Woody Allen fait simple avec Whatever Works
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Woody Allen fait simple avec Whatever Works
Woody Allen fait simple avec Whatever Works Le cinéaste signe un tout petit film très réussi. Pourquoi ne pas s’intéresser à un héros qui ne serait ni jeune, ni riche, ni beau, ni particulièrement aimable? C’est ce que fait Woody Allen dans son nouveau film. Au cinéma, la plupart des héros doivent être jeunes, beaux, fringants ou branchés. Quel ennui! Qui songe encore à concevoir un film dont le «héros» serait un vieux? Personne? Non, non! Woody Allen l’a fait. Il signe même avec Whatever Works l’une de ses réalisations les plus toniques et les plus impertinentes. Ce personnage s’appelle Boris. Il est New-Yorkais, comme la plupart des personnages de Woody Allen. Et en plus misanthrope. Dans le bon sens du terme. Ses diatribes sur le monde et la société, le public ne s’en lasse pas. Le film débute même par l’une d’elles, par un planséquence (face caméra à la fin) qui suggère vite que Whatever Works ne sera pas une comédie comme les autres. Il s’agit bien de tordre le cou aux convenances et aux principes, de transformer le bon sens en norme absolue et de montrer enfin que la norme, justement, n’existe pas. Jamais. Nulle part. Aussi ambitieux que paradoxal, direz-vous. Oui et non. Le parcours d’un misanthrope Le dernier Woody Allen affiche apparemment des ambitions très limitées. Aucune star au générique. Nulle présentation préalable dans un gros festival. Une sortie sans fanfare au cœur de l’été. Reste qu’on jubile. Car le résultat est sacrément drôle, d’un bout à l’autre. Mais que s’y passe-t-il au juste? L’affaire repose sur l’opposition des contraires. Boris, excentrique et indépendant, la soixantaine, accueille un jour, on ne sait trop pourquoi et lui non plus, une jeune fugueuse, Melody. Elle est naïve, a quarante ans de moins que lui et fuit ses parents, qui vont bien entendu finir par débarquer. Dans l’intervalle, Melody et John se seront mariés, sans qu’on parle d’amour, ni d’attirance, ni de quoi que ce soit d’approchant. Leurs amis les auront acceptés et les conventions commencé à éclater. Jusqu’à l’implosion? Pas tout à fait… Mais Whatever Works ne se résume guère. Allen y met en scène un imbroglio romantique qui pourrait être celui d’un vaudeville. Tout cela dans une structure classique et novatrice, car fraîche et inventive. Bizarrement légère aussi, malgré le recours des déclarations face caméra, qui alourdissent parfois les fictions. Découverte d’un acteur, Larry David En plus de cette mise en scène légère et circonstanciée, l’essentiel de l’affaire repose sur les épaules d’un comédien qu’on a très peu l’habitude de voir. Larry David, qui avait déjà tenu de tout petits emplois dans d’autres Woody Allen (Radio Days, New York Stories), se voit confié le rôle principal. Il n’y croyait pas lui-même. «J’ai ouvert le scénario et sur la première page, le nom de Boris était partout. Par curiosité, je suis allé à la page 50. Boris était encore là. Puis je suis allé directement à la dernière page et Boris y figurait aussi! Là, j’ai réalisé qu’on m’offrait un sacré rôle!» Voilà ce que l’acteur déclarait à la production après avoir été engagé. N’en revenant visiblement pas lui-même, tant ses congénères se montrent en général demandeurs pour figurer dans un Woody Allen. Et de rajouter, à propos du titre du film, intraduisible en français: «Whatever Works, cela signifie qu’il faut vivre sa vie non pas selon les critères et les règles dictés par la société, et que l’on prétend convenir à la majeure partie des gens, mais selon ceux que dicte votre cœur.» Whatevers Works vaut bien mieux que les deux précédents films de l’auteur new-yorkais, Le rêve de Cassandre (2007) et Vicky Cristina Barcelona (2008). Une gourmandise à ne pas rater, cela va sans dire. Pascal Gavillet © Tribune de Genève 11 août 2009