INFECTION NOSOCOMIALE

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INFECTION NOSOCOMIALE
INFECTION NOSOCOMIALE :
DEFINITION, FREQUENCE ET RISQUE
2.01
Objectif
Pour mettre en place une surveillance et une prévention efficace des infections nosocomiales, il est
indispensable de disposer de définitions opérationnelles simples et validées de ces infections et de
connaître les facteurs qui les favorisent (facteurs liés aux malades ou à l’environnement).
Ces éléments de base seront présentés ci-dessous et rappelés dans les fiches correspondant aux quatre
sites principaux d’infections nosocomiales.
Techniques et méthodes
I – DEFINITION DES INFECTIONS NOSOCOMIALES
Une infection est dite nosocomiale si elle apparaît au cours ou à la suite d’une hospitalisation (ou d'un soin
ambulatoire) et si elle n’était ni présente, ni en incubation à l’admission à l’hôpital. Ce critère est applicable à
toute infection. Cette définition inclut les infections des patients comme celles des soignants. Elle ne préjuge
ni de l'origine endogène ou exogène du micro-organisme responsable, ni du caractère évitable de cette
infection.
Lorsque la situation précise à l’admission n’est pas connue, un délai d’au moins 48 heures après l’admission
(ou un délai supérieur à la période d’incubation lorsque celle-ci est connue) est communément accepté pour
distinguer une infection d’acquisition nosocomiale d’une infection communautaire. Toutefois, il est
recommandé d’apprécier, dans chaque cas douteux, la plausibilité du lien causal entre hospitalisation et
infection.
Pour les infections de site opératoire, on considère comme nosocomiales les infections survenues dans les
30 jours suivant l’intervention ou, s’il y a mise en place d’une prothèse ou d’un implant, dans l’année qui suit
l’intervention. Cette durée est également admise pour le suivi d'un accouchement.
La pratique des soins à domicile peut aussi engendrer des infections. Ces infections sont considérées
comme liées aux soins lorsqu’elles ne sont pas relatives à un séjour hospitalier ou un autre organisme de
soins et développées au moins 48 heures après l’admission à la structure de soins à domicile.
II – AGENTS PATHOGENES
Les agents en cause sont variés : bactéries, champignons, virus, parasites, ATNC.
Parmi les bactéries, les bacilles à Gram négatif représentent environ 60% des germes rencontrés, les cocci
à Gram positif 30%.
L’origine du germe peut être exogène (provenir d’un autre malade, du personnel, de l’environnement) ou
endogène (provenir du malade lui-même). Plusieurs mécanismes différents peuvent donc conduire à une
infection nosocomiale.
Si tout doit être mis en œuvre pour éviter la survenue des infections endogènes comme exogènes, c’est
essentiellement sur ces dernières que porte l’effort de prévention en évitant la transmission des germes. La
prévention des infections endogènes reste plus délicate.
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III – FREQUENCE DES INFECTIONS NOSOCOMIALES
La fréquence globale des infections nosocomiales, mesurées par des études internationales, varie entre 5 et
10% des hospitalisés. Lors de l’enquête nationale de prévalence de 2001, le taux global de prévalence des
infections nosocomiales était de 7,5% et le taux de prévalence des infectés de 6,9 infectés pour 100 patients
hospitalisés.
Ces taux varient en fonction du type d’activité du service, du recrutement de l’hôpital, de la méthode de
calcul des taux et de la qualité du travail de recueil des informations.
Il est utopique de penser qu'il est possible d'atteindre un taux nul d’infections nosocomiales. Il faudrait pour
cela ne soigner que des patients dont le système immunitaire est fonctionnel, ne présentant pas d’autres
facteurs de risque, chez lesquels aucun dispositif invasif ne serait utilisé et pour lesquels aucun geste invasif
médical ni opération chirurgicale ne seraient réalisés.
Il existe donc un taux « incompressible » d’infections nosocomiales, qu’il faut s’efforcer de réduire au
minimum par une technique rigoureuse et une attention constante des équipes de soins, du CLIN et de
l’équipe opérationnelle d’hygiène.
Les infections les plus fréquemment rencontrées sont, selon un ordre décroissant et d’après l’enquête
nationale de prévalence 2001 :
-
les infections urinaires
les infections de la peau et des tissus mous
les pneumopathies
les infections de sites opératoires
IV – CRITERES DE DIAGNOSTIC UTILISES POUR LA SURVEILLANCE
Dans le contexte de la surveillance épidémiologique, les critères de définition peuvent être différents des
critères utilisés dans un contexte de diagnostic ou de traitement. En effet l'objectif n'est pas le même. On
recherche dans ce contexte des critères utilisables dans des structures de soins différentes, tout en
garantissant une reproductibilité maximale, avec une sensibilité et une spécificité évaluées et constantes.
Des définitions types basées sur des critères cliniques et microbiologiques sont rassemblées dans un guide
édité en 1999 par le ministère de la santé (100 recommandations pour la surveillance et la prévention des
infections nosocomiales). Ces définitions sont reprises en partie ci-dessous.
INFECTION URINAIRE
Pour les formes symptomatiques les signes classiques sont les suivants :
- fièvre
- douleur
- envies impérieuses
- dysurie
- pollakiurie
- brûlures
- faux besoins
- mais aussi : douleurs irradiées, contracture abdominale, baisse de l'état général
La preuve est toujours microbiologique. L’Examen CytoBactériologique des Urines (ECBU) est considéré
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comme positif en fonction de valeurs seuils : ≥ 10 micro-organismes/ml avec une seule espèce microbienne
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isolée ou ≥ 10 micro-organismes/ml et 10 leucocytes/ml.
Il peut être choisi d'utiliser d'autres valeurs seuils mieux adaptées à certaines populations, mais dans ce cas
attention aux comparaisons !
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INFECTION DE SITE OPERATOIRE (ISO)
L'ISO se définit par la présence de pus provenant d'une des localisations suivantes :
- partie superficielle de l'incision chirurgicale (peau et tissus sous cutanés)
- partie profonde de l'incision chirurgicale (tissus mous profonds en dessous de l’aponévrose)
- cavité ou organe à proximité ou à distance du site opératoire mais lié(e) à l’intervention.
Une ISO est considérée comme nosocomiale quand elle n'est ni présente ni en incubation à l’entrée et si elle
survient dans les 30 jours qui suivent l’intervention ; cette période est étendue à un an en cas de mise en
place de matériel prothétique artificiel.
PNEUMOPATHIE
Diagnostic radiologique (opacités parenchymateuses récentes)
ET
- isolement d’un germe par une méthode reconnue (ponction, LBA, brosse protégée…) ou sérologie
- ou symptomatologie clinique évocatrice
Dans le contexte de la réanimation, des définitions plus restrictives sont couramment proposées.
INFECTION LOCALE SUR CATHETER
Pus franc ou liquide puriforme au niveau de l’émergence ou de la tunnellisation du cathéter.
INFECTION SUR CATHETER AVEC BACTERIEMIE
Hémoculture périphérique (prélevée par ponction veineuse) positive
ET un des critères suivants :
Cas 1 : infection locale et isolement du même micro-organisme dans le pus et le sang périphérique
Cas 2 : culture positive de cathéter et isolement du même micro-organisme dans l’hémoculture
Cas 3 : le rapport de la concentration de micro-organismes de l’hémoculture prélevée sur cathéter à la
concentration en micro-organismes de(s) l’hémoculture(s) périphérique(s) est supérieur ou égal à 5
Cas 4 : signes cliniques d’infection résistant à l’antibiothérapie mais disparaissant 48h après l’ablation du
cathéter
Cas 5 : signes cliniques d’infection lors de la manipulation du cathéter.
V – LES FACTEURS DE RISQUES INFECTIEUX LIES AU MALADE
La présence chez les malades de certaines caractéristiques augmente, quelque fois de façon très
importante, leur risque d’acquérir une infection nosocomiale :
1) Les pathologies chroniques
-
diabète
insuffisance rénale
insuffisance hépatique
incontinence (facteur majeur des infections urinaires)
immunodépression (aplasie, leucopénie, leucémie, cancer, SIDA)
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2) Certaines pathologies aiguës motivant l’hospitalisation
-
polytraumatisme
brûlures
défaillance viscérale aiguë
3) Un état nutritionnel perturbé
La dénutrition est un facteur favorisant important pour tous les sites d’infections et l’obésité favorise les
abcès pariétaux post-opératoires.
4) L’âge
Avant un an et après 65 ans, le risque infectieux est toujours majoré.
D'autres facteurs sont établis dans la pathogénie des différentes localisations d'infection nosocomiale ou
dans des situations particulières (maternité par exemple).
VI – LES EXPOSITIONS A RISQUE INFECTIEUX LIES AUX SOINS DIAGNOSTIQUES
ET THERAPEUTIQUES
En plus du risque individuel du malade, la nature et la qualité des soins influent sur le risque d’acquérir une
infection nosocomiale.
1) Les interventions chirurgicales
Le risque d’infection du site opératoire (ISO) est inégal selon le type d’intervention pratiquée. Ceci amène à
formaliser une classification des interventions selon la probabilité de contamination du site opératoire. Ce
sont les classes de contamination de l’American College of Surgeon (voir fiche 2.02).
Ce facteur rentre dans le calcul du score NNIS qui comprend en outre :
-
La durée de l’intervention
L’état général du patient (reflété par le score ASA).
Grâce à ce score, des groupes de malades ayant sensiblement le même risque de développer une ISO
peuvent être formés. Ceci autorise par la suite des comparaisons de taux d’ISO dans des groupes
homogènes de patients par rapport au risque de développer cette infection.
2) Les actes invasifs, les dispositifs invasifs
-
endoscopie
dialyse
sondage
intubation/ventilation
drainage
perfusion, alimentation parentérale
ponction
cathétérisme
Ces actes et la pose de dispositifs invasifs sont plus fréquents en réanimation et en unité de soins intensifs,
ce qui explique le risque accru dans ces services (voir fiche 15.04).
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3) Les traitements diminuant la résistance à l’infection
-
corticothérapie prolongée
radiothérapie
chimiothérapie anticancéreuse
Les services d’hématologie ou d’onco-hématologie sont, de ce fait, des services ou l’infection sera
particulièrement redoutée (voir fiche 15.05).
4) Les insuffisances dans l’organisation des soins
Chaque insuffisance dans l’organisation des soins s’accompagne de portes d’entrée potentielles qui sont
autant d’occasions mises à profit par les germes.
Les recommandations de ce guide visent à réduire les plus graves d’entre-elles.
Cinq types d’erreurs peuvent être particulièrement lourdes de conséquences :
- Hygiène des mains défectueuse
- Stérilisation inefficace
- Désinfection insuffisante
- Asepsie insuffisante
- Antibiothérapie mal conduite.
Pour en savoir plus
Références
AVRIL JL, CARLET J. Les infections nosocomiales et leur prévention. Ellipses, Paris, 1998, 679 pages.
BEAUCAIRE G. Infections nosocomiales. Epidémiologie, critères du diagnostic, prévention, principes de
traitement. La revue du praticien 1997; 47: 201-209 (NosoBase n°3734).
C.CLIN PARIS NORD. Guide de définitions des infections nosocomiales. C.CLIN Paris-Nord, Paris,1995, 78
pages.
GAMBOTTI I, GIRARD R, FABRY J. Etablir un programme de surveillance des infections en hospitalisation à
domicile. HygièneS 2001; IX, 1: 31-37 (NosoBase n°8599)
GARNER SJ, JARVIS WR, EMORI TG, et al. CDC définitions for nosocomial infections, 1988. Am J Infect
Control 1988; 16: 128-140 (NosoBase n°329)
Guides et recommandations
COMITE TECHNIQUE NATIONAL DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (CTIN). Cent recommandations pour la
e
surveillance et la prévention des infections nosocomiales. 2 ed. Ministère de l'Emploi et de la Solidarité,
Secrétariat d'Etat à la Santé et à l'Action Sociale. 1999, 121 pages.
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