CANCERS ORL : SIGNES PRECOCES, SIGNES TROMPEURS ET

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CANCERS ORL : SIGNES PRECOCES, SIGNES TROMPEURS ET
CANCERS ORL :
SIGNES PRECOCES, SIGNES TROMPEURS ET SIGNES UTILES.
S. VERGEZ, X. ROSE, J. PERCODANI, J.J. PESSEY, E. SERRANO.
Les cancers des voies aérodigestives supérieures présentent de nombreux pièges
diagnostiques, retardant parfois la prise en charge thérapeutique. L’impact
pronostique d’un retard diagnostique, ainsi que le caractère potentiellement mutilant
du traitement chirurgical de certaines localisations ORL évoluées, nous imposent de
connaître les signes précoces parfois banals des cancers ORL.
Avant de détailler les signes utiles, localisation par localisation, il convient d’évoquer
quatre situations cliniques communes à toutes. Tout d’abord, l’altération de l’état
général constitue un véritable dénominateur commun. La situation stratégique
qu’occupe le carrefour aéro-digestif sur l’alimentation permet parfois d’avoir une
altération précoce de l’état général. La présence d’adénopathies cervicales est
aussi un signe clinique qui doit faire évoquer, surtout en présence de facteurs de
risque, un processus expansif des voies aérodigestives supérieures. Moins
fréquemment, nous pouvons être en présence de signes en rapport avec des
localisations
secondaires
(pulmonaires,
hépatiques,
voire
osseuses
ou
cérébrales). De façon occasionnelle, un syndrome paranéoplasique peut
également révéler un primitif des voies aérodigestives supérieures.
I. FOSSES NASALES – SINUS.
Les localisations rhinosinusiennes font facilement l’objet d’un diagnostic tardif, et ce,
pour deux principales raisons :
-
la profondeur des lésions, rendant incontournable l’examen spécialisé ;
-
la symptomatologie d’allure bénigne, faussement rassurante, nous imposant
une vigilance toute particulière devant une pathologie résistante au traitement
médical.
Cependant, le caractère strictement unilatéral, et permanent des signes
fonctionnels doit alerter le clinicien. Néanmoins, les lésions rhinosinusiennes ont une
symtomatologie
très
variable
pouvant
nous
égarer
vers
des
pathologies
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ophtalmologiques, neurologiques ou dentaires. Peuvent se rencontrer : des algies
dentaires, une gêne au port de la prothèse dentaire, voire une névralgie faciale
dans le territoire sous-orbitaire. Une obstruction nasale, progressive, apparaît
précocément si le primitif est nasal et plus tardivement si ce dernier est sinusien. Une
diplopie, sans paralysie oculomotrice évoque une pathologie ethmoïdale.
De façon plus objective, il est parfois possible de constater en consultation un
écoulement nasal séro-purulent, muco-sanglant voire une épistaxis unilatérale
répétée. Des déformations du massif facial peuvent apparaître avec une voussure
de l’angle interne de l’œil, une tuméfaction jugale, une exophtalmie, un œdème
palpébral…
Lors de l’examen physique, il convient de ne pas négliger l’inspection et la palpation
de la cavité buccale, facilement accessible. Les vestibules gingivo-jugaux, gingivolabiaux, les gencives et le voile peuvent présenter une voussure convexe. Une
simple inspection/palpation du massif facial recherche une asymétrie faciale, une
exophtalmie,…
II. NASOPHARYNX
- Epidermoïde, UNCT
L’extême lymphophilie de cette pathologie explique que la présence d’adénopathies
cervicales constitue le motif de consultation dans 40% des cas. Puis, par ordre de
fréquence, apparaissent les signes otologiques (25% des cas) puis rhinologiques
(20% des cas). L’hypoacousie décrite est progressive, mécanique, provoquée par
une obstruction tubaire. Cette hypoacousie peut être uni ou bilatérale, et associée ou
non à des acouphènes, à une autophonie ou à une otalgie. Une obstruction nasale
progressive, uni ou bilatérale, peut s’associer à une rhinorrhée séro-sanglante, et
une rhinolalie. Enfin, compte-tenu de la contiguïté du cavum avec la base du crâne,
les fentes orbitaires et les sinus caverneux sont parfois présents des déficits
neurologiques (diplopie), des névralgies…
- Lymphome
Le lymphome se distingue essentiellement par la présence d’adénopathies, le plus
souvent fermes, élastiques, hautes, indolores, uniques ou multiples et bilatérales.
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Une hypoacousie et une obstruction nasale progressives peuvent aussi s’intaller
mais les douleurs et déficits neurologiques sont rares.
Cliniquement, une tumeur du cavum peut être suspectée devant une rétraction d’un
hémivoile, une voussure indurée à la palpation. L’otoscopie permet de visualiser une
otite séro-muqueuse voire une rétraction tympanique.
III. OROPHARYNX
Une lésion de la loge amygdalienne provoque généralement une dysphagie
unilatérale, à la salive puis aux aliments. Cette gêne devient douloureuse avec le
temps. Plus tardivement, apparaît une otalgie associée à des crachats sanglants.
Notons que l’adénopathie cervicale est révélatrice dans 30% des cas.
Cliniquement, à l’inspection oropharyngée il est nécessaire d’adjoindre une palpation
amygdalienne. Deux localisations sont de diagnostic plus délicat : le sillon amygdaloglosse et l’amygdale intra-cryptique.
Une lésion de la paroi postérieure de l’oropharynx reste longtemps asymptomatique,
et le diagnostic est parfois fortuit. Des signes frustes sont parfois négligés comme les
paresthésies pharyngées et la sensation de corps étranger. Tardivement s’installent
la dysphagie, l’odynophagie et l’otalgie.
IV. HYPOPHARYNX
Le maître symptôme d’une tumeur du sinus piriforme est la dysphagie, présente dans
trois quarts des cas, à la salive puis aux aliments. Une tuméfaction cervicale ainsi
qu’une otalgie sont fréquentes. Plus tardivement, avec l’extension laryngée,
apparaissent une dysphonie et des crachats sanglants.
V. LARYNX
Les signes d’appel d’une lésion laryngée sont la dysphonie et la toux. La dysphonie
est précoce et d’aggravation progressive. La toux est chronique, sèche, quinteuse,
improductive, et spasmodique. Des paresthésies laryngées et un hemmage sont
fréquents. Plus tardivement peuvent apparaître une dyspnée laryngée, une
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dysphagie et une otalgie. Notons que selon l’épicentre tumoral, la symptomatologie
change. Par exemple la dysphonie est précoce et les adénopathies rares dans le
cadre d’une tumeur du plan glottique. Autre exemple, une lésion de la margelle
laryngée entraine des symptomes plutôt pharyngés.
CONCLUSION
Il convient de rester à l’écoute des doléances fonctionnelles alléguées par le patient.
L’absence d’évolution favorable sous traitement d’une situation clinique d’allure
bénigne peut faire envisager une consultation spécialisée. Une connaissance précise
des facteurs de risque oriente les soupçons cliniques. Enfin un examen clinique ORL
exhaustif, avec une palpation cervicofaciale et endobuccale, permet parfois de
diagnostiquer de petites tumeurs au pronostic favorable.
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