N° 006 2010: Anniversaire assassinat du président Laurent

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N° 006 2010: Anniversaire assassinat du président Laurent
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COMMUNIQUE DE PRESSE N°006/RDC/VSV/CD/2010
ANNIVERSAIRE ASSASSINAT DU PRESIDENT LAURENT-DESIRE KABILA :
NEUF ANS DE PROCES INACHEVE ET D’ENCHAINEMENT DE LA VERITE
A l’occasion de la commémoration du neuvième (9ème) anniversaire du douloureux
assassinat mardi 16 janvier 2001, à Kinshasa, du président de la République
Démocratique du Congo (RDCongo), monsieur Laurent-Désiré Kabila, dans sa résidence
officielle au Palais de Marbre, sise avenue Nguma, quartier Ma Campagne, commune de
Ngaliema, la Voix des Sans-Voix pour les droits de l’homme (VSV) saisit, une fois de
plus, l’opportunité lui offerte, ce samedi 16 janvier 2010 pour réitérer ses vives
préoccupations.
La VSV souhaite voir le mot d’ordre du gouvernement « Tolérance Zéro » appliqué en
faveur de la manifestation de la vérité sur l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila
en poursuivant les enquêtes pouvant déboucher sur un procès véritablement juste et
équitable où comparaitront les coupables, commanditaires et exécutants.
La VSV dénonce la politisation à outrance, non seulement, du procès sur l’assassinat du
président Laurent Désiré Kabila, mais aussi, de l’application discriminatoire de la loi
d’amnistie n°05/23 promulguée en date du 19 décembre 2005.
1. De la politisation de la loi d’amnistie pour faits de guerre,
infractions politiques et d’opinion.
Rappel des faits :
Conformément aux prescrits de l’Accord Global et Inclusif et à la Constitution de la
transition, l’Assemblée Nationale de la RDCongo avait adopté, le 29 novembre 2005, la
loi portant amnistie pour faits de guerre, infractions politiques et d’opinion, et ce, après
deux ans de controverse, mieux de blocage unilatéral par de partisans du président
Joseph Kabila regroupés dans le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie
(PPRD).
L’on se rappellera que cette loi a été adoptée sans la participation des députés issus de la
composante dite ex-gouvernement de Joseph Kabila à cause de leur volonté d’exclure, à
tout prix, de la loi d’amnistie les personnes poursuivies et/ou condamnées dans
l’assassinat du chef de l’Etat Laurent-Désiré Kabila.
Adoptée à la majorité écrasante des députés présents et votants, la loi avait été déposée
sur la table du chef de l’Etat pour promulgation endéans quinze jours.
Cependant, au lieu de privilégier l’intérêt supérieur de toute une nation au détriment des
considérations égoïstes, partisanes et probablement familiales, le chef de l’Etat avait
choisi, par contre, de solliciter l’avis de la Cour Suprême de Justice (CSJ) sous forme de
question fermée, mais apparemment ouverte : « Est-ce que l’assassinat d’un chef de
l’Etat est une infraction politique ou un crime de droit commun ? ».
Se dédisant, la Cour Suprême de Justice (CSJ), la plus haute instance judiciaire de la
RDCongo qui, pourtant s’était, par le passé, déclarée incompétente sur la même matière,
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à l’initiative de la question, lui posée également par le président de l’Assemblée
Nationale, a surpris en donnant, cette fois-ci, un avis contraire, conformément à la
position du chef de l’Etat et de sa famille politique.
Bien que, dans son avis consultatif du 13 décembre 2005, la CSJ considère l’assassinat
d’un chef de l’Etat comme une infraction de droit commun, tous les prévenus dans cet
assassinat avaient été pourtant, auparavant, condamnés pour des infractions politiques.
Cette tendance visant à perpétuer l’application discriminatoire de la loi d’amnistie, sous
de fallacieux prétextes, vide le texte légal de sa vraie substance, à savoir, la
réconciliation nationale pendant cette période cruciale de l’histoire du pays.
Déjà au sortir du dialogue inter congolais, le président de la république a signé le décretloi 03/001 du 15 avril 2003 portant amnistie pour faits de guerre, infractions politiques et
d’opinion pour la période allant du 02 avril 1998 au 04 avril 2003. Cependant, il sied de
relever que la famille politique du président Joseph Kabila a fait appliquer ce décret-loi de
manière sélective.
Comme vous vous en souviendrez, la VSV a dénoncé, le 01 mars 2004, au cours d’un
point de presse, cette discrimination et le manque de volonté politique au sommet de
l’Etat pour organiser enfin un procès juste et équitable sur l’assassinat du président
Laurent-Désiré Kabila.
Dans le but de privilégier l’esprit d’équité et de justice afin de déboucher sur une
véritable réconciliation nationale et de mettre un terme à une justice à deux vitesses
dans un pays qui se veut un Etat de droit, une amnistie totale, complète et non
discriminatoire doit être accordée à tous en attendant la révision tant revendiquée du
procès.
2. De la commémoration du neuvième anniversaire de l’assassinat du
président Laurent-Désiré Kabila.
Depuis neuf (9) ans, les congolaises et congolais assistent et/ou participent chaque 16
janvier, à de différentes cérémonies commémoratives de l’assassinat du président
Laurent-Désiré Kabila, dont l’organisation des cultes ou messes dans des églises, temples
et mosquées, des visites guidées au Palais de Marbre et au mausolée…
Des personnalités et personnes vivant dans l’opulence au jour le jour et ayant tiré
manifestement profit de l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila sont,
curieusement et brusquement, à cette date du 16 janvier, émues de tristesse et
compassion apparentes vis-à-vis de la famille de l’illustre disparu, et ce, avant que des
discours politiques ne s’y mêlent au grand dam de la mémoire du défunt et de l’histoire
politique de la RDCongo.
Tout en réitérant sa vive compassion à l’égard de la famille du président assassiné
Laurent-Désiré Kabila, la VSV s’interroge jusque quand prendra fin ce folklore
politicien, pendant que de nombreuses personnes innocentes sont sacrifiées et
continuent, en toute indifférence, de croupir dans des prisons tandis que, d’autres, sur
qui pèserait des soupçons graves d’avoir trempé, de près ou de loin, dans cet assassinat,
circuleraient librement dans des rues de Kinshasa et d’ailleurs.
Au lieu de rechercher la manifestation de la vérité par l’organisation d’un procès juste et
équitable, tout est, par contre, mis en œuvre en vue de perpétuer la conclusion d’une
parodie de justice et l’obstruction de l’application juste et équitable de ladite loi
d’amnistie.
Il vous souviendra que le verdict, injuste, du 07 janvier 2003, rendu par l’ex Cour
d’Ordre Militaire (COM), juridiction d’exception de triste mémoire, n’aurait eu
manifestement, entre autres, objectifs la privation aux RDCongolais de leur droit à
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l’information sur la mort du président Laurent-Désiré Kabila et la réclusion de témoins
gênants par la condamnation.
La commémoration du neuvième anniversaire de l’assassinat du président Laurent Désiré
Kabila coïncide avec le deuxième (2ème) anniversaire de l’assassinat, dans la nuit du 15
au 16 janvier 2008, de madame Aimée Mulengela Kabila, âgée de 32 ans portant
passeport diplomatique n° D0012 893, fille du président Laurent-Désiré Kabila (décédé)
et de madame Zaïna Kibangula (décédée), victime d’actes de cruauté, de torture, avant
d’être tuée, par balles, par deux (2) hommes armés ayant fait irruption, par effraction, à
son domicile, à Kinshasa/Mont-Ngafula.
Depuis lors, aucun procès n’a été ouvert pour faire la lumière sur cet odieux assassinat
en vue de poursuivre et sanctionner les auteurs et commanditaires de ce crime.
Eu égard, non seulement, à l’occupation de la RDCongo, pendant plusieurs années, par
des pays étrangers, à travers la présence des armées régulières, entre autres, du
Rwanda, de l’Ouganda, du Burundi, de l’Angola, du Zimbabwe, de Namibie et du Tchad
mais aussi, à l’implication interne et externe dans l’assassinat d’un chef de l’Etat en
fonction, il importe d’interpeller, à cette occasion, la communauté internationale, plus
précisément l’Organisation des Nations Unies (ONU) sur l’impérieuse nécessité de la
mise en place d’une commission d’enquête internationale, à l’instar de la
commission instituée sur l’assassinat de l’ancien premier ministre libanais, monsieur Rafic
Hariri, en vue de garantir l’impartialité et l’objectivité des résultats de l’enquête et
l’organisation d’un procès public, juste et équitable.
Sinon, la RDCongo risque de ressembler à un pays assis constamment sur un volcan,
susceptible de provoquer, en permanence, une déstabilisation politique dans la mesure
où on ne peut prétendre bâtir un nouvel Etat sur un fond ou des cendres d’assassinat, de
crime, de mensonges, de manipulations et de l’impunité.
Le caractère urgent de la demande de la VSV est plus que d’actualité au regard du
ciblage, à travers, notamment, des mesures exceptionnelles de détention dont font
l’objet les condamnés, visiblement, épuisés moralement, en neuf ans d’incarcération.
Les détenus continuent de passer leur séjour au CPRK dans des conditions
particulièrement difficiles. L’absence de la ration alimentaire et des soins médicaux les
ayant, pour la plupart, obligés d’assurer leur propre prise en charge ; la répétition
d’interdiction intempestive de visite ; les traitements cruels, inhumains et dégradants
leur réservés , durant des années, par un groupe de prisonniers appartenant au « Comité
d’Encadrement » qualifié de « Milice » au service de l’autorité pénitentiaire. L’absence de
la volonté politique de pouvoir leur assurer une justice juste après moult réclamations
par eux-mêmes ou par des avocats et défenseurs des droits humains... a fini par briser
leur moral et pousser bon nombre d’entre eux à la tentation de s’ « évader », à tout prix,
dans des conditions hautement périlleuses.
C’est le cas de quatorze (14) détenus qui se sont évadés du CPRK lundi 23 octobre 2006
dans des conditions non élucidées à ce jour.
Rattrapés, mardi 24 octobre 2006, à Brazzaville, par les services de sécurité de la
RDCongo, opérant à Brazzaville, République du Congo, deux (2) évadés sont rapatriés,
manu militari, à Kinshasa, RDCongo, où ils ont été détenus à l’Etat Major des
renseignements militaires (ex DEMIAP) avant leur transfert au CPRK, mercredi 25
octobre 2006.
Sous prétexte de prévenir d’éventuelles évasions, une trentaine des prisonniers ont été
brutalisés et forcés de quitter les cellules du pavillon 1, où ils sont gardés, depuis leur
transfert vers ce lieu de détention, pour être disséminés dans d’autres cellules dans des
conditions inhumaines. Certains, dans le lieu de transfert, ont été placés dans des
toilettes. C’est le cas de capitaine Itongwa Girinda, commandant Amisi Nshombo... Le
bilan de cette opération fait état de plusieurs biens appartenant aux détenus ciblés
emportés par les détenus membres du Comité d’Encadrement et gardés, à ce jour,
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entre les mains des autorités pénitentiaires et de plusieurs personnes blessées, dont
MM. Simon Mtulu, Fils Murhanzi, Julien Nshombo, Gervais Baguma, ...
La VSV reste d’avis que la paix, la sécurité et le développement en RDCongo reposent sur
une vraie réconciliation nationale qui passe, entre autres, par une bonne application de la
Justice, l’application non sélective de différentes lois portant amnistie en faveur des
condamnés et autres personnes se trouvant dans le collimateur des autorités
RDCongolaises, indexées dans les rapports des droits de l’homme, au niveau national et
international, dans la persistance de manque d’indépendance de la justice du pays.
3. Recommandations
•
Au niveau national, la VSV invite, une fois de plus, le gouvernement de la
RDCongo de lever tous les obstacles politiques créés en vue de :
- Voter une nouvelle loi d’amnistie par le Parlement, dont l’application fidèle, intégrale et
sans discrimination devra être effectivement garantie ;
- Lancer de nouvelles poursuites en vue de continuer le procès, et ce, conformément à la
conclusion du verdict du 07 janvier 2003 ;
- l’ouverture et l’activation du procès relatif à l’assassinat de madame Aimée Kabila
Mulengela.
•
Au niveau international, la VSV invite le Conseil de Sécurité des Nations Unies
à mettre sur pied une commission d’enquête internationale sur l’assassinat du
président Laurent-Désiré Kabila dans la perspective de mise en place d’une
instance judiciaire mixte (interne et externe) indépendante pour assurer la
révision du procès afin de lutter réellement contre l’impunité et les actes de
barbarie en RDCongo qui révoltent la conscience de l’humanité.
Fait à Kinshasa, le 16 janvier 2010.
LA VOIX DES SANS-VOIX POUR LES DROITS DE L’HOMME (VSV)