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4-6, avenue d’Alsace PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE - TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION 92982 – Paris La Défense Cedex N°88 – Octobre 2014 Tél. : 01 46 24 30 30 Fax : 01 46 24 30 32 www.fidal.com [email protected] DOSSIER L’enregistrement de marques tridimensionnelles, un exercice délicat Le droit de l’Union interdit l’enregistrement de signes constitués exclusivement par « la forme imposée par la nature même du produit » et par « la forme qui donne une valeur substantielle au produit » (art. 3, § 1, sous e), premier et troisième tirets, directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, remplacée par la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008). La Cour de justice vient de préciser ces notions (CJUE, 18 septembre 2014, C-205/13, Hauck c./ Stokke et a.) En l’espèce, la société titulaire de la marque tridimensionnelle Benelux, portant sur l’aspect de la célèbre chaise pour enfants « Tripp Trapp », avait assigné aux Pays-Bas l’un de ses concurrents en contrefaçon de droit d’auteur et de marque. Pour se défendre, ce dernier avait notamment formé une demande reconventionnelle en annulation de cette marque. La cour d’appel hollandaise saisie du litige avait considéré que « la chaise « Tripp Trapp » faisait l’objet d’une protection au titre du droit d’auteur » et qu’il y avait donc contrefaçon à ce titre. Elle avait toutefois annulé la marque litigieuse au motif que « l’aspect attrayant de la chaise « Tripp Trapp » donne une valeur substantielle au produit en cause et que sa forme est déterminée par la nature même du produit à savoir une chaise pour les enfants sûre, confortable et de qualité ». Un pourvoi a été formé et le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des PaysBas) a posé à la Cour de justice une question préjudicielle relative à l’interprétation de l’article 3, § 1, sous e) susvisé. D’une part, le motif de refus d’enregistrement des signes constitués exclusivement par la forme « imposée par la nature même du produit » concerne les signes « exclusivement constitué[s] par la forme d’un produit présentant une ou plusieurs caractéristiques d’utilisation essentielles et inhérentes à la fonction ou aux fonctions génériques de ce produit, que le consommateur peut éventuellement rechercher dans les produits des concurrents ». D’autre part, le motif de refus tiré de l’interdiction des signes constitués exclusivement par la forme « qui donne une valeur substantielle au produit » s’applique quant à lui à un signe constitué par la forme d’un produit ayant plusieurs caractéristiques pouvant lui conférer différentes valeurs substantielles. La perception de la forme du produit par le public ciblé ne constitue qu’un seul des éléments d’appréciation. PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE - TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION EN BREF Privilège de l’agriculteur : parution du décret relatif à la liste des variétés végétales concernées er Décret n° 2014-869 du 1 août 2014 portant application de l’article L. 623-24-1 du Code de la propriété intellectuelle, JORF du 3 août 2014, www.legifrance.fr La liste des espèces pour lesquelles les agriculteurs ont le droit d’utiliser sur leur propre exploitation, sans autorisation de l’obtenteur, le produit de la récolte obtenu par mise en culture d’une variété végétale protégée, a été fixée par ce décret. Le privilège de l’agriculteur est ainsi étendu à certaines espèces de plantes fourragères, oléagineuses, à usage de cultures intermédiaires, protéagineuses et potagères non mentionnées dans le règlement (CE) n° 2100/94. Ces motifs de refus semblent être interprétés largement par la Cour de justice qui considère en somme qu’une marque tridimensionnelle ne peut pas correspondre à une forme dont certaines caractéristiques – mais pas toutes – seraient purement fonctionnelles ou donneraient « une valeur esthétique importante » au produit. Il est indifférent que la forme correspondant au signe déposé à titre de marque tridimensionnelle ait, par ailleurs, d’autres caractéristiques. Le signe dans son entier devient alors impropre à être déposé en tant que marque. Aussi est-il parfois préférable de déposer un dessin ou un modèle ou, comme au cas particulier, d’invoquer un droit d’auteur sur la forme revendiquée, et de protéger les caractéristiques techniques du produit par un brevet d’invention. ACTUALITES Le défaut de droit au titre est une cause de nullité relative du brevet Cour d’appel de Paris, pôle 5, chambre 2, 13 juin 2014, RG n° 12/12323, M. X c./ Sic Marking Après avoir été sommé par le titulaire d’un brevet européen de cesser la fabrication d’une machine prétendument contrefaisante, une société avait agi en annulation de ce brevet. Statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel rappelle que la règle selon laquelle un brevet européen peut être déclaré nul si son « titulaire (…) n’avait pas le droit de l’obtenir (…) » constitue une cause de nullité relative. « L’action en nullité fondée sur l’article 138 paragraphe 1 e) peut uniquement être initiée par la personne habilitée à se voir reconnaître la qualité de titulaire du brevet dont la nullité est sollicitée. N’étant pas inventeur ou co-inventeur de l’invention objet du brevet (…), ni son ayant cause, la société (…) n’a pas qualité à agir en nullité du brevet sur le fondement de ce texte ». La demande en nullité fondée sur ce moyen est donc déclarée irrecevable. Celle fondée sur l’absence de nouveauté et d’activité inventive est par ailleurs rejetée. Usage de la marque sous une forme modifiée : la Cour de cassation s’aligne sur la jurisprudence européenne Cour de cassation, chambre commerciale, 3 juin 2014, n° 13-17769, Cofra Holding et a. c/ Dolce & Gabbana Le titulaire de la marque verbale « RODEO » avait agi en contrefaçon à l’encontre d’une société qui avait mis en ligne, sur des sites internet accessibles en France, des photographies et le film d’un défilé de mannequins portant des vêtements revêtus de la mention « Rodeo ». Le défendeur avait sollicité, à titre reconventionnel, la déchéance des droits du titulaire sur la marque en cause pour non exploitation. Le demandeur s’était alors défendu en rapportant la preuve qu’il exploitait une autre marque semi-figurative et contenant l’élément verbal « Rodeo ». PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE - TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION EN BREF Protection et respect des droits de propriété intellectuelle : la Commission européenne dévoile son plan d’action er Commission européenne, 1 juillet 2014, communiqué IP/14/760, www.europa.eu La Commission européenne a présenté son plan d’action « pour lutter contre les atteintes à la propriété intellectuelle dans l’Union européenne et une stratégie pour la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle dans les pays tiers ». La Commission a notamment prévu d’examiner les dispositifs nationaux aidant directement les PME à accéder au système judiciaire. Numérisation et mise à disposition des œuvres détenues par les bibliothèques e Cour de justice, 4 chambre, 11 septembre 2014, C-117/13, Technische Universität armstadt c./ Eugen Ulmer KG Selon la Cour de justice, rien « ne s’oppose (…) à ce qu’un Etat membre accorde aux bibliothèques accessibles au public (…) le droit de numériser les œuvres faisant partie de leurs collections, si cet acte de reproduction est nécessaire, aux fins de la mise à la disposition, [aux] usagers, de ces œuvres, au moyen de terminaux spécialisés, dans les locaux de ces établissements ». La cour d’appel a cependant fait droit à la demande reconventionnelle au motif « qu’en déposant plusieurs marques, la société [titulaire] a entendu les distinguer, de sorte qu’il lui incombe de justifier de l’usage sérieux qu’elle a fait de chacune d’elles et que la protection dont bénéficie sa marque semi-figurative ne peut s’étendre à ses deux marques verbales ». Un pourvoi a été formé. La Cour de cassation, qui casse et annule l’arrêt entrepris, opère un revirement de jurisprudence et affirme, conformément au droit européen, « qu’en statuant ainsi alors que les textes [applicables] exigent seulement que la marque exploitée ne diffère des marques enregistrées que par des éléments n’en altérant pas le caractère distinctif, peu important que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée, la cour d’appel a violé les dispositions de ces textes ». La parodie : le respect d’un juste équilibre entre les intérêts et droits des auteurs et la liberté d’expression Cour de justice, Grande chambre, 3 septembre 2014, C-201/13, Johan D. et a. c./ Helena V et a. La Cour de justice a été saisie d’une demande de décision préjudicielle dans le cadre d’un litige opposant une association aux héritiers de l’auteur de bandes dessinées, au sujet de la distribution d’un calendrier reproduisant un dessin ressemblant à un dessin figurant sur la couverture de l’une de ces bandes dessinées. La Cour considère que la parodie, qu’elle qualifie de « notion autonome du droit de l’Union », a pour caractéristiques essentielles, au sens du droit d’auteur, d’évoquer une œuvre existante, tout en présentant des différences perceptibles par rapport à celle-ci et de constituer une manifestation d’humour ou une raillerie. « La notion de parodie (…) n’est pas soumise à des conditions selon lesquelles la parodie devrait présenter un caractère original propre (…), devrait pouvoir raisonnablement être attribuée à une personne autre que l’auteur de l’œuvre originale lui-même, devrait porter sur l’œuvre originale elle-même ou devrait mentionner la source de l’œuvre parodiée ». L’exception de parodie doit toutefois « respecter un juste équilibre entre, d’une part, les intérêts et les droits [des auteurs] et, d’autre part, la liberté d’expression de l’utilisateur d’une œuvre protégée (…) » qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier. Contrefaçon de meubles photographiés et théorie de l’accessoire Cour d’appel de Paris, pôle 5, chambre 2, 13 juin 2014, RG n° 13/15182, Fondation Le Corbusier c./ Getty Images France et a. Les ayant droits de Le Corbusier avaient assigné en contrefaçon de droits d’auteur une société qui avait mis en ligne sur Internet plusieurs photographies représentant divers meubles de l’auteur. Le tribunal de première instance avait en partie fait droit à cette demande. Appel a été interjeté. PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE - TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION EN BREF Réutilisation des données publiques de l’INPI Décret n° 2014-917 du 19 août 2014 relatif à la mise à disposition du public, pour un usage de réutilisation, d’informations publiques issues des bases de données de l’Institut national de la propriété industrielle, JORF du 21 août 2014, www.legifrance.fr Le décret, en vigueur depuis le er 1 octobre, permet à l’INPI de mettre à disposition du public, pour un usage de réutilisation, les informations publiques issues de ses bases de données et relatives aux titres de propriété industrielle (brevets, marques, dessins et modèles), sous condition de l’acceptation d’une licence gratuite. La cour, qui confirme partiellement le jugement, procède à « l’examen de chacune des photographies » mises en cause et « se prononc[e] au cas par cas ». La reproduction et la représentation non autorisées desdits meubles sur les photographies litigieuses porte bien atteinte aux droits d’auteur des ayants droits. Le caractère accessoire de ces reproductions et représentations ne peut pas être retenu dès lors que les éléments originaux des meubles concernés « sont parfaitement visibles », « discernables et identifiables ». La position parfois centrale des meubles ainsi que leur éclairage « exclut [également] toute inclusion fortuite ». Obligation d’information du prestataire informatique à l’égard de ses clients profanes Cour de cassation, première chambre civile, 2 juillet 2014, n° 13-10076, CRESS et a. c./ Risc Des sociétés ayant souscrit des contrats d’abonnement et de prestations s’étaient plaintes, après livraison et installation conforme, de dysfonctionnements persistants du processus de sauvegarde de leurs données. Elles avaient alors assigné leur prestataire informatique pour ne pas avoir vérifié si le système de sécurité informatique mis en œuvre était compatible avec leur connexion internet. La cour d’appel a rejeté cette demande au motif que le prestataire, qui leur avait alors conseillé de modifier leur connexion, n’était pas fautif. La Cour de cassation casse et annule cette décision : « en se déterminant ainsi, alors, (…) que la société (…) prestataire de service professionnel, était tenue envers ses clients profanes d’un devoir d’information et de conseil qui l’obligeait à se renseigner préalablement sur leurs besoins et à les informer des contraintes techniques de l’installation téléphonique proposée. » Elle estime, en outre, que s’il incombait au client de « déterminer la configuration de l’installation et de se doter des équipements nécessaires, notamment un accès adéquat au réseau de télécommunication », il appartenait au prestataire de justifier avoir fourni une « information circonstanciée et personnalisée » au client. Retrouvez la lettre d’information Propriété intellectuelle - Technologies de l’information sur notre site www.fidal.fr Si vous ne souhaitez plus recevoir cette lettre d'information, merci de nous l'indiquer en répondant à ce mail. 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