Compagnie Tutti Quanti 19, rue d`Alsace 92600 Asnières sur Seine

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Compagnie Tutti Quanti 19, rue d`Alsace 92600 Asnières sur Seine
Compagnie Tutti Quanti
19, rue d’Alsace
92600 Asnières sur Seine
06.67.61.96.61
[email protected] - www.tuttiquanticie.com
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Carlo Collodi, de son vrai nom Carlo Lorenzini, est né en 1826 à Florence dans un milieu populaire. Il
prend le pseudonyme de Collodi en hommage à sa mère, native de ce village toscan. Après des études
au séminaire puis à l’école des pères Scopoli, il est engagé comme commis à 17 ans dans une librairie
de Florence. C’est là qu’il tisse ses premiers contacts avec le milieu du journalisme.
En 1848, lors du Risorgiamento, première guerre d’indépendance, il s’enrôle dans un bataillon de
volontaires florentins et se bat contre l’occupant autrichien. Malgré l’échec de l’insurrection, il continue à
écrire et publie ses textes anonymement dans de nombreux journaux.
De 1860 à 1865, il écrit et publie des critiques de théâtre et de musique. Polémiste et écrivain à la
plume acérée, il s’attaque à la décadence de la bourgeoisie et critique le gouvernement qui selon lui, ne
s’occupe pas suffisamment de la population. Collodi s’engage fortement en faveur de l’émancipation et
l’éducation du peuple. Lors de l’unification de l’Italie, en 1871, c’est vers lui que le gouvernement se
tourne pour travail de terrain sur la langue et la rédaction d’un dictionnaire.
Sa mission lui tient à cœur et s’ancre dans son engagement pour élever le niveau culturel du pays.
C’est à cette époque qu’il commence à écrire pour les enfants en traduisant et adaptant les contes de
Charles Perrault, « Racconti delle fate », récits de fées. Il écrit ensuite, plusieurs livres à destination des
professeurs et des élèves, des manuels scolaires, des écrits pour la jeunesse. Ses publications en firent
une figure reconnue et appréciée par de nombreuses générations de lecteurs. Il écrira des livres pour
enfants jusqu’à sa mort en 1890. Collodi est aujourd’hui célébré comme un des grands auteurs italiens.
En 1881, Collodi répond à une commande de feuilleton du Giornale per i bambini, un des premiers
journaux destinés à l’enfance. Ainsi naît L’Histoire d’un pantin, Storia di un burattino. Le feuilleton a ses
contraintes qui influenceront l’écriture de l’histoire. Tantôt Collodi se voit rappelé à l’ordre par le
directeur qui lui demande de nouveaux épisodes, tantôt les lecteurs s’offusquent de la mort du pantin
qui ressuscite à l’épisode suivant. Cette écriture par strates successives nourrit l’aspect foisonnant et
riche du récit.
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Tout le monde connaît l’histoire du pantin de bois. Il y a d’abord Gepetto,
un vieux menuisier, pauvre et seul, qui fabrique un jour dans un morceau de bois un pantin qui parle
comme un enfant. Il le nomme Pinocchio et l’aime comme son fils. Mais quand la marionnette prend vie,
elle découvre la faim, proteste, réclame, et s’indigne d’avoir été mise au monde par un homme aussi
pauvre. Pinocchio est un pantin naïf et cruel, qui rêve d'une vie de prince. Avide d’amusements et de
découvertes, « Il ne veut pas ne pas s’amuser ». L’école est pour lui une grande source d’ennui et il lui
préfère les plaisirs immédiats et faciles. Il quitte donc son père et part dans le vaste monde : son
apprentissage de petit garçon commence.
Au fur et à mesure des épreuves et des expériences, le bois devient chair et la marionnette
disparaît pour laisser naître un petit garçon.
Le nez qui s’allonge, les oreilles d’ânes, la baleine immense… autant d’images qui nous reviennent en
mémoire, autant d’étapes et d’épreuves que va traverser Pinocchio.
Récit initiatique, voyage féerique, l’histoire de Pinocchio est fascinante et mystérieuse à la fois. C’est
ce mythe fondateur que nous avons voulu revisiter.
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« Pinocchio » c’est d’abord l’histoire d’une construction commune. D’un spectacle qui s’imagine avec
les habitants d’un quartier, en lien avec leurs propositions, leur regard. En effet, l’histoire de ce
spectacle commence avec des ateliers menés avec des groupes d’habitants de Seine-Essonne.
De leur vision du récit, de nos expérimentations communes, est né ce spectacle que présente
aujourd’hui la compagnie Tutti Quanti.
Pendant six mois, nous menons des ateliers de pratique théâtrale avec des enfants, des adolescents,
des adultes aux profils variés (personnes touchées par le handicap, primos arrivants, personnes en
reconversion professionnelle, etc.). A partir des différentes versions de l’histoire, les participants
s’approprient le conte et livrent leur regard sur les personnages et leurs péripéties. A la fin du travail, ils
présentent leur spectacle avec les artistes de la compagnie sur la scène du Théâtre de CorbeilEssonnes.
Inspirés par leurs interprétations, nous nous saisissons de la matière à notre tour et nous écrivons
collectivement une trame de spectacle. Les personnages sont nourris de nos recherches en ateliers et
de ce que nous souhaitons raconter des personnages aujourd’hui : les escrocs deviennent des
passeurs, la fée une diva, le pays des imbéciles devient une orgie consumériste…
Dans la phase d’écriture, émerge le personnage de la scénariste qui écrit un film sur Pinocchio.
Les images de l’histoire de Pinocchio affleurent par bribes, éclats que nous connaissons tous : le chat
et le renard, le pays des ânes, l’apparition de la fée bleue, …
La piste d’une construction en fragments apparaît comme la plus juste. Nous décidons de travailler sur
une narration éclatée, non chronologique qui nous permet de revisiter des passages de l’histoire de
manière libre.
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Le canevas du spectacle est finalisé avec un cadre de travail très précis. On évoque le nœud
dramaturgique et les actions pour chaque scène et le parcours émotionnel de chaque personnage, avec
ses objectifs et ses obstacles.
Nous proposons des éléments de langage pour ouvrir sur une certaine manière de s’exprimer et
caractériser le champ lexical des personnages.
A travers un travail du mouvement et du geste, du masque et du chœur, les personnages se dessinent,
leurs silhouettes apparaissent.
Les comédiennes travaillent en improvisation à partir du canevas et de leurs impulsions. Puis, le texte
est repris après les répétitions, retravaillé et ciselé en fonction de l’expérience du plateau.
Sur scène, une scénariste au bord de la crise de nerfs qui noircit les feuilles de son cahier. Elle doit
écrire l’histoire de Pinocchio dont elle a promis de rendre le scénario pour le lendemain. Coup de
téléphone de son producteur qui égrène ses exigences. Elle tente de se souvenir de l’histoire si connue
de ce pantin de bois, mais ne sait pas quel bout commencer. Noir.
Les scènes défilent dans sa tête. Sur les tréteaux de bois, à côté de son bureau, des personnages
s’animent. Ombres et clair obscur, figures burlesques ou étonnantes, masques de bois, objets
démesurés autant d’éléments qui peuplent la scène et dessinent un univers fantasmé et poétique.
Gepetto, les escrocs, l’enfant qui rêvait d’une autre vie, la fée, apparaissent et échappent peu à peu au
contrôle de la scénariste.
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Marionnette de bois, « Pinocchio » signifie en toscan « pignon », qui est la graine comestible du pin
parasol. Des spécialistes s’accordent aussi à dire que « Pinocchio » signifie « petit pignon ». Dans le
chapitre X du livre de Collodi, c’est un pantin de bois, reconnu comme l’un des leurs, par les
personnages de la Commedia dell’arte, que sont les marionnettes Arlequin et Polichinelle.
Gepetto et Pinocchio. Un père et son fils.
La paternité, le lien filial sont au centre du récit avec une mère absente et un père désemparé devant
les attentes et les désirs de son fils. Un pauvre menuisier qui ne sait comment répondre à son fils,
comment combler ses désirs. Un père aimant qui ne sait pas s’y prendre, mais qui est prêt à tous les
sacrifices.
Lors du travail en atelier, la problématique de la transmission de valeurs aux enfants, des attentes aussi
que l’on fait porter sur eux et de la pression qu’ils peuvent ressentir est apparue de manière aigue. Il
nous a semblé important d’en faire un des aspects centraux des personnages de Pinocchio et de
Gepetto.
Artisan, travailleur du bois, notre personnage de Gepetto a des valeurs simples et une croyance
absolue dans l’éducation. Il veut que son fils fasse mieux que lui et réussisse ce que lui même n’a pas
pu accomplir.
Pinocchio porte le poids de ses rêves et ses ambitions. Comment ne pas faillir aux attentes de son
père ? L’émancipation de Pinocchio passera par une prise de distance avec ce rêve paternel et par le
vécu de ses propres expériences.
La question de la précarité est également très forte dans l’histoire. Collodi y revient à plusieurs reprises.
L’histoire se déroule dans un univers humble, celui de pauvres gens. C’est du bois le plus humble
qu’est issu Pinocchio :
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La maison de Gepetto est dépouillée, il n’a pas un sou, la marmite et le foyer sont peints sur le
mur et pour acheter un abécédaire à son fils, il se voit contraint de vendre son manteau. Comme il le dit
avec humour la lignée imaginaire du pantin n’est pas brillante : « J’ai connu une famille de Pinocchi,
tous menaient la bonne vie. Le plus riche d’entre eux était mendiant ! ». La dimension sociale est donc
très présente dans le roman, de même que la défense d’un certain statut de l’enfant.
A travers cette histoire, Collodi délivre un message républicain, laïc, valorisant le salut par
l’école, lieu d’apprentissage essentiel pour devenir un véritable petit garçon. Dans le contexte de
l’époque on peut aussi penser que l’école représentait un rempart à la menace de l’exploitation et du
travail des enfants. L’école était considérée comme un lieu de protection des enfants. Selon Jean-Louis
Le Run : « On trouve ici des échos de représentations imaginaires anciennes et fondatrices, comme par
exemple la Croisade des enfants : on se souvient qu’un berger charismatique aurait rassemblé, pour
partir en croisade, des milliers d’enfants qui vagabondaient dans les campagnes. Sous sa houlette,
ceux-ci traversèrent toute l’Europe avant d’arriver à Gênes où les survivants furent vendus comme
esclaves. (…)Elle inspira également le conte Le joueur de flûte de Hamelin. »
Cet épisode fait écho au passage du ramassage des enfants qui embarquent pour le pays où tout est
permis.
Une âme d’enfant dans un morceau de bois. Pinocchio condense en lui la dialectique entre nature et
culture. Impulsif, indomptable, au début de l’histoire il est proche de sa nature profonde : l’aspect
sauvage, l’arbre, la forêt, matière première, le désir. Il refuse l’enfermement, l’autorité, la contrainte, le
fait de rester enfermé entre quatre murs. Il court, il saute, il bouscule, il veut se rouler dans les champs.
L’histoire avance et il s’éloigne de ses impulsions premières. Il fait l’expérience de la société, de ses
lois, de l’école, de la prison.
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Dans cette partie nous vous proposons différents outils et exercices pour aborder l’histoire par le jeu et
faire découvrir aux élèves l’univers du spectacle de manière ludique et interactive.
Cet exercice permet de mettre en lumière la vision des personnages qu’ont les élèves. Il s’agit pour
eux de donner vie aux protagonistes de l’histoire en passant par leur propre corps, leur voix. Dans un
premier temps, on peut travailler par exemple sur le personnage de Gepetto.
Comment marche-t-il ? A quoi ressemble-t- il ? Quels sont les vêtements qu’il porte ?
On propose aux enfants de se placer en fond de classe et chacun avance vers le public en proposant
une démarche, un geste, une attitude. Arrivé au devant du public, le personnage s’arrête et doit se
présenter. On peut alors aborder des notions comme les émotions : « Dans quel état est Gepetto au
début de l’histoire ? Que souhaite-t-il? »…
On peut appliquer cette méthode à tous les personnages de l’histoire.
Puis une fois les personnages incarnés, on peut les mettre en relation pour aborder les scènes de
l’histoire.
A partir de lectures d’extraits comparés du texte de Collodi en parallèle avec la pièce de Joël
Pommerat, on peut proposer aux participants une improvisation sur une scène. Par exemple, on peut
commencer par la première scène : la création de Pinocchio.
Après avoir lu les extraits des deux textes, proposer à deux élèves de choisir chacun un personnage.
Puis, les mettre en scène dans une improvisation autour de l’histoire.
Quels sont éléments importants du dialogue ?
Que souhaite Pinocchio ?
Que lui oppose Gepetto ?
Puis, on peut affiner l’interprétation en travaillant sur l’incarnation des personnages :
Quelle est l’attitude de Pinocchio? Comment se tient-t-il ? Quelle est son émotion principale ? Quel est
le ton de sa voix ?
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Pinocchio est souvent tiraillé entre son désir et la raison. On peut rendre concrète et matérialiser cette
dualité par le jeu. Un élève vient en scène pour incarner Pinocchio derrière lui, un élève à sa gauche,
un élève à sa droite.
A gauche : le désir, l’envie, le plaisir
A droite : la raison, les règles, le respect de la parole donnée
Pinocchio hésite à aller à l’école. L’enfant qui le joue propose quelques répliques sur ce thème. Puis la
conscience « obscure » à gauche s’exprime en donnant des arguments pour ne pas aller à l’école : tout
ce qu’il pourrait faire, ce dont il rêve, etc.
Ensuite la conscience « raisonnable » à droite prend la parole et fait voir à Pinocchio les conséquences
de ses actes, la promesse faite à son père etc.
A chaque fois les élèves incarnent de manière vivante les arguments des deux consciences : par des
gestes, des variations de voix, des émotions.
Et celui qui joue Pinocchio montre au public ses émotions, ses doutes, la tentation…
Ensuite, on peut ouvrir un débat dans la classe suite à cet exercice pour dialogue avec les enfants sur
l’école, les tentations, les obligations.
Cette approche est issue d’un travail sur le chœur, inspiré par les recherches de Lecoq et repris dans
les créations de la Compagnie Tutti Quanti.
Placer les élèves par groupe de 5 ou 7 (toujours un nombre impair), en quinconce avec un élève devant
les autres. Ce sera le chef de chœur, le coryphée. Il amorce des mouvements que les autres vont
suivre.
Il s’agit de se mouvoir doucement pour que les membres du chœur puissent imiter ses gestes avec
fluidité.
On peut alors imaginer un chœur de Gepetto par exemple. Le chef de chœur propose l’attitude de
Gepetto face à la désobéissance de Pinocchio : émotion de la tristesse, gestes, attitude… ou bien
Gepetto qui cherche Pinocchio et qui l’a perdu : mouvement, avancée, crier son nom.
A chaque fois, tous les membres du chœur suivent le coryphée et imitent ses mouvements. Le
personnage se voit ainsi amplifié, c’est un exercice très intéressant à faire mais aussi à regarder pour
que les élèves se rendent compte de l’effet théâtral produit.
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- Collodi, C. 2003. Les aventures de Pinocchio, sous la direction de Jean-Michel Gardair, traduction
Nathalie Catagné, Paris, Folio classique.
- Site de Joseph Cabioch consacré aux représentations de Pinocchio
http://pages- perso-orange.fr/joseph.cabioch/pourquoi.htm
- Une lecture totémique du Pinocchio de Collodi
Mémoire de Pierre Rothlisberger présenté comme exigence partielle de la maîtrise en études littéraires
; Université du Québec à Montréal /
http://www.archipel.uqam.ca/1182/1/M10486.pdf
- Jean-Louis Le Run « Pinocchio chez le psy »
http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=EP_032_0161
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