chapitre 4 - Chenelière Éducation
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chapitre 4 - Chenelière Éducation
CHAPITRE 4 Des moyens pour faciliter la réussite scolaire des garçons S i l’on croit que l’environnement détermine et forge tout de la personnalité, on attribuera les qualités et les défauts de l’enfant qui se présente à l’école à l’éducation familiale, aux médias et à la société de consommation. On se croira, à son tour, capable de tout transformer chez lui avec de bonnes méthodes et de grandes convictions. Avec plus de nuances, si on réalise que l’enfant n’est qu’un terrain fertile, aux capacités naturelles, on comprendra qu’il faut faire appel au monde intérieur de l’enfant, à son intuition, à ses rêves, à ses émotions et à son besoin de créer et d’être avec les autres. En abordant les pratiques pédagogiques, je ne veux surtout pas faire un « cahier d’exercices », mais bien offrir des pistes à explorer. Je les propose aux maîtres en complicité avec ses élèves que je souhaite participants actifs, artisans de leur formation. Je ferai référence, à l’occasion, à des écrits particulièrement pertinents qui nourriront les approches suggérées. Les grandes lignes de ces pratiques pédagogiques étaient déjà écrites en 1995, bien avant que le Conseil supérieur de l’éducation se penche sur la problématique de l’apprentissage des garçons. Je les fournissais en conférence. On me dit qu’elles rejoignent des aspects du nouveau programme du MEQ, et c’est tant mieux. Je les ai d’abord retenues en observant autant les garçons qui prenaient plaisir à apprendre que ceux qui ne s’investissaient pas. Mais aussi les garçons et les filles qui s’éveillaient tout à coup à l’apprentissage scolaire parce qu’on avait réussi à les atteindre autrement et qui révélaient des talents bien dissimulés. Et je dis surtout aux maîtres : « Prenez votre place, croyez en vous et en vos élèves. Arrêtez de demander des précisions aux multiples programmes, des tonnes de guides d’enseignement et des “modes d’emploi” au risque de devoir les appliquer à la lettre. Faites participer vos élèves, partez de leurs expériences, de leurs questions, de leurs goûts. Soyez surtout des passionnés de la matière que vous enseignez et qui devrait d’abord être un champ, que dis-je, une vaste terre de connaissances à explorer. L’école doit être, avant tout, un lieu privilégié de découvertes et d’expériences enrichissantes avant d’être celui où l’élève doit s’astreindre à se faire questionner à tout moment. Surtout, ne laissez pas les examens, d’année en année, déterminer votre enseignement1, ce serait alors la queue qui fait branler le chien. » Un maître enseigne. Un bon maître démontre. Un grand maître inspire. (Proverbe chinois) 1. Pardonnez mes propos mais je parle de ce que j’ai vu. C’est le programme adapté aux intérêts des élèves qui doit nous guider. Tenir compte du besoin des garçons de se situer dans l’action À l’époque de mon collège classique, on nous répétait à longueur de journée : « Un esprit sain dans un corps sain » ou plutôt Mens sana in corpore sano et nous devions aller dehors, beau temps, mauvais temps. De fait, si on observe les aires cérébrales nécessaires au mouvement, on constate que le cervelet occupe un dixième de l’encéphale, mais qu’il contient la moitié de l’ensemble des neurones. Les patients qui subissent des dommages au cervelet ont aussi d’autres problèmes de fonctions cognitives. C’est peut-être oublier que le système moteur du cervelet et celui de l’équilibre de l’oreille sont les premiers à atteindre la maturité chez le bébé humain. Eric Jensen2 nous démontre comment plusieurs chercheurs ont pu confirmer l’hypothèse selon laquelle l’intégration sensorimotrice est fondamentale dans l’apprentissage chez les enfants au primaire et se poursuit toute notre vie. Plusieurs grands penseurs avaient besoin de marcher pour réfléchir et prendre une décision. En est-il de même pour vous ? Oui, les gars ont besoin de bouger, c’est le corps qui le demande. Ils en ont besoin pour être en santé, ils en ont besoin pour s’oxygéner, pour se détendre et être plus attentifs. Plusieurs programmes scolaires où l’on réserve une place importante à l’activité physique ont prouvé que les élèves sont plus attentifs et ont une meilleure mémoire après avoir fait de l’exercice. Jensen poursuit en disant « qu’il pourrait y avoir un lien entre la violence et le manque d’activité physique. Les jeunes enfants privés de stimulations tactiles et d’activités physiques n’ont peutêtre pas développé de lien célébral du plaisir associé au mouvement3 ». Personnellement, j’ai remarqué que les élèves qui s’inscrivaient à l’activité parascolaire de monocycle de mon école développaient aussi de nouvelles attitudes face à l’apprentissage. Ils comprenaient que : • l’échec n’est qu’une étape vers le succès et qu’il est normal de devoir faire plusieurs essais ; • il faut passer par de petits apprentissages pour atteindre une plus grande maîtrise ; • on n’apprend pas tous au même rythme (quelques-uns avaient besoin de trois jours pour apprendre à maîtriser l’habileté à rouler sur une roue, d’autres de deux semaines) ; • • • on peut aider les autres sans perdre soi-même ; la première valorisation passe par la satisfaction de soi ; la reconnaissance des autres peut se vivre à l’école même, pas nécessairement en dehors de ses murs, comme certains pouvaient le croire (je recevais des 2. Éric Jensen, Le cerveau et l’apprentissage, Montréal, Chenelière/McGraw-Hill, 2001. 3. Ibid., p. 89. Chapitre 4 33