Picard Surgelés en grève contre son premier plan social

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Picard Surgelés en grève contre son premier plan social
AGROALIMENTAIRE
Picard Surgelés en grève
contre son premier plan social
Malgré une très forte rentabilité) le leader français du surgelé supprime onze postes dans la livraison à domicile. FOy voit la conséquence du rachat de l'entreprise par un énième fonds d'investissement en octobre dernier.
«C'est le premier FSE dans
l'entreprise, s'inquiète Elisabeth Jousselin, déléguée syndicale centrale FO chez Picard.
La livraison à domicile n'est pas
rentable, mais la direction n'a
rien fait pour la relancer et elle
pousse les clients à commander par internet. Un projet de
restructuration est à l'étude,
pourquoi ne pas attendre le résultat avant de licencier?»
, TROIS PROPRIÉTAIRES
I EN DIX ANS
Elles ont planté des croix mortuaires
devant l'entrepôt pour symboliser
leurs emplois perdus. «28 ans»,
«15 ans»... sur chacune, elles ont précisé
leur ancienneté chez Picard Surgelés.
Quinze des dix-huit hôtesses chargées de
prendre les commandes par téléphone sur
le site de livraison à domicile de Cergy
voient leur poste supprimé. Seules quatre
d'entre elles seront reclassées. Le 11 avril,
elles se sont mises en grève à l'appel de la
FGTA-FO, syndicat majoritaire avec 40%
des voix. Des salariés de la plate-forme de
Nemours, des chauffeurs, des délégués
syndicaux sont venus les soutenir.
Un comité d'entreprise sur la
question du FSE est prévu le 29
avril. «Les informations restent
très succinctes, nous avons
lancé une expertise pour
mieux connaître la situation,
ajoute-t-elle. Le site de Cergy
est en location et la prochaine
expiration du bail pourrait expliquer les choses.»
Une certitude, Picard Surgelés se porte
bien financièrement. C'est l'enseigne préférée des Français, devant Ikea et Sephora, selon un sondage du cabinet OC &
C. Avec 850 magasins et 4000 salariés, elle
détient 20% du marché des produits surgelés en France. Les anciennes «Glacières
de Fontainebleau», une petite fabrique de
pains de glace fondée en 1906 par Raymond Picard, ont généré un chiffre d'affaires de 1,15 milliard d'euros en 2009.
L'activité a doublé en dix ans et les bénéfices sont confortables.
Un tel succès aiguise les appétits. En dix
ans, l'enseigne a changé trois fois de
mains, passant d'un fonds d'investissement à un autre. À chaque fois, le transfert
s'est fait sous forme de LBO (leverage buy
ouf), une opération basée sur un emprunt
bancaire. La dette est remboursée par les
ressources de l'entreprise acquise. Les investisseurs réalisent au passage une belle
plus-value.
Le dernier épisode remonte au 14 octobre
2010. Le fonds d'investissement britannique Lion Capital, déjà propriétaire du
groupe de surgelés Findus, a déboursé la
somme colossale de 1,5 milliard d'euros
pour mettre la main sur Picard. Il compte
poursuivre le développement de l'enseigne en ouvrant 30 à 40 magasins par an.
«On a l'impression que le nouveau propriétaire veut gagner de l'argent rapidement avant de nous revendre, il s'implique
davantage dans la politique commerciale,
poursuit la déléguée centrale. De plus en
plus de magasins ouvrent le midi et le dimanche matin. Le dernier fonds comptait
encore parmi ses associés le fils du fondateur, il pouvait peser un peu dans les décisions. Mais depuis octobre, ce n'est plus le
cas.»
Ses craintes portent notamment sur l'emploi à la plate-forme de Nemours, qui alimente en surgelés un dixième des maga-i
sins. «Les chambres froides, quil
fonctionnent au fréon, ne seront plus aux I
normes en 2014, ajoute la déléguée. On I
se demande si des travaux seront faits |
ou si le FSE de 11 personnes n'est pas I
un entraînement pour un plan social I
plus important.»
J