendre goût à l’étude que sur le plan d’une recherche créative dont pourrait
profiter le système dans son ensemble.
Ces quelques lignes, donc, pour vous encourager et espérer que les décisions
annoncées ne sont pas irrévocables.
Anne-Françoise Languillier
ancien professeur de chimie
Chante pinson… l’histoire que ma grand mère me racontait avant de dormir…
l’histoire préférée de ma petite enfance… une variation sur le thème de la cigale et de
la fourmi (je ne l’ai compris que plus tard)… mais une variation de taille…
Ecureuil engrange des provisions pour l’hiver, il refuse tout divertissement, toute
pause dans ses activités de préparation frénétiques, toute invitation de son ami Pinson.
Pinson chante et s’en retourne seul vers les amis de la forêt à qui il apprend à chanter.
L’hiver venu, Pinson a froid mais Ecureuil lui refuse l’accès à sa maison sous prétexte
qu’il n’avait qu’à travailler… « mais j’ai travaillé » pense Pinson, « j’ai appris à
chanter aux autres, je les ai soutenus dans leurs efforts »… seul dans sa maison avec
ses conserves de champignons et ses noisettes séchées, Ecureuil déprime tant qu’il
tombe malade. Le docteur lui conseille de voir du monde et il envoie chercher Pinson
qui, transi de froid, ne peut plus voler. Les oiseaux de la forêt le transporte chez
Ecureuil : rien qu’à sa vue est déjà guéri. Il partage ses provisions, prend soin de lui
et passe tout l’hiver avec son ami. Au printemps, tous attendent avec impatience que
Pinson se remette à chanter.
Depuis quelques mois, je n’ai souvent que ces mots en tête : « la revanche des
fourmis »…
On vit ça, cerné de tous côtés. L’hécatombe des abeilles.
Quand le prozac ne suffit plus à égayer leur quotidien, les fourmis se réveillent soudain
dans un édredon de frustrations : à force d’engranger pour « l’avenir », elles sont
passées à côté de la joie… c’est tellement plus facile alors de critiquer les cigales
plutôt que de reconnaître la saveur et la force de leur chant/choix, tellement plus facile
de s’attaquer au vivant plutôt que de tuer le mort en soi ! Tellement plus facile de se
coucher sur un divan plutôt que de construire sa maison avec le vent. Un lieu ouvert où
tout s’engouffre parfois de travers mais où jamais le souffle ne manque, où l’énergie se
renouvelle en permanence.
Pédagogie nomade, pour moi, c’est ça, avant tout : un souffle.
La possibilité du vent au bout des doigts, un défi à la pesanteur dans tous les sens du
terme.
Un lieu. Un temps. Une manière de penser le monde, jusqu’au fond de nos
contradictions aussi. Ce que l’autonomie engendre forcément comme pouvoir, ce
que la liberté porte en elle de despotique, la capacité de se remettre en question pour
avancer, chercher ensemble, encore, la parole critique, la parole juste, la place laissée
au silence, la quête ouverte d’un autrement, l’apprendre possible par la confiance, la
mise à l’épreuve du rêve/risque, la pensée en mouvement – évidemment. Marcher avec
/ l’étymologie même.
Chante pinson ! Chante encore !!!
Anne Penders
Pédagogie Nomade, c’est pour moi le signe que l’espoir d’une « Ecole Nouvelle»
est toujours vivant, la preuve que l’on peut encore rêver grand en ces temps où
«être raisonnable» signifie «penser petit», un immense effort pour (se) poser dans
le bon ordre les questions d’éducation: d’abord le «quoi» et le «pour quoi», avant le
«comment» et le «combien».
Bernade"e Mouvet
Un vendredi soir fin décembre 2009, une épaisse couche de neige recouvre la région.
J’arrive à Limerlé vers 18 h30. C’est le dernier jour du 1er trimestre et je suis invitée
à un «conseil de progrès» à l’école «pédagogie Nomade».
Je participe à celui de 5ème, la salle de classe est comble, élèves, parents, profs et
moi…
(élément extérieur travaillant dans l’aide à la jeunesse.)
Quatre élèves animent la réunion ; le but est de s’exprimer sur ce qui «a été «et ce
qui «n’a pas été» pendant la période et de trouver des moyens pour remédier aux
difficultés.
Les jeunes ont préparé et livrent leur bilan, la discussion s’élargit, les parents font part
de leurs propres expériences, de leurs avis, de leurs critiques, de leurs solutions…, les
profs donnent leur point de vue.
Les élèves tentent alors d’élaborer des solutions dans lesquelles ils s’engagent
personnellement.
Ex. un des points abordé avec passion était le peu de participation au cours de
gym. On analyse le pourquoi, on justifie, on critique, les parents parlent «de leur
temps»… donnent des solutions……, cela polémique…… et puis se dégage un
consensus ; certains iront en réveiller d’autres…
La séance se termine sur des résolutions.
Je suis frappée par le sens de la responsabilité que ce genre de pédagogie génère. Si
ces jeunes font des choses c’est parce qu’ils le décident eux-mêmes. Les adultes
conseillent, expliquent mais n’obligent pas, la décision appartient à l’élève. D’autre
part ce système semble aussi générer une conscience de groupe collective et une
solidarité entre eux (comment va-t-on faire pour l’aider ?)
Lors du buffet qui suit je rencontre, entre autres, un prof de la région qui vient par
sympathie pour le projet, des parents qui m’expliquent comment leur enfant est arrivé
là et les problèmes qu’il avait dans un Athénée traditionnel.
Je suis étonnée de voir qu’une partie des élèves est originaire de la région ou du Grand
Duché tout proche, moi qui croyais qu’il s’agissait exclusivement de citadins.
Vers 22 h, sur une scène montée au centre de la pièce, on nous propose une soirée
poésie. Il s’agit de textes, de poèmes… récités et mis en scène par des élèves. Un père
me dit surpris et heureux de voir sa fille qu’il qualifie «d’inhibée» se produire devant
nous, «elle a vraiment repris confiance en elle» me dit il.
Pour ma part, je suis très étonnée de voir ces adolescents rester à l’école le dernier jour
du trimestre jusqu’aux petites heures… pour proposer un spectacle littéraire………
Claudine Bodart
A l’affut du silence / le sens.
Par dessus — le vent.
Insensé donneur de leçons.
[de quoi fuit-on la question ?]
Mon corps au bord du sentier
n’a plus d’orage.
Juste le souvenir de.
Ce qu’on garde.
[comment ne pas perdre la mer ?]
J’ai les mots
transis — le désir en eux / s’exile.
Quand le sommeil conquiert la résistance du bouclier — rien n’échappe aux oracles.
Brouillard d’ouest.
L’envers embué.
Marcher à l’encontre.
[allant contre / forcément pour]
Je ne trahirai pas le chemin qui mène vers.
Multiplier les écarts, les rencontres, les remparts.
Pour que du monde hors
Rien n’essouffle l’entre.
Antre / deux.
Sur les fils tissés du tapis, pieds déchaussés.
Sous les fils tissés, la trame solide — des joies en devenir.
[le plaisir du conflit / un jeu où tu épuises — la force des fourmis]
Je te regarde courir sur le muret — le soleil calcule ses ombrages.
Je te regarde
construire l’imaginaire au quotidien.
Le temps avance avec le reste.
On ira jusqu’où. Oui.
Aux confins du vent — le silence.
L’envers de ce qui nuit.
Les étoiles, les champignons, la révolte des chardons.
[de quoi aura-t-on le courage ?]
L’en-vert.
C’est de cela qu’il s’agit.
La couleur de l’en-vie.
L’en-vers.
La puissance des brumes, ce qui s’y cache — la lumière d’après
[entre autres]
Le purin d’orties — n’est pas qu’un engrais.
9, 10, 12 juin 2010. Villeneuve. Cévennes
Anne Penders, extraits de « l’envers » (inédit)
Les acteurs concernés par l’enseignement supérieur aboutissent souvent à des réussites
enthousiasmantes.
Ainsi par exemple, quel bonheur de voir les yeux pétillants de vivacité d’une jeune
fille ou d’un jeune homme lors de sa défense de mémoire lorsqu’il ou elle récolte
les fruits d’une formation de près de 2O années : découvertes, travail, plaisir de la
réussite, etc.
Souvent ce jeune est enfant d’une lignée qui réussit : ses parents, ses frères et soeurs,
ses ami-es, etc. Quel bonheur.
Parfois ce jeune est le premier dans sa famille à décrocher un diplôme «supérieur». Du
bonheur et beaucoup d’émotion...
Mais en tant qu’enseignant dans une haute école, je suis témoin et souvent participant
(au sens systémique du terme) de l’ennui, du décrochage et de l’échec... Il arrive que
des projets de vie soient abîmés par l’échec scolaire ou académique.
Pas besoin d’être un spécialiste de l’évaluation pédagogique pour constater que notre
système d’enseignement ne réussit pas chez tous nos jeunes. Très loin de là ...
Les conséquences d’un échec de fond dans la formation scolaire dans un monde
comme le nôtre peuvent être (et sont) dramatiques.
D’où mon soulagement et mon admiration d’être témoin de la recherche de solutions
aux parcours d’échec, comme celle menée par la Pédagogie Nomade. Chercher et
trouver des chemins de réparation scolaire chez certains adolescents est digne d’appui,
de subsidiation, d’encouragement ...
Comme l’est le système de santé et de santé mentale qui répare, recoud, soigne, guérit
...
A nous les citoyens et aux autorités publiques de soutenir cette initiative de “santé
publique”
Didier Somzé
enseignant dans une Haute Ecole
Madame Marie-Dominique Simonet
Ministre de l‘enseignement obligatoire
Place Surlet de Chokier, 15-17
B-1000 Bruxelles
Belgium
RE: Pédagogie Nomade
8 September 2010
Dear Madame Simonet,
It has come to my notice that the internationally known Belgian democratic school
Pédagogie Nomade is under pressure owing to difficulties arising from its co-
administration with a normal state school and its problems in conforming with the
normal operational requirements for Belgian schools, in particular its small size of 60
students.
I have been the headteacher of a secondary school in England and a school inspector.
Since retirement I have acted as a researcher/adviser to the UK government,
UK NGOs, and the Council of Europe in the field of Education for Democratic
Citizenship.
As a teacher and headteacher I always tried to involve students in decision making
about their own learning and in the general running of the school. I found that
taking responsibility in these ways developed a growing maturity and commitment
to themselves and to others. We attempted to use the school as a microcosm of a
democratic society in which the students could learn how to participate effectively. I
was convinced that this approach enhanced learning and the quality of relationships
between people of all ages within the school. The enhancement of learning was
measurable in improved examination results and the improved quality of relationships
was measurable in the decline in the numbers of students needing to be reprimanded
for aggressive behaviour to others.
In 2001 I was asked by the then English minister of education as part of the planning
for the introduction of Education for Democratic Citizenship into the English
secondary curriculum to carry out research to see if this pattern was replicated in other
schools. This was indeed what I found and the results were published as the ‘Hannam
Report’, which is available online at www.csv.org.uk . It was also what I found in my
inspections of some 80 secondary schools in England.
While working as an inspector and researcher it came to my attention that there were
schools known as ‘democratic schools’ in a number of countries. As part of my work I
was able to visit some of these schools and found their work to be an extension of that
which I had been attempting in an English state school. I was especially impressed by
my visit to Hadera School in Israel, where the headteacher was a Mr Yaacov Hecht.
This state school of 350 children from 6 to 19 years of age school offered a curriculum
in three forms. A regular subject based timetable, subject specialist areas staffed by a
specialist teacher to which students go whenever they choose, and courses provided at
the specific request of groups of students. The students could construct their study day
out of any combination of these learning opportunities that suited them. Some chose
a regular timetable as in any conventional school. Others chose a mix of methods.
Others chose to totally self-direct their learning. All had the opportunity to learn
experientially about the workings of a democratic community through attendance
at the regular meetings of the school parliament and its associated governance and
judicial processes. It is now well known that different students learn in different
ways and that what is best for any individual can change over time. This knowledge
was perfectly operationalised at Hadera School, and the results in both personal
development and examinations were impressive. I am delighted that Mr Hecht is
now working for the government of Israel in developing much wider programmes of
democratic education in the school systems of whole cities.
At one point my work as an inspector led me to advise a well-known democratic
school in England known as Summerhill School. The school was causing some
anxiety to the ministry as it allowed attendance at lessons to be at the free choice
of the students. I found in fact that most students were attending classes from free
choice despite many Summerhill students having had very bad previous experiences
of ‘schooling’ in regular schools. Significantly in connection with the problems
of Pedadogie Nomade over the question of size Summerhill at this time also had
approximately 60 students as did the other well-known UK democratic school Sands
School in Devon. When I conducted an inspection of Summerhill school with a
team of eminent academics from education and business backgrounds together with
headteachers from two other prestigious independent schools we found that not only
was the school providing an excellent education in democratic citizenship but that the
attainment of its students in national examinations was better than the average for state
secondary schools. As a result of the evidence of our inspection being accepted by the
Court hearing the state case for closure, the school was allowed to continue and is now,
ten years later, thriving and growing in size. (The Summerhill School inspection report
is available online from the school website.)
All over the world there are criticisms of school systems as they currently exist. This
is true even in countries such as Finland, where the existing system appears to be
performing comparatively well. In my judgement all school systems should contain a
wide variety of approaches to learning in a wide variety of schools. Certainly for some
students the approach of the democratic schools appears to be highly effective. In the
UK and Norway for example the work of a very few small democratic schools has
had a disproportionate influence on developments in the state school systems of those
countries. It is interesting that experimentation with more democratic approaches is
in fact happening in Finland, which appears from international comparative research
to have the most successful school system in Europe. I would urge you to both permit
and support the work of Pédagogie Nomade.
I would be delighted to discuss further with you by telephone, e-mail or in person any
issues arising from this letter.
Yours sincerely,
Derry Hannam
Consultant/Researcher in Education for Democratic Citizenship to UK Government
and Council of Europe (Retired Acting Headteacher and School Inspector)
La pédagogie nomade, c’est une bouffée d’oxygène, un peu d’espoir face au monde de
l’enseignement traditionnel peu enclin à la remise en question.
Cette expérience inquiète et pourtant elle devrait nous réjouir. Certes, pratiquer la
démocratie est difficile, laisser une place au jeune en tant que citoyen à part entière
bouscule les repères, force le questionnement, mais quelle expérience humaine !
J’ai envie de faire confiance à ceux qui s’engagent dans ce défi audacieux. Je les
remercie pour leur courage et j’espère que lorsque mes enfants auront l’âge de faire un
choix, ils auront l’opportunité de tenter cette aventure s’ils le souhaitent.
Je rêve d’une école ouverte sur le monde, qui soit un lieu de rencontres, un lieu où l’on
réfléchit, où l’on crée, où l’on vit... Et la pédagogie nomade tend à se rapprocher de
mon rêve.
E.D.
Mardi 7.09.2010
Chère Pédagogie Nomade,
Je suis un ami des tentatives car celui qui ne tente rien ne réussira jamais rien, il suivra,
il copiera, il imitera, il sera triste et nerveux. Il obéira… et après, pour se défendre, il
dira qu’il n’a fait qu’obéir aux ordres…
PN, c’est une expérience, incomplète, imparfaite, trop ceci, pas assez cela… mais c’est
une rare expérience qui procure à ceux qui la tentent un enrichissement qui dépasse
l’acquisition d’une somme d’informations (fussent-elles scolaires).
Je suis un ami d’Arthur Devroye et j’ai vu, vécu sa transformation sur deux ans,
l’épaisseur de vie qui s’est sédimentée en lui et qui lui permet… de continuer à vivre, à
grandir.
A PN, me semble-t-il, on s’essaie d’abord à être. Apprendre sera alors une joie, un
plus, car affinité avec soi-même. La dimension collective de ce projet me semble aussi
fondamentale dans notre société trop tournée vers l’égo, l’individualisme, le héros, le
« chacun pour moi » !
Je suis heureux de savoir qu’une telle école de vie existe. Je suppose que ceux qui y
vivent, en sont fiers.
Jacques Esnault.
Pédagogie Nomade a été conçu et accepté comme une expérience pilote, qui
pouvait certes s’enrichir des conseils de l’extérieur, mais pas être détournée
de ses fondements et objectifs. Il n’est pas acceptable que, en si peu d’années, autant
de croc-en-jambes lui soient faits... Le but est-il de pouvoir publier ensuite des analy
ses négatives, et faire rentrer tout le monde dans le consensus qu’il n’y a qu’une seule
manière d’apprendre, dans une seule structure institutionnelle?
Si les écoles traditionnelles sont faites pour le plus grand nombre, cela implique
qu’un petit nombre résiduel soit fait pour une autre forme d’école, et que, au
nom de l’égalité des chances, on ne peut leur refuser la forme d’apprentissage qui leur
convient.
Bon vent à Pédagogie Nomade,
Jeanne BOLLEN
Jeanne Bollen
enseignante,
psycho-pédagogue
Paris, le 07 septembre 2010
Nous, membres du Lycée Autogéré de Paris, voulons faire part de notre surprise et
de notre indignation face aux derniers événements qui touchent pédagogie Nomade.
Depuis 30 ans, l’équipe du Lycée Autogéré de Paris s’est constituée sur la base de la
cooptation, seule garante de l’adhésion de chacun au projet pédagogique. Ce principe
est totalement dérogatoire en France mais a permis aux expériences Savary (du nom
du ministre de l’Éducation Nationale qui a accompagné la création de quatre lycées,
en 1982, à Paris, Saint Nazaire, Oléron et Hérouvile Saint Clair) d’exister et de
maintenir le projet pédagogique d’origine. Ce principe est d’ailleurs réaffirmé dans la
dernière convention entre le Lycée Autogéré de Paris et le Rectorat de Paris.
De même, l’autonomie totale de l’équipe, tant dans la gestion des moyens financiers
que du point de vue pédagogique, face aux autorités de tutelle est l’une des
conditions indispensables à la construction et au maintien d’un tel projet.
Nous connaissons Pédagogie Nomade, et l’un de ses animateurs, Benoît Toussaint,
depuis plusieurs années, et depuis l’ouverture de Pédagogie Nomade, nous
échangeons régulièrement autour de nos pratiques.
Les principes et le fonctionnement de PN, dans lesquels nous retrouvons les valeurs
que nous défendons, devraient être un sujet de satisfaction et de fierté pour le
système éducatif belge, et interroger, en tant qu’expérience, sur les pratiques et sur
la relation pédagogique instaurée.
Il nous paraît injuste de programmer la disparition de cette structure qui permet
à un certain nombre d’élèves de retrouver le goût de l’apprentissage et de partager
cette expérience collective.
Nous demandons :
- La réintégration de Benoît Toussaint au sein de l’équipe
-
Le maintien du statut dérogatoire permettant l’autonomie pédagogique, la
cooptation de l’équipe, …
Les membres du Lycée Autogéré de Paris, élèves et enseignants
Porter atteinte à Pédagogie Nomade
c’est porter atteinte à des enseignants qui cherchent à concrétiser une réflexion autour
d’un code pédagogique que nous connaissons bien,
c’est entraver l’esprit collectif qui s’en dégage,
c’est fermer la porte aux innovations pédagogiques et à un apprentissage alternatif,
c’est briser l’élan d’élèves qui ont retrouvé le goût d’apprendre,
c’est étouffer un mode de pensée qui dérange,
c’est clôturer les esprits de peur qu’ils ne s’évadent vers des idéaux,
c’est empêcher de faire de la différence une richesse.
Je me suis déplacée à Limerlé avec des élèves trois fois en deux ans, pour assister
à l’inauguration, pour favoriser des échanges et des rencontres pédagogiques,
pour apporter mon soutien lors du procès de Benoît Toussain l’an dernier. J’ai été
époustouflée par les activités mises en place, par la liberté pédagogique et par la
cohésion d’une équipe soudée qui s’est choisie pour redonner ensemble du sens à
l’école. C’est grâce à cette cohésion et à ces réflexions que les élèves apprennent les
valeurs humaines fondamentales dans notre société malheureusement de plus en plus
conformiste et individualiste.
Perrine GAMBART;
Enseignante au Lycée
Autogéré de Paris
En ce moment, il ne fait pas bon être nomade en Europe. Que ce soient les Rroms de ce côté de la frontière, ou les pédagogues de l’autre côté, la chasse est ouverte. Chasse à ceux qui ne veulent pas penser dans le droit chemin ; le nomade, qui propose d’autres codes et une autre vision de la société, dérange.
Pédagogie nomade, nous l’avons rencontré au cours des prémisses, des discussions
passionnées sur la pédagogie, sur l’utopie créatrice qui a accouché d’une structure
unique, sans doute, en Belgique. Mais pas unique dans l’histoire de la pédagogie. Fautil rappeler l’apport essentiel et inestimable, quoique souvent encore trop méconnu, de
Célestin Freinet, en son temps villipendé par l’Administration, qui a posé, et appliqué,
les fondements d’une pédagogie novatrice où le but ultime est l’émancipation
de l’individu. Faut-il parler des expériences, ici ou là, en Europe, où la liberté et
l’expérimentation font table rase d’une scolastique ennuyeuse. De par ma posture
d’enseignant au lycée Autogéré de Paris, je me sens en osmose avec nos camarades
belges qui se sont lancés dans cette aventure passionnante qu’est travailler autrement
avec des jeunes, dans un rapport de confiance et d’égalité. Et par mes fréquentes
visites, où j’ai pu goûter tous les plaisirs du nomadisme, je me dis que PN doit vivre,
librement.
Si nous avions expulsé tous les Rroms, Gitans, Manouches, qu’en serait-il de
Django Reinhardt, dont chacun se plaît à célébrer le talent. Mais lui aussi, c’était un
dissident, qui a brisé les codes de lecture de la musique pour accoucher de ces rythmes
universellement connus. En chaque nomade, sommeille aussi cette possibilité de créer,
ne les expulsons pas, il y a tant à prendre et à donner. Étrangler cette encore jeune
expérience, sans lui laisser le temps de s’épanouir pleinement (et déjà que de fruits ont
été portés), c’est prendre la responsabilité d’étouffer la création, la soif de liberté, la
richesse de cette construction collective.
Jean-Luc Roubier
Professeur au Lycée
Autogéré de Paris
Bonjour PN.
Étant élève au Lycée Autogéré de Paris, j’ai appris par une de mes profs, Perrine,
les ennuis que vous aviez et qui pourraient donner suite à la fermeture de votre
établissement.
Je vous envoie ce mail pour porter mon soutien et pour vous faire part de mes
sentiments.
J’accorde une importance primordiale à l’éducation mais les systèmes de nos deux
pays respectifs sont loin de répondre aux besoins et à l’épanouissement de l’élève.
L’école alternative donne et redonne l’envie d’apprendre, de se cultiver et de vivre
avec l’autre sur un pied d’égalité. Il existe trop peu d’écoles comme les nôtres et
c’est pour cela que l’État devrait nous aider à les conserver. Elles donnent une place
importante à l’élève comme au professeur. Le fait d’être dans une école autogérée nous
pousse à prendre les décisions ensemble dans ce lieu de vie et d’éducation où chacun
de nous a fait le choix de participer. C’est pour notre bon fonctionnement qu’on doit
nous laisser la liberté d’appliquer nos principes : la cooptation des profs en fait partie.
Je vous transmets mon plus grand soutien et mes amitiés, à vous, Nomadiens.
Hélène
Suite à un séjour passé au sein de Pédagogie Nomade j’ai pu observer son
fonctionnement, ce qui fut une agréable surprise.
PN est une école expérimentale mais aussi une école libératrice qui redonne le goût
d’apprendre. Sa particularité permet l’apprentissage du travail collectif. C’est dans
ce cadre que de nombreux élèves prennent plaisir à travailler. L’équipe pédagogique
à l’écoute crée une dynamique et participe à l’épanouissement des élèves. C’est
pourquoi lui porter atteinte c’est remettre en cause la liberté de l’éducation et détruire
l’espoir de certain d’avoir une approche avec la scolarité. Dans ce cas devons-nous
comprendre que « l’éducation pour tous » n’est pas une priorité...?
Lola
Bonjour PN,
Le fonctionnement de nos établissements a un impact sur le système pédagogique et il
a droit a une place.
Les problèmes survenus ne me laissent pas indifférent, ils nous concernent nous aussi.
C’est pour cette raison que je fais acte de présence en vous envoyant ce message de
soutien.
L’élève dans ce système pédagogique s’épanouit et a plus de liberté. Celle-ci est
consolidée par des règles morales.
Le cadre que nous avons grâce à ce sytème enveloppe et rassure chaque individu et le
dirige solidement dans ce qu’il veut faire.
Et bafouer les valeurs de ces établissements c’est oublier les élèves et leur liberté.
.
Maxime Fissier
Amis de Pédagogie Nomade,
Je suis élève au lycée Autogéré de Paris depuis maintenant 3 ans.
J’ai découvert PN l’année dernière suite à la descente des forces de l’ordre ayant eu
lieu au sein de cette structure.
J’ai défendu et je défendrais encore Pédagogie Nomade !
Pour moi un établissement comme celui-la est capital et ne doit pas être déstructurée.
Cet événement me révolte et nous nous devons tous de défendre Pédagogie Nomade.
Avec mon soutien et ma sympathie
Lohengrin-Aloys MARLE OUVRARD
Amis Nomades,
J’ai eu la chance de découvrir Pédagogie Nomade en Mai dernier, suite à l’atelier
Correspondance monté au Lycée Autogéré de Paris. J’ai passé parmi vous une semaine
excellente, pleine d’échanges et de découvertes, notamment sur nos expériences
respectives des lycées alternatifs.
J’ai eu vent de ce qui vous arrive, et, même si je ne comprends pas tout au système
éducatif Belge, j’espère grandement que vous trouverez une solution pour continuer
d’exister tout en gardant vos principes et votre autonomie, vous le méritez. Un lycée
alternatif qui meurt et c’est la liberté et l’amour de l’enseignement qu’on assassine (au
moins!!). Je vous apporte donc tout mon soutien (moral, à défaut de mieux...) dans
cette affaire et vous souhaite une longue vie et une bonne continuation !
Bises à tout les habitants de PN.
Thibault K. Élève au Lycée Autogéré de Paris.
7th September 2010
To whom it may concern,
I am writing this letter in support of the school Pédagogie Nomade.
I am a teacher at Sands school in England. Sands is a successful democratic school in
South Devon founded 25 years ago. It has many similarities with Pédagogie Nomade
and was rated outstanding by a recent government inspection.
Last autumn I attended, with some of our students, a conference of democratic schools
in Copenhagen. There I met staff and students from Pédagogie Nomade. All were
such committed and interesting young people that we invited them to visit our school
earlier this year. I can only say that we all found them to be a very good group. It was
obvious that the students were thoughtfully involved in their own education. They
were interested in our school, joined in with all aspects of Sands school whilst they
were here. They were wonderful guests, helpful, cooked for us and were good house
guests for those of us who offered hospitality. I find it incredible that a school with
such committed staff and good students could be the so misunderstood. There is no
one way to educate young people. Whilst many go through the conventional system
without difficulty and lead successful lives it must be obvious to all that it does not suit
everybody. Here at Sands we take many students who have found regular schooling
difficult. Almost without exception they grow to love the school which recognises
them as individuals, embraces them and gives them responsibility, encourages them
to make choices and helps them find their way. They leave us confident and versatile
and lead successful lives. I would urge the authorities concerned to listen carefully
to the staff and students at Pédagogie Nomade. They will have, I believe, something
important to offer. Another way. A different way. Surely here in Democratic Europe
we can embrace such an experiment. I came to Sands school 18 years ago and
found it difficult and challenging in the first months, but I have come to believe in
it completely, have seen it grow and seen many students gain enormously from this
radically different system. I hope Pédagogie Nomade will be given the chance to
similarly prove itself.
Respectfully,
Stephen Hoare
Sands School
Ashburton
Devon. UK.
j’ai rêvé
Il y a 50 ans, j’ai enseigné en primaire, suivant la méthode Freinet.
Quel bonheur ( et quel travail…) que d’être à l’écoute des enfants et de marcher avec
eux sur les chemins du savoir !
Mes enfants ont (en partie) suivi la même méthode en primaire.
Quand il a fallu choisir une école secondaire, Freinet avait quasi disparu…sinon à
Decroly.
Lorsque j’ai appris la naissance du projet de PN , mon intérêt s’est réveillé et j’ai été
très curieuse de suivre ce qui s’y faisait, d’autant plus qu’un de mes petits-fils y avait
adhéré, lui qui a de grandes facilités mais qui se sentait si mal dans l’enseignement
traditionnel…
En 2 ans, j’ai vu des jeunes, qui avaient laissé tomber les études ou qui étaient sur le
point de le faire, retrouver le goût d’apprendre, de chercher à savoir, d’aller plus loin
que le cours.
Quel bonheur ! N’est-ce pas ça le but d’être enseignant, que de donner le goût d’apprendre
( tout est bon à prendre, en cette matière !) par quelque méthode que ce soit, pourvu que
l’intérêt y soit ?
J’ai lu les publications de PN en vacances. J’étais en montagne, avec le cours de français
entre les mains.
A ceux qui ne comprennent pas, qui critiquent, qui sont peut-être mal informés, qui se
fient aux rumeurs, qui ont peur de cet inconnu, je ne puis que suggérer de parcourir ce
petit fascicule de 70 pages qui se lit comme un roman. On le parcourt d’abord et puis,
on est happé par cette approche du savoir parfois bien ardu qu’est l’apprentissage de
notre langue maternelle.
J’aimerais savoir s’il y a beaucoup de profs de français dans nos écoles, qui ont autant
de plaisir à être des « passeurs de savoir et de savoir-faire » ?
Apprendre à lire, à parler, à écouter, à écrire et à penser…quel beau programme ! Quel
défi aussi …et quelle satisfaction d’y être arrivé avec la plupart des élèves , en leur
faisant confiance.
Et je repense à 4 de mes petits-enfants qui n’ont pas trouvé de place à Decroly et chez
qui, d’année en année, lentement mais sûrement, je vois le goût d’apprendre s’étioler.
Ils appréhendent la rentrée, partent à l’école avec des pieds de plomb. Tout est lourd
pour eux, à part de temps en temps l’une ou l’autre matière où le prof est arrivé à
susciter l’intérêt.
Cela m’attriste quand je sais qu’il y a moyen d’apprendre autrement…
Le soir, à la montagne, au coucher du soleil, quand tous les sommets rougeoyaient, ce
fut un régal d’avoir ce fascicule entre les mains , et de rêver à une Autre Ecole… Mais
non, ce n’est pas un rêve : elle existe bel et bien dans nos Ardennes, cette école.
Mais elle est loin de tout…
On ne peut que souhaiter ardemment que d’autres profs s’en inspirent, se regroupent et
créent de nouvelles écoles pilotes ailleurs, un peu partout en Belgique, pour donner à
d’autres jeunes, une chance d’en sortir. Et pour eux-mêmes, retrouver le goût de faire
passer le savoir.
N’est-ce pas un des souhaits du Gouvernement de la Communauté française ?
Luce!e Chapelle
Madame la Ministre de l’enseignement
Puis-je vous soumettre quelques réflexions au sujet du problème de la
Pédagogie Nomade de l’école de Limerle.
Apparemment cette école a du mal à prendre un envol serein.
En effet, malgré la promesse faite par le Ministre de l’enseignement il
y a 2 ans, les autorités locales compétentes, dont dépend l’école, créent un climat de
tension et de suspicion qui nuit fortement au bon déroulement de la pédagogie mise en
place.
Celle –ci est bien sûr fort différente de celle pratiquée dans
l’enseignement traditionnel, mais ne faut-il pas laisser du temps au temps ?
Des personnes se sont investies dans ce projet depuis plusieurs années
car elles croyaient à ce projet et, fortes du soutien des responsables politiques, n’ont
pas ménagé leurs efforts pour que celui-ci aboutisse. Les élèves inscrits ainsi que leurs
familles sont par ailleurs satisfaits de cet enseignement.
Il ne m’appartient pas de porter un avis au sujet de ce type de pédagogie
mais simplement de vous faire remarquer qu’il serait injuste de réagir négativement
sans chercher à mieux la connaître.
En vous remerciant de l’intérêt que vous porterez à cette lettre, veuillez
recevoir Madame la Ministre l’expression de mes sentiments les plus respectueux.
Chris"ane Lenaerts
Les expériences vécues par les élèves à Pédagogie Nomade sont d’une richesse
qui me fait ouvrir grand les yeux. Quand je regarde l’exposition d’un atelier, je n’ose
même pas y toucher tellement je sais qu’il y a de vie derrière le papier.
On devrait reconsidérer le mot « apprendre ». On y accorde bien peu de prix, il
me semble, quand il s’agit pourtant de la construction de tout un individu, qui sollicite
toutes ses émotions, ses tiraillements intérieurs.
J’imagine le professeur, en chemin dans la nature avec ses élèves, touchés par ce qu’ils
voient, riant avec lui.
Ça ne tient peut-être qu’à un fil…
Au retour, il y a des réalités plus « sombres » qui les attendent : la vaisselle, un repas à
préparer, quelqu’un qui ne va pas bien, une terrasse à construire, les toilettes sèches, le
four à pain…
Pas les lumières des discothèques, ni du métro qui te ramène automatiquement chez
toi, et l’autre automatisme de l’écran d’ordinateur ou télévision, captivant, attirant
comme un aimant.
Ces jeunes-là ne seront pourtant pas moins aptes que les autres à s’asseoir dans un
bureau, selon ce qu’ils auront découpé dans le journal d’opportunités d’emploi.
Mais j’ai une foi en la confiance et la sûreté de commande d’eux-mêmes qui les
accompagneront à bord sur leurs sentiers futurs, par temps pluvieux et même
scaphandriers sous les mers.
Je n’ai pas vraiment les mots, je ne sais pas par où dérouler la ficelle pour parler de
Pédagogie Nomade. C’est un beau nom. Mon école à moi portait le nom d’un ancien
député européen. Et nous, ce millier d’élèves originaires pour une grande partie de
pays étrangers, on s’entassait à l’ombre de sa statue grise, aux traits qu’on lui avait
figés avant qu’il ait pu connaître ces fils d’immigrés, ou la grande fresque des visages
de Matongé, à cent mètres.
À la seule petite pause de la matinée, tandis qu’on se bousculait sans avoir la moindre
ration d’air pour aérer son cerveau, nous surplombait une autre fresque, celle de Tintin,
qui sur fond de château Moulinsart nous adressait dans une bulle un conseil comme
« Prends le train en marche » (ou : ne le rate pas ?)
Pour une majorité d’élèves, aller à l’école c’était comme pointer à l’usine. Il y avait
le cachet abattu d’un poing féroce sur nos journaux de classe un par un en file droite,
dans le petit matin qui se frotte les yeux, plus tard la sonnerie, m’évoquant des grues
jaunes qu’on manoeuvre, et aussitôt après, au sortir du cours, nos pas courant dans les
couloirs, tapant au passage les portes métalliques des casiers couvrant les murs, puis
nos doigts poussant avec hargne les boutons Coca-Cola ou Sprite, et enfin, rythmant
tout le long des 20 minutes de pause, le bruit lourd des canettes tombant dans les
machines qui encerclait les deux préaux, aidées en cela par deux massifs monuments
aux morts des deux guerres, une guerre par préau.
Les reliant en souterrain, le couloir agité où allaient et venaient de façon maladive
pendant leurs minutes de dégourde-jambes les mille élèves, c’était l’entre-deuxguerres.
Durant laquelle on avait la tête gonflée à force de se batailler les méninges, même
que pendant les minutes libres imparties, les plus originaux, les plus fous, les plus
skateurs au grand air de nous ne pouvaient s’empêcher de faire l’historique des faits
du professeur, ses avancées, ses reculs, ses grandes phrases historiques, les prévisions
pour la stratégie à adopter le lendemain.
Mais ce n’était pas une guerre de groupe, chaque élève avait sa propre angoisse
contenue dans son classeur personnel (qui transpirait des gouttes.) À cet âge-là, on a
déjà d’autres soucis à soi dans ses propres vêtements. Son corps pâle qui couve l’être
de demain, tremblant de peur qu’il n’en sorte que dans un grand jet rouge de maladie
acide, rouge comme les phares d’une bagnole fonçant sur l’autoroute et venant trop
vite sur toi, t’emportant et t’obligeant à brûler tous les feux rouges.
Je ne sais pas ce que sont devenus tous ces élèves. Quand je reviens à Bruxelles, je
ne les vois pas dans les visages que je croise. Ils sont évaporés dans la grisaille des
bureaux à dix étages. Ils ont encore à trouver un coin de ciel bleu où respirer et prendre
un rayon, mais chaque jour leur tombe du ciel le « metro » avec des nouvelles lourdes
et menaçantes. Dans ce journal les cottes de la bourse c’est comme les points qu’à
la fin de chaque semaine le professeur traçait dans leurs bulletins. Comme de petites
aiguilles qui font mal.
A Limerlé, mon frère a son potager, ses tasses et couverts qui font clink clink,
dans l’air du matin, une route qui monte en pente raide aux champs, une dame en
rouge lui explique comment faire la prochaine fois pour que les haricots grimpent à
leurs tuteurs jusqu’au bout ; il pratique le langage de pierre ? de bois ? de quelque
chose de solide avec ces camarades rappeurs batteurs de mots quand il les croise dans
la cour lui sortant du four à pain eux du théâtre en bois, et puis, leurs fardes de cours
étalées sur la colline voisine ils font des grands plans de Politique Européenne de
l’Environnement et de l’Energie…
Il a un pied enfoncé dans la terre et quand il nous parle, à nous, à la famille inquiète de
statistiques, il sent en même temps là-dessous sur sa peau le chatouillement d’un ver
qui lui souffle le secret de qui mangera qui, de la chaîne alimentaire et de l’approche
des météores.
Et je dors tranquille en lui imaginant deux bébés emportés sur le dos dans un grand
panier d’oseille alors qu’il traverse des volcans, une Terre en fusion (c’est ce que sent
le futur.)
On oublie cette Terre qui nous modèle, cette réalité un peu crue qui salirait de beaux
décrets, d’où poussent de beaux fruits pourtant, qu’on appelle « insolents ». On
demande la politesse et le respect du cadre, mais chez les polis cadrés il y a la hargne
de qui a besoin d’ouvrir la fenêtre pour respirer. Et sous l’apparente insolence il y a un
sourire simple et bienveillant…
Qui racontera au voyageur étranger se demandant ce qu’est ce troupeau de maisons
entre lesquels cheminent des étudiants et des bêtes (secte ou coopérative ?), ce qu’est
une oxymore, autour de la bière du même nom.
Santé !
Mathieu Hanin
Pédagogie nomade – les ailes coupées d’un projet novateur
Qu’est-ce que Pédagogie nomade apporte de nouveau ? Les réponses vont fuser, de la
part de tous les protagonistes du projet. Les élèves en premier : ils sont certainement les
témoins privilégiés d’une volonté d’apprendre fraichement reconquise. Mais du point
de vue extérieur des sympatisants, voici ce qui semblait le plus singulier : on voyait à
Pédagogie nomade un effort (pour une fois réel et concret) de penser la pédagogie et
l’apprentissage de manière collective. D’un point de vue méthodologique, on ne peut
qu’encourager les points de vue multiples sur le monde, parce qu’ils forcent l’esprit
critique à se développer. Les pédagogues et officiels du monde de l’enseignement, qui
chantent volontiers les mérites des compétences transversales, ne diront pas le contraire.
Quand les cours sont cloisonnés, que chaque enseignant relève de son côté les défis de sa
matière, rien ne garantit que l’élève fasse lui-même des connexions entre les domaines
du savoir (c’est pourtant ce qui définit l’intelligence). En travaillant ensemble sur des
thématiques communes, les enseignants et les élèves de Pédagogie nomade ont montré
l’importance de l’énergie collective et de la circulation des idées dans l’apprentissage.
L’occasion était unique à Pédagogie nomade de repenser librement les modes
d’enseignement. Et le projet de cette école n’a pas manqué d’attirer l’attention d’autres
institutions scolaires – on ne compte plus les enseignants de Communauté française
dont la curiosité à été piquée par Pédagogie nomade. Plusieurs amis bruxellois nous
l’ont confirmé : les commentaires vont bon train dans les salles de profs de la capitale.
Mais enfin : à quoi sert d’encourager un projet novateur, alternatif, s’il s’agit de lui
couper les ailes aussitôt ?
Pour les raisons évoquées ci-dessous, l’équipe pédagogique de PN doit à tout prix
conserver le droit de s’organiser selon ses modalités propres, pensées en fonction
du projet de l’école. On ne voit pas l’intérêt qu’il y aurait à diminuer les forces
vives à Limerlé. L’engagement de ceux qui y travaillent est sans bornes. Ce sont des
enseignants qui font leur métier avec leur coeur, et il ne faudrait pas se priver de leurs
ressources. Surtout, il faut que Pédagogie nomade puisse continuer à fonctionner de
manière collective. Il est trop tôt pour étouffer ce projet en lui imposant les normes de
l’enseignement traditionnel.
Maud Hagelstein
Chargée de recherches du F.R.S.-FNRS à l’Université de Liège
Tout ce qui vous arrive me rappelle ce que racontait Fred Ulhman, l’histoire de cet
aveugle qui voulait qu’on lui décrive la couleur blanche. « C’est la couleur du cygne »
lui dit son ami. « Et qu’est-ce qu’un cygne ? » demanda l’aveugle. « Un oiseau avec
un long cou. Donne-moi ta main et touche mon bras jusqu’au coude. C’est ça le cou
du cygne. — Oh ! C’est très beau, dit l’aveugle. Maintenant je sais ce que c’est que
le blanc. » Beaucoup de gens, hélas, qui voient très bien, cherchent encore à savoir ce
qu’est le blanc.
Paul Herman
« Et pourtant elle tourne… »
Quelques réflexions sur la vie de prof à Limerlé
Il fallait réagir. L’enseignement est en crise. Le Soir l’a dit. Dans un cahier spécial
« Rentrée des classes » : les professeurs sont « au bord de la crise de nerfs ». La
lecture de ce cahier, si elle n’apprend guère, est malgré tout édifiante. La pénurie
d’enseignants est patente dans tous les domaines et à tous les niveaux, les conditions
de travail loin d’être idéales, les salaires trop bas, la formation défaillante. Les
solutions ? La passion des enseignants, imperméable à tous les revers de fortune – les
vocations plus rares sont, on le sait, les plus ferventes. Et la formation continuée,
probablement dans la ligne de la formation initiale qu’on disait pourtant défaillante
trois lignes plus haut. On sent bien que cela ne peut suffire. Il faut fermer Pédagogie
nomade. Ou, au moins, en faire une école comme toutes les autres. On connaît
l’alternative de l’école traditionnelle : la répression ou la dépression. Dans un sens
ou dans un autre. Parfois les deux en même temps. Formation initiale et formation
continuée peut-être ? Le long apprentissage d’un métier mené en solitaire le plus
souvent, malgré les projets d’établissement et les temps de concertation. Faire
respecter une autorité disparue ou disparaître. Pédagogie nomade a choisi de refuser
l’alternative. Le problème ne peut être traité au niveau individuel. Il exige une prise
en charge collective. C’est le sens même d’une des dispositions institutionnelles
principales de l’école : la cooptation des enseignants. C’est précisément cette
disposition spécifique que les autorités de la Communauté française mettent
aujourd’hui en cause.
Il faut dire qu’elle peut inquiéter les plus fervents optimistes des administrations
communautaires. Dans le petit lexique maison, cooptation ne peut vouloir dire que
copinage, petits arrangements entre amis, reproduction entre soi, accumulation de
titres et de privilèges. De la maternelle à l’université du troisième âge, les règles
d’affectation des enseignants souffrent aisément qu’on « pousse » tel ou tel candidat,
« très apprécié », au mépris des mérites respectifs et des procédures. Il ne faudrait pas
que cela arrive à Pédagogie nomade. La préfète veille, le cabinet aussi, la ministre.
Cette vigilance est peut-être l’occasion de redire que le principe de la cooptation a à
Limerlé un autre sens. Il ne s’agit pas de se choisir entre soi, mais de rendre possible
une vie institutionnelle qui repose tout entière sur la construction de choix collectifs
élaborés et mis en œuvre, sur une base égalitaire, par les professeurs et les élèves.
Pédagogie nomade soutient qu’on ne peut agir directement, autoritairement, sur la
volonté des élèves, mais seulement travailler collectivement sur les conditions de
l’apprentissage. La cooptation n’est rien d’autre que le mode de désignation qui
correspond au plus près à ce parti pris pédagogique et politique. La cooptation n’est
donc pas négociable – comme l’égalité ne connaît pas de degré. Les professeurs
comme les élèves de PN connaissent cette discipline exigeante. Ils en affrontent les
aléas, les retards et les tâtonnements, parce qu’ils en ont fait le choix plein et entier. En
toute connaissance de cause : l’année écoulée, ils ont étudié et monté La Vie de Galilée
de Bertold Brecht, où le dramaturge allemand met en scène la lutte entre le savoir du
physicien et le pouvoir religieux qui veut en déterminer les limites.
Pédagogie nomade affronte sans fard, mais sans concession, les problèmes actuels
de l’enseignement secondaire. C’est ce qui la rend irremplaçable en même temps
qu’impertinente : oser mettre au centre des questions pédagogiques, non pas l’élève
lui-même comme on le lui reproche à tort, mais l’école elle-même. « Et pourtant
elle tourne » et doit continuer de le faire avec les professeurs – et les élèves – qui
choisiront de la faire vivre.
Grégory Cormann
Membre du collec"f Pédagogie nomade
Chercheur en philosophie à l’Université de Liège
Comme beaucoup de monde, sans doute, lorsque j’ai pris connaissance des principes
de Pédagogie nomade, j’ai été quelque peu sceptique, voyant dans ce projet
autogestionnaire une résurgence généreusement naïve de la pédagogie soixantehuitarde qui met l’enfant au cœur de l’apprentissage en abolissant toute idée de
hiérarchie entre le « maître » et l’élève. Et il est vrai qu’à moindres frais, la caricature
peut rapidement mettre à mal une entreprise qui a pourtant l’appui de toute une
théorie et d’une histoire : des profs qui n’en sont plus et qui peuvent passer des maths
au français, des élèves qui n’en sont plus et qui décident de leur formation ; une
« discipline » inexistante, etc. etc. Bref on imagine facilement comment les tenants
d’une éducation stricte et soumise aux valeurs dominantes de la société a pu se gausser
d’une école qui retourne comme un gant les sacro-saints principes de la pédagogie
officielle. Quand j’ai appris que ce projet était soutenu par le ministre de l’éducation
de l’époque, j’ai été à la fois heureux et méfiant : n’allait-on pas une fois de plus créer
une « école-pilote » qui ferait tôt ou tard la preuve de son inefficacité et ainsi donner
crédit à l’enseignement traditionnel? Ne ferait-on pas de Limerlé une expérience à
la Lipp dont on savourerait intérieurement l’échec programmé ? C’est peut-être ce
qui se joue actuellement si j’en juge d’après les menaces de fermeture qui pèsent sur
l’établissement que l’on pourrait au mieux, si je comprends bien, transformer en une
succursale de son institution d’attache (l’Athénée de Vielsalm), une sorte de classe
verte qui accueillerait les élèves les plus rebelles, à la satisfaction de tous.
Si Limerlé dérange, ce n’est certes pas parce qu’on a pu y trouver des foyers
d’insoumission ou des pratiques illicites — la drogue qui se deale dans certains
établissements renommés fait davantage de ravage et, curieusement, choque moins. Si
Limerlé dérange, c’est parce qu’elle remet profondément en question les bases d’un
enseignement secondaire qui fait pourtant la preuve de ses limites (voir les rapports
accablants de l’OCDE). Même si le projet est jeune, il conviendrait pourtant d’en tirer
les leçons pour l’ensemble des acteurs de la communauté éducative et faire en sorte
que les écoles officielles introduisent un peu de nomadisme dans leurs programmes et
leurs conduites.
Lors d’une journée portes ouvertes à laquelle je me suis rendu, j’ai été très
impressionné par ce que j’ai découvert de la PN. En une après-midi, ce qu’il restait
de mes réticences a été balayé. Une élève est venue m’accueillir et en très peu de
temps m’a mis au courant du fonctionnement de l’école : d’une expression sûre et
confiante, elle a immédiatement mis le doigt sur les bénéfices d’une telle expérience
pour des élèves — dont elle-même — qui ont connu ce qu’on appelle pudiquement le
« décrochage scolaire » (qui est surtout un largage social). Quelle maturité ! me suisje dit, jamais je n’ai entendu des adolescents parler avec une telle conviction de leur
projet pédagogique (l’école officielle est censée en produire, je ne suis pas sûr que
les élèves en aient même connaissance). Ensuite, une autre élève, en pleine activité,
m’a décrit la maison d’édition que les élèves et les profs animent en pure autonomie,
atelier incomparable où s’apprennent au sens fort et déjà avec un professionnalisme
impressionnant les métiers de l’écriture dans leurs composantes créatives et
matérielles : des disques et des livres sortent de cette maison, mais l’essentiel est
ailleurs, dans l’extraordinaire expérience de vie que ces activités occasionnent. Des
autres contacts que j’ai eus avec les élèves, j’ai ressenti le même sentiment : voilà des
enfants heureux, mûrs, épanouis intellectuellement, qui savent prendre leur destin en
main, confiants dans ce qu’ils apprennent au quotidien de cette expérience collective
sans pareil qui les fait se frotter aux nécessités logistiques et ancillaires autant qu’aux
débats philosophiques. Ce qu’ils semblent avoir appris est tout simple : aller chercher,
avec esprit critique, l’information et la formation là où elles se trouvent, dans une
démarche participative. De quoi faire pâlir les pédagogues en chambre, les cabinets
ministériels, les préfets d’études et les professeurs qui, au fond, tiennent un discours
qui n’est pas radicalement autre, à ceci près que les mots, dont on se paie trop dans
le carcan institutionnel de l’enseignement secondaire en CFB, sont rarement suivis
d’effets.
A ceux qui pensent que Pédagogie nomade est synonyme de laxisme éducatif, je
réponds que, au contraire, c’est l’école de l’exigence par excellence : quoi de plus
difficile pour des adolescents que de se prendre en main, à l’heure où l’on ne cesse
— en famille, à l’école, à l’université même — de les cocooner ! Les élèves que j’ai
rapidement côtoyés m’ont donné la certitude que quoi qu’ils fassent dans leur vie ils
sauraient l’affronter : n’est-ce pas ce à quoi tend désespérément l’Ecole ?
Jean-Pierre Bertrand
Doyen de la Faculté de Philosophie et Le!res de l’université de Liège
Franchement je ne comprends pas!
Quand nous, les parents, sommes confrontés aux échecs scolaires de nos enfants on
essaie de comprendre les raisons.
Est-ce que les enseignants font bien leur travail ? Est-ce que nous, les parents, sommes
assez impliqués dans la vie scolaire des nos enfants ? Est-ce que mon fils ou ma fille
n’est pas assez intelligent(e) ? Est-ce que les élèves ne sont pas trop nombreux dans
les classes ? Est ce que c’est mon fils ou ma fille qui n’a pas envie d’étudier ? Mais
surtout, est ce que je choisis une bonne école pour mon enfant ?
Si, je ne comprends pas ce cirque, et là je fais référence à ce courrier parvenu par
le cabinet, c’est parce que à l’école Pédagogie Nomade on a trouvé les réponses a
ces questions. A PN on est sûr que les raisons pour lesquelles nos enfants ont des
difficultés à l’école ne sont pas des raisons auxquelles on ne peut remédier.
Les professeurs travaillant à PN font un travail remarquable et parfois très difficile,
ils sont obligés s’auto-évaluer tous les jours. A PN les professeurs ne sont pas attirés
par un bon salaire, ne sont pas attirés par la sécurité qui pourrait apporter un poste
de fonctionnaire, ils ne peuvent pas être attirés par une fonction de pouvoir. La seule
chose qui reste pour encourager leur motivation personnelle est le plaisir de voir
les élèves réussir, apprendre à apprendre, s’intéresser à des sujets qu’auparavant ils
classaient dans les sujets « nuls ou débiles ». Enfin, leur seule et vraie motivation est
de bien faire leur travail.
A PN, nous, les parents, pouvons participer de façon active, nous pouvons nous
exprimer, nous pouvons décider avec les élèves et les professeurs et nous pouvons
même critiquer le fonctionnement de notre école, de telle façon que si les choses ne
vont pas très bien, ça pourrait être aussi un peu de notre faute. Du coup, on se sent
plus responsable vis-à-vis de la vie scolaire de nos gosses, puisque nous construisons
l’école nous même.
A PN il n’y a pas une intelligence « standard », il n’y a pas d’intelligence tout court
mais plusieurs intelligences. Il n’existe pas de jeune qui n’ait aucune intelligence. Les
prof à PN sont là pour valoriser ce que les jeunes savent déjà bien faire et pour les
aider à comprendre de manier différente ce que nos jeunes ont du mal à intégrer.
En classe à PN les jeunes ne se retrouvent pas à 35, même pas à 25. Les classes ne
sont pas surchargées, en conséquence, les profs non plus. C’est-à-dire moins de bruit,
moins de stress, plus de concentration, plus de disponibilité réciproque, une meilleure
ambiance de travail, plus de temps pour pouvoir expliquer et pour pouvoir comprendre
et beaucoup de bonne humeur.
Les élève qui n’ont pas envie de travailler ne vont pas à PN, puisque PN est une
école plus difficile que les autres. Son système est totalement basé sur la motivation
personnelle des élèves, sur leur engagement vers le projet de l’école puisque eux, les
élèves à PN, doivent la construire eux même. Il n’y a personne qui n’oblige personne
à PN du coup, tout le travail fourni par les élève est le vrai fruit d’un travail étudié et
responsabilisé par eux mêmes.
A PN, les élèves n’apprennent pas qu’à étudier mais aussi à prendre des décisions, à
collaborer, à trouver des compromis, ils apprennent à être solidaires l’un vers l’autre
puisque le travail de groupe dépend de la réussite de tout le monde. Ils apprennent
à réfléchir et non seulement à apprendre des choses par coeur en échange de points,
de façon que trois jours après un examen ils ont déjà tout oublié. A PN les jeunes
apprennent à vivre ensemble et, pour plusieurs d’entre eux, même à manger des
légumes.
Enfin, avec toutes ces histoires du décret d’inscription, dans nos droits nous avons
choisi pour une mixité de tout type et niveaux dans notre école. Même si cela apporte
des problèmes de distance, de nombreux déplacements, d’argent, d’éloignement
des nos enfants. Il y a une bonne raison pour laquelle nous n’avons pas choisi la
facilité : le futur et le bonheur de nos enfants ainsi que leur réussite dans cette société
ne dépendent que d’une bonne utilisation du droit que nous avons de prendre des
décisions pour ou avec eux.
Je ne comprends pas, comment dans une société démocratique la parole d’une seule
personne (la directrice de l’athénée de Vielsalm) puisse mettre en danger la scolarité
des nos enfants, alors qu’elle n’a même jamais assisté aux cours en classe ou aux
réunions des parents d’élèves.
Alors que nous les parents mais aussi les élèves sommes contents et tout à fait en
harmonie avec le travail qu’amène Benoît Toussaint, nous ne nous plaignons pas, ou
contraire nous le remercions tous les jours. Comment peut-il se faire qu’en démocratie,
une personne complètement désintéressé et aussi distante du projet de PN, de notre
projet, puisse gaspiller tout notre travail. Enfin, on cherche à faire de nos enfants des
bonnes gens, dans quel droit et pourquoi quelqu’un voudrait-il nous en empêcher ?
Personnellement je n’attends que le jour où mon fils soit assez grand pour l’inscrire à
PN, ce sera bien à ce moment là que je lui aurai fait le plus précieux des cadeaux de sa
vie.
Olga
Contes à rebours d’une bavure annoncée.
Contes à rebours d’une bavure annoncée,
Est un titre bien trouvé.
Après un affront comme celui-là,
Il ne faut pas baisser les bras.
Sans agressivité, avec intelligence,
Sans crier, avec patience,
Il faut raconter cette histoire,
Ne pas laisser un tel cauchemar.
Face à la pression,
À la perte de notre vie privée,
Dans cette fâcheuse situation,
Gardons notre dignité.
Face à la discrimination,
Restons d’aplomb.
Face à l’agressivité,
Restons posés.
Face à l’angoisse,
Ne pas perdre la face.
Face aux bafouages,
Contenir sa rage.
Si la liberté n’existe que dans ma tête,
Il va falloir qu’elle pette.
Si la liberté est une illusion,
Je n’en ferais pas une raison !!!
Nathalie Vertommen
Réaction à chaud suite à la lecture du journal « Contes à rebours d’une bavure
annoncée »
Je vous envie, jeunes pédagogues nomades.
Bien sûr vous prenez des coups, vous vous colletez à toutes les difficultés possibles,
mais c’est vous qui avez raison. Les bien-pensants vous regardent de travers, ils vous
trouvent suspects. Mais l’éducation institutionnelle va tellement mal que son avenir est
aujourd’hui, j’en suis convaincue, entre les mains de suspects généreux comme vous.
Je parle en connaissance de cause, j’ai enseigné pendant plus de trente ans. J’ai
tout essayé, pour semer, pour éveiller, mais en restant scrupuleusement dans les
limites imposées par l’institution. Devant la souffrance d’élèves en difficulté, devant
l’impossibilité de les aider sans souffrir beaucoup moi-même, devant le poids
paralysant de l’institution qui se préoccupait plus de documents administratifs et
de statistiques que d’actions positives, je tentais modestement de faire un chemin
personnel en guidant des jeunes dans leur recherche individuelle et collective. Le cours
que je donnais - la morale non confessionnelle - me laissait heureusement une marge,
mais le cadre de l’école traditionnelle, pour des jeunes en grande difficulté, créait
d’incontournables contradictions avec les buts même de la mission enseignante. Je
n’étais pas une aventurière et j’admire chez vous ce que je pense être la sagesse d’une
réflexion constante: je ne me trompe probablement pas en disant que vous n’êtes pas
des aventuriers non plus, mais plutôt - et vous avez raison d’assumer ce beau mot - des
pédagogues fondamentaux.
Si je dis vous envier, c’est que, je le sais bien, je n’étais courageuse que dans les
limites d’une rigoureuse légalité. Alors quand je vois une petite équipe qui y croit,
qui franchit le pas de l’expérience vécue, qui fait raisonnablement le pari d’une
pédagogie innovante, je me prends à rêver de ce que j’aurais pu ou dû faire. Vous dire
ça maintenant, alors que vous êtes peut-être dans le doute tant vos difficultés sont
grandes, c’est sans doute presque indécent. Vous envier aujourd’hui, c’est pourtant le
fait d’un immense regret de ne pas pouvoir faire aussi bien que vous.
Ne baissez pas les bras. Courage !
Rolande Heldenbergh
Lors de la Semaine du Commerce Équitable 2009/2010, Alternative Théâtre
(compagnie dont je m’occupe) avait présenté son spectacle de théâtre-forum
sur l’alimentation et la consommation responsable à Pédagogie Nomade.
Étant donné que l’alimentation était un thème que les élèves de Pédagogie
Nomade avaient décidé d’aborder, j’ai été invitée à leur proposer un
atelier de théâtre-action autour de ces questions.
J’ai été principalement touchée et aussi très surprise par les élèves
inscrits à cet atelier: vifs, critiques, curieux, bel esprit d’analyse,
sens aigu des responsabilités..tout ces qualificatifs étaient très loin
des stéréotypes que j’avais alors vis à vis des « jeunes en décrochage
scolaire »!
En rencontrant les professeurs, en m’informant sur leur philosophie de
travail et en partageant le temps des ateliers leur mode de vie (entre
autres un repas réalisé avec les légumes du potager dont ils se sont
occupés) je me suis rendue compte que c’était ce genre de structure et de
pédagogie qui pouvaient permettre l’épanouissement des atouts précieux
(cités plus haut) dans la vie d’adulte qui les attend.
Je me réjouis de savoir que ce type d’enseignement existe, à l’opposé du
conditionnement et pour l’émancipation de l’individu et de la société.
Pour Alterna"ve Théâtre
Sara Graetz
Bonjour,
En tant que psychopédagogue, je porte un intérêt académique au projet de
Pédagogie Nomade depuis ses débuts, et je m’y rends de manière occasionnelle pour
me rendre compte de la progression de l’expérience. N’étant fardé d’aucune couleur
politique, les aspects qui me concernent sont les apprentissages dans leur cadre
pédagogique. Ces quelques lignes me sont inspirées par l’éventualité d’un changement
de la structure de gestion de cette école expérimentale, sous un vent politique turbulent.
Je tente ici de répondre succinctement aux questions qui naissent en moi à l’aube de ce
changement.
Qu’est-ce que Pédagogie Nomade ? Il s’agit d’une école expérimentale qui s’est
donnée pour mission de scolariser les exclus de la norme du système scolaire
ordinaire. Pour atteindre cet objectif, cette école se donne les moyens de la cooptation.
En effet, pour remettre les élèves déçus de l’école sur les voies de la scolarité et de
l’intégration sociale, les pédagogies institutionnelles ont été mises en évidence comme
solution dans des projets parallèles de nos voisins européens. Quoi de mieux, dans ce
cadre, que de pouvoir dire à l’élève : « Ton école sera ce que tu en feras ! ».
Quel rapport peut-il y avoir entre structure de gestion et apprentissage ? Dans cette
école, c’est la gestion par les élèves qui est à l’origine de tout apprentissage. La gestion
prend ici son sens large, puisqu’il en va des toilettes au projet pédagogique. Il s’agit
de l’essence même de cette Pédagogie Nomade. Chaque apprentissage réalisé est le
fruit de la conscience collective que ce projet a fait émerger chez ses participants. Ces
élèves sont la preuve que le système scolaire est actuellement en échec, il n’arrive pas
à scolariser tout le monde. Pédagogie Nomade fait le pari d’offrir une alternative pour
pallier les effets pervers de ce système. Cette école réussit ce défi grâce à sa structure
atypique. Lui enlever sa structure, c’est lui enlever ses élèves et donc mettre fin à
l’expérience. Pourquoi mettre fin à une expérience avant d’avoir obtenu des résultats ?
Sans réponse.
Que répondre à ceux qui font le procès de l’anarchie ? La notion « anarchie » est
ordinairement pris comme un synonyme de « désordre ». Or, de manière abstraite
de tout jugement de valeur, l’anarchie signifie le refus de tout pouvoir central. Isolé
comme tel, ce refus comporte de grands risques de désordre. Pour éviter cet effet, une
morale de responsabilité individuelle et collective devient une condition nécessaire. Si
cette école est anarchiste, elle prouve par son existence que la conscience collective
qu’elle développe chez ses intervenants est cette morale de responsabilité individuelle
et collective qui permet l’intégration dans la société. Si cette école est anarchiste, elle
permet alors la réintégration des exclus de la norme dans la société. Si cette école est
anarchiste, elle participe au développement actif de notre société.
Fabien Jenon
Psychopédagogue
Bruxelles le 06 septembre 2010
Madame la Ministre,
Je me permets de vous adresser cette lettre suite aux menaces qui pèsent sur
Pédagogie Nomade, l’école de mon frère (Olivier Vertommen). En effet, celui-ci est
inscrit dans cette école pour la deuxième année consécutive.
C’est après un parcours difficile qu’Olivier atterrit à Pédagogie Nomade au début de
l’année scolaire 2009-2010. Au cours de cette année, j’ai pu constater énormément de
changements chez mon frère (nous sommes très proches).
PN lui a redonné confiance en lui, lui a montré une autre manière d’apprendre qui lui
donne le goût du savoir, lui a ouvert les yeux sur le monde, la société qui nous entoure.
Ces devoirs et ses droits au sein d’une communauté (et les problèmes rencontrés par
PN y ont fortement contribués).
Ne devrait-il pas y avoir des écoles pour tout le monde ? PN peut offrir aux jeunes
en difficulté une alternative à l’échec, à l’abandon scolaire. Il est clair que notre
gouvernement va devoir faire face à ce problème, va devoir aider ces jeunes. Pourquoi
démonter l’école qu’EUX ont choisi et qui est la première à les aider (dans le cas de
mon frère la première après 5 ans de galère) ?
PN a tellement apporté à mon frère et pourrait apporter tellement à notre société qu’il
est indispensable qu’on les laisse évoluer et s’adapter.
Je pense qu’il faut vivre avec son temps, qu’il faut savoir évoluer et PN est la
première pierre d’une évolution de l’enseignement. (Parce que honnêtement, cela fait
des années maintenant que l’enseignement secondaire en Belgique c’est une vaste
blague !!!)
PN répond à une demande, à un besoin de la société, il serait temps qu’on lui donne les
moyens de pouvoir réaliser ses projets plutôt que les démonter.
Je suis certaine, Madame la Ministre, que des solutions existent, et que dans le
dialogue tout le monde y trouvera son compte.
Nathalie Vertommen
PN c’est…
C’est la concrétisation d’un rêve qui permet de croire que les choses peuvent être
différentes, que l’école peut devenir un lieu de vie où il fait bon vivre, dans lequel
professeurs et élèves viennent avec le sourire et travaillent ensemble.
PN c’est…
Un grand bol d’air frais dans un enseignement sclérosé. C’est une sève puissante qui se
réveille et qui nous montre que nous, êtres humains, sommes acteurs de notre destin.
C’est un appel à la liberté. La soumission n’est pas une fatalité… Oui, nous pouvons
changer les choses… Non, nous ne sommes pas obligés de nous soumettre au grand
Capital et aux systèmes dysfonctionnels. Non, nous ne devons pas courber l’échine et
vivre dans la fatalité du « c’est ainsi, on ne sait rien y faire ». Oui, les choses peuvent
bouger, changer, se transformer. Oui, il est possible d’être épanoui à l’école. Et oui,
il est possible que tout cela se réalise dans le respect des autres et sans révolution
meurtrière.
Alors, pourquoi ?
Pourquoi vouloir abattre l’arbre qui pousse ?
Pourquoi vouloir effacer les preuves que l’enseignement peut se vivre autrement ?
Pourquoi vouloir casser les idéaux ?
Pourquoi vouloir abattre ceux qui font bouger le monde ?
A quoi sert l’histoire qui a tant d’exemples à nous donner sur ces personnes qui ont fait
bouger les choses à tous les niveaux et qui n’ont pu être reconnues de leur vivant ?
N’est-il pas temps, au XXIe siècle d’enfin accueillir le changement positivement ?
Car qu’on le veuille ou non, les choses changent… Et aider l’enseignement à changer
permettra d’éviter un plantage magistral…
Alors, je continue d’espérer que les personnes qui détiennent aujourd’hui le pouvoir
sauront faire changer les choses pour nous permettre un jour de dire que PN, c’est
l’école qui a permis en Communauté Française à faire bouger l’enseignement et à
redonner une vraie valeur au mot Education.
Christelle Colleaux
Il est encore bien rare qu’un pays démocratique soit vraiment démocratique dans son
système éducatif. Cependant, un nombre croissant d’écoles démocratique voient le
jour dans beaucoup de pays. L’exemple le plus frappant est peut- être celui de l’Inde,
plus particulièrement dans le Tamil Nadu, où il y a 3 750 écoles où l’on pratique
l’ABL, c’est-à-dire l’Activity Based Learning, où le centre est l’enfant plutôt que
le professeur. Il n’y a rien de comparable dans d’autres pays, mais partout on voit
se développer de nouvelles écoles démocratiques, dont Pédagogie Nomade est un
exemple typique.
Pour connaître un peu l’étendue de ce mouvement, il suffit visiter les sites
www.idenetwork.org ou www.eudec.org. Dans ces écoles, les élèves et les
professeurs travaillent de façon co-opérative. Les jeunes acquièrent non seulement les
connaissances nécessaires pour réussir leurs examens, ils apprennent aussi comment
vivre ensemble, comment développer leurs propres centres d’intérêt et leurs talents
individuels, comment se tenir pour se faire respecter, comment respecter les droits de
l’autre.
J’ai visité des écoles de ce type dans de nombreux pays - dans mon Angleterre natale,
aux Etats-Unis, au Japon, en Thaïlande, en Allemagne, en France, en Espagne, en
Israël, en Inde - un peu partout. Et il y en a d’autres dans des pays que je n’ai pas
visités, comme par exemple la Russie, la Corée, le Brésil et le Lesotho.
Il est très important que la Belgique fasse aussi partie de ce mouvement. Le film que
l’on peut voir sur http://peripleenlademeure.be/spip.php?article203= m’a beaucoup
plu. On y voit bien que les élèves s’intéressent à ce qu’ils font, qu’ils s’expriment
clairement et librement, qu’ils jouent un rôle important dans la gestion de l’école. Je
souhaite vivement que Pédagogie Nomade puisse continuer de s’épanouir.
David Gribble
Auteur de plusieurs ouvrages sur l’éducation (dont « Considering Children », « A
Really Good School », « Real Education »), David Gribble a enseigné à Dartington
Hall et fondé Sands School en Angleterre. Il est actuellement coordinateur du réseau
IDEN (International Democratic Education Network).
David Gribble
Je m’appelle Thomas, 25 ans, définissable que par le cœur qui m’anime. Dire sociologue,
je trassaille. Dire chargé de promotion, c’est ne rien avoir compris. Dire artiste, dire être
humain ... On manque le cœur. Autant ne rien dire.
Je pourrais me taire. Je pourrais ne pas parler de moi, ce serait si facile. Mais il y a
atteinte à un projet qui me ressemble. Un projet qui m’attire parce qu’il me rassemble.
Je n’en fais pas encore partie, si ce n’est de cœur, mais son existence déjà me réjouit. Il
est en péril et ce dommage me touche. Je pourrais ne pas parler de moi mais c’est bien
de moi qu’il s’agit quand je suis triste. C’est moi qui suis interpellé dans mes projets,
dans ma vision de notre société. Ce texte passera donc par moi.
Tableau en cinq volets.
Sociologue. Le mot attribué à ma personne me choque. J’ai le papier mais je ne le
suis pas dans l’âme. Qu’à cela ne tienne, j’ai néanmoins hérité d’une sensibilité au
monde. Comment va notre société ? Question impertinente, insoluble absolument. Qui
peut prétendre avoir raison ? Je ne prétends rien mais je dis que je ne m’y sens pas à
l’aise. Je cherche ma voie dans les marges, je trouve mon bonheur dans les valeurs
que tout le monde clame mais que je ne retrouve que rarement. Inutile d’entrer dans
des débats passionnés. La société propose une culture et l’impose, ça a souvent été le
cas. Certains sont laissés dans les bas-côtés des autoroutes du développement. Je roule
en vélo. L’allure du monde ne me plait guerre, je dois fonctionner avec des œillères,
éviter les ornières et ne pas trop lever les yeux. C’est dangereux, certains paysages
sont si tristes. Dans cette grisaille, des éclats de lumières font garder les yeux ouverts
car l’homme est capable des pires atrocités mais il est aussi porteur de grandeur. Là où
l’attention est accordée à l’autre, où la différence peut être prise en compte en donnant
le droit d’exister, même si on n’a pas son carosse sur l’autoroute, là notamment,
la lumière jaillit. Inutile de vouloir imposer cette lumière à tous, il suffit qu’elle
convienne à certains, qu’elle leur permette d’exister quand ailleurs ils sont démolis.
Prendre soin de l’être humain dans sa diversité et en soustraire certains d’un enfer de
terriens, c’est précieux. Avec humble bienveillance.
Fini l’université : mémoire, défense, diplôme. Je fais la révérence et me retourne.
C’en est fini de l’intellectualisme où pourtant j’ai brillé. Je veux autre chose. Nouvel
horizon vierge, nouveaux chemins à tracer... j’allais refaire connaissance avec mes
mains. Découvrir les sensations des mes pieds et laisser tranquille mon dôme qui
surchauffe. J’explore. Je me redécouvre et tombe notamment sur un certain plaisir
à transmettre. Quel plaisir que de participer à l’élaboration de la société de demain
en même temps que d’être contraint à apprendre, à chercher la simplicité et la
substantifique moelle ! Je finis par remettre les pieds à l’université pour obtenir
l’agrégation mais j’en sors avec une certitude : si certaines écoles peuvent avoir un
projet pédagogique assez sympa voire un collectif de professeurs encore motivés, le
projet de l’école telle qu’il existe ne me plaît guère. Rien que prendre conscience des
misères qu’elle peut produire pousse à l’indignation. On me répond : « La société
est multiple, les gens tous différents, on ne peut contenter tout le monde ! ». Hé ! Un
projet unique ne peut contenter tout le monde. C’est clair. Pourquoi dès lors rester
dans un moule scolaire qui ne convient que pour les enfants bien calibrés ? Ceux qui
sont hors normes, on les reclasse, on essaye, on rate, ils ratent, ils se ratent. Pourquoi
tant de tristesse ? Pourquoi tant de colère et de haine engendrées par le système
scolaire ? Pourquoi ne garder qu’un moule, pourquoi faire des héros et des déclassés
malheureux ? Je stigmatise ? Un peu. Mais pourquoi mettre en péril ces projets qui
naissent, forcément différents puisqu’ils cherchent à donner goût à la vie à ceux
qui sont laissés en friche ? Je tombe des nues. On constate le problème, on abat les
solutions. Qui a la prétention de dire qu’il a raison, qu’il connaît toutes les failles, qu’il
pourra monter un projet sans heurts qui satisfera tout le monde, depuis le HP jusqu’à
l’émigré analphabète ? Personne ne le peut. Pédagogie Nomade ne le fait pas, en toute
humilité. Qu’un projet marginal qui explore de franges abandonnées de notre société,
qui met en avant des valeurs pédagogiques et sociales reconnues par tous, qui permet à
beaucoup de s’inspirer, d’oser croire qu’une autre école est possible, que ce projet, qui
à ma connaissance ne fait de mal à personne, soit mis en péril, je trouve ça grave.
Le bois. J’aime le bois. Le bois est un matériau chaud. Il offre des surprises dans les
dessins de son fil, on le travaille pour qu’il sonne, on le travaille pour qu’il nous pare,
pour qu’il nous entoure, qu’il nous protège, ... Le bois est beau, il peut être doux ou
rugueux, dessiné ou uniforme, coloré jusque dans des teintes extraordinaires. J’en fais
des meubles, des boucles d’oreille. Je fais de la musique sur du beau bois, ... Tout ça,
ce n’est pas l’école qui me l’a appris. Tout ça, j’ai eu bien de la chance de l’apprendre.
Enfant veinard, bien entouré, on m’y a donné goût. Sans ces personnes qui aimaient le
bois et en faisaient des prodiges, qu’aurait-il été pour moi ?
La musique ... Début du secondaire, on a la chance d’avoir une heure de musique.
Fabuleux. Pourtant ... Est-ce cela qui donne envie de faire de la musique ? Si fin de
3è secondaire je demandais à mes parents de commencer un instrument, ce n’était pas
grâce à l’école.
J’ai appris de belles choses à l’école, je suis même assez content de mon parcours.
Mais je suis resté assis pendant 6 ans, n’utilisant mes mains que munies d’un stylo.
Premier apprentissage de ma scolarité : rester assis et être sage. J’excelle. Pourtant, je
trouve que l’école n’a pas rempli sa mission. A mon sens, l’école doit ouvrir l’élève,
ouvrir ses horizons, lui ouvrir des possibles. Elle doit ouvrir la tête mais aussi ouvrir
au monde, et le monde a besoin des mains des hommes. Des mains, des pieds, de
créativité et de légèreté. J’oublie l’enseignement professionnel ? Allez dans une classe
de professionnelle demander comment ils ont choisi leur orientation. C’est avec ça
qu’on alimente le monde de nos mains ?
A quand le projet scolaire qui combinera tête et mains ? Ah oui ça existe. Mais qu’on
les fasse vivre !!!!
La terre. Je m’étonne : serions-nous la seule civilisation à ne pas apprendre à nos
jeunes à faire croître les plantes qui nous nourrissent ? Sommes nous les seuls à avoir
relégué la terre loin de TOUS les enfants de nos pays ? Hormis ceux qui y baignent
par leurs parents (mais les fermes familiales disparaissent) plus aucun gosse ne connaît
la nature qui nous entoure. Les pommes de terre poussent au supermarché, toutes
les carottes sont oranges et la banane pousse en hiver. Je déplore aussi et me désole
devant la distance à laquelle nous avons relégué le vivant qui nous entoure. Je suis
triste quand cette école qui intègre ses élèves dans le rythme des saisons est menacée.
L’enjeu n’est pas dans le potager, le débat n’y porte pas. Mais c’est pour ça aussi que
je tiens à Pédagogie Nomade.
Arts. Je me rappelle d’un de mes stages d’agrégation. Séquence de cours sur les
populations indigènes des forêts tropicales au Cameroun. Grâce à quelques lignes
lues à haute voix, j’essaye de leur donner quelques images de la brousse africaine. A
eux de rapporter ce qu’ils ont vu au moyen d’un mot, d’une phrase, d’un dessin ....
Résultat moyen. Mais fin du cours, une élève vient me trouver. Elle me montre une
véritable œuvre d’art qu’elle n’avait pu faire valoir en classe entière. Je ne peux que
l’encourager. Je pense aussi à tous ceux-là dont le mode d’expression passe ailleurs et
que ces cours n’explorent pas, ne leur donnent pas même la possibilité de découvrir
eux-même. Quel élève se découvrira une passion pour le travail de la pierre ? Qui peut
vraiment se découvrir artiste à l’école ?
Il y a ainsi un esprit à PN qui est rare et gagne à être cultivé. Pour moi, il est très
important. Important qu’il existe, important qu’il soit reconnu. Celui-là qui affirme
avoir une solution pour tous menace la société dans sa diversité, dans son exploration
de chemins de vie possibles. Pédagogie Nomade me semble offrir au contraire
encourager la dynamique sociale, la prise en compte de la diversité grâce à une voie
belle et peu explorée.
Ce projet est important pour moi car il rassemble en lui différentes composantes qui
pour moi sont primordiales, à la fois pour moi, dans ma vie telle que je la conçois et à
la fois pour la société, telle que je pense qu’elle gagnerait à être.
J’aimerais continuer à savoir que PN existe à sa manière et qu’elle est bienvenue
et bien accueillie dans notre société. J’aimerais pouvoir me projeter et m’imaginer
travailler en son lieu. J’aimerais ne pas me désoler contre notre société qui ne parvient
pas à accueillir la différence mais, au contraire, être fier de son ouverture.
Ce chemin passait par moi, je ne prétends à aucun absolu. Je témoigne simplement de
l’attache et de l’estime que j’ai pour PN. Cette école m’est précieuse.
Espérant des bonnes nouvelles,
Thomas Clément
J’ai découvert PN lors de sa première rentrée comme visiteuse intriguée par le projet.
J’y ai rencontré des élèves motivés, engagés avec un sentiment d’appartenance très
développé pour leur école. J’ai vu des professeurs animés par la passion d’enseigner et
d’un côté comme de l’autre,
faire des heures sup’ n’est pas un problème. J’ai vu dans de nombreux colloques des
professeurs et des élèves passer des samedis entiers à promouvoir leur projet. Je pense
que les acteurs de cette école y trouvent leur compte. Moi en tant que citoyenne, j’y
trouve mon compte également. PN est la preuve qu’une école différente peut exister
en Belgique. PN est le résultat d’un groupe de personnes qui s’est donné corps et
âmes pour faire aboutir leurs idéaux. C’est pour moi un symbole de liberté et de vrai
démocratie qui a triomphé sur la bureaucratisation de l’enseignement. C’est rassurant
et énergisant, ça donne envie d’en construire des beaux projets ! Si demain PN devait
disparaître, ce serait signe d’une intolérance à la différence, cela voudrait dire que
l’administration de l’école compte plus que l’éducation qu’elle offre. Et surtout ce
serait éteindre des passions tant chez les enseignants qui sont là par vocation et que des
élèves qui sont en train de trouver la leur grâce à Pédagogie Nomade.
Bravo à tous pour votre travail !
Valen"ne Anciaux
Pédagogie Nomade, une école trop différente?
La première fois que j’ai posé les pieds à Pédagogie Nomade, je n’en revenais pas...
Il existait donc une école, la seule en Belgique, où les notions de responsabilité,
d’engagement et d’esprit critique, si chères pourtant à Voltaire mais complètement
absentes des écoles «classiques», désespérément normalisantes, étaient effectives.
Une école, la seule en Belgique, qui considère les élèves comme des individus et qui,
plutôt que d’imposer une vision unique, un chemin qui ne mène qu’à un seule endroit,
celui du travail spécialisé, du stress, de l’exploitation, de l’ambition, de l’argent,
n’impose aucun chemin aux élèves mais leur propose plutôt de trouver leur propre
chemin, de se fabriquer eux-mêmes plutôt que d’être fabriqués.
Une école, la seule en Belgique, où des élèves dit «en décrochage» (bien qu’il serait
plus juste de dire que c’est le système scolaire et son horizon bouché, aliénant, qui est
«en décrochage» face à ces élèves) reprennent goût à l’éducation, se découvrent et
trouvent des pistes face aux absurdités d’un système en faillite.
Une école, la seule en Belgique, qui se construit au quotidien, où l’on apprend
à se remettre en question, où chaque jour il faut réfléchir aux «pourquoi» et aux
«comment» de notre société, où l’on pose les questions indispensables «qu’estce qui ne fonctionne pas?» et «comment cela pourrait fonctionner mieux?», où
l’apprentissage ne s’impose pas par l’autorité des uns sur les autres, mais par le faire
ensemble, le vivre ensemble, le décider ensemble.
Une école, la seule en Belgique, où les professeurs sont aussi des élèves, et les élèves
aussi des professeurs.
Une école, la seule en Belgique, où les termes de sagesse, d’intelligence, de
construction individuelle et d’autonomie, si cruellement absents du programme
scolaire, ne sont ici pas utilisés en vain.
Une école différente, donc, qu’un corpus de bureaucrates autoritaires s’évertue à
détruire par un travail de sape organisé et délibéré (perquisition, procès, renvois),
justement parce qu’elle est différente, parce qu’elle met en valeur les tares du système
éducatif actuel dont ces bureaucrates sont tributaires.
Une école dont, dans l’état actuel, l’on peut dire qu’elle elle trop différente, puisque
dans le système de l’éducation nationale aussi bien que partout ailleurs, la différence
est bannie, écartée, écrasée.
Une école qui m’émerveille, qui me redonne espoir, et qu’on aimerais tant voir fleurir
alors même qu’on aperçoit le bulldozer de la normalisation, la mécanique inhumaine,
impitoyable, de la société de consommation, s’approcher, étendre son ombre sur ce
champ de liberté.
«...Cette haine-là tient à quelque chose de très profond et de complexe. On la retrouve
chez tous les gens d’ordre. C’est la haine qu’on porte au Bédouin, à l’hérétique, au
philosophe, au solitaire, au poète. Et il y a de la peur dans cette haine. Moi qui suis
toujours pour les minorités, elle m’exaspère. Du jour où je ne serai plus indigné, je
tomberai à plat, comme une poupée à qui on retire son bâton.»
Antoine Caramalli
Notule sur l’expansion du domaine de la bêtise en Communauté Française de Belgique
et sur l’opportunité de la défaire (une lettre ouverte)
Madame, Monsieur, À qui de droit,
C’est un point partout admis et inlassablement répété : le but ultime de l’école est de
contribuer à la production de citoyens responsables, ouverts, dotés de sens critique
– des individus aptes à participer activement aux affaires de la Cité. L’apprentissage
de matières variées, l’acquisition d’une culture générale minimale, d’un comportement
social globalement civilisé : voilà les atouts qui doivent à terme permettre à l’élève de
prendre part à la vie collective et de s’y rendre utile. Enfin, le fait de trouver au sein
du monde social sa propre « place » ne doit pas aller sans plaisir : c’est que l’école a
l’ambition de donner à l’élève les moyens de « se réaliser ».
Tout projet pédagogique aujourd’hui en vigueur en Communauté Française de
Belgique est fier de souscrire à ces quelques principes. Le projet éducatif « Pédagogie
nomade » ne fait pas exception à la règle.
À mon sens, pour l’avoir constaté de visu, ce projet se distingue cependant de tous les
autres sur un point précis : il a d’emblée fait le choix de prendre à la lettreces énoncés,
puis de se donner les moyens de les mettre réellement en application.
« Pédagogie nomade » est bien à cet égard une école « différente » en Communauté
Française.
À l’inverse de se qui se pratique communément, il y a été décidé de ne pas se satisfaire
de la seule énonciation de ces quelques principes de base. De ne pas les envisager dans
leur généralité la plus abstraite (au titre de simples slogans), comme quelque fanfreluche
que l’on agite au moment opportun (en général le premier et le dernier jour de l’année
scolaire) afin de « donner sens » à une « mission » qui apparaît bien vite, chaque fois à
nouveau, comme impossible (en général dès le second jour de l’année scolaire).
Tout au contraire, à « Pédagogie nomade », l’élaboration collective d’un sens de la
critique et de l’auto-critique, la responsabilisation effective d’élèves qui, par exception,
ne sont pas ici ravalés au rang de petits singes, la création parfois douloureuse mais
bien réelle de normessoutenant un véritable vivre-ensemble, un apprentissage et un
enseignement ni régressif ni débilitant sont devenus les bases concrètes qui guident au
jour le jour la vie collective d’une poignée d’élèves, de parents et de professeurs. Ce qui
on s’en doute ne peut aller ni sans joie ni sans peines.
Il reste que l’on n’avait jamais vu ça : une école où tout ce qu’on se promet de faire ne
correspond plus à tout ce que l’on va bientôt s’empêcher de réaliser, tout le reste du
temps, et de toutes les façons possibles.
Cette fidélité à quelques principes élémentaires – fidélité qui ne va pas sans une sorte de
naïveté calculée – explique la nature des choix pratiques qui organisent la vie de l’école,
et qui sont en l’espèce, il faut bien le reconnaître, très spécifiques, peut-être originaux.
Ce sont eux sans doute – en particulier lorsqu’ils appellent une refonte des principes
hiérarchiques habituels et une mise en question des modes de transmission normaux
du savoir – qui provoquent de-ci de-là quelques cris. Dans le pire des cas, ce sont eux
qui justifient implicitement (inconsciemment ?) l’une de ces descentes policières qui
comme à l’accoutumée ne ridiculise que policiers et petits juges.
Mais au vu de la différence, justement, qu’insinue dans le champ scolaire de la
Communauté Française de Belgique le projet « Pédagogie nomade », qui s’étonnera
qu’il suscite le plus souvent l’irritation et la colère ? On ne s’étonne pas non plus que le
phénomène de rejet s’accompagne à la fin d’un désir de destruction du corps étranger.
Je me plais à remarquer qu’au même moment la faillite de l’école traditionnelle
s’affiche partoutet sans la moindre pudeur, dans des cartes blanches journalistiques, des
débats télévisuels, ou encore dans les conversations quotidiennes, notamment celles des
professeurs et des écoliers.
On le sait, la qualité de son enseignement est partout moquée sinon méprisée ; sa
capacité civilisatrice est depuis longtemps mise en doute. Il se dit même qu’elle n’est
plus capable de jouer correctement son rôle essentiel, qui est de créer des individus
dociles et productifs. De fait, sa « mission » d’intégration de travailleurs conformes,
dotés d’un comportement économiquement responsable et normalement adaptés au
marché du travail, laisse maintenant à désirer1. L’échec est en somme patent.
L’échec est complet, personne ne songe plus à le camoufler ; on n’en colporte pas moins
bruyamment des vœux pieux en rapport avec le Citoyen, la Cité et le Sens Critique ; or, et
simultanément, on n’a pas ou plus tellement envie que « Pédagogie nomade » bénéficie
de l’autonomie minimale qui lui permettrait de mener à bien ce que cette institution, à la
différence des autres, se propose effectivement de mettre en pratique : un sens critique
de la citoyenneté.
La conjonction de cet échec et de ce qu’il faut bien appeler un « désir de répression »
doit donner à penser.
Se tenant pourtant bien loin d’un tel échec, « Pédagogie nomade » possède la modestie
des naïfs (et des roublards) : personne n’y a jamais prétendu que ce projet détenait ou
constituait une « solution », ou qu’il permettrait à tout un chacun de « réussir ».
Il s’y agi plutôt de construire des problèmes, sans garantie aucune de les résoudre. Le
but est de les poser avec justesse; par exemple, de poser avec justesse la question de
la « réussite » elle-même en tant que problème. De façon concrète, et à la différence,
encore une fois, de ce qui se fait ailleurs, les problèmes ne sont pas ici niés, ou déniés,
ou ignorés, ou purement réprimés.
D’aucuns le savent, lorsque la vie n’est pas absente les gens font l’amour, ils parlent,
ils mâchent du chewing-gum, ils fument, ils ne sont pas d’accord, ils se transmettent
des maladies et des idées etc., ceci dans la joie ou la violence, dans la finesse ou la
bassesse, selon. Et cela fait problème.
Le pari de « Pédagogie nomade » a été de prendre acte de cela, et de le prendre à bras-lecorps. C’est seulement alors que tous ces éléments – lesquels sont de fait impliqués dans
tout processus d’apprentissage et sont comme tels indissociables de la vie de n’importe
qu’elle école – ont pu commencé, positivement, de faire problème. Lorsque l’on a pris
acte du fait qu’il faudra bien vivre avec, s’ouvre la possibilité de tracer collectivement le
cadre où enfin penserces problèmes, sans les étouffer, et sans non plus se laisser étouffer
sous eux.
Il est étrange de constater qu’en général, à l’école, rien de tout cela ne semble poser
problème. C’est bien simple, tout s’y passe comme si cela n’existait pas (selon la
logique de la cour de récréation : « on disait que… »). Donc forcément, pour ceux-là,
le fait qu’une école différente existe ne peut être vécu que comme un grave problème.
Quelque chose qu’il faudra bien supprimer. Pour parler clair, on va reprendre en main
les gentils (mais bruyants) beatniks.
J’observe qu’une seule initiative, elle-même minuscule, fort locale – d’ailleurs conquise
de haute lutte –, dont le défaut majeur est de prendre à la lettre, au sérieux, une certaine
forme d’autonomie de la pensée et de l’action dans la vie scolaire quotidienne, cela, qui
est peu de chose, on en conviendra, pour d’aucuns est encore de trop, et leur paraît trop
insupportable.
L’affaire qui est à l’origine de ce serrement de vis nouveau est comme toujours
ridicule. Un esprit que l’on dira paranoïaque y reconnaîtrait même certains traits
caractéristiques du « coup monté ». Je ne suis pas de ceux-là. Je me borne à
constater que l’on ne greffe pas sans mal sur un corps moribond, ou pourri (le réseau
de l’enseignement de la Communauté Française de Belgique), quelque chose de
« différent ». C’est-à-dire, en toute rigueur, quelque chose qui ne serait ni mourant ni
répugnant.
En ma qualité d’aspirant du FNRS, j’ai constaté à de nombreuses reprises (lors de
conférences, cours, journées d’étude et conseils de classe) ce que je n’avais jamais
découvert dans l’école qui – malgré elle – m’avait donné accès à l’Université : une autocritique lucide et permanente ; la volonté de poser crûment des problèmes habituellement
refoulés ; des débats d’une grande qualité intellectuelle où l’élève est considéré en tant
qu’il sait quelque chose (non pas en tant que pur réceptacle d’un savoir du reste mal
maîtrisé par celui qui s’estime à tort capable de l’expliquer) ; l’essai constant de penser
par soi-même ; la volonté de construire et de s’approprier un enseignement plutôt que de
le subir et de l’imposer ; l’idée que l’école engage de façon totale la vie sociale de ceux
qui la composent et, réciproquement, que l’école n’est rien d’autre que ce qu’ils en font
; des individus en santé et parfois séduisants.
Les tensions régulières, faites de surveillances et de menaces, dont ce projet – accepté,
je le répète, du bout des lèvres –, a depuis le début de sa réalisation été le lieu, cette
nouvelle tentative de déstabilisation, plus insidieuse et fondamentale que les autres,
tout ceci pourrait inciter au désespoir. En vérité on ne peut se défendre d’un certain
mouvement d’humeur face à la constance d’un tel acharnement mesquin, quand
on y reconnaît une fois de plus une piteuse réaction des tares classiques de notre
enseignement, la Bêtise, la Peur et l’Hypocrisie.
Car ce qui s’oppose à l’existence de « Pédagogie nomade » révèle ici par contraste sa
véritable nature : il est une petite chose idiote, craintive et mensongère. Et il est vrai que
je ne peux mieux désigner les écoles de la Communauté Française de Belgique où j’ai
moi-même perdu mon temps et, pour un moment au moins, ma joie.
Dans une perspective philosophique et politique, le point essentiel révélé par cette
expérience éducative et pédagogique est le suivant : une initiative de ce type ne peut
s’autoriser que des garanties qu’elle se donne elle-même ; elle ne peut rien attendre des
institutions qui peut-être, en un autre monde, meilleur celui-là, devraient la soutenir – et
qui à cette heure ne placent dans les roues de la machine nomade que quelques pauvres
bâtons.
Or – et c’est le point – voilà quelque chose qu’il ne s’est jamais agi de déplorer. On avait
mieux à faire. Il fallait seulement faire avec (avec ces obstacles, c’est-à-dire sans ce
soutien). Comme chacun à « Pédagogie nomade » le sait, le dit et le vit, il y a des choses
que l’on ne demande pas mais qu’il faut savoir prendre. Ainsi en va-t-il – par définition
– de l’autonomie.
Au final, ces simagrées disent beaucoup du triste état de qui les organise mais rien du
tout de la puissance de ce qui se pense et s’expérimente à Limerlé.
C’est ce qui autorise un dernier jugement. Malgré cela, malgré tout, « Pédagogie
nomade » continuera, comme on dit, de persévérer dans son être et dans son existence.
C’est que cette institution(j’y insiste) en a la force, les moyens, et qu’elle en sait la
nécessité.
Il est notoire que l’on ne peut en dire autant de ce corps stupide et agonisant qu’est
l’enseignement non différenten Communauté Française de Belgique. Lequel réclame
parfois pire que le mépris : l’indifférence.
(Footnotes)
1
On peut penser qu’une seule fonction est assumée avec efficacité par l’école aujourd’hui :
elle est toujours une instance privilégiée de reproduction de la structure d’ensemble des
rapports de forces (économiques, sociales, culturelles et symboliques) définitoires de la
société en général (forces que l’on sait inégalitairement réparties). Il est remarquable que
la machine scolaire ne remplisse jamais aussi bien sa fonction implicite que lorsqu’elle
dysfonctionne absolument de tous les autres points de vue.
Thomas Bolmain
ULg – département de Philosophie
108
Québec, le 7 septembre 2010
L’hiver dernier, j’ai eu la chance de faire un stage dans une école alternative de Bruxelles.
J’ai profité de mon passage en Europe pour explorer des initiatives pédagogiques pouvant
inspirer mon cheminement professionnel. J’ai cogné à la porte de quelques écoles en
Belgique, France et Angleterre. Seulement deux m’ont fait grâce d’une réponse positive.
L’une m’a offert une seule journée et Pédagogie Nomade m’a accueillie quatre jours. Quatre
jours… de merveilleuses découvertes.
À PN, je me suis très rapidement sentie chez moi. Avec mes yeux d’apprenante, j’ai regretté
de ne pas avoir eu la chance de vivre une telle expérience. J’étais une élève douée. Le cadre
scolaire m’a maintenue dans un état de famine intellectuelle. Si j’avais eu la chance de
connaître une école telle que Pédagogie Nomade, j’aurais tout simplement trouvé des outils
et du soutien pour mon épanouissement intellectuel et personnel. J’ai plutôt perdu tout intérêt
aux apprentissages, cloisonnée dans un cadre normalisant où il ne fallait pas trop en faire…
C’est en rêvant d’une école différente que quelques années plus tard, j’ai entamé des études
en sciences de l’éducation.
Mes yeux d’étudiante en sciences de l’éducation, d’enseignante en formation, ont été
grandement réconfortés de constater que de telles initiatives soient mises en routes. Des
discussions avec les enseignants, élèves, parents d’élèves et membres de la communauté,
du chemin parcouru par PN en si peu de temps, des fondements philosophiques et
pédagogiques de l’école, de l’ambiance, de la passion du personnel, de l’espoir des élèves,
de la participation à la vie quotidienne de l’école, des ateliers offerts, de l’assemblée
générale, de la gestion des menus, des l’ampleur des projets mis en route, notamment du
cabaret Brassens, de l’implication de Thomas, de plusieurs élèves, enseignants, parents, amis
et membres de la communauté dans ce projet. De la maison d’édition. De tous ces livres
que j’ai acheté, que j’ai adorés, que je vais introduire à quelques camarades, collègues et
professeurs de l’Université où j’ai fait mes études.
À dire vrai, je ne sais pas si un projet tel que Pédagogie Nomade serait le remède à tous
les maux scolaires. Mais je sais qu’il est la solution pour plusieurs d’entre eux. Et je sais
que c’est dans l’esprit qu’il a été mené jusqu’ici qu’il doit continuer, par respect pour tous
les acteurs qui y croient, qui placent de grand espoirs en ce projet : enseignants, parents,
élèves, famille, amis, membre de la communauté, professeurs d’université et de haute école,
étudiants en enseignements… Toute une équipe s’est constituée autour d’une initiative
audacieuse et astucieuse qui pourrait faire une grande différence pour plusieurs jeunes. Il faut
donner le droit et la liberté à Pédagogie Nomade d’exister pour et par elle-même.
Et si on laissait la chance à quelques jeunes de vivre des succès autrement? Et si, cette fois,
on ne tuait pas le poussin dans l’œuf?
Laurianne Lafontaine
Étudiante en sciences de l’éduca"on à l’Université du Québec à Trois-Rivières.
Une école : autrement.
L’école est en crise, en Belgique comme ailleurs. Nous ne savons que difficilement
donner le goût d’apprendre dans une société qui propose un avenir flou et plutôt terne.
L’autorité aveugle et la sanction automatique ne semble définitivement pas apporter de
solution pérenne et démocratique.
Pédagogie Nomade reste la plus belle et la plus courageuse initiative que je connaisse
dans le domaine de l’éducation.
J’ai eu l’occasion, dans le cadre de mon travail, de suivre et d’enregistrer le déroulement
de la première année d’existence de Pédagogie Nomade. Que dire de ces moments vécus
dans cette école ? Ils m’ont émus très sincèrement. Il n’y a rien de très compliqué. C’est
juste la confiance portée en chacun, prof vers élèves, élèves vers profs qui installent
un climat serein.J’ai pu constater lors de ce travail une implication extraordinaire de
l’équipe pédagogique basée sur une un réel dialogue profs/élèves, de nombreux moments
de travail pour trouver les solutions adaptées aux problèmes rencontrées, de réunions de
professeurs constructives et sérieuses.
J’ai vu des élèves au cours de ces 2 années relever la tête, devenir adulte, respectueux
des autres et prenant plaisir à venir à l’école, « comme des fleurs qui manquaient
d’eau... ».
Je ne fait preuve ni d’angélisme, ni d’optimisme exagéré. Ce projet relève d’un vrai
courage autant pour l’équipe pédagogique et des élèves que du ministère.
J’ai eu l’occasion de pouvoir proposer 3 ateliers Radio/technique du son en 20092010. Pour ces jeunes en recherche d’un avenir : découvrir des métiers possibles, leurs
permettre d’être équipés pour les
concours d’entrées aux écoles de technicien son est une opportunité inestimable et
irréalisable dans d’autres structures.
Ces interventions extérieurs sont aujourd’hui impossible par manque de financement.
Pourtant elles permettent une vraie plus-value pédagogique...
Je ne peux que communiquer ma tristesse d’apprendre que P.N. est maintenant en grande
difficulté. Je ne comprend pas l’éviction du professeur de français. Mr Benoît Toussaint
qui reste l’un des tous meilleurs professeur de français que je connaisse. Je regrette que
PN soit obligé de se battre pour sa survie alors qu’elle devrait prendre ce temps pour
s’occuper de l’apprentissage des élèves.
Il faut du temps à un tel projet pour arriver à maturation. Il faut de l’humilité pour
accepter une autre façon. Il faut de l’humilité pour remettre en cause les principes
classiques de l’école. Il faut de la confiance en l’équipe qui souhaite, évidemment; que
du bon pour les élèves.
PN veut être une école, simplement mais autrement. Laissons lui le temps de grandir.
Pourquoi avoir créé cette structure si c’est pour la tuer dans l’oeuf ?
Christophe Rault
Auteur radiophonique, ingénieur du son, co-fondateur d’ARTEradio.com
Chers amis de la Pédagogie Nomade,
Ayant fait connaissance avec l’équipe de la Pédagogie Nomade il y a deux étés lors de
la fête d’ouverture à Limerlé, je suis revenue vous voir l’année dernière avec 20 élèves
de la cinquième année de l’Athénée Freinet De Wingerd à Gand. En tant qu’école de
méthode avec des racines communes – le mouvement Freinet – nous étions intéressés
de rencontrer les jeunes de la Pédagogie Nomade. Malgré le froid d’octobre, vous nous
avez reçus dans la chaleur de votre village, de votre école, de votre maison. La visite
a été une aventure, un défi, une lutte pour certains parmi nous, eh bien oui il fallait
avoir le courage de parler français avec des ‘locuteurs natifs’ venus de tous les coins
de la Wallonie, partie du pays souvent mal connue par nous. Certains ont été touchés,
d’autres charmés, d’autres encore bouleversés quand ils ont constaté qu’on pouvait
avoir le courage de faire une école vraiment ‘différente’ de la nôtre – De Wingerd /
La Vigne – qu’ils estimaient pourtant déjà spéciale. Si chez nous la participation des
élèves existe bel et bien, à la Pédagogie Nomade elle est la base de toute activité, de
toute décision. En effet, la participation existe chez vous à tous niveaux : des contenus
des projets de cours à la comptabilité, de la manutention des ordinateurs à la gestion
de la vie en communauté. Par conséquent, nous avons cuisiné ensemble, nous avons
participé aux cours, nous avons échangé des idées lors des promenades dans les
bois, nous avons vu un film de votre choix, nous avons travaillé ensemble dans votre
potager, les musiciens wallons et flamands se sont unis le soir du free podium, etc.
Quelques mois plus tard, vous êtes venus nous voir à Gand, où nous logions tous
ensemble, Flamands et Wallons, dans un site de scouts. On a répété la formule de la
vie en communauté pendant quelques jours, cette fois-ci près d’une ville historique.
A notre grande surprise, vous étiez 20 à venir nous voir. L’apprentissage de la langue
néerlandaise ne faisait même pas partie du curriculum d’une grande partie de vos
jeunes. Cela nous a touchés : c’était la preuve que l’échange était plus que réussi.
Cette année, une vingtaine d’élèves flamands du Wingerd sont anxieux de venir vous
voir à Limerlé à leur tour. En effet, ils ont parlé avec nos jeunes qui sont venus vous
rencontrer l’année dernière et ils ne voudraient perdre l’occasion d’un échange avec
vous pour rien au monde.
Malheureusement, nous venons d’apprendre aujourd’hui que notre projet en commun
est en péril puisque votre projet de la Pédagogie Nomade l’est également. Sachez que
nous sommes solidaires avec vous, que nous appuyons la PN de tout cœur et que nous
sommes convaincus qu’il s’agirait d’une perte énorme pour les jeunes qui reçoivent la
chance de faire leurs études secondaires dans le contexte particulier créé par l’équipe
de Pédagogie Nomade et par son fondateur et son inspirateur Benoît.
Amitiés,
Sylvia Derycke
enseignant de français à l’Athénée Freinet De Wingerd à Gand
L’urgence et le manque de temps rendent impossible de tenir un discours articulé tant
sur Pédagogie Nomade que sur les événements récents qui la concernent. Peut-être,
c’est une occasion de ne pas rater d’apprendre à exercer une certaine parcimonie vis-àvis des mots, à mieux en organiser l’usage.
Faute de pouvoir réellement parler de l’intérieur d’une pratique, on attendrait des
lignes qui vont suivre qu’elles fournissent une analyse de la signification et des
enjeux d’une expérience telle que Pédagogie Nomade; qu’elles disent quelque chose
à propos de ses principes, de ses sources d’inspiration, de ses idées-guide; et encore,
qu’elles fassent état d’une situation, désormais généralisée en Europe, de crise des
institutions de l’éducation, d’impasse des pratiques de transmission des savoirs, d’un
destin qui s’annonce trouble et incertain tant pour les jeunes générations que pour
les formes de la vie civile. Après tout, ce sont des choses de ce genre qu’on attend
des «gens qui écrivent» (en jargon actuel: les «chercheurs»; en Français archaïque:
les «intellectuels») lorsqu’ils sont interpellés par une conjoncture ou un événement.
Mais ce genre de choses justement – c’est à la fois trop et trop peu. Car il est des
interpellations auxquelles on ne peut répondre convenablement qu’en agissant
brusquement, voire en réagissant par un seul bond.
Une partie toujours croissante de nos sociétés, de leurs choix et de leurs structures a
cessé de se laisser orienter par l’idée que l’existence et la reproduction d’une strate
incompressible de «laissés pour compte», ou «laissés de côté», répresente quelque
chose d’intolérable. Il devient toujours plus facile d’accepter que la production en série
d’hommes-chevaux, d’hommes-bras, d’hommes-ressorts, serait un prix raisonnable
à payer pour assurer l’ordre social, la scientificité des approches et des méthodes,
le respect des contraintes financières et le service du «public» anonyme des grands
nombres, des pourcentages et des moyennes.
Pédagogie Nomade est l’un de ces rares lieux où cette résignation, ou lassitude, qui est
en passe de nous envelopper, rencontre une résistance. Ce qui entraîne nécessairement
des incompréhensions plus ou moins intéressées, des hostilités plus ou moins
innocentes.
Les difficultés que rencontre Pédagogie Nomade, les ombres qui éventuellement
pésent sur son avenir, ne peuvent que faire l’objet d’une grande inquiétude et appeller
à l’expression immédiate d’une solidarité.
Andrea Cavazzini
ERRAPHIS (Université de Toulouse II-Le Mirail)
Madame, Monsieur,
on sait combien l’enseignement classique peut poser des problèmes, générer des
formes d’exclusion parfois violentes lorsque les élèves ne parviennent pas à se plier
à ses normes ou à y trouver des voies d’émancipation. Tout l’intérêt de Pédagogie
Nomade consiste justement dans la proposition d’une autre manière de faire et de
vivre l’école qui permettent à ces élèves de ré-adhérer à l’école, de ne plus seulement
la voir, dans le meilleur des cas, comme une obligation par rapport à laquelle on
s’acquitte plus ou moins bien, dans le pire des cas, comme un fardeau plus ou moins
ravageur pour la personne, mais comme un lieu de vie dans lequel il devient possible
de s’émanciper ensemble. Pour le formuler simplement, cela doit être le seul endroit
où j’entends dire qu’on aime l’école, qu’on n’a pas envie de la quitter, qu’on y apprend
des choses, et cela d’abord parce qu’on y est pas pris pour un con, infantilisé, mais
qu’on y est considéré comme l’égal de toute autre personne.
Pour tout ça, je répète mon soutien indéfectible à l’école Pédagogie
Nomade et à tous ceux, profs, élèves, amis, qui y travaillent.
Damien Darcis
Doctorant en Philosophie
Madame, Monsieur,
nous sommes très favorables à l’existence d’écoles telles que Pédagogie Nomade
à Limerlée. En effet, elles permettent à des jeunes au ban d’une structure classique de
réintégrer un cursus scolaire, une vie sociale, un apprentissage adapté et d’avoir des
buts, des projets et un épanouissement. C’est vital pour certains jeunes !
Aussi mon époux et moi-même apportons notre soutien à une école (trop rare) de
ce type et à leurs enseignants très engagés et motivés.
Docteurs Jean-Michel et Corinne Darcis-Dubois
Le!re de sou"en à Pédagogie Nomade.
PN, ça veut pas dire Père Noël. D’ailleurs à ce PN-là, on ne lui fait pas
d’cadeaux! Pourtant cette pédagogie offre bien des choses à ceux à qui elle s’adresse.
Mais à qui donc?
A tous! Pas seulement, pourrait-on croire du haut de sa fenêtre, à des ados rebelles,
hors normes et fichus de toutes façons...
J’y suis passé là-bas, plusieurs fois, et c’est de bien belles leçons de vie que l’on y
apprend, que l’on soit petits ou grands. La vie en collectivité, le savoir-se-débrouillerpar-soi-même (ou « l’autonomie », dit-on en langage spécialisé), la communication
de personne à personne, sous un mode égalitaire et non d’étiquette à étiquette ou
d’uniforme à uniforme (maître/élève, citoyen/ policier, jugé/juge...), la découverte
de pratiques variées, l’entraide... Et j’en passe et des meilleurs, bref, tout ce que,
personnellement, je tends à vivre tous les jours dans ma vie d’adulte et que je souhaite
à chacun d’entre nous.
Dans mon pays, il y a un adage: « liberté, égalité, fraternité », clame t’on comme le
coq chante. Dans les faits, c’est pas très bien appliqué, mais j’ose croire encore que
mon tout petit, qui fête sa première semaine de vie, aura la possibilité de vivre dans
une société, quelle soit belge, wallonne ou française, où l’on met tout en oeuvre pour
laisser la chance à chacun de pouvoir penser par soi-même, faire son propre chemin en
fonction de ses désirs, le tout dans un partage d’expériences et un climat de respect le
plus absolu.
Heureusement, il existe des écoles comme PN qui contribuent, à mes yeux, à ce projet
de société et ça me réconforte quand j’y pense... Je me dis qu’il existe des lieux où mes
espoirs deviennent réalités.
Lors de mes divagations, je crois que cette pédagogie alternative deviendra pédagogie
normale, ou de la norme, ou de la majorité, bref, pédagogie de base à laquelle le
plus grand nombre se réfère. Pédagogie où le véritable objectif auquel on travail
sincèrement et concrètement est de donner à la personne les outils nécessaires
à décrypter son milieu, afin de se faire un avis propre et réfléchir par soi-même
(« émancipation » en langage spécialisé).
Et pourtant, et pourtant... En cette rentrée, les nouvelles sont bien sombres de ce côtélà.
Il y a deux ans, j’applaudissais la communauté française de Belgique d’avoir l’audace
de soutenir un projet comme PN. Naïvement, je pensais: « Ah! Ces Belges! Ils ont
tout compris! Espérons qu’ils ne fassent pas comme en France où les écoles dites
expérimentales le sont encore après 30 ans d’existence! Espérons qu’ils fassent comme
Marcel Hicter s’inspirant des politiques culturelles de Malraux: prendre le bon de cette
politique (s’intéresser à la cause du peuple...) sans le mauvais (...dans une logique
pyramidale: ceux qui savent, ceux qui connaissent la culture, l’art, le Beau, doivent
le transmettre à ceux qui ne connaissent pas = démocratisation culturelle). » (NB:
Monsieur Hicter a lui, défendu la démocratie culturelle: tout groupe vit autour d’une
culture et chaque culture mérite que l’on s’y intéresse (= démocratie culturelle).).
Aujourd’hui, j’apprends qu’il est impossible pour les professeurs et élèves de PN
de pouvoir travailler à ce pourquoi ils sont là, car leur mode de fonctionnement est
menacé: ils doivent, encore et toujours, justifier leurs actes, montrer patte blanche, leur
équipe pédagogique a été mise à mal...
Comment pouvoir se développer sereinement dans un tel climat? Comment ne pas
penser que les pouvoirs décisionnels ne font aucun effort pour soutenir ce projet tout
jeune, voire même, sont les acteurs directs des difficultés auxquelles doit faire face
PN?
J’imaginais déjà mon fils aller à l’école là-bas. Il aurait pu y être épaulé à construire
son chemin, entouré d’autres que ses seuls parents, avec des professeurs attentifs à ce
qu’il est et non à ce qu’il doit. Il y aurait trouvé des ateliers où il aurait pu découvrir
maintes pratiques et techniques lui donnant la matière à construire son projet de vie.
Il aurait découvert des domaines lui permettant d’aller plus loin dans ses réflexions,
l’amenant à comprendre ce qui l’entoure...
Il est clair pour moi que ce n’est pas ce que l’enseignement classique offre, c’est
pourquoi j’estimais grandement la Communauté française de Belgique lorsqu’elle
acceptai le projet de PN. Je pensais le ministre concerné d’alors, clairvoyant sur la
nécessité de s’intéresser concrètement à de nouvelles pédagogies pour le bien de
l’enseignement à venir!
Certainement je m’étais trompée, sans doute n’était-ce encore qu’une stratégie
politique de plus pour gagner la confiance de certains. Le normatif reprend le dessus,
l’intolérance à la différence a l’air définitivement plus fort. Naïve! Idéaliste! Utopiste!
Ça m’apprendra à prendre mes rêves pour des réalités!
Cependant, quoi qu’il en soit, et quoi qu’il advienne du système que l’on veut
nous imposer en étouffant les nouveaux projets plus audacieux, vous pouvez compter
sur moi, à mon fils je transmettrai toujours: « Face à ceux qui veulent te mettre dans
une case, te coller une étiquette, t’imposer une manière de faire, d’être, de penser, dit
« non ». A l’image de ceux qui combattent un totalitarisme, résiste, au risque peut-être
d’être chassé, voire pire, tu agiras au moins en homme libre et conscient. »
Elisa Robert
mère d’un membre de la future généra"on,
diplômée en psychologie, sciences de l’éduca"on et psychomotricité,
travaillant dans le secteur socioculturel et de l’éduca"on permanente à Bruxelles.
Bonsoir,
Ma fille Marion Delforge me communique votre adresse avec la prière d’écrire un
texte à propos de ce que Pédagogie Nomade veut dire pour moi et peut-être pour
d’autres.
Je suis le grand père de Cosmos Pans et j’ai pu observer et, d’une certaine manière,
vivre l’aventure de Pédagogie Nomade depuis ses débuts effectifs. Depuis ce que j’ai
envie d’appeler son incarnation, tant j’ai eu l’impression que la démarche était ancrée
dans le réel, dans l’ici et maintenant avec les pieds bien dans la terre.
C’est amusant ( je ne crois pas au hasard) que le courriel de la même journée m’amène
une citation que je vous livre, tant elle est adéquate (elle est de Ramuz, dans « besoin
et grandeur »).
«la plupart des hommes manquent d’imagination. Ils ne voient pas que ce qui est,
pourrait ne plus être. Ils ne voient même pas que ce qui est, pourrait être autrement; ils
ne distinguent pas, au-delà de ce qui existe, le possible ».
« il faut leur faire voir le possible et qu’il ne tient qu’à eux de se réaliser. »
C’est, je crois, ce que tente de réalisé Pédagogie Nomade avec ses élèves. Et c’est
aussi semble-t-il, et je le dis avec tout le respect qui lui est du et la conscience des
difficultés de sa tâche, ce que ne voit pas clairement le « pouvoir organisateur » ou
comment appelle-t-on cet ensemble
société- ministère-autorités-cabinet ?
Il me semble que l’enseignement est en crise depuis des années: les nombreuses
tentatives de réorganisation en font foi, ainsi que les échecs et décrochages d’élèves
pourtant moins doués que les autres. Alors pourquoi diable vouloir « normaliser »
et faire rentrer dans les rangs une expérience portées par la base (des enseignants
enthousiastes et des élèves enfin motivés) ? Ce qui est différent est-il tellement
dangereux et dérangeant ?
Soyons cyniques: après tout, il ne s’agit que d’une petite centaine d’élèves: s’ils se
plantent, tant pis pour eux, on les auras prévenu. Mais s’ils réussissent, qu’elle joie, et
qu’elle source de fierté pour ceux qui les auront laissé prendre des risques.
Revenons en à nos moutons: en l’occurrence, mon petits fils, que je vois enfin aimer
son école et en être fier. Il devient un homme, je suis fort impressionné par son
évolution. Je crains qu’il ne retourne jamais sur les bancs qu’il a détesté.
Laisser faire sans réagir serait trahir.
Je souhaite donc de tout cœur que le bon sens, et pourquoi pas, la confiance réciproque
renaissent.
Jean Delforge
Sentiment d’une école
L’école a un toit
elle ne cesse de s’inventer
Il fait froid tans pis !
Il suffit de prendre son temps
Gardez confiance dans ces jeunes
madame monsieur
Ils ne sont pas cons
Qu’a-t-on réellement perdre ?
Notre jeunesse obéissante ?
Mais pourtant :
La Belgique tremblante,
La nature fatiguée
Le futur alambiqué
Allons ! soyons réaliste
Faisons vivre ces jeunes
avant qu’il ne soit trop tard
«Il faut trembler pour grandir»
La vie est courte
L’école est longue
Il ne sert à rien de s’accrocher
aux chimères du passé
L’autorité est une preuve de faiblesse
La confiance est une force.
CR
Chers Amis de Pédagogie Nomade (parents, enseignants élèves),
Ce petit message de soutien et d’encouragement aux actions que vous menez pour
sauvegarder votre « institution » PN.
La FAPEO soutient pleinement ce projet que nous avons appris à connaître via
Jacqueline Bailly et Benoit Toussaint.
Toute expérience qui a comme objectif d’accrocher, de « réconcilier » (l’élève avec
l’école) et de faire réussir les élèves qui à un moment de leur vie ont eu des difficultés
scolaires, ne peut qu’être encouragée.
Via l’Association de parents de votre école, la FAPEO est toute prête à vous soutenir
au plus haut niveau pour que vos demandes soient entendues.
Bonne chance et bien à vous,
Hira LACI
Chargée de missions et de la régionale de Bruxelles.
Fédéra"on des Associa"ons de Parents de l’Enseignement Officiel (FAPEO)
PN propose aux profs comme aux élèves une expérience aussi difficile que
précieuse : celle de la démocratie et (donc) de la responsabilité. Comment rendre le goût
d’apprendre aux élèves qui n’en veulent plus ? On a tout essayé : le redoublement, le
triplement, le passage en technique ou en professionnel, les récompenses, les sanctions,
les menaces. PN veut tenter quelque chose de radicalement différent et fait le pari le plus
risqué : celui de la liberté. Marre de te lever le matin parce que des types à qui tu n’as
rien demandé ont inventé une obligation scolaire jusqu’à dix-huit ans ? Marre d’obéir à
des règlements idiots ? Marre qu’on te force à apprendre des tas de trucs qui te soûlent
et qui ne servent à rien ? Ok, on supprime au maximum les contraintes externes et on te
donne la possibilité d’inventer. Inventer une manière d’apprendre, inventer une manière
de vivre ensemble à l’école. Donc, tout le monde s’en rend compte très vite, inventer
des règles et des contraintes. Et construire un projet de parcours scolaire qui, parce qu’il
sera choisi, ne pourra pas être abandonné au motif que « on n’en a rien à f. et on n’aime
pas qu’on nous force ». Du coup, nous voilà tous contraints à l’exercice de l’autonomie.
Impossible, pour les élèves, d’incriminer le règlement absurde, les cours trop durs et les
profs avec qui on a juste le droit de se taire. Impossible de transformer une absence ou
un travail non rendu en acte héroïque de résistance à une autorité arbitraire. Impossible
de justifier qu’on arrive en traînant les pieds par un « j’ai pas le choix ». Impossible,
pour le prof, de faire l’économie de cette question : « en quoi ce que je veux transmettre
mérite-t-il d’être transmis ? comment vais-je les persuader que cette question qui me
passionne présente un intérêt pour eux aussi ?» Impossible de se satisfaire de « c’est
le programme, on n’a pas le choix, il faut y passer » parce que les élèves, eux, ne s’en
satisferont pas, et qu’ils vous le feront savoir. Le projet PN est le plus exigeant qui soit.
Pas de moyens de pression, ni carotte ni bâton. L’enseignement réduit à son essence :
l’appétit d’apprendre, le désir de transmettre. Et ça suffit pour faire tourner une école,
ça ? Avec des élèves qui ne sont quand même pas les plus dociles de leur génération ?
Quelle naïveté, quelle candeur faut-il pour imaginer qu’un projet pareil puisse tenir la
route ?
Vraiment, PN, ça marche ? Oui et non, sans doute, selon le sens que l’on donne à
la question. Tous les projets n’aboutissent pas. La maîtrise de telle ou telle matière reste
parfois un idéal à long terme. La tentation de préférer facebook au cours de math reste
forte. Et l’absentéisme continue, je pense, à faire problème. Mais tout de même… Quand
on constate avec quelle détermination ces élèves, dont on devine que certains ont rêvé
quelquefois que l’école brûlait pendant la nuit, se battent aujourd’hui pour sauver PN,
quand on les écoute débattre, argumenter, négocier – avec quelle maturité – lors des AG,
quand on les écoute présenter PN dans les médias et répondre – avec quelle pertinence
– aux questions des sceptiques, quand ils vous disent qu’ils ont repris confiance, qu’ils
ont à nouveau envie d’apprendre, quand on les voit s’investir dans un projet scolaire,
quand ils vous demandent de continuer à parler de l’infini mathématique pendant le
repas et qu’ils reviennent le soir pour l’atelier philo, comment ne pas penser qu’il faut
absolument laisser une chance à cette école ?
Une chose encore : nulle part ailleurs, au cours de mon expérience professionnelle
d’un bon quart de siècle, je ne me suis trouvée dans une équipe aussi solidaire,
disponible, généreuse et qui avait un tel sens du bien commun.
Laurence Bouquiaux,
Professeur à l’Université de Liège
Professeur à PN en 2009-2010
« A toi, futur enseignant »
Ah te voilà, mais qui es-tu au juste ?
Combien de lignes peux-tu aligner et de quelles manières savantes peux-tu les arranger
?
Peux-tu les dire avec aplomb, comme un bon maître le doit ?
Lèves-tu le menton bien haut pour que porte ta voix ?
As-tu le regard frondeur de celui qui sait et aime qu’on le voit ?
Es-tu de ceux qui pensent qu’il est important de savoir que tu sais…ou de ceux qui
disent qu’ils doutent et parfois ne savent pas ?
De pas en pas tu as appris, petit à petit tu as grandi et toujours sans relâche tu as remis
sur la tâche tes efforts !
Efforts sur toi-même, peine, combat peut-être même ?
Quelle part de toi-même as-tu laissée à la raison, à la mémoire à l’objectivité des faits
?
Comment t’y es-tu pris pour t’oublier si fort, aussi longtemps et au nom de quelle
efficacité ?
Pourquoi nier que tu vivais, que tes sens et ton cœur étaient là ?
Qu’ils ne demandaient qu’à dire oui avec toi.
Pourquoi et quand, as-tu pris le parti de tourner la page du choc de l’expérience, des
risques qu’elle comporte et des richesses qu’elle fait naître, créant le tourbillon de la
vie ?
Qu’attendais-tu, en fait, pour laisser les questions se lier au plaisir de les poser, à celui
de ta curiosité d’enfant, pour celui de l’échange, pour la rencontre tout simplement.
Pourquoi as-tu consenti à tant de vaines affirmations et tant de souffrances à gérer le
savoir…à le tuer de toute expression humaine à l’enfermer dans ta tête.
Pourquoi ne pas l’avoir laissé courir près de tes rêves les plus chers, ceux de la joie,
ceux de la vie.
Et le choix de ce métier alors…il reflète quoi au juste ?
Une toute puissance ? Un déni ? Une non vie ?
Comment nommerais –tu celui qui va à l’échafaud les yeux bandés ?
Un condamné.
As-tu vécu en aveugle au point de fréquenter la mort de si près pour la gloire du savoir
sans te ressaisir jamais ?
Qui t’a mené sur ce chemin là ?
L’école ? Les maîtres ? Les savants ?
Les livres ? Les points ? Les punitions ? Les humiliations ?
L’ombre de toi – même ?
Et pourtant tu t’es donné tant de peine, cent fois, tu a remis celle-ci sur l’ouvrage.
Le travail était ta douleur et tu as tant souffert, mais tu n’es pas arrivé à être… tu t’es
condamné, comme à l’école ils te l’ont commandé !
Alors, tu as marché dans un brouillard épais et tu as souvent suffoqué, tu en as même
perdu un peu chaque jour, ta sensibilité et parfois jusqu’à ta liberté de pensée !
Reprends-toi, car la vie ne s’apprend pas, elle s’élance et crée, elle ne dort pas, elle se
pose, et l’apprentissage est là, dans ce mouvement incessant et dans le silence de ton
être, le savoir est blotti au fond de toi il n’y a qu’à le faire vivre et tu verras !
F. Boland
Madame la Ministre,
Pourquoi, des tentatives de sauvetage d’élèves exclus du système scolaire ne peuventelles faire leur chemin et vivre ce qu’elles ont à vivre ?
Pourquoi une expérience positive d’enseignement, construite à force de courage
d’engagement et de professionnalisme, doit- elle subir des décisions qui risqueraient de
la voir se détruire ?
Pourquoi de votre ministère aveugle et sourd faut-il que des décisions insensées tombent ?
Avec un petit groupe d’étudiants, afin de les former à l’étude critique des courants
pédagogiques, j’ai pu rencontrer des collègues- professeurs dans cette école sans qui des
dizaines d’adolescents n’auraient pas à ce jour terminés le cycle secondaire. Sans cette
école au projet différent ils auraient rejoint les exclus du travail donc d’une vie sociale
indigne.
La rencontre de cette école « alternative » qui pratique la pédagogie du sens de l’être faitelle tellement peur qu’il faille soit l’agresser soit lui retirer ce qu’elle a de plus vivant. Je
veux parler de son cadre.
Tout d’abord le temps, celui de sa construction, le temps que toute une équipe de
professeurs a donné entièrement à sa réalisation. Celui d’un projet novateur, car il est
à la fois le temps de l’apprentissage pour les élèves inscrits dans ce cursus qui leur
convient mieux que tout autre. C’est le choix de ces élèves et celui des initiateurs de
l’Ecole Nomade d’apprendre à son propre rythme qui donne toute la qualité à ce que
l’on y apprend. Le temps de la pensée, qui se pose et permet l’apprentissage de l’écriture
authentique.
Ensuite l’espace dont l’agencement ne rappelle en rien la rigidité des espaces scolaires
dans lesquels il arrive que des adolescents étouffent. Mais aussi l’organisation souple
et adaptée, donnant la possibilité de répondre aux besoins des élèves et qui est garante
d’un cheminement personnalisé et efficient de l’apprentissage pour chacun. Mais plus
encore, l’espace donné à la parole de chacun, l’espace réservé à la réflexion qui fondent
l’espace de la relation éducative dans cette école et créent une qualité d’écoute et de
dialogue peu commune dans la communication avec les élèves.
Ainsi, les étudiants guidés dans la visite par des élèves ont découvert des adolescents
responsables connaissant la réalité de leur école de manière précise et plus proche du
terrain qu’eux ne peuvent l’être lorsqu’ils vont en stage.
La grande critique de tout apprentissage n’est- elle pas d’être éloignée de la réalité ?
A Pédagogie Nomade cet obstacle est sans cesse surmonté par une implication citoyenne
de chaque élève.
Vous savez, Madame la Ministre, combien l’espace et le temps sont aussi les dimensions
nécessaires à l’homme pour vivre en collectivité. Pourquoi dès lors enlever au personnel
et aux élèves de cette école les moyens qui en découlent directement, à savoir : la
responsabilité démocratique dont ils disposaient jusqu’à aujourd’hui ?
Un système innovant a vu le jour à Pédagogie Nomade qui nous a convaincus, lors de nos
visites, qu’il était indispensable que de telles écoles puissent se développer davantage et
«tenir la route» dans notre pays. Elles seraient en quelque sorte le signe de « l’humain »
dans le système éducatif en Belgique.
Nos étudiants ont été bouleversés par ce que celle-ci apportait d’expérience « culturelle »
donnant sens à la vie des élèves qui la fréquentent.
En lui imposant des règles opposées et inadéquates à son fonctionnement, cette école
perdra tout le fruit des efforts consentis par ses promoteurs et verra l’avenir scolaire
d’adolescents compromis. Mais plus encore le constat de l’échec d’un changement
porteur de valeurs essentielles au développement de l’éducation des adolescents chez
nous.
Nous osons espérer que vous serez sensible aux dimensions de citoyenneté que Pédagogie
Nomade privilégie et au fait que cet aspect est indéniablement lié à l’auto gestion et à la
liberté de choix de son équipe éducative et de ses élèves.
Pour que notre système scolaire puisse un jour affirmer : « une autre école a vu le
jour, s’est donnée les moyens d’exister et a été approuvée et soutenue par les décideurs
politiques», nous vous demandons instamment de retirer votre décision malencontreuse.
Nous vous remercions pour l’attention portée à notre demande.
Françoise Boland psychopédagogue à la Haute Ecole de Bruxelles.
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PN, c’est quatre ans de travail de fourmi. Faire entendre sa voix, quoi qu’on dise, est
chose malaisée quand les oreilles n’entendent que les sons venus d’en haut. Il y a fallu
opiniâtreté, et surtout, polyphonie.
Les vrais spécialistes de l’école (profs, élèves, parents) et les observateurs attentifs
(chercheurs, travailleurs sociaux, politiques authentiques et étymologiques) ont uni
leur requête : il faut essayer ça, puisque de toute façon le navire fait eau de toutes parts
: décrochage (coût social), redoublement (coût financier), taux d’échec alarmant (coût
humain).
PN a vu le jour. L’expression est adéquate parce qu’il s’agit d’un être. Collectif, certes,
mais vivant. Et donc concret. Et donc imparfait. Et donc irréductible. Individu, à la
lettre, qu’on ne peut diviser.
C’est ici que ça devient compliqué, donc intéressant. Collectif et indivisible.
Un cabinet ministériel, de telle couleur, hérite d’un projet vivant, et relativement
impertinent1, lancé par un autre cabinet. Le premier ouvre une école parce qu’elle se
présentera comme différente. Face à cette différence, le second, en bon gestionnaire
qu’il rêvait de redevenir, la prie de se normaliser. Je veux dire lui ordonne de se plier
aux règles, les mêmes règles qui rendaient nécessaires sa création.
Qui peut y retrouver ses jeunes ?
Pas la police qui perquisitionne.
Pas le juge qui tranche.
Pas l’inspecteur qui a pour mission de vérifier et mesurer la conformité.
Qui alors ?
Peut-être les parents, dont les jeunes se retrouvent eux-mêmes.
Peut-être les jeunes, qui retrouvent un fil, et renouent quelque chose.
Peut-être les profs, qui vivent dans tous les sens du terme, le métier.
C’est ici que ça devient intéressant, et compliqué.
Qui peut monopoliser le regard expert sur l’école ?
Personne.
Qui peut disqualifier les acteurs concernés au quotidien ?
Personne non plus. Particulièrement ceux qui, investis d’une mission de bien public,
et d’un réel pouvoir sur les règles, mais d’une puissance d’action toute relative sur les
choses.
Mais si celui qui, tenant le couteau du côté du manche, affirme, avec toute la sincérité
du monde, nous n’en doutons pas, qu’il veut rendre humaine l’école, attractive la
profession d’enseignant, réduire la violence scolaire2, améliorer les performances de
l’école (humaines, sociales, intellectuelles) et en même temps asphyxie une école dont
parents, élèves, enseignants, se disent satisfaits, il y a quelque chose qui étonne.
L’étonnement, c’est le début de la philosophie. Et à partir de là, tout reste possible.
Laissons de côté la question « l’application d’une règle peut-elle prendre le dessus sur
les intentions qui ont guidé sa rédaction ? »
Les règles de l’école s’articulent autour du Décret Missions, et en bonne logique, ont
pour finalité réelle, mais parfois oubliée, la réalisation de ses objectifs, auxquels, tout
en bouclant la boucle, nous souscrivons.
Benoit T.
Des brèches, voilà ce qu’il y a.
Voilà ce qu’il y a à ouvrir dans ma vie, dans mon monde, dans notre monde. Dans nos
mondes.
Fissures, lézardes, tout cela n’effraie personne dans le monde de l’éducation. L’édifice
peut s’écrouler : l’essentiel pour eux est que ni air ni lumière ne traversent les murs.
*
Dans une autre vie, je fus élève. Élève bien élevé, élève élevé par l’école au pinacle de
la scolarité : l’Université.
Pourtant, au bout de cinq années d’études dont tous s’accordent à dire qu’elles sont
les plus difficiles dans notre beau pays, je me suis rendu compte que, pendant tout
ce temps, j’avais été distrait. Au bout de cinq années d’université, six années d’école
secondaire et autant d’école primaire, le tout sans le moindre faux pas, sans la moindre
faille, j’ai eu vingt-deux ans, et je me suis demandé : «Qu’est-ce que je fous là ?».
Je dois bien en conclure que, contre toute apparence, pendant toutes ces années, j’avais
été absent.
Non pas, bien sûr, absent au sens des registres, de l’administration, de l’obligation
scolaire.
Non pas, naturellement, au sens des enseignants, des apprentissages disciplinaires, des
compétences requises.
Mon corps et mon esprit étaient bien en classe, appliquant avec cœur et rigueur les
consignes, produisant ce qui était attendu.
Un anti-cancre, et pourtant : absent.
*
Alors, alors ? Quelle est donc cette mystérieuse part de moi qui se serait absentée de
l’école, tandis que tout mon être y était pleinement présent ?
Aujourd’hui, je peux le dire clairement, simplement. Ayant vu Pédagogie Nomade
dans son concret, son quotidien ; ayant vécu intensément tant de contrariétés immenses
et minuscules, de joies minuscules et immenses, je peux maintenant le dire : cette part
de moi qui était absente de l’école, c’est la liberté.
*
D’où ça me vient, ce gros mot de liberté, qu’auparavant je n’employais qu’enrobé
d’ironie, et avec des pincettes encore ? La liberté n’est qu’une sensation, infiniment
difficile à décrire ou à raconter. Un autre mot alors ?
À Pédagogie Nomade, j’ai compris que la condition pour qu’un enseignant puisse
seulement commencer sont travail, c’est la confiance.
Confiance dans chacun des élèves, c’est le centre, le nœud. Celle sans quoi le travail
n’a pas de sens.
Un élève qui, arrivant fin juin en fin de rhéto, semble toujours s’engouffrer dans
ses rêves de grandeur, sans produire quoi que ce soit de visible... comment ne
pas désespérer ? Et pourtant, en septembre, il a non seulement rempli les contrats
pour l’essentiel des disciplines, même pour le cours de maths ; non seulement il a
réellement appris des choses en remplissant ces contrats ; mais aussi, il nous a présenté
un chef-d’œuvre de façon magistrale, nous apprenant à nous tous présents, profs et
élèves, des choses passionnantes que nous ignorions.
Une élève de cinquième secondaire, cataloguée depuis l’école primaire comme «nulle
en maths», au point qu’elle en était intimement convaincue, au point que la simple
idée de penser aux maths l’empêchait de penser quoi que ce soit. Et dont je découvre,
in extremis, qu’elle a une capacité incroyable en calcul mental, au moment où elle
m’explique innocemment que, faute de machine, elle avait extrait mentalement la
racine cubique de 625 avec trois chiffres significatifs... (vous pouvez essayer, et écrire
à l’école si vous y arrivez).
Des exemples comme ça, chacun des professeurs de PN en aura quelques dizaines à
raconter. Des moments qui redonnent la confiance dans chaque élève, sa capacité à se
mobiliser au moment où c’est nécessaire, sa capacité à apprendre envers et contre tout.
Confiance dans les autorités administratives... on ne croirait pas, mais c’est beaucoup
plus difficile. Les jeunes sont peut-être incontrôlables, immatures, irrationnels - soit, admettons, même si ce genre de constats est grandement discutable. Mais des
fonctionnaires ? Comment réagir quand certains fonctionnaires se révèlent irrationnels,
immatures, incontrôlables ? On n’apprend pas ça dans les cours de pédagogie. Alors,
on doit l’apprendre sur le tas. Pédagogie Nomade, ça m’a servi à ça : me rappeler que
les fonctionnaires sont aussi des humains, fabriqués comme nous, à quelques détails
près, mais si peu, si peu. Et que si on les traite en humains, au moins on ne contribue
pas à leur devenir-machine.
C’est un peu comme pour les élèves, au fond.
Confiance dans les collègues, dans l’équipe... La condition pour que quelque chose
soit possible, quelque chose de neuf, quelque chose de juste. Pour que le travail ne soit
pas pur labeur, mais une mise en mouvement de quelque chose de plus que soi.
Au sein d’un collectif, toute confiance passe par la reconnaissance par chacun de la
singularité de chacun, et de la singularité du collectif dont tous font partie. Brigitte,
Benoit, Mireille, Siggi, Marie, Jean-Christophe, Maurine, Guillaume, Gil, Bob, mes
collègues de cette année écoulée, (sans oublier Séverine notre «jardinière») ; Charlotte,
François, Pierre-Nicolas, les anciens ; Agnès, Sylvain, Jacqueline, les nouveaux (oui,
Jacqueline, bien sûr) : aucun ne réagit de la même manière à une même situation ;
aucun ne projette une même vision du monde (et ce n’est pas non plus la mienne).
Et pourtant, même dans les tensions insoutenables, la solidarité est chaque fois
renouvelée, et vit bien au-delà du temps et de l’espace des engagements formels.
Parce que chacun a choisi d’être là, reconnaissant ainsi d’emblée la singularité de
Pédagogie Nomade dans son approche pédagogique.
Parce que chacun a choisi que l’autre soit là, reconnaissant ainsi d’emblée la
singularité de cette personne dans sa démarche professionnelle.
Cette double reconnaissance porte un nom, elle s’appelle cooptation. Elle a un prix,
celui de renoncer aux illusions d’équité et de qualité sur lesquelles se fondent les
mécanismes de désignation des enseignants dans l’enseignement de la Communauté
Française.
Pour terminer, j’ajouterai que le nom et le prix seront de la même famille si l’on
souhaite aussi de la solidarité entre élèves, et entre élèves et professeurs, dans
l’objectif commun de gai savoir et d’émancipation.
Nicolas Pieret, professeur de mathéma"ques à
Pédagogie Nomade du 21 novembre 2008 au
3 septembre 2010.
En juillet 2008, Benoît m’appelle. Il se présente et puis il parle d’une école
expérimentale. À ce moment-là, j’étais prof à temps plein dans une école de la
Communauté germanophone. Je ne ressentais ni le besoin ni l’envie de changer
d’école.
Pourtant, je suis allé voir. Et j’étais enchanté : tout était encore à faire, à construire
ensemble. J’ai pris 6 heures pour le cours d’Anglais. Puis, l’année d’après, 12, tout en
restant professeur à l’autre école.
Cette année-ci, je compte être professeur uniquement à Pédagogie Nomade, et pourtant
pas à temps plein, parce que je comprends qu’être professeur à temps plein n’est pas
possible si je veux bien faire ce que j’aime.
La situation actuelle m’incite à réfléchir, à écrire les raisons pour lesquelles j’ai choisi
d’être à Pédagogie Nomade. Et cette réflexion affirme encore plus que c’est cela que je
veux faire.
Cette école donne un sens à ce que je fais, car j’ai appris le vrai plaisir d’apprendre.
Le sens d’une école et, en ce qui me concerne, de la vie, c’est de partager le plaisir
avec les autres. Enseigner me semble impossible sans l’envie d’apprendre. J’ai fait
connaissance avec l’idée de l’égalité entre profs et élèves, qui maintenant me semble
évidente et indispensable. J’ai appris que le désir d’apprendre quelque chose peut
initier un apprentissage énorme et joyeux. J’ai appris la modestie et, soulagé de me
rendre compte qu’un prof ne doit pas absolument s’attribuer une énorme importance,
j’ai perdu ma timidité.
Ici, j’ai rencontré beaucoup de belles personnes, artistiques, chaleureuses, joyeuses
solidaires, tous avec le même but : faire école. Et quelle école étrange si on la compare
avec ce qu’on entend sur les écoles en général ! Pas de congés de maladie, pas de
violence, pas de souffrance ou de dépression. Pas de profs qui déplorent leur statut
dans la société, ni leur salaire. Au contraire, pour permettre une équipe plus grande,
nous avons tous choisi de ne pas prendre un temps plein. Pas de profs qui se moquent
des élèves derrière leur dos ou qui s’énervent parce qu’un tel n’a rien compris. Au
contraire, des discussions stimulantes et riches, des dialogues ouverts.
J’ignore comment on ne puisse pas comprendre ce qu’on fait. Ça me semble évident et
même simple. Parfois, j’ai l’impression que Pédagogie Nomade fait peur. Mais je ne
comprends pas pourquoi. Ce qui nous arrive maintenant m’échappe complètement. Ça
me fatigue, et cette dernière semaine, j’ai envie de me blottir contre le désespoir. Mais
grâce aux autres autour de moi, je résiste à cette envie. Les autres : ce sont ceux qui
ont choisi d’être là.
À mon avis, Pédagogie Nomade produit elle-même toute l’énergie dont elle a
besoin pour exister. Cet équilibre me semble très fragile : parfois on va au bout de
nos énergies ou même plus loin ; et d’autres fois, des choses si belles arrivent qu’on
est tous remplis d’enthousiasme, de sourires, de bonheur. Je ne peux pas imaginer
maintenir cet équilibre si on permet que des membres de Pédagogie Nomade soient
écartés et remplacés. Après tout, une école, c’est des personnes, à savoir profs et
élèves.
La préfète de l’Athénée Royal Vielsalm a décidé de donner un rapport négatif à
un professeur de notre école qu’elle n’a visité même pas cinq fois pendant l’année
scolaire précédente. Par contre, même le rapport des inspections semble apprécier
le travail de ce collègue. En plus de ça, pendant l’année précédente, un professeur
qui travaillait à la fois à Vielsalm et à Pédagogie Nomade, n’est presque jamais venu
jusque mars ; puis, il a complètement disparu. Pas de cours, ni de réunions, ni de
délibérations. Cette personne-là n’a pas obtenu de rapport négatif.
Je ne comprends pas. Si notre collègue est un bon prof, même aux yeux des
inspecteurs, et si la Préfète ne l’a pratiquement pas vu pendant toute une année
scolaire, comment peut-elle écrire un rapport négatif? Et comment ce rapport peutil mener au point auquel on se trouve maintenant ? Et comment peut-on respecter
l’autorité de quelqu’un qui n’est jamais là et, dans ce cas, est injuste ?
Entretemps, la nouvelle année scolaire a commencé. Tout le monde est heureux d’être
de retour ou de faire ses premières expériences à Pédagogie Nomade. Et tout le monde
s’inquiète.
Vous pouvez bien sûr faire ce que vous voulez. Ici, il y a une soixantaine de personnes
qui espèrent tous la même chose. Et on vous souhaite le courage de le faire.
Siggy- prof de langue
La rentrée des classes a toujours eu le même effet sur moi: un mal de ventre diffus et
tenace.
...je respire: tout ira bien... Même lorsque j’étais étudiante à l’université, la tension
était palpable dans mes intestins: j’allais devoir retrouver un lieu sillonné par des
individus, dont moi-même, tendus vers le savoir, mais parfois angoissés ou, n’abusons
pas des mots, serrés dans l’étau de la définition du bon étudiant. Bref, l’institution
scolaire m’a toujours fait l’effet d’un corsage, et jamais je n’avais songé à passer plus
de temps dans ses locaux que le strict minimum prescrit par les horaires, même si nous
passions de nombreuses heures à deux pas de là: au café du coin. Ça ne me semblait
alors pas étrange.
J’ai ensuite enseigné, par petits intervalles, dans des classes que je n’avais pas
l’occasion de connaître autrement que le dos collé à un tableau, ou le dos tourné à
mes élèves, face au tableau. L’enfer. Rien n’avait de sens, pas plus le rôle qu’on me
demandait de jouer (expliquer, évaluer, sanctionner) que les rapports que j’entretenais
(c’est-à-dire que je n’entretenais pas) avec ceux qui « partageaient » avec moi le lieu
que j’occupais (c’est-à-dire que je n’occupais pas, tout au plus peut-on dire que je le
traversais).
Pédagogie Nomade, avant d’exister, à l’état de rêve, de projet, est venu illuminer
l’ombre opaque dans laquelle se noyait mon avenir de prof (métier que j’aurais sans
aucun doute abandonné). Jamais jusqu’alors je n’avais envisagé la possibilité de
réfléchir et créer le lieu, le rôle, le sens d’une école. Joie, excitation, folle impatience
qu’on s’y mette.
On s’y met. C’était magique, et, en même temps, toujours ce mal de ventre: on créait,
enfin, mais toujours en poussant de toutes nos forces sur les membranes de la matrice
dont on s’efforçait de s’émanciper. D’abord parce que c’est tout un travail que de
déconstruire ce qui avait été depuis si longtemps ancré dans nos représentations de
l’école. Mais ce travail sur nous-mêmes n’était pas le pire (il était au contraire le plus
encourageant); non, le pire était d’exister dans une sorte de flou à propos du rôle qu’on
nous faisait jouer: « expérimentez! Mais pas trop... ». On nous « confiait » une mission
pour laquelle on ne nous accordait en somme aucune confiance: inspecteurs en tous
genres, menaces, mépris. Et pourtant on testait, en tâtonnant, en concertation avec le
milieu à la fois rude et chaleureux des Ardennes, ce qui s’apparente pour moi à la
plus exigeante des méthodes: inventer les conditions d’accès au savoir. Inventer, ça ne
s’arrête jamais, ça ne se consigne pas dans des livres, ça ne peut pas donner naissance
à des lois, ça ne peut que s’alimenter soi-même.
Début d’année, ce foutu mal de ventre... On apprend que les chefs ont décidé de nous
rappeler qui ils sont. Vlan, patatras. On n’expérimentera rien du tout. On ne créera
rien du tout. Tout au plus le professeur, agrégé s’il vous plaît, aura-t-il la liberté de
concocter les séquences de cours les plus originales et les plus loufoques qu’il veut,
pour autant qu’il respecte les « règlements statutaires en vigueur dans le cadre de
l’exercice de la fonction de professeur en Communauté Française ». Tout au plus aurat-il le droit de brandir des slogans (citoyenneté, démocratie, esprit critique) sans avoir
la moindre idée de la façon dont on peut effectivement vivre ce qu’est la démocratie et
exercer son esprit critique (ce qui ne peut se faire à moitié).
En tout cas, ça ne sera pas moi. Je souhaite, à celui ou celle qui aurait pour mission
d’éduquer à Pédagogie Nomade revue et corrigée, bien du courage pour assumer son
rôle bâtard.
Marie L.
Je crains que ce texte ne serve à rien tant les rapports de force sont puissants. Le rapport
d’Inspection ne fait que confirmer mon sentiment de départ : les gens d’ « en haut » qui
ne vivent pas avec ceux « d’en bas » ne les comprendront que très partiellement ; avec,
par exemple, des observations dites « objectives » qui ne reflètent qu’une partie de la
réalité (ou carrément ne correspond à aucune réalité). Ce rapport n’a que très peu de
légitimité à mes yeux et n’a aucune force pour changer ou faire évoluer quoi que soit au
sein de Pédagogie Nomade. Seule la relation positive que j’ai eue avec l’inspecteur de
géographie et un conseiller pédagogique a été fructueuse. Je ne retiens que ça ! Ils ont
constaté les points négatifs et les points positifs. Ils ne se sont pas contentés de dire ce
qu’il y avait à faire ou à ne pas faire mais à chercher avec moi des pistes d’action (si je
n’en avais pas une pour l’année prochaine dont ils étaient tout à fait satisfaits). Et ils ont
posé des questions, ont écouté mes positions pédagogiques, mes doutes, mes propres
questions. Malgré l’asymétrie des statuts et des rôles, je me suis considéré comme égal
à eux. Égal dans le dialogue et dans l’intelligence. Cet élément humain ne transparait
pas dans ce rapport.
Ensuite, il y a ce (re)cadrage qui risque clairement d’amoindrir un projet pédagogique
si particulier. Je ne suis pas d’accord à cent pour cent avec le projet pédagogique de
l’école mais je tente systématiquement d’en comprendre les subtilités et de respecter
certains principes philosophiques et éducatifs. Je pense cependant qu’il faut laisser
innover et pour cela, en aucun cas pervertir les fondements. Mais comment mener un
projet pilote innovant et expérimental avec les mêmes cadres que partout ailleurs ? Et,
s’il y a des garanties à préserver, j’ai toujours été prêt à me mettre à table.
A vrai dire, tout me dépasse. Ce sur quoi je me raccroche ce sont des souvenirs de
rencontres avec des professeurs qui se tuent tous les jours à la tâche pour intégrer leur
projet d’éducation dans leurs pratiques de tous les jours ... au front des classes dans
des écoles dites «traditionnelles». C’est en effet en classe, dans les ateliers, dans mes
groupes de suivi que j’ai encore le pouvoir de (faire/laisser) décider, de (faire/laisser)
changer, de (faire/laisser) transformer. Je me raccroche à mon boulot même avec ces
cadres qui ne correspondent pas à Pédagogie Nomade. C’est extrêmement désolant et
en même temps stimulant parce que dans ces conditions, je me focalise à l’essentiel, sur
des principes de base.
Jean-Christophe Senny
Limerlé, le 1er septembre 2010
Madame la Ministre,
C’est avec beaucoup d’émotion et de consternation que j’ai appris votre refus de
reconduire notre collègue Benoit Toussaint dans sa fonction de professeur de français
au sein de Pédagogie Nomade, suite au rapport de service défavorable de la préfète
de l’Athénée royal de Vielsalm et au fait qu’il n’ait pas introduit de demande de
candidature dans l’enseignement de la Communauté française.
J’ai l’impression qu’un fossé grandissant d’incompréhension est en train de se
creuser entre le projet de PN et la perception qu’en a le Cabinet. Pour cette raison, je
souhaiterais apporter mon éclairage sur toute une série de faits (notamment reprochés
à Benoit Toussaint) qui mettent notre projet en porte à faux par rapport aux règlements
administratifs. Je suis consciente que chacun d’entre nous pourrait faire les frais de ces
écarts par rapport à la réglementation. Aujourd’hui, c’est Benoit qui en est la victime;
demain, cela pourrait être n’importe lequel d’entre nous.
Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas, dans notre chef, de s’opposer aux
réglementations en vigueur, mais bien de tenter une autre manière d’aborder
l’enseignement, comme le stipule la Convention. Et cela a pour conséquence directe
que notre manière de faire entre en conflit avec les règlementations en vigueur. Ce
qui fait notre force fait aussi notre faiblesse. A vous de voir si vous choisissez de
soutenir nos tentatives engagées, enthousiastes, tantôt audacieuses, tantôt maladroites,
mais toujours soucieuses de mettre en place une structure qui permette aux élèves
d’apprendre, de s’épanouir et de prendre une place dans la société.
Permettez-moi de vous donner quelques précisions sur notre fonctionnement. Dans
notre équipe, tous les professeurs prestent deux voire trois fois le nombre d’heures
pour lesquelles ils sont engagés. Nous ne ménageons pas notre temps ni nos efforts
pour susciter un autre rapport au savoir: en plus de nos cours « traditionnels »,
nous participons à des ateliers transdisciplinaires, nous nous occupons de la gestion
de l’école (cuisine, entretien, administration), nous participons à des assemblées
générales, à des projets divers (qui se déroulent parfois en soirée). Certains d’entre
nous ont organisé des week-end de travail scolaire avec les élèves. Chaque semaine,
nous organisons une réunion d’équipe pour traiter du quotidien de l’école, pour
échanger sur nos pratiques et réfléchir ensemble à ce que nous faisons. Une fois
par mois, nous nous retrouvons également en soirée pour aborder un thème plus en
profondeur. Vous l’aurez compris, nous ne comptons pas nos heures, portés par un
idéal commun et une recherche qui nous tient à cœur.
Dans notre organisation, il n’est pas rare que des raisons pédagogiques nous poussent
à modifier l’horaire de la semaine, voire à le bousculer. Tel incident nous amènera
à suspendre les cours pour organiser une assemblée générale extraordinaire, tel
autre nous conduira à consacrer un après-midi à une situation difficile mais riche en
apprentissage. Ces temps ont notamment permis de mettre fin aux vols à l’étalage dans
le Spar du coin, ou encore de mettre des mots sur une expérience traumatisante, tout en
menant une réflexion sur les médias et les lois. L’horaire est également bousculé pour
des semaines de projets ou pour des temps de coévaluation pendant lesquels l’équipe
pédagogique fait le point avec chaque élève sur son avancement. Par ailleurs, si l’un de
nous doit s’absenter (par exemple pour participer à une réunion au Cabinet), ses cours
sont donnés par un collègue. Ainsi, il arrive qu’un professeur de physique donne un
cours de math, qu’un professeur d’allemand donne le cours de français, etc., tout cela
au grand bénéfice de l’élève.
Si nous pouvons travailler de la sorte, c’est parce que nous avons choisi de prendre
part à cette aventure pédagogique, parce que nous sommes prêts à nous y investir
sans compter, mais aussi parce que nous formons une équipe complémentaire, unie et
soudée. Il serait inimaginable d’envoyer dans notre école un enseignant qui aurait une
priorité d’un point de vue statutaire, mais qui n’aurait pas choisi de travailler ainsi et
qui n’aurait pas été choisi pour rejoindre notre équipe. Inversement, plusieurs d’entre
nous ne souhaitent pas travailler dans une école traditionnelle de la Communauté
française, ils ont rejoint ce projet pour ce qu’il a de hors du commun, d’expérimental.
Ces deux éléments expliquent pourquoi aucun de nous n’a introduit sa candidature
pour l’enseignement de la Communauté française. Actuellement, nous sommes
candidats pour cette école en particulier, cela ne nous intéresse pas d’être désignés
ailleurs.
Tout ce qui précède vous permettra sans doute de comprendre à quel point nous
sortons du cadre par la force des choses, par la force d’un projet qui explore de
nouvelles voies. Celui qui souhaite aborder notre travail sous l’angle des statuts et
des réglementations pourra constater qu’aucun des membres de notre équipe ne les
respecte entièrement. C’est à ce prix que nous pouvons expérimenter. Mais ce qui fait
notre force fait aussi notre faiblesse. Si vous souhaitez nous sanctionner pour cela,
renvoyez-nous tous et mettez fin à ce projet expérimental porté par des gens motivés et
prêts à donner de leur personne dans un contexte difficile.
A la lumière de ce qui vient d’être dit, je vous réitère mon incompréhension devant
la sanction dont seul Benoit Toussaint fait l’objet. Et je vous invite à porter un autre
regard sur sa situation en prêtant attention aux points suivants. Premièrement, la
majorité des reproches incriminés à Benoit Toussaint se basent sur les témoignages
de la mère d’un élève, avec laquelle nous avons eu beaucoup de problèmes et contre
laquelle la préfète elle-même nous avait mise en garde, arguant du fait qu’elle pourrait
nuire au projet. Pour un témoignage négatif et mensonger de parents, vous pourrez en
lire des dizaines d’autres sincères, élogieux, enthousiastes, rassurants, encourageants
– mais malheureusement, aucun d’eux ne figure dans le rapport que vous avez reçu.
Deuxièmement, en ce qui concerne la convocation officielle de votre Chef de Cabinet,
il faut savoir que celle-ci avait été envoyée par recommandé un mercredi pour un
rendez-vous le lundi suivant. Excusez-moi de mentionner ce détail, mais quand on
reçoit un recommandé, on n’est pas obligé d’aller le chercher dans les 24 heures,
on a plus de dix jours pour aller le retirer à la poste... En outre, comme nous vous
l’expliquions ci-dessus, il est des semaines où l’emploi du temps est modifié, dès lors,
un professeur peut être absent un jour où il a l’habitude de donner cours sans manquer
à aucun de ses devoirs. Le lundi du rendez-vous, Benoit Toussaint n’avait pas de
cours à donner. L’horaire remis aux inspecteurs est tout relatif. Le respecter à la lettre
nous empêcherait de mener à bien cette expérience pilote. Troisièmement, il nous faut
constater qu’à aucun moment il n’est question de pédagogie dans votre rapport. Or
c’est bien de cela qu’il s’agit dans une école. De notre avis de collègue, mais aussi
de l’avis de très nombreux élèves, Benoit est un professeur remarquable aux grandes
qualités pédagogiques. Ne serait-il pas préjudiciable pour un projet que de l’amputer
de son membre fondateur, excellent pédagogue de surcroît, pour des motifs inhérents à
une structure sans doute inappropriée?
Car c’est sans doute là que réside la source de nombreux maux actuels: la Convention
signée en juillet 2008 par le Ministre Dupont et Périple en la demeure nous place en
effet devant une injonction paradoxale, elle accorde à Pédagogie Nomade la liberté
dans la mise en œuvre pédagogique du projet tout en l’enjoignant de suivre tous les
règlements de la Communauté française. Un tel double discours est inconfortable
pour tout le monde, il ne fait que compliquer voire entraver les relations des uns avec
les autres, il met en péril le projet lui-même. Pour que celui-ci puisse vivre et devenir
l’expérience innovante qu’il est censé être, ne faudrait-il pas lever cette ambiguïté
lourde de conséquences?
En conclusion, je vous demande de tenir compte de la spécificité d’un projet porté
par une équipe soudée d’enseignants qui ne demandent qu’à pouvoir consacrer leur
énergie et leur enthousiasme à redonner le goût d’apprendre à des élèves qui ont choisi
de venir dans cette école. Plus concrètement, je vous demande de bien vouloir revoir
votre décision concernant Benoit Toussaint et de revoir la Convention afin de mettre
fin à une situation incommode pour tout le monde.
D’avance je vous remercie de l’attention que vous porterez à cette lettre et vous prie
d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de mes meilleures salutations.
Brigi!e Brisbois
Lere à l’inspecon
août 2010
Bonjour,
Votre dernière visite, répétée à un rythme élevé, en ce dernier mois de juin, nous laisse
en bouche un goût amer, et dans l’esprit un énorme point d’interrogation.
Nous comprenons le sens de cette visite, et aussi vos préoccupations, que nous
partageons pour la plupart. Mais nous tenons aussi à rester fidèles à l’engagement
que nous avons pris : faire école autrement, avec des élèves en différend multiforme
avec l’institution scolaire, avec pour guide quotidien le Décret Mission, dans ce qu’il
contient d’essentiel, c’est-à-dire ses objectifs.
Sans critiquer personne, au contraire convaincus des efforts de chacun, nous sommes
informés, par la nature même des élèves qui s’inscrivent à Pédagogie Nomade, des
carences de l’enseignement. La ligue des droits de l’enfant parle de 100000 jeunes
frappés chaque année par le redoublement, l’exclusion, la réorientation, le décrochage,
voire diverses pathologies reconnues aujourd’hui, et diagnostiquées comme telles.
Nous ne pouvons en faire abstraction, car notre école n’est pas un monde isolé du
monde : elle en fait partie.
Nous connaissons, et partageons votre souci de remédier à cette situation. En toute
modestie, nos efforts sont concentrés sur une soixantaine d’élèves. Cela nous semble
une taille humaine, susceptible de permettre une qualité relationnelle nécessaire, un
accompagnement attentif. La qualité de cette relation et de cet accompagnement réside
en elle-même, et non dans son contrôle, très partiel de toute façon, par un registre
de présence par exemple, dont nous vous rappelons qu’il a abouti à l’échec ou à
l’exclusion dans les écoles fréquentées précédemment par nos élèves. C’est pourquoi
nous tentons de mettre au point deux autres outils : la fiche micrographique, le contrat.
Puisque ces outils sont différents le regard qu’on jette sur eux doit l’être aussi, et ce
qu’il disent est de nature différente également. Mais ils rejoignent le souci d’objectiver,
pour tout le monde, élève compris, ce qu’est la présence, ce que dit l’absence.
Les textes officiels, les réflexions des spécialistes, s’accordent pour dire que l’échec
scolaire n’est pas une solution efficace. Et que cela coûte cher. Nous tentons donc
d’y remédier, en suivant les mêmes textes et les mêmes réflexions, et en développant
des pédagogies coopératives, actives, différenciées, progressives. Forcément, en
travaillant de la sorte, on n’arrive pas à mener une classe, au même rythme, vers les
mêmes objectifs. Certains progrès, imperceptibles et lents, sont souvent néanmoins
la condition d’une évolution ultérieure. Ils n’apparaissent pas à la lumière des
outils habituels, comme les grilles d’évaluation, mais sont évidents pour une équipe
éducative très disponible, en concertation permanente, soucieuse du travail collectif et
du décloisonnement des cours et des matières.
C’est ainsi qu’une bonne part du temps pédagogique est réservée à des approches
que préconisent tous les pédagogues : interdisciplinaires, avec des groupes verticaux,
débouchant sur des productions concrètes, qui font sens pour les élèves et les
professeurs, sans s’écarter pour autant des grandes lignes des programmes, mais en les
dépassant souvent. Ces productions suscitent étonnement et admiration de la part de
toutes les personnes qui les considèrent.
Sans forcer le trait, nous affirmons que nous passons à l’école beaucoup plus de temps
que nos collègues des autres établissements. Nous affirmons également que le métier
se trouve à la fois compliqué, mais également terriblement éclairé, quand la relation
prof – élève est débarrassée de ses caractéristiques habituelles que sont les points, le
jugement, la sanction éventuelle. C’est sans cet arsenal que nous nous sentons à la fois
vraiment enseignants et relativement désarmés. Cette situation nous semb le moins
paradoxale qu’il n’y paraît.
Mais quand nous nous sommes retrouvés, à l’issue de vos nombreuses visites, nous
n’avons eu à échanger que notre amertume : la présence doit être obligatoire et
obligatoirement contrôlée, même si on sait qu’elle ne dit rien de l’implication de
l’élève, ni de ses apprentissages. Les productions collectives ne peuvent pas être prises
en considération parce qu’elles n’isolent pas les performances des élèves, alors que
nous avons toujours cru que l’apprentissage est plus joyeux et plus efficace quand
il est le résultat d’une coopération. L’évaluation que nous pratiquons, qui laisse
une seconde chance, qui choisit l’optimisme prospectif, qui ne fait pas du temps un
couperet, qui ne cloisonne pas les compétences, n’est pas adéquate, alors que nous
savons que les compétences ne sont rien, précisément, quand elles ont isolées l’une des
autres. Nous péchons au niveau des contenus, mais d’une part nous travaillons avec
des élèves dont nous n’avons pas prédéterminé le niveau, et qui affichent parfois des
faiblesses stupéfiantes, et d’autre part nous organisons tant de choses qui permettent
d’aller au-delà, d’aller à côté, de ce que réclament les programmes, que nous pensions
que l’un rattrape l’autre, et que les contenus, de toute façon, ne sont rien sans les outils
que sont les compétences, au sujet desquels vous tenez, nous le considérons comme un
encouragement, des propos plutôt positifs. Et enfin, Pédagogie Nomade se caractérise
par des pratiques de pédagogie institutionnelle, qui sont de l’avis de tous la voie d’un
authentique apprentissage de la démocratie vivante. Nous avons le sentiment que cette
caractérisitique, dans laquelle nous investissons tous, profs et élèves, énormément
d’énergie, vous laisse de marbre, que vous ne pouvez considérer cela comme du temps
scolaire, puisque ça ne se focalise sur aucune discipline exclusivement, alors que ça
traite de toutes, au contraire, et de bien d’autres choses encore, qui celle-là font sens
pour les élèves : leur vie à l’école.
Nous avons, pour la plupart, éprouvé un sentiment de frustration : les rencontres que
nous avons eues n’étaient pas placées sous le signe du dialogue. Clairement, l’un
détenait le savoir, l’autre n’avait qu’à obtempérer. Heureusement, il y a eu quelques
exceptions, qui nous ont donné l’espoir qu’un jour s’établisse, même si nos missions
sont différentes, un dialogue d’égal à égal : nous sommes vous et nous enseignants,
et soucieux de bien faire notre métier. Mais il y a eu aussi exception de l’autre côté
: le discours de celui qui pense savoir a eu parfois un caractère hautain, souvent
infantilisant, et parfois insultant.
Nous ne prétendons pas, ne l’avons jamais fait, que Pédagogie Nomade est une école
parfaite. Ni ses enseignants, ni ses élèves. L’école parfaite n’existe pas, n’existera
jamais, et elle est à rechercher par tous. l’enseignement en Communauté Française, de
façon générale, n’approche pas non plus la perfection, et il est dans l’intérêt de tous
d’adopter une attitude de curiosité, sinon de bienveillance, pour des écoles qui tentent
d’explorer des voies différentes. Nous l’avons souvent dit, nos succès, comme nos
erreurs serviront à tous. Mais pour prendre en considération des pratiques différentes,
il faut, résolument, adopter des pratiques différentes. Et, tous les pédagogues le savent,
la confiance produit de meilleurs résultats que la suspiscion.
Alors, de la même façon que nous continuons à croire qu’un dialogue fructueux peut
être établi avec l’inspection, et nous y tenons, nous vous demandons de croire que
quelque chose d’intéressant, même si c’est différent, se passe peut-être à Pédagogie
Nomade. A partir de là, peut-être s’intéressera-t-on à des sujets qui méritent réflexion.
Cordialement,
L’équipe éducative de Pédagogie Nomade
AVIS SUR LE PROJET DE SCRUCTURE SCOLAIRE ALTENATIVE PRESENTE PAR
« PEDAGOGIE NOMADE »
Au moment où les institutions scolaires traditionnelles rencontrent de grandes
difficultés avec les adolescents et les jeunes adultes, tant en matière d’apprentissage
que de socialisation, le projet présenté par « Pédagogie nomade » est particulièrement
prometteur. Il s’émancipe de manière bienvenue des archaïsmes formels et prend
le parti de l’inventivité. Pour autant, il n’est en rien un « projet laxiste », bien au
contraire : il est d’une extrême exigence, aussi bien pour les enseignants qui devraient
s’y investir que pour les élèves qui auront la chance d’y être scolarisés.
Pour une fois, une école, en effet, mettra la transmission des savoirs et ses exigences
au coeur de son fonctionnement. En effet, le grand paradoxe de beaucoup d’écoles,
c’est qu’elles sont organisées à partir d’exigences extrinsèques, sans partir de ce qu’il
faut enseigner, à qui il faut l’enseigner et la manière de l’enseigner. Ici, c’est l’inverse :
on ne construit pas un emploi du temps artificiel dans lequel élèves, professeurs et
connaissances doivent se couler tant bien que mal, mais on se demande en permanence
comment faire pour que les élèves, grâce aux professeurs, s’approprient les savoirs.
Ce changement paradigmatique est absolument fondamental : il permet, par exemple,
de remplacer la notion passe-partout de « cours » par des groupements finalisés et
précisément ciblés : groupes de besoin, ateliers, cours magistraux, etc. On sait ce
qu’on doit transmettre et on cherche la meilleure manière de le faire. Cela permet aussi
de penser la progression des élèves et de mettre les moyens didactiques au service de
celle-ci quand, trop souvent, la temporalité est celle d’une institution qui accepte de
« perdre en route » ceux qui ne peuvent s’y conformer.
…/…
Mais cette efficacité didactique s’accompagne d’une forte préoccupation pédagogique
et citoyenne : il s’agit d’ « instituer l’École » avec les élèves, de les impliquer dans
le fonctionnement afin qu’elle devienne « leur affaire ». Il s’agit de les associer
progressivement à la responsabilité de leurs apprentissages pour qu’ils puissent se
construire comme sujets autonomes. Il s’agit de faire de l’interaction solidaire un
moteur du développement individuel et collectif.
Il ne faut pas le cacher : ce projet sera difficile à mettre en oeuvre et demandera un
très gros investissement de la part de ses responsables. Mais ils sont prêts à l’assumer.
En cela, ils rendront un immense service à la fois aux élèves qu’ils scolariseront, mais
aussi à la recherche pédagogique et à la société tout entière. Ils contribueront, en effet,
à explorer de nouvelles formes scolaires dont la modernité a terriblement besoin.
Je soutiens ce projet sans réserve et suis prêt, dans la mesure de mes possibilités, à lui
apporter mon concours.
Philippe Meirieu Professeur en sciences de l’éduca"on
à Madame Marie Aréna Ministre de l’Enseignement en Communauté Française
Objet : soutien au projet d’école différente de Pédagogie Nomade
Madame la Ministre,
Je voudrais, par la présente, apporter mon soutien chaleureux au projet qui vous est
présenté par le groupe Pédagogie nomade. J’ai lu attentivement ce projet et j’ai eu
la possibilité de discuter de ses principes et de leur mise en pratique avec Monsieur
Benoît Toussaint. Il me semble remarquable par son souci d’articuler l’exploration
en profondeur des fondements théoriques d’une école différente avec l’attention
minutieuse aux détails les plus concrets de son fonctionnement. Ce projet alternatif
par rapport aux formes traditionnelles de l’enseignement n’est pourtant guidé par
aucune adhésion dogmatique à telle ou telle théorie de la pédagogie ou de l’antipédagogie. Le groupe qui l’a élaboré a manifestement réfléchi sur ces théories et
décidé de retenir des unes et des autres , sans a priori, les éléments théoriques et
pratiques susceptibles de fonder une école différente adaptée au temps présent . Il
a pensé cette expérimentation pédagogique dans le cadre d’une vision globale de
la société, mais non pas sous la forme d’une contre-société autosuffisante. Il a mis
au cœur de l’entreprise projetée l’articulation des deux objectifs qui orientent toute
politique éducative conséquente : l’acquisition du savoir et la conquête de l’autonomie.
Ces deux finalités de l’Ecole sont constamment invoquées ensemble, mais à peu près
toujours disjointes ou opposées dans la pratique. L’enseignement officiel privilégie
l’acquisition du savoir, considérant la construction de l’autonomie comme son résultat,
alors qu’elle est seule à pouvoir nourrir le désir de savoir. Nombre de pédagogies
alternatives tendent, à l’inverse, à disqualifier le savoir au nom du développement de
la personnalité des élèves. Le projet de Pédagogie nomade a le rare mérite de dépasser
cette alternative. Il met clairement le désir de savoir au centre de son entreprise, tout en
mettant à la base de son fonctionnement l’affirmation de l’autonomie, la participation
effective des élèves à l’ensemble des responsabilités de l’institution. Il insiste sur la
dimension symbolique irréductible de l’institution scolaire sans y voir, comme tant
d’autres, le principe d’une opposition entre apprentissage scolaire et démocratie. J’ai
été impressionné par la qualité de la réflexion qui innerve la conception des aspects
pratiques de l’école projetée : assemblée, groupes de base, groupes de niveau, de
besoin et de désir. Cette qualité tient beaucoup à l’enquête que les initiateurs du
projet ont menée dans plusieurs établissements publics alternatifs en France et au
Luxembourg. Ils ont eu le souci non seulement d’observer mais aussi de prendre part
à la vie de ces établissements, pour pouvoir pleinement en mesurer les acquis, les
lacunes ou les problèmes. Cette conjonction entre réflexion théorique et engagement
pratique contribue à l’élaboration d’un projet qui réunit au plus haut point deux
qualités volontiers opposées. Il s’agit là d’un projet audacieux, fondé sur une croyance
radicale dans les vertus de l’autonomie et de la démocratie. Et il s’agit, en même
temps, d’un projet profondément raisonnable et équilibré qui ne veut imposer aucune
théorie préformée et n’ignore rien des difficultés d’une expérimentation radicale de
ces vertus. Compte tenu de ces éléments, je pense que ce projet, porté par une équipe
enthousiaste et réfléchie, se présente sous les meilleurs auspices et que sa réalisation
est éminemment souhaitable. C’est pourquoi je lui apporte mon soutien très chaleureux
et sans réserve.
En vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien porter à cette lettre, je vous
prie d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de toute ma considération.
Département de Philosophie
Jacques Rancière, professeur émérite
Mieux vaut une liberté désordonnée qu’une inhumanité se revendiquant de la
jusce.
J’ai toujours trouvé odieux le propos de Goethe déclarant, un jour où l’homme
d’Etat effaçait en lui le poète : « Je préfère une injustice à un désordre. » Mieux vaut
une liberté désordonnée qu’une inhumanité se revendiquant de la justice, car une
conscience libre corrige la première, au lieu que la seconde perpétue cette tyrannie du
châtiment qui entretient la délinquance sous couvert de la supprimer.
La brutale intrusion de la police dans une école où l’on apprend à n’être ni l’esclave
ni le maître de personne offre un bel exemple de la violence que les discours officiels
appellent à proscrire. Qu’attendre d’autre de gouvernements qui préfèrent multiplier
les prisons plutôt que les écoles et ne connaissent d’autres lois que celles de la
prédation ?
Partout la dignité des hommes, des femmes, des enfants est bafouée par une politique
qui accroît la pauvreté, le désarroi, la peur, le désespoir. L’Etat pousse le cynisme
jusqu’à faire payer par les citoyens les plus défavorisés les malversations bancaires
qu’il a couvertes de son autorité. Et l’on voudrait que chacun se résigne et obtempère
docilement ? Le pouvoir mise sur le mensonge et sur la peur pour encourager le
fatalisme et ensommeiller les consciences. Ce n’est pas sans raison qu’une justice,
qui – à l’exception de quelques rares magistrats - ferme les yeux sur la corruption
généralisée et s’avoue impuissante à empêcher le blanchiment de la drogue, s’en prend
à un enseignement libertaire, où se pratique un art tout à fait contraire à la barbarie
traditionnelle, l’art de refuser la prédation et la servitude volontaire.
Dans son souci de crétiniser les électeurs pour garder ses prérogatives, la classe
politique, obnubilée par le clientélisme, n’ignore pas que ce qui la menace, c’est un
ras-le-bol massif où l’invitation à « aller se faire foutre » ne sera qu’un pis-aller. Car,
ne nous faisons pas d’illusions, l’effondrement de l’argent et d’une économie fondée
sur le profit annonce un chaos où la violence aveugle risque de l’emporter.
La seule issue est une double prise de conscience des individus. A savoir, ce dont
nous ne voulons plus : la mise à l’encan du bien public (enseignement, santé,
transports, énergie, alimentation saine, industries utiles, droits à la retraite…) au profit
d’intérêts financiers condamnés à la débâcle. Et ce que nous voulons vraiment : une
priorité absolue accordée à la vie, à l’environnement, à une existence plus humaine,
débarrassée de tout comportement prédateur. Le projet d’un enseignement, prodigué
en ce sens aux enfants et aux adolescents comme aux adultes, doit être partout
privilégié. Ceux qui l’entravent aujourd’hui répondront demain de la violence qu’ils
ont engendrée.
En ces temps de servilité, il est salutaire de saluer l’audace des résistants à la tyrannie
et au mensonge, car c’est de cette audace-là que va dépendre le sort des hommes et de
la terre.
Raoul Vaneighem
Futur noir, futur rose.
Donner un sens nouveau à un métier qui, s’il n’est pas le plus vieux du monde
(quoique…), est sans doute le plus beau : é- ducere, conduire hors de, bref éduquer ;
Voilà le programme d’une tribu nomade faite de quelques aventuriers de l’Education.
Ils s’éduquent l’un l’autre en cherchant depuis deux ans des sentiers de chèvres, des
espaces de liberté.
L’arrivée est en vue. Le campement est trouvé, un trou perdu dans les Ardennes belges.
Limerlé, vous connaissez ? Non, jamais entendu parler. C’est comme Buzet, un patelin
là-bas près de Floreffe et Namur, raccordé, lui, depuis quinze ans au courant alternatif.
C’est que ça vient de nulle part la Pédagogie Nomade, l’Education Nouvelle. Ca
germe à l’ombre. Un trou perdu, un trou à idées noires devient peu à peu cratère rouge
comme au fond d’un volcan. Ca bouillonne. C’est l’éternel printemps des projets qui
bourgeonnent. Le futur est rose. Une formidable machine à idées s’active. On réfléchit
à ce qu’on va faire avec des adolescents en septembre, on philosophe avec l’Université
de Liège, on sociologise, on fouille la psychologie et on rêve de méthodes miracles.
Pour ça on va voir ailleurs en nomadisant, à Saint Nazaire chez l’ami Gaby Cohn
Bendit (le frère de l’autre).
Elèves, professeurs, même combat, même enthousiasme pour construire durant la
formation des jeunes, un monde meilleur avec des ados qui se détournent d’une école
bancaire, pas rose tous les jours. Enfin voilà pour eux une école où l’enseignement ne
sera pas secondaire.
Non, il n’y a pas péril en la demeure : créativité, audace, solidarité, non jugement,
dialogue, organisation, rigueur sont des biens à partager donc à décupler, centupler,
miltupler, pourvu qu’on s’y mette ensemble, comme à Limerlé.
La caravane rêve :
Elle se pose
Un nouveau jour se lève
L’horizon est rose.
Charles Pepinster
Ins!gateur du Groupe Belge d’Educa!on Nouvelle GBEN
Et sur les indica!ons du diable, on créa l’école.
L’enfant aime la nature : on le parqua dans des salles closes.
L’enfant aime voir son activité servir à quelque chose : on fit en
sorte qu’elle n’eût aucun but.
Il aime bouger : on l’obligea à se tenir immobile.
Il aime à manier les objets : on le mit en contact avec des idées.
Il aime se servir de ses mains : on ne mit en jeu que son cerveau.
Il aime parler : on le contraignit au silence.
Il voudrait raisonner : on le fit mémoriser.
Il voudrait chercher la science : on la lui servit toute faite.
Il voudrait s’enthousiasmer : on inventa les punitions.
Alors les enfants apprirent ce qu’ils n’auraient jamais appris sans
cela : ils surent dissimuler, ils surent tricher, ils surent mentir..
Adolphe Ferrière (1879-1960)*
* cité par HAMELINE D in « Perspectives : revue trimestrielle d’éducation comparée (p.387) », Paris,
UNESCO : Bureau international d’éducation, vol.XXIII, n°1-2, mars-juin 1993(p.379)

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