Outsourcing : sans cesse sur le métier…

Transcription

Outsourcing : sans cesse sur le métier…
L’Essentiel
Club des Responsables
d’Infrastructures et de Production
# 29
Mai 2014
Outsourcing
CRiP Thématique
Outsourcing :
sans cesse sur le métier…
du 09 avril 2014
Si l’infogérance est presque aussi vieille que l’informatique elle-même, elle se transforme
au gré des mutations de l’IT. Elle doit proposer des services plus flexibles, satisfaire les
exigences de qualité de service des métiers, et évidemment dégager des réductions de
coûts. Autant de problématiques et de stratégies d’entreprise, autant de prestataires et de
services d’infogérance différents. Devant faire le grand écart entre un niveau d’exigence
sur une qualité de service toujours plus élevée, et un tarif des services qui s’érode année
après année, l’infogérant doit sans cesse remettre son ouvrage sur le métier pour garder la
confiance de la DSI et de l’entreprise.
Le contexte
En quelques phrases
Cette conférence a été organisée par le GT
Outsourcing, animé par Philippe Guyé (OCDE) et
David Perreau (CEA), la journée étant parrainée par
Frédéric Sevestre (Carrefour). Cette journée a illustré la
diversité des attentes liées à la taille de l’entreprise. Elle
a également traité des primo-contrats aussi bien que
des renouvellements. Les retours d’expérience sont
unanimes sur l’extrême nécessité de bien planifier le
passage de témoin, des équipes internes vers celles
de l’infogérant, ou la transition d’un infogérant sortant
à un infogérant entrant. Même, et surtout, si cette
transition implique des facteurs humains, le succès
de l’opération sera très dépendant de la formalisation
en amont des processus, et de la complétude du
contrat en aval. Ce dernier doit naviguer entre deux
écueils : être suffisamment détaillé pour éviter toute
interprétation en cas de recours, mais être assez
souple pour ne pas brider flexibilité et réactivité au
quotidien. L’infogérance, c’est un peu comme un
mariage. La non-atteinte des SLA conduit au divorce.
Pour l’éviter, la relation saine doit prévaloir, même si la
confiance n’exclut pas le contrôle…
•Il faut mettre en place un modèle adapté à sa
maturité : l’offshore low-cost ne fonctionne pas
forcément bien avec tout type de client.
• Dans notre stratégie, on voulait un acteur local
surtout parce qu’il y avait beaucoup de réticence
des équipes.
• Il faut impliquer les équipes delivery au plus tôt
dans le projet pour éviter une bascule violente.
• On allait être mariés pendant 5 ans. Si on
démarre la prestation en mettant les gens dans
un mode conflictuel, la relation contractuelle va
prédominer sur la relation humaine.
• Une fois qu’on a signé le contrat, c’est
extrêmement compliqué de changer une virgule.
• On ne choisit pas de quitter le confort de
l’existant pour l’inconnu s’il n’y a pas de fortes
économies à la clé.
• La réversibilité est une phase qu’on a souvent
tendance à négliger et surtout à ne jamais tester.
• Le prestataire sortant est un animal blessé, il fait
tout pour survivre et pour conserver le contrat.
• Si vous faites 1 comité de pilotage par mois,
au bout du 3ème mois vous avez déjà 3 mois de
retard.
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Ce qu’il faut retenir
Le modèle de maturité
démarrer quoi que ce soit. Il faut s’appuyer sur des faits
plutôt que des croyances ». Et même si « on connait
les points forts et les points faibles de son infogérant »,
on sait qu’on « ne saura pas demander à un crabe de
marcher droit, mais au moins on sait à quel angle il
avance ».
Aujourd’hui, il existe de nombreux modèles d’infogérance :
infrastructures, applications, postes clients, réseaux,
téléphonie, centres d’appels…. Et plusieurs modes de
fourniture des services : en délégation de personnel
sur site, avec des centres de service partagés situés
en France, dans un pays proche (nearshore) ou lointain
(offshore), avec des personnels parlant plus ou moins
bien le français. Et selon qu’on se lance dans son
premier projet d’infogérance (primo-entrant), ou qu’on
soit un habitué (multi-récidiviste), les avantages d’un
modèle pour l’un peuvent être perçus comme des
inconvénients par l’autre. Un multi-récidiviste avoue :
« On a un modèle d’infogérance qui repose beaucoup
sur l’offshore, c’est quelque chose à prendre aux sérieux
avec l’infogérant pour choisir le bon modèle. Il faut se
poser les bonnes questions sur son modèle de maturité
et mettre le curseur au bon endroit. L’offshore low-cost ne
fonctionne pas forcément bien avec tout type de client ».
Un primo-entrant confirme : « On voulait un acteur
local surtout parce qu’il y avait beaucoup de réticence
des équipes, et aussi parce qu’on avait un niveau
de maturité faible sur l’outsourcing d’exploitation. ».
Un multi-récidiviste complète : « Pour les primoutilisateurs, aller signer des contrats en Inde en Chine
ou au Mali peut se révéler compliqué ». Les barrières
de langue et de culture ne s’estompent pas facilement.
« On a un modèle d’infogérance qui repose beaucoup
sur l’offshore, c’est quelque chose à prendre aux
sérieux avec l’infogérant pour choisir le bon modèle ».
Même si la recherche d’économies substantielles attise
les convoitises (« ce n’est pas le genre de manip qu’on
fait pour gagner 7 ou 8%, il y a trop de risques »), il faut
raison garder avec le low-cost (« la raison d’être de ce
programme était de sécuriser nos applications critiques »).
Et pourtant, les préjugés peuvent avoir la vie dure :
« On pensait fermement que, depuis des années, on
payait 20% de plus que les prix du marché », on n’est
pas à l’abri d’une surprise agréable « alors qu’en fait on
était à -3% ! ». En résumé, « il faut avoir envie, penser
que le fournisseur peut s’améliorer » et « considérer que
c’est un partenaire avec lequel on va vivre pendant x
années. Nos collaborateurs vont travailler avec ses
collaborateurs même s’ils sont situés dans un pays
distant».
La confiance n’exclut pas le contrôle, c’est la raison
d’être des comités de pilotage qui doivent être réunis à
haute fréquence, surtout au démarrage du contrat, car
«si vous faites 1 comité de pilotage par mois, au bout du
3ème mois vous avez déjà 3 mois de retard ! ».
Quel portail de services ?
La plupart des contrats d’infogérance modernes
proposent un portail de services à leurs clients. Pour
un contrat d’infogérance de datacenters, le catalogue
donne « une vision claire des services et d’assurer un
lien fort entre services et architecture ». Ce client dispose
même de « deux types catalogues de services. Celui
proposé par l’infogérant liste les services qu’il fournit à
l’entreprise. Le second type est destiné à nos clients
internes. Il a été construit par notre organisation, qui se
positionne en tant que fournisseur de services internes,
et masque les infogérants qu’il peut y avoir derrière les
services proposés ». Chez un autre client, « le portail
de service avait l’avantage de délester le service desk
d’appels sans réelle gravité ». Le portail intègre un
certain nombre d’informations, d’outils de ‘self-healing’
permettant à l’utilisateur lambda de se débrouiller dans
les cas les plus fréquents et pour les incidents les plus
bénins. « Le seul problème c’est de savoir ce que l’on
veut mettre dans le catalogue de services. A partir
d’une analyse des historiques d’appels, nous avons pu
déterminer les 10 demandes les plus fréquentes. C’est
par celles-là que nous avons commencé à remplir le
catalogue, puis nous avons complété peu à peu ».
Une nécessaire relation de confiance
L’infogérance, comme toute prestation de service,
s’appuie sur une relation humaine entre les équipes IT
et les utilisateurs du client ainsi que les employés du
prestataire. Certains doivent vaincre des réticences et
« montrer comment on s’inscrit sur un apport de valeur
au pays et pas une perte de pouvoir, leur expliquer
qu’au lieu que ce soit eux qui soient réveillés la nuit
pour une barrette mémoire, ce serait nous, idem pour
les passages de patchs… ». Les réticences peuvent se
transformer en force d’inertie, « quand vous avez des
équipes entières qui pensent que l’infogérant sortant
est nul, il faut rétablir une relation de confiance avant de
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de comprendre les stratégies de chacun ».
Qu’il s’agisse d’un premier contrat ou d’une
reconduction, c’est avant le démarrage et pendant la
phase de ‘due-diligence’ que se cimentent les bases
de la réussite du contrat. « Les 3 premiers mois sont
relativement tendus, explique un grand compte,
parce qu’il y a tous les ateliers à mettre en place,
le paramétrage de l’outil (ITSM) qui devait changer,
remettre nos processus à plat pour le nouvel outil. Il a
fallu également caler tous les transferts de compétences,
ensuite refaire une validation documentaire de ce qui
nous avait été fourni…car la documentation de l’ancien
infogérant n’était ni toujours complète ni totalement à
jour ». Les ateliers sont primordiaux car « les livrables
non contractuels sont issus de tous les ateliers. C’est
le client qui a la maîtrise de ce qu’il est censé fournir à
l’infogérant. C’est le moment de documenter ce qui ne
l’était pas ».
Il arrive que le prestataire en cours ne soit pas reconduit,
ce qui a pour effet immédiat de tendre la passation de
pouvoir avec le suivant. « L’infogérant en place a refusé
de donner les mots de passe avant le dernier jour à
19h00. C’était très compliqué d’avoir la nouvelle équipe
en place dans les starting blocks jusqu’au dernier
moment ». Ce que confirme un autre témoignage :
« L’ancien fournisseur avait les manettes jusqu’à 5h59 le
jour J. Ce qui nous a valu une petite minute d’angoisse
lorsque nous avons coupé les consoles de supervision
de l’ancien infogérant et que nous avons basculé sur
celles du nouveau». Mais comment faire autrement ?
Même avec de la bonne volonté, il est difficile –voire
impossible- de faire se chevaucher les 2 contrats
utilisant des processus différents, des outils différents…
L’Essentiel
L’importance de la préparation
Certains infogérants laissent parfois un cadeau d’adieu :
« Le Service Desk s’est retrouvé le 1er jour avec 600
tickets en backlog laissés par le précédent infogérant ».
Le besoin de formalisation est confirmé par un autre
témoignage : « On a fait la due-diligence pendant 6
semaines avec 4 à 5 ateliers par jour. C’est un processus
extrêmement formalisé, il faut noter toutes les questions
car cela sert pendant les premiers temps du contrat
lorsque le prestataire vous dit ‘je ne savais pas que…’ ».
Dans la ‘due-diligence’ « il faut être exhaustif et traçable »
et accepter le fait que « la phase de collecte des
informations est coûteuse en temps et en ressources,
mais elle permet de faire le point en interne».
Les clauses de réversibilité permettent-elles de limiter
ce genre d’effets négatifs ? Un témoin déclare : « La
réversibilité c’est une phase qu’on a souvent tendance
à négliger et surtout à ne jamais tester ». Il conseille de
« la tester 1 fois par an, sans forcément effectuer une
réversibilité totale, mais au moins faire une réversibilité
documentaire et passer un peu de temps pour s’assurer
que toutes les documentations sont au carré et qu’elles
ont été rafraichies au moins une fois au cours de l’année
écoulée ». Et de conclure : « La dernière année, faites-la
2 fois 6 mois avant la fin de contrat et à la fin de contrat ».
CRiP Thématique Outsourcing : sans cesse sur le métier…
Car prudence est mère de sureté, surtout si « on avait
peur de tomber sur un prestataire qui nous impose
avenant sur avenant parce qu’on aurait oublié ceci ou
cela ».
Est-ce facile de changer
d’infogérant ?
A la fin naturelle du contrat, ou de façon parfois anticipée,
se pose la question du renouvellement. Même si l’on
ne dépend pas des marchés publics obligeant à une
nouvelle consultation formelle, nos témoins confirment
que la tacite reconduction fait désormais place à un
processus de mise en concurrence. Certains ont décidé
« d’anticiper la fin de contrat dans une renégociation de
gré à gré ». Pour autant, si ce client choisit de ne lancer
les négociations qu’avec son prestataire en place, celuici est prévenu : « Si, au milieu de la négociation, on n’a
pas trouvé d’accord, on met une appel d’offres sur le
marché ».
Pour un autre « la short list a été faite avec le prestataire
en cours et un nouvel entrant possible » Il poursuit : « Si
vous avez le temps, rédigez le modèle de contrat avec
les 2 entreprises, cela vous permet d’avancer plus vite et
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Le Benchmark Outsourcing du CRiP
Les contrats d’outsourcing sont utilisés à peu près
à égalité pour l’infogérance de datacenters ou
de postes de travail. Ensuite sont mentionnés la
maintenance applicative, les réseaux et télécom et
la maintenance système. Est-ce une manifestation
de l’exception française ? Une écrasante majorité
de contrats ont été signés avec des intégrateurs
ou sociétés de service, loin devant les opérateurs
télécoms et éditeurs ou constructeurs.
Le Groupe de Travail a lancé l’initiative d’un
Benchmark Outsourcing au sein du CRIP. Le
questionnaire, comportant 21 questions, a été
envoyé durant le 1er trimestre 2014 à un échantillon
représentatif de 254 sociétés membres du CRIP. A
ce jour 91 réponses ont été collectées, ce qui permet
d’avoir une première photographie des attentes des
membres vis-à-vis de l’outsourcing. Les résultats
sont en ligne avec les études menées par les grands
analystes du marché.
CRiP Benchmark ‘Outsourcing’
Q12. Avec quel(s) prestataire(s) le contrat a-t-il été signé ?
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Rédaction : Philippe Roux & Pierre Mangin, CRiP - Création Fred.lameche - www.anousdejouer.fr
Q3. Dans quel(s) domaine(s), un contrat d’outsourcing ?