Introduction La lettre du père Eymard Pour approfondir le texte
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Introduction La lettre du père Eymard Pour approfondir le texte
Introduction Lorsque le père Eymard était mariste, il a fait la connaissance de Mme Natalie Jordan (18101882 ; cf. Sagesse de vie-5). Entre eux s’est nouée une forte amitié. Le père Eymard se disait son « frère dauphinois » et considérait qu’elle était son « âme sœur ». Ils passaient par les mêmes états dans les mêmes moments. Cette lettre est l’une des plus précieuses, parmi les quatre-vingt lettres qui composent leur correspondance. Le père Eymard prodigue à Mme Jordan des conseils judicieux en lui inculquant des principes de vie spirituelle, et il lui révèle la grâce qu’il a reçue au calvaire de Saint-Romans alors qu’il était jeune vicaire à Chatte. Le « Rocher de Saint Romans », avec sa chapelle, la belle nature, le silence et la paix des vallons et des collines, est le lieu qui a apporté au père Eymard une connaissance plus profonde de l’amour de Dieu. Le principe de vie spirituelle, que nous rapportons dans cette lettre, développe l’oraison de contemplation, il est un résumé de la spiritualité du père Eymard et comme l’expression achevée de son expérience mystique du « rocher de St Romans », dont Natalie Jordan est l’unique confidente. La lettre du père Eymard Paris, 27 août 1867 Il y a longtemps que vous ne m’avez donné de vos nouvelles; dans un sens j’en suis content, cela prouve que vous allez bien, que l’âme est bien nourrie, qu’elle marche dans sa vraie voie. Vous m’avez bien compris; la récapitulation que vous me faites de mes conseils est très exacte, cependant laissezmoi y revenir. […] Aspirez dans vos oraisons à vous nourrir plutôt de Dieu, qu’à vous purifier et à vous humilier; et pour cela nourrissez votre âme de la vérité personnifiée en la divine bonté de Dieu envers vous, de sa tendresse, de son amour personnel; voilà le secret de la vraie oraison, c’est de voir l’action et la pensée de Dieu dans son amour pour nous! Alors l’âme étonnée, pressée, s’écrie: “Que vous êtes bon, ô mon Dieu! Que ferai-je pour vous? Qu’est-ce qui pourrait vous faire plaisir?” C’est la flamme du foyer. Mais pour arriver à cette oraison de vie, il faut travailler beaucoup à s’oublier soimême, à ne se rechercher en rien dans l’oraison; il faut surtout simplifier le travail de l’esprit par la vue simple et calme des vérités de Dieu. Le secret de cette vue simple c’est de voir de prime abord les choses sous le côté de la bonté de Dieu pour l’homme, la raison de cette grâce, ce qu’elle a coûté à Notre Seigneur, son actualité, sa permanence pour nous. Quand l’âme a le bonheur de trouver ce bon côté, l’oraison est plutôt une contemplation délicieuse, où l’heure passe vite. Ah! bonne fille, que je vous souhaite et désire souvent de goûter ainsi Dieu! Il y en a pour longtemps; c’est mon rocher de SaintRomans. […] Nous vieillissons et nous avons encore beaucoup de chemin à faire ; il faut prendre le plus court, celui de l’amour qui donne tout sans intérêts. J’ai bien souvent pensé à ma visite de Lyon ; vous m’avez trouvé plus ami que père quelquefois. La joie de vous revoir après si longtemps me ferait croire à ma famille ; puis j’avais le cœur si souffrant depuis quelque temps, qu’il s’est épanoui en retrouvant sa vieille fille. […] Eymard Pour approfondir le texte « Aspirez dans vos oraisons à vous nourrir plutôt de Dieu, qu’à vous purifier et à vous humilier ». Se nourrir de Dieu, c’est le conseil que le père Eymard donne aussi à la nièce de Mme Jordan : « Nourrissez-vous de Notre Seigneur, de son esprit, de ses vertus, de sa vérité évangélique, de la contemplation de ses mystères. (…) Tirez de tout ce que vous faites le pain de vie, la vie de Jésus, et alors rien ne vous affaiblira » (CO 2171). « L’homme a faim de Dieu, dit le père Eymard, et Jésus-Christ est sa seule nourriture divine » (RA 16,7). Il est question, donc, de contempler dans la prière l’amour personnel et plein de tendresse de Dieu, de se nourrir de sa parole et de son pain de vie. « Pour arriver à cette oraison de vie… c’est de voir de prime abord les choses sous le côté de la bonté de Dieu pour l’homme » L’amour de Dieu est présent, parfois comme caché, en toutes choses ; tout ce que nous vivons peut être un témoignage de son amour. Mais pour que l’amour de Dieu devienne le centre de toute la vie chrétienne, il faut se préparer à en faire le principe par l’oraison. « Mettez-vous en Dieu et vous serez dans votre centre divin » (CO 1153), suggérait le père Eymard à sa correspondante dans une autre lettre. Il lui écrivait encore : « La force sort de l’amour: aimez donc bien; l’amour sort du foyer de l’oraison: soyez avant tout une fille d’oraison, mais d’une oraison vôtre, affectueuse, recueillie, recueillante, qui goûte Dieu, se nourrit de Dieu » (CO 2049). A la fille de Mme Jordan le père Eymard écrivait : « Tout ce que je vous désire est de goûter la bonté et la beauté de Dieu dans l’oraison » (CO 2040). Une fois qu’on a découvert l’amour de Dieu, on se sent poussé à correspondre à cet amour par un amour humble, doux, patient, mortifié, charitable. « C’est mon rocher de Saint-Romans » Au fur et à mesure que l’analyse de l’expérience vécue à St Romans s’approfondit, le rocher devient le rocher mystique du père Eymard, qui le rapproche de Dieu, jusqu’à goûter Dieu et se perdre un peu dans l’harmonie de son cœur. « Nous avons encore beaucoup de chemin à faire ; il faut prendre le plus court, celui de l’amour qui donne tout sans intérêts » L’expérience de St Romans a permis au père Eymard un cheminement, qui l’a conduit à une religion inspirée par l’amour, qui devient « sa voie » à lui. « L’amour! voilà ma loi, ma voie; ma vertu, ma force, ma joie, mon bonheur, ma vie, ma mort, mon ciel! Amen! » (NR 44,111). Le père Eymard propose à tous la voie la plus courte : celle de l’amour. « Vous m’avez trouvé plus ami que père quelquefois » Cette lettre révèle le lien profond qui unit le père Eymard à la famille Jordan, comme si elle était sa famille, en particulier à Natalie ‘sa vieille fille’. Leur amitié a fleuri pendant plus de 25 ans et a atteint son apogée entre 1864 et 1868 ; les dernières années de la vie du Père. Elle a été une amitié humaine d’une grande affinité spirituelle et d’une grande maturité affective. Sagesse de vie - 7 A l’écoute de St Pierre-Julien Eymard Pour la prière Oh Seigneur notre Dieu, ton amour est vraiment grand. Tu nous as aimé le premier (cf. 1Jn 4,19). Tu as envoyé ton Fils Jésus, qui a donné sa vie pour nous, alors que nous étions pécheurs, indifférents, infidèles (cf. Rm 5,6-8). Seigneur, que ton amour fonde la glace de notre cœur, qu’il nous appelle, nous invite, nous presse. Que nous puissions répondre à ton amour avec un amour semblable au tien : généreux et dévoué, fort et doux, fidèle et constant. Une lettre pour nous tous Centre de spiritualité « Eymard » 67, rue du Breuil 38350 La Mure [email protected] À Mme Natalie Jordan 27 août 1867 – CO 2011 C’est mon rocher de Saint-Romans