Apport pratique de l IRM dans le diagnostic des tumeurs

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Apport pratique de l IRM dans le diagnostic des tumeurs
Tumeur s osseuses et des tissus mous
Apport pratique de l’IRM dans le
diagnostic des tumeurs osseuses :
quelles séquences ? Quels arguments
pour définir la nature maligne ?
Magnetic resonance imaging and bone tumors:
an approach diagnosis and main sequences
● É. Bridel, R. Carlier, Y. Perrier, P. Cuvelier, D. Mompoint, C. Vallée*
L
a conduite d’un examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) dans le cadre des tumeurs osseuses est actuellement bien codifiée, avec des séquences T1, T2 et l’injection de gadolinium. L’IRM permet de confirmer la présence d’une
tumeur, peut aider à la caractérisation tissulaire, et surtout établit
le bilan d’extension locorégionale d’un processus tumoral, bilan
pour lequel elle est devenue la méthode de référence. Cependant,
elle ne remplace en aucun cas la radiographie standard, qui reste
l’examen de première intention dans l’exploration d’une tumeur
osseuse. En effet, c’est elle qui permet d’établir une synthèse sur
la lésion et une conduite à tenir, en classant la lésion en lésion
quiescente, suspecte, ou intermédiaire et douteuse.
Au cours de cet exposé, nous allons détailler successivement les
séquences à disposition, le rôle de l’IRM dans le bilan d’extension, et enfin les possibilités de caractérisation tissulaire, de distinction entre bénin et malin.
Séquences rapides
Elles ont en commun de raccourcir le temps d’examen.
● Les séquences en écho de gradient (EG)1 : par cette technique,
la résolution spatiale est inférieure à celle du SE. Elle est, par
ailleurs, sensible aux artéfacts et aux hétérogénéités du champ
magnétique (2). L’EG T1 est peu satisfaisant, car le contraste
entre la tumeur et les tissus avoisinants est faible (1). L’EG T2
est plus intéressant, car le contraste entre la tumeur en hypersignal et le tissu sain en hyposignal est marqué (1). La sensibilité
de l’EG aux artéfacts peut également être un atout : elle permet
de mettre en évidence des dépôts d’hémosidérine dans les
tumeurs à composante hémorragique comme la synovite villonodulaire ou des gaines tendineuses. De plus, ces séquences
offrent la possibilité de réaliser des séquences volumiques tridimensionnelles.
Les séquences de spin écho rapide (SER) : l’intérêt est de
diminuer le temps d’acquisition par rapport au SE. Le SER T1
offre le même contraste que le SE T1 entre la tumeur et les tissus
environnants. Le SER T2 est une séquence flatteuse en raison de
la qualité de l’image qui y est en général très bonne. Mais cette
séquence est inutilisable et doit être évitée en pathologie tumorale osseuse, car le contraste entre la tumeur en hypersignal et la
graisse en hypersignal est très mauvais (figure 2). En revanche,
l’association à des séquences de suppression de graisse change
les possibilités de cette séquence (1) (figure 1).
●
SÉQUENCES
Séquences de spin écho (SE)
Le SE T1 est une séquence de référence. La résolution spatiale
est bonne. Chez l’adulte, la médullaire osseuse normale est en
hypersignal compte tenu du remplacement de la moelle “rouge”
ou hématopoïétique par une moelle “jaune” ou graisseuse. Les
tumeurs osseuses sont le plus souvent en hyposignal (figure 1).
Par conséquent, il existe un contraste spontané et les limites de la
tumeur avec l’os sain sont bien définies. Les muscles quant à eux
sont en hyposignal et le contraste spontané entre la tumeur et les
muscles environnants est mauvais (1) (figure 1).
En SE T2, les tumeurs sont en hypersignal. La moelle jaune et les
muscles sont en hyposignal. Le contraste entre la tumeur et les
structures saines environnantes, os et muscles, est donc bon.
* Service d’imagerie médicale, hôpital Raymond Poincaré, Garches.
1 Le principe est de diminuer l’angle d’impulsion initiale (inférieur à 90°) et
de remplacer l’impulsion de 180° par un gradient de rephasage.
2 Elles débutent par une impulsion de 180° qui a pour but d’inverser l’aimantation longitudinale, l’impulsion de 90° étant appliquée au temps d’inversion.
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Séquences en inversion-récupération2
On peut supprimer le signal d’un tissu en choisissant un temps
d’inversion (TI) proche du signal T1 de ce tissu. Pour les
séquences STIR (Short T1 Inversion Recuperation), le TI court
permet de supprimer le contraste de la graisse, mais également
les structures à T1 courts proches de la graisse (méthémoglobine,
gadolinium). Le contraste entre les tissus sains et les tissus à T1
et T2 longs, en fort hypersignal (tumeur, œdème, etc.) est très
marqué (figure 2). C’est une séquence plus sensible que le SE
T1, mais dont la résolution spatiale est médiocre (2). Le temps
d’acquisition est long, mais les nouvelles séquences STIR rapides
ont permis de le diminuer. Le STIR est utilisé dans les bilans de
tumeur utilisant des grands champs (métastases rachidiennes, segments de membre) (1).
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e
b
c
Figure 1. Patient âgé de 23 ans atteint d’un ostéosarcome du fémur gauche.
Des coupes axiales T1, T2 Fat Sat, T1 Fat Sat gadolinium (a, b, c), ainsi
que des coupes sagittales T1, T1 Fat Sat gadolinium (d, e) et frontale T2
Fat Sat (f) illustrent cette tumeur osseuse chez ce patient. Ces différentes
coupes montrent une atteinte diaphysaire fémorale inférieure, se traduisant par un hyposignal T1, un hypersignal T2 Fat Sat, et un rehaussement
après injection de chélates de gadolinium. Il s’y associe un envahissement
des tissus mous, prédominant à la face antérieure de la cuisse. Nous noterons le mauvais contraste de la pondération T1, comparativement à la pondération T2 Fat Sat et T1 Fat Sat après injection de gadolinium, pour évaluer l’envahissement des tissus mous.
Séquences de suppression de graisse
Elles ne doivent être employées que si l’on dispose au moins d’une
séquence équivalente sans saturation du signal de la graisse.
Plusieurs techniques sont utilisées pour saturer la graisse et augmenter le contraste entre la tumeur et son environnement :
3 Les protons de la graisse ont une fréquence de résonance différente des
protons de l’eau. On incorpore à la séquence une impulsion sélective centrée exactement sur le pic de résonance de la graisse entraînant une destruction de l’aimantation longitudinale de ce tissu et annulant ainsi son
signal.
4 Le gadolinium est un agent paramagnétique qui raccourcit leT1 et qui augmente donc le signal de la lésion dans laquelle il diffuse.
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f
La séquence STIR a été évoquée plus haut (figure 2).
La technique de saturation sélective de la graisse (Fat
Sat) 3 : cette séquence est très utilisée en T1 après injection
de gadolinium et est très intéressante pour mettre en évidence des lésions à proximité de structures graisseuses
(figure 1). Par ailleurs, elle ne supprimera que la graisse,
sans altérer les tissus ayant des T1 équivalents. On peut également l’utiliser en T2, notamment pour rechercher un
œdème intraosseux (figure 1f). Cependant, l’homogénéité
de la saturation de graisse est moins bonne qu’avec des
séquences en inversion récupération (IR) ; par ailleurs, elle
est plus sensible à la présence de matériel (2).
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Injection de gadolinium4
Le gadolinium est utilisé par voie intraveineuse pour apprécier la
vascularisation d’une lésion, ses limites et son extension, et permet de mieux différencier les zones tissulaires des liquidiennes
(kyste, nécrose) (2). Cependant, cette injection ne modifie pas
l’attitude thérapeutique (1). L’association à une technique de saturation de graisse augmente le contraste avec l’environnement péritumoral, surtout en cas de lésions agressives (figure 1). Dans certains cas, l’injection peut être minutée et la cinétique de prise de
contraste étudiée.
EXTENSION ET STAGING
L’IRM est aujourd’hui l’examen le plus performant pour répondre
à l’extension locorégionale grâce à l’application des différentes
séquences. L’examen doit être réalisé si possible avant la biopsie
chirurgicale pour limiter la surévaluation de l’extension tumorale
liée à l’œdème et aux phénomènes hémorragiques en rapport avec
la procédure (3).
L’évaluation de l’extension est essentiellement réservée aux
tumeurs malignes et à un moindre degré à certaines tumeurs
bénignes à caractère agressif. Elle peut être locorégionale, intraosseuse au niveau du canal médullaire et extraosseuse au niveau des
parties molles, et à distance avec des localisations secondaires,
principalement pulmonaires ou osseuses (4).
La classification la plus utilisée pour les tumeurs musculo-squelettiques est celle de W.F. Ennecking (5). Elle est fondée sur trois
composantes :
● Le grade chirurgical, classé I ou II : le grade I est un bas grade,
le II un haut grade. Il est à noter que ce grade n’est pas toujours
corrélé au grade histologique, mais au pronostic de la tumeur.
● L’extension locale (T) détermine l’extension anatomique de la
lésion. Le principal facteur qui définit la qualité d’une marge de
résection chirurgicale est le fait que la lésion soit située dans un
compartiment anatomique bien limité. Ainsi, les chirurgiens distinguent deux stades : le stade A ou intracompartimental (tumeur
au sein d’un compartiment bien limité) et le stade B ou extracompartimental (tumeur dépassant les limites d’un compartiment). Les limites des différents compartiments sont des barrières
anatomiques comme l’os cortical, le cartilage articulaire, la capsule articulaire, les fascias et les tendons. Il est important de noter
que la zone d’œdème réactionnel autour de la tumeur contient le
plus souvent des micronodules tumoraux satellites et qu’elle doit
être considérée comme une partie intégrante de la lésion.
● La présence ou l’absence de métastases osseuses régionales ou
à distance (M0 ou M1) est le troisième facteur dans l’établissement de la stadification. Les sarcomes musculo-squelettiques
métastasent le plus souvent par voie hématogène aux poumons et
donnent plus rarement des adénopathies locorégionales.
Les caractéristiques tumorales nécessaires au staging et auxquelles l’IRM répond sont :
● L’extension dans l’os : l’extension endocanalaire s’explore sur
une coupe frontale ou sagittale de l’ensemble de l’os concerné,
en séquences en spin écho pondérées T1, où l’hypersignal graisseux normal est remplacé par un signal hypo- ou iso-intense
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c
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Figure 2. Myélome chez une patiente âgée de 70 ans.
Les coupes sagittales en pondération T1 (a), T2 (b), STIR (c), corrélées au
scanner (d), montrent une atteinte myélomateuse diffuse se traduisant par
un hyposignal T1, un hypersignal STIR diffus des vertèbres atteintes et,
sur le scanner, par une atteinte lytique. Certaines de ces vertèbres pathologiques sont le siège d’un tassement. Nous noterons le mauvais contraste
entre le processus pathologique et la graisse du spongieux des vertèbres
sur la coupe sagittale en pondération SER T2, comparativement au T1 et
à la séquence STIR.
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– l’extension dans l’articulation : il est important de savoir si l’articulation proche de la tumeur est envahie, car le geste chirurgical va être modifié, l’articulation étant alors excisée sans être
ouverte pour éviter la contamination. Les faux positifs sont assez
nombreux même si la technique est très sensible. L’absence
d’épanchement articulaire a, en revanche, une importante valeur
prédictive négative concernant l’envahissement articulaire. Le cartilage articulaire est une barrière relative à la progression tumorale et n’est généralement envahi que dans les tumeurs de grande
taille ou évoluées (3).
CARACTÉRISATION TISSULAIRE
Les tumeurs osseuses ont le plus souvent un signal non spécifique :
hyposignal T1, hypersignal T2, et prise de contraste après injection de gadolinium. Le signal ne permet pas, le plus souvent, de
différencier les tumeurs bénignes des tumeurs malignes (1, 2, 6).
Figure 3. Coupes frontales T1 Fat Sat gadolinium chez un patient âgé de
65 ans atteint d’un chondrosarcome avec présence de skips métastases sur
le fémur droit, mais également sur le fémur gauche.
(figure 1) (6). Il est nécessaire de mesurer l’extension tumorale
dans la moelle à partir d’un repère anatomique reconnu et palpable par le chirurgien lors de l’intervention (figure 1d) (3). Les
skips métastases sont des îlots de cellules tumorales (plus particulièrement dans les ostéosarcomes) qui siègent dans le même os
que la tumeur primitive ou dans un os voisin (figure 3). La plupart de ces lésions sont détectées en scintigraphie, mais des cas
de skips métastases avec scintigraphie négative ont été rapportés.
En conséquence, il est nécessaire d’associer au moins une
séquence T1 à un grand champ pour les rechercher, ou bien d’utiliser une séquence STIR, en raison de sa grande sensibilité et de
son grand champ de vue (3).
● L’extension dans les parties molles : elle sera évaluée tout particulièrement par des coupes axiales (figure 1). L’importance du
contenu aqueux de la plupart des tumeurs les rend iso-intenses
aux muscles adjacents sur les coupes en T1 et par conséquent peu
visibles (figure 1). C’est pourquoi les séquences en pondération
T2 sont nécessaires, et ont un bon contraste entre les muscles et
la tumeur. Cependant, l’hypersignal de la graisse en T2 peut nuire
à la différenciation avec la tumeur ; ce problème peut être résolu
par l’utilisation de séquences de suppression de graisse (figure 1)
(6). Une séquence STIR est une bonne alternative, malgré une résolution spatiale moins bonne et la tendance à surestimer l’extension tumorale du fait de l’hypersensibilité de la séquence au
contenu en eau (6). L’évaluation de l’extension est alors rendue
difficile par la présence de l’œdème péritumoral. La différence
entre œdème et tumeur peut reposer sur l’analyse morphologique :
l’œdème présente des prolongements linéaires qui suivent les fascias musculaires, alors que la tumeur ne les respecte pas. Malgré
cela, la distinction reste très difficile (4).
L’IRM permet également d’apprécier :
– l’envahissement neuro-vasculaire : l’IRM peut montrer que la
tumeur est au contact des structures neuro-vasculaires, mais ne
peut distinguer un envahissement précoce (3) ;
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Une tentative de caractérisation tissulaire peut être envisagée si
la tumeur est en hypersignal en T1 (1, 6) : il peut s’agir de graisse
comme dans les lipomes intraosseux, dans l’angiome vertébral
quiescent ou dans l’infarctus osseux. Le lipome intraosseux se
localise le plus fréquemment au calcanéum, au fémur proximal
et à l’humérus. Il est parfois difficile à distinguer d’autres lacunes
osseuses sur des radiographies osseuses, mais est facilement
reconnu en IRM en raison de son signal graisseux majoritaire sur
toutes les séquences. Par ailleurs, il peut contenir quelques zones
de bas ou de haut signal en T2, correspondant respectivement à
des plages de dégénérescence kystique ou à des calcifications
associées. L’angiome intraosseux est fréquent au rachis. En pondération T2, il se caractérise par un hypersignal, mais se différencie des autres lésions par son signal intense en T1 en raison de
son contenu graisseux. Les angiomes agressifs ne contiennent
typiquement pas de graisse et sont donc non différenciables des
autres tumeurs par leur signal. Cependant, certains contiennent à
la fois un contingent graisseux et un contingent cellulaire
(figure 4). L’infarctus osseux est une lésion aux contours géoa
b
Figure 4. Patiente d’une trentaine
d’années ayant deux angiomes des vertèbres thoraciques. Les coupes sagittales en pondération T1 (a), T2 (b) et
STIR (c) montrent ces angiomes qui se
traduisent par les hypersignaux T1 et
T2, et une atténuation du signal sur la
séquence STIR, témoignant du
contenu graisseux de ces angiomes.
Concernant l’angiome le plus haut situé, il persiste un discret hypersignal STIR,
témoignant de la composante cellulaire de ce dernier.
c
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a
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Figure 5. Coupes axiales en pondération T1 (a), T2 (b), corrélées à une
coupe axiale en tomodensitométrie
(c) chez une patiente âgée de 65 ans
atteinte d’un chondrosarcome de
bas grade de l’extrémité humérale
supérieure droite. Ces coupes montrent une lésion osseuse bien limitée, se traduisant par un hyposignal
T1 et un hypersignal T2. La matrice
lésionnelle est le siège de calcifications annulaires, qui se traduisent
quelle que soit la séquence par un
hyposignal ; pour preuve, la corrélation avec le scanner, qui montre ces
calcifications et leur hyperdensité dans la matrice tumorale.
c
graphiques avec un aspect serpigineux et des bords en hyposignal
en pondération T1 et T2. Il contient de la graisse en son centre.
Enfin, l’hypersignal T1 peut correspondre à une composante
hémorragique.
L’hyposignal en T2 que peut présenter une tumeur peut être en
rapport avec une matrice contenant des calcifications, une matrice
osseuse ou une condensation osseuse, ou encore en rapport avec
un tissu fibreux (1, 6). Les matrices osseuses ou cartilagineuses
sont cependant mieux analysées en radiographie standard et surtout en tomodensitométrie (figure 5). Les lésions fibreuses ont
un aspect le plus souvent en signal bas ou intermédiaire en T2,
mais elles ont un aspect variable. Le fibrome non ossifiant, par
exemple, est une tumeur bénigne découverte le plus souvent fortuitement chez le jeune adulte. Il est le plus souvent diagnostiqué
en radiologie conventionnelle, mais peut être découvert au cours
d’une IRM. Il se caractérise par un signal hypo-intense en T1 et
souvent par un signal hypo-intense ou intermédiaire en T2 en raison de son caractère fibreux. Cependant, un signal hyperintense
en T2 peut être observé.
Les niveaux liquide-liquide sont des niveaux hématohématiques
avec sédimentation des hématies et sérum surnageant (figure 6)
(1, 4, 6). Ce ou ces niveaux peuvent apparaître en cas d’hémorragie intratumorale, en particulier intrakystique, et sont presque
toujours associés à une architecture en logette. Ils ne sont pas
visibles en radiologie conventionnelle, mais le sont en tomodensitométrie en fenêtrage tissu mou. C’est l’IRM qui les met le
mieux en évidence, surtout sur les séquences en spin écho pondérées T2, où le surnageant apparaît en hypersignal et le sédiment
en signal moins intense, l’intensité dépendant du degré de dégradation du sang (4). Sur les séquences en spin écho pondérées T1,
cet aspect peut être invisible (désoxyhémoglobine iso-intense en
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Figure 6. Coupe frontale T2 (a) et coupe sagittale T1 (b) chez une patiente
d’une quarantaine d’années ayant un kyste anévrismal acétabulaire
gauche, se traduisant par une image avec niveau liquide-liquide.
T1) ou moins bien visible. Globalement, le sérum surnageant a
un signal qui suit celui de l’eau, tandis que le signal du sédiment
varie en fonction du degré de dégradation de l’hémoglobine et
donc de l’âge du sang. Cet aspect a longtemps été décrit comme
spécifique du kyste anévrismal. En fait, il peut se voir dans
d’autres tumeurs : tumeur à cellules géantes et sarcome télangiectasique, entre autres (4).
Enfin, dans certains cas, le fort hypersignal en T2, pratiquement
liquidien, peut orienter vers une tumeur à matrice cartilagineuse
(figure 5).
BÉNIN VERSUS MALIN
En général, les tumeurs bénignes ont des contours réguliers, un
signal homogène, et n’envahissent pas les structures vasculonerveuses (6). À l’opposé, les tumeurs malignes tendent à avoir un
signal hétérogène, des contours irréguliers, à s’associer à un
œdème péritumoral et enfin à avoir un potentiel d’envahissement
des structures avoisinantes (6).
Cependant, il ne faut pas s’attarder à ces principes de base, car
certaines tumeurs bénignes peuvent avoir un comportement agressif et l’IRM est alors prise en défaut : c’est le cas de l’ostéome
ostéoïde, du chondroblastome, de l’ostéoblastome, du granulome
éosinophile (figure 7), ou encore de la fracture de contrainte.
L’œdème associé à ces lésions est étendu, à la fois dans la cavité
médullaire et les tissus mous adjacents, avec pour conséquence
un aspect IRM mimant une lésion agressive (6).
Enfin, l’analyse en IRM dynamique de la prise du produit de
contraste et du rehaussement secondaire d’une tumeur, pour
essayer de différencier une tumeur bénigne d’une tumeur maligne,
a fait l’objet de travaux : le principe consiste à étudier, à partir du
rehaussement initial correspondant à la phase artérielle, la progression du rehaussement tumoral avec une analyse qualitative et
quantitative (4). L’hypothèse est que les tumeurs malignes seraient
vascularisées plus précocement et massivement, alors que les
tumeurs bénignes auraient une vascularisation plus tardive, le
contraste diffusant peu et lentement, ou pas du tout dans le tissu
tumoral (4). L’étude dynamique est réalisée en imagerie rapide
avec des séquences pondérées T1 en EG5. Les zones d’intérêt sont
sélectionnées au curseur sur l’écran. Une courbe de l’intensité du
signal de rehaussement en fonction du temps est construite. Trois
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Tumeur s osseuses et des tissus mous
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c
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e
Figure 7. Patient âgé de 30 ans souffrant de cervicalgies diurnes et nocturnes. L’IRM montre une lésion du corps vertébral de C4 en hypersignal
T2 (a, d) et en hyposignal T1 (b), se rehaussant après injection de gadolinium (e). Cette lésion a un caractère agressif et envahit les tissus mous
prérachidiens, comme le montrent les coupes axiales (d, e). Elle contient,
par ailleurs, des séquestres osseux (hyposignal intralésionnel) confirmés
par le scanner (c, f). L’examen anatomopathologique, après biopsie, a
confirmé le diagnostic de granulome éosinophile.
paramètres sont analysés : le débit du rehaussement, le type de
rehaussement précoce (présent, absent, et, si présent : diffus ou
périphérique) et la progression du rehaussement dans le temps.
Trois types de courbe ont été obtenus. Si l’hypothèse de départ a
été confirmée pour les tumeurs des parties molles, il n’en va pas
de même pour les tumeurs osseuses. En effet, certaines tumeurs
osseuses bénignes peuvent présenter des caractéristiques cinétiques identiques à celles des tumeurs malignes (sarcomes) :
tumeurs à cellules géantes, ostéoblastomes et kystes anévrismaux,
■
par exemple (4).
L’injection de contraste est faite avec un débit de 5 ml/s avec une quantité
de 0,1 mmol/kg de produit suivie de 20 ml de sérum salé au même débit.
Les acquisitions doivent couvrir 5 minutes au maximum, mais surtout les
deux premières.
5
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La Lettre du Rhumatologue - n° 322 - mai 2006