Section 2. Les modèles de procédure pénale
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Section 2. Les modèles de procédure pénale
INTRODUCTION Section 1. La procédure pénale - Définition La procédure pénale est la branche du droit qui met en œuvre le droit pénal. C'est l'ensemble des règles d'organisation et de fonctionnement des autorités chargées de l'application du droit pénal. Le droit pénal et la procédure pénale sont inextricablement liés, la sanction d’une infraction ne pouvant intervenir que dans le respect de la procédure pénale. Les règles de la procédure pénale permettent de faire constater la commission d'une infraction et de faire sanctionner le responsable, elles décrivent alors les formes à suivre à partir du moment où une infraction a été commise. Plus précisément, la procédure pénale réglemente: L'enquête qui permet de constater l'infraction, d'en rassembler les preuves, d'en découvrir les auteurs; La poursuite c'est-à-dire le déclenchement de l'action publique; L'instruction préparatoire qui permet de compléter la recherche des preuves commencée lors de l'enquête et de chercher l'existence de charges suffisantes contre une personne pour, le cas échéant, la renvoyer, devant une juridiction de jugement; Le jugement des personnes poursuivies par une juridiction du premier degré, la Cour d'appel et la Cour de cassation. Section 2. Les modèles de procédure pénale On distingue traditionnellement deux modèles de procédure : le système accusatoire et le système inquisitoire. La procédure pénale est dite accusatoire lorsqu’elle est déclenchée par une accusation. Dès lors, s’affrontent celui qui accuse (la victime de l’infraction par exemple) et a saisi la justice, et la personne accusée, désignée comme étant l’auteur ou le complice de l’infraction. Cette procédure est orale, publique et contradictoire. Traditionnellement, cette procédure apparaît protectrice des droits de la personne poursuivie, celle-ci affrontant son accusateur à armes égales. Ce système présente toutefois des inconvénients notamment en ce que l’enquête à charge repose sur la victime accusatrice ; le manque de moyens pourrait la dissuader de poursuivre l’auteur de l’infraction, conférant une certaine immunité de fait aux délinquants. À l’opposé de ce système, la procédure est dite inquisitoire lorsqu’elle repose sur une formalité initiale dont dépend le déroulement du procès et sa solution : l’inquisitio ou l’enquête. Cette enquête est confiée à un magistrat spécialisé qui mène l’instruction de manière écrite et secrète. Cette procédure n’est pas contradictoire. Le juge n’est plus un simple arbitre mais un acteur de la procédure, celui qui met tout en œuvre pour parvenir à la manifestation de la vérité. La France a adopté un système dit mixte, mélangeant l’inquisitoire lors de l’enquête et l’accusatoire lors de la phase de jugement. Section 3. La codification Le code de procédure pénale (CPP), qui rassemble l’essentiel des règles de la procédure pénale, trouve son origine dans le Code d’instruction criminelle (CIC) promulgué le 16 décembre 1808 (entré en vigueur le 1er janvier 1811). - - Ce Code d’instruction criminelle distinguait deux phases dans le procès pénal : la première phase, la phase préparatoire du procès, précédait l’audience de jugement. Celle-ci relevait d’un système inquisitoire, l’instruction étant confiée à un magistrat spécialisé. la seconde phase s’étendait depuis l’audience jusqu’à la décision. Cette phase relevait des règles de la procédure accusatoire, les débats étant oraux, publics et contradictoires. Il convient de noter que la publication du fameux Traité des délits et des peines par BECCARIA en 1764 a fortement marqué tant le droit pénal de fond que de forme. A ce dernier titre on y trouve notamment la mention du contrôle de la détention préventive (§29), la prohibition des accusations secrètes (§15) ou de la torture (§16). La codification de la procédure pénale évolua au fil du temps, subissant les bouleversements politiques successifs des 19 et 20ème siècles, jusqu’à la naissance du Code de procédure pénale entré en vigueur le 2 mars 1959 (1er mars 1962 pour les départements d’Outre-Mer). Section 4. Aperçu du code de procédure pénale Le CPP comporte un article préliminaire (issu de la loi du 15 juin 2000) suivi de deux parties : une partie législative et une partie réglementaire. Chacune comporte un titre préliminaire, intitulé « De l’action publique et de l’action civile » (articles 1er à 10), suivi de six livres : - le Livre I « De l’exercice de l’action publique et de l’instruction » traite de la phase préparatoire du procès pénal (articles 11 à 230-5); - le Livre II « Des juridictions de jugement », traite de la phase du jugement (articles 231 à 566) : et en particulier, « de la Cour d’assises », « du jugement des délits », « du jugement des contraventions » et « des citations et significations » ; - le Livre III traite « des voies de recours extraordinaires » (articles 567 à 626-7), c’està-dire « du pourvoi en cassation », « des demandes en révision » et « du réexamen d’une décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la cour européenne des droits de l’homme » ; - le Livre IV procède au regroupement « de quelques procédures particulières » (articles 627 à 706-111) ; - le Livre V s’intitule « des procédures d’exécution ». Il traite de l’exécution des peines (articles 707 à 803-4) ; - le Livre VI énonce les dispositions spécifiques applicables dans les DOM-TOM (articles 804 à 934). Section 5. Les sources de la procédure pénale A. Sources nationales Plusieurs articles de la Constitution du 4 octobre 1958 énoncent des règles de procédure pénale. Notamment, les articles 66, 67 et 68 qui traitent respectivement du rôle de l’autorité judiciaire (gardienne de la liberté individuelle), de la mise en accusation et du jugement du Président de la République (en cas de haute trahison, devant une juridiction spéciale : la Haute Cour de justice), et de la responsabilité des membres du gouvernement pour les infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions (devant une autre juridiction spéciale : la Cour de justice de la République). Au-delà du corps même de la Constitution, certains principes sont rattachés au « bloc de constitutionnalité » et ont à ce titre valeur constitutionnelle. Ainsi, par exemple, le principe de la légalité procédurale et la présomption d’innocence sont consacrés par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. La loi est la source privilégiée de cette branche du droit (article 34 de la Constitution de 1958). Il sera précisé qu’un certain nombre de règles figurent dans d’autres codes que le CPP, en raison de leur spécificité (à titre d’exemples, les codes des douanes, le code général des impôts et le livre des procédures fiscales contiennent certaines règles de procédure pénale). Par ailleurs, il apparaît opportun de rappeler l’application toujours effective de certains textes très anciens tels l’Ordonnance de Villers-Cotterêt de 1539 (Ordonnance prise par François 1er pour imposer le français comme langue officielle), ou encore le Décret du 19 juillet 1791 relatif aux perquisitions (les perquisitions sont autorisées de nuit dans les « lieux où tout le monde est admis indistinctement, tels que cafés, cabarets, boutiques et autres » ainsi que dans « les maisons où l’on donne habituellement à jouer des jeux de hasard ). B. Sources conventionnelles A côté des sources nationales, le droit conventionnel s’impose comme une source incontournable. On peut citer : o le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1981) ; o la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (18 décembre 2000) ; o la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950, et ratifiée par la France en 1974, qui demeure le texte ayant l’influence la plus palpable. Cette convention intéresse tant le fond du droit que la procédure, notamment au travers de ses articles 5 (relatif à l’arrestation et à la détention des personnes), 6 (qui pose le principe du droit à un procès équitable, dans le respect des droits de la défense), et 8 (qui concerne le respect de la vie familiale, du domicile et de la correspondance). Il sera rappelé que la Convention est d’application directe et a une autorité supérieure à celle de la loi (article 55 de la Constitution). Elle s’impose donc aux juridictions répressives. Les principes qu’elle énonce sont d’autant plus efficaces que sont admis depuis 1981 le recours individuel, et plus récemment (loi du 15 juin 2000) le réexamen d’une décision pénale définitive après condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme, sous certaines conditions prévues aux articles 626-1 et suivants du CPP. Section 6. Les finalités de la procédure pénale Le mot procédure vient du latin "procedere" qui signifie avancer, aller en avant. La procédure pénale doit donc avancer afin d'assurer la sécurité des citoyens tout en sauvegardant les droits fondamentaux des personnes. C’est ainsi que la procédure pénale procède de la recherche d’un équilibre entre deux exigences contradictoires : la protection des libertés individuelles et la protection de l’ordre public. Si la défense de l’intérêt de la société réclame la poursuite et la sanction des coupables d’infractions pénales, celle de l’intérêt des individus commande la prudence, la possibilité de se défendre et le respect de certaines formalités procédurales. Tiraillée entre ces deux impératifs, la procédure est une matière d'équilibre. Le législateur oscille dans ses choix entre la préférence donnée à la répression et celle donnée aux libertés des personnes. Dans tous les cas, la procédure pénale fait l'objet d'un contrôle externe, opéré par la Cour de Strasbourg. Remarque de terminologie: La personne mise en cause est la formule générique permettant d'englober les termes de suspect (au stade de l'enquête), de mis en examen (instruction) ou de prévenu (devant le tribunal de police ou correctionnel) ou encore d'accusé (devant la Cour d'assises); Tous ces termes, en ce qu'ils situent le stade procédural, ne doivent pas être confondus. Retenir l’essentiel : La Convention européenne des droits de l'homme est l'instrument privilégié de protection des droits de l'homme dans une matière, la procédure pénale, où les libertés de l'individu sont en cause. Le législateur s'est inspiré des principes qui en découlent pour consacrer à l'occasion de la loi du 15 juin 2000 un article préliminaire dans le Code de procédure pénale. La procédure pénale française est une procédure pénale marquée par le caractère inquisitoire aux stades décisifs de l'enquête et de l'instruction alors que la phase de jugement se rattache davantage au système accusatoire. La procédure pénale tend à trouver un équilibre, délicat, entre la préservation de l'ordre public et le respect des droits fondamentaux de la personne mise en cause. Points à approfondir: • La diversité des sources en procédure pénale. • • L'influence de la Convention européenne des droits de l'homme sur la procédure pénale française. Les traits caractéristiques de la procédure pénale française. EXERCICES Répondez aux questions suivantes 1. La procédure de type accusatoire est a. orale b. publique c. contradictoire 2. La procédure inquisitoire est a. procédure écrite b. repose sur l’enquête des parties (accusateur et accusé) c. contradictoire 3. Le code de l’instruction criminelle est entré en vigueur en a. 1804 b. 1808 c. 1811 4. Le code de procédure pénale est entré en vigueur en France métropolitaine en : a. 1957 b. 1958 c. 1959 5. La procédure pénale relève du domaine de la loi : vrai ou faux Dissertation A quel modèle la procédure pénale française se rattache-t-elle ? CHAPITRE 1. LES PRINCIPES ESSENTIELS DE LA PROCEDURE PENALE Section 1. Origine La Commission dite « Justice pénale et Droits de l’Homme » a été constituée en 1988, sous la présidence de Mme le Pr. DELMAS-MARTY, avec pour objectif de procéder à un examen approfondi de la phase antérieure au jugement. Cette commission avait notamment proposé un certain nombre de réformes notamment concernant les enquêtes de police et d’instruction. Elle avait aussi dégagé dix principes généraux ou essentiels de la procédure pénale. Ces principes n’ont pas été agréés par le gouvernement qui ne les a pas intégrés au projet de loi déposé le 24 février 1992, devenu la loi du 4 janvier 1993. Ces principes n’ont toutefois pas été oubliés. La loi tendant au renforcement de la présomption d’innocence, en date du 15 juin 2000, a intégré un article préliminaire dans le code de procédure pénale fixant certains principes essentiels. Outre la loi, il faut prendre en compte dans l’élaboration des principes essentiels de la procédure pénale, l’influence des normes supra-législatives, à savoir notamment la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la Constitution de 1958. Ces normes s’imposent en effet au législateur, sous le contrôle du Conseil constitutionnel et ce, avec d’autant plus d’efficacité depuis la réforme de sa saisine en 1974. Section 2. Les principes essentiels issus de la convention européenne des droits de l’homme La Convention européenne des droits de l’homme et la jurisprudence issue de la Cour européenne des droits de l’homme a permis de dégager un certain nombre de principes essentiels qui s’imposent au droit français (article 55 de la Constitution de 1958), ses dispositions pouvant directement être invoquées par les justiciables devant les juridictions nationales, la convention étant d’application directe. A. Articles de la convention européenne des droits de l’homme particulièrement concernés par la procédure pénale (à lire dans le détail, voir annexe dans le Code de procédure pénale) Article 3 - Interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants Article 5 - Droit à la liberté et à la sûreté Article 6 - Droit à un procès équitable Article 8 - Droit au respect de la vie privée et familiale B. Application par la CEDH, exemples choisis La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France à plusieurs reprises pour violation des principes essentiels affirmés. Notre procédure pénale a ainsi dû s’adapter pour tenir compte de la jurisprudence de la CEDH. À titre d’exemple, l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants et de la torture, issue de l’article 3, notamment au cours de la garde à vue, a été rappelée à diverses reprises (voir notamment, Tomasi1, CEDH Selmouni2), et la France a été condamnée pour traitements inhumains ou dégradants puis pour torture. Avant l’entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 1991, la CEDH a sanctionné la France pour ses pratiques en matière d’écoutes téléphoniques, incompatibles avec l’article 8 de la Convention ( arrêts Kruslin et Huvig CEDH 24 avril 19903). La cour a, en effet, estimé que le droit français, écrit et non écrit, n’indique pas avec assez de clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités et qu’il n’offre pas, par conséquent, le degré minimal de protection voulu par la prééminence du droit dans une société démocratique. La durée excessive des procédures en cours et en particulier de la détention provisoire a été sanctionnée comme incompatible avec le droit au procès dans un délai raisonnable (article 6§1)4. L’article 6 de la Convention s’intitule « Droit à un procès équitable », la Cour européenne des droits de l’homme a ainsi progressivement dégagé une notion de procès équitable, qui lui permet de sanctionner certaines pratiques, notamment en matière de mode de preuve5. La Cour a également fait usage du principe de la présomption d’innocence, affirmée par l’article 6§2. C’est ainsi que la France a été sanctionnée par la CEDH dans une affaire Allenet de Ribemont (CEDH, 10 février 1995). En l’espèce, une personne gardée à vue, Monsieur Allenet de Ribemont, est désignée par de hauts responsables de police qui donnaient une conférence de presse avec le Ministre de l’intérieur, comme étant l’instigateur d’un assassinat. Cette déclaration de culpabilité au stade de la garde à vue préjugeait de l’appréciation des faits par les juges compétents, en violation de l’article 6§2 de la Convention6. Section 3. Le Conseil constitutionnel Le Conseil constitutionnel a eu à apprécier la conformité à la Constitution et plus largement au bloc de constitutionnalité d’un certain nombre de dispositions de procédure pénale. À travers ce contrôle, le Conseil constitutionnel encadre fermement le législateur et veille sur le contenu de notre procédure pénale. Le Conseil constitutionnel a ainsi affirmé le caractère essentiel du principe du double degré de juridiction lors de la phase du jugement7. Il a fixé les principes applicables aux perquisitions et saisies au cours de procédures administratives, les soumettant désormais au pouvoir de décision de l’autorité judiciaire8. Il a considéré que le droit d’une personne gardée à vue à un entretien avec un avocat était un droit 1 CEDH 27 août 1992, D. 1993 somm. 383 obs. Renucci CEDH 28 juillet 1999, RGDI pub. 2000, 181. JCP 1990 II 21541 note de W. Jeandidier 4 Affaire Le Tellier 26 juin 1991 ; affaire Kemmache, 27 novembre 1991 ; affaire A. 23 septembre 1998 5 déclarations anonymes écartées : Aff. Koskovski, 20 novembre 1989 ; Aff. SAIDI, 20 septembre 1993 ; Aff. Doorson, 28 mars 1996 ; 6 CEDH, 10 février 1995, série 1 n° 308 7 DC 19-20 janvier 1981, JCP 1981 II 19701 8 DC 29 décembre 1983, JCP 1984 II 20160 note Drago et Decocq 2 3 de la défense, et qu’à ce titre ce droit ne pouvait être supprimé9. Le Conseil constitutionnel a encore déclaré inconstitutionnelles des dispositions relatives à l’injonction pénale10 intervenant à la diligence de l’autorité chargée de l’action publique, en invoquant le principe selon lequel l’autorité judiciaire est la gardienne des libertés individuelles, ainsi que la présomption d’innocence et le respect des droits de la défense. Récemment, les réformes de la procédure pénale ont donné lieu à de nouvelles saisines du Conseil constitutionnel. La décision rendue le 2 mars 200411 à propos de la loi du 9 mars 2004 est riche en enseignements. Le Conseil y énonce que l’allongement de quarante-huit heures de la garde à vue en matière de criminalité organisée ne porte pas une atteinte excessive aux libertés individuelles. Toujours concernant la garde à vue en matière de criminalité organisée, le Conseil considère que le retard dans l’intervention de l’avocat n’est pas contraire aux droits du gardé à vue, dans la mesure où l’autorité judiciaire contrôle la qualification des faits. Par ailleurs, la Conseil a validé la constitution d’un fichier des délinquants sexuels. Concernant la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (le « plaider coupable »), le Conseil constitutionnel a supprimé les termes qui écartaient la publicité des débats pour cette procédure. Section 4. Les principes essentiels issus de la loi La loi renforçant la présomption d’innocence, en date du 15 juin 2000, comporte un article préliminaire inséré en tête du Code de procédure pénale. Cet article fixe trois séries de principes essentiels de la procédure pénale. Une première série de principes fixe les objectifs généraux de la procédure pénale. L’influence de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de la Cour européenne des droits de l’homme est évidente, notamment à travers la notion de procès équitable. Il en ressort que la décision pénale doit être celle d’un juge impartial, d’où le principe de séparation des juridictions d’instruction et de jugement. Le principe du contradictoire implique que chaque partie puisse débattre et contredire les arguments et preuves avancés par l’autre partie. Un deuxième bloc intéresse les victimes et leur prise en compte dans le procès pénal. Une troisième série de principes intéresse la présomption d’innocence et plus largement les droits de la personne poursuivie. Section 5.- Les principes essentiels de la procédure de jugement A. La publicité des débats 9 DC 11 août 1993, JO 15 août 1993 DC 8 février 1995 11 DC 2004-492 du 2 mars 2004, JO 10 mars 2004, p. 4639 10 Un fameux adage anglais pose que "Justice is not only to be done, but to be seen to be done". De fait il est important que la justice, qui est rendue au nom du Peuple français, lui permette justement d'assister aux débats. La publicité des débats est alors un principe essentiel de la procédure de jugement qui assure le respect de tous les droits accordés au prévenu et à l’accusé. Il figure à l’article 6 de la CEDH. La Cour européenne des droits de l’homme considère que ce principe assure la confiance dans l’institution judiciaire et confère la transparence nécessaire pour que le procès soit équitable. Ce principe supporte certaines limites. Notamment, le huis clos est exigé pour les procédures de jugement des mineurs délinquants. Par ailleurs, le huis clos12 peut parfois être demandé par une victime partie civile (en matière de viol, de torture et d’actes de barbarie accompagnés d’agression sexuelle). De manière générale, le tribunal ou la cour peuvent ordonner le huis clos, sous réserve du refus des parties civiles. La publicité autorise la publication de comptes rendus des audiences dans la presse. Toutefois, la publication des débats des tribunaux pour enfants est interdite ; de même que la publication de comptes rendus dans certaines affaires, notamment en matière de diffamation. B. L’oralité des débats La finalité de ce principe est de rendre plus efficace la discussion des preuves à partir desquelles la juridiction de jugement doit se déterminer. Toutefois, l’écrit conserve une place importante dans les procédures de jugement (conclusions, réquisitions, notes d’audience prises par le greffier…). C. Le contradictoire Ce principe n’est pas le propre de la procédure de jugement. Il trouve à s’appliquer en principe dès la phase d’instruction, mais est particulièrement fort au cours de la phase du jugement. Lors de cette phase, le contradictoire se traduit par la possibilité pour les parties de défendre leurs intérêts, ce qui implique leur présence, et la possibilité de prendre la parole pour discuter des preuves. L’obligation faite aux parties de comparaître procède notamment de ce principe et permet de rendre un jugement contradictoire. Par exception, dans certaines circonstances, la juridiction de jugement pourra rendre une décision qui sera, même en l’absence de la personne poursuivie, réputée contradictoire. Mais il faut noter que la Cour de cassation décide que les juges ne peuvent procéder à une requalification d’office des faits lorsque le prévenu est absent (Crim. 5 janvier 2005, annexe). 12 Voir pour la Cour d'assises, article 306 CPP Retenir l’essentiel : La Constitution revêt une importance en procédure pénale à travers certaines de ses dispositions mais aussi et surtout à travers le contrôle qu’exerce le Conseil constitutionnel. L'article préliminaire du CPP a une importance sans cesse croissante en procédure pénale. Il prévoit de nombreuses garanties telles que la proportionnalité s'agissant des mesures de contrainte pouvant être imposées aux individus ou encore la dignité de la personne. Si les auteurs d'interrogent sur sa valeur supra législative en ce qu'il reprend, pour l'essentiel, des principes issus de la Convention européenne, force est, à tout le moins, de lui reconnaître une valeur législative incontestable et une valeur symboliquement très forte. L'invocation directe de cet article évite le recours à la Cour de Strasbourg (qui suppose des conditions tenant notamment à l'épuisement des voies de recours internes). La phase de jugement est protectrice s’agissant des garanties qu’elle offre aux justiciables. Points à approfondir: - La constitutionnalisation de la procédure pénale - Les caractéristiques de la phase de jugement EXERCICES Vrai / faux 1. En matière de procédure pénale, les principes essentiels de la Convention européenne des droits l’homme sont directement invocables par les justiciables. 2. Le Conseil constitutionnel et le législateur ont une compétence partagée pour l’élaboration de la procédure pénale. 3. Le droit de se faire assister par un interprète pour une personne qui ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience est affirmé dans la Convention européenne des droits de l’homme. 4. La présomption d’innocence est un principe à valeur constitutionnelle. 5. « L’article préliminaire » issu de la loi du 15 juin 2000 a conféré valeur constitutionnelle au principe du droit au procès équitable. Commentaire de l’article préliminaire du Code de procédure pénale