Petit journal FR
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AILLEURS ICI UNE PROPOSITION D’ELVAN ZABUNYAN AVEC MICHELLE DIZON, FANCH DODEUR ET BARTHÉLEMY PÉRON, ANDREAS MARIA FOHR, RENÉE GREEN, THIERRY LEFÉBURE, TRINH T. MINH-HA, CAECILIA TRIPP En partenariat avec le Musée des beaux-arts de Quimper et Gros Plan « Ailleurs, ici » est né du désir de réunir ici, au Quartier, des propositions visuelles et sonores qui racontent l’histoire du déplacement culturel. Ce déplacement est d’abord physique - l’artiste se trouve dans un lieu et y enregistre des images mais il est aussi politique et poétique - l’artiste pense le présent de la culture qu’il interroge et en fait une forme filmique, photographique, sculpturale, littéraire. Pour vivre cette exposition collective, qui est aussi et surtout une expérience subjective, les spectateurs peuvent prendre leur temps. Elles et ils peuvent s’engager dans un parcours contemplatif en s’immergeant dans les œuvres afin de saisir les mouvements du déplacement et la nécessité de s’arrêter pour les découvrir. Le corps se pose mais, au contact des images et des sons, l’esprit devient nomade. « Ici », « Ailleurs », deux adverbes dont l’étymologie latine désigne respectivement un endroit précis (hic) et un autre lieu (aliore). Sans hiérarchiser les espaces, l’exposition propose de privilégier les rencontres en créant une simultanéité de temporalités. C’est au cœur d’une oscillation (comment effectuer le déplacement entre le « ici » et l’« ailleurs » ? et vice versa ?) qu’on cherche à saisir ce qui se joue dans la distance qui sépare géographiquement, politiquement, culturellement, métaphoriquement les deux lieux à appréhender selon la position que l’on occupe dans le monde. Il ne s’agit pas de déterminer ce qu’est le « ici » ou l’« ailleurs » (ils sont partout là à chaque instant) mais bien l’espace qui les lie ou les éloigne. Puisque le déplacement d’un point à un autre peut être multiple et évoquer à la fois le voyage, la migration, l’exploration, l’exode, ce qui fait le lien de toutes ces conditions est la mobilité nécessaire qui s’y rattache. L’exposition souhaite solliciter plusieurs « ailleurs » pour les faire naviguer vers le « ici » que représente la ville de Quimper, en convoquant à travers les lignes et la mémoire, la longue histoire de la Bretagne dans le commerce maritime à l’époque coloniale. Travailler cette notion de lieu dans sa translation permet de réfléchir à la façon dont l’idée allégorique du « voyage » est aussi une façon de découvrir, d’explorer mais aussi d’observer, d’étudier ce qui se joue dans les ondes de l’expérience du déplacement et dans les sillons d’une pensée critique qui s’adosse plus que jamais à l’extrême violence de l’actualité en s’inscrivant dans les interstices d’une Histoire tourmentée. À la manière d’une vague, l’exposition porte l’idée contrastée de force et de fluidité, de décentrement et d’aller-retour, de turbulence et de persévérance, pour établir une conversation entre les artistes et les spectateurs, pour poser un regard aiguisé sur la réalité contemporaine du monde aujourd’hui, « ailleurs » et « ici », « ailleurs, ici ». Elvan Zabunyan, historienne de l’art contemporain, est professeure à l’Université Rennes 2 et critique d’art. Ses recherches portent sur l’art nord-américain depuis les années 1960 et notamment le tournant 1970 autour des questions raciales et féministes. Elle travaille depuis le début des années 1990 sur les problématiques issues des cultural studies, des théories postcoloniales et des études de genre en cherchant à construire, grâce à ces pensées critiques, une méthodologie de l’histoire de l’art contemporain articulée autour d’une histoire culturelle, sociale et politique. Ses travaux actuels interrogent l’héritage et la mémoire de l’esclavage ainsi que de la colonisation en repensant l’idée de déplacements culturels à la lumière de l’actualité mondiale, tant artistique que géopolitique. Elle a publié Black is a color, une histoire de l’art africain américain (Dis Voir, 2004 et 2005 pour la version anglaise), Theresa Hak Kyung Cha – Berkeley – 1968 (Presses du réel, 2013), co-dirigé plusieurs livres et écrit de nombreux articles dans des ouvrages collectifs, des catalogues d’exposition et des périodiques (notamment sur les artistes Louise Bourgeois, Martha Rosler, Adrian Piper, Lorna Simpson, Trinh T.Minh-ha, Renée Green, Rosemarie Trockel, Hannah Wilke, Martha Wilson…). JOURNAL Nº 95 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 SALLE 1 THIERRY LEFÉBURE Né à Paris. Il vit à Limay et à Paris. Sans titre, 2007-2014 15 photographies, 80 x 120 cm Thierry Lefébure photographie selon ses déplacements. Son travail s’adosse depuis des décennies à un engagement sur le terrain. En 1998, il emménage à l’Hôtel Moderne à Paris et aide les Sans-Papiers à traverser la mer Rouge comme une métaphore pour revendiquer le droit à la circulation pour tous. En 2002, il autoédite un livre sur l’entreprise familiale pour rendre hommage au monde du travail et présente des portraits des salariés photographiés en 1998 et en 1999. En 2003, il rencontre les Rroms roumains aux portes de Paris (Montreuil, SaintDenis, Aubervilliers) et s’engage avec d’autres soutiens pour obtenir leur régularisation sur le territoire français. En 2004 et en 2005, il se rend à Brindiago en Casamance au Sénégal en tant que chef de projet (porté par l’association ARBRE) pour travailler à la reconstruction de l’école primaire de Brindiago qui accueille 205 élèves en 2008. Paris, Istanbul, Saint-Malo, Bucarest, Dakar, Los Angeles, Mustafapasa, Selçuk, Uchisar, Catane, Izmir, Doganbey, sont les lieux où Thierry Lefébure a pris les photographies qui sont présentées ici pour la première fois par des tirages de grand format, directement collés sur les murs. L’artiste préfère volontairement ne pas nommer chaque image par un titre afin de laisser libre le regard que l’on pose sur le lieu. Si c’est l’image qui fait exister le lieu, le lieu a aussi sa liberté et l’artiste choisit de la lui laisser tout en captant pendant une fraction de seconde ce qu’il y a vu. Parmi les éléments qui génèrent le déplacement photographique chez Thierry Lefébure, il y a la lumière. Celle-ci associe ce qui est saisi avant et après la prise de vue et est très souvent le déclencheur de l’image à naître. En parcourant les paysages les plus divers en Europe occidentale et orientale, aux Amériques, en Asie, en Afrique, il regarde comment le lieu traversé peut s’imprimer sur la surface rayonnante de sa pellicule argentique. Choisies de façon très soigneuse parmi des milliers d’images qui composent son travail depuis près de trente ans, ces quinze photographies datent toutes des dix dernières années et permettent de créer un espace de contemplation inédit et spécifique. Chaque image existe pour elle-même et pour les autres, produisant simultanément la conscience d’une immersion, d’une concentration et d’un flottement. LE SUPERBE Maquette du bateau de la flotte royale française du XVIIIème siècle, réalisée dans les ateliers P. Bauwens à l’île Maurice en 1993. Issu d’un programme maritime visant à renforcer les diversités des vaisseaux de la Marine royale de Louis XVI au XVIIIème siècle, le Superbe est mis en chantier à partir des plans de l’ingénieur Jacques-Noël Sané en 1782. C’est un vaisseau de ligne de 74 canons, d’une longueur totale de 85 m et d’une largeur de 30 m. Sa particularité est d’avoir une coque doublée de cuivre qui le protège contre les vers et parasites marins. Lancé en 1785, le Superbe intègre la flotte de l’Amiral Villaret de Joyeuse. Il prend part à la campagne du Grand Hiver, dirigée par la République contre la marine britannique, mais gravement endommagé au cours d’une tempête, le vaisseau est abandonné en janvier 1795. La maquette est présentée dans l’exposition en écho aux ex-votos marins de Bretagne. JEAN-BAPTISTE CAMILLE COROT Né en 1796 à Paris où il est mort en 1875. Paysage de Bretagne, 1860-1865 Huile sur toile, 33 x 25 cm Collection Musée des beaux-arts de Quimper Corot est souvent cité comme le précurseur de l’impressionnisme pour ses recherches sur la lumière, pour le travail sur le motif et pour le paysage saisi sur le vif. Il n'expose jamais ses études réalisées en plein air mais les tableaux peints en atelier. Il voyage sans cesse de l’Italie aux Pays-Bas, en passant par l’Angleterre et la Suisse. Il se déplace aussi dans différentes régions françaises, notamment en Bretagne où il séjourne à sept reprises. Paysage de Bretagne ne peut être localisé avec certitude, mais il a appartenu à un de ses amis, le peintre Camille Bernier, établi à Brest. À partir de 1866, Corot séjourne avec Bernier chez un autre peintre, Vincent Vidal, dans la propriété de Kerlagadic près de Bannalec. Il est probable que ce paysage ait été réalisé à cette occasion dans les environs de ce lieu. Plus qu’un paysage, le sujet principal du tableau est un arbre, d’où l’utilisation d’un format vertical atypique. Cette peinture, qui ne se différencie pas des paysages peints à cette époque autour de Villed’Avray (Île-de-France), caractérise la dernière période de l’œuvre de Corot, marquée par une vision romantique, une rêverie poétique devant une nature originelle. JOURNAL Nº 95 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 SALLE 2 CAECILIA TRIPP Née à Francfort-sur-le-Main en Allemagne. Elle vit et travaille à Paris depuis 1993. Music for (prepared) Bicycles (Score One: Bombay, Score Two : New York) [Musique pour les bicyclettes (préparées), partition un : Bombay, partition deux : New York], 2013 Deux projections vidéo sonores, 18’ et 15’ À travers l’installation filmique, la photographie, le son et la performance, la pratique artistique de Caecilia Tripp s’immerge dans l’espace migratoire de l’imaginaire social et collectif des identités fluides. Music for (Prepared) Bicycles (Score One: Mumbai, Score Two: New York) est un projet en cours (prochaine partition sera réalisée à Cap Town en Afrique du Sud) qui présente deux itinéraires d’une bicyclette équipée de cordes de guitare et des éléments sonores ; l’un à Bombay en Inde, l’autre à New York aux États-Unis. Ces deux métropoles ont été choisies en référence aux mouvements des droits civiques qui y ont eu lieu. Inspirée par les œuvres de Marcel Duchamp, John Cage et par les écrits d’Henry David Thoreau sur la désobéissance civile, cette installation de deux vidéos présente une œuvre musicale dans l’espace publique, où les enregistrements de sons produits par le vélo capturent les paysages sonores de chaque métropole. MICHELLE DIZON Née à Los Angeles où elle vit et travaille. Perpetual Peace [Paix perpétuelle], 2013 Film, 42’53’’ Michelle Dizon est artiste, cinéaste et écrivaine. Son travail se construit à partir des théories postcoloniales, de l’histoire des mouvements sociaux, des droits de l’homme et de la mémoire collective. Perpetual Peace interroge la façon dont un engagement lié à une mémoire diasporique peut proposer une autre représentation de la globalisation aujourd’hui. Le film explore l’histoire politique de la colonisation des Philippines par les États-Unis à travers la narration personnelle de Michelle Dizon, qui est née aux Etats-Unis et y a été élevée au sein de la diaspora philippine. Cette narration personnelle entre en relation avec un récit politique en expansion. Ce qu’elle enregistre évoque un pays, les Philippines, qui reste profondément affecté par les legs de colonialismes multiples conditionnant encore les différentes gestions internationales dans un présent globalisé. Pendant la production de Perpetual Peace, Michelle Dizon a voyagé à travers les Philippines à la recherche de lieux et de processus qui confirmaient l’existence de l’impérialisme en expansion : les ruines d’une ancienne base militaire américaine devenue une zone économique spéciale, l’exploitation de ressources naturelles par les multinationales, les zones de conflit de Mindanao, une île au sud du pays... Perpetual Peace est divisé en cinq chapitres : traduction, mémoire, pays, valeur et héritage. Chaque chapitre est appelé un “intervalle” et, comme pour la migration, s’inscrit dans un espace qui se situe entre langage, histoires, espaces, économies et générations. Le principe narratif et structurel qui constitue l’organisation du travail de l’artiste permet aux spectateurs de comprendre que la temporalité proposée par Perpetual Peace va au-delà d’une simple vie humaine. PETITE SALLE FANCH DODEUR ET BARTHÉLEMY PÉRON Fanch Dodeur et Barthélemy Péron sont nés respectivement à Lorient et Rambouillet. Ils vivent et travaillent à Quimper. Haïkus, 2012-2015 Vidéo 83’ Fanch Dodeur et Barthélemy Péron travaillent ensemble depuis 2010 sur le projet Geocyclab, lieu d’observation, de recherche et de création en permanente mutation, qui se fait et se défait, se déplace, apparaît, disparaît puis réapparaît ailleurs suivant le modèle de la «T.A.Z.» (Zone Autonome Temporaire) d’Hakim Bey. De 2012 à 2015, le duo arpentait en vélo les routes du monde, expérimentant les réalités de cet atelier mobile et autonome. Avec Haïkus, les deux artistes transfèrent la tradition littéraire du haïku japonais dans le domaine du son et de l’image en mouvement pour traduire l’évanescence d’un instant vécu. Respectant une certaine spontanéité, le haïku devient un lieu d’expression où deux interprétations (sonore et visuelle) d’un même espace-temps s’opposent, se confrontent ou s’associent, remettant en question notre lecture du réel. Cet ensemble de 83 micro-métrages d’une minute propose un éventail de paysages fragiles qui en se succédant revisitent de manière sensible le concept de carnet de bord. JOURNAL Nº 95 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 SALLE 3 RENÉE GREEN Née à Cleveland (Ohio). Elle vit et travaille à New York et à Cambridge, Massachusetts, États-Unis. Come Closer, 2008 Vidéo, 12’10’’ Artiste, écrivaine et cinéaste, Renée Green questionne dans ses vidéos et films l’histoire reléguée du discours dominant présenté comme vérité historique. Ses œuvres se nourrissent de ses lectures, de ses entretiens, de ses voyages et de son activité théorique en s’inscrivant dans l’héritage de l’art conceptuel et post-minimal et dans le discours critique du postcolonialisme. En réalisant ses projets dans divers pays en lien avec le contexte historique et l’actualité du lieu, l’artiste invite le public à relier les références entre passé et présent, histoire personnelle et histoire collective. Réalisée en 2008 à partir d’extraits de ses précédents films consacrés au Portugal, la vidéo Come Closer est un récit allégorique racontant la relation de Renée Green avec le Brésil, un pays où elle n’est alors encore jamais allée mais où y habite son frère Derrick, musicien du groupe Sepultura et où sont nés des écrivains et des artistes importants pour son travail. Ce regard vers le Brésil s’effectue à partir de ses recherches portant sur l’histoire coloniale du Portugal. Renée Green a exposé à Lisbonne en 1992 puis en 2000, chacun de ses séjours a permis des déplacements dans la ville en quête d’une mémoire inscrite dans le présent. L’artiste interroge la façon dont on habite un lieu, dont on l’explore, dont on le quitte. Par un montage qui fait se superposer plusieurs références et citations, par une narration en portugais et en anglais qui fait se croiser les voix féminines et masculines, Come Closer s’adresse à soi et aux autres en parlant au monde. Le Space Poem #2 (créé en 2009 pour son exposition «Endless Dreams and Water Between » au Maritime Museum de Greenwich-Londres) est composé des « Mots de Laura ». Fidèle à sa méthode de recherche minutieuse, Renée Green reprend ici le poème « There Is No Land Yet » de Laura Riding (1901-1991) dont chaque vers se pose sur les 33 bannières en formant un récit fragmenté qui renvoie à l’eau et à l’imaginaire le plus profond porté par la mer. Le poème spatial crée un lieu décloisonné où le regard bouleversé est dans le même temps enchanté. Images mentales abstraites, interrogations tranchantes, les vers sur les bannières colorées constituent le socle d’une pensée qui navigue ; les bannières dans l’espace sont autant de voiles qui appellent le vent. Poème spatial #2 (Les Mots de Laura) [1ère rangée] Il n’existe pas encore de terre La longue mer, de si courte durée, De pensée liquide en pensée liquide Si prompte à éprouver surprise et honte. Où les instants ne sont pas du temps [2ème rangée] Mais le temps est fait d’instants. Tel ni oui ni non, Tel amour unique, que reporte au lendemain L’échec certain du maintenant et maintenant. [3ème rangée] Couchés sur l’eau de robustes navires et des hommes Doués de faiblesse arrivent ailleurs : Pas de lieux plus heureux depuis chez soi dans le lit Pour le plus formidable dormeur. [4ème rangée] Ainsi la foi embarqua sur la terre du marin En quête d’absurdités au nom du ciel Une fontaine sans source pour toute découverte, Légende de brume et patience perdue. [5ème rangée] Le corps nageant en lui-même Est la dissolution préférée. La bouche dégoulinante il dit une vérité Qui ne peut mentir, avec des mots encore à naître [6ème rangée] De la première immortalité, Fragilité omnisciente. Et l’œil poussiéreux dont les précisions S’embuent pour l’esprit [7ème rangée] Où des vagues de probabilité Écrivent une vision d’une main marée Que seul le temps peut lire. Et pas encore la terre sèche, [8ème rangée] Salut solitaire et absolu Se vantant d’être consistante Comme une île sans eau autour Dans une eau où il n’existe pas de terres. JOURNAL Nº 95 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 SALLE 4 TRINH T. MINH-HA Née à Hanoi au Viêtnam. Elle vit et travaille aux États-Unis depuis 1970. Old Land New Waters, 2007 Installation de deux séquences vidéo, 7’ et 11’ © Moongift Films, Viêtnam Trinh T. Minh-ha, cinéaste indépendante, féministe et théoricienne, est une personnalité qui a marqué toute une génération d’artistes s’engageant dans une création plurielle entre espaces visuel et littéraire. Son travail filmique — Reassemblage (1982), Naked Spaces (1985), Surname Viet Given Name Nam (1989), Shoot for the Contents (1991), A Tale of Love (1996), The Fourth Dimension (2001), Night Passage (2004) et Forgetting Vietnam (2015) — a été présenté dans plus de cinquante rétrospectives à travers le monde. Old Land New Waters est un travail visuel pensé comme un diptyque et composé de deux séquences vidéo diffusées simultanément et en continu. La première séquence (Dât) figure l’élément terre, la seconde (Nuoc) l’élément eau, les deux réunis forment le mot “pays” en vietnamien : dât nuoc. L’un des mythes qui est à l’origine de la création du Viêtnam parle d’un combat entre deux dragons dont les corps entrelacés tombant dans la mer de Chine du sud symbolisent et structurent, par la forme du “S”, les contours côtiers du pays. La double projection proposée par l’artiste est une peinture d’un Viêtnam originel, spirituel et historique où la question de la globalisation est au cœur d’une réflexion portant sur les enjeux du développement économique et du tourisme. Alors que la cinéaste a été à l’origine de concepts théoriques radicaux permettant de déconstruire les stéréotypes culturels ainsi que les approches anthropologiques et ethnographiques les plus conventionnelles, elle propose un essai engagé où le médium numérique se dissout sur la surface de l’écran comme d’infinies particules d’eau. Associant les images à des textes qui les traversent, s’emparant de faits quotidiens, insistant sur le déplacement sur la terre et sur l’eau, Trinh T. Minh-ha revisite avec cette œuvre l’histoire d’une culture ancestrale en accordant aux représentations une fonction à la fois politique et poétique. ANDREAS MARIA FOHR Né en Allemagne. Il vit à Paris et à Champlay. Andreas Maria Fohr construit sa pratique artistique dans une démarche qu’on pourrait qualifier de postdocumentaire. Partant d’un ancrage dans le réel, ses œuvres, souvent filmiques, articulent des objets, des textes, la photographie ou la performance en vue d’une relecture radicale. Sans titre (Bird), 2015 Impression numérique, 66 x 90 cm Cette image d’un oiseau rare enfermé au Tierpark de Berlin est extraite de la vidéo Travelling E (Exile) qui questionne la notion du dehors, de l’espace public et de l’exil. Why is there no color on the screen ? [Pourquoi il n’y a pas de couleur sur l’écran ?], 2015 Dessin mural, 330 x 1000 cm (variable) Issu d’une photo satellite d’un désert au Proche Orient, ce dessin adapté à la surface du mur du Quartier déploie une nouvelle forme qui, à la manière d’une peinture rupestre contemporaine, compile la technologie de pointe et la pratique ancestrale. Déjà vu, 2014 Peinture laque sur bois, cheveux humain, ø 65cm Rappelant un tambour rituel chamanique, Déjà vu présente un schéma de reconnaissance faciale. Cet objet assimile à la fois, le rapport du corps à la performativité technologique et la diversité culturelle aux flux migratoires. AAA, 2014 Deux masques Hulk, cheveux, bois, env. 30 x 15 cm Tout en se référant au système de notification de la solvabilité d’un état, ces masques réunissent les matériaux et narrations de trois continents (Afrique, Amérique et Asie). À la manière d’un agrégat étrange à la fois grotesque et inquiétant, ils associent les formes traditionnelles, rituelles aux mythes contemporains. Pathos, 2013, photographie : Viviane Fohr impression numérique marouflée au mur, 300 x 280 cm, peinture laque sur aluminium, 65 x 90 cm À cette photographie d’un souvenir de vacances en bord de mer, reproduite à grande échelle, Andreas Maria Fohr juxtapose par montage une peinture d’après le dessin de son fils, mettant en scène une transmission réciproque d’expériences transgénérationnelles, qui fait resurgir des symboles à travers le jeu. Der Garten meiner Eltern [Le jardin de mes parents], 2015 7 photographies, tirage Fine Art sur Hahnemüle 300 gr, 40 x 60 cm Dans cette série photographique, Andreas Maria Fohr présente des plantes recensées dans le jardin botanique de ses parents. Les appellations de nombreux spécimens y évoquent des contrées lointaines héritées d’un système colonial, qui semblent donner une représentation miniature d’un monde révolu. JOURNAL Nº 95 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 ANDREAS MARIA FOHR - Sans titre (Bird), 2015 Impression numérique, 66 x 90 cm - Why is there no color on the screen ? [Pourquoi il n’y a pas de couleur sur l’écran ?], 2015 Dessin mural, 330 x 1000 cm (variable), - Déjà vu, peinture laque sur bois, 2014 Cheveux humains, ø 65cm - AAA, 2014 Deux masques Hulk, cheveux, bois, env. 30 x 15 cm - Pathos, 2013 Photographie : Viviane Fohr Impression numérique marouflée au mur (300 x 280 cm), peinture laque sur aluminium (65 x 90 cm) - Der Garten meiner Eltern [Le jardin de mes parents], 2015 7 photographies, tirage Fine Art sur Hahnemüle 300 gr, 40 x 60 cm TRINH T. MINH-HA - Old Land New Waters, 2007 Installation de deux séquences vidéo, 7’ et 11’ SALLE 3 FANCH DODEUR ET BARTHÉLEMY PÉRON - Haïkus, 2012-2015 Vidéo 83’ SALLE 4 RENÉE GREEN - Come Closer, 2008 vidéo, 12’10’’ - Space Poem #2, 2009 Installation de bannières MICHELLE DIZON - Perpetual Peace [Paix perpétuelle], 2013 Film, 42’53’’ PETITE SALLE SALLE 2 SALLE 1 LE SUPERBE - Maquette du bateau de la flotte royale française du XVIIIème siècle, réalisée dans les ateliers P. Bauwens à l’île Maurice en 1993. VOUS ÊTES ICI THIERRY LEFEBURE - Sans titre, 2007-2014 15 photographies, 80 x 120 cm 14 NOVEMBRE 2015 - 14 FÉVRIER 2016 JOURNAL Nº 95 JEAN-BAPTISTE CAMILLE COROT - Paysage de Bretagne, 1860-1865 Huile sur toile, 33 x 25 cm Collection du Musée des beaux-arts de Quimper CAECILIA TRIPP - Music for (prepared) Bicycles (Score One: Bombay, Score Two: New York) [Musique pour les bicyclettes (préparées), partition un : Bombay, partition deux : New York], 2013 Deux projections vidéo sonores, 18’ et 15’ AUTOUR DE L’EXPOSITION CONFÉRENCES Mercredi 2 décembre à 18h Ailleurs ici, qu’est-ce qu’une exposition collective subjective ? par Elvan Zabunyan, historienne de l’art contemporain, professeure à l’université Rennes 2, critique d’art À partir de l’exposition « Ailleurs, ici » qui propose un regard sur des travaux artistiques contemporains où la question du déplacement culturel est au centre de la réflexion, il s’agira de penser la structure de l’exposition en insistant sur le caractère subjectif de sa mise en forme et les points de jonction critiques qu’elle permet de faire surgir dans son rapport à l’actualité et au présent. L’EESAB, site de Quimper / Salle de culture générale, accès libre. Jeudi 17 décembre 2015 à 18 h 30 Vendredi 15 janvier 2016 à 18 h 30 Sonorités africaines et afro-américaines : origines, évolutions et relations des musiques déplacées Deux conférences musicales de Kemi Bassène, musicologue. Les Amériques sont la scène pivot où les musiques qui ont accompagné les populations déplacées (qu’elles soient africaines ou autres) ont trouvé une intelligence recréatrice pour remodeler des identités à travers une résistance par la résidence ou l’imitation de l’oppresseur. L’esclavage des Noirs, et les colonisations qui lui ont succédé, ont permis une nouvelle définition de rituels sonores qui, à leurs débuts, n’avaient pour nom que les instruments qui les jouaient. Les musiques qui ont « voyagé » avec les corps déportés vivaient toutes en dehors de leur propre vocabulaire. Ces conférences ne chercheront pas à redéfinir ces musiques mais elles interrogeront les entraves de résistance et de survivance de ces sonorités déplacées une fois adaptées à leur nouvel environnement. Tarif 4 € / réduit 2 € / durée 1 h Vendredi 29 janvier 2016 à 18h30, Ailleurs ici, histoire(s) en mouvements par Elvan Zabunyan. À partir de l’exposition et des œuvres qui y sont présentées, la conférence portera sur l’importance des déplacements culturels comme autant de façons de saisir l’échelle du monde et son histoire. Fonds Hélène & Édouard Leclerc, Landerneau Sans réservation préalable, dans la limite des places disponibles. Mercredi 27 janvier 2016 à 18h30 Geocyclab – atelier nomade de recherche et de création Par Barthélemy Péron et Fanch Dodeur Geocyclab est un atelier nomade de recherche et de création artistique qui sillonna les routes du monde entre septembre 2012 et septembre 2015. De retour depuis quelques semaines, Barthélemy Péron et Fanch Dodeur, artistes quimpérois, reviennent sur les points clés de ce voyage expérimental. Gratuit / durée 1h30 JOURNAL Nº 95 CINÉMA MÉCÈNES & BIENFAITEURS Julie Bizien, Crédit Agricole, Crédit Mutuel de Bretagne, Philippe Dejacques, Garage Plomelin Auto, Marie et Jean-Pierre Le Garrec, Libraire Ravy, Gwen Pacallet, Michelle Senant, Stéphanie Stein, Les Vitrines de Quimper Le Bouton de nacre de Patricio Guzmán Production : France/Chili – 2015 – 1h22 / Ours d’argent – meilleur scénario Berlinale 2015 Projections à partir du 11 novembre au cinéma Quai Dupleix. En partenariat avec l’association Gros Plan Le Bouton de nacre raconte une histoire sur l’eau, le Cosmos et nous. Il puise son inspiration dans deux mystérieux boutons découverts au fond de l’océan Pacifique, au large des côtes chiliennes. Comité de rédaction et suivi : Morgan Danveau, Keren Detton, Sylvie Doré, Anna Olszewska, Elvan Zabunyan Conception graphique : Jérôme Saint-Loubert Bié assisté de Caroline Fabès REMERCIEMENTS Elvan Zabunyan remercie les artistes, toutes les personnes qui ont travaillé sur le projet, ses ami-e-s, sa famille, ses filles Meena et Lily. Le Quartier remercie Sten et Marie Lena, Guillaume Ambroise, Solenn Rousseau, Stéphanie Stein PARTENAIRES Avec le soutien de la ville de Quimper, du ministère de la Culture et de la Communication, du conseil général du Finistère et de la Région Bretagne VISITES Visite commentée Un parcours dans l’exposition « Ailleurs, ici » en compagnie d’un médiateur du Quartier. Tous les dimanches à 16h Gratuit/durée 1h Visite en breton Samedi 12 décembre à 16h Découverte de l’exposition en langue bretonne en compagnie d’Annaïck Loisel, guide conférencière Tarif 3,50 € / réduit 2 €/ durée 40 mn Visite couplée avec le Musée des beaux-arts 23 janvier à 15h Une traversée de l’histoire de l’art développée autour du thème de l’exposition du Quartier. Tarif 6€50/ réduit 3€50/ durée 1h30 ATELIERS Atelier famille Samedi 19 décembre à 15h Précédé d’une visite de l’exposition, l’atelier pratique propose aux familles de découvrir les gestes et la démarche des artistes. A partir de 5 ans Tarif 4€/durée 1h Ateliers sensoriels en compagnie d’Isabelle Le Bail Samedi 30 janvier 2016 à 16h (0-3 ans) Tarif 4 €/durée 40 min. LE QUARTIER, CENTRE D’ART CONTEMPORAIN DE QUIMPER 10, esplanade François Mitterrand 29000 Quimper T : +33 (0)2 98 55 55 77 www.le-quartier.net ACCÈS centre ville de Quimper, entrée face au Théâtre de Cornouaille. Accessible aux personnes à mobilité réduite. HORAIRES Du mardi au samedi de 13 h à 18 h Dimanche de 14 h à 18 h Fermé les 25 décembre et 1er janvier TARIFS Entrée 3 € (le dimanche : entrée libre) Réduit 2 € : Passeport culturel, Fonds Hélène & Édouard Leclerc, Passerelle, groupe (+ 10 pers.) Entrée libre : abonné du Quartier, étudiant (-26 ans), demandeur d’emploi, bénéficiaires des minima sociaux, passeport pour l’art