Le recours administratif et judiciaire en matière de douanes et

Transcription

Le recours administratif et judiciaire en matière de douanes et
fiscalité
Le recours administratif
et le recours judiciaire
en matière de
douanes et accises
Luc GHEYSENS
Avocat au Barreau de Courtrai
Gheysens – Soetaert & Partners - Wevelgem
Professeur FHS, VLEKHO et UIA
La loi du 30 juin 2000 modifiant la loi générale sur les
douanes et accises (L.G.D.A.) et instaurant un droit de
recours administratif (M.B., 12 août 2000) régit le
volet administratif de la procédure en matière de
douanes et accises. Ce faisant, la Belgique exécute une
obligation découlant de l'article 243 du Code des
douanes communautaire (C.D.C.), en vigueur depuis
le 1er janvier 1994 dans les autres Etats membres de
l'Union européenne.
Pour leur part, les aspects juridictionnels de la procédure en matière de douanes et accises (recours devant
le juge) ont été réglementés par la loi du 15 mars
1999 relative au contentieux en matière fiscale, la loi
du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en
matière fiscale et l'arrêté royal d'exécution de l'article
7 de la loi du 23 mars 1999 (M.B., 27 mars 1999).
L’analyse sommaire de ces deux volets de la procédure
contentieuse constitue l’essentiel de cette contribution.
1. PORTÉE
A. L'article 243 C.D.C. confère à toute personne le droit
d'exercer un recours contre des décisions prises par les
autorités douanières qui ont trait à l'application de la réglementation douanière et qui la concernent directement
et individuellement. Ce droit est également reconnu aux
personnes qui ont sollicité une décision auprès des
autorités douanières, sans toutefois l'obtenir dans le délai
prévu à l'article 6, al. 2. Le Code des douanes communautaire oblige chaque Etat membre à désigner une auto-
rité douanière auprès de laquelle ce droit de recours
administratif peut être exercé.
B. La loi du 30 juin 2000 instaurant un droit de recours
administratif désigne le directeur général de l'Administration des douanes et accises de Bruxelles comme
l’autorité compétente pour recevoir et statuer sur ledit
recours administratif. Le directeur général, le fonctionnaire ou le collège de fonctionnaires délégué par lui
statue par décision motivée, qui doit être notifiée au
requérant par lettre recommandée à la poste (nouvel
article 219 L.G.D.A.).
La loi précise également les cas et les délais dans lesquels
le droit de recours administratif pourra être exercé, tant
dans l’hypothèse où une décision a été rendue que dans
le cas où aucune décision n’est rendue à l’expiration d’un
délai déterminé.
C. Comme indiqué dans l'introduction, les recours
judiciaires sont régis par les lois des 15 et 23 mars 1999
et leur arrêtés d’exécution. A l’instar de la situation qui
prévaut pour les autres impôts depuis la récente réforme
de la procédure, le contribuable devra intenter une
action, par requête contradictoire (munie, en cas de
décision de sa copie ) auprès des chambres fiscales des
tribunaux de première instance établis dans chaque cheflieu de province (+ Eupen, pour les cantons rédimés). Il
en va de même pour l’opposition à contrainte, dont on
sait qu’elle était jusqu’à présent signifiée au moyen d’une
citation (art. 313 et 314 L.G.D.A. et 1385undecies C.J.).
Les procédures en langue allemande sont obligatoirement intentées devant le tribunal fiscal d'Eupen.
Précisons encore que si l'Etat (en l’occurrence, l’Adminis-
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fiscalité
tration des douanes et accises du Ministère des Finances)
entend intenter une action en justice, il doit procéder à
une assignation devant le tribunal civil ou devant le
tribunal pénal (correctionnel) si des peines sont en sus
requises. Rien n’empêche également de décerner une
contrainte, laquelle confère un titre exécutoire à l'Administration et devient définitive, dès l'instant où le contribuable n'y a pas fait opposition auprès du tribunal fiscal
dans les trois mois.
2. COMMENTAIRE
a. Le droit de recours - titre VIII - articles 243 à 246
C.D.C.
Un droit de recours administratif auprès du directeur
général de l'Administration belge des douanes et accises
est ouvert à toute personne contre les décisions de la
compétence des douanes et accises et des taxes y assimilées (taxes environnementales, taxes d’ouverture, permis
d’exploitation …..) qui le concerne directement et individuellement ou contre l’absence d’une décision de même
nature (art. 243 et 245 C.D.C).
Comme on le voit, le droit de recours administratif est
ouvert aussi bien à l’égard d’une décision qu’à l’égard
d’une absence de décision.
En vertu de l'article 6 C.D.C, les autorités douanières
compétentes doivent, si elles y sont invitées, prendre une
décision relative à l'application de la réglementation
douanière dans un délai fixé au niveau national. Ce délai
peut être dépassé, lorsqu’il n’est pas possible aux autorités
douanières de le respecter. Dans ce cadre, il convient
toutefois d’en informer le requérant avant l'expiration du
délai, en indiquant les motifs qui justifient le dépassement ainsi que le nouveau délai jugé nécessaire pour
statuer sur la requête. La durée de ce nouveau délai peut
donc être déterminée par les autorités douanières.
Dans une première phase (réclamation), ce droit de
recours est exercé devant l'autorité douanière nationale
(en Belgique : le directeur général des douanes et
accises). Dans une seconde phase, il l’est devant une
autorité judiciaire ou un organe spécialisé équivalent
(art. 243 C.D.C).
L’introduction d’un recours n’est pas suspensive de
l'exécution de la décision contestée, mais les autorités
douanières peuvent surseoir (en tout ou en partie) à son
exécution lorsqu’il existe des raisons fondées de douter
de la conformité de la décision contestée à la réglementation douanière ou qu’un dommage irréparable est à
craindre pour l’intéressé (art. 244 C.D.C).
Lorsque la décision contestée a pour effet l’application
de droits à l’importation ou de droits à l’exportation, il
faut en principe constituer une garantie, mais les autorités
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douanières peuvent également y renoncer si la constitution d’une telle garantie est de nature, en raison de la
situation du débiteur, à susciter de graves difficultés
économiques ou sociales. Concrètement, cela signifie
que les autorités douanières et/ou le débiteur des droits
d’accises disposent du droit d’agir de la sorte.
L’article 246 C.D.C. indique que le droit de recours ne
peut être exercé contre des décisions par les autorités
douanières sur la base du droit pénal.
L’action devant les tribunaux de première instance se fait
par requête contradictoire, établie en autant d’exemplaires qu’il y a de parties en cause auxquels il est toutefois conseillé d’ajouter un exemplaire supplémentaire
pour le greffe. A chaque requête doit être jointe, sous
peine de nullité, une copie de la décision contestée ou
une copie du recours administratif, en l’absence de
décision du directeur.
Nous reviendrons ultérieurement sur la possibilité
d’audition de l’expert-comptable, du comptable professionnel ou de réviseur d’entreprises (voyez c. Action en
justice, B,4 4 ❷ Citation directe par l’Administration).
Suite à l’ajout d’un nouveau paragraphe 32 à l’article
576, al. 1er du Code judiciaire, une possibilité de recours
existe également pour les procédures d’un montant inférieur à 75.000 BEF.
b. Recours administratif organisé par la loi du
30 juin 2000 (M.B., 12 août 2000)
D’évidence, il convient de noter qu’il s’agit ici d’un
recours administratif préalable imposé " par ou en vertu
de la loi" au sens de l’article 1385undecies du Code judiciaire, tel que modifié par la loi du 23 mars 1999 relative
à l'organisation judiciaire en matière fiscale. En d’autres
mots, le contribuable ne peut donc s’adresser au juge
fiscal qu’après avoir épuisé son droit de recours
administratif.
Sous peine de nullité, l’action devant les tribunaux
fiscaux doit être exercée dans un délai de trois mois à
compter de la date d’expédition de la décision contestée
ou six mois à compter de la date de réception du recours
en cas d’absence de décision. Le délai de six mois peut
encore être prolongé de trois mois lorsque l'imposition
contestée a été établie d'office par l'Administration.
Le droit de recours administratif ne peut être exercé que
contre les décisions du directeur régional des douanes et
accises ou d'un fonctionnaire de grade équivalent
(art. 212 L.G.D.A.). Les fonctionnaires visés ont été précisés par l’arrêté ministériel du 14 octobre 2.000
(M.B. 20 octobre 2 000). Il s’agit de ceux qui ont le grade
d’auditeur général des finances ou de directeur chargé de
la gestion d’un service. Par suite, les décisions d’autres
agents de l’Administration des douanes et accises
fiscalité
devront, préalablement à l'exercice du droit de recours
administratif, être soumises au directeur régional des
douanes et accises, qui prendra une décision contre laquelle le recours administratif pourra ensuite être exercé.
Les transactions ne peuvent jamais faire l'objet d'un recours administratif. Il en va de même en matière pénale,
même si, dans la pratique, rien n'empêche les autorités
douanières de prendre une décision sur la partie "civile"
du litige en recours.
Sous peine de déchéance, la requête motivée doit être
adressée au directeur général de l'Administration des
douanes et accises, par lettre recommandée à la poste,
dans un délai de trois mois à compter de la date d'expédition de la décision contestée ou à compter de l'expiration du délai légal dont l'Administration dispose pour
prendre une décision ou, si aucun délai légal n'a été déterminé, dans les deux mois à dater du jour qui suit celui
de la remise à la poste de la lettre recommandée mettant
l'Administration en demeure de prendre une décision.
L'article 215 (nouveau) L.G.D.A., qui s'inscrit dans le
chapitre XXIII (droit de recours administratif) oblige le
directeur général à délivrer un accusé de réception mentionnant la date de réception du recours. Cette date a son
importance, car elle détermine le délai dans lequel
l'action en justice doit ensuite être intentée.
La formalisation du recours administratif par la loi du
30 juin 2000 n'a pas supprimé le recours administratif
généralement exercé de manière informelle dans toutes
les matières fiscales pour lesquelles l’Administration des
Douanes et Accises est compétente.
En cas de litige avec des agents vérificateurs concernant le
tarif applicable en matière de valeur en autorités douanières, etc., il est toujours possible de saisir le directeur
régional ou directement l'Administration centrale. Le
délai de recours administratif formel ne commence à
courir qu'au moment où le directeur régional prend une
décision.
Nous estimons que même si l’Administration centrale
prend une décision (fût-ce par un agent ayant le grade de
directeur), cette décision ne peut faire l’objet d’une
recours formel (réclamation) que si elle est actée,
modifiée ou non, par un directeur régional.
La Belgique compte un directeur régional à Gand
(Flandre orientale et occidentale), à Anvers pour une
partie de la province d'Anvers, à Hasselt (province du
Limbourg et l'arrondissement de Turnhout), à Bruxelles
(Brabant), à Mons (Hainaut), et à Namur et Liège pour
les provinces de Liège et du Luxembourg.
c. Action en justice
Si le requérant en fait la demande dans sa requête, il sera
entendu et sera, à cet effet, invité à se présenter dans un
délai de 30 jours (art. 217 L.G.D.A.).
Tant qu’une décision n’est pas intervenue, le requérant
peut compléter sa requête par des griefs nouveaux,
libellés par écrit.
En vertu et dans les limites de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration (M.B. 30.6.1994),
le requérant peut également consulter le dossier en litige.
Le directeur général, le fonctionnaire ou le fonctionnaire
délégué par lui statue par décision motivée. Le défaut de
motivation viole la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation des actes administratifs et la décision sera ensuite
annulée par le tribunal. De même, le requérant qui n'est
pas entendu alors qu'il en avait fait la demande, pourra,
avec de grandes chances de succès, invoquer la nullité de
la décision devant le tribunal.
S’il ne statue pas dans un délai raisonnable, le directeur
général viole également les principes de bonne administration dont l’applicabilité en matière fiscale a été inconditionnellement reconnue par l'arrêt de cassation du 27
mars 1992.* Ne perdons également pas de vue qu’en
l’absence de décision sur le recours administratif après
six mois (neuf mois, en cas de taxation d’office), le
contribuable peut porter la contestation devant le tribunal de première instance, sans plus attendre la décision
du directeur.
Conformément à la loi du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale (M.B., 27 mars
1999), tous les litiges relatifs à toutes les matières fiscales
pour lesquelles l’Administration des douanes et accises
est compétente relèvent de la compétence du tribunal de
première instance établi dans le chef-lieu de chaque
province : Bruges, Gand, Anvers, Hasselt, Liège, Arlon,
Namur, Nivelles, Louvain, Bruxelles (pour la Région de
Bruxelles-Capitale) et Eupen (pour les procédures en
langue allemande).
Un jugement rendu par le tribunal de première instance
en matière fiscale est toujours susceptible d’être frappé
d'appel.
Le tribunal fiscal compétent est celui de la "province" où
est situé le bureau où la perception a été ou doit être faite
ou, si la contestation n'a aucun lien avec la perception
d'un impôt, celui de la province où est établi le service
d'imposition qui a pris la disposition contestée.
* L’applicabilité des principes de bonne administration en matière fiscale
vient encore d’être explicitement confirmée par une récente circulaire du Ministère des Finances (Circulaire Ci.RH. 863/530.827 du 18 septembre
2000). En substance, il en ressort que la décision du directeur ne doit pas
être seulement motivée en fait et en droit, mais la motivation doit en sus être
suffisamment adéquate et conforme aux dispositions de la loi du 29 juillet
1991 sur la motivation des actes administratifs.
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& TAX
fiscalité
A. Si la requête émane du contribuable, les hypothèses
suivantes sont envisageables :
• En cas d’absence de décision, il y a lieu de joindre, à
peine de nullité, une copie du recours administratif et
de l'accusé de réception de ce recours. Le contribuable
ne peut toutefois introduire sa demande qu'à partir
du premier jour du sixième mois suivant la date de
réception du recours administratif (neuf mois, si
l'imposition contestée a été établie d'office);
• Si une décision a été prise , le délai de recours est de
trois mois à compter de la date d’expédition de la décision contestée. Si une copie de la décision contestée
➊ L'Administration a toujours la possibilité de
décerner une contrainte, si elle opte pour l'exécution
parée (art. 314 L.G.D.A., tel que modifié en ses
paragraphes 3 et 4 par la loi du 30 juin 2000).
a) L'exécution parée est exercée par contrainte décernée par le receveur et déclarée exécutoire par le directeur régional du domicile du débiteur ou de sa caution
et doit être notifiée au contribuable par l'Administration. Une fois la contrainte notifiée (par lettre recommandée ou par exploit d'huissier), l'exécution parée ne
pourra être suspendue que par une action en justice
(art. 314, § 3 modifié L.G.D.A.).
L'ancien texte stipulait ce qui suit :
"Après la notification de la contrainte, l’exécution parée ne
pourra être suspendue que par l’opposition de la partie,
signifiée au receveur poursuivant. L’opposition doit être
motivée et contenir en même temps citation au receveur à
comparaître dans les dix jours à dater de l’opposition devant
le juge, conformément aux règles prévues par le Code
judiciaire en matière de compétence et de procédure."
En vertu de la nouvelle réglementation, le contribuable doit, selon nous, introduire son action en
justice par requête à déposer au greffe du tribunal
fiscal dans un délai de trois mois à compter de la date
de notification, en y joignant une copie de la contrainte
(à peine de nullité).
Nous conseillons toutefois au contribuable de déposer
la requête dès l'instant où une contrainte lui est signifiée, si possible dans l'(ancien) délai de 10 jours. Tout
recours contre le jugement du tribunal fiscal statuant
sur l’opposition à une contrainte doit être introduit
dans un délai d’un mois à partir de la notification du
jugement rendu sur opposition.
b) Jusqu'au 12 août 2000, le contribuable était obligé de
consigner préalablement la somme qu'il était condamné
à payer. L'ancien paragraphe 4 de l'article 314 L.G.D.A.
stipulait, en effet, qu’un "recours contre le jugement
statuant sur l’opposition ne sera reçu que moyennant consignation préalable du montant des condamnations."
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& TAX
n’est pas jointe à chaque exemplaire de la requête, il y
a matière à nullité d’après le texte légal. Nous renvoyons à cet égard aux nouveaux articles 632 et
1385decies et undecies du Code judiciaire.
B.Quant à l’administration, elle dispose de trois possibilités d’action en justice :
• soit décerner une contrainte 4 4 ➊
• soit assigner directement devant le tribunal civil
(fiscal)4 4 ❷
• soit assigner devant le tribunal correctionnel 4 4 ❸
Cette obligation se voit à présent assouplie : le receveur
est libre de notifier une demande de consignation en tout
ou en partie des sommes dues. S'il le fait, il peut tenir
compte des données concrètes du dossier, en ce compris
la situation financière du débiteur et la demande de
consignation peut être soumise à l’appréciation du
tribunal. Le débiteur peut être autorisé à remplacer cette
consignation par une sûreté réelle ou personnelle agréée
par l'Administration des Douanes et Accises. Nous
pensons cependant que l'Administration ne peut refuser
arbitrairement la sûreté proposée.
Les sommes réclamées doivent être consignées ou la sûreté constituée, dans les deux mois de la notification. A
défaut de consignation des sommes ou de constitution de
la sûreté dans le délai imparti, la juridiction saisie du recours doit, dans les trois mois à compter de l'expiration
de ce délai, déclarer le recours irrecevable, à moins que,
sur requête motivée du débiteur dans les deux mois de la
notification, elle ne conclue, dans la même période de
trois mois, que la demande formée par le fonctionnaire
chargé du recouvrement n’est pas fondée. Reste à savoir
quand commence à courir le délai de trois mois précité et
quelle est la sanction applicable si aucun arrêt n'est rendu
dans les trois mois. Il est toutefois certain qu'une
demande de dispense de l’obligation de consignation/
sûreté devra être motivée par des justificatifs financiers
et/ou par des éléments attestant que l'entreprise risque
d'être mise en péril par cette obligation de
consignation/sûreté (art. 243 et s. C.D.C.).
Une consignation/sûreté ne peut être demandée que si le
jugement a rejeté la demande introduite par le débiteur.
Les sommes réclamées doivent être consignées ou la sûreté constituée dans un délai de deux mois à partir de la
notification.
c) Constatons également que la loi du 30 juin 2000 a,
en quelque sorte, abrogé subrepticement les paragraphes 4 et 5 de l’article 313 L.G.D.A., ce qui n’est pas
sans importance. Jugez-en.
• article 313, § 4 L.G.D.A. :
"le privilège et l’hypothèque légale (dont l’Administration
fiscalité
dispose toujours en vertu de l’article 313, §§ 1, 2 et 3 )
commencent à courir du jour où la dette a été contractée, et
cessent trois années après qu’elle est devenue exigible"
• article 313, §5 L.G.D.A. :
"le droit d’exécution parée peut être exercé également
contre les cautions ou les redevables et cesse, à l’égard des
uns et des autres, lorsque trois années se seront écoulées depuis que la dette a été exigible; après ce temps, les receveurs
conserveront néanmoins, au nom de l’Administration, l’action personnelle ordinaire, sauf le cas où il aurait été fixé
un terme de prescription plus court "
Les conséquences concrètes de cette abrogation ne
sont pas bien claires. Nous sommes d’avis qu’elle est
défavorable au contribuable dans la mesure où l’on
pouvait auparavant tirer profit de cette " fourchette "
de trois ans. Par ailleurs, nous estimons par ailleurs
que le privilège et l’hypothèque légale restent valables,
même au terme de l’ancien délai de 3 ans. De même,
les cautionnements peuvent être conservés durant plus
de trois ans. Les règles de prescription en vigueur en
matière civile demeurent évidemment applicables en
l’espèce.
Le privilège que l’article 313 L.G.D.A. confère à l’Administration est très large; il s’étend, par exemple, " à
tous les instruments et ustensiles qui se trouvent dans
les fabriques et les usines des redevables, sans distinction à qui en est la propriété". En outre, l’Administration est préférée à tous autres créanciers sur les marchandises qui se trouvent dans les entrepôts au nom
de son débiteur. Ce privilège très large a encore été
récemment confirmé par un arrêt de la Cour d’appel
de Gand.
L’Administration dispose également un droit d’exécution parée sur les biens de propriétaires "innocents".
L’inscription d’hypothèque légale sera faite par les
conservateurs des hypothèques, sans frais et dans le
respect des formalités mentionnées à l’article 89 de la
loi du 16 décembre 1851.
Le privilège et l’hypothèque légale n’auront pas lieu si
le redevable garantit sa dette en fournissant un cautionnement en numéraire, en biens immeubles ou en
inscriptions sur le "grand-livre".
❷ Citation directe par l’Administration des douanes et
accises devant le tribunal fiscal
a) Selon nous, les autorités douanières ne sont pas
obligées de notifier une contrainte dans la mesure, où
il est possible d’envoyer au contribuable une citation à
comparaître devant le tribunal fiscal.
L’article 1385undecies C.J. pose, en principe, que le
contribuable doit avoir épuisé son recours administratif, avant d’introduire une action contre l’Administration. De la lecture des alinéas 2 et 3 du même article
1385undecies C.J., on peut déduire que l’Administration pourrait introduire sa citation au plus tôt 6 mois
(éventuellement prolongés de 3 mois) à dater de la
réception du recours administratif, si ce recours n’a pas
encore fait l’objet d’une décision.
En cas de citation directe, il n’y a pas d’obligation de
consignation/de sûreté si le contribuable interjette
appel de ce jugement et est condamné au paiement de
droits ou accises.
b) Tant dans le cas d’une citation directe qu’en cas de
requête, le contribuable ou son avocat peut expressément demander au juge, par voie de conclusions, d’entendre en ses explications écrites ou orale à l’audience,
l’expert-comptable, comptable professionnel ou réviseur d’entreprises choisi par le contribuable. Ce recours
est toutefois soumis à l’appréciation du juge qui apprécie l’opportunité de procéder à semblable consultation.
Cette “audition" ne peut porter que sur des éléments
de fait ou sur des questions relatives à l’application du
droit comptable. Seul peut être entendu l’expert-comptable, le comptable professionnel ou le réviseur d’entreprises qui s’occupe habituellement de la comptabilité
du contribuable ou qui a contribué à l’élaboration de
la déclaration fiscale litigieuse, ou qui est intervenu
aux côtés du contribuable dans la procédure de
réclamation administrative.
c) Le recours en cassation est ouvert aux parties en cause
– contribuable comme Etat belge - contre l’arrêt de la
cour d’appel. La requête, préalablement signifiée au
défendeur, doit être déposée, à peine de déchéance,
dans les trois mois à partir de la signification de la
décision attaquée faite, à la requête d’une des parties à
l’autre partie. La signification s’entend de la copie de
l’acte par exploit d’huissier. Le pourvoi en cassation
n’est pas suspensif de l’exécution de l’arrêt de la cour
d’appel.
❸ Citation devant le tribunal correctionnel
a) Dès l'instant où l'Administration entend percevoir
non seulement des droits et des accises, mais également des amendes, elle peut, sans être tenue à des
délais autres que les délais de prescription, intenter
une action au pénal et assigner les intéressés en
correctionnelle.
L'Administration des douanes et accises peut porter
tous les faits à la connaissance du procureur du Roi,
sans avoir besoin, pour ce faire, d'une autorisation du
directeur régional compétent.
En revanche, les autres administrations fiscales doivent
avoir cette autorisation (art. 10 de la loi du 23 mars
1999 relative à l'organisation judiciaire en matière
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& TAX
fiscalité
fiscale, qui a modifié en ce sens l'article 29, al. 2 du
Code d'instruction criminelle).
b) Nous estimons que le contribuable peut, dans le
cadre d'une procédure criminelle, également demander au juge d'entendre l'expert-comptable, le comptable professionnel ou le réviseur d'entreprises "choisi"
par lui, soit par voie de conclusions et de notes écrites,
soit verbalement. Bien que cette possibilité ne soit pas
explicitement inscrite dans la loi du 23 mars 1999,
nous pensons que ne pas l’admettre reviendrait à
violer les principes d'égalité consacrés par les articles
10 et 11 de la Constitution. Toute violation de ces
principes implique le risque d'un arrêt condamnatoire
de la Cour d'arbitrage.
Seuls peuvent entrer en ligne de compte des éléments
de fait ou des questions relatives à l’application du
droit comptable.
c) Dans les procédures pénales, il n’est pas question de
consignation ou de constitution de sûreté en cas
3.
ENTREE EN VIGUEUR
A. Le Code des douanes communautaire est en vigueur
depuis le 1er janvier 1994.
B. La loi du 30 juin 2000 modifiant la loi générale sur
les douanes et accises (L.G.D.A.) et instaurant un droit
de recours administratif est entrée en vigueur le 12 août
2000, sa date de publication au Moniteur Belge. Les nouveaux articles 211 à 219 L.D.G.A. sont applicables à la
perception des droits et des droits d’accises nés à partir
de cette même date. Si le litige n’ aucun lien de perception avec ces droits, les nouvelles règles s’appliquent aux
décisions prises à compter à partir du même jour. Les
nouvelles règles de procédure en cas d'exécution parée
(art. 313 et 314 L.G.D.A.) sont, elles aussi, immédiatement applicables aux procédures en cours ou introduites
à partir du 12 août 2000.
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& TAX
d’appel. Au contraire, le fait d’interjeter appel et de se
pourvoir en cassation annule la décision prise antérieurement. Les procédures pénales présentent l’avantage de ne jamais condamner le contribuable à l’exécution d’un jugement ou d’un arrêt qui a fait l’objet,
respectivement, d’un appel ou d’un pourvoi en
cassation.
Une transaction annule un jugement ou un arrêt rendu
antérieurement en matière pénale et empêche la poursuite du traitement du recours pendant (appel/pourvoi
en cassation).
Tant le recours en appel que le pourvoi en cassation
doivent être introduits dans les 15 jours suivant le
prononcé contradictoire.
En cas de condamnation par défaut, ce délai ne prend
cours qu’au moment de la notification personnelle de
la décision par défaut à l’intéressé.
L’appel est interjeté au greffe du tribunal correctionnel
et le pourvoi en cassation est intenté au greffe de la
cour d’appel.
C. La loi du 30 juin 2000 a remplacé l'intégralité du
Chapitre XXIII de la L.G.D.A. (art. 212 à 219).
Ce chapitre XXIII était anciennement intitulé " Litiges
concernant la valeur en douane des marchandises". Sa
suppression signifie la disparition de la très courte procédure qui était prévue lorsque l'intéressé n'était pas d'accord avec la valeur en douane déterminée par le vérificateur au moment de l'importation.
Si l’on peut déduire que le déclarant ou tout autre débiteur de droits de douane ne doit pas payer la dette douanière ou fournir de cautionnement dans l’attente d’une
décision sur son recours administratif formel ou informel, ou d’une décision du tribunal, l’abrogation de ce
chapitre n’est pas nécessairement défavorable à la personne concernée.
Quant à savoir s’il en ira ainsi dans la réalité, rien n’est
moins sûr. A ce propos, nous tenons à signaler que l'ancien article 217 L.G.D.A. obligeait le déclarant à fournir
un cautionnement s'il contestait en appel le résultat de la
vérification. Dès lors que cet article 217 n’existe plus en
tant que tel, on pourrait alléguer a contrario (et non sans
succès) que cette obligation a disparu, elle aussi.