Gastronomie - mets-vins À chaque puligny
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Gastronomie - mets-vins À chaque puligny
Gastronomie - mets-vins Grande cuisine et puligny À chaque puligny-montrachet son escorte : recettes rustiques pour un “village”, plus sophistiquées pour un premier cru, produits nobles et préparations riches pour la famille des grands crus. Des accords au sommet, mis en scène par Michel Bezout, le chef du Montrachet... à Puligny. M ichel Bezout, le chef du Montrachet, à PulignyMontrachet (21), a les deux pieds solidement plantés dans le vignoble depuis plus de vingt ans. Ce Bourguignon du nord -natif d’Avallon (89)- vit en totale osmose avec son village et avec ses vins. Au cœur de la côte de Beaune, les blancs de puligny figurent parmi les plus racés et les plus prestigieux du monde. Des vins de rêve, lorsque le terroir est respecté, ce qui est, heureusement, de plus en plus souvent le cas. Michel Bezout ne leur refuse rien : nobles crustacés, poissons riches, volailles d’appellation contrôlée, et même, pourquoi pas, desserts subtils, sans fruits ni chocolat 68 • Bourgogne Aujourd’hui 53 (ces derniers avec un clavoillon, “un premier cru qui fait bande à part”, note le chef). C’est le niveau du vin dans la hiérarchie des appellations qui impose les règles de l’accord...“Pour un village, je recommande des produits et des préparations plutôt rustiques, comme les terrines et les pâtés relevés d’une pincée d’aromates.” Les œufs en meurette à la lie de puligny constituent un bon exemple de cette cuisine bourgeoise qui connaît ses racines et qu’affectionne Michel Bezout. Il a créé la recette en 1981, et elle est devenue le grand classique de la maison. Forcément indémodable, puisque déposée au Conservatoire de la Cuisine Française. Des saveurs vives, légèrement acidulées, forment l’ossature du plat. Le chef leur réserve un puligny- Bourgogne Aujourd’hui 53 • 69 Gastronomie - mets-vins La carrure de géant et la délicatesse des grands crus appellent forcément le meilleur. montrachet 2000 du domaine Carillon, bien rond en bouche. Il joue l’opposition entre le gras du vin, et le côté pointu de la préparation. Pour escorter les premiers crus du village, Michel Bezout monte en gamme. Les poissons nobles et les volailles de Bresse entrent en scène. “Pourquoi pas un pigeonneau rôti au raisiné, aux saveurs légèrement sucrées, avec un Folatières, dense et parfumé, ou un sandre poêlé à l’échalote et aux girolles, avec un Truffières aux arômes de sous-bois, très à l’aise sur les champignons. On peut aussi penser à un élégant Combettes”, suggère le cuisinier. Mais pour accompagner le blanc de volaille de Bresse au foie gras de canard à la crème de girolles (voir recette), aux saveurs riches et douces -le foie imprègne délicatement la viande-, il choisit un Pucelles 97 du domaine Leflaive. Grand domaine, grand terroir, année mûre, la fête est totale. Le vin, minéral, ample et gras, joue sa partition sans faiblir. Un accord en puissance, sur les textures... La carrure de géant et la délicatesse de ballerine des grands crus -le montrachet occupant une place à part- appellent forcément le meilleur : poissons nobles et grands crustacés. Comme on n’imagine pas un bâtard fricotant avec une sardine, Michel Bezout lui réserve le turbot. Un vrai turbot de ligne, braisé doucement au four, accompagné d’un jus monté au beurre. “La saveur très concentrée du plat supporte la puissance du bâtard-montrachet”, affirme le chef. Et pour le homard, montrachet ! Un homard breton, ébouillanté dans un court-bouillon à l’aneth, puis rôti, et servi avec un coulis de homard et quelques légumes primeurs. À ce niveau, est-il bien raisonnable de rechercher un accord ? Mieux vaut profiter d’abord du plaisir intense, de la race formidable, des arômes de miel et de tilleul et de la longueur en bouche du montrachet 98 Sauzet (idéalement, à attendre 10 ans), pour se concentrer ensuite sur la qualité du homard breton. Un produit exceptionnel, un vin exceptionnel : tout est dit. Jean-Philippe Chapelon Photographies : Lionel Georgeot Michel Bezout, la constance Michel Bezout, 54 ans, a fait l’ouverture du Montrachet, sur la place du village de Puligny, en 1981. Depuis, il n’a plus jamais quitté la maison. De formation classique, il attache beaucoup d’importance à l’identité des terroirs. “La richesse de la cuisine française est le produit de la richesse des cuisines régionales, nous devons beaucoup à nos racines”, explique-t-il. Après s’être affirmé dans le répertoire bourguignon, le chef a élargi son horizon. Il aime travailler les produits de la mer, rigoureusement sélectionnés - homard breton, acheté en direct à des artisans pêcheurs...- et les champignons sauvages, qu’il ramasse lui-même. C’est son côté “écolo”. “Cueillir les girolles, les cèpes et les asperges sauvages est un vrai bonheur”, affirme-t-il. Michel Bezout cultive aussi son jardin, qui lui fournit la sarriette, le romarin, le persil plat, la bourrache et toutes sortes de plantes aromatiques... Privé du macaron qu’il détenait depuis 19 ans par la dernière édition du Guide Rouge, il a décidé de retrousser les manches : “je fais tout pour récupérer le macaron : plus d’échanges avec les confrères, plus de dépouillement dans les préparations de base et les dressages. Cette année, ma cuisine est devenue plus pointue.” La cave de la maison mérite aussi le détour. Avec ses 33 références de montrachet, ses 45 références de puligny et puligny 1er cru, c’est l’une des plus riches de Bourgogne. Le Montrachet, Puligny-Montrachet (21). Tél. 03 80 21 30 06. Ouvert 7/7 jours. Menus à 35, 52 et 72 €. Hôtel 3*** (32 ch). 70 • Bourgogne Aujourd’hui 53 Les recettes de Michel Bezout Homard breton rôti aux primeurs Pour 8 couverts 4 homards bretons de 800 gr chacun 24 mini carottes 24 mini pois-gourmands 16 petits fenouils 16 tomates cerises 1,5 dl d’huile d’olive et pour la sauce : sel, poivre en grain, aneth, carottes, oignons, céleri, ail, thym, laurier, tomates. ■ Court bouillonner les homards 5 minutes, les décortiquer et concasser les carcasses des têtes. Faire blondir à l’huile d’olive : 1 carotte, 2 oignons, ajouter une branche de céleri, un demi fenouil, 2 gousses d’ail, thym, laurier, poivre en grain écrasé, 4 tomates très mûres, sel, ajouter les carcasses. Mettre au four chaud 7 à 8 mn, mouiller avec 2 litres d’eau ou mieux 2 litres de fumet de poisson. Laisser cuire à frémissement 30 minutes et filtrer en foulant bien. Faire réduire, mettre au point (safran), petit jus sirupeux à peine beurré pour arrondir les saveurs. Cuire les légumes séparément à l’eau bouillante salée. Fricasser (cuisson très courte) les queues de homards coupées en deux, la chair des pinces, celle des pattes, avec de l’huile d’olive et quelques branches d’aneth. Ajouter les légumes et dresser aussitôt sur assiettes chaudes Blancs de volaille de Bresse au foie gras sauce fleurette Pour 8 couverts 2 poulets de Bresse A.O.C. de 1,5 kg 120 g de foie gras cru de canard 300 g de champignons de Paris très blancs 160 g de crème fleurette 6 tomates cerises 200 g d’épinards 1 douzaine de mini-carottes 60 g de petits pois-gourmands Sel fin – poivre du moulin 5 cl de ratafia de Bourgogne ■ Lever les filets de volaille, les ouvrir en portefeuille. Les cuisses seront utilisées pour une autre recette. Saler 1 2 et poivrer l’intérieur des filets. Découper le foie gras en aiguillettes de 30 g. Les rouler dans le ratafia. Le foie gras étant au milieu, refermer le filet et le mettre sous vide ou en vessie ; réserver au frais. Poêler les trois-quarts des champignons, assaisonner. Cuire à la vapeur les petits légumes. Le quart restant de champignons sera poêlé en julienne juste blond. Arroser de la crème fleurette ; ce sera la sauce. Cuire les filets de volaille 6 minutes. Dresser les champignons au centre de l’assiette, les petits légumes sur le pourtour. Verser la sauce fleurette, découper les filets de volaille en 7 rondelles, les dresser autour des champignons. Agrémenter d’un champignon tourné et de cerfeuil. Servir aussitôt. Les œufs en meurette à la lie de Puligny Pour 8 couverts 16 gros œufs extra frais 1 bouteille de Bourgogne Aligoté (ou de puligny-montrachet) Pour la garniture : 50 g de beurre 150 g de poitrine de porc fraîche (coupée en lardons) 200 g de petits champignons de couche 200 g de petits oignons blancs 16 rondelles de pain de ménage grillées et frottes d’ail 750 dl de bouillon de blanc de volaille Pour la finition 5 cl de lie de vin blanc de Puligny-Montrachet (dans l’idéal) 3 cl de fine de Bourgogne 3 (1) Œufs en meurette à la lie de Puligny. (2) Blancs de volaille de Bresse au foie gras sauce fleurette. (3) Homard breton rôti aux primeurs. ■ Blondir au beurre les lardons. Ajouter les petits oignons, les faire colorer. Egoutter l’excès de matière grasse. Mouiller avec le bouillon de volaille et laisser cuire à frémissements. Faire sauter des petits champignons au beurre, égouttez-les sur du papier absorbant et ajoutez-les à la garniture. Saler et poivrer la garniture et finir de cuire. Passer la garniture et la réserver au chaud. Faire bouillir le fond de sauce sans la garniture et réduire de moitié. Pocher les œufs dans le vin blanc presque bouillant et les égoutter. Déposer les œufs deux par deux dans des assiettes creuses à peine chauffées. Verser le pochage des œufs dans le fond de sauce réduit. Ajouter la garniture et faire bouillir. Rectifier l’assaisonnement. Ajouter la lie de vin (ou de fine) et bien mélanger avec une spatule en bois. Verser la sauce et la garniture sur chaque assiette. Parsemer de persil haché et ajouter deux croûtons aillés dans chaque assiette. Bourgogne Aujourd’hui 53 • 71