ORDRE DU JOUR DU CONSEIL DE L`AMRAE

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ORDRE DU JOUR DU CONSEIL DE L`AMRAE
L’Assujettissement du MOD à l’obligation d’assurance
Pascal DESSUET
SOCIETE GENERALE
Responsable des Assurances pour les Affaires Immobilières
Chargé d'enseignement à l'Université de Paris Val de Marne (Paris XII)
Président de la Commission Construction (AMRAE)
Président de la Commission Assurance de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI)
La question est classique mais procède souvent du fait que les praticiens s’arrêtent à la dénomination de
MOD, comme une catégorie monolithique du droit dont le contenu serait défini par le Code civil, alors
qu’en réalité, il n’en est rien en droit privé.
Par conséquent, dans la mesure où en droit privé, contrairement au droit public, le terme de MOD, n’est
pas défini par la loi, il ne faut pas s’arrêter à la dénomination donné au contrat, mais à son contenu, c’est
le contenu de la mission qui permet de définir le régime et non l’intitulé du contrat..
Par de là la dénomination, Il faut en réalité distinguer deux cas en fonction du contenu de la mission:
+ La convention est un contrat de mandat, par laquelle, le Maître de l’ouvrage, donne mandat de faire
réaliser un ouvrage par des constructeurs, avec une obligation de résultat, un prix ferme et un délai de
livraison.
+ La convention est un contrat de prestation de service, s’analysant cette fois à un louage d’ouvrage
consistant à accomplir un certain nombre de diligences, qui s’apparentent à des obligations de moyen,
sans mission quant à la construction d’un ouvrage.
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I – Le contrat s’analyse en un mandat
Nous sommes dans l’hypothèse du véritable contrat de « Maîtrise d’Ouvrage Délégué, classiquement
rédigé sous la forme d’un mandat conduisant le plus souvent à son assimilation au Contrat de Promotion
Immobilière de l’article 1831-1 C Civil :
Le Maître d’ouvrage Délégué reçoit mandat de passer des actes juridiques, en l’espèce des marchés et des
conventions de Maîtrise d’œuvre pour le compte du Maître de l’ouvrage en vue de faire réaliser un
ouvrage, pour une date donnée et moyennant un certain prix incluant les honoraires du mandataire.
Dans ce cas, le plus souvent l’assujettissement à la RC décennale et à l’obligation d’assurance, résulte du
fait que la jurisprudence, va requalifier ce mandat en contrat de promotion immobilière, au sens de
l’article 1831-1 C Civil, rendant alors inutile le recours à l’article 1792-1 3° et à la notion de « mandataire
accomplissant une mission assimilable à celle d’un locateur d’ouvrage.1 :
Dans l’arrêt de 1986, pour admettre l’assimilation du contrat de mandat à un contrat de promotion
immobilière au sens de l’article 1831-1 du Code Civil, la Cour de Cassation semble avoir pris en compte
le seul fait que le mandataire s’était engagé envers le Maître d’ouvrage « à faire procéder à la réalisation
d’un programme »
1 Civ. 3e, 23 avril 1986, N° 84-12 852 arrêt n°408
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la S.A.C.I. s'était obligée envers le maître de l'ouvrage à faire procéder à la
réalisation du programme de construction, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Cass Civ 3ème 08 avril 2009 Pourvoi n° 07-20.706, n° 07-21.304, n° 08-11.577 Arrêt n°464
2°/ que, par contrat de prestations de services du 26 mars 2001, la société CEDIF s'était vue simplement confiée une mission
d'assistance du syndicat des copropriétaires sur le plan technique et financier ; qu'en qualifiant cependant la société CEDIF de
promoteur de fait, la cour d'appel a dénaturé ce contrat et violé l'article 1134 du code civil ;
../..
Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, répondant aux conclusions et sans dénaturation du contrat du 26
mars 2001, que c'était la CEDIF qui avait conçu le projet de restauration du château Morin et sa division par lots, les plans des
divers lots à créer étant annexés à la plaquette publicitaire diffusée par elle, au vu de laquelle les demandeurs avaient conclu les
acquisitions, qu'elle était le seul interlocuteur des acquéreurs dans le cadre de cette opération, qu'elle avait d'ailleurs saisi le
géomètre ainsi que l'architecte et déposé elle-même le 15 décembre 1997 la demande de déclaration d'intention d'aliéner à la
communauté urbaine de Bordeaux alors qu'elle n'était pas propriétaire du château, qu'elle avait demandé à la société CIIF de se
substituer à elle pour son acquisition et sa revente par lots, qu'elle avait continué, après la vente intervenue par l'intermédiaire
d'une société écran, sa mission de promoteur de fait en sollicitant un premier permis de construire qui avait été refusé, puis un
second permis pour la rénovation en logement unifamilial, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que
ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que la société CEDIF, devant en conséquence être qualifiée de
promoteur de fait, sa responsabilité était engagée en application de l'article 1831-1 du code civil, pour avoir méconnu l'obligation
de résultat pesant sur elle quant à la conformité du projet aux règles d'urbanisme ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
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Les praticiens privilégient parfois la formule de la MOD à celle du contrat de CPI de l’article 1831-1
afin de déroger à certains dispositions du CPI jugées trop contraignante, comme l’obligation de redditions
de compte da la part du mandataire, à l’issu de son mandat.
II - Le contrat s’analyse en un contrat de prestation de services
Peut-on déduire de l’expression utilisée par l’article 1792-1,
« Est réputé constructeur de l’ouvrage ../.. tout techniciens ou autre personne lié au Maître de l’ouvrage
par un contrat de louage d’ouvrage »,
le fait que l’assujettissement de l’AMO, à la RC décennale et donc à l’obligation d’assurance pourrait
découler du simple fait de passer un contrat de louage d’ouvrage, même non technique, directement avec
le Maître de l’ouvrage… ?
On peut raisonnablement considérer, malgré la formulation « techniciens ou autre personne » et
l’imprécision concernant la nature du louage du premier alinéa de l’article 1792-1 du Code civil, que le
législateur n’a envisagé que le cas des personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage
d’ouvrage « technique » appelé aussi marché de travaux, figurant au troisième alinéa de l’article 1779 du
Code civil et non au titre de la catégorie générique des contrats de louage d’ouvrage visés par l’article
1710 du Code civil, dans laquelle pourrait entrer, la Convention d’Assistance à Maîtrise d’ouvrage
(AMO), en tant que mission de prestation de service se limitant à des obligations de moyens, tournant
autour de l’idée de l’assistance du Maître de l’ouvrage dans l’accomplissement des tâches lui incombant,
sans engagement quant à un résultat précis :
L’assistant Maître d’ouvrage conseille le maître de l’ouvrage dans la passation des marchés, mais ne les
signe pas en son nom, comme le ferait un véritable Maître d’ouvrage délégué qui aurait reçu mandat de le
faire, il assiste le Maître de l’ouvrage lors de la réception, mais ce n’est pas lui qui prononce la réception
en son nom avant de lui livrer l’ouvrage comme le ferait un MOD….
Dans ces conditions, il n’y a pas de place pour un assujettissement à la RC décennale des constructeurs,
au sens de l’article 1792-1 1° du Code civil, bien qu’il y ait un lien de louage d’ouvrage avec le Maître
d’ouvrage.
Dans le cas contraire, il faudrait admettre que tout prestataire de service lié au Maître de l’ouvrage est
assujetti à la RC décennale, quand bien même l’objet de sa mission ne serait elle pas « de réaliser un
ouvrage », alors qu’au terme de l’article 1792, l’exigence de participer à la construction d’un ouvrage est
clairement posée : « tout constructeur d’un ouvrage » est assujetti à la RC décennale.
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On renverra sur ce point à l’analyse du professeur Malinvaud à propos des contrôleurs SPS2 :
« Certes, littéralement, ce texte (l’article 1792-1) répute constructeur de l'ouvrage « 1° tout architecte,
entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage
d'ouvrage » ; en cela il ne fait que reprendre la formule de l'ancien article 1792 qui édictait que « les
architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l'ouvrage par un contrat de louage en
sont responsables pendant dix ans ». Or, pas plus en 1978 qu'en 1967, le législateur n'a entendu faire
peser la présomption de responsabilité sur des locateurs d'ouvrage autres que ceux exerçant une fonction
de construction.
../..
« A vouloir étendre l'article 1792-1 à tout locateur d'ouvrage, on aboutirait à des résultats aberrants.
Ainsi, seraient réputés constructeurs tous les locateurs d'ouvrage : non seulement les constructeurs, mais
la société de gardiennage du chantier, celle assurant la sécurité incendie, le médecin de service, et
pourquoi pas les services juridiques auxquels le maître aurait recouru pour monter l'opération (V. sur ce
point H. Perinet-Marquet, Le coordonnateur, n° 2007, in Dalloz Action, Construction, )
../..
En fait il faut lire l'article 1792-1 en contemplation de l'article 1792, et non pas l'inverse, si on veut
éviter de commettre un contresens sur la portée de la loi. »
De tout cela il résulte que dans la mesure où l’AMO, est certes « un locateur d’ouvrage » tel que visé
par l’article 1792-1, mais pas « constructeur d’un ouvrage » au sens de l’article 1792, il ne peut de ce fait,
être assujetti aux garanties légales et donc à l’obligation d’assurance de même notamment en marchés
publics, que les conducteurs d’opération3.
Il en irait différent si parmi les missions de l’AMO en question, on trouvait des missions assimilables à
de la Maîtrise d’œuvre. Cependant en toute hypothèse, une telle situation ne devrait pas pouvoir se
présenter, puisque le Maître d’ouvrage, ne peut déléguer ce dont il ne dispose pas, en l’espèce le droit de
s’immiscer dans la maîtrise d’œuvre.
Bien évidemment, il convient d’être vigilant sur la dénomination du contrat qui ne doit en aucun cas
être dénommé « contrat de Maîtrise d’Ouvrage Délégué », car même si en droit privé, il ne s’agit pas d’un
contrat dénommé, il est en général réservée à l’hypothèse du contrat de mandat donné au promoteur de
faire réaliser l’ouvrage dans le cadre d’une obligation de résultat très comparable à celle que l’on retrouve
dans un contrat de Promotion Immobilière au sens de l’article 1831-1 C Civil.
On observera néanmoins, qu’une certaine pratique, craignant d’éventuelles mises en cause injustifiées
sur le terrain de la RC décennale, nécessitant des frais de justice pour se défendre, demande et obtient,
l’intégration dans la liste des assurés au titre de la police CNR, de l’Assistant Maître d’Ouvrage ou des
structures de gestion et de conseil, assumant les missions de prestation de service à caractère
administratif, pour le compte du maître de l’ouvrage (la SCI de vente en VEFA) ou même pour le compte
2
P Malinvaud La responsabilité du coordonnateur en cas de dommages à l'ouvrage RDI 1997 p. 47
3
V. sur ce sujet, Guide des maîtres d’ouvrage, Ed. MIQCP, 2006 — V. également le site www.archi.fr/MIQCP.
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du promoteur, au sens de l’article 1831-1 du Code civil.
Cette solution n’est pas sans danger pour l’assureur, car dès lors qu’il a accepté d’assurer l’assistant
Maître d’Ouvrage en RC décennale, il aura quelques difficultés par la suite, à plaider que ce type
d’intervenant n’est pas assujetti à la RC décennale. (V par analogie 4)
Autre conséquence indirecte de ce raisonnement : Le « promoteur », prestataire, qui anime des
opérations immobilières dans les domaines juridiques, administratif, financier, comptable, fiscal et
commercial, pour le compte du maître de l’ouvrage, la SCI de construction vente, dont la création a été
suscitée par le promoteur pour l’opération, et passe avec elle, le plus souvent, un contrat dit de gestion –
qui est en réalité un contrat de louage d’ouvrage – n’est pas assujetti selon nous, à la responsabilité
décennale, et en conséquence, pas soumis aux obligations d’assurance de responsabilité décennale.
Un doute pourrait subsister à propos de la mission de maîtrise d’œuvre de désamiantage, mais en
réalité, le désamiantage, comme les travaux de démolition ou de « déconstruction » ne peuvent constituer
la réalisation d’un ouvrage, critère indispensable pour un assujettissement à la RC décennale et donc à
l’obligation d’assurance.
4 Cass Civ 3ème 28 janvier 2009 Pourvoi n° 07-20.891. Arrêt n° 145 Bulletin Civil - Bulletin d'information Note J Bigot RGDA
2009 P 514
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