Le recours administratif et judiciaire en matière de douanes et
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Le recours administratif et judiciaire en matière de douanes et
fiscalité Le recours administratif et le recours judiciaire en matière de douanes et accises Luc GHEYSENS Avocat au Barreau de Courtrai Gheysens – Soetaert & Partners - Wevelgem Professeur FHS, VLEKHO et UIA La loi du 30 juin 2000 modifiant la loi générale sur les douanes et accises (L.G.D.A.) et instaurant un droit de recours administratif (M.B., 12 août 2000) régit le volet administratif de la procédure en matière de douanes et accises. Ce faisant, la Belgique exécute une obligation découlant de l'article 243 du Code des douanes communautaire (C.D.C.), en vigueur depuis le 1er janvier 1994 dans les autres Etats membres de l'Union européenne. Pour leur part, les aspects juridictionnels de la procédure en matière de douanes et accises (recours devant le juge) ont été réglementés par la loi du 15 mars 1999 relative au contentieux en matière fiscale, la loi du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale et l'arrêté royal d'exécution de l'article 7 de la loi du 23 mars 1999 (M.B., 27 mars 1999). L’analyse sommaire de ces deux volets de la procédure contentieuse constitue l’essentiel de cette contribution. 1. PORTÉE A. L'article 243 C.D.C. confère à toute personne le droit d'exercer un recours contre des décisions prises par les autorités douanières qui ont trait à l'application de la réglementation douanière et qui la concernent directement et individuellement. Ce droit est également reconnu aux personnes qui ont sollicité une décision auprès des autorités douanières, sans toutefois l'obtenir dans le délai prévu à l'article 6, al. 2. Le Code des douanes communautaire oblige chaque Etat membre à désigner une auto- rité douanière auprès de laquelle ce droit de recours administratif peut être exercé. B. La loi du 30 juin 2000 instaurant un droit de recours administratif désigne le directeur général de l'Administration des douanes et accises de Bruxelles comme l’autorité compétente pour recevoir et statuer sur ledit recours administratif. Le directeur général, le fonctionnaire ou le collège de fonctionnaires délégué par lui statue par décision motivée, qui doit être notifiée au requérant par lettre recommandée à la poste (nouvel article 219 L.G.D.A.). La loi précise également les cas et les délais dans lesquels le droit de recours administratif pourra être exercé, tant dans l’hypothèse où une décision a été rendue que dans le cas où aucune décision n’est rendue à l’expiration d’un délai déterminé. C. Comme indiqué dans l'introduction, les recours judiciaires sont régis par les lois des 15 et 23 mars 1999 et leur arrêtés d’exécution. A l’instar de la situation qui prévaut pour les autres impôts depuis la récente réforme de la procédure, le contribuable devra intenter une action, par requête contradictoire (munie, en cas de décision de sa copie ) auprès des chambres fiscales des tribunaux de première instance établis dans chaque cheflieu de province (+ Eupen, pour les cantons rédimés). Il en va de même pour l’opposition à contrainte, dont on sait qu’elle était jusqu’à présent signifiée au moyen d’une citation (art. 313 et 314 L.G.D.A. et 1385undecies C.J.). Les procédures en langue allemande sont obligatoirement intentées devant le tribunal fiscal d'Eupen. Précisons encore que si l'Etat (en l’occurrence, l’Adminis- 11 ACCOUNTANCY & TAX fiscalité tration des douanes et accises du Ministère des Finances) entend intenter une action en justice, il doit procéder à une assignation devant le tribunal civil ou devant le tribunal pénal (correctionnel) si des peines sont en sus requises. Rien n’empêche également de décerner une contrainte, laquelle confère un titre exécutoire à l'Administration et devient définitive, dès l'instant où le contribuable n'y a pas fait opposition auprès du tribunal fiscal dans les trois mois. 2. COMMENTAIRE a. Le droit de recours - titre VIII - articles 243 à 246 C.D.C. Un droit de recours administratif auprès du directeur général de l'Administration belge des douanes et accises est ouvert à toute personne contre les décisions de la compétence des douanes et accises et des taxes y assimilées (taxes environnementales, taxes d’ouverture, permis d’exploitation …..) qui le concerne directement et individuellement ou contre l’absence d’une décision de même nature (art. 243 et 245 C.D.C). Comme on le voit, le droit de recours administratif est ouvert aussi bien à l’égard d’une décision qu’à l’égard d’une absence de décision. En vertu de l'article 6 C.D.C, les autorités douanières compétentes doivent, si elles y sont invitées, prendre une décision relative à l'application de la réglementation douanière dans un délai fixé au niveau national. Ce délai peut être dépassé, lorsqu’il n’est pas possible aux autorités douanières de le respecter. Dans ce cadre, il convient toutefois d’en informer le requérant avant l'expiration du délai, en indiquant les motifs qui justifient le dépassement ainsi que le nouveau délai jugé nécessaire pour statuer sur la requête. La durée de ce nouveau délai peut donc être déterminée par les autorités douanières. Dans une première phase (réclamation), ce droit de recours est exercé devant l'autorité douanière nationale (en Belgique : le directeur général des douanes et accises). Dans une seconde phase, il l’est devant une autorité judiciaire ou un organe spécialisé équivalent (art. 243 C.D.C). L’introduction d’un recours n’est pas suspensive de l'exécution de la décision contestée, mais les autorités douanières peuvent surseoir (en tout ou en partie) à son exécution lorsqu’il existe des raisons fondées de douter de la conformité de la décision contestée à la réglementation douanière ou qu’un dommage irréparable est à craindre pour l’intéressé (art. 244 C.D.C). Lorsque la décision contestée a pour effet l’application de droits à l’importation ou de droits à l’exportation, il faut en principe constituer une garantie, mais les autorités 12 ACCOUNTANCY & TAX douanières peuvent également y renoncer si la constitution d’une telle garantie est de nature, en raison de la situation du débiteur, à susciter de graves difficultés économiques ou sociales. Concrètement, cela signifie que les autorités douanières et/ou le débiteur des droits d’accises disposent du droit d’agir de la sorte. L’article 246 C.D.C. indique que le droit de recours ne peut être exercé contre des décisions par les autorités douanières sur la base du droit pénal. L’action devant les tribunaux de première instance se fait par requête contradictoire, établie en autant d’exemplaires qu’il y a de parties en cause auxquels il est toutefois conseillé d’ajouter un exemplaire supplémentaire pour le greffe. A chaque requête doit être jointe, sous peine de nullité, une copie de la décision contestée ou une copie du recours administratif, en l’absence de décision du directeur. Nous reviendrons ultérieurement sur la possibilité d’audition de l’expert-comptable, du comptable professionnel ou de réviseur d’entreprises (voyez c. Action en justice, B,4 4 ❷ Citation directe par l’Administration). Suite à l’ajout d’un nouveau paragraphe 32 à l’article 576, al. 1er du Code judiciaire, une possibilité de recours existe également pour les procédures d’un montant inférieur à 75.000 BEF. b. Recours administratif organisé par la loi du 30 juin 2000 (M.B., 12 août 2000) D’évidence, il convient de noter qu’il s’agit ici d’un recours administratif préalable imposé " par ou en vertu de la loi" au sens de l’article 1385undecies du Code judiciaire, tel que modifié par la loi du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale. En d’autres mots, le contribuable ne peut donc s’adresser au juge fiscal qu’après avoir épuisé son droit de recours administratif. Sous peine de nullité, l’action devant les tribunaux fiscaux doit être exercée dans un délai de trois mois à compter de la date d’expédition de la décision contestée ou six mois à compter de la date de réception du recours en cas d’absence de décision. Le délai de six mois peut encore être prolongé de trois mois lorsque l'imposition contestée a été établie d'office par l'Administration. Le droit de recours administratif ne peut être exercé que contre les décisions du directeur régional des douanes et accises ou d'un fonctionnaire de grade équivalent (art. 212 L.G.D.A.). Les fonctionnaires visés ont été précisés par l’arrêté ministériel du 14 octobre 2.000 (M.B. 20 octobre 2 000). Il s’agit de ceux qui ont le grade d’auditeur général des finances ou de directeur chargé de la gestion d’un service. Par suite, les décisions d’autres agents de l’Administration des douanes et accises fiscalité devront, préalablement à l'exercice du droit de recours administratif, être soumises au directeur régional des douanes et accises, qui prendra une décision contre laquelle le recours administratif pourra ensuite être exercé. Les transactions ne peuvent jamais faire l'objet d'un recours administratif. Il en va de même en matière pénale, même si, dans la pratique, rien n'empêche les autorités douanières de prendre une décision sur la partie "civile" du litige en recours. Sous peine de déchéance, la requête motivée doit être adressée au directeur général de l'Administration des douanes et accises, par lettre recommandée à la poste, dans un délai de trois mois à compter de la date d'expédition de la décision contestée ou à compter de l'expiration du délai légal dont l'Administration dispose pour prendre une décision ou, si aucun délai légal n'a été déterminé, dans les deux mois à dater du jour qui suit celui de la remise à la poste de la lettre recommandée mettant l'Administration en demeure de prendre une décision. L'article 215 (nouveau) L.G.D.A., qui s'inscrit dans le chapitre XXIII (droit de recours administratif) oblige le directeur général à délivrer un accusé de réception mentionnant la date de réception du recours. Cette date a son importance, car elle détermine le délai dans lequel l'action en justice doit ensuite être intentée. La formalisation du recours administratif par la loi du 30 juin 2000 n'a pas supprimé le recours administratif généralement exercé de manière informelle dans toutes les matières fiscales pour lesquelles l’Administration des Douanes et Accises est compétente. En cas de litige avec des agents vérificateurs concernant le tarif applicable en matière de valeur en autorités douanières, etc., il est toujours possible de saisir le directeur régional ou directement l'Administration centrale. Le délai de recours administratif formel ne commence à courir qu'au moment où le directeur régional prend une décision. Nous estimons que même si l’Administration centrale prend une décision (fût-ce par un agent ayant le grade de directeur), cette décision ne peut faire l’objet d’une recours formel (réclamation) que si elle est actée, modifiée ou non, par un directeur régional. La Belgique compte un directeur régional à Gand (Flandre orientale et occidentale), à Anvers pour une partie de la province d'Anvers, à Hasselt (province du Limbourg et l'arrondissement de Turnhout), à Bruxelles (Brabant), à Mons (Hainaut), et à Namur et Liège pour les provinces de Liège et du Luxembourg. c. Action en justice Si le requérant en fait la demande dans sa requête, il sera entendu et sera, à cet effet, invité à se présenter dans un délai de 30 jours (art. 217 L.G.D.A.). Tant qu’une décision n’est pas intervenue, le requérant peut compléter sa requête par des griefs nouveaux, libellés par écrit. En vertu et dans les limites de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration (M.B. 30.6.1994), le requérant peut également consulter le dossier en litige. Le directeur général, le fonctionnaire ou le fonctionnaire délégué par lui statue par décision motivée. Le défaut de motivation viole la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation des actes administratifs et la décision sera ensuite annulée par le tribunal. De même, le requérant qui n'est pas entendu alors qu'il en avait fait la demande, pourra, avec de grandes chances de succès, invoquer la nullité de la décision devant le tribunal. S’il ne statue pas dans un délai raisonnable, le directeur général viole également les principes de bonne administration dont l’applicabilité en matière fiscale a été inconditionnellement reconnue par l'arrêt de cassation du 27 mars 1992.* Ne perdons également pas de vue qu’en l’absence de décision sur le recours administratif après six mois (neuf mois, en cas de taxation d’office), le contribuable peut porter la contestation devant le tribunal de première instance, sans plus attendre la décision du directeur. Conformément à la loi du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale (M.B., 27 mars 1999), tous les litiges relatifs à toutes les matières fiscales pour lesquelles l’Administration des douanes et accises est compétente relèvent de la compétence du tribunal de première instance établi dans le chef-lieu de chaque province : Bruges, Gand, Anvers, Hasselt, Liège, Arlon, Namur, Nivelles, Louvain, Bruxelles (pour la Région de Bruxelles-Capitale) et Eupen (pour les procédures en langue allemande). Un jugement rendu par le tribunal de première instance en matière fiscale est toujours susceptible d’être frappé d'appel. Le tribunal fiscal compétent est celui de la "province" où est situé le bureau où la perception a été ou doit être faite ou, si la contestation n'a aucun lien avec la perception d'un impôt, celui de la province où est établi le service d'imposition qui a pris la disposition contestée. * L’applicabilité des principes de bonne administration en matière fiscale vient encore d’être explicitement confirmée par une récente circulaire du Ministère des Finances (Circulaire Ci.RH. 863/530.827 du 18 septembre 2000). En substance, il en ressort que la décision du directeur ne doit pas être seulement motivée en fait et en droit, mais la motivation doit en sus être suffisamment adéquate et conforme aux dispositions de la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation des actes administratifs. 13 ACCOUNTANCY & TAX fiscalité A. Si la requête émane du contribuable, les hypothèses suivantes sont envisageables : • En cas d’absence de décision, il y a lieu de joindre, à peine de nullité, une copie du recours administratif et de l'accusé de réception de ce recours. Le contribuable ne peut toutefois introduire sa demande qu'à partir du premier jour du sixième mois suivant la date de réception du recours administratif (neuf mois, si l'imposition contestée a été établie d'office); • Si une décision a été prise , le délai de recours est de trois mois à compter de la date d’expédition de la décision contestée. Si une copie de la décision contestée ➊ L'Administration a toujours la possibilité de décerner une contrainte, si elle opte pour l'exécution parée (art. 314 L.G.D.A., tel que modifié en ses paragraphes 3 et 4 par la loi du 30 juin 2000). a) L'exécution parée est exercée par contrainte décernée par le receveur et déclarée exécutoire par le directeur régional du domicile du débiteur ou de sa caution et doit être notifiée au contribuable par l'Administration. Une fois la contrainte notifiée (par lettre recommandée ou par exploit d'huissier), l'exécution parée ne pourra être suspendue que par une action en justice (art. 314, § 3 modifié L.G.D.A.). L'ancien texte stipulait ce qui suit : "Après la notification de la contrainte, l’exécution parée ne pourra être suspendue que par l’opposition de la partie, signifiée au receveur poursuivant. L’opposition doit être motivée et contenir en même temps citation au receveur à comparaître dans les dix jours à dater de l’opposition devant le juge, conformément aux règles prévues par le Code judiciaire en matière de compétence et de procédure." En vertu de la nouvelle réglementation, le contribuable doit, selon nous, introduire son action en justice par requête à déposer au greffe du tribunal fiscal dans un délai de trois mois à compter de la date de notification, en y joignant une copie de la contrainte (à peine de nullité). Nous conseillons toutefois au contribuable de déposer la requête dès l'instant où une contrainte lui est signifiée, si possible dans l'(ancien) délai de 10 jours. Tout recours contre le jugement du tribunal fiscal statuant sur l’opposition à une contrainte doit être introduit dans un délai d’un mois à partir de la notification du jugement rendu sur opposition. b) Jusqu'au 12 août 2000, le contribuable était obligé de consigner préalablement la somme qu'il était condamné à payer. L'ancien paragraphe 4 de l'article 314 L.G.D.A. stipulait, en effet, qu’un "recours contre le jugement statuant sur l’opposition ne sera reçu que moyennant consignation préalable du montant des condamnations." 14 ACCOUNTANCY & TAX n’est pas jointe à chaque exemplaire de la requête, il y a matière à nullité d’après le texte légal. Nous renvoyons à cet égard aux nouveaux articles 632 et 1385decies et undecies du Code judiciaire. B.Quant à l’administration, elle dispose de trois possibilités d’action en justice : • soit décerner une contrainte 4 4 ➊ • soit assigner directement devant le tribunal civil (fiscal)4 4 ❷ • soit assigner devant le tribunal correctionnel 4 4 ❸ Cette obligation se voit à présent assouplie : le receveur est libre de notifier une demande de consignation en tout ou en partie des sommes dues. S'il le fait, il peut tenir compte des données concrètes du dossier, en ce compris la situation financière du débiteur et la demande de consignation peut être soumise à l’appréciation du tribunal. Le débiteur peut être autorisé à remplacer cette consignation par une sûreté réelle ou personnelle agréée par l'Administration des Douanes et Accises. Nous pensons cependant que l'Administration ne peut refuser arbitrairement la sûreté proposée. Les sommes réclamées doivent être consignées ou la sûreté constituée, dans les deux mois de la notification. A défaut de consignation des sommes ou de constitution de la sûreté dans le délai imparti, la juridiction saisie du recours doit, dans les trois mois à compter de l'expiration de ce délai, déclarer le recours irrecevable, à moins que, sur requête motivée du débiteur dans les deux mois de la notification, elle ne conclue, dans la même période de trois mois, que la demande formée par le fonctionnaire chargé du recouvrement n’est pas fondée. Reste à savoir quand commence à courir le délai de trois mois précité et quelle est la sanction applicable si aucun arrêt n'est rendu dans les trois mois. Il est toutefois certain qu'une demande de dispense de l’obligation de consignation/ sûreté devra être motivée par des justificatifs financiers et/ou par des éléments attestant que l'entreprise risque d'être mise en péril par cette obligation de consignation/sûreté (art. 243 et s. C.D.C.). Une consignation/sûreté ne peut être demandée que si le jugement a rejeté la demande introduite par le débiteur. Les sommes réclamées doivent être consignées ou la sûreté constituée dans un délai de deux mois à partir de la notification. c) Constatons également que la loi du 30 juin 2000 a, en quelque sorte, abrogé subrepticement les paragraphes 4 et 5 de l’article 313 L.G.D.A., ce qui n’est pas sans importance. Jugez-en. • article 313, § 4 L.G.D.A. : "le privilège et l’hypothèque légale (dont l’Administration fiscalité dispose toujours en vertu de l’article 313, §§ 1, 2 et 3 ) commencent à courir du jour où la dette a été contractée, et cessent trois années après qu’elle est devenue exigible" • article 313, §5 L.G.D.A. : "le droit d’exécution parée peut être exercé également contre les cautions ou les redevables et cesse, à l’égard des uns et des autres, lorsque trois années se seront écoulées depuis que la dette a été exigible; après ce temps, les receveurs conserveront néanmoins, au nom de l’Administration, l’action personnelle ordinaire, sauf le cas où il aurait été fixé un terme de prescription plus court " Les conséquences concrètes de cette abrogation ne sont pas bien claires. Nous sommes d’avis qu’elle est défavorable au contribuable dans la mesure où l’on pouvait auparavant tirer profit de cette " fourchette " de trois ans. Par ailleurs, nous estimons par ailleurs que le privilège et l’hypothèque légale restent valables, même au terme de l’ancien délai de 3 ans. De même, les cautionnements peuvent être conservés durant plus de trois ans. Les règles de prescription en vigueur en matière civile demeurent évidemment applicables en l’espèce. Le privilège que l’article 313 L.G.D.A. confère à l’Administration est très large; il s’étend, par exemple, " à tous les instruments et ustensiles qui se trouvent dans les fabriques et les usines des redevables, sans distinction à qui en est la propriété". En outre, l’Administration est préférée à tous autres créanciers sur les marchandises qui se trouvent dans les entrepôts au nom de son débiteur. Ce privilège très large a encore été récemment confirmé par un arrêt de la Cour d’appel de Gand. L’Administration dispose également un droit d’exécution parée sur les biens de propriétaires "innocents". L’inscription d’hypothèque légale sera faite par les conservateurs des hypothèques, sans frais et dans le respect des formalités mentionnées à l’article 89 de la loi du 16 décembre 1851. Le privilège et l’hypothèque légale n’auront pas lieu si le redevable garantit sa dette en fournissant un cautionnement en numéraire, en biens immeubles ou en inscriptions sur le "grand-livre". ❷ Citation directe par l’Administration des douanes et accises devant le tribunal fiscal a) Selon nous, les autorités douanières ne sont pas obligées de notifier une contrainte dans la mesure, où il est possible d’envoyer au contribuable une citation à comparaître devant le tribunal fiscal. L’article 1385undecies C.J. pose, en principe, que le contribuable doit avoir épuisé son recours administratif, avant d’introduire une action contre l’Administration. De la lecture des alinéas 2 et 3 du même article 1385undecies C.J., on peut déduire que l’Administration pourrait introduire sa citation au plus tôt 6 mois (éventuellement prolongés de 3 mois) à dater de la réception du recours administratif, si ce recours n’a pas encore fait l’objet d’une décision. En cas de citation directe, il n’y a pas d’obligation de consignation/de sûreté si le contribuable interjette appel de ce jugement et est condamné au paiement de droits ou accises. b) Tant dans le cas d’une citation directe qu’en cas de requête, le contribuable ou son avocat peut expressément demander au juge, par voie de conclusions, d’entendre en ses explications écrites ou orale à l’audience, l’expert-comptable, comptable professionnel ou réviseur d’entreprises choisi par le contribuable. Ce recours est toutefois soumis à l’appréciation du juge qui apprécie l’opportunité de procéder à semblable consultation. Cette “audition" ne peut porter que sur des éléments de fait ou sur des questions relatives à l’application du droit comptable. Seul peut être entendu l’expert-comptable, le comptable professionnel ou le réviseur d’entreprises qui s’occupe habituellement de la comptabilité du contribuable ou qui a contribué à l’élaboration de la déclaration fiscale litigieuse, ou qui est intervenu aux côtés du contribuable dans la procédure de réclamation administrative. c) Le recours en cassation est ouvert aux parties en cause – contribuable comme Etat belge - contre l’arrêt de la cour d’appel. La requête, préalablement signifiée au défendeur, doit être déposée, à peine de déchéance, dans les trois mois à partir de la signification de la décision attaquée faite, à la requête d’une des parties à l’autre partie. La signification s’entend de la copie de l’acte par exploit d’huissier. Le pourvoi en cassation n’est pas suspensif de l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel. ❸ Citation devant le tribunal correctionnel a) Dès l'instant où l'Administration entend percevoir non seulement des droits et des accises, mais également des amendes, elle peut, sans être tenue à des délais autres que les délais de prescription, intenter une action au pénal et assigner les intéressés en correctionnelle. L'Administration des douanes et accises peut porter tous les faits à la connaissance du procureur du Roi, sans avoir besoin, pour ce faire, d'une autorisation du directeur régional compétent. En revanche, les autres administrations fiscales doivent avoir cette autorisation (art. 10 de la loi du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière 15 ACCOUNTANCY & TAX fiscalité fiscale, qui a modifié en ce sens l'article 29, al. 2 du Code d'instruction criminelle). b) Nous estimons que le contribuable peut, dans le cadre d'une procédure criminelle, également demander au juge d'entendre l'expert-comptable, le comptable professionnel ou le réviseur d'entreprises "choisi" par lui, soit par voie de conclusions et de notes écrites, soit verbalement. Bien que cette possibilité ne soit pas explicitement inscrite dans la loi du 23 mars 1999, nous pensons que ne pas l’admettre reviendrait à violer les principes d'égalité consacrés par les articles 10 et 11 de la Constitution. Toute violation de ces principes implique le risque d'un arrêt condamnatoire de la Cour d'arbitrage. Seuls peuvent entrer en ligne de compte des éléments de fait ou des questions relatives à l’application du droit comptable. c) Dans les procédures pénales, il n’est pas question de consignation ou de constitution de sûreté en cas 3. ENTREE EN VIGUEUR A. Le Code des douanes communautaire est en vigueur depuis le 1er janvier 1994. B. La loi du 30 juin 2000 modifiant la loi générale sur les douanes et accises (L.G.D.A.) et instaurant un droit de recours administratif est entrée en vigueur le 12 août 2000, sa date de publication au Moniteur Belge. Les nouveaux articles 211 à 219 L.D.G.A. sont applicables à la perception des droits et des droits d’accises nés à partir de cette même date. Si le litige n’ aucun lien de perception avec ces droits, les nouvelles règles s’appliquent aux décisions prises à compter à partir du même jour. Les nouvelles règles de procédure en cas d'exécution parée (art. 313 et 314 L.G.D.A.) sont, elles aussi, immédiatement applicables aux procédures en cours ou introduites à partir du 12 août 2000. 16 ACCOUNTANCY & TAX d’appel. Au contraire, le fait d’interjeter appel et de se pourvoir en cassation annule la décision prise antérieurement. Les procédures pénales présentent l’avantage de ne jamais condamner le contribuable à l’exécution d’un jugement ou d’un arrêt qui a fait l’objet, respectivement, d’un appel ou d’un pourvoi en cassation. Une transaction annule un jugement ou un arrêt rendu antérieurement en matière pénale et empêche la poursuite du traitement du recours pendant (appel/pourvoi en cassation). Tant le recours en appel que le pourvoi en cassation doivent être introduits dans les 15 jours suivant le prononcé contradictoire. En cas de condamnation par défaut, ce délai ne prend cours qu’au moment de la notification personnelle de la décision par défaut à l’intéressé. L’appel est interjeté au greffe du tribunal correctionnel et le pourvoi en cassation est intenté au greffe de la cour d’appel. C. La loi du 30 juin 2000 a remplacé l'intégralité du Chapitre XXIII de la L.G.D.A. (art. 212 à 219). Ce chapitre XXIII était anciennement intitulé " Litiges concernant la valeur en douane des marchandises". Sa suppression signifie la disparition de la très courte procédure qui était prévue lorsque l'intéressé n'était pas d'accord avec la valeur en douane déterminée par le vérificateur au moment de l'importation. Si l’on peut déduire que le déclarant ou tout autre débiteur de droits de douane ne doit pas payer la dette douanière ou fournir de cautionnement dans l’attente d’une décision sur son recours administratif formel ou informel, ou d’une décision du tribunal, l’abrogation de ce chapitre n’est pas nécessairement défavorable à la personne concernée. Quant à savoir s’il en ira ainsi dans la réalité, rien n’est moins sûr. A ce propos, nous tenons à signaler que l'ancien article 217 L.G.D.A. obligeait le déclarant à fournir un cautionnement s'il contestait en appel le résultat de la vérification. Dès lors que cet article 217 n’existe plus en tant que tel, on pourrait alléguer a contrario (et non sans succès) que cette obligation a disparu, elle aussi.