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Dyslipidémies
37
1. Introduction | Pathogenèse
——Les maladies cardiovasculaires représentent la première cause de
mortalité et de morbidité dans les pays industrialisés.
——Les causes principales de dyslipidémies sont :
‒‒l’hérédité, notamment dans les dyslipidémies familiales ;
‒‒le mode de vie : alimentation mal équilibrée et manque d’exercice ;
‒‒les médicaments : corticoïdes, olanzapine, isotrétinoïne, ritonavir, progestérone ;
‒‒certaines maladies : hypothyroïdie, syndrome néphrotique.
2. Définition | Classification 1,2
Classification phénotypique (Fredrickson simplifiée)
——Hypercholestérolémie pure : LDL-cholestérol élevé
——Hyperlipidémie mixte : LDL-cholestérol et triglycérides (TG)
élevés
——Hypertriglycéridémie : triglycérides élevés
——HDL-cholestérol (mmol/l) : bas si < 1,0 chez l’homme, < 1,3 chez
la femme
Endocrinologie et métabolisme 509
Tableau 1. Classification des taux de cholestérol
et triglycérides adapté du GSLA
LDL-cholestérol
(mmol/l)
Cholestérol total
(mmol/l)
Triglycérides
(mmol/l)
Normal
< 2,6
< 5,2
< 1,7
Limite
2,6-4,0
5,2-6,1
1,7-2,2
Elevé
4,1-4,8
≥ 6,2
2,3-5,5
≥ 4,9
–
≥ 5,6
Très élevé
Syndrome métabolique 2
Trois critères présents :
——Périmètre abdominal : > 102 cm chez l’homme, > 88 cm chez la
femme
——TG ≥ 1,7 mmol/l
——HDL < 1,0 mmol/l chez l’homme, < 1,3 mmol/l chez la femme
——TA ≥ 130/85 mmHg
——Glycémie à jeun ≥ 5,6 mmol/l
3. Drapeaux rouges
Situations à risque
——Antécédents personnels ou familiaux de maladies vasculaires
précoces
——Signes cliniques : gérontoxon précoce, xanthomes tendineux et
cutanés
——Cholestérol total > 7 mmol/l, LDL-cholestérol > 5 mmol/l ou triglycérides > 5,6 mmol/l
ÄSuspecter
Ä
une dyslipidémie familiale.
510
37. Dyslipidémies
Affection concomitante
——Symptômes ou signes d’hypothyroïdie
——Elévation du taux de cholestérol en absence de changement de
traitement
——Cholestérol total > 7 mmol/l à partir de 40 ans sans notion antérieure d’hypercholestérolémie
à une dyslipidémie secondaire à une hypothyroïdie et
ÄPenser
Ä
doser la TSH.
Quand adresser au spécialiste ?
——TG > 8,0 mmol/l : éviter la pancréatite aiguë
——Hypertriglycéridémie résistante aux traitements non médicamenteux
——Hyperlipidémie résistante au traitement
——Suspicion de dyslipidémie familiale : hypercholestérolémie familiale ou hyperlipidémie familiale combinée
ÄUne
Ä
consultation par un spécialiste des troubles lipidiques est
recommandée.
Endocrinologie et métabolisme 511
4. Diagnostic
Dépistage2,3
——Fréquence 1 ×/5 ans (femmes > 45 ans, hommes > 35 ans)
——Pour les personnes avec un autre facteur de risque, des antécédents familiaux de dyslipidémie ou de maladies cardiovasculaires précoces : avancer l’âge du dépistage.
Tableau 2. Détermination du risque cardiovasculaire en 4 étapes
1) Bilan lipidique complet à jeun : cholestérol total, HDL-cholestérol, triglycérides *
2) Identifier anamnestiquement la présence de situations à haut risque
d’événements cardiovasculaires :
––Maladie coronarienne
––Maladie cérébrovasculaire (AIT, AVC)
––Artériopathie périphérique
––Anévrisme de l’aorte abdominale (AAA)
––Diabète de type 2 ou de type 1 avec atteinte des organes cibles
(microalbuminurie)
––Insuffisance rénale chronique (clearance < 60 ml/min/1,73 m2)
3) Déterminer si des facteurs de risque majeurs sont présents (autre que le LDL)
––Tabagisme
––Hypertension : TA ≥ 140/90 mmHg ou sous traitement
––Taux de HDL-cholestérol < 1 mmol/l
––Anamnèse familiale de maladie coronarienne précoce (parent de
1er degré, hommes < 55 ans, femmes < 65 ans)
––Age : hommes ≥ 45 ans et femmes ≥ 55 ans
4) Si absence de situations à haut risque cardiovasculaire (cf. ci-dessus),
­calculer le risque absolu à 10 ans d’événement coronarien mortel ou non :
www.gsla.ch/ (cf. Annexe 1k : Score de risque PROCAM adapté à la Suisse par
le GSLA)
* le LDL-cholestérol se calcule selon la formule de Friedwald (pas valable si TG
≥ 4,5 mmol/l) : LDL-cholestérol = Cholestérol total – HDL-cholestérol – Triglycérides ÷ 2,2
4 catégories de risque à 10 ans
512
Très élevé
Situations dites à haut risque d’événement cardiovasculaire
(maladies des gros vaisseaux) ou diabète avec atteinte des
organes cibles ou insuffisance rénale chronique
Elevé
Risque calculé sur 10 ans > 20 %
Intermédiaire
Risque calculé sur 10 ans entre 10 % et 20 %
Faible
Risque calculé sur 10 ans < 10 %
37. Dyslipidémies
5. Prise en charge | Traitement
Objectif primaire : intervention
A sur le LDL-cholestérol avec les statines
Approche non médicamenteuse en première intention
——Alimentation équilibrée, type méditerranéenne : préconiser les
aliments suivants : fruits, légumes, céréales complètes, pain complet, produits laitiers pauvres en graisses, poisson, viande maigre.
——Activité physique : > 30 min d’activité ≥ 5 ×/sem en étant légèrement essoufflé ou 20 min d’activité d’endurance ≥ 3 ×/sem.
——En cas de maladie cardiovasculaire et projet de pratiquer une
activité physique « intense » : établir un programme sur la base
d’une épreuve d’effort.
——Poids : idéalement viser un IMC (indice de masse corporelle)
< 25 kg/m2 ; pratiquement viser une stabilisation.
LDL-cholestérol : prise en charge médicamenteuse 1,2,4
Très élevé
≥ 1,8 mmol/l
Elevé
≥ 2,6 mmol/l
1re colonne : catégorie de risque
Intermédiaire
≥ 3,4 mmol/l
Faible
≥ 4,9 mmol/l
2e colonne : seuil pour intervention
médicamenteuse si échec du traitement non médicamenteux
——Maladies coronariennes, AVC ou artériopathie périphérique :
introduire d’emblée un traitement de statine simultanément à
l’approche non médicamenteuse.
——Pour les autres catégories de risque : considérer l’ajout d’une statine après 3 à 6 mois de prise en charge non médicamenteuse.
——Prescrire la statine et le dosage en fonction du risque cardiovasculaire à 10 ans.
——En cas d’échec du traitement : consultation spécialisée.
N.B. En prévention primaire, l’introduction d’une statine au-delà de
l’age de 75 ans est à évaluer selon le contexte clinique de cas en cas.
Endocrinologie et métabolisme 513
514
10 mg : 40 %
20 mg : 45 %b
rosuvastatine
Rhabdomyolyse (très rare),
élévation des enzymes hépatiques, dyspepsie, douleurs
­abdominales, nausée, diarrhées
Effets secondaires
CI relative : prise concomitante chronique de médicaments i­nhibiteurs
du CYP 3A4a
A discuter avec le spécialiste :
hépatopathie chronique ou active,
néphropathie
Contre-indications
Combinaison avec :
ézétimibec
10 mg : 18 %
Céphalées, douleurs abdominales,
diarrhées
Insuffisance hépatique modérée à
sévère, à discuter avec le spécialiste
En cas d’intolérance à une statine, une autre statine devrait être essayée en visant des doses plus faibles d’une molécule
plus puissante. Parfois un traitement alterné 1 j/2 peut être tenté. Le passage à d’autres classes thérapeutiques est à
déconseiller ou devrait être évalué avec un spécialiste.
10 mg : 30 %
20 mg : 40 %
40 mg : 45 %
atorvastatine
10 mg : 20 %
20 mg : 30 %
40 mg : 35 %
Baisse moyenne
du taux de LDL
selon le dosage
b
Si interaction : fluvastatine ou pravastatine
Un avis spécialisé est nécessaire pour prescrire du 40 mg !
c
Les études cliniques à long terme supportant l’impact sur les événements cardiovasculaires ne sont pas encore disponibles.
a
2e choix :
1er choix :
Statine
simvastatine
Médicament
Tableau 3. Tableau comparatif des médicaments hypolipémiants
37. Dyslipidémies
Bilan sanguin initial
——Doser les transaminases si présence d’un risque hépatique : hépatite chronique, consommation excessive d’alcool.
——Pas de dosage des CK sauf si présence ou apparition de symptômes musculaires (myalgies, faiblesse, etc.).
Objectif secondaire : traiter
B l’hypertriglycéridémie (≥ 1,7 mmol/l)
——A moins qu’il ne soit très élevé (≥ 5,6 mmol/l), la normalisation
du taux de triglycérides est un objectif secondaire, après le taux
de LDL cholestérol.
Mesures non médicamenteuses en priorité
——Diminuer la consommation d’alcool
——Recommander des mesures diététiques : restriction calorique,
moins de sucres d’absorption rapide, diminution de la proportion de sucres d’absorption lente
——Encourager l’activité physique quotidienne
——Viser une diminution ou au moins une stabilisation du poids
Si TG < 5,5 mmol/l
——Considérer l’ajout d’un médicament seulement après échec des
mesures non médicamenteuses :
‒‒intensifier le traitement hypolipémiant ou
‒‒éventuellement, ajouter un fibrate pour baisser encore le VLDLcholestérol.
Si TG ≥ 5,6 mmol/l
Baisser d’abord les TG pour prévenir la pancréatite aiguë :
——Arrêt de l’alcool
——Régime très pauvre en graisses (≤ 15 % des calories totales)
——Contrôle du poids et activité physique
——Fibrate : premier choix :
fénofibrate 200 mg
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——Baisse TG de 15-30 %
——Effets secondaires : dyspepsie, lithiases vésiculaires, myopathie
N.B. Adapter le dosage à la fonction rénale.
——Contre-indications absolues : IR sévère, insuffisance hépatique
sévère
——Contre-indications relatives : attention à la combinaison avec
une statine. Dans ce cas, le risque d’interaction médicamenteuse
est corrélé à la dose de la statine. En cas d’insuffisance rénale,
adapter la dose à la clearance.
ÄSi
Ä échec du traitement : avis spécialisé avant d’introduire une
bithérapie.
6. Suivi | Complications | Pronostic
Suivi du traitement 5,6
——Si introduction juste après un syndrome coronarien aigu (SCA),
un accident vasculaire cérébral ou une opération : contrôle à 3,
6 et 12 mois.
——Si introduction hors SCA : contrôle à 6 semaines, puis à 6 et 12 mois.
——Si stable sous traitement : 1 ×/an.
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37. Dyslipidémies
7. Message
›› Une anamnèse familiale positive ou la présence de signes cliniques tels que : gérontoxon précoce, xanthomes tendineux
et cutanés doivent attirer l’attention sur une dyslipidémie
familiale.
›› En prévention primaire le choix d’une stratégie thérapeutique
avec les statines se base sur l’appréciation du risque d’événement vasculaire à 10 ans.
›› En cas d’hypertriglycéridémie sévère (TG ≥ 5,6 mmol/l), il
existe un risque de pancréatite qui doit être prévenu en visant
un arrêt de la consommation d’alcool, une intervention sur le
style de vie et un traitement par fibrates si nécessaire.
8. Références bibliographiques | Liens
1. Stone NJ et al. ACC/AHA Guideline on the Treatment of Blood
­Cholesterol to Reduce Atherosclerotic Cardiovascular Risk in Adults,
J Am Coll Cardiol. (2013), doi :10.1016/j.jacc.2013.11.002.
2. Groupe de travail Lipides et Athérosclérose (GSLA) de la Société
Suisse de Cardiologie (SSC). Prévention de l’atherosclérose 2012.
Aperçu des recommendations de l’International Atherosclerosis
Society 2003 (IAS), de l’European Society of Cardiology 2011 (ESC)
et de l’European Atherosclerosis Society 2011 (EAS). Disponible sous
www.gsla.ch.
3. Cornuz J, Guessous I, Rodondi N. Prévention primaire et dépistage
chez l’adulte. Rev Med Suisse. 2006 ; 2 : 262-73.
4. Jones P, Kafonek S, Laurora I, Hunninghake D. Comparative dose efficacy study of atorvastatin versus simvastatin, pravastatin, lovastatin,
and fluvastatin in patients with hypercholesterolemia. Am J Cardiol.
1998 ; 81 : 582-7.
5. Rosenson RS. Myocardial injury : the acute phase response and lipoprotein metabolism. J Am Coll Cardiol. 1993 ; 22 : 933-40.
6. Riesen WF, Darioli R, Noseda G, Bertel O, Buser P. Recommandations pour la prevention de l’atherosclérose. Bull Med Suisses. 2005 ;
86 : 2055-61.
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