Mes chères Sœurs,

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Mes chères Sœurs,
Mes chères Sœurs,
Le chemin qui nous est proposé durant le Carême est un pèlerinage intérieur. Par
la contrition et la conversion, en union avec le Seigneur crucifié et ressuscité, ce
chemin nous conduit à une nouvelle naissance. En cette année de la vie consacrée,
ce temps de grâce revêt un sens encore plus profond pour nous, religieuses.
Vita Consecrata l’énonce clairement : "Les personnes consacrées font l'expérience
de la vérité de Dieu qui est Amour, d'une manière d'autant plus directe et profonde
qu'elles se situent sous la Croix du Christ."1
Mon souhait le plus cher en cette année de la vie consacrée est que chacune
d'entre nous ait pris le temps durant ces 40 jours, d’accompagner Jésus du désert
à la montagne de la Transfiguration, de Jérusalem à la Galilée. Marcher avec Lui
sur la route pascale conduit à faire l’expérience de l'immensité de l'amour de Dieu,
et à témoigner toujours plus joyeusement de Lui.
Dans le DÉSERT, Jésus a été tenté par Satan. "Il était parmi les bêtes sauvages et
les anges le servaient." 2 Dans le désert de nos vies quotidiennes aussi, nous
sommes affrontées à ce même combat spirituel où s’opposent voix de Dieu et voix
du Malin. Aujourd’hui encore il nous est nécessaire de bien discerner notre attrait
pour des séductions qui se présentent à nous sous l'apparence du «bien». Ainsi,
par exemple, le désir de formation professionnelle ou de recyclage peut conduire à
une poursuite effrénée d'efficacité comme si le travail apostolique dépendait de nos
seules forces humaines. La solitude du désert, la prière, l'ascèse et l'amour de la
Parole de Dieu, nous permettent de rejeter ces séductions trompeuses du Mauvais
pour choisir les voies de Dieu. Demandons-nous concrètement combien de fois
nous mettons l'Evangile à la source de notre vie quotidienne au niveau
communautaire ou dans les décisions que nous prenons. Notre façon d’être et nos
actes reflètent-ils vraiment la fécondité de notre vie avec Dieu?
Dans nos vies personnelles, les "bêtes sauvages" prennent la forme de pensées
négatives, de critiques, de jalousies, d’actes ou de paroles contraires à la charité,
d’ambitions mondaines, d'indifférence et d'égoïsme. Autour de nous, ces bêtes
sauvages nous assaillent continuellement par l’annonce au quotidien d’actes de
terrorisme, de situations injustes et de guerres fratricides. Toutes ces violences qui
1
2
Vita Consecrata, 24
Mc 1,12
détruisent la dignité humaine sortent d'un cœur qui ne connaît pas l'amour. Nous
pouvons à l’opposé apporter notre contribution en semant la paix et l’unité, par
notre prière et par des actes fraternels et bienveillants posés à l’égard de tous, "en
privilégiant ce qui est positif dans les personnes ou les situations et en accueillant
inconditionnellement chacun sans distinction."3
Rejoignons le désert de nos cœurs, tenons compte de l'appel à la conversion et
retournons nos reproches en louanges, notre mauvaise humeur en paix, notre
jalousie en générosité, notre orgueil en humilité et notre égoïsme en serviabilité.
Nous avons maintes possibilités de répandre des semences de miséricorde et de
paix dans nos propres communautés religieuses, dans ces «écoles de l'amour»4,
où nous nous exerçons à nous aimer les unes les autres comme Dieu nous aime.
Cela n’est pas facile, mais nous prenons notre Seigneur Jésus-Christ comme
modèle et nous implorons sa grâce, car lui aussi a été "éprouvé en tout d’une
manière semblable, à l’exception du péché."5
Sur la montagne de la TRANSFIGURATION, Jésus fut désigné comme le Fils
bien-aimé du Père, tandis que se profilait son voyage imminent pour Jérusalem. Au
cours de cette année de la vie consacrée, l'Église nous invite à monter sur la
«montagne de notre propre transfiguration" pour redécouvrir la joie et la beauté de
notre premier appel ... ce temps où le Seigneur nous a regardées, aimées, saisies
d’une main si puissante et si mystérieuse que nous n’avons pu nous détourner de
Lui. Revivre cette expérience d'intimité avec le Seigneur fortifie notre foi et nous
permet de faire face à la tragédie de la croix dans nos vies. Après des années de
vie consacrée, demandons-nous encore si Jésus est bien notre seul et unique
amour, comme nous l’avons promis aux premiers jours de nos vœux.
Pendant tout le temps du Carême, le Seigneur nous a suppliées en disant:
"Revenez à moi de tout votre cœur." 6 Pour nous, personnes consacrées, voici
l’appel à raviver l'amour qui nous a fait signe de tout quitter pour remettre notre vie
entière à Dieu. Par notre consécration religieuse nous nous engageons "à centrer
et à enraciner toute notre existence dans l'expérience pascale du Christ." 7
Concrètement, cela nous invite à nourrir en nos cœurs un amour ardent pour le
Christ, par une communion constante avec Lui et par notre volonté de mourir de sa
mort dans nos luttes quotidiennes contre le mal.
3
Actes Capitulaires 2013, p.15
Congrégation pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique, Vie fraternelle
en Communauté, N° 35.
5
He 4,15
6
Jl 2,12
7
Actes Capitulaires p.14
4
Le voyage de Jésus à JÉRUSALEM est la
manifestation suprême de l'amour passionné de Dieu
pour son humanité. Jésus ne s’est pas seulement vidé
lui-même en prenant notre condition, mais "il s’humilia
plus encore, devenant obéissant jusqu'à la mort, et la
mort sur une croix." 8 Dieu ne vient pas pour nous
condamner, ni pour supprimer du monde la souffrance
et la mort, mais "il vient prendre sur lui le fardeau de
notre condition humaine, pour la porter à sa fin, pour
nous libérer de façon radicale et définitive." 9 En
personnes consacrées, nous reflétons la splendeur de
l'amour de Dieu par notre fidélité au mystère de la
CROIX, signe par excellence de la présence salvifique
du Christ au sein de nos épreuves.10 Le témoignage
courageux de nos sœurs qui vivent des situations
difficiles dans des pays ravagés par la guerre ou dans des lieux de très grande
pauvreté, est manifestation de la présence salvatrice de Dieu. Le témoignage d'une
vie simple et détachée du superflu au niveau personnel et communautaire est
encore signe providentiel de l'amour de Dieu. Le sacrifice silencieux dans
l'abandon à la volonté de Dieu, la fidélité à la prière au cœur même de la
sécheresse, l'humilité d'une vie cachée, l'acceptation sereine des faiblesses et des
forces déclinantes en raison de l'âge ou de la maladie, révèlent encore notre fidélité
à l'amour de Dieu. Nous manifestons enfin la présence du Christ quand nous nous
donnons généreusement au service de ceux qui sont en marge de la société: les
pauvres, les malades, les abandonnés, les opprimés, les personnes âgées, les
jeunes, et quand, partageant leurs difficultés nous les soutenons dans leurs
moments difficiles.
Le chemin de Jésus, du Golgotha à la Résurrection, est pour nous chemin
d’espérance. Ne manquons pas de nous lever et de passer Pâques avec Lui en
GALILÉE. Là, supplions-le de remplir nos cœurs du don précieux de sa joie
pascale ! La joie pascale éclate quand nous laissons l’Esprit de Dieu souffler sur
nous; il brise alors nos cœurs de pierre et nous donne un cœur de chair, nous
rendant capables de faire miséricorde à ceux qui nous ont blessées et nous
donnant de ressentir joie et paix, malgré nos infidélités et malgré les remous de
notre monde.
La joie pascale signifie encore ne plus être sous l’emprise de sentiments négatifs
ou bloquées par des expériences douloureuses, ne plus être enfermées dans nos
idées et nos vues étriquées, ni paralysées par nos peurs, car “ni le passé, ni le
présent, ni l'avenir, rien ne peut nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en
8
Phi 2,9
Pape François, Angelus du 15 février 2015.
10
Vita Consecrata 24.
9
Jésus-Christ.”11 La joie pascale enfin, c’est la grâce que nous recevons, quand,
sortant de nous-mêmes, nous donnons de notre temps personnel pour offrir à
l’autre le soutien de notre présence et de notre oreille écoutante.
Alors que nous célébrons le triomphe de notre Seigneur sur le péché et la mort, je
prie pour que vous receviez ce cadeau de l'amour, de la paix et de la joie du Christ.
Ne nous lassons jamais de faire la volonté de Dieu et ne nous laissons jamais
décourager par nos échecs, car notre Dieu est Père de miséricorde et de tendresse.
Puissions-nous continuer à faire de nos communautés des lieux où le Christ
ressuscité est rendu visible par le don du vivre-ensemble dans un partage de vie
empreint de bienveillance et soutenu par la prière mutuelle; par le don de la
compréhension et de la miséricorde; par le don de la fidélité à notre vie consacrée;
par le don de l’engagement pour révéler la présence du Royaume dans notre
monde en proclamant la joie de l'Évangile.
Nos sœurs Assistantes générales, Secrétaire et Économe, ainsi que toutes les
Sœurs de la communauté se joignent à moi pour vous souhaiter une sainte fête de
Pâques!
Que Marie notre Mère qui fut la première à connaître la joie de son Fils Ressuscité,
nous accompagne durant ce temps d’exultation, afin que nous puissions chanter
d’un seul cœur la victoire éclatante de la Pâque du Seigneur! Alléluia ! Alléluia !
Supérieure Générale
11
Rom 8:38
SUPERIOR GENERAL

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