Centenaire de la naissance de Paul Ricoeur
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Centenaire de la naissance de Paul Ricoeur
Paul Ricoeur 27 février 1913, Valence – 20 mai 2005, Châtenay-Malabry Photographie par son amie Catherine Goldstein © Catherine Goldstein Paul Ricoeur aurait eu cent ans cette année : « Vous êtes incontestable », lui a dit un jour Emmanuel Levinas. Plus qu’un maître-penseur, un maître à penser, un maître-semeur comme l’a écrit récemment Robert Maggiori. Son geste philosophique, qui se déploie en trois moments, atteste sa singularité de philosophe : l’écoute, l’engagement et l’échappement. En premier lieu l’attention à l’autre, le fondamental accueil à la différence, à l’altérité, au risque de bouleverser son identité. Ses « Lectures » si nombreuses à partir desquelles il nous guide dans le labyrinthe des textes de l’histoire de la philosophie attestent son souci d’accompagner l’autre. Puis, vient le moment de l’engagement, de la prise de risques, car il n’est d’engagement sans s’exposer à un possible échec de la cause que l’on défend. Le troisième temps n’est pas celui d’une synthèse dans un savoir absolutisé qui se formulerait en un nouveau système subsumant les contradictions internes pour parvenir à une synthèse idéale. Il aura inventé des concepts opératoires comme celui d’identité narrative, de distinction dans le soi entre l’idem et l’ipse, de représentance... qui sont autant de médiations, toujours imparfaites, pour penser ensemble des pôles hétérogènes. Paul Ricoeur est essentiellement un penseur de l’agir depuis sa thèse dans laquelle il déploie ce que peut être une philosophie de la volonté. Tout son effort spéculatif aura été de faire davantage de place à l’action proprement humaine, d’insister sur la capabilité qui finit toujours par triompher du tragique de l’histoire. Il aura déployé une pensée animée par une volonté de présence - au sens fort - à son siècle. Il a renoncé à une pensée systématique ainsi qu’à toute posture de surplomb, leur substituant une attention aux phénomènes d’émergence, débouchant sur l’inachèvement. D’où une logique de forage par laquelle Paul Ricoeur reprend les « résidus » des questions non résolues dans chacune de ses études pour en faire son nouveau questionnement, tout en s’appliquant à lui-même ses propres positions dialogiques, traversant ainsi aussi bien l’existentialisme, le structuralisme, l’herméneutique, la philosophie analytique..., pour affirmer que la personne n’est pas une chose et qu’il convient de penser l’agir humain dans ses potentialités à se recréer un horizon d’attente. Ricoeur aura été un magnifique passeur entre la philosophie continentale (Husserl, Gadamer) et la philosophie anglo-saxonne analytique, augurant un âge nouveau de la pensée, celui de la réflexivité. Il aura œuvré à combattre le scepticisme et le fatalisme pour faire prévaloir la responsabilité humaine. De la même manière que l’individu, la société selon Paul Ricoeur ne peut se passer d’avoir un projet, un horizon d’attente et d’espérance, d’où le sens qu’il attribuait au passé, à la mémoire, celui d’être une ressource potentielle à la construction du devenir, d’un êtreensemble plus harmonieux et plus juste. Toujours résolument tourné vers l’avenir, il défendait l’idée d’une utopie dans sa fonction libératrice qui « empêche l’horizon d’attente de fusionner avec le champ d’expérience ». François Dosse, historien, auteur d’une biographie de Paul Ricoeur : Paul Ricoeur, les sens d’une vie, La Découverte, 1997, rééd. La Découverte-poche, 2008. Évènements programmés Les colloques et publications sur l’œuvre de Ricœur se succèdent à un rythme soutenu sur les cinq continents. En France, signalons quelques parutions récentes : − Paul Ricœur, de J. Grondin (PUF, « Que sais-je ? »,128 p.) − Paul Ricœur : penser la mémoire sous la direction de F.Dosse et C. Goldenstein (Seuil, 304 p.) − Souffrance et douleur. Autour de Paul Ricœur, sous la dir. de C. Marin et N. ZaccaïReyners (PUF, 102 p.) − Ricœur et ses contemporains, de J. Michel (PUF, 180 p.) Une publication du Fonds Ricœur doit sortir à l’automne, au Seuil : Paul Ricœur, Écrits et Conférences III. Anthropologie. Quelques colloques à venir : − Marseille : 6-7 juin, Strasbourg : 10-11 octobre, Rennes : 3 décembre − Paris : 18-20, 22-23 novembre : deux colloques internationaux organisés avec et autour du Fonds Ricœur. Le jeudi 21, placé sous le haut patronage du Président de la République, s’adressera à un vaste public1. Charles Taylor prononcera la conférence de clôture. Quelques rendez-vous : inauguration de la place Paul Ricœur (face à l’université Diderot, Paris 13e) le mercredi 20 novembre à 11 h. 30. France culture, « Une vie, une œuvre » par M. Garrigou-Lagrange : http://www.franceculture.fr/emission-une-vie-une-oeuvre-paul-ricoeur-1913-2005-2013-0302 1 Pour en savoir plus : http://www.fondsricoeur.fr