Homélie Dimanche 28 mars 2010 Dimanche des Rameaux Luc 22
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Homélie Dimanche 28 mars 2010 Dimanche des Rameaux Luc 22
Homélie Dimanche 28 mars 2010 Dimanche des Rameaux Luc 22,14-23,49 « La Passion » « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! », chantions nous dans la rue tout à l’heure avec une immense joie dans le cœur ! Et quelques instants plus tard, nous nous rassemblons dans cette église pour écouter le récit de la Passion et de la mort de Celui que nous acclamions dans la joie quelques instants plus tôt. C’est un peu paradoxal, non ? Et ça l’est encore plus lorsque nous osons affirmer que pour nous chrétiens, la Passion de notre Seigneur, c’est l’unique chemin qui conduit au vrai bonheur, au seul bonheur qui puisse parfaitement combler totalement et définitivement le cœur de l’homme. Nous voulons tous être heureux. Et c’est normal puisque Dieu nous a créés pour que nous vivions dans la Joie. Encore faut-il ne pas se tromper de joie, de bonheur. Pour assouvir sa soif de bonheur, le premier réflexe de l’homme est de chercher à s’approprier des biens. Il pense se libérer de ses peurs, de ses tristesses, de sa solitude intérieure, en accumulant des biens : biens matériels, biens intellectuels, ou en s’attachant au pouvoir, au regard des autres, à la réussite personnelle, ou encore en recherchant à satisfaire toutes ses envies, etc…Et comme ces réponses ne peuvent combler son cœur, l’homme cherche à en avoir toujours plus. C’est le comportement des soldats romains qui se battent pour se partager les vêtements d’un condamné à mort. C’est Juda qui livre Jésus pour quelques pièces d’argent. En entrant dans Jérusalem sur un petit âne, en acceptant de se laisser dépouiller de tout ce qu’il a, de ses vêtements, de ses amis, de sa propre mère, et même de sa vie, le Fils de Dieu, le Roi des rois nous montre que le bonheur, la gloire n’est pas à chercher dans le fait de se savoir propriétaire de quelque chose, ou de quelqu’un. Bien au contraire. La vraie Joie est à chercher au plus profond de nous-mêmes, auprès de Dieu notre Père, qui est la source de tout bien. En lavant les pieds de ses disciples, Jésus nous montre que la vraie joie se trouve non pas dans le pouvoir de commander en maître, mais dans le don de nous-mêmes, dans le service de nos frères. Et puis, il y a ceux qui ont un peu plus avancé dans leur réflexion, et qui ont compris que le bonheur ne se trouve pas dans l’ « avoir », mais dans la relation d’amour, d’amitié. La tentation alors devient celle de « s’approprier la relation » en faisant toujours plus de choses pour les autres, pour Dieu ou pour l’Eglise. Ce sont les disciples qui jettent leurs manteaux devant le passage de Jésus. C’est Pierre qui se dit prêt à aller en prison et à la mort pour suivre Jésus jusqu’au bout. C’est ce disciple qui tire son épée et coupe l’oreille du serviteur du grand Prêtre pour défendre son maître. Mais bien souvent, cette façon de se réfugier dans l’agir se transforme en activisme, en agitation, à l’exemple de Marthe, et conduit un jour ou l’autre à la désillusion, voire même à la trahison. C’est Pierre qui trahit par trois fois. Ce sont les foules qui, après avoir acclamé Jésus, le condamnent à mort. L’erreur de toutes ces personnes de bonnes volontés qui s’épuisent dans le « faire », c’est de croire qu’elles sont à l’origine du bien qu’elles font. Alors Jésus leur montre que l’amour a une source et que cette source, c’est Dieu. Et qu’en entrant en communion avec Dieu, avec la source de l’amour, on peut alors aimer sans s’épuiser, sans limites, jusqu’à donner sa vie pour ceux qu’on aime. C’est le sens de l’Eucharistie qu’institue Jésus, car ce que Jésus veut nous donner, c’est lui-même. C’est ce qu’il veut nous faire comprendre lorsqu’il se laisse librement arrêter, flageller et clouer sur la croix. Seule la Vierge Marie, saint Jean, et quelques femmes ont compris ce jour-là le sens du don que Jésus voulait faire de lui-même. Les autres ont fui. Pour saint Pierre, il lui faudra attendre de se retrouver sur les rives du lac de Galilée, face au Christ ressuscité qui lui demandera à trois reprises « m’aimes-tu ? », pour qu’il lui réponde enfin : « Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime » – c’est-à-dire « tu sais bien que je suis maintenant prêt à donner ma vie pour toi ». Pierre entrera alors en pleine communion avec le Christ. Il accèdera alors à la vraie joie du don total de soi. Voilà le chemin qui nous conduit au bonheur véritable. Ne pas se réfugier dans l’avoir, ni même dans le faire, mais dans la communion avec Dieu, dans l’ « être avec » Dieu, et par voie de conséquence dans la communion avec nos frères. Alors nous découvrirons qu’en fait, là où on croyait ne plus rien avoir, on a tout, puisque tout ce qui est à Dieu nous est donné en partage. Là où on croyait ne plus pouvoir rien faire de bon, Dieu se met à agir à travers nous, et réalise avec nous des choses étonnantes. Là où on croyait être seul, abandonné de tous, critiqué, insulté, on se retrouve unis à nos frères, y compris à nos ennemis par une source d’amour qui jaillit en nous et qui dépasse tout, une source d’amour et de vérité qui nous fait entrer pour toujours dans une joie qui ne finit pas. Amen. Père Patrick de VARAX