Mobilisation musulmane au Bourget

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Mobilisation musulmane au Bourget
Mobilisation musulmane au Bourget
Dans le brouhaha de la foire musulmane du Bourget (Seine-Saint-Denis), la plus grande
d'Europe, des cris de bébé se font entendre: sur l'écran accroché au-dessus d'une vente de
gâteaux faits maison, des secouristes dégagent la tête de l'enfant, coincée sous les gravats
après un bombardement à Alep. "Je suis Syrie", conclut la vidéo-choc après une autre série
d'images insoutenables sur fond de musique hollywoodienne.
Choquer pour faire prendre conscience
"On revendique de choquer, pour que les gens prennent conscience du drame à des kilomètres
de chez eux. Et encore, on édulcore ", assume Mohammad Alolaiwy, 31 ans, président de
Syria Charity. Avec son budget de 3,5 millions d'euros, son association finance des colis
humanitaires, le parrainage d'orphelins, une maternité, et des ambulances, dont quatre
soutenues financièrement par la région Ile-de-France. "
Et
malheureusement, à cause du conflit, on continue de grossir
", constate cet ingénieur en télécoms, qui entend "
aider les gens qui le veulent à rester en Syrie
".
"Grâce à l'effet boule de neige des réseaux sociaux", l'association fondée en 2011 a vite grandi,
affichant près de 500.000 fans sur Facebook. Presque autant que Baraka City, association très
en faveur chez les jeunes des quartiers populaires, mais contestée en raison des positions
ambigües de ses fondateurs, des trentenaires au profil salafiste.
Toutes deux sont parmi les plus connues des visiteurs de ce 33e rassemblement annuel des
musulmans de France, organisé par l'Union des organisations islamiques de France (UOIF).
Installées au coeur de l'espace commercial, où chacun des 50.000 visiteurs dépense en
moyenne 250 euros, elles côtoient quatre ONG musulmanes internationales, sans compter de
nombreuses oeuvres locales pour les écoles et les mosquées, qui tentent chacune de lever des
fonds.
Signe de son essor, Syria Charity est passée d'un petit stand l'an dernier à 90 m2 d'espace,
une ambulance tournant sur un présentoir comme au salon de l'Auto. Baraka City déploie un
grand plateau au design moderne, baigné de lumière. La foule s'y presse pour découvrir les
forages d'eau potable en Afrique et acheter les t-shirts, omniprésents dans les allées. "Leurs
réseaux sont plus fermés, plus communautaires
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", affirme un bénévole d'Human Appeal, importante ONG musulmane britannique également
présente. "
Nous, nous avons plus de donateurs et de réseaux non-musulmans"
, explique-t-il. "
Mais en France, avec la laïcité, ils ont besoin de se démarquer
", pense ce trentenaire.
Humanisme et solidarité
L'outil qui attire les visiteurs de son stand, c'est le casque virtuel: une immersion à 360° dans le
quotidien de Gaza et la vie dans une baraque de tôles. "Quand les gens voient les frères en
Syrie, à Gaza, au Népal, alors ils donnent, à la fois par humanisme et par solidarité entre frères
", explique-t-il. L'aumône (la zakat) est l'un des cinq piliers de l'islam, une obligation pour tout
musulman.
Avec un budget de 37,6 millions d'euros en 2014, le Secours islamique, qui fête ses 25 ans,
cultive aussi un style semblable aux ONG non-confessionnelles, moins spectaculaire et
communautaire. Dans la halle associative, à l'écart de la foire commerciale, il organise des jeux
et ateliers de bricolage avec des objets de récupération pour sensibiliser les enfants à la
solidarité avec les pays du Sud.
Pendant ce temps les parents sont invités dans une tente, où a été récréé l'intérieur d'un
appartement syrien. Sirènes hurlantes, explosions: Sabrina, 32 ans, a 30 secondes pour choisir
l'essentiel à emporter sur la voie de l'exil. Elle choisit d'embarquer le "bébé" (une poupée), des
couvertures, un sac de couchage, une gourde et un téléphone. "Il manque l'argent et les
chaussures, primordiales
", lui
expliquent les bénévoles.
"J'ai été plus dans l'affectif que la raison", analyse cette mère de trois filles, venue en famille au
Bourget. "
Au-delà des films qu'on peut voir, ça fait
vraiment réfléchir sur ce que vivent les réfugiés. En France, nous, on est épargné.
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