TA Cergy-Pontoise 3 octobre 2012 n°1102790, 2

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TA Cergy-Pontoise 3 octobre 2012 n°1102790, 2
TA Cergy-Pontoise 3 octobre 2012 n° 1102790, 2e ch., Sté Zambon France SA
Mmes Colombani, Prés. - Hameau, Rapp. - M. Chayvialle, R. public
1. Considérant que la société Zambon France SA, société française qui exerce une activité de distribution de produits
pharmaceutiques, est la filiale d'une société mère italienne, non-imposable en France, et la société soeur de la société
ZachSystem, également française ; que si la société Zambon France SA a réalisé, au cours des exercices 2008 et 2009, des
bénéfices, la société ZachSystem a quant à elle déclaré des résultats déficitaires au titre de la même période ; que par courrier
du 25 janvier 2010, la société mère italienne du groupe a saisi la direction des résidents à l'étranger et des services généraux,
d'une demande tendant à obtenir communication des modalités de l'option pour le régime de groupe, à laquelle l'administration
n'a pas répondu ; qu'après s'être acquittée de l'impôt sur les sociétés dont elle était redevable au titre des exercices clos en
2008 et en 2009, la société Zambon France SA a demandé, par réclamation du 30 décembre 2010, la restitution de la fraction
d'impôt sur les sociétés correspondant à l'imputation sur ses résultats des déficits de la société ZachSystem ; que
l'administration a rejeté cette réclamation le 11 février 2011 au motif qu'une société française ne peut être membre d'un groupe
fiscalement intégré, lorsque sa détention à 95 % par la société mère intégrante est réalisée par l'intermédiaire d'une société
étrangère ne disposant pas d'un établissement en France, qui n'est donc pas assujettie à l'impôt sur les sociétés en France ;
que la société demande la restitution à hauteur de la somme de 3 287 271 €, de la cotisation d'impôt sur les sociétés et de
contributions sociales dont elle s'est acquittée au titre des exercices clos en 2008 et en 2009, assortie des intérêts moratoires ;
Sur les conclusions principales aux fins de décharge :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 223 A du CGI, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en
litige : « Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe
formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice,
directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe. Dans ce cas, elle est également redevable de
l'imposition forfaitaire annuelle due par les sociétés du groupe. Le capital de la société mère ne doit pas être détenu à 95 % au
moins, directement ou indirectement, par une autre personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de
droit commun ou selon les modalités prévues aux articles 214 et 217 bis. (...). Seules peuvent être membres du groupe les
sociétés qui ont donné leur accord et dont les résultats sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit
commun ou selon les modalités prévues aux articles 214 et 217 bis. (...) » ; qu'aux termes de l'article 223 B du même Code : «
Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés
du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun (...) » ; qu'aux termes de l'article 46 quater-0 ZD de l'annexe III au
CGI : « Les options mentionnées au premier et au deuxième alinéas de l'article 223 A du CGI sont notifiées au service des
impôts auprès duquel est souscrite la déclaration du résultat d'ensemble. (...) » ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 43 du traité instituant la Communauté européenne devenu l'article 49 du
traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : « Dans le cadre des dispositions visées ci-après, les restrictions à la liberté
d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre sont interdites. Cette interdiction
s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un Etat
membre établis sur le territoire d'un Etat membre. La liberté d'établissement comporte l'accès aux activités non salariées et leur
exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, et notamment de sociétés au sens de l'article 48 (devenu 54),
deuxième alinéa, dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants, sous
réserve des dispositions du chapitre relatif aux capitaux. » ; qu'il résulte de l'interprétation donnée de ces stipulations par la cour
de justice des Communautés européennes qu'est de nature à constituer une telle restriction l'application par un Etat membre
d'un traitement fiscal inégal aux sociétés filiales constituées sur son territoire en conformité de sa législation selon que leur
société mère s'y trouve ou non, elle-même, établie, dès lors qu'au regard de l'objet du dispositif en cause, les unes et les autres
de ces sociétés filiales sont dans une situation objectivement comparable ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Zambon France SA et la société ZachSystem sont deux sociétés
soeurs détenues, de manière directe par des sociétés holdings imposables en Italie, et de manière indirecte par la société mère
du groupe Zambon, la société Zambon Company, également imposable en Italie ; que la réclamation du 30 décembre 2010, par
laquelle la société Zambon France SA demandait la restitution d'une fraction de l'impôt sur les sociétés dont elle s'est acquittée
pour les exercices 2008 et 2009 correspondant à l'imputation sur son résultat des déficits de sa société soeur française,
s'analyse comme une demande tendant au bénéfice de l'intégration horizontale entre les résultats des deux sociétés soeurs qui
sont les seules sociétés du groupe Zambon à être assujetties à l'impôt en France ; que la circonstance, invoquée par
l'administration fiscale, que ni la société requérante, ni la société mère du groupe, Zambon Company, n'ait exercé l'option en
vue d'obtenir le bénéfice du régime de l'intégration fiscale dans les conditions prévues par l'article 46 quater-0 ZD de l'annexe III
au CGI, ne saurait priver l'intéressée de la possibilité de contester devant le juge de l'impôt la compatibilité des dispositions
précitées du CGI relatives à la constitution de groupes fiscaux intégrés avec le droit communautaire dès lors que la contestation
de la société porte notamment sur les modalités d'exercice d'une telle option, laquelle n'est ouverte par la loi française qu'aux
sociétés mères assujettie à l'impôt sur les sociétés en France ;
5. Considérant que la société Zambon France SA fait valoir que les dispositions des articles 223 A et B du CGI, en tant qu'elles
excluent l'application du régime d'intégration fiscal qu'elles prévoient à des sociétés françaises détenue par une société mère
étrangère, entraînent pour elles un désavantage fiscal par comparaison avec les filiales françaises d'une société mère française
et sont, par suite, incompatibles avec les stipulations de l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif
au principe de la liberté d'établissement au sein de l'union européenne ;
6. Considérant toutefois, d'une part, que les dispositions de l'article 223 A du CGI ne prévoient pas l'intégration horizontale de
sociétés soeurs, mais seulement l'intégration verticale d'une société mère avec ses filiales ; que l'administration a donc pu à
bon droit, sur le fondement de ces dispositions, refuser à la société Zambon France SA le bénéfice du régime d'intégration
fiscale avec sa société soeur ZachSystem, le lieu d'imposition de leur société mère étant à cet égard sans influence ; que la
société Zambon France n'est donc pas fondée soutenir que les dispositions de l'article 223 A du CGI méconnaissent le principe
de la liberté d'établissement prévue par les stipulations de l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
7. Considérant en outre, d'autre part, que la société Zambon France SA et la société ZachSystem, compte tenu, précisément,
de la singularité de leur lieu d'imposition au sein de leur groupe, et eu égard à l'objet même du régime d'intégration, qui tend à
ce que les bénéfices et les pertes de toutes les sociétés soient globalisés au niveau de la société mère afin d'établir la base
imposable à l'impôt sur les sociétés au niveau de cette dernière, ne se trouvent pas dans une situation objectivement
comparable avec la situation qui est celle de sociétés soeurs françaises filiales d'une société mère française imposable sur ses
bénéfices en France ; que dans ces conditions, la restriction critiquée apparaît, eu égard à l'objet même du régime d'intégration
fiscale, justifiée par la différence de situation susmentionnée ; qu'en conséquence, la société Zambon France n'est pas fondée
à soutenir que les dispositions des articles 223 A et 233 B du CGI créeraient entre les sociétés soeurs françaises filiales de
sociétés françaises et les sociétés soeurs françaises filiales de sociétés étrangères une différence de traitement incompatible
avec les stipulations de l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; que par suite, la société requérante
n'est pas fondée à demander la restitution des impositions litigieuses ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de faire droit aux conclusions subsidiaires de la requête
tendant à ce que le tribunal saisisse la cour de justice de l'Union Européenne d'une question préjudicielle, la requête de la
société Zambon France SA doit être rejetée ;
Décide : Rejet.