la publicite et les femmes
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la publicite et les femmes
I) LA FEMME DANS LA PUBLICITE A) La femme, une stratégie publicitaire L’image de la femme est exploitée par les publicitaires pour deux raisons principales : son pouvoir d’achat et son pouvoir de séduction. 1. Le phénomène d’identification L’une des stratégies publicitaires peut être l’identification de la femme qui se plaît à se reconnaître dans ses habitudes consuméristes. L’image qui en est donnée n’est pas nécessairement le reflet d’une réalité mais plutôt l’expression des aspirations de chaque public. C’est pourquoi des mannequins sont le plus souvent utilisés dans les publicités, ils incarnent le vouloir être de la femme. La femme dispose d’un pouvoir d’achat considérable. Au-delà des produits de beauté, qui s’adressent à une clientèle avant tout féminine, la plupart des produits de consommation courante sont encore aujourd’hui achetés par les femmes. 2. La femme objet de séduction et de désir Les publicitaires utilisent le corps de la femme pour sa valeur esthétique. La publicité se conçoit dans une démarche de séduction, le charme de la femme devient alors un argument de vente. Si cette utilisation est justifiée pour la promotion de certains produits tels que les produits de beauté, les parfums, le prêt-à-porter… on peut cependant parfois regretter une utilisation gratuite et simpliste du sexe. Se pose ici la question de l’inadéquation entre l’image et le produit vanté, qui caractérise bon nombre de publicités usant entre autres de l’image de la femme-objet. Par exemple, une publicité pour le café Lavazza illustre son slogan, " Express yourself " via une femme singulièrement dénudée. Y a-t-il un rapport entre la nudité et une marque de café ? On trébuche dans ce dernier cas sur un principe certainement peu profitable à la publicité. De même la plupart des publicités réalisées à l’attention des concessionnaires automobiles, utilisent l’image de la femme sans qu’il n’y ait le moindre lien entre le produit et la femme. Cette dernière devient alors un objet de désir, qui n’a pour seul but que d’attirer l’attention des hommes. A l’extrême, la femme peut se trouver assimilée à l’objet de consommation présenté. 4 3. L’impact publicitaire : le shockvertising Etant donné le nombre de messages publicitaires, la publicité se doit de se démarquer. Les réponses semblent se trouver dans la provocation, qui garantit cet indispensable impact : la publicité doit faire preuve d’audace. Le shockvertising, s’inscrit dans cette optique, se nourrit des tabous de la société que sont la violence, le sexe, la drogue, etc. Si l’on a tenu à s’attarder sur cette stratégie c’est d’une part parce que la femme incarne ces tabous, d’autre part parce que son corps y est exploité de manière parfois dénigrante. Dans une thèse de doctorat de l’Université de Lausanne, Raphaël Arn définit le shockvertising en ces termes : " Doit être considérée comme choquante toute publicité, quel qu’en soit le support, qui présente des thèmes sans relation objective avec le produit ou l’entreprise et susceptibles d’entraîner de violentes réactions auprès des consommateurs dans le but d’accroître la notoriété de l’entreprise ". Trois éléments distinguent la publicité choquante des autres publicités, à savoir le thème utilisé (exploitation de sujets sensibles), le but (accroître la notoriété) et enfin l’absence de liens objectifs entre la publicité et le produit ou l’entreprise. L’un des premières publicités utilisant cette stratégie fut pour les glaces Extrême de Gervais. Le spot mettait en scène un combat fratricide entre deux jeunes femmes, dont l’une est clairement égoïste et sadique, alors que la seconde, apparemment en manque, est prête à tout (supplications, menace à la tronçonneuse, etc.) pour obtenir ne serait-ce qu’une miette du cornet… Un des exemples les plus révélateur souligné par le magazine d'information des professionnels de la communication est la publicité E. Leclerc pour une " grille de référence " des indices de crèmes solaires. La lecture de cette publicité est pour le moins équivoque. B) les évolutions de l’image de la femme. L’histoire a créé une sorte de distribution symbolique des rôles, une répartition sexuelle ou la femme est restée longtemps considérée comme une auxiliaire de son mari ou son père, réduite à un rôle secondarisé. Pour preuve, on peut noter quelques citations révélatrices : Montaigne : « la plus utile et honorable science et occupation à une femme est la science du ménage » Proudhon : « L’homme et la femme peuvent être équivalents devant l’Absolu : ils ne sont point égaux, ils ne peuvent pas l’être ni dans la famille, ni dans la cité ». Jusqu’en 1960, le Petit Larousse définissait ainsi : • Homme : « personnage de sexe masculin et énumérait les qualités de « l’homme de bien, du gentilhomme, de l’homme de lettre … ». • Femme : compagne de l’homme, épouse, assortie, entre autre de « femme de chambre, femme de ménage, femme de petite vertu, bonne femme ». Il faudra en effet attendre le milieu du 20ème siècle pour que la femme soit reconnue 5 comme un citoyen responsable dans la communauté et obtienne le droit de vote. Depuis, la libéralisation de la femme s’est progressivement affirmée dans la société. La publicité reflète cette évolution. Schématiquement, quatre modèles se sont succédés jusqu’aux années 2000. 1. 1960 : La ménagère C’est l’époque où, dans l’après guerre, tout nouveau produit est encore magique et accueilli avec émerveillement. Dans les imaginaires, la femme est assimilée au modèle de la fée du logis. La publicité qui vante l’arrivée sur le marché des produits d’entretien met en scène une ménagère dont la fierté se mesure à la propreté de son intérieur. Les problèmes relatifs à l’image des femmes dans la publicité restent marginaux. Aux contraires, elles se sentent plutôt valorisé par tous les moyens mis à disposition par la publicité et dans leur grande majorité les femmes n’y voient pas de mal. La publicité reste alors le reflet d’une époque où la femme continue d’être maintenue dans un rôle secondaire. En faisant appel à une image de la femme stéréotypée et impersonnelle, le premier gros problème de la publicité apparaît. Est-ce dégradant de faire référence à une figure type? Un objet sans caractéristique personnel comme la ménagère au foyer, l’homme fan de foot ou encore le français avec un béret? Le fait de faire rentrer des personnes humaines dans le moule d’un stéréotype est tout d’abord plus simplificateur qu’humiliant mais peut être blessant quand la majorité des personne concerné trouve cela rabaissant ou encore en désaccord total avec leur volonté d’être autre chose. 2. 1970 : La militante Dans les années soixante-dix, la femme investit le monde du travail. Elle sort du foyer pour explorer et faire sa place dans l’espace public, professionnel et politique. Ce modèle va se heurter avec celui de la femme ménagère auparavant assumée. Les femmes, se battent pour leurs droits et notamment celui de disposer librement de leur corps. Elles aspirent à quitter le foyer. Avec la publicité la consommation devient une arme de libération. DIM invente le collant et resitue les filles DIM dans la réalité et la vie de tous les jours, avec le slogan « en DIM vous, êtes libre vous êtes belle ». 6 http://www.wat.tv/video/474383/1974-1975-pub-dim.html Cependant le mérite de la femme au foyer persiste dans l’inconscient collectif, tandis que l’autre modèle de la femme indépendante tente timidement de se développer. Cette confrontation va déterminer le début du travail du BVP (bureau de vérification de la publicité). On le verra plus tard, mais d’une manière générale, le BVP préconise en premier lieu une l’autodiscipline résonnée plutôt qu’une réglementation contraignante. Il recommande d’éviter l’usage abusif de l’image de la femme pour des produits vendus indifféremment aux hommes et aux femmes. De plus la femme ne doit plus servir d’objet publicitaire sans rapport avec l’utilisation du produit. Régulièrement pourtant, ce problème resurgit avec l’emploi de femmes dénudées sans aucune justification (voiture, yaourt,…). Ce problème a pris de l’ampleur avec l’accès des femmes aux études supérieurs, aux travails salarié et aux postes à responsabilités. Le fossé s’est donc creusé entre l’image que la publicité renvoi (docile, soumise,…) et la perception qu’elles pouvaient avoir d’elles-mêmes. 3. 1980 : La Superwoman Les femmes ont lutté pour leurs droits et les ont acquis. Les femmes veulent prouver leurs compétences dans les carrières professionnelles et leur modèle devient celui de la superwoman décidée à être sur tous les fronts et parfaite sur chacun d’eux. Les années 86-87 marquent un nouveau tournant grâce à trois campagnes très symboliques. - Rodier d'abord, grande campagne de l'agence BDDP dont la directrice associée et directrice de la création est Marie-Catherine Dupuy. "Elles assurent en Rodier" : une Vie Active mais avec l'humour en plus. Une caricature, certes, mais qui a permis de faire évoluer les mentalités", note Marna Benitah, directrice commerciale de TBWA. La femme Rodier, c'est la nouvelle féministe. Elle n'est pas anti-mec mais elle est infidèle, allumeuse et cultivée, Elle est pleine de santé, c'est une star nouvelle vague. Ce nouveau style de féminité se combine avec la réhabilitation des rôles de mère, femme au foyer et simplement femme. On peut être sans complexe femme et cuisinière, mère, amante et bosseuse. - Les superwoman affichent leur volonté de tout pouvoir faire : Lessieur en fera sa devise « Je veux tout ». Avec cette seconde grande campagne, Lesieur est entré dans le langage courant, signe que cette communication correspond à une vérité sociologique. Véritable profession de foi des années 86-90, "Elles veulent tout" symbolise cette prise de conscience (masculine) d'une force invincible. - Prise de conscience identique dans le "C'est elle qui commande" de la campagne des Trois Suisses, lancée en 1987. Cette campagne met en scène des femmes d'aujourd'hui avec leurs contraintes, leurs exigences et leurs caprices. "Puisque son patron joue au patron, elle fait son shopping au bureau. C'est elle qui commande". Les années quatre-vingt vont voir arriver une deuxième vague féministe des Etats-Unis. On passe d’un féminisme libertaire à un féminisme radical. La sexualité, qui était un moyen d’émancipation devient le facteur de domination des hommes qu’il faut réduire. En même temps, elles doivent prouver leur égalité face aux hommes si ce n’est agir comme un homme, ce qui 7 abolirait leur sexualité. Le paradoxe est là, comment s’assumer comme une femme tout en rejetant ce qui la distingue. Ces contradictions des féministes Américaines sont peu suivies en France. Les françaises ne veulent pas aller aussi loin. Pendant ces années, la publicité va reproduire ces contradictions dans l’image que les femmes veulent d’elles-mêmes. 4. Les contradictions du féminisme dans les années 90. Contrairement au mouvement féministe américain très séparatiste qui se veut de revenir aux spécificités de chaque sexe, la France, elle adopte un féminisme particulier qui tient à préserver des relations harmonieuses entre les deux sexes. La femme, loin de se donner une « image de superwoman » préfère se considérer sur un pied d’égalité avec l’homme et penser que celui-ci est capable aussi de « féminiser » son rôle. La publicité, dans ces années là, cherche donc paradoxalement l’image d’une femme saine, normale et cette recherche entraîne un retour aux valeurs morales des années 50 et 60. Ces valeurs, une fois adaptées à leur nouveau contexte, donnent des publicités comme celle publiée dans Vanity Fair, où Demi Moore pose nue, enceinte de plusieurs mois. Cette couverture fera polémique mais cette image sera vite banalisée. Après avoir été vécue comme une servitude, la maternité retrouve son statut ancestral de premier objet de fierté de la femme. Celles-ci jouent désormais de leur image et des stéréotypes qui leur sont attribués, elles s’en détachent et les détournent. ; par exemple, dans une publicité pour la Mégane Scénic, on voit une femme choisir sa voiture comme elle choisirait son vernis à ongles. C’est donc le retour, sous des dehors inoffensifs, à des publicités subtilement sexistes. La femme retrouve le rôle qu’elle a tenue des siècles durant : celui de l’être beau, faible et léger qui les responsabilités de la maternité et de l’éducation des enfants. Cette démarche semble flatter l’image de la femme et ce, bien entendu, dans une logique très pertinente, puisque la femme est au centre de l’organisation et de la consommation des foyers. 8 On assiste aussi à cette période, une sorte de rééquilibrage entre la femme et l’homme, qui semble accepter sa part de féminité, on le voit par exemple dans la pub pour Paic faire la vaisselle entre amis. En 1994, on les voit aussi s’enrouler dans une couette ou se suspendre à la porte du garage pour emprunter la voiture de leur femme, dans une pub pour la Peugeot 106, dont le slogan est : « Pour la première fois, les hommes vont être fous de la voiture de leur femme ». Sous couvert de l’humour et du second degré, cependant, la publicité rallume des concepts ouvertement sexistes, voire brutaux, la femme est montrée comme un objet séducteur et tentateur. On est loin de sa « multidimensionnalité » affirmée au début des années 90. Parmi ces publicités, en voici quelques unes particulièrement choquantes, relevées par Jean Pierre Teyssier, dans son ouvrage « Frapper sans heurter : quelle éthique pour la publicité » : « Il a l’argent, il a le pouvoir, il a la voiture, il aura la femme… » Audi, « Elle sait faire la quiche, elle fait du 90 C… » Citroën. Sans parler des campagnes Bourjois de 1999, où, dans « le petit manuel de magie à l’usage des filles qui veulent être encore plus jolies », on voit une jeune fille s’exclamer : « Je crois que je vais lire un livre cette année ». A ce sujet, ci dessous, voici un article de Gérard Biard, paru dans Charly Hebdo le 25.08.1999. Esprit féminin Il ne faut pas confondre presse féminine et presse féministe. C'est idiot, mais les deux genres sont généralement incompatibles. Preuve, cette pub pour la ligne de beauté Bourgeois, parue dans Elle. Nous avons un opuscule, intitulé ’Petit manuel de magie à l'usage des filles qui veulent être encore plus jolies’, à l'intérieur duquel on trouve des recettes pour, par exemple, ’transformer la femme en geisha, petite fleur sauvage et fragile à la fois’. A côté de ce manuel indispensable à toute femme désireuse de satisfaire les plus crétins des fantasmes machos, un petit dessin, où l'on voit une midinette s'exclamer : ’Finalement, je crois que je vais lire un livre cette année’... Difficile de dire plus ouvertement que la femme est une conne illettrée. L'agence qui a signé cette pub est restée courageusement anonyme. Mais d'après l'annuaire CB News 1999, c'est Young & Rubicam France qui a le budget Bourgeois. Au cas où certaines lectrices auraient envie d'aller s'expliquer avec les créatifs qui ont pondu cette ânerie. Histoire de leur démontrer que les ’petites fleurs sauvages’ ont aussi de la conversation. En même temps que se manifestaient ces dérives, les Françaises, elles, se rendaient moins sensibles à ce supposé humour des publicitaires, mais plus exigeantes quant aux discriminations sexuelles dans leur vie quotidienne. Les françaises, dans les années 90, mais aussi encore aujourd’hui, sont dans une position d’infériorité, vis-à-vis des hommes, qua ce soit dans les tâches ménagères, leurs carrières professionnelles ou leur rémunération. La crise économique, avec le chômage, a mis en exergue ces inégalités. Se sentant inférieure, la femme devient une victime dans la société, or « toute souffrance appelle dénonciation et réparation » (Elisabeth Badinter). La publicité, après avoir reproduit toutes les contradictions des combats féministes, va se heurter à la fin du siècle au ressentiment féminin. 5. La vague du porno chic. 9 On voit apparaître à la fin des années 90, une nouvelle vague publicitaire, nommée « porno chic ». Dans la foulée de la stratégie provocatrice de Benetton, les grandes marques prestigieuses rajeunissent leur image en « injectant » dans leurs pubs des valeurs sexuelles, voire même des valeurs sexuellement agressives et provocantes. Publicité pour la marque Opium. L’affiche sera interdite en Grande Bretagne en décembre 2001. Les grandes marques de parfum s’en donnent à coeur joie, les publicitaires n’ont aucune limites, les freins sont lâchés, soumission, machisme, sadomasochisme, les fantasmes les plus débridés sont tolérés sous couvert de la créativité et de la tradition française, de préférence en affichage où l’intervention du BVP ne peut s’effectuer qu’à posteriori. 10 Les images provocantes de femmes nues ou légèrement vêtues sont particulièrement abondantes dans la publicité. Shari Graydon, une ancienne présidente d’Évaluation-médias, affirme que « la publicité sexualise le corps des femmes pour mieux attirer l’attention du public. Les femmes deviennent des objets sexuels à partir du moment où leur corps et leur sexualité sont associés à des marchandises ». Ceci a pour résultat de banaliser la sexualité et de la ramener au rang de produit de consommation. Plus inquiétant, l’association entre le sexe et la violence est très fréquente dans ces productions. L’agression sexuelle, le harcèlement et la violence y sont souvent présentés comme des manifestations de la passion amoureuse. 11 12 Cette affiche pour la marque Dolce & Gabbana en est un exemple frappant, il y a, en effet, une forte connotation sexuelle, cette femme, allongée en position de soumission et entourée de plusieurs hommes nous renvoie aux « tournantes », pratiques dans lesquelles plusieurs hommes violent ensemble la même femme. Outre le caractère violant de cette image, on comprend mal la relation entre cette scène et la vente de vêtements. Cette affiche, dont nous n’avons pu retrouver la marque à laquelle elle s’affilie est un autre exemple, à notre sens, de dérive. En effet, impossible de savoir ce qui justifie la présence de cette femme, extrêmement maigre, allongée, en situation d’abandon et de plaisir. 13 Il est intéressant de s’attarder aussi sur cette campagne, lancée par la marque de vêtements La City qui met en scène une jeune fille à quatre pattes, très maigre (encore une fois), face à un mouton avec pour slogan « J’ai envie d’un pull ». Cette publicité, signée de l’agence DDB Paris constituera « la publicité de trop » sur laquelle se focaliseront les associations féministes : « Voilà, la femelle à quatre pattes, presque nue, les mamelles pendantes, dialoguant avec un mouton, animal à la bêtise et au conformisme légendaire. Le mouton tend l’oreille, ce qui laisse supposer que le QI de la fille égale celui de l’animal dont elle imite la position. Cette posture ramène ses désirs au niveau d’un animal, et est aussi un cliché de pornographie. C’est l’un des visuels qui me semble le plus choquant, à cause de cette représentation dégradante et de l’utilisation de la nudité et de la maigreur » Florence Montreynaud, Fondatrice du mouvement des Chiennes de garde A la demande du BVP, les affiches seront retirées, mais l’agence DDB ne comprendra pas ou feindra de n,a pas comprendre l’accusation : « la jeune fille est à quatre pattes parce qu’elle regarde la mouton dans les yeux, elle porte une culotte, ses bras cachent ses seins. IL n’y a rien de sexuel là dedans » justifiera le directeur général de DDP Paris. 14 Ces deux affiches publicitaires pour la marque Ungaro mettent en scène une femme et un chien. Sur la première, le chien est derrière la femme accroupie, les pattes de devant posées sur ses épaules et sur l’un de ses seins ; il porte un collier proche de la muselière, hérissé de clous. Sur la seconde, la femme, dont on ne voit que les jambes et le haut du corps, se fait lécher les pieds, chaussés de talons aiguilles, avec une expression de plaisir sexuel. Cette mise en scène évoque le sadomasochisme et la zoophilie par la présence combinée des colliers en cuir et à clous, des talons aiguilles, du chien vecteur de sexualité et de domination. On se demande alors quel est le message et quelle image des femmes souhaite faire passer le publicitaire ? Compare t il les femmes à des chiennes ? Le chien est il une métaphore pour représenter l’homme ? Quelque soit la lecture, on ne voit qu’humiliation. Pour aller encore plus loin avec la vague du porno chic, voici une affiche de la marque Sisley : 15 Est il réellement besoin de commenter cette image ? Quand une jeune femme, habillée en blouson de cuir avec une petite culotte blanche accroupie sous les pies d’une vache, les yeux fermés et la bouche ouverte, semble boire son lait ? On aimerait connaître l’explication des publicitaires à l’origine de cette photo où tous les clichés pornographiques sont représentés : cuir, maigreur, culotte, chaussettes et tresses d’écolière, expression de plaisir sexuel, et le lait dégoulinant sur sa jambe nous renvoyant à l’image de l’éjaculation faciale. A ces dérapages s’ajoutent d’autres campagnes qui attisent la polémique, notamment l’affiche pour la marque Babette : 16 Une enquête effectuée en 2001 auprès de mille quinze personnes représentatives de la population française révélera que 75% des femmes et 63% des hommes sont choqués de la manière dont on montre les femmes depuis deux ans. Le ministère lui-même s’inquiète de cette vague « porno chic » et prend des mesures : PARIS, 26 avr. (UPF) - Les dirigeants du Bureau de vérification de la publicité (BVP), l'organisme d'autodiscipline de la publicité, qui regroupe agences, annonceurs et supports, ont été conviés, le 24 avril, par la ministre déléguée à la famille et à l'enfance, Ségolène Royal, pour discuter de l'invasion du "porno-chic" en publicité. Pour Mme Royal, la lutte pour la "parité" est en contradiction avec une "instrumentalisation" croissante de la femme et l'usage des "images dégradantes" qui prévalent en publicité. "Plusieurs campagnes ont franchi la ligne jaune, en matière de respect de la dignité de la femme. Le gouvernement réfléchit à un éventuel encadrement législatif de la création..." a observé aujourd'hui le quotidien Le Monde (27 avril). La floraison répétée de soutiens et petites culottes, de femmes soumises, voire battues, sur les affiches et les écrans, chantent le triomphe du "porno chic" qui s'est épanoui avec succès dans les années 1990 pour la bonne fortune des couturiers et des marques de luxe. La secrétaire d'Etat aux droits de la femme Nicole Péry avait déjà mis en place une commission d'étude sur la violence, la dépendance et la discrimination. Le BVP envisage une remise à jour de sa charte déontologique qui introduirait les notions de violence, de soumission et de dépendance, pour éviter une ingérence administrative dans la création publicitaire, a noté Le Monde. "Notre mission consiste à faire respecter un certain nombre de règles, de manière à éviter que les pouvoirs publics fassent une loi régissant la publicité", a rappelé son président. Entre l'autodiscipline qui prévaut aujourd'hui et l'encadrement de la publicité par la loi, la profession publicitaire est néanmoins partagée. 17