La rationalisation de la consommation en ligne de mire
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La rationalisation de la consommation en ligne de mire
La rationalisation de la consommation en ligne de mire Entretien avec Pascal Sokoloff, directeur de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies L'ouverture du marché de l'énergie ne concerne que la fourniture. En quoi la mise en concurrence constituera-t-elle une opportunité pour les communautés ? Il faut d'abord faire une distinction selon la taille des collectivités. Les consommations globales (acheminement et fourniture) d'électricité représentent en moyenne de 3 à 5 ou 6% des dépenses de fonctionnement des communes, le poids relatif des consommations énergétiques ayant tendance à augmenter avec l'importance démographique en raison du nombre plus important d'équipements collectifs (culturels, sportifs…) consommateurs. Le prix TTC de la fourniture proprement dite s'inscrit donc grosso modo dans une fourchette allant de 1 à 2 ou 3% de ces dépenses. On peut par ailleurs conjecturer que la mise en concurrence sera d'autant plus efficace que le pouvoir de marché, et donc la taille, de l'acheteur public seront importants. On admet souvent que les espérances de réduction de coûts pourraient osciller selon le cas entre 10 à 20% (20% correspondant à un résultat particulièrement honorable). Il résulte de l'ensemble de ces éléments que si une petite collectivité ne peut guère espérer mieux de la mise en concurrence qu'une économie de l'ordre de 0,1% du budget de fonctionnement (réduction de 10 % du coût d'un poste équivalent à 1% du budget de fonctionnement), soit peu de chose en réalité, l'espérance de gain pourrait atteindre en revanche 0,6% du budget de fonctionnement dans une collectivité plus importante. Cela représente déjà un enjeu moins négligeable, d'autant que ce pourcentage s'appliquera à des budgets plus conséquents en valeur absolue. La massification de la commande publique sera d'ailleurs probablement de nature à améliorer sensiblement les chances d'obtenir des prix intéressants. Outre qu'elle autorise classiquement des économies d'échelle (répartition des coûts fixes sur un plus grand nombre de kWh), la massification permet également tout à la fois de lisser la courbe de charge (répartition de la consommation d'énergie dans le temps) et de réduire les creux et les pointes aléatoires, à condition toutefois que le groupement associe des acheteurs aux profils de consommation suffisamment différents (dans le cas contraire les creux et les pics ne font que s'empiler). Un tel effet de « foisonnement » permet de réduire l'amplitude de la consommation ajustée, composante la plus onéreuse de la consommation énergétique. En d'autres termes, les intercommunalités s'impliquant dans une démarche de massification des achats d'énergie seront d'autant plus performantes de ce point de vue que le panel de consommateurs d'énergie regroupés sera suffisamment diversifié. En tout état de cause, la préparation de la remise en concurrence s'accompagnera nécessairement d'une remise à plat des consommations actuelles : inventaire des contrats et des points de livraison, analyse des courbes de charge, audit des modes de consommation… Cette démarche devrait conduire assez logiquement à une approche en termes de maîtrise de la consommation, car l'analyse susmentionnée fera apparaître des gisements d'économie qu'il serait regrettable de ne pas exploiter : révision des puissances souscrites, réflexion sur les modes de chauffage des bâtiments publics, utilisation accrue des lampes basse consommation pour l'éclairage public, etc... On peut ainsi estimer que l'effet vertueux de l'ouverture du marché se situera plus au niveau de la rationalisation des comportements de consommation, que de la mise en concurrence proprement dite… Sous quelles formes l'achat d'électricité par une communauté peut-il se concrétiser, que cela soit pour ses propres consommations ou celles de ses communes membres ? Il est urgent d'attendre pour se prononcer précisément sur la forme que vont prendre les achats d'énergie des communes et de leurs EPCI. En effet, le projet de loi sur la modification du statut d'EDF et de GDF, actuellement en cours de discussion, devrait traiter de cette question dans des termes dont l'exégèse reste cependant à faire. Pour les contrats en cours d'exécution au 1er juillet 2004, il serait apparemment possible de ne pas mettre en œuvre l'éligibilité, à condition toutefois que l'assemblée de la collectivité en délibère expressément. En ce qui concerne les nouveaux contrats souscrits après le 1er juillet (nouveaux bâtiments, nouveaux points de livraison…), il n'est en revanche nullement certain qu'il soit possible de s'affranchir de l'obligation de mise en concurrence. Dans tous les cas, dès lors que la collectivité applique le Code des marchés publics, il y aura lieu de respecter son article 81 relatif aux achats d'énergie non stockable. Quels conseils donner aux communautés qui se préparent à l'ouverture du marché ? Tout d'abord, attendre que le droit de l'achat public d'énergie soit parfaitement stabilisé, notamment avec la publication dans quelques jours de la loi sur le changement de statut d'EDF-GDF au Journal officiel. Je conseillerai ensuite de faire une mise à plat des consommations actuelles et d'engager une démarche de maîtrise de la demande d'énergie. Propos recueillis par FM Le 13 juillet 2004 Pour aller plus loin : ? FNCCR, « Rapport sur l'achat d'électricité par les collectivités locales », 30 mars 2004, consultable sur http://www.fnccr.asso.fr Ce rapport contient notamment en annexe : - des modèles d'articles des statuts d'un syndicat intercommunal ou d'un syndicat mixte, prévoyant le transfert à celui-ci de la compétence éclairage public, et l'habilitant à assurer la coordination de groupements de commande pour l'achat d'énergie électrique - un modèle de convention de groupement de commandes pour l'achat d'énergie électrique - un modèle de cahier des charges des clauses administratives et techniques particulières pour l'achat d'énergie électrique.