Bref d`auteur 6 — Utilisation équitable version canadienne En

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Bref d`auteur 6 — Utilisation équitable version canadienne En
Bref d’auteur 6 — Utilisation équitable version canadienne
En common law, l’utilisation équitable fait partie du concept plus général de fair dealing, qui
limite et balise le champ d’application du droit d’auteur. Souvent, on le compare au fair use
américain, mais les deux sont passablement différents. En régime de fair use, un usage qui n’est
pas nommément mentionné dans la loi ne peut être utilisé pour se défendre contre une violation,
car il ne sera pas reconnu comme équitable par les cours de justice ; le fair use est donc un
moyen de défense. En régime canadien de fair dealing, c’est l’inverse, les exceptions
d’utilisation équitable sont des autorisations de nature générale et tous les usages qui entrent
dans la définition se trouvent autorisés.
Quand on sait qu’une nouvelle exception est une portion de la protection garantie aux créateurs
par les lois antérieures que le gouvernement se réapproprie pour la céder d’office à des tiers, on
pourrait croire que le gouvernement Harper se serait trouvé une petite gêne d’en faire un usage
aussi intempestif. Or c’est ni plus ni moins que 17 exceptions que l’on trouve dans le projet de loi
C-32. Et quand on sait l’étendue des autorisations très larges que confèrent aux usagers les
exceptions d’utilisation équitable, on ne peut qu’être catastrophé par la nouvelle exception aux
fins éducatives qui n’exclut même pas les matériels conçus expressément par les éditeurs
scolaires, scientifiques et techniques pour répondre aux besoins des programmes d’études
canadiens!
Une entreprise privée a besoin d’essais scientifiques pour ses chercheurs? Il organise une petite
formation à l’interne et, allez hop! plus besoin de demander l’autorisation de reproduire et plus
besoin de compenser les auteurs. Un professeur emprunte des textes et des illustrations à
divers livres pour les intégrer à ses notes de cours? Perte du droit d’autoriser et pertes de
revenus pour les auteurs et les éditeurs! Un membre d’un club social utilise un poème pour
introduire joliment une formation locale, pourquoi pas, c’est permis ! Il n’y a pas de limite aux
exemples qu’on pourrait donner. Il suffira de démontrer un rôle « éducatif » à la copie, et le tour
sera joué!
Aline Côté
Présidente du comité du droit d’auteur de l’ANEL