La compétitivité artisanale : atouts, freins et

Transcription

La compétitivité artisanale : atouts, freins et
< Cahier de synthèse • Octobre >2013
La compétitivité
artisanale : atouts, freins
et spécificités
Cahier de synthèse de l’Institut Supérieur des Métiers
Établi sous la responsabilité
d’Anne de Blignières-Légeraud,
Présidente de l’ISM
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
Sommaire
Préface.. .......................................................................................................................... 3
1
“Compétitivité” : de quoi parle-t-on ? ........................................................... 4
• L’approche productiviste par les coûts (compétitivité “prix”)....................... 4
• L’approche High Tech par l’innovation (compétitivité “hors prix”)............... 5
• L’approche universelle par la qualité (compétitivité “par le haut”)............. 6
2
Indicateurs et paramètres “économiques”
de la compétitivité artisanale....................................................................... 7
•L’innovation au quotidien : les atouts de “l’orientation client”
et du “dialogue professionnel”.. ................................................................................. 7
•La performance industrielle : des compétences de conception
et de fabrication uniques, une réactivité recherchée............................................ 8
•Le potentiel d’exportation : des savoir-faire rares,
des prestations sur mesure ...................................................................................... 9
•L’apport des “nouveaux entrants” : une plus grande maturité
des projets, des compétences en management .................................................... 10
3Principaux freins au développement
de la compétitivité artisanale ? ................................................................................... 12
« La compétitivité >
n’est pas une fin
en soi, mais une
condition de
la croissance,
de l’emploi et
de la cohésion
sociale. »
CFDT, CFE-CGC,
CFTC, CGPME,
MEDEF, UPA :
Approche
de la compétitivité
française, juin 2011
• Le poids de la fiscalité............................................................................................ 12
• Le coût de la complexité réglementaire. . ......................................................... 13
• Le frein de l’instabilité............................................................................................ 14
4Un consensus sur l’objectif du “développement durable”.................... 15
• L’approche des partenaires sociaux.................................................................. 15
• De nouveaux paramètres à valoriser................................................................ 16
ANN…X…
2
Principales sources utilisées ................................................................................. 18
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
PRÉFACE
Ce nouveau Cahier de Synthèse se donne pour objectif – en partant des études déjà conduites > « Notre époque
vit la fin du “tout
par l’ISM – de tenter une première approche des spécificités propres aux métiers de l’artisanat
quantitatif” : le
en termes de compétitivité.
qualitatif, en tout,
reprend valeur
au-delà des prix. »
Cette démarche suppose d’intégrer ici l’ensemble des composantes – quantitatives et qualitatives –
susceptibles d’entrer dans la définition de la compétitivité.
Marc Halévy :
L’entreprise nouvelle
sous toutes ses facettes,
Revue Management,
juillet 2013
Elle suppose d’interroger toute la chaîne de valeurs professionnelles, éthiques et sociales dans laquelle
s’inscrit pour l’entreprise artisanale « l’écosystème » de la compétitivité :
• valeur produite par l’entreprise dans son environnement direct en termes de richesses,
mais aussi de réponse aux besoins locaux, de formation, d’emploi et de promotion sociale ;
• valeur investie par le professionnel dans le perfectionnement quotidien de la qualité de
son offre, des produits et des services ajoutés ;
• valeur perçue par le consommateur en matière d’usage, d’authenticité et de durabilité.
L’importance stratégique du savoir-faire, mais aussi des capacités d’adaptation et d’innovation des
entreprises artisanales dans leur faculté de résistance à la crise économique est présente au sein de
tous les secteurs, et particulièrement bien confirmée par les dernières études de l’ISM sur la soustraitance industrielle et l’exportation.
Par ailleurs, l’ensemble des études sectorielles ou générales conduites par l’ISM depuis le début de
la crise permet de faire ici un point synthétique sur d’importants facteurs d’évolution des profils
d’entrepreneurs, des modes d’installation et des stratégies de développement des entreprises artisanales, qui ont des incidences importantes en matière de compétitivité.
Ces éléments, aujourd’hui dispersés au sein de nombreuses approches essentiellement quantitatives, méritaient de faire l’objet d’un nouveau Cahier de Synthèse de l’Institut Supérieur des
Métiers, centré sur les atouts de compétitivité transversaux à l’ensemble des activités du secteur, face à la crise, mais aussi sur les freins et écueils à prendre en compte dans les politiques
publiques pour valoriser leur potentiel de développement.
Anne de Blignières-Légeraud
Présidente de l’Institut Supérieur des Métiers
>
L’objectif des Cahiers de synthèse de l’Institut Supérieur des Métiers est d’apporter, sur une thématique
d’actualité, un éclairage utile aux prises de décision des dirigeants d’organisations professionnelles et
des responsables politiques ; un éclairage utile aussi pour la valorisation de cet univers encore trop
méconnu des atouts et potentiels de l’entreprise artisanale en matière de développement durable,
d’économie de proximité, de formation professionnelle et de stabilité de l’emploi.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
3
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
1. “Compétitivité” : de quoi parle-t-on ?
Dans son acception économique la plus générale, le concept de compétitivité
désigne la capacité d’une offre de produits ou de services à maintenir et développer ses parts de marché : il invite à mesurer des gains ou des pertes dans la
“position concurrentielle” de cette offre sur son propre marché. Cette mesure
s’applique aussi bien à l’échelle de l’entreprise, quels que soient sa taille et son
métier, qu’à celle d’un territoire, d’un secteur d’activité ou de toute une nation.
Le débat national sur la compétitivité s’est centré sur les performances des produits “made in France” dans les balances de la mondialisation, ouvrant une large
place aux problématiques des multinationales, mais loin des défis quotidiens
de millions d’entreprises sur leurs propres marchés locaux ou régionaux… Il a
également privilégié deux approches, principalement industrielles et technologiques, qui laissent trop souvent les ressorts spécifiques de l’activité artisanale
hors du champ de la réflexion.
L’approche productiviste par les coûts
(compétitivité “prix”)
Cette première approche – essentiellement quantitative et “productiviste” – a longtemps monopolisé le débat public et la négociation entre partenaires sociaux, en focalisant l’attention sur
la problématique de réduction des coûts de production qui déterminent la compétitivité “prix”
de l’économie française en général, et de son industrie en particulier, sur le marché mondial de
l’échange de biens.
L’activité artisanale n’échappe pas plus que les autres secteurs aux contraintes de cette compétitivité “coûts”, et de la compétitivité “prix” qui en résulte directement : coût des approvisionnements, des équipements, de l’énergie, du transport, du travail, de la fiscalité, etc. Mais
les stratégies de sous-traitance, de délocalisation ou d’optimisation fiscale lui sont radicalement
étrangères, et elle n’a pas l’œil rivé sur l’évolution de la balance des paiements internationaux.
Ses marges de manœuvre dans la recherche de réduction des coûts sont donc généralement
beaucoup plus limitées : l’entreprise artisanale n’assure son équilibre – et a fortiori son développement – que dans une logique de proximité, de service, de différentiation, et ne saurait survivre
dans la spirale industrielle du prix le plus bas.
Dans toutes les tailles d’entreprise, et tous les secteurs d’activité, comme en conviennent aujourd’hui beaucoup d’économistes, le prix reste d’ailleurs le moins puissant des moteurs du
succès : « La plupart des dirigeants français voient dans la baisse des prix la seule réponse pertinente pour combattre la concurrence. S’ensuit une spirale d’échec : la baisse tarifaire conduit à
réduire les coûts ; cette baisse s’opère au détriment de la qualité des produits et du service au
client ; de là une perte mécanique d’attractivité, entraînant mévente et hémorragie de clientèle
au profit des concurrents, déclenchant une nouvelle baisse des prix… »(1)
(1) Pascal Py : Savoir vendre ou mourir. Les règles du jeu de la compétitivité hors prix, Ed. Eyrolles, 2013.
4
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
L’approche “High Tech” par l’innovation
(compétitivité “hors prix”)
À cette tentation bien souvent suicidaire de promouvoir une “compétitivité par le bas”, de
nombreux économistes opposent la nécessité de susciter au contraire une montée en gamme
des hautes technologies dans toutes nos productions. Il s’agit d’une approche principalement
scientifique et “élitiste” de la compétitivité nationale. La problématique principale devient celle
de l’investissement en R&D et du renforcement de l’enseignement supérieur long pour booster l’innovation de rupture, c’est-à-dire la compétitivité “hors prix” des grosses PME, des ETI
et des grandes organisations, les nouveaux thermomètres étant ceux du nombre d’ingénieurs
formés et de brevets déposés chaque année.
Cette vision trop partielle de l’innovation, réduite à des composantes “High Tech” qu’on suppose dériver en droite ligne des activités de recherche, fait peu de cas de la complexité réelle
des processus et des produits innovants capables de conquérir un marché :
« La recherche, lorsqu’elle aboutit, génère une invention qui ne saurait être assimilée à l’innovation. Pour que les entreprises soient innovantes, de nombreux autres éléments fonctionnels et
facteurs organisationnels doivent intervenir, notamment le marketing, le design, la créativité. »(2)
L’approche par l’innovation de rupture, comme la recherche systématique du prix le plus bas,
reste en effet impuissante à rendre compte des motivations implicites ou explicites de la clientèle, qui résident exclusivement dans la galaxie des valeurs attribuées à l’acte d’achat :
• utilité liée au produit ou à la prestation proposée (valeur d’usage) ;
• qualité attribuée au service (pertinence du conseil, respect des délais, efficacité du SAV) ;
• valeurs liées à l’image (appartenance, proximité, authenticité). « Il y a beaucoup plus de pistes
pour travailler sur l’utilité et la qualité d’une offre qu’il n’y en a pour en diminuer le prix. »(3)
Si les facteurs “prix” et ”innovation de rupture” constituaient les principaux déterminants de
la compétitivité, la gamme des produits Apple – qui combine avec génie et au prix le plus fort
des inventions extérieures au Groupe – ne serait pas leader dans sa catégorie. L’automobile
allemande – plus qualitative et plus chère que ses concurrentes – n’aurait connu aucun succès.
Et toute l’industrie française du luxe, où l’artisanat tient de si belles parts, aurait déjà disparue !
(2) Pascal Morand et Delphine Manceau : Pour une nouvelle vision de l’innovation, La documentation Française, avril 2009.
(3) Thierry Guichard : Vous avez dit compétitivité ? Les Echos, 7 novembre 2012.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
5
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
L’approche universelle par la qualité
(compétitivité “par le haut”)
Considérer que la valeur d’usage d’un produit constitue la principale justification, aux yeux du
consommateur, de sa valeur d’échange, permet de fournir une vision beaucoup plus universelle du concept de compétitivité, où le monde des artisans peut se reconnaître.
Personne n’achète un prix. Ce que Michael Porter analysait déjà en 1986 comme “l’avantage
concurrentiel” d’une entreprise est la résultante de la chaîne de valeur créée par son “orientation client” et perçue comme telle par le consommateur :
« Toute entreprise peut se concevoir comme ensemble d’activités destinées à concevoir, fabriquer, commercialiser, distribuer et soutenir son produit. L’ensemble de ces activités peut être
représenté par une chaîne des valeurs… En termes de concurrence, la valeur est la somme que
les clients sont prêts à payer ce qu’une entreprise leur offre. »(4)
Cette approche par la valeur ne se limite plus aux problématiques de réduction des coûts ou de
développement des hautes technologies. Elle inclut les multiples facettes qualitatives des relations
qui peuvent s’établir au sein d’une économie de proximité, et de l’innovation “incrémentale” qui
caractérise l’univers des métiers. Elle mobilise aussi les nombreux ingrédients qui nourrissent
la valeur perçue d’une offre aux yeux de sa clientèle, comme la créativité, la marque, le design,
“l’excellence de la main”, l’authenticité, la proximité, la qualité du service, etc.
La notion de compétitivité renvoie ici à l’écosystème des valeurs objectives et subjectives
dans lequel l’offre s’inscrit, pour l’entreprise aussi bien que pour ses clients. Elle ne laisse personne à l’écart de la compétition mais concerne la totalité des métiers, et mobilise l’ensemble
des niveaux de formation, dans les ateliers, les chantiers et les lieux de vente.
« C’est en adoptant une vision élargie de la compétitivité, fondée sur la montée en gamme de
toutes nos productions, sur la valorisation de tous nos atouts et talents, sur la qualification de
tous nos salariés que nous parviendrons à faire de la compétitivité davantage qu’un slogan : une
réalité mobilisatrice pour l’ensemble des Français. »(5)
(4) Michael Porter : L’Avantage Concurrentiel, InterEditions, 1986.
(5) Emmanuel Combe, professeur à l’Université de Paris I : La compétitivité n’est pas toujours là où l’on croit, Les Echos, 16 octobre 2012.
6
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2. Indicateurs et paramètres “économiques”
de la compétitivité artisanale
La compétitivité de l’entreprise artisanale est par définition irréductible (voire
radicalement étrangère) aux ratios quantitatifs de productivité, de rentabilité et
de croissance mondiale mesurés par les analystes financiers et les actionnaires.
Elle reste aussi très largement absente de la statistique nationale, qui privilégie
systématiquement le critère de la taille sur celui du métier, et ne dispose pas des
outils nécessaires pour établir des mesures de “positionnement concurrentiel”
sur un aussi grand nombre d’activités, de spécialités, de marchés différents…
Pour se faire une idée précise des atouts de compétitivité transversaux à l’ensemble des métiers de l’artisanat, il faut s’intéresser aux performances qui les
caractérisent dans la promotion, l’adaptation et la diffusion quotidienne de
l’innovation, mais aussi à la rareté reconnue de leur savoir-faire, comme en témoigne la fidélité de ses commanditaires industriels et de ses clients étrangers,
et au potentiel induit par l’arrivée des “nouveaux entrants”.
L’innovation au quotidien :
les atouts de “l’orientation client” et du “dialogue professionnel”
Contrairement à l’idée reçue, le potentiel d’innovation de l’entreprise artisanale est considérable,
bien qu’il soit difficile à quantifier, parce qu’il est multiforme, permanent, et ancré dans le système
de relations individuelles que le dirigeant entretient avec ses clients et ses salariés.
« L’innovation artisanale est bien rarement le fruit d’une invention pure et simple de techniques
ou de produits nouveaux, mais celui de nouvelles combinaisons de ressources internes ou
externes à l’organisation. […] L’artisan, parce qu’il traite davantage avec une clientèle qu’avec
un marché, est particulièrement bien placé pour faire évoluer son offre au “feeling” et y introduire des innovations commerciales ou techniques que la méthode des essais et des erreurs lui
permettra d’affiner. On commence par “essayer pour voir” ce qui pourra le mieux répondre aux
attentes explicites ou implicites de tel ou tel client. L’objectif d’industrialisation n’étant pas premier, la démarche peut sembler moins rationnelle, mais elle reste plus libre et plus spontanée. »(6)
L’innovation artisanale en effet ne consiste pas principalement à introduire un produit radicalement nouveau sur un quelconque marché (innovation de rupture). Elle reste pourtant quotidienne
(innovation incrémentale) à travers la volonté de perfectionnisme qui caractérise les métiers, et
l’organisation si particulière d’une entreprise où le patron partage presque toujours avec ses employés les tâches de production, d’écoute individualisée de la clientèle et de veille technologique.
La nécessité de s’adapter le plus rapidement possible aux nouveaux matériaux du développement durable et de la transition énergétique, aux nouveaux outils de travail issus du numérique,
comme aux contraintes de plus en plus nombreuses des réglementations ou des labels de qualité, constituent autant de défis que la majorité des artisans relèvent avec passion.
(6) Cahier de synthèse ISM : L’innovation “combinatoire” au cœur de l’artisanat, avril 2007.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
7
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
La première exploitation concrète des procédés de “publication assistée par ordinateur” (PAO) dans
les travaux d’imprimerie ou la conception et la construction des premières maisons à ossature bois,
pour ne citer que ces deux exemples, sont passées par des entreprises artisanales avant de s’imposer comme incontournables ou particulièrement performantes dans ces deux secteurs d’activité.
« Par son implantation disséminée sur tout le territoire national, sa réactivité, sa connaissance
des besoins concrets d’une clientèle locale, l’artisanat reste également l’ambassadeur, le prescripteur et le diffuseur principal des nombreuses innovations de produits, de process ou de
services qui affectent les différents métiers, au service du “développement durable” de toute la
société, innovations dont il est souvent lui-même l’inventeur. […] Le dirigeant d’entreprise artisanale donne l’impulsion d’un changement, suggéré par la relation quotidienne qu’il entretient
avec son environnement professionnel, ses clients et ses ouvriers, mais c’est l’intensité de cette
relation entre acteurs qui va crédibiliser sa démarche et la faire aboutir. »(7)
En matière d’innovation, les vertus d’écoute des demandes particulières du client, de recherche
de solutions sur mesure et de concertation avec les salariés de l’entreprise restent en effet essentielles à l’aboutissement de n’importe quel projet : c’est cette “orientation client” et ce “dialogue
professionnel” permanent qui construisent la valeur d’une offre nouvelle et assurent sa faisabilité.
Cette conception de “l’organisation du travail participative”(8) que l’artisan pratique souvent sans
le savoir, et dont beaucoup de grandes organisations s’emparent aujourd’hui dans leurs nouvelles
stratégies de management, ouvre d’ailleurs une voie de réconciliation importante entre l’éthique
et l’économie, puisqu’elle repose sur la reconnaissance du professionnalisme des collaborateurs
plutôt que sur la recherche effrénée du profit immédiat… Pourquoi ces critères de performance
sociale n’auraient-ils pas leur place, à part entière, dans la définition de la “compétitivité” ?
La performance industrielle :
des compétences de conception et de fabrication uniques,
une réactivité recherchée
Une étude 2012 de l’ISM(9) a fait sortir de l’anonymat un aspect peu connu des performances techniques de l’artisanat de fabrication : 75 % du nombre total des entreprises de sous-traitance industrielle sont artisanales. Elles regroupent 90 000 salariés, soit le quart des emplois du secteur, et travaillent souvent pour des secteurs de pointe comme la plasturgie, l’aéronautique ou l’aérospatiale…
« Ces artisans sous-traitent en bout de chaîne. Mais, sans eux, la Peugeot 508, l’A380, le Rafale
ou le Queen-Mary 2 n’auraient jamais vu le jour. »(10)
Le travail d’enquête de l’ISM a permis d’établir ici deux indicateurs de compétitivité particulièrement significatifs :
• 85 % des entreprises interrogées interviennent en sous-traitance de “spécialité” c’est-àdire lorsque le donneur d’ordre ne dispose pas du savoir-faire requis pour fabriquer la pièce ;
• près du tiers d’entre elles ont développé des bureaux d’études et proposent également un
apport en conception/innovation à leurs commanditaires.
(7) Cahier de synthèse ISM : Atouts et potentiels de “l’esprit d’entreprendre” en artisanat, janvier 2012.
(8) Jacques Rojot : Les nouvelles stratégies sociales des entreprises : les modes de gestion participatifs, Dalloz, 1995.
(9) L’artisanat de sous-traitance industrielle. Enquête auprès de 1 000 entreprises, mai 2012.
(10) Audrey Emery : La sous-traitance en quête de reconnaissance, Le Point, 10 mars 2011.
8
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
Ces entreprises sont choisies en premier lieu pour leur haut degré de compétence technique,
mais aussi pour leur réactivité face aux contraintes ou aux imprévus de la production, et pour
la relation de confiance établie avec leur client. Une relation de confiance qui évite à beaucoup
d’entre elles les affres de l’appel d’offres, mais tourne souvent à leur désavantage : l’essentiel de
l’activité, formalisé par de simples bons de commandes, ne fait l’objet d’aucun contrat ; si bien
que, pour près de la moitié de ces entreprises, la visibilité du carnet de commande reste inférieure à un mois.
« L’acheteur sait aussi qu’il lui sera plus facile d’obtenir les modifications en cours de travail,
modifications de plus en plus fréquentes dans les industries travaillant à flux tendu, notamment
grâce au contact direct avec le patron qui caractérise les entreprises artisanales. »(11)
Le potentiel d’exportation :
des savoir-faire rares, des prestations sur mesure
Selon une autre étude de l’ISM(12), près du tiers des exportateurs français sont des entreprises
artisanales, principalement positionnées dans le secteur de l’industrie manufacturière.
Les deux tiers de ces 35 000 entreprises, qui travaillent essentiellement en B to B, bénéficient
d’une image extrêmement positive auprès de leur clientèle, parce qu’elles détiennent un savoirfaire rare – voire unique – à l’échelle nationale ou internationale, souvent protégé par le biais
de dépôts de marques, modèles et brevets, et délivrent des prestations sur mesure.
Ce double indicateur de compétitivité technique s’enrichit ici d’un indicateur d’attractivité du
savoir-faire artisanal français à l’échelle internationale particulièrement important : dans 64 % des
cas, la première exportation se trouve déclenchée par la sollicitation directe d’un client étranger
(le quart seulement des entreprises artisanales exportatrices se sont montrées proactives pour
initier leurs premières ventes à l’étranger).
La part du marché artisanal dans les exportations françaises (4,3 milliards d’euros, 50 000 emplois
induits) reste relativement modeste au regard de son potentiel de développement.
L’étude ISM en explique les raisons : « Dans les deux tiers des entreprises, c’est le dirigeant luimême qui est l’acteur central de la démarche. Il n’existe un responsable export dédié que dans
5 % des cas. Cette impossibilité de déléguer est le talon d’Achille de l’exportation artisanale :
le manque de temps du dirigeant est en effet le principal point faible souligné. Il conduit souvent à une sous-exploitation des opportunités par les entreprises. Un autre point faible réside
dans la faiblesse des investissements commerciaux susceptibles d’être réalisés. La démarche est
donc généralement peu formalisée et structurée. Le plus souvent (dans 76 % des entreprises),
les exportations se réalisent en direct avec le client, sans intermédiaire […] Quel que soit le
niveau d’implication, l’activité d’exportation est vécue positivement par les artisans. Le potentiel “marché” existe et près de 46 % des artisans exportateurs ont pour objectif prioritaire de
développer le chiffre d’affaires de l’entreprise à l’exportation. »(13)
(11) Thomas Hubert : L’artisanat pilier du monde industriel, Le monde des artisans, mars-avril 2013.
(12) ISM : Les exportateurs de l’artisanat : portraits et trajectoires de développement sur les marchés internationaux, février 2012.
(13) ISM : Op. cit., loc. cit.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
9
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
L’apport des “nouveaux entrants” :
une plus grande maturité des projets, des compétences en management
Parmi les facteurs de développement de la compétitivité artisanale, il semble indispensable
d’inclure aussi ceux qui relèvent de l’évolution des profils de dirigeants, attentivement suivis par
l’ISM depuis plusieurs années, au niveau sectoriel comme au niveau national.(14)
On observe en effet que 34 % des créateurs ou des repreneurs qui s’installent aujourd’hui dans
l’artisanat ont acquis leur première expérience professionnelle au sein d’une PME ou d’une
grande entreprise, dans un métier presque toujours différent. Ces nouveaux entrants se décident
souvent plus tard que les dirigeants issus de la filière classique “apprentissage/compagnonnage/
installation” : entre 2006 et 2010, parmi les créateurs-repreneurs, la part des seniors de plus de
50 ans n’est pas loin de doubler (de 10 % à 18 %).
Beaucoup d’entre eux avaient un statut de cadre dans leur première expérience professionnelle,
si bien que le niveau de formation initiale des créateurs-repreneurs et leurs compétences en
management ne cessent de s’élever : 26 % d’entre eux sont diplômés de l’enseignement supérieur en 2010 (contre 15 % seulement en 2006). Dans l’artisanat de production industrielle,
c’est déjà le cas d’un dirigeant sur trois.(15)
Ils font aussi évoluer le statut juridique des entreprises artisanales (hors auto-entrepreneurs, de
2000 à 2009, les formes SARL sont passées de 32 % à 46 %), ainsi que l’investissement réuni
dans les coûts d’installation : des coûts désormais supérieurs à 16 000 € pour 35 % des créateurs-repreneurs (contre 22 % seulement en 2002).
Ces moyennes nationales recouvrent de fortes disparités : dans l’artisanat de production industrielle ou de réparation automobile, par exemple, les niveaux d’études et les coûts d’installation
sont sensiblement plus élevés. Elles n’en témoignent pas moins d’une plus grande diversité des
acteurs, en même temps que d’une plus grande maturité des projets d’installation.
La motivation principale des nouveaux entrants n’est pas principalement financière. Elle sanctionne bien souvent une volonté de rupture, face à l’excès de stress et au manque de reconnaissance vécus dans les grandes organisations : « Quitte à gagner moins, de nombreux travailleurs
sont désormais soucieux de préserver ou de retrouver une valeur positive du travail : la fierté
qu’un travail bien fait peut procurer, satisfaction plus proche de l’artisanat que d’une logique de
production exclusivement centrée sur le rendement. »(16)
Il reste que les atouts de “compétitivité prévisionnelle” chez ces nouveaux entrepreneurs de
l’artisanat, sont particulièrement nombreux :
• Issus des classes moyennes ou supérieures de la société, ils rencontrent moins de difficulté
que les autres pour réunir au sein de leur milieu familial et amical une partie des ressources
nécessaires au démarrage de leur activité.
• Face aux banques, leur niveau de formation initiale permet plus facilement de se distinguer
des autres candidats à l’installation, d’argumenter sur la viabilité d’un business-plan, et de se présenter ainsi en véritables porteurs de projet.
(14) Dernière étude ISM : Les entrepreneurs de l’artisanat. Exploitation de l’enquête Insee/Sine 2010, avril 2013.
(15) ISM : Les nouveaux entrepreneurs de l’artisanat de production, juin 2010.
(16) Nathalie Sarthou-Lajus : Un travail, c’est aussi une fierté, Revue Études, septembre 2013.
10
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
• Familiers de la recherche en ligne et des dynamiques de réseaux, ils mobilisent souvent avec aisance le soutien des chambres consulaires et des systèmes d’aides publiques relatifs à leur activité.
• Dans la gestion même de l’entreprise, l’appropriation des outils du numérique ne fera pas
difficulté, etc.
« Le groupe des ouvriers reste le principal pourvoyeur de petits patrons, qu’il s’agisse du groupe
socioprofessionnel antérieur ou de leurs origines sociales. Pour autant, dans un contexte socioéconomique difficile et alors que le marché salarial est moins ouvert et moins sécurisant qu’il y
a une trentaine d’années, les individus d’origine ouvrière sont moins nombreux à suivre la voie
de l’indépendance, alors que des candidats issus des classes moyennes et supérieures, par leur
trajectoire professionnelle et/ou par leurs origines sociales, investissent davantage l’artisanat. Ils
bénéficient d’atouts supplémentaires (capitaux économiques, culturels et sociaux) qui facilitent
leur accès au statut d’artisan et favorisent leur maintien dans cette position. »(17)
>
Les savoir-faire d’excellence du label EPV
Le label Entreprises du Patrimoine Vivant géré par l’Institut Supérieur des Métiers constitue une
marque de reconnaissance publique mise en place en 2005 pour distinguer des entreprises françaises
aux savoir-faire d’excellence. Les critères d’attribution du label illustrent ainsi “par le haut” les principaux
atouts de compétitivité que nous venons de présenter, spécialement en ce qui concerne les performances industrielles et le potentiel d’exportation de nombreuses entreprises du secteur des métiers :
1. Détenir un patrimoine économique spécifique, issu de l’expérience manufacturière, qui peut
être constitué d’équipements ou de documentations techniques rares.
2. Disposer d’un savoir-faire exclusif, ou partagé avec un nombre très limité d’entreprises, reposant
sur la maîtrise de techniques traditionnelles ou de très haute technicité.
3. Bénéficier d’une notoriété et d’un fort ancrage territorial, mesurés par un ou plusieurs critères objectifs d’ancienneté, de localisation historique, de contribution à l’évolution technique d’un
métier ou à son maintien en France, etc.
Les entreprises labellisées opèrent sur des marchés où la France bénéficie d’une image de leader
mondial (mode, parfumerie, décoration, gastronomie…), mais aussi dans des secteurs de pointe où
notre pays dispose de maîtrises exceptionnelles peu connues, que le label EPV contribue à détecter et
valoriser : robotique, mécanique de précision, outillages pour les grandes industries, optique, textiles
techniques, pièces métalliques pour l’aérospatiale ou l’armement, etc.
En septembre 2013, 1 112 entreprises avaient obtenu le label EPV : elles représentent actuellement plus
de 52 000 emplois, et génèrent un chiffre d’affaires annuel de près de 11 milliards d’euros.
Plus des deux-tiers de ces entreprises sont artisanales (moins de 20 salariés), et 74 % d’entre elles
réalisent une partie de leur chiffre d’affaires à l’exportation. Ces entreprises se distinguent également
par leur ancienneté dans le tissu économique français : 24 % ont été créées au XIXe siècle, et 21 %
entre 1900 et 1950.
(17) Caroline Mazaud : Entre le métier et l’entreprise. Renouvellement et transformations de l’artisanat français, thèse de doctorat de sociologie soutenue à l’Université de Nantes en décembre 2009.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
11
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
3. Principaux freins au développement
de la compétitivité artisanale
Les freins au développement de la compétitivité artisanale sont comparables
à ceux que rencontrent toutes les tailles d’entreprise face à la complexité fiscale et réglementaire du système français, et à l’insécurité juridique qui en
résulte trop souvent. Ces freins prennent toutefois des proportions considérables, lorsqu’il s’agit pour un dirigeant isolé et 100 % investi dans sa production
de dégager le temps et les compétences nécessaires pour s’y retrouver dans
le maquis des aides, réduire (légalement) l’imposition de son entreprise, voire
simplement mesurer ses risques dans la rédaction d’un contrat d’embauche.
Le poids de la fiscalité
Il existe en France plus de trois mille dispositifs publics d’aides aux entreprises et 293 niches
fiscales différentes pour optimiser le résultat, c’est-à-dire aussi la marge disponible permettant
d’investir et d’accroître la compétitivité d’une organisation.
Un rapport de la Cour des Comptes a montré en 2009 à quel point les dirigeants d’entreprises
artisanales et de TPE avaient peu recours à ce formidable potentiel “d’optimisation fiscale”, en
calculant ce que représentait alors – par taille d’entreprises – le “taux implicite d’imposition”,
c’est-à-dire l’impôt sur les bénéfices effectivement payé, rapporté à l’excédent net d’exploitation :
un taux de 30 % pour les professionnels sans salarié et les dirigeants de TPE, de 22 % pour les
PME, qui chute à 13 % pour les entreprises de plus de 2000 salariés, et à 8 % seulement pour
les enseignes du CAC 40, en raison notamment d’un “reroutage” systématique des principaux
bénéfices sur leurs implantations internationales, dont l’imposition échappe au fisc français.(18)
Un autre exemple de la pénalisation fiscale des artisans est fourni par l’instauration de la “contribution économique territoriale” (CET) en remplacement de la taxe professionnelle, sous
le précédent quinquennat. La taxe professionnelle était considérée par tous comme un impôt
nuisible parce qu’elle prenait assise sur la masse salariale et les actifs de l’entreprise, pénalisant
ainsi son développement. La CET, assise non plus sur les salaires mais sur la valeur locative des
sites d’exploitation et le volume d’activité, est donc venue alléger sensiblement la charge fiscale
des grosses PME, aux lourds dépens des travailleurs indépendants et des TPE de l’artisanat :
« Cette année, les patrons des petites entreprises payeront en CET jusqu’à cinq à six fois ce
qu’ils payaient en taxe professionnelle. »(19)
(18) Source : Conseil des prélèvements obligatoires de la Cour des Comptes : Les prélèvements obligatoires des entreprises dans une économie globalisée, octobre 2009. – Un rapport publié en juin 2011 par la Direction Générale du Trésor confirme cet écart, sur des taux
implicites d’imposition différents : entre 37,3 % et 39,5 % pour les micro-entreprises (moins de 10 salariés) et les PME, 28 % pour
les ETI, et 18,5 % pour les grandes entreprises. (Direction Générale du Trésor : Le taux de taxation implicite des bénéfices en France,
Trésor-Éco n° 88 de juin 2011.)
(19) Jeanne Dussueil : La CET, cet impôt qui ruine la compétitivité des TPE, Challenges, novembre 2012.
12
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), mesure-phare du “Pacte national
pour la croissance, la compétitivité et l’emploi” présente lui aussi un écueil pour les plus petites
et donc les plus fragiles entreprises du monde artisanal, comme l’a souligné l’UPA : calculé sur la
base du montant des salaires bruts versés par l’entreprise ; il n’est pas ouvert aux très nombreux
artisans qui travaillent en solo ou avec un conjoint collaborateur non salarié, soit plus de 600 000
travailleurs indépendants du secteur des métiers… qui contribueront pourtant au financement
du dispositif par le biais de l’augmentation générale des taux de TVA.
Le coût de la complexité réglementaire
« Redonner à la France de la compétitivité ne concerne pas seulement son économie mais
également son droit dans un pays où, du fait de l’accumulation de plus de 400 000 normes et
de la complexité des procédures, le temps des papiers se révèle plus long que le temps des
chantiers. »(20)
Quel dirigeant de TPE aura les moyens en effet de retrouver tout seul ou de déléguer à un
conseil juridique et fiscal l’identification des articles correspondant à son activité au sein du Code
général des impôts (1 400 pages), du Code du commerce (1 500 pages), du Code des transports
(2 150 pages), du Code des marchés publics (2 160 pages) ou du Code du travail (plus de 10 000
articles, sur 3 400 pages) ?
Les artisans sont les premières victimes de cette inflation réglementaire française, dont le coût
a été estimé par l’OCDE à 3 points du PIB national (60 milliards d’euros). Ils auraient donc tout
lieu de se féliciter des deux cents premières mesures annoncées en juillet 2013 par le Comité
interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP) dans le cadre du “choc de
simplification”, qui inclut par exemple d’importants allégements sur les obligations déclaratives
et comptables des entreprises de moins de dix salariés.
Reste à savoir dans quels délais, et aussi dans quelle proportion, cet ambitieux programme pourra
être mené à bien par les nombreuses administrations publiques qui s’y trouvent impliquées : une
mission parlementaire vient en effet d’évaluer à 29 % – moins du tiers – le taux de réalisation
effective des 348 mesures de simplification déjà engagées en direction des entreprises depuis
2009. « Le large rejet de la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) au sein des administrations de l’État risque d’avoir des effets durables. Ce constat oblige aujourd’hui à se soucier
particulièrement des conditions de réussite de toute nouvelle démarche de modernisation de
l’administration publique d’État. »(21)
(20) Alain Lambert et Jean-Claude Boulard : Rapport de la mission de lutte contre l’inflation normative, mars 2013.
(21) Thierry Mandon : Mieux simplifier. La simplification collaborative, Rapport de synthèse de la mission parlementaire de simplification
de l’environnement réglementaire et fiscal des entreprises, juillet 2013.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
13
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
Le frein de l’instabilité
L’inflation législative, réglementaire et fiscale en France génère une instabilité qui se trouve dénoncée dans tous les secteurs comme le principal obstacle aux projets de développement. Dans le
cas de l’entreprise artisanale, l’absence de visibilité à court et moyen terme a des répercussions
directes sur les décisions d’investissement et d’embauche des dirigeants.
C’est ainsi que, dans la restauration et le bâtiment, le taux de TVA applicable aura changé trois
fois en trois ans : 5,5 % en 2010, 7 % en 2012, 10 % à compter du 1er janvier 2014. « L’ensemble
des fédérations soulignent que les craintes autour d’une possible réévaluation du taux de TVA ont
significativement ralenti l’investissement de leurs adhérents ainsi que leurs décisions d’embauches
qui, du fait de leur flexibilité limitée, sont considérées comme un réel investissement par les restaurateurs. Ceux-ci ont besoin d’une visibilité entre trois et cinq ans, avec la certitude d’un cadre
légal et fiscal stable sur la période, pour engager sereinement des investissements lourds. »(22)
Partout, les enjeux d’emploi sont considérables : Enerplan, le syndicat des professionnels de l’énergie solaire, estime à 15 000 (sur les 25 000 créés) le nombre d’emplois détruits dans la filière
photovoltaïque par l’instabilité permanente des mesures d’aides ou de réduction d’impôts et
des tarifs d’achat de l’électricité par le réseau ERDF ; inversement, la CAPEB évalue à plusieurs
dizaines de milliers le nombre d’emplois prévisionnels sauvés par la dérogation de TVA à 5 %
annoncée fin septembre 2013 pour l’ensemble des travaux de “rénovation énergétique” (isolation et chauffage) chez les particuliers, travaux qui représentent en effet aujourd’hui 30 à 40 %
de l’activité totale du bâtiment.
Mais les freins à la compétitivité ne doivent pas être exclusivement recherchés au niveau des
coûts du travail et de la fiscalité, comme le suggère le débat suscité par le rapport Gallois. Pour
les dirigeants des petites entreprises les plus innovantes, c’est-à-dire les plus susceptibles de
vouloir recruter, la complexité du droit du travail et surtout l’insécurité juridique qui en résulte
freinent les embauches plus qu’elles ne protègent l’emploi. Une enquête menée fin 2012 auprès
de 5 000 petites entreprises innovantes (dont 53 % de TPE) a situé en effet la rigidité du Code
du travail comme principal frein à la compétitivité aux yeux des dirigeants, à égalité avec le coût
des charges sociales, mais loin devant la pression fiscale, les difficultés de recrutement de personnel qualifié et celles de l’accès au crédit bancaire.(23)
« Les excès de la réglementation du travail finissent par générer la “grève de l’embauche” dans
les TPE/PME, indépendamment de toutes considérations sur le coût du travail, la fiscalité et la
concurrence internationale. »(24)
(22) Eurogroup Consulting : Étude économique sur le secteur de la restauration, février 2012.
(23) Sogedev : La compétitivité et les besoins en financement des PME innovantes, octobre 2012.
(24) Bertrand Nouel : Pourquoi réformer le droit du travail est plus important que de discourir sur la compétitivité, Fondation Ifrap, octobre 2012.
14
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
4. Un consensus sur l’objectif
du “développement durable”
Des voix de plus en plus nombreuses se font entendre aujourd’hui pour ne pas
limiter le débat sur la compétitivité aux seuls critères quantitatifs et financiers
de la croissance du PIB, des retours sur investissement et des parts de marché,
pour le recentrer sur les objectifs du bien commun de toute la société. Elles font
écho à l’approche européenne des sommets de Lisbonne (2000) et Göteborg
(2001), qui définissaient déjà la compétitivité d’un pays comme « sa capacité à
améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur procurer un haut
niveau d’emploi et de cohésion sociale, dans un environnement de qualité ».
L’approche des partenaires sociaux
Remettre la compétitivité sous le regard de sa finalité, c’est aussi le sens d’une importante déclaration commune de trois organisations syndicales de salariés et des trois principales organisations d’employeurs, au terme des travaux de la “Délibération sur la politique industrielle et
économique” entamée avec l’agenda 2009 des partenaires sociaux : « La compétitivité n’est
pas une fin en soi, mais une condition de la croissance, de l’emploi et de la cohésion
sociale. Accroître la compétitivité et l’attractivité du territoire, c’est créer davantage de richesses,
améliorer les conditions de travail des salariés, faire progresser le niveau et la qualité de vie
des Français. En outre, la compétitivité doit viser un modèle de croissance équilibrée reposant
sur les trois piliers – économique, social et environnemental – du développement durable. »(25)
Cette approche s’est trouvée confirmée et approfondie dans les années suivantes par une réflexion des mêmes partenaires sur le concept du développement durable : « La croissance de
demain ne saurait être celle d’hier : le modèle des Trente Glorieuses, auquel on se réfère encore
souvent aujourd’hui, est révolu. Dans un monde en pleine mutation, qui comporte des risques,
mais aussi de nombreuses opportunités, il s’agit d’inventer un nouveau paradigme de croissance fondé sur le développement durable et tenant compte des profondes transformations
de la France au cours des dernières décennies. »(26)
Le concept de “développement durable” en effet ne se limite ni à la mesure des positions concurrentielles d’une entreprise sur son propre marché, ou d’un pays dans la compétition internationale, ni à la démarche écologique, entendue comme sauvegarde des ressources naturelles de la
planète. Il entend promouvoir une autre vision des activités humaines dans le monde, qui passe
par la recherche d’un meilleur équilibre entre les dimensions économiques, sociales et
environnementales du développement. Dans cette vision, tous les métiers de l’artisanat et du
commerce de proximité peuvent revendiquer des positions très fortes sur les trois dimensions :
• L’artisanat et le commerce de détail proposent des biens et des services de proximité non
délocalisables sur l’ensemble du territoire national, en réponse à une demande grandissante des
consommateurs en matière d’adaptation des offres, d’authenticité des produits et de qualité
dans la relation (dimension économique).
(25) CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGPME, MEDEF, UPA : Approche de la compétitivité française, juin 2011.
(26) CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGPME, MEDEF, UPA : Réinventer la croissance, mai 2013.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
15
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
• L’entreprise artisanale et le commerce de proximité offrent de l’insertion professionnelle, de
l’emploi “durable” et de la promotion sociale à plus de quatre millions d’actifs sur leurs lieux de
vie (dimension sociale).
• Presque tous les métiers de l’artisanat utilisent en priorité des matières premières naturelles,
proches des lieux de production ou de transformation et inscrites dans l’identité territoriale de
leur région (dimension environnementale).
De nouveaux paramètres à valoriser
Cette nouvelle approche oblige à interroger un grand nombre de critères qui n’entrent pas
habituellement dans le débat sur la compétitivité :
Quelles sont les entreprises françaises qui contribuent le plus fortement, depuis quinze
ans, au maintien du niveau d’emploi des actifs sur l’ensemble du territoire national ?
Entre 1998 et 2008, dans la période où l’industrie française perdait 71 000 salariés par an(27),
l’artisanat a créé 100 000 nouvelles entreprises et généré 600 000 emplois supplémentaires,
soit 25 % du total de la création nette d’emploi en France sur la période considérée(28). Après
l’apparition de la crise et le lancement du régime d’auto-entrepreneur, le nombre d’entreprises
artisanales individuelles a connu une progression spectaculaire, mais sans porter préjudice à
l’emploi salarié : l’effectif des entreprises artisanales employant des salariés reste en effet remarquablement stable sur les cinq dernières années connues : 474 000 au 1er janvier 2007, 473 000
au 1er janvier 2011.(29)
Quelles sont les entreprises françaises qui confirment le mieux leurs capacités d’intégration des jeunes peu ou pas qualifiés et de maintien dans l’emploi des seniors ?
Selon les statistiques de l’URSSAF, les salariés des TPE françaises se caractérisent par des proportions sensiblement plus élevées de jeunes de moins de 30 ans (32 % contre 27 % en moyenne
nationale) et de seniors de plus de 55 ans (15 % contre 10 % en moyenne nationale).(30) C’est
une réponse aux dérèglements signalés par François Hollande dans son discours du Bourget :
« Le marché du travail français souffre de deux grands dysfonctionnements : la précarité et le
chômage des jeunes et le faible taux d’emploi des seniors. »(31) – À quoi il convient d’ajouter ici
qu’en dépit d’un recours très réduit aux dispositifs de formation permanente, l’artisanat assure
souvent beaucoup mieux que les autres secteurs ses formations “sur le tas” : « L’organisation de
l’entreprise artisanale travaillant “sur mesure” n’est pas seulement “qualifiante” mais “apprenante”
par les contraintes directes de sa petite taille, transformées en atouts de formation : l’outil ou le
chantier est nouveau, le patron a dû s’absenter, le client pose des questions, etc. Cette organisation s’avère souvent séduisante pour les attentes du jeune recruté, qui reste demandeur d’une
relation de proximité et d’authenticité dans son initiation au métier, comme de mobilité et de
réactivité dans les marges de manœuvre qui lui sont ouvertes par l’activité. »(32)
(27) Lilas Demmou : La désindustrialisation de la France, Les Cahiers de la DG Trésor, juin 2010.
(28) UPA : Penser autrement, dossier de presse du 19 octobre 2011.
(29) Insee : Entreprises artisanales selon le nombre de salariés, 2007-2011.
(30) Acoss Stat : Conjoncture n° 162, décembre 2012. Il n’existe pas de statistique nationale sur la pyramide des âges dans les métiers de
l’artisanat. Mais le palmarès établi en 2011 par la DARES cite les métiers du bâtiment (47 % de jeunes), ceux de la coiffure (43 %) et
les métiers de bouche (32 %) parmi les secteurs les plus employeurs de salariés âgés de 16 à 29 ans (DARES : Synthèse des principales
données relatives à l’emploi des jeunes et à leur insertion, novembre 2011.)
(31) François Hollande, Discours du Bourget, 22 janvier 2012.
(32) Cahier de synthèse ISM : Atouts et potentiels de “l’esprit d’entreprendre” en artisanat, janvier 2012.
16
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
Quelles sont les entreprises françaises qui présentent les ratios les plus “socialement
acceptables” en termes de partage de la valeur ajoutée et d’écarts de rémunérations ?
La part de la richesse redistribuée aux employés sous forme de masse salariale par rapport à
la richesse créée par l’organisation (valeur ajoutée) décroît en effet proportionnellement à la
taille de l’entreprise : elle est inférieure à 55 % dans les grandes entreprises, et systématiquement supérieure à 75 % dans les entreprises artisanales et l’ensemble des TPE.(33) Quant aux
écarts de rémunérations entre les salariés au Smic et leurs dirigeants, ils s’établissent dans un
rapport moyen de un à quatre au sein des TPE, contre un abîme moyen de un à quarante dans
les grandes organisations.(34)
Quelles sont les entreprises françaises qui sont jugées comme les plus “conviviales” par
leurs collaborateurs ?
L’Observatoire de la vie au travail (OVAT) établit chaque année, sur un échantillon très large
de plus de 5 000 salariés, l’état des lieux du vécu du travail en France, pour identifier les leviers
de la “performance sociale” au sein des organisations. Cette enquête menée depuis cinq ans, et
confirmée par de nombreux sondages d’Opinion Way, indique que les motifs de l’insatisfaction
au travail des Français se concentrent sur trois volets : le manque de transparence, le manque
de proximité, le manque d’enthousiasme. Elle atteste aussi que les salariés qui subissent le
moins ces manques et vivent le mieux leur travail sont ceux des TPE.(35) Nous avons longtemps
cru que la performance générait le bien-être, on s’est trompé : c’est le bien-être qui génère la
performance. Et « le bien-être au travail – explique Christophe Paud – a plus de chance de
s’exprimer dans le cadre de petites structures, où l’information et la communication circulent
sans intermédiation, où le collectif est spontané et donc immédiat. Dans une TPE, il existe un
rapport de proximité non seulement entre l’opérationnel et la hiérarchie, mais aussi entre le
salarié et l’entreprise. Plus l’entreprise est petite, plus les salariés la “respirent”, plus ils sont placés dans une logique permanente de coproduction et de responsabilisation.(36) »
La question des atouts de compétitivité transversaux à l’ensemble des activités de l’artisanat renvoie ainsi à des problématiques beaucoup plus larges, encore fort peu étudiées, qui sont celles
de son potentiel dans l’émergence des nouveaux paradigmes du développement durable,
sous toutes ses dimensions, et de l’économie de proximité, définie de la façon la plus riche
comme une économie de la relation.
>
« Nous sommes au croisement de deux logiques économiques. Nous sortons d’une économie de
masse, de puissance, de taille, de prix, pour aller vers une économie de la proximité, du néo-artisanat,
une société où l’entreprise vivra de sa valeur d’usage. Il s’agira d’une entreprise de petite taille qui vise
à la satisfaction des besoins du client proche d’elle. Nous allons vers une relocalisation des activités
économiques et sociales.(37) »
(33) Jean-Philippe Cotis, directeur général de l’Insee : Partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France,
Insee, mai 2009.
(34) Insee : Effectifs et salaire moyen des dirigeants d’entreprise par taille et secteur, en 2009 et 2010.
(35) Stéphanie Baggio et Pierre-Eric Sutter : La performance sociale au travail, Observatoire de la vie au travail, janvier 2013.
(36) Christophe Paud : Et si la QVT était surtout affaire de management ? Revue de l’Anact, janvier-février 2013.
(37) Marc Halévy : L‘entreprise de demain sera de petite taille et à forte valeur ajoutée, Le journal des entreprises, 26 septembre 2013.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
17
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
2013
Annexe
Principales sources utilisées
BAGGIO Stéphanie et SUTTER Pierre-Eric : La performance sociale au travail, Observatoire de la vie au travail,
janvier 2013.
CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGPME, MEDEF, UPA : Approche de la compétitivité française, juin 2011.
CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGPME, MEDEF, UPA : Réinventer la croissance, mai 2013
COMBE Emmanuel, professeur à l’Université de Paris I : La compétitivité n’est pas toujours là où l’on croit, Les Echos,
16 octobre 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires de la Cour des Comptes : Les prélèvements obligatoires des entreprises dans une
économie globalisée, octobre 2009.
COTIS Jean-Philippe, directeur général de l’Insee : Partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de
rémunérations en France, Insee, mai 2009.
DARES : Synthèse des principales données relatives à l’emploi des jeunes et à leur insertion, novembre 2011.
DEMMOU Lilas : La désindustrialisation de la France, Les Cahiers de la DG Trésor, juin 2010.
DGCIS : Chiffres clés de l’artisanat, édition 2013.
Direction Générale du Trésor : Le taux de taxation implicite des bénéfices en France, Trésor-Éco n° 88 de juin 2011.
DUSSUEIL Jeanne : La CET, cet impôt qui ruine la compétitivité des TPE, Challenges, novembre 2012.
EMERY Audrey : La sous-traitance en quête de reconnaissance, Le Point, 10 mars 2011.
Eurogroup Consulting : Étude économique sur le secteur de la restauration, février 2012.
GUICHARD Thierry : Vous avez dit compétitivité ? Les Echos, 7 novembre 2012.
HALÉVY Marc : L‘entreprise de demain sera de petite taille et à forte valeur ajoutée, Le journal des entreprises,
26 septembre 2013.
HALÉVY Marc : L‘entreprise nouvelle sous toutes ses facettes, Revue Management, juillet 2013.
HUBERT Thomas : L’artisanat pilier du monde industriel, Le monde des artisans, mars-avril 2013.
Institut de l’Entreprise : Quel “choc de compétitivité” pour la France ? octobre 2012.
Institut Supérieur des Métiers : L’artisanat face aux jeunes et aux défis de l’emploi, Cahier de synthèse, novembre 2006.
Institut Supérieur des Métiers : L’innovation “combinatoire” au cœur de l’artisanat, Cahier de synthèse, avril 2007.
Institut Supérieur des Métiers : Les nouveaux entrepreneurs de l’artisanat de production, Rapport d’étude, juin 2010.
Institut Supérieur des Métiers : Atouts et potentiels de “l’esprit d’entreprendre” en artisanat, Cahier de synthèse, janvier 2012.
Institut Supérieur des Métiers : Les exportateurs de l’artisanat : portraits et trajectoires de développement sur les marchés
internationaux, Rapport d’étude, février 2012.
Institut Supérieur des Métiers : L’artisanat de sous-traitance industrielle. Enquête auprès de 1 000 entreprises, Rapport
d’étude, novembre 2012.
Institut Supérieur des Métiers : Les entrepreneurs de l’artisanat. Exploitation de l’enquête Insee/Sine 2010, Rapport d’étude,
avril 2013.
18
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
Cahier de synthèse de
< l’Institut
Supérieur des Métiers <
LAMBERT Alain et BOULARD Jean-Claude : Rapport de la mission de lutte contre l’inflation normative, mars 2013.
MANDON Thierry : Mieux simplifier. La simplification collaborative, Rapport de synthèse de la mission parlementaire de
simplification de l’environnement réglementaire et fiscal des entreprises, juillet 2013.
MARTIN Pierre : L’économie de proximité : une réponse aux défis de la société française, Rapport du CESE, septembre 2010.
MAZAUD Caroline : Entre le métier et l’entreprise. Renouvellement et transformations de l’artisanat français, thèse de doctorat
de sociologie soutenue à l’Université de Nantes en décembre 2009.
MORAND Pascal et MANCEAU Delphine : Pour une nouvelle vision de l’innovation, La documentation Française, avril 2009.
NOUEL Bertrand : Pourquoi réformer le droit du travail est plus important que de discourir sur la compétitivité, Fondation Ifrap,
octobre 2012.
PAUD Christophe : Et si la QVT était surtout affaire de management ? Revue de l’Anact, janvier-février 2013.
PORTER Michael : L’Avantage Concurrentiel, InterEditions, 1986.
PY Pascal : Savoir vendre ou mourir. Les règles du jeu de la compétitivité hors prix, Ed. Eyrolles, 2013.
ROJOT Jacques : Les nouvelles stratégies sociales des entreprises : les modes de gestion participatifs, Dalloz, 1995.
SARTHOU-LAJUS Nathalie : Un travail, c’est aussi une fierté, Revue Études, septembre 2013.
SOGEDEV : La compétitivité et les besoins en financement des PME innovantes, octobre 2012.
UPA : Penser autrement, livre blanc et dossier de presse du 19 octobre 2011.
La compétitivité artisanale : atouts, freins et spécificités
19
< Cahier de synthèse • Octobre >2013
Cahier de synthèse de l’Institut Supérieur des Métiers
134 ISM – novembre 2013
La compétitivité artisanale :
atouts, freins et spécificités