Hyperactivité vésicale rebelle non neuro

Transcription

Hyperactivité vésicale rebelle non neuro
Hyperactivité vésicale rebelle (non neurologique)
Traitement médical
Dr Marianne de Sèze
Unité d’Evaluation et de Traitement du Handicap Urinaire
Service de Médecine Physique et de Réadaptation, CHU Bordeaux
Première journée de FMC Sifud-PP, Institut Pasteur, Paris 2008
Traitement médical de l’hyperactivité vésicale rebelle
Les enjeux
Préjudices de l’hyperactivité vésicale rebelle
-Fonctionnel: conséquences des troubles mictionnels irritatifs sur la qualité de vie
-Mixte: fonctionnel et organique, si association de l’HAVR à un mode mictionnel à
risque ou de hautes pression du détrusor.
Prise en charge thérapeutique guidée par l’impératif de répondre à l’un et/ou
l’autre de ces enjeux, et harmonisée autour du choix d’un mode mictionnel adapté
et sécurisant.
Traitement médical
- Répond majoritairement au préjudice fonctionnel: arsenal riche de moyens oraux,
endovésicaux, fonctionnels.
- Peu d’arguments pour garantir effet préventif et efficacité à long terme si
pronostic organique mis en jeu: recours aux moyens chirurgicaux
Pharmacologie orale de l’hyperactivité vésicale rebelle
Adaptation du traitement anticholinergique
Dépassement des doses maximales autorisées d’anticholinergiques
Intérêt de la titration individuelle de dose suggéré par études multicentriques 1-5
augmentation hebdomadaire posologie jusqu’à meilleur ratio efficacité/tolérance
# 2 à 3 X posologie usuelle: >80 % d’efficacité incluant continence complète
(Oxybutynine IR/ER/TDS, Tolterodine IR,Darifenacine, Solifenacine)
Risque majoration aux effets secondaires 1-5
ES majoré avec oxybutynine IR, mais peu d’arrêt de ttt. Tolérance satisfaisante pour
formulation ER
HAV neurogène: tolérance superposable aux posologies usuelles (Ceris )6
Surveillance ++ rétention urinaire recommandée
Surveillance interaction chez sujets polymédiqués
1
Mc Diarmid 2003, Cur Urol Rep 4:446; 2 Andersson 1999, J Urol 161:1809; 3Gleason 1999, Urology 54:420; 4
Dmochowski 2002, J Urol 168:580. 5 Hay-Smith 2007, Cochrane. 6 Menarini 2006, Int J Clin Pharmac Ther 44:623.6
Pharmacologie orale de l’hyperactivité vésicale rebelle
Adaptation du traitement anticholinergique
Association d’anticholinergiques
Intérêt rapporté chez le neurologique en sondages intermittents 1
Peu de données chez le patient non neuro en miction spontanée: envisageable avec
titration et surveillance résidu chez sujet sans risque interactions
Fenêtres thérapeutiques: intérêt d’une resensibilisation des récépteurs
cholinergiques après sevrage thérapeutique. Travaux en cours (P Raibaut, G Amarenco et al)
Combinaisons thérapeutiques
Agents adrénergiques: Quelques travaux supportant intérêt association
anticholinergiques /alpha-bloquants dans HAVR post-obstructive ou non 3-5
… mais pertinence de l’association non validée par méta-analyses 6
Reprogrammation mictionnelle ou rééducation périnéale: supériorité association aux
anticholinergiques vs monothérapies 7
1
Horstmann 2006, NeuroUrol Urodyn 25:441 ; 3 Lee 2004, BJU Int 94:817; 4 Abrams 2007, BJU Int 100: 987;
5 Serels 1998, NeuroUrolUrodyn 17:31; 6 Novara 2006, Eur Urol 50:675); 7 Alhasso/Cochrane 2007
Alternatives orales aux anticholinergiques dans l’HAVR
Tricycliques/alpha-bloqueurs/ inhibiteurs calciques
Revue Cochrane 2007: Pas d’évidence pour intérêt > anticholinergiques 1 ,
… mais pas d’essai dans population purement HAVIR.
Gabapentine:
Etudes de faible niveau de preuve,
Efficacité clinique rapportée chez près de 50% de patients HAVR et nyctiurie
(moyenne 600 mg, progressivement, 100 à 3000), tolérance acceptable 2
Mécanisme d’action supposé déafférentation fibres C (modèle animaux douloureux) 4
Hormonothérapie:
Pertinence thérapeutique encore controversée
Méta-analyse : bénéfice sur troubles mictionnels irritatifs et CVF versus placebo,
voie locale>systémique3.
Effet thérapie combinée peu documenté.
1 Cochrane
Roxburgh 2007; 2 Kim 2004 Int Braz J Urol, 30:275; 3 Cardozo 2004 Acta Obstet Gynecol Scand 83:892;
4Stanfa 1997, Neuroreport, 8:587.
Alternatives orales aux anticholinergiques dans l’HAVR
Sérotoninergiques:
Duloxetine (inhibiteur recapture sérotonine et noradrénaline): 1 RCT, 306 femmes,
HAV sans IU d’effort, 2x40 à 60 mg, 12 sem [4 puis 8 semaines, poso croissante).
Supériorité clinique (délai intermictionel, IUI, Plk, I-Qol) vs placebo,
pas modification significative RPM, nyctiurie,CVF et VR ni RPM
Même efficacité si symptomatologie clinique pure ou associée à hyperactivité
détrusor (pas de profilométrie).
Efficacité croissante au fil du temps, max réponse à partir 5ème semaine (effet dose, effet temps?)
ES> placebo (79% vs 56%), max 4 semaines (nausée/30%, séch b/16%, vertige 14%,
constipation,, insomnie,fatigue). Arrêt de ttt sous duloxetine>placebo (41% vs 22%)
Doses moindres (20 à 40mg/j) sans bénéfice vs placebo ou vs 10 mg oxybutynine.
Pas de données dans HAV strictement ‘rebelle’ 1 .
Non disponible en France
Antagonistes spécifiques 5-HT1A-7: pas de preuve d’efficacité dans l’HAV2
1 Steers
2007 BJU Int,100:337;
2
Lazzeri 2006;Int Braz J Urol 32:620.
Alternatives orales aux anticholinergiques dans l’HAVR
Perspectives thérapeutiques
Antagonistes NK1 (tachykinines) RCT Aprepitant vs placebo: amélioration
troubles irritatifs mais non continence dans HAV postménopausique.1
Ouvreurs canaux potassiques (réduction influx calcique et contractilité détrusor)
Premier essai contrôlé vs placebo dans l’HAVR (ZD09467), multicentrique, 189
patients, : tolérance satisfaisante mais pas de bénéfice clinique ni qualité de vie2
(effet in vitro et urodynamique démontré chez l’animal)
Molécules en développement 3: résultats précliniques ou phases 2 encourageants
Inhibiteur sélectif recapture norepinephrine (reboxetine)
AINS (anti-prostaglandines et anti-glutamate)
Beta-3 agonistes (solabegron)
Tramadol (opioïde, inhibiteur recapture sérotonine et NE)
Agonistes gabaergiques (tigabine): interaction récepteurs gaba B médullaires et
fibres C sous/urothéliales 2
1
Green J Urol 2006,176:2535. 2 Chapple Eur Urol 2006:49:879.3 Lazzeri 2007, Eur Urol 5:250.
Pharmacologie intravésicale de l’hyperactivité vésicale rebelle
Anticholinergiques:1-3
Bénéfice clinique et urodynamique rapporté dans l’HAVR neurogène , mais validation pauvre
chez patient non neurologique
Tolérance meilleure que voie orale (moindre passage hépatique),
…Efficacité brève nécessitant instillation pluriquotidienne et absence de formulation
commercialisée en France ttt marginal de l’HAVR
Anesthésiques:1-3
Blocage des CNID induite par stimulation chimique et électrique démontré in vitro.
Dispositifs d’instillation commercialisé, effet bref et inconstant: ttt marginal
Opioïdes:4-5
Nociceptine, agoniste récepteurs OP4, désensibilisant afférences vésicales exprimant TRPV1.
Intérêt à court terme dans l’HAVR neurogène (clin et urodyn > au placebo), mais pas dans
l’HAVR non neurogène.
Pertinence thérapeutique non établie dans l’HAVR non neurogène
Nouveaux mode de délivrance et vecteurs endovésicaux à l’étude
1Fowler
2000, Urology 55:60; 2 Ouslander 2004, N Eng J Med 350:786. 3 Lose 2000, BJU Int 87:767.
4 Lazzeri
2006;Int Braz J Urol 32:620 5Lazzeri 2001, J Urol 166:2237.
Pharmacologie intravésicale de l’hyperactivité vésicale rebelle
Vanilloïdes (Capsaïcine, Resiniferatoxine)
Neurotoxiques des fibres afférentes peu/pas myélinisées impliquées dans
l’exagération du réflexe mictionnel après irritation chimique, obstruction sous
vésicale ou lésion neurologique.
Action désensibilisante sans abolition des capacités contractiles: intérêt pour
préservation contractilité détrusor.
Indication princeps: HAVR neurogène. Pertinence thérapeutique établie si
indication ciblée
Résultats dans l’HAVR non neurogènes moins probants et protocoles
thérapeutiques encore mal définis.
Pharmacologie intravésicale de l’hyperactivité vésicale rebelle
Vanilloïdes
Résiniferatoxine
Bénéfice supérieur au solvant sur impériosité et continence dans HAVIR après instillation
unique à forte dose (100 ml RTX 50nM/10% éthanol)1-3
et sur continence après instillations répétées (1/sem/4sem) à faibles doses (populations
disparates, pb techniques…) 4
Possible valeur prédictive du taux de TRPV1 muqueux et sous muqueux 4
Capsaïcine: intérêt démontré dans HAVR neurogène mais pas de validation dans l’HAV
idiopathique ni secondaire
En pratique…
Avantages: faisabilité instillation intravésicale ambulatoire, 60 minutes; Respect de la
contractilité du détrusor;
Inconvénients: Tolérance imparfaite si administration en solution alcoolique, molécules
hors AMM réservées à certains CHU.
Vanilloïdes plutôt réservés aux patients neuro, protocoles thérapeutiques
1.Silva 2007, BMC Urol, 7:9; 2.Kuo 2004, J Urol 176:641; 3.Apostolidis 2006, Eur Urol 50:1299;
4. Liu 2007, BJU Int 100:1086.
Electrostimulation externe et hyperactivité vésicale rebelle
• Intérêt thérapeutique de la stimulation électrique périphérique en urologie connu
depuis près de 30 ans
– Sites et modalités multiples (Stimulation implantée pudendale ou sacrée,
stimulation endocavitaire, stimulation transcutanée, Stimulation magnétique
sacrée…
– Effets aigus cliniques ou urodynamiques majoritairement rapportés
– Mais
• pertinence fonctionnelle et maintien à long terme encore rarement
démontrés
• faisabilité des modes de stimulation souvent contestable
• Développement récent de modalités de stimulation externe non invasive
administrable à domicile ou en cabinet médical simple
Arguments croissants en faveur intérêt neurostimulation tibiale postérieure
Neurostimulation tibiale postérieure et hyperactivité vésicale rebelle
Principe
Stimulation du nerf tibial postérieur à la cheville
à l’aiguille percutanée ou électrode adhésive transcutanée
Nerf mixte, contingent de fibres L4-S3, originaires de
segments impliqués dans l’innervation périnéale et vésicale.
Mode d’action
Inhibition centrale motoneurones vésicaux préganglionnaires,
Interaction sur inter neurones segmentaires
Action sur voies lemniscales de la colonne médiane dorsale
Suppression phénomènes d’amplification centrale (noyau caudé)
Voie percutanée à l’aiguille électrode implantée
Séances de 30 minutes, 1à 3/semaines, au moins 12 séances
Milieu médicalisé, Appareillage non disponible en France
Voie transcutanée par électrodes adhésives
Stimulation quotidienne (20’) à domicile, auto-administrée,
3 mois.
Appareil disponible et inscrit à la LPR, location ou achat
Neurostimulation tibiale postérieure et hyperactivité vésicale rebelle
Stimulation aigue
Effet cystomanométrique démontré
dans l’HAVR idiopathique et neurogène1,2
CVF/volume réflexe
Stimulation chronique3-7
Résultats convergents des études cliniques
multicentriques, adultes/enfants
Bénéfice significatif continence et HAV
60 à 80% (jusqu’à 55% continents)
Amélioration qualité vie, // à
garnitures
CVF/volume réflexe,
Rares disparitions CNID
Meilleures réponses si symptomatologie
essentiellement clinique 6
Moindre réponse si altération ++ qualité
vie (particulièrement items santé mentale)7
1 Amarenco
2003, J Urol,169:2210
2003, J Urol 170:926;3 Soomro 2001,J
Urol 166:146;4Van Balken 2001, J Urol
166:914;5Govier 2001, J Urol 165:1193;
6VanVandoninck 2003, NeuroUrol 22:227. 7Van
Balken 2006 Eur Urol 49:360;2006
2Andrews
Neurostimulation tibiale postérieure
• Peu de données sur le suivi à long terme après une session thérapeutique
• Intérêt suggéré des traitements séquentiels dans l’HAVIR 1
• Réapparition des troubles après 6 semaines d’arrêt chez 2/3 des patients,
• Efficacité du renouvellement des séances chez 82% patients
• En pratique…
Traitement simple, atraumatique, conservateur, adaptable
Pas d’ES systémiques ni interactions médicamenteuses (grossesse, âge, enfant)
Rares contre-indications rares (pace maker)
Appareil transcutanée disponible et pris en charge en France
A retenir en seconde intention avant toute prise en charge invasive dans l’HAVR
• Modalités des répétitions des cycles à préciser
Faisabilité ++ si transcutanée
Perspective amélioration voie percutanée : Etude pilote 2
électrode implantée + stimulation magnétique externe, 3 par
semaine à domicile: 70% maintien efficacité clinique à 1 an
1
Van der Paal 2006, BJU Int 97:547; 2 Van der Paal 2006, Int Neuromod Soc, 9(2): 163.
Electrostimulation externe et hyperactivité vésicale rebelle
Stimulation électrique transcutanée sacrée 1,2
Electrodes adhésives en regard foramen sacré. Stimulation biquotidienne 20 à 60’.
Bénéfice clinique sur urgenturie/pollakiurie mais moindre sur continence dans
HAVR de l’enfant.
Maintien à long terme et intérêt chez l’adulte méconnu.
Stimulation magnétique externe:
Siège avec aimant et système refroidissant induisant un champ
magnétique sacré. Anus au centre de l’aimant (contraction).
Effet urodynamique aigu: suppression CNID volo-induite 3
Stimulation chronique (2/sem/6sem): Effet urodynamique
(CVF, PD), mais pas de bénéfice clinique et contraintes ttt
50% arrêt 4
Pas d’intérêt thérapeutique mais aide possible pour prise de
conscience muscles périnéaux 5
1 Malm-Buatsi
2007, Urology 70:980; 2 Bower 2001, J Urol 166:2420. 3 Mc Farlane 21997, Brit J Urol 80:734;
4
Bradshaw 2003; 91:810; 5 Van der Zalm 2006, BJU Int 97:1035;
Traitement médical de l’hyperactivité vésicale rebelle
Algorithme
Préalable à tout traitement médical de l’HAVR:
Analyse facteurs environnementaux et comportementaux
Définition des objectifs thérapeutiques
Première ligne de traitement= pharmacologie orale
Titration individuelle des anticholinergiques
Pas d’argument probant en faveur agent oral efficace de seconde ligne , gabapentine
Association alpha-bloquants/gabapentine
Intérêt de l’association à agents visant cibles non-cholinergiques à définir
Stimulation tibiale postérieure transcutanée
En première ligne si risque intolérance pharmacologie
En seconde si échec thérapies orales
Place des thérapies endovésicales encore marginale chez patient non neurologique:
perspectives d’amélioration faisabilité et durée d’efficacité en développement.
Recours au traitement chirurgical demeure de troisième ligne si préjudice organique
mal contrôlé et/ou retentissement fonctionnel persistant après échec modalités médicales.