La Lame à l`œil

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La Lame à l`œil
La Lame à l’œil
Cellules, cylindres, germes
et parasites urinaires
A. BRIEND-MARCHAL
Laboratoire Vébiotel - 41 bis avenue Aristide-Briand - 94110 Arcueil
L’examen microscopique du culot (photo 1) permet de mettre en évidence les cristaux, mais également les cylindres, les
cellules normales ou anormales qui desquament dans l’urine, les éléments responsables d’infection (bactéries et levures) et
les rares parasites du tractus urinaire.
cellules épithéliales de morphologie normale, ce qui peut
être confondu avec des amas de cellules carcinomateuses.
Les tumeurs vésicales d’origine épithéliale, et en particulier
le carcinome transitionnel de la vessie, sont les plus fréquents au sein des néoplasies du tractus urinaire, mais il
existe aussi des tumeurs d’origine mésenchymateuse bénignes (fibromes) ou malignes (sarcomes).
Les carcinomes desquament plus volontiers que les sarcomes, mais pas systématiquement, surtout en début d’évolution. Aussi, l’absence de cellules vésicales suspectes sur
le culot ne doit en aucun cas faire éliminer l’hypothèse
d’une origine néoplasique.
Photo 1 : Montage d’une goutte d’urine entre lame et lamelle.
■
Les cellules vésicales
Les cellules épithéliales rénales et vésicales desquament
physiologiquement en petit nombre dans l’urine et sont
facilement identifiables (photo 2).
Les cellules rénales, petites et rondes, ont un noyau rond et
une chromatine fine, un cytoplasme basophile homogène
sans vacuole et un contour régulier.
Les cellules vésicales sont de plus grande taille et présentent un noyau rond à chromatine mottée et un cytoplasme
clair à contour plus anguleux (lié à la kératinisation).
Lors d’infection bactérienne du tractus vésical, l’inflammation peut entraîner une desquamation très marquée de
Photo 2 : Cellules épithéliales vésicales normales (x 1000).
Microscopiquement, lorsqu’il y a desquamation cellulaire,
une population augmentée à très augmentée de cellules
vésicales isolées ou groupées en amas est notée. Au fort
grossissement, ces cellules présentent des atypies cytonucléaires comme une anisocytose et une anisocaryose marquées, une basophilie cytoplasmique nette, une chromatine
fine ou irrégulière et un ou plusieurs nucléoles (photo 3).
■
Les cylindres
Les cylindres sont liés à l’agrégation de protéines et de débris
cellulaires dans les tubules rénaux et se retrouvent parfois
dans l’urine. Leur formation est liée à la prise de médicaments, à des dysfonctionnements métaboliques ou encore
à des intoxications. Les cylindres uniquement constitués de
protéines sont dits hyalins (photo 4). Lorsque s’ajoutent aux
Photo 3 : Cellules épithéliales atypiques sur un carcinome transitionnel vésical (MGG, x 500).
– Pratique Vét Anim Comp - février 2006 - N° 24 –
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Coordinatrice scientifique : Brigitte CLOET-CHABRE - [email protected]
Photo 4 : Cristaux de cystine (flèches rouges),
de phosphates ammoniaco-magnésiens (flèches
jaunes), d’oxalate de calcium (flèches vertes) et
cylindres granuleux (flèches noires) (x 400).
En pratique
• Toute infection du
tractus urinaire doit être
traitée avant de faire
une recherche de cellules
atypiques sur une
suspicion de carcinome
transitionnel vésical
• Tout amas de cellules
suspect à l’examen du
culot urinaire sans
coloration doit amener
à réaliser une
cytocentrifugation et
un examen des cellules
après coloration au
May-Grünwald-Giemsa
Photo 5 : Germes en grand nombre dans un
culot urinaire (x 400).
protéines des hématies, on parle de cylindres
hématiques. Lorsque s’ajoutent des cellules, on
parle de cylindres granuleux et lorsque ce sont
des globules gras, de cylindres graisseux.
Les cylindres peuvent être observés dans l’urine
en petit nombre (moins d’un par champ au
grossissement x 40) mais sont pathologiques
lorsqu’ils sont en plus grand nombre.
■
Les infections urinaires
bactériennes
La technique de prélèvement influence la fiabilité des examens d’urines, notamment la bactériologie. La cystocentèse, qui exclue toute
contamination lorsque les conditions d’asepsie
sont réunies, est la technique à privilégier.
L’urine est maintenue stérile grâce à de nombreux mécanismes physiologiques qui préviennent le tractus urinaire contre les infections (pH urinaire acide,
concentration urinaire élevée en urée, présence de protéines de Tamm-Horsfall, pression régnant dans l’ensemble du
tractus urinaire et limitant les infections ascendantes par les
bactéries, notamment d’origine fécale).
Une inflammation, quelle que soit sa cause (calcul, néoformation, irritation par administration de substances toxiques
éliminées par le rein, anomalie morphologique, sondage),
ou une immunosuppression, quelle que soit sa cause
(administration de corticoïdes, d’immunomodulateurs),
ainsi que certaines maladies systémiques (FeLV, FIV, diabète
sucré, hypercorticisme) sont des facteurs favorisant des
infections urinaires.
Les germes les plus souvent isolés sont les entérobactéries,
les protéus, les staphylocoques, les pseudomonas et les
moraxellas (photo 5). Généralement, l’infection urinaire
n’est liée qu’à un seul germe. Toutefois, des infections
impliquant deux, voire trois bactéries sont possibles. Ils
sont souvent associés à des cellules épithéliales (desquamation liée à l’inflammation) et à des cellules leucocytaires
(polynucléaires neutrophiles et macrophages).
L’examen cytobactériologique permet d’isoler le germe
responsable de l’infection et de tester sa sensibilité aux différentes familles d’antibiotiques disponibles.
■
Les infections urinaires
mycosiques et parasitaires
Candidoses urinaires
Les infections mycosiques (photo 6) du tractus urinaire sont
très rares. Ce sont des candidoses qui apparaissent à la
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Photo 6 : Levures ( x400).
Photo 7 : Capillaria sp. (x 400).
suite d’une immunodépression au sein de l’organisme :
infection par le FeLV ou le FIV, présence d’un diabète sucré,
d’un hypercorticisme spontané ou d’une administration
prolongée de corticoïdes.
Pour conclure à une mycose urinaire “vraie” et ne pas interpréter une éventuelle contamination des urines par des
levures ou des champignons, il faut réaliser plusieurs prélèvements par cystocentèse.
Parasitoses urinaires
L’infection par Capillaria plica (photo 7) est très rare. Les
Carnivores se contaminent par ingestion d’un ver de terre
lui-même infecté par le parasite. Les symptômes sont généralement frustes, mais des œufs de Capillaria peuvent être
mis en évidence à l’examen du culot.
■
Conclusion
Les éléments observables physiologiquement sur un culot
urinaire doivent être correctement identifiés afin de déterminer les éventuels éléments atypiques ou artéfactuels. Ces
derniers sont évités en respectant les délais impartis pour
l’examen et la mise en culture des urines.
Lecture pratique
Baker R, Lumsden JH (2001). Atlas de cytologie du chien et du
chat. Editions Masson, Paris.
Cotard JP (1993). Néphrologie et urologie du chien et du chat.
Edition PMCAC, 487p.
Hebert F (2004). Guide pratique d’uro-néphrologie vétérinaire.
Editions Med’Com, 250p.
Raskin RE, Meyer DJ (2001). Atlas of canine and feline cytology.
WB Saunders, Philadelphie, 430p.
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