BIOGAZ La Sue ̀̀de, pays pionnier pour le biogaz

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BIOGAZ La Sue ̀̀de, pays pionnier pour le biogaz
✿ B I OG AZ
La Sued
̀ e, pays pionnier pour le biog
La méthanisation à la ferme, photo Biomethane Regions
Les villes de Suède sont, depuis de nombreuses années, dans des logiques de
développement durable et de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Dans leur
processus de transition énergétique, biogaz et biométhane représentent une composante
essentielle du mix énergétique de demain. Pour tirer tous les enseignements de ces
démarches, un groupe d’élus et de techniciens des régions Rhône-Alpes, Pays-de-la Loire et
Bretagne vient de réaliser un voyage d’étude en Suède du Sud entre Malmö et Växjö. Dans
cette région le réseau de gaz naturel n’est pas très développé du fait de la faible densité de
population et des distances à parcourir. Malgré ce handicap, là où c’est possible, les suédois y
injectent du biométhane.
La production d’électricité à partir du biogaz
n’est pas la priorité en Suède et 50% de la
valorisation
concerne
la
production
de
carburant : bioGNV voire bioGNL. Si les stations
services sont éloignées d’un réseau de gaz, des
camions transportant du gaz comprimé ou
liquéfié prennent le relais pour alimenter ces
stations. Il n’y a pas de tarif d’achat mais un
modèle économique qui trouve sa place sur le
marché du carburant.
Le biométhane et le bioGNV,
opportunités pour le territoire
des
La stratégie qui porte le développement du
biométhane carburant en Suède est basée sur le
principe de l’économie circulaire. 95% de l’argent
généré par le secteur du transport lié au pétrole
est exporté, or en remplaçant le pétrole par le
biométhane, cet argent peut rester sur le
territoire et alimenter l’économie locale.
Dans la Région de Skåne (proche de Malmö),
80% du potentiel de production (3TWh) du biogaz
est lié à l’agriculture. Si ce potentiel était exploité,
il génèrerait 3 300 emplois dans la région, un CA
de 5,6 milliards de couronnes suédoises, une
diminution des GES de 1 million de tonnes, et
d’autres bénéfices environnementaux (qualité de
l’air…).
Développer la filière biogaz et bioGNV
À Skåne, non loin de Malmö, la stratégie de
développement
de
la
filière
réside
principalement dans la mobilisation d’un réseau
d’acteurs. L’animation par l’agence de l’énergie
est importante autour d’acteurs, pièces d’un
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puzzle, indispensables pour que la filière se
structure : agriculteurs, collectivités, filières
déchets, universités, filière engrais, filière GNV,
industriels,
agronomes,
producteurs,
distributeurs d’énergie, consommateurs... La
région s’est engagée sur un objectif « 0 énergie
fossile pour 2020 ». L’ensemble des acteurs a
signé cette feuille de route pour atteindre cet
objectif (46 organisations).
Pour développer la filière, il a fallu montrer
aux producteurs de véhicules qu’il y avait une
demande. Toute la gamme est représentée : des
petites voitures jusqu’aux camions, de moteurs 1
à 12 litres de cylindrée. Deux constructeurs ont
fait des choix stratégiques différents : Scania a
développé un moteur 100 % gaz et Volvo a
développé un produit à partir de moteurs diesel
(mélangé avec 25 % de diesel).
Les stations-service ne sont pas assez
développées : 2 000 stations d’essences contre
150 stations pour le gaz. Il existe aussi 45 à 50
stations privées pour les bus et camions, et il
existe des applications téléphoniques pour
trouver ces stations.
Les acteurs sont en recherche de méthodes
pour construire plus de stations sachant que le
modèle économique est basé sur un temps de
retour de 3 ans. Il n’y a pas de subvention et pas
de tarif pour l’instant, seulement une
exonération de taxe pétrolière, ce qui place le
biogaz 25% moins cher que l’essence (1 litre
d’essence coûte environ 15 kr = 2 €).
À Malmö, tous les bus de la ville roulent au
gaz avec 60% de bioGNV et 40% de GNV. D’ici 5
ans, ce sera 100% au bioGNV (biométhane)
provenant du biogaz issu des boues de station
Bioénergie International no 27 - Octobre 2013
Données techniques de
l’unité de méthanisation :
•
Fermentation mésophile
•
2 personnes y travaillent
•
Co-digestion : 7 000 m³ de lisier de
porcs, 20 000 m³ de graisses
d’abattoirs (à 3 %MS, par canalisation
sur 2 kms), 6 000 t de déchets
d’abattoir (C2 et C3), 5 000 t de petits
pois (sur 2 mois), 20 000 t de déchets
agro-alimentaires.
•
Préfosse de mélange : 500 m³.
Hygiénisation totale des substrats.
3 échangeurs de chaleur et une
chaudière gaz. Environ 1/3 du biogaz
sert au processus.
•
Digesteurs : 4 000 m³
•
Production de 280 à 300 Nm³/h de
biométhane
d’épuration
ainsi
que
de
la
fraction
fermentescible des déchets ménagés et de
l’agriculture. Les bennes à ordures en centre ville
à Malmö roulent au gaz, sans émission de
particules.
À Växjö, les bus de la ville sont aussi
alimentés par du biométhane en provenance de
la station d’épuration qui traite aussi des déchets
fermentescibles. L’opérateur énergique E.ON, l’un
des deux plus importants électriciens allemands,
voit dans le biométhane un vecteur de
développement durable et investit aux côtés des
porteurs de projet pour revendre cette énergie
comme carburant. E.ON possède cinq unités de
méthanisation en Skanie sur les six existantes, et
procède donc à 400 GWh de ventes annuelles de
biométhane. Ainsi, plus de 40 000 véhicules de
particuliers, de collectivités et
d’entreprises
roulent au
gaz
reno
uvel
able.
Injection dans le réseau, photo Biomethane
Regions
Tous les jours, toute l'actualité des bioénergies
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gaz-carburant
Bus de Malmö roulant avec 40% de biométhane, photo Biomethane Regions
Données techniques de
l’épuration & injection :
•
Épuration : PSA Carbothec 6 colonnes
de régénération, montée en pression
de 50 mbar à 5,3 bars
•
CO2 et offgaz relargués à l’atmosphère
•
Eau :
séchage
du
gaz
de
refroidissement à 5 °C
•
Épuration d’H2S par charbon actif
•
Odorisation et injection dans le réseau
à 4 bars
•
280 à 300 Nm³ heure de biométhane
produit
Visite
de
l’unité
méthanisation
agricole
Soderasens Bioenergi
de
de
M. Rudolf Tornerhjelm, agriculteur,
est co-propriétaire de l’unité de
méthanisation
et
dirige
une
exploitation agricole de 3 000 ha dont
2 000 de forêt et 780 de surface
agricole utile SAU (céréales 50% de blé,
colza, betteraves à sucre). Il dispose
d’un
élevage
de
porcs
à
l’engraissement (9 à 10 000 porcs par
an). La SAU a été gagnée sur les terres
forestières qui sont des terres peu
fertiles (65% d’argile avec récolte de blé
de 60 quintaux à l’ha) d’où l’intérêt de
cet agriculteur pour la méthanisation
notamment pour la valorisation des
digestats et les apports en N,P,K (azote
phosphore potassium).
retour sur investissement prévisionnel
de 10 ans, confirmé après 7 ans
d’exploitation. Elle a été financée avec
10 % de fonds propres apportés par
les actionnaires et 90% d’emprunt.
L’engagement long terme de E.ON a
facilité le financement du projet. Il n’y a
pas eu de subvention.
Les intrants sont majoritairement
des effluents industriels : Findus situé
à 2-3 km de l’unité envoie ses eaux de
transport de légumes par canalisation
(7,6 M de m³/an à 3% de matière
sèche) plus des restes de légumes non
commercialisés : petits pois, carottes…
soit environ 30 000 t. Les substrats
sont hygiénisés (70°C).
L’unité a été construite en 2006
puis mise en service en 2007 par
BIGADAN. L’actionnariat comprend
l’agriculteur, le constructeur et 51%
des parts sont détenus par une filiale
de E.ON.
Digesteurs de la step de Vaxjö, photo
Biomethane Regions
L’installation a coûté 43 millions
de Kr soit 5 M€ pour la partie
méthanisation avec un temps de
sur www.bioenergie-promotion.fr – Observatoire des bioénergies
Épuration du biogaz par PSA et torchère, photo
Biomethane Regions
L’usine Diester de
Venette
reconvertie pour
l’estérification
d’huiles animales
et usagées
Le contexte politique
défavorable
pour
les
biocarburants (baisse du
taux d’incorporation, modification de la directive
européenne sur l’énergie,
importations
massives)
amène
le
groupe
Sofiprotéol à réorganiser
les
activités
de
ses
branches Diester Industrie
et Saipol. Le site de
Venette,
qui
produisait
jusqu’ici du biodiesel à
partir de graines oléagineuses, va être reconverti pour continuer sa
production de biodiesel sur
la base d’huiles animales et
d’huiles
usagées,
des
matières premières non
soumises à d’éventuel
quota de biodiesel de
cultures.
Pour cela, la société AD
Biodiesel, créée par les
sociétés
Sofiprotéol,
Electrawinds, Akiolis, et
Mindest produira 80 000
tonnes de biodiesel d’ici à
2015 sur le site industriel de
Venette,
à
partir
de
graisses animales (EMHA)
et d’huiles alimentaires
usagées (EMHU).
La
création
d’AD
Biodiesel nécessitera un
investissement de 8 millions
d’euros
supplémentaires par rapport
aux investissements déjà
réalisés. Ce projet
permettra de valoriser les
coproduits des différentes
filières e. Akiolis et Mindest
assureront
l’approvisionnement
en
graisses
animales, Electrawinds le
raffinage des graisses et la
production
d’électricité,
Sofiprotéol l’estérification et
la commercialisation des
biocarburants.
Bioénergie International no 27 - Octobre 2013 Page 37
✿ B I OG AZ
Le groupe Biomethane Regions
Il va être possible
de produire de
l’énergie à partir
d’eau et
d’éthanol
Le nouveau catalyseur, Christine
Khammash & Hansjörg
Grützmacher, ETH Zürich
L’équipe de recherche
de Hansjörg Grützmacher,
professeur au Laboratoire
de chimie inorganique de
l’Ecole
polytechnique
fédérale de Zurich (ETHZ),
a créé une molécule qui
permettrait la production
d’énergie à partir d’eau et
d’alcool. Cette molécule, un
complexe de ruthénium,
agit comme un catalyseur :
ajouté à un mélange
d’éthanol et d’eau, elle
entraîne la production de
dihydrogène et de dioxyde
de
carbone.
Cette
découverte
ouvre
de
nouvelles possibilités pour
la mise au point des piles à
combustibles.
Produire du biométhane
E.ON qui participe au capital achète le gaz (biométhane)
à 100%. Le biogaz produit est épuré puis injecté dans le
réseau de gaz naturel. Il sert également comme carburant
pour les tracteurs de la ferme. L’investissement de la partie
épuration et injection a été de 4,5 M € et l’amortissement est
prévu sur 10 ans.
Le biogaz produit contient 65% de CH4, et il est
nécessaire de le purifier pour en faire du biométhane, c'està-dire enlever le CO2 principalement, l’H2S et l’eau (filtre à
charbon actif et tour de lavage). Le biométhane est ensuite
utilisé dans les tracteurs et injecté directement dans le
réseau de gaz naturel. Il permet le remplacement de 2,7
millions de litres d’essence soit l’alimentation de 1 500 à
2 000 voitures roulant au biogaz. Le biométhane est vendu
au prix du marché, mais sans taxe pétrolière. Sur le site, une
petite station d’avitaillement a été installée. Elle permet de
faire le plein des tracteurs en 6-7 h, qui auront une
autonomie de 5-6 h. Il persiste encore des problèmes
d’autorisation pour ces véhicules.
Valoriser le digestat
Le volume de stockage sur l’unité est de 20 000 tonnes
de digestat qui peut être épandu en 5 jours grâce à des
rampes d’irrigation d’une longeur totale de 1,2 km.
L’épandage est intéressant entre 10 et 15 °C car il évite la
volatilisation de l’azote. L’agriculteur constate une
augmentation des rendements de 60 q à 75 q/ha pour du
blé. Il a par ailleurs réduit ses fertilisants chimiques de 70%.
Auteures :
RAEE : VALÉRIE BORRONI
[email protected] - Tél. : 04 72 56 33 55
AILE : ARMELLE DAMIANO
[email protected] –Tél. : 02 99 54 63 23
Ce voyage d’étude a été réalisé dans le cadre du programme
européen biométhane-REGIONS financé par l’Europe, les Régions
Rhône-Alpes, Pays-de-la Loire et Bretagne, l’ADEME et un cofinancement exceptionnel de GrDF.
La
production
de
dihydrogène
à
partir
d’éthanol et d’eau est
connue depuis longtemps.
Cependant jusqu’à présent
cette
réaction
n’était
possible que dans des
conditions physiques «
extrêmes » : hautes
températures et hautes
suite page 39
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Bioénergie International no 27 - Octobre 2013
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