Clôture de l`instruction : quelle sanction en cas de

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Clôture de l`instruction : quelle sanction en cas de
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Clôture de l’instruction : quelle sanction en cas de
non-respect du contradictoire ?
le 4 avril 2012
PÉNAL | Instruction | Jugement
Lorsque l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel a été rendue sans que les parties
aient été mises en mesure de présenter des observations, les juges saisis de la poursuite doivent
renvoyer la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction
d’instruction, afin que la procédure soit régularisée.
Crim. 21 mars 2012, F-P+B, n° 11-87.660
La Cour de cassation réaffirme ici une solution qui pouvait sembler marginale en prescrivant aux
juges du tribunal correctionnel de renvoyer la procédure au ministère public, aux fins de
régularisation, lorsque la procédure contradictoire prévue par l’article 175 du code de procédure
pénale n’a pas été respectée (V. Crim. 29 sept. 2010, n° 10-84.003, AJ pénal 2011. 41. obs. L.
Ascensi ).
Réécrit par la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 sur l’équilibre de la procédure pénale (Dossier : La loi
du 5 mars 2007 sur l’équilibre de la procédure pénale : premiers commentaires, AJ pénal 2007. 105
), l’article 175 du code de procédure pénale organise une procédure contradictoire entre le
procureur de la République et les parties dès lors que le juge d’instruction entend mettre un terme
à l’information (E. Mercinier, Nouveau régime de la fin de l’information judiciaire : réflexions
pratiques, AJ pénal 2008. 497 ). Prévenus concomitamment de la prochaine clôture de l’instruction,
le représentant du ministère public et les parties sont appelés à échanger réquisitions et
observations et à faire connaître, au vu de cette première communication, leurs réquisitions et
observations complémentaires. Ce n’est qu’à l’issue de cette procédure, et dans le respect des
délais impartis, pendant lesquels les parties ont pu faire des demandes d’actes ou déposer des
requêtes en nullité, que le juge d’instruction est habilité à rendre son ordonnance de règlement.
En l’espèce, le caractère contradictoire de cette procédure n’avait pas été respecté car
l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel avait été rendue sans notification préalable
du réquisitoire définitif aux parties, de telle sorte que celles-ci avaient été privées de la possibilité
de présenter leurs observations. Le tribunal doit-il alors, comme le soutenait le prévenu, annuler
l’ordonnance de renvoi ?
L’article 385, alinéa 3, qui prévoit explicitement l’hypothèse du non-respect des conditions de
l’article 175, semble faire obstacle à l’annulation de l’ordonnance de renvoi dans la mesure où le
législateur se contente d’indiquer que, par exception au principe de la purge des nullités, « les
parties demeurent recevables à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la
procédure ». Dans un premier arrêt du 30 mars 2004 (n° 02-85.180, Bull. crim. n° 80 ; D. 2005. Pan.
689, note J. Pradel ; JCP 2004. IV. 2060), la chambre criminelle s’était livrée à une interprétation
littérale de cette disposition en estimant que « le défaut de notification, par le juge d’instruction, de
l’avis de fin d’information prévu par l’article 175, n’entraîne pas la nullité de l’ordonnance de renvoi
devant le tribunal correctionnel », la seule conséquence du non-respect de l’article 175 résidant
dans la possibilité octroyée aux parties de soulever des nullités pendant l’audience correctionnelle.
La solution, logique au regard de l’article 175 dans son ancienne rédaction – le principal objectif
était alors de permettre aux parties de soulever des nullités avant la clôture de l’instruction –, se
révélait cependant impropre à remédier au non-respect du caractère contradictoire introduit par la
loi du 5 mars 2007(sur l’ensemble de cette question, V. C. Guéry et B. Lavielle, Copié, collé, jugé ?
Sur la motivation des ordonnances de renvoi par le juge d’instruction, Dr. pénal 2010. Étude 24).
C’est pourquoi, la Cour de cassation, comme elle l’avait déjà fait en 2010 (V. Crim. 29 sept. 2010,
préc.), impose dans cet arrêt une autre solution en se fondant non plus sur le troisième alinéa de
l’article 385 mais sur le second alinéa de ce texte. Ce détour peut sembler curieux, l’article 385,
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alinéa 2, visant le non-respect des conditions prescrites par les articles 183, 217 et 184 du code de
procédure pénale, aucune mention n’étant faite à l’article 175. L’article 184 permet toutefois de
rétablir ce lien puisqu’il concerne précisément la forme et le contenu de l’ordonnance de renvoi qui,
depuis la loi du 5 mars 2007, doit être motivée au regard « des réquisitions du ministère public et
des observations des parties qui ont été adressées au juge d’instruction en application de l’article
175 […] ». Or la méconnaissance de l’article 184 permet au tribunal correctionnel de renvoyer la
procédure au ministère public, lequel devra saisir à nouveau le juge d’instruction aux fins de
régularisation de la procédure. Le troisième alinéa de l’article 385, issu de la loi n° 99-515 du 23
juin 1999, devient, de facto, lettre morte. A priori peu conforme à la lettre de l’article 385, cette
solution respecte cependant l’esprit de la réforme entreprise en 2007 en permettant de réinstaurer
le contradictoire recherché par le législateur.
par C. Girault
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