Raisins, abricots secs et sport : gagnants
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Raisins, abricots secs et sport : gagnants
[ dossier ] FORMATION © BSIP/Giral Raisins, abricots secs et sport : gagnants ? Peu de travaux ont étudiés l’effet spécifique de la consommation de raisins ou abricots secs dans le cadre de la pratique sportive. L’intérêt majeur des fruits secs dans un contexte sportif réside dans leur forte teneur en glucides, macronutriment essentiel du métabolisme énergétique. L Glucides et exercice physique Les glucides représentent la part principale des substrats utilisés lors d’efforts intenses de plus de quelques secondes à quelques heures. Ceci illustre leur rôle déterminant dans le métabolisme énergétique. Par conséquent, ils apparaissent comme un élément essentiel dans l’alimentation du sportif et c’est pourquoi ce macronutriment a fait l’objet de nombreuses recherches, lesquelles n’ont eu de cesse de tenter d’accroître la disponibilité en glucose au cours de l’exercice dans le but d’améliorer la performance. Leur forte teneur en glucides fait des raisins et des abricots secs les alliés de la performance. © Fotolia.com/Maxim Loskutnikov es abricots et raisins secs apportent autour de 200-260 kcal pour 100 g. Ils se caractérisent par une forte teneur en glucides (40 % pour l’abricot sec et 65 % pour les raisins secs) et sont, par ailleurs, pauvres en protéines et en graisses. Ils représentent une très bonne source de fibres (14 g pour 100 g pour les abricots secs et 6 g pour 100 g pour les raisins secs) et de polyphénols. Par ailleurs, ils contiennent des quantités importantes de potassium et de b-carotène (en particulier l’abricot). Enfin, ils possèdent un fort pouvoir alcalinisant1. Kim et coll., qui se sont intéressés à l’index glycémique (IG) des raisins dans différentes populations, trouvent un IG faible chez des sédentaires et des adultes prédiabétiques, et un IG modéré chez des sportifs2. Cette différence n’apparaît pas pour l’index insulinique qui est faible pour ces trois populations. [ N° 26 - Avril-Juin 2011 – Pratiques en nutrition — 29 ] FORMATION [ dossier ] Besoins glucidiques du sportif Les besoins en glucides du sportif dépendent du niveau d’activité3. La pratique d’une activité physique légère à modérée ne majore pas les besoins glucidiques qui sont satisfaits par une alimentation normale comportant 45 à 55 % de l’apport énergétique sous forme de glucides. En revanche, un entraînement intense de 2 à 3 heures effectué cinq à six fois par semaine nécessite des apports glucidiques quotidiens de 5 à 8 g par kg de poids corporel. Ces besoins sont encore augmentés lorsque le volume d’entraînement atteint 3 à 6 heures, cinq à six fois par semaine. Ils s’élèvent alors à 8 à 10 g par kg de poids corporel par jour, ce qui correspond à des apports quotidiens de 500 à 1 000 g de glucides pour des sportifs de 50 à 100 kg. De manière très caricaturale, il faudrait manger entre quatre et huit baguettes de pain pour atteindre de tels niveaux. Nous voyons poindre ici l’intérêt des fruits secs qui permettent de fournir une quantité importante de glucides sous un faible volume, donc d’éviter de consommer des portions pantagruéliques de féculents et autres aliments glucidiques. De plus, les fruits secs apportent des glucides à faible IG, ce qui n’est pas forcément le cas de produits de l’effort destinés aux sportifs. Enfin, il faut mentionner la capacité des fruits secs à se conserver sans conditions climatiques particulières, ce qui représente un avantage certain pour les disciplines qui se déroulent sur plusieurs heures, voire plusieurs jours telles que les épreuves d’ultraendurance ou encore les courses au large à la voile. Outre ces considérations quantitatives, de nombreux travaux soulignent l’impor- [ 30 — Pratiques en nutrition – Avril-Juin 2011 - N° 26 ] tance du moment auquel ces apports glucidiques ont lieu. Besoins glucidiques avant l’effort • Les jours qui précèdent L’alimentation des jours précédant une épreuve doit permettre d’optimiser les réserves en glycogène hépatique et musculaire. Les premiers travaux relatifs à cette problématique datent de 1966 et sont à l’origine du célèbre régime dissocié scandinave. Bergström et Hultman, qui ont participé à leurs propres expérimentations, ont mis en évidence l’intérêt d’une période de déplétion glycogénique importante induite par l’association d’exercices intenses et d’un régime protéolipidique, suivie d’un régime hyperglucidique pendant quelques jours4. Cette pratique permet une surcompensation des réserves glycogéniques, c’est-à-dire un accroissement des réserves en glycogène au-delà des valeurs initiales de repos. De nos jours, ce régime a bien évolué et les données actuelles indiquent que cette surcompensation peut être obtenue après un à trois jours de régime hyperglucidique (10 g/kg/ jour de glucides) sans passer par la phase hypoglucidique initiale qui, par ailleurs, était assez mal supportée par beaucoup de sportifs5. Pour autant, cette surcompensation n’est pas systématiquement associée à une augmentation des performances. Dans une revue de questions, Hargreaves rapporte un bénéfice sur la performance en endurance pour des efforts supérieurs à 90 minutes mais cet effet positif est gommé dès lors que des apports glucidiques appropriés sont assurés avant et pendant l’exercice. Le bénéfice d’une surcompensation en glycogène est le plus probant pour des efforts intenses © Fotolia.com/lilufoto [ dossier ] FORMATION intermittents comme ceux que l’on peut rencontrer dans les sports collectifs6. • Le dernier repas Un apport de 150 à 300 g de glucides trois à quatre heures avant le début de l’exercice permet une augmentation des réserves en glycogène mais entraîne des perturbations métaboliques telles que l’augmentation de l’oxydation des hydrates de carbones et une baisse de la mobilisation des acides gras. Il semblerait que ces perturbations ne soient pas pour autant préjudiciables à la performance6. Wu et collaborateurs rapportent une augmentation de la capacité d’endurance lorsque le dernier repas avant l’exercice est constitué de glucides à IG bas par rapport à un repas riche en glucides ayant un IG élevé7. Mais ce type de résultat n’a pas été retrouvé dans une situation similaire en endurance8 et lors d’un effort intense intermittent9. Un travailde Febbraio et collaborateurs indique, quant à lui, que la consommation d’un repas glucidique deux heures avant l’exercice est moins déterminante pour la performance que la prise de boisson énergétique au cours de l’exercice10. • Dans l’heure qui précède L’ingestion de glucides dans l’heure qui précède l’exercice entraîne une forte augmentation de la glycémie et des concentrations plasmatiques de l’insuline. Ce phénomène majore l’oxydation des glucides et minore celle des lipides au cours de l’exercice suivant. Par conséquent, différentes stratégies ont été élaborées pour tenter de minimiser ces variations métaboliques dont l’ingestion de fructose, la consommation d’aliments d’IG variable, la variation de la charge glucidique, l’addition de graisses et l’intégration d’exercices d’échauffement au cours de la période précédant l’exercice. Une étude récente a comparé les réponses glycémiques et insuliniques avant, pendant et après un exercice suite à la consommation de différentes collations pré-exercice (raisins secs, barre énergétique et solution de glucose). Les résultats montrent une moindre [ N° 26 - Avril-Juin 2011 – Pratiques en nutrition — 31 ] FORMATION [ dossier ] réponse glycémique pour les raisins et la barre énergétique par rapport à la solution glucosée et une réponse insulinique minorée pour les raisins par rapport à la barre énergétique et à la boisson glucosée11. Enfin, la consommation de raisins secs avant un exercice s’avère aussi efficace que celle d’un gel énergétique en termes de performance12. Ces données montrent que les raisins secs représentent un bon choix de colla tion avant l’exercice. Besoins glucidiques pendant l’effort La consommation de glucides au cours de l’effort est une pratique extrêmement répandue. Le bénéfice de l’apport en glucides au cours de l’exercice repose à la fois sur sa capacité à fournir du glucose sanguin, et ainsi prévenir l’hypo glycémie, et aussi, potentiellement, sur sa capacité à épargner le glycogène musculaire. L’effet ergogénique des glucides dépend en premier lieu de la durée de l’exercice mais aussi de l’état initial des réserves en glycogène et de l’apport alimentaire précédant l’exercice. Pour des efforts d’une demi-heure, les données de la littérature ne rapportent pas de gain de performance13. Lors d’un exercice intense d’environ une heure, la consommation d’une boisson glucidique permet de diminuer de 2,3 % le temps nécessaire pour couvrir une distance donnée14. En revanche, pour le même type d’effort, ce gain de performance n’est pas retrouvé lorsque les apports alimentaires en glucides des 24 heures précédentes sont optimaux15. L’ingestion de glucides au cours d’efforts prolongés supérieurs à une heure permet d’améliorer la performance, que ce soit pour des efforts en endurance ou des efforts intenses intermittents. Ce bénéfice est d’autant plus probable que les [ 32 — Pratiques en nutrition – Avril-Juin 2011 - N° 26 ] réserves en glycogène musculaire sont faibles16 et que l’apport avant l’exercice n’est pas optimal10. Le consensus qui se dégage aujourd’hui recommande des apports en glucides de 0,7 g par kg de poids corporel et par heure d’effort (soit environ 30 à 60 g par heure), lesquels doivent être fournis dès le début de l’exercice et, si possible, à intervalles réguliers (toutes les 15-20 minutes)17. Effectivement, Fielding a montré que des doses plus faibles(10 g) ingérées fréquemment (toutes les demi-heures) pendant une course cycliste de 4 heures s’avèrent plus efficaces pour le sprint final qu’un apport important (80 g) toutes les heures18. La nature des glucides à ingérer a fait l’objet de nombreuses recherches. Il est admis que le taux d’oxydation maximale de glucides exogènes se situe autour de 1 g par minute et que le glucose doit être privilégié, mais des travaux plus récents mettent en évidence l’intérêt de mélanger plusieurs sources de gluci des telles que glucose, maltodextrine et fructose19. La plus grande partie des études concernant l’apport de glucides à l’effort ont utilisé des boissons glucidiques 20. La question se pose de savoir si l’apport de glucides sous forme solide induit des résultats similaires. Les données de la littérature révèlent que la forme sous laquelle est apporté le glucide (boisson versus barre) ne modifie ni les réponses glycémiques et insuliniques21 ni le taux d’oxydation des hydrates de carbones exogènes22. Ces données, bien que non directement portées sur les fruits secs, laissent à penser que les raisins secs ont tout à fait leur place en tant qu’apport de glucides au cours de l’exercice. C’est d’ailleurs une pratique très répandue notamment dans les courses d’endurance comme le marathon. Notons que dans ce type d’exercice où la mastica- [ dossier ] FORMATION tion n’est pas facile, il faut privilégier les raisins secs qui sont plus facilement ingérables que les abricots secs. Besoins glucidiques en période de récupération La récupération est une étape fondamentale de la performance. Bien sûr, elle est d’autant plus importante que l’entraînement est fréquent, quotidien, voire biquotidien, et elle devient tout à fait cruciale dans les compétitions qui se déroulent sur plusieurs jours comme les courses à étapes. Un des objectifs d’une bonne récupération est l’optimisation de la resynthèse de glycogène. Ce processus est sous l’influence des différents facteurs parmi lesquels la quantité de glucides ingérée, le moment auquel ces glucides sont consommés, la présence de protéines et l’IG23. Il est généralement admis qu’un apport de glucides de 1 à 1,5 g par kg de poids consommé immédiatement après l’exercice, puis répété toutes les deux heures jusqu’à 6 heures permet d’optimiser ce processus de resynthèse17. Une étude déjà ancienne a mis en évidence l’impor tance d’un apport immédiat de glucides. Effectivement, différer cet apport de deux heures diminue le taux de resynthèse de glycogène de 50 %24. La forme choisie, solide ou liquide, n’affecte pas la vitesse de resynthèse du glycogène25, contrairement à l’IG. Les aliments glucidiques à IG élevé sont plus favorables à la resynthèse de glycogène que ceux ayant un IG faible26. Cependant, la consommation d’aliments ayant un faible IG au cours d’une période de récupération de 22 heures s’accompagne d’une amélioration de la performance en endurance lors de l’exercice suivant27. Ce phénomène s’explique en partie par une oxydation plus importante des lipides au cours de l’exercice. À cet effet, la consommation de raisins semble tout à fait indiquée puisqu’elle combine un apport important de glucides à un faible IG. Cependant, un tel effet bénéfique de la consommation d’aliments ayant un faibleIG en période de récupération n’est pas retrouvé dans le cas d’un exercice intense intermittent28. Conclusion Les fruits secs, en particulier les raisins et les abricots secs, se caractérisent par une forte teneur en glucides et une richesse en micronutriments. L’intérêt de ces aliments pour le sportif réside dans l’apport important de glucides sous un faible volume et, qui plus est, avec un IG faible à modéré. Par conséquent, ces aliments s’avèrent particulièrement intéressants dans les situations où il est nécessaire d’assurer un apport glucidique élevé comme c’est le cas, au quotidien, lorsque le volume d’entraînement est important (entraînement quotidien, voire biquotidien), en période de surcompensation glyco génique avant une épreuve ou encore lors de la phase de récupération. Enfin, les études ayant comparé les raisinssecs à des produits énergétiques classiques (barres, gel, boissons glucosées) montrent que leur consommation avant un exercice permet de minimiser les réponses métaboliques avant et pendantl’exercice, et qu’ils sont aussi efficaces que des produits de l’effort classiques en termes de performance. En conclusion, à la question “Raisins et abricots secs et sport : gagnant ?”, nous pouvons répondre par l’affirmative. Éve Tiollier Pôle départemental de médecine du sport, Marcoussis (91) Mail ??? Source 13es Entretiens de nutrition de l’Institut Pasteur de Lille, les 9 et 10 juin 2011. [ N° 26 - Avril-Juin 2011 – Pratiques en nutrition — 33 ] FORMATION [ dossier ] Références 1. Remer T, Manz F. Potential renal acid load of foods and its influence on urine pH. J Am Diet Assoc 1995;95(7):791-7. 2. Kim Y, Hertzler SR, Byrne HK, Mattern CO. Raisins are a low to moderate glycemic index food with a correspondingly low insulin index. Nutr Res 2008;28(5):304-8. 3. Kreider RB, Wilborn CD, Taylor L et coll. ISSN exercise & sport nutrition review: research & recommendations. J Int Soc Sports Nutr 2010;7:7. 4. Bergström J, Hultman E. Muscle glycogen synthesis after exercise: an enhancing factor localized to the muscle cells in man. Nature 1966;210(5033):309-10. 5. Bussau VA, Fairchild TJ, Rao A, Steele P, Fournier PA. Carbohydrate loading in human muscle: an improved 1 day protocol. Eur J Appl Physiol 2002;87(3):290-5. 6. Hargreaves M, Hawley JA, Jeukendrup A. 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