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DROIT IMMOBILIER P R E S T I G E • 4 1 Il faut bien se renseigner sur les éventuelles servitudes avant d’acheter! P R O P R I E T E PA R E TA G E S ( P P E ) Qui décide de quels travaux? Dans le cadre d’une copropriété organisée en propriété par étages (PPE), des litiges peuvent surgir entre copropriétaires à propos des travaux à exécuter dans leur immeuble. Dans ce contexte, il s’agit de bien distinguer d’une part les travaux qu’un copropriétaire entend exécuter dans son propre appartement, et d’autre part ceux que la copropriété dans son ensemble désire entreprendre sur les parties communes de l’immeuble. D ans ce contexte, des dispositions légales et réglementaires prévoient des règles qui déterminent à quelles conditions certains travaux peuvent être décidés par les copropriétaires. Ces règles dépendent de la nature des travaux, qui se distinguent en travaux nécessaires, utiles ou d’embellissement. Bases légales et réglementaires Me Patrick Blaser, avocat, associé de l’Etude Borel & Barbey, Genève. 90 Une partie de ces règles font l’objet des articles 647c, 647d, 647e et 712g du Code civil (travaux de construction). Ces dispositions légales sont la plupart du temps complétées et précisées par un règlement d’administration et d’utilisation adopté par les copropriétaires de la PPE. A Genève de nombreuses PPE appliquent le règlement type d’administration et d’utilisation de la propriété par étage élaboré conjointement par le Groupement des propriétaires d’appartement (GPA), de la Chambre genevoise immobilière (CGI) et la Société des régisseurs de Genève (SR, aujourd’hui USPI) (édition 2004). C’est un règlement type qui fait référence dans le cadre du présent article. Parties privatives et parties communes Pour déterminer les règles applicables, il convient préalablement de distinguer les travaux qui portent sur les parties privées ou sur les parties communes de la PPE. La partie privée d’une PPE correspond aux locaux ou surfaces qui font l’objet d’un droit exclusif, attribué à l’un des copropriétaires de la PPE à l’exclusion des autres. En général, ce droit exclusif porte sur un lot qui peut correspondre notamment à un appartement, à un local commercial, à une cave, à un grenier ou à une place de parc. Les parties communes d’une PPE correspondent quant à elles aux locaux et surfaces qui ne sont pas attribués à titre exclusif à l’un des copropriétaires de la PPE et qui peuvent par conséquent être utilisées par chacun des copropriétaires. Ces parties communes ne font en général pas l’objet d’un lot. Elles peuvent concer- ner les voies d’accès à l’immeuble, les halls d’entrée, les couloirs, les parkings, les buanderies, les jardins, voire la piscine. Travaux dans les parties privatives Le copropriétaire exclusif d’un lot peut en principe l’aménager et l’utiliser comme il l’entend, c’est-à-dire sans avoir besoin d’obtenir une décision de l’assemblée des copropriétaires. Mais cette liberté a toutefois des limites inhérentes aux statuts de la PPE. En effet le copropriétaire exclusif d’un lot ne peut l’aménager l’utiliser librement que pour autant qu’il: • ne restreint pas l’exercice du droit des autres copropriétaires ; • n’endommage pas les parties et installations communes du bâtiment ni n’en entrave l’utilisation; • ne modifie pas l’aspect extérieur du bâtiment. Concrètement, le copropriétaire ne peut notamment pas: • modifier l’aspect extérieur des locaux; • encombrer son balcon ou sa terrasse d’objets visibles depuis l’extérieur de l’immeuble; • provoquer des dégâts sur les lots voisins par infiltration d’eau ou fumée; • changer la destination des locaux. Par contre, le propriétaire peut: • rénover complètement les différentes pièces de son lot; • modifier la répartition interne des pièces de son lot; • agrémenter librement son jardin. Cela pour autant que l’exercice de l’ensemble de ses droits ne provoque F É V R I E R – A V R I L pas de nuisances pour les autres copropriétaires. Dans ce contexte, il convient de distinguer les travaux d’entretien, et de réparation courants, des travaux d’aménagement. Les travaux d’entretien et de réparation constituent en fait une obligation à charge du copropriétaire, qui est tenu d’assurer que son lot ne péjore pas le bon état du bâtiment, notamment en ce qui concerne les terrasses, en particulier celles en attique, et les balcons dont le copropriétaire concerné doit assurer l’étanchéité. En cas de travaux d’aménagement, le copropriétaire doit préalablement indiquer à l’administrateur de la PPE quelle est la nature des travaux envisagés, ainsi que leur déroulement, et obtenir son autorisation pour les réaliser. Cette autorisation doit être donnée, pour autant que les travaux envisagés: • ne portent pas atteinte aux parties communes; • ni aux droits exclusifs d’autres copropriétaires; • n’entraînent pas d’augmentation des charges de copropriété; • seront effectuées durant les heures officielles d’ouverture des chantiers; • ont été, lorsque cela est nécessaire, dûment autorisés par l’autorité administrative compétente. Travaux dans les parties communes S’agissant des travaux à effectuer sur les parties communes, un certain 2 0 1 4 nombre de dispositions légales ou statutaires doivent être respectées. Dans ce cadre il convient de distinguer: • les travaux nécessaires; • les travaux utiles; • les travaux d’embellissement; • les travaux urgents. Les travaux nécessaires Les travaux nécessaires correspondent aux travaux d’entretien, de réparation et de réfection qui permettent de maintenir l’état et la valeur de l’immeuble. Ces travaux peuvent concerner normalement l’entretien, la réparation, voire la réfection: • des voies d’accès extérieures et intérieures; • de la toiture; • des façades; • du chauffage de l’immeuble et autres installations communes. Dans ce contexte, ces travaux doivent avoir été acceptés par l’Assemblée des copropriétaires à la majorité, dite simple, des copropriétaires présents ou représentés. Les travaux utiles Les travaux utiles correspondent à des travaux de réfection ou de transformation qui sont susceptibles d’augmenter la valeur de l’immeuble ou à améliorer son rendement ou son utilité. Il peut s’agir, par exemple: • d’aménager une buanderie, un local à vélo ou d’autres locaux • 91 P R E S T I G E • communs utiles à l’ensemble des copropriétaires; • d’aménager des caves et des greniers privatifs; • de créer des places de parking; • d’installer le téléréseau. Ces travaux doivent faire l’objet d’une décision prise à la double majorité de tous les copropriétaires, présents ou représentés à l’assemblée des copropriétaires, représentant en outre, leurs parts réunies, plus de la moitié de la PPE. Dans ce cadre il convient de rappeler que chaque copropriétaire dispose d’une seule voix, quel que soit le nombre de millièmes et de parts qu’il possède. Les travaux d’embellissement Les travaux d’embellissement correspondent aux travaux d’aménagement ou de construction destinés à embellir l’immeuble, en améliorer l’aspect ou à en rendre l’usage plus aisé. Ces travaux peuvent consister en: • l’installation d’un ascenseur; • l’amélioration esthétique des façades et des surfaces intérieures, • la construction d’une piscine. Dans ce cadre, c’est l’unanimité des copropriétaires qui est nécessaire pour accepter la réalisation de ces travaux. La double majorité peut toutefois être suffisante lorsque l’unanimité ne peut être atteinte en raison de l’opposition formulée par un copropriétaire dont le droit d’usage de sa part de copropriété n’est pas entravé durablement par les travaux envisagés et dont la part de frais est prise par les autres copropriétaires. 92 4 1 Dans ce dernier cas les copropriétaires peuvent décider, à la majorité simple, que le copropriétaire réticent ne pourra utiliser le projet réalisé (notamment, par exemple, la construction d’une piscine). Les travaux urgents En cas d’urgence, c’est-à-dire de nécessité de devoir faire rapidement des travaux pour éviter la survenance d’un dommage ou pour en limiter la portée, il appartient à l’administrateur d’ordonner l’exécution des travaux nécessaires. Tel est le cas lorsqu’une installation tombe en panne, qu’une inondation se produit ou qu’un dégât peut mettre en péril le bâtiment ou ses occupants. Changement d’utilisation des locaux: Arrêt du TF du 15 avril 2013 Les travaux effectués sur une partie privative peuvent avoir pour conséquence de modifier l’utilisation voire la destination des locaux privatifs d’un copropriétaire. Sous cet angle le Tribunal fédéral, dans un arrêt récent du 15 avril 2013, distingue: • le changement d’utilisation... • ...du changement de destination. Le changement d’utilisation des locaux d’un copropriétaire, dans la mesure où le règlement PPE prévoit des restrictions à cet égard, doit être décidé à la double majorité des copropriétaires. En revanche le changement de destination de l’immeuble doit faire l’objet d’une décision prise par l’ensemble des copropriétaires. Il y a changement de destination lorsqu’en fait ou en droit, l’usage et l’affectation éco- nomique de l’immeuble sont modifiés de façon profonde et significative. Dans le cas d’espèce jugé par le Tribunal fédéral, ce dernier a considéré que le fait pour un copropriétaire d’aménager ses locaux en café-bar, alors qu’auparavant ils étaient utilisés comme librairie-agence de voyage, constituait non pas un changement de destination des locaux nécessitant une décision de l’assemblée des copropriétaires prise à l’unanimité, mais un changement d’utilisation des locaux nécessitant uniquement l’accord de la double majorité des propriétaires d’étages. n Patrick Blaser, avocat [email protected] Récemment parus dans la rubrique «Droit Immobilier» Achat d’une villa: attention aux servitudes! 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