LA LIQUIDATION DU RÉGIME MATRIMONIAL DANS LE CADRE

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LA LIQUIDATION DU RÉGIME MATRIMONIAL DANS LE CADRE
LETTRE N°3
NOVEMBRE 2014
LA LIQUIDATION DU RÉGIME MATRIMONIAL DANS LE CADRE
DE LA COMMUNAUTÉ LÉGALE: POURQUOI FAIRE?
Par un arrêt du 11 Septembre 2013 (12-18.512), la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation a jugé que "méconnaît l'étendue de
ses pouvoirs le juge qui refuse de désigner, lors du prononcé du divorce, un notaire liquidateur".
Cet arrêt intervient suite au rejet des juges du fond de faire droit à la demande de l'épouse qui sollicitait la désignation d'un notaire
aux fins de liquider et partager la communauté légale de biens ayant existé entre son ex-époux et elle.
D'où l'intérêt pour chaque époux marié sans contrat de mariage ou expressément sous le régime de la communauté réduite aux
acquêts, et en phase de divorce, de savoir s'il y a ou pas lieu à liquidation de son régime matrimonial, sachant que cette liquidation
sera obligatoirement faite par un notaire s'il existe des biens immobiliers.
Rappelons que la fin de la communauté et sa liquidation n'arrivent pas qu'avec le divorce mais également du fait d'une séparation de
corps, du décès d'un époux, de l'absence déclarée ou en cas de changement de régime matrimonial vers un régime séparatiste.
Pour ce qui est du divorce et de la séparation de corps, leurs effets sur le régime matrimonial remontent, non au jour du prononcé du
divorce, mais au jour de l'ordonnance de non conciliation, et ce par application des dispositions de l'article 262-1 du Code Civil.
Trois problématiques s'imposeront: A quelle moment la liquidation doit-elle être envisagée? Comment liquider? Quelle est la
procédure en cas de litige?
I - À QUEL MOMENT LA LIQUIDATION DE LA COMMUNAUTÉ LÉGALE DOITELLE ÊTRE ENVISAGÉE?
La liquidation de la communauté a pour but de remettre, à terme, les époux dans leurs droits en évitant que l'un d'entre ne jouisse
seul de biens, de fonds qui devraient revenir aux deux parties. Il y a lieu à liquidation chaque fois qu'il existe dans la communauté
matière à liquider, c'est à dire soit un enrichissement, soit des dettes.
A- DETERMINATION DE LA MASSE ACTIVE
Chaque fois que le couple aura acquis ou créé du patrimoine, la liquidation sera obligatoire.
- les acquêts: quand la communauté aura acquis onéreusement (par les salaires notamment) ou par don des biens
mobiliers (meubles, voiture...) ou immobiliers (terrains, parts sociales...)
Si l'origine d'un bien ne peut être déterminée, il tombera dans l'actif de la communauté.
Par contre, les biens reçus par donation, succession ou legs par un époux ne tombent pas dans la communauté et demeurent des biens
propres.
- le financement par la communauté de dépenses d'amélioration sur un bien appartenant en propre à un époux:
existence d'une créance à l'égard de cet époux et droit à récompense.
C'est le cas quand le couple fait construire une maison sur le terrain appartenant en propre à l'un des époux ou encore s'il apporte des
rénovations sur un bien propre (exemple: rénovation d'une maison)
B- DETERMINATION DU PASSIF: LES DETTES DE LA COMMUNAUTÉ
Elles ont également vocation à être partagées.
- il s'agit, sauf exception, des prêts conclus durant l'union qui sont communs.
- la communauté peut également avoir des dettes à l'égard d'un époux, c'est le cas quand elle a tiré profit de biens
appartenant en propre à l'époux (ex: durant l'union, les époux utilisent des économies de l'un d'eux réalisées avant l'union)
Mais ne seront jamais à la charge définitive de la communauté les dettes personnelles d'un époux.
La preuve du caractère commun se fait par tout moyen (titre de propriété, factures, attestations, documents administratifs...)
II- LE PROCESSUS
OBLIGATOIRE
DE
LIQUIDATION:
LA
PHASE
AMIABLE
RESTE
La liquidation du régime matrimonial doit toujours débuter par une phase amiable devant le notaire à peine
d'irrecevabilité de l'action judiciaire en liquidation partage.. (article 1360 du Code de Procédure Civile).
A- DÉBUT DE CETTE PHASE DÈS L'ORDONNANCE DE NON CONCILIATION
Dès la requête en divorce et au pire devant le juge lors de l'audience de conciliation, les époux peuvent demander la désignation d'un
notaire et d'un expert aux fins d'entreprendre les démarches amiables de liquidation partage (article 255 n°9 et 10 du Code Civil).
Au terme de l'arrêt sus-mentionné du 11 Septembre 2013, la désignation d'un notaire peut également être demandée au Tribunal
après l'ordonnance de non-conciliation dans les conclusions aux fins de divorce (notons que dès l'assignation l'époux demandeur doit
formuler une proposition de partage des intérêts communs).
La décision portera donc désignation du président de la chambre départementale des notaires aux fins de désigner un notaire.
B- PROCÉDURE AMIABLE DEVANT LE NOTAIRE
Le notaire désigné va convoquer les parties et réunir les pièces nécessaires (titre de propriété, relevés de compte...)
Au terme de l'article 1368 du Code Civil et sous les exceptions portées par l'article suivant le notaire dispose d'une année pour
reconstituer l'actif et le passif de la communauté. Il pourra s'adjoindre un expert aux fins de déterminer le quantum de l'éventuel
enrichissement ou appauvrissement.
Que se passe-t-il en cas d'échec de la procédure amiable?
III- L'ECHEC DE LA PROCÉDURE AMIABLE: LE RECOURS JUDICIAIRE
En cas d'échec de la procédure amiable l'un des époux pourra saisir le Juge aux Affaires Familiales en démontrant, à peine
d'irrecevabilité, l'échec de la tentative amiable.
A- IMPORTANCE DU PROCÈS VERBAL DE DIFFICULTÉ
Si la phase amiable s'est déroulée devant notaire celui-ci aura pris la peine de délivrer à l'époux soit un procès verbal de carence
justifiant de l'échec de la convocation de l'autre époux, soit un procès verbal de difficulté faisant état du désaccord persistant entre les
parties sur le partage et qui a empêché de signer ledit acte de partage.
Si le notaire a été judiciairement désigné, il transmettra au Tribunal un procès verbal de difficulté qui a pour effet de saisir le
Tribunal afin qu'il soit statué sur les droits patrimoniaux des parties.
B- CONTRÔLE PERMANENT DU TRIBUNAL JUSQU'AU PARTAGE
Le Tribunal pourra statuer sur les contestations et renverra devant notaire pour l'établissement de l'état liquidatif. Un nouveau retour
devant le juge reste possible en cas de contestation persistante, ce dernier pouvant à terme statuer sur une vente aux enchères
(licitation) si le partage s'avère impossible.
En conclusion, la liquidation du régime matrimonial peut s'avérer longue et complexe.
Elle est un droit pour l'époux qui en fait la demande sachant que le maintien dans l'indivision est souvent une source de préjudice.
Vous assistant auprès de votre notaire à chaque étape, votre avocat demeure votre meilleur allié.
Maître Sarah APPASSAMY
Avocat au Cabinet JUDEXIS