Chapitre 2.10.1.

Transcription

Chapitre 2.10.1.
SECTION 2.10
MALADIES NON INSCRITES
1
DANS LES LISTES A ET B
CHAPITRE 2.10.1.
CYSTICERCOSES
RÉSUMÉ
La cysticercose des animaux de rente et des animaux sauvages est causée par les stades larvaires
(métacestodes) de cestodes (ténias), les stades adultes étant présents dans l’intestin de l’homme,
du chien ou de canidés sauvages. La cysticercose bovine (primitivement dans le muscle) et porcine
(primitivement dans le muscle et le système nerveux central) est causée respectivement par les
métacestodes (cysticerques) des cestodes de l’homme Tænia saginata et T. solium. Les
cysticerques de T. solium se développent également dans le muscle et le système nerveux central
de l’homme. Les cysticerques de T. saginata asiatica se développent dans le foie du porc. Les
cysticercoses et cénuroses du mouton et de la chèvre (dans le muscle, l’encéphale, le foie et la
cavité péritonéale) sont causées par T. ovis, T. multiceps et T. hydatigena dont les adultes se
développent dans l’intestin du chien et de canidés sauvages.
La plupart des infestations dues aux larves ou adultes de cestodes sont discrètes ou
asymptomatiques. Les exceptions sont graves, la neurocysticercose humaine (NCH)
potentiellement fatale causée par T. solium et occasionnellement la neurocénurose causée par
T. multiceps chez l’homme. Ces parasites sont cause occasionnellement de signes oculaires ou
musculaires chez l’homme. La maladie nommée « Gid » due à T. multiceps chez les ruminants
peut nécessiter l’abattage de ces animaux. La cénurose aiguë à T. hydatigena chez le mouton et la
chèvre est rare. La cysticercose cause des pertes économiques par saisies des viandes et abats
infestés.
Identification de l’agent pathogène : Les cestodes adultes du genre Tænia sont aplatis
dorso-ventralement, segmentés et grands, atteignant de 20 à 50 cm (espèces du chien) à plusieurs
mètres (espèces de l’homme). A l’extrémité antérieure, le scolex (tête) a 4 ventouses musculaires
et peut avoir un rostre souvent armé avec 2 rangées de crochets, leur longueur et leur nombre
étant relativement caractéristiques d’une espèce. Un cou suit le scolex puis des segments
immatures puis mûrs et enfin des segments gravides renfermant des œufs. La structure des
segments, bien que peu fiable, peut aider à la diagnose. Les espèces de Tænia ne peuvent pas
être différenciées par la structure de leurs œufs. Les métacestodes consistent en une vésicule
renfermant un ou plusieurs protoscolex invaginés. Ces « vers vésiculaires » sont à l’intérieur de la
paroi du kyste à l’interface parasite-hôte. Cette structure comprend le cysticerque et le cénure.
Les adultes de Tænia sont reconnaissables lors d’autopsie, par l’élimination de segments ou par
les œufs. Les métacestodes sont facilement visibles lors d’autopsie et à l’inspection des viandes,
mais les faibles infestations peuvent passer inaperçues. La NCH peut être diagnostiquée par les
techniques d’imagerie médicale.
Tests immunologiques : Les infestations par les adultes de Tænia peuvent être reconnues par la
détection des copro-antigènes de Tænia par la méthode immuno-enzymatique (ELISA), mais le test
1
Les 4 premières maladies de cette liste sont incluses dans les sections de la liste B rapportées à certaines espèces, alors
que ces chapitres couvrent plusieurs espèces et fournissent une description plus large.
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Chapitre 2.10.1. - Cysticercoses
ne peut pas différencier les espèces et n’est pas disponible commercialement. L’utilisation de
sondes spécifiques reste expérimentale.
Épreuves sérologiques : Les épreuves pour la détection d’anticorps sériques ne sont pas utilisées
couramment pour le diagnostic de la cysticercose ; le diagnostic est fait par inspection des viandes.
Spécifications applicables aux vaccins et aux produits biologiques à usage diagnostique :
Les antigènes vaccinaux ont été identifiés pour les métacestodes, mais pas pour les adultes de
T. ovis, T. saginata et T. solium. Un vaccin contre T. ovis est enregistré en Nouvelle-Zélande mais
n’est pas commercialisé.
A. INTRODUCTION
Les métacestodes (ou larves de cestodes) des espèces Tænia spp de l’homme et des canidés sont la cause de
cysticercoses chez plusieurs animaux de rente et sauvages, et chez l’homme. Les cestodes adultes sont trouvés
dans l’intestin grêle des carnivores hôtes définitifs – homme, chien et canidés sauvages. Tænia saginata de
l’homme provoque la cysticercose bovine, de répartition mondiale mais avec une forte prévalence en Afrique, il
est observé dans le Caucase, en Asie centrale et du sud, et dans les pays de l’est méditerranéen, l’infestation se
produisant dans plusieurs pays européens. Le Tænia solium de l’homme provoque la cysticercose porcine et la
neurocysticercose humaine (NCH). Il est observé principalement en Amérique centrale et du sud, en Afrique
subsaharienne, dans les pays indépendants du Commonwealth, la république populaire de Chine et les pays non
musulmans d’Asie où sont élevés librement des porcs consommateurs de déchets. Les cysticerques de Tænia
saginata asiatica de l’homme dans le sud-est asiatique se développent dans le foie du porc. Le chien et les
canidés sauvages sont les hôtes définitifs des métacestodes du mouton, de la chèvre et d’autres ruminants, et
ceci dans de très nombreux pays bien que T. multiceps ait disparu des États-Unis d’Amérique (USA) et de
Nouvelle-Zélande. Tænia ovis se développe dans le muscle du mouton, T. multiceps dans l’encéphale
(occasionnellement dans les muscles) du mouton, de la chèvre et parfois d’autres ruminants, rarement de
l’homme, et T. hydatigena dans la cavité péritonéale et le foie des ruminants. Le diagnostic est habituellement
fondé sur l’espèce-hôte et la localisation du métacestode à l’inspection des viandes. Les adultes se développent
après ingestion des métacestodes de la viande et des abats, qui ne sont pas suffisamment cuits ou congelés
pour tuer le parasite.
Les segments gravides, éliminés par le cestode adulte, sortent spontanément de l’anus pour tomber sur le sol et
libérer les œufs, ou les segments et les œufs sont entraînés directement dans les fèces. Les segments de Tænia
solium sont fréquemment éliminés par paquets. Les œufs éliminés sont immédiatement infestants. L’animal
s’infeste par ingestion de segments et d’œufs ayant souillé le pâturage ou présents dans les matières fécales.
L’homme peut s’infester avec T. solium en ingérant les œufs présents sur des légumes, etc., contaminés par des
fèces ou des mains sales, par la transmission oro-fécale, par rétro-péristaltisme ou par éclosion entérale des
œufs. Le diagnostic est fondé sur la morphologie du cestode adulte et la présence d’œufs ou de segments dans
les fèces des hôtes définitifs infestés.
B. TECHNIQUES DE DIAGNOSTIC
1.
Identification de l’agent pathogène
Tænia saginata (le cestode du bœuf) : l’adulte est grand, 4 à 8 m de longueur et peut survivre plusieurs années,
fréquemment en un exemplaire, dans l’intestin grêle de l’homme. Le scolex (ou tête) n’a ni rostre ni crochets. Les
techniques diagnostiques usuelles sont présentées dans le tableau 1 (23, 24). Les segments gravides quittent
habituellement l’hôte de façon isolée et migrent spontanément au travers de l’anus.
Les œufs sont typiquement des œufs de téniidés qui ne peuvent être distingués de ceux des genres Tænia ou
Echinococcus spp. Les œufs de Tænia mesurent 30 à 45 µm de diamètre, renferment un oncosphère (ou
embryon hexacanthe) portant 3 paires de crochets, présentent un embryophore épais, brun et strié
transversalement ou « enveloppe » constituée de cubes ; une membrane externe et ovale, véritable paroi de
l’œuf, qui est absente des œufs présent dans les fèces.
Les métacestodes (ou cysticerques) de T. saginata se développent habituellement dans les muscles striés du
bœuf (ladrerie bovine) mais aussi chez le buffle, le renne et le cerf. Ils sont ovales, environ 0,5 à 1 x 0,5 cm de
longueur, transparents et renfermant un scolex unique blanchâtre qui est morphologiquement similaire au scolex
du futur cestode adulte. Ils sont entourés d’une fine capsule fibreuse produite par l’hôte. Les kystes peuvent être
observés dans le foie, les poumons, les reins et le tissu adipeux.
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Tænia solium (le cestode du porc) est plus petit que T. saginata, atteignant 3 à 5 m. Le scolex a un rostre portant
2 rangées de crochets, le nombre et les dimensions de ces crochets pouvant aider à le distinguer des autres
espèces de Tænia spp. (Tableau 1). Les segments ovigères ont 7 à 13 ramifications utérines (moins de 17) et ne
s’éliminent pas spontanément de leur hôte, mais passivement par paquets de segments dans les fèces.
Les métacestodes se développent dans les muscles et le système nerveux central (ladrerie porcine) du porc, de
l’ours et du chien, dans les tissus sous-cutanés et le système nerveux central de l’homme. Les kystes sont à peu
près identiques à ceux de T. saginata, mais de taille un peu plus grande. Ils possèdent un scolex avec rostre et
crochets identiques à ceux de l’adulte. Occasionnellement, dans l’encéphale de l’homme, ils peuvent se
développer pour atteindre 2 cm ou plus et perdre leur scolex.
Tableau 1. Bases usuelles à l’identification des scolex et segments de Tænia spp.
Espèces
parasites
Nombre
de
crochets
Longueur des
crochets (µm)
grands
petits
Nombre
de
testicules
Couches
de
testicules
Extension de
la poche du
cirre aux
vaisseaux
longitudinaux
Nombre de
ramifications
utérines
T. hydatigena
28–36
(26–44)
191–218
(170–
235)
118–143
(110–
168)
600–700
1
oui
6–10
branches
divisées
Lobes ovariens
inégaux. Pas de
sphincter vaginal.
Testicules
jusqu’aux glandes
vitellogènes mais
pas réunis derrière
T. ovis
30–34
(24–38)
170–191
(131–
202)
111–127
(89–157)
350–750
1
non
11–20
branches
divisées
Lobes ovariens
inégaux. Sphincter
vaginal bien
développé.
Testicules jusqu’au
bord postérieur des
ovaires
T. multiceps
22–30
(20–34)
157–177
(120–
190)
98–136
(73–160)
284–388
2
oui
14–20
branches
divisées
Lobes ovariens
égaux. Couche
musculaire en
partie antérieure
du vagin testicules
jusqu’aux glandes
vitellogènes mais
pas réunis derrière
T. saginata
–
–
–
765–1200
1
non
14–32
branches
divisées
Lobes ovariens
inégaux avec un
petit lobe.
Sphincter vaginal
bien développé.
Testicules
jusqu’aux glandes
vitellogènes mais
pas réunis derrière
22–36
139–200
93–159
375–575
1
oui
7–16
branches
divisées
Lobes ovariens
inégaux avec petit
lobe accessoire
pas de sphincter
vaginal. Testicules
réunis derrière les
glandes
vitellogènes
T. solium
Tænia saginata asiatica (ténia asiatique ou de Taiwan) : très proche mais génétiquement distinct de T. saginata
(2), l’adulte présent chez l’homme possède un ovaire, un sphincter vaginal musculaire et une poche du cirre
comme ceux de T. saginata, mais T. s. asiatica a un rostre, des segments avec des protubérances postérieures
et 11 à 32 branches utérines. Les segments s’éliminent de façon isolée et spontanément. Les métacestodes sont
petits, environ 2 mm, et possèdent un rostre et 2 couronnes de crochets primitifs, ceux en position extérieure
étant nombreux et petits. Ils sont observés principalement dans le parenchyme et en surface du foie des porcs
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domestiques et sauvages, ils peuvent être trouvés dans l’épiplon, et rarement dans les poumons et la séreuse du
côlon. Occasionnellement, ils sont trouvés chez les bovins, la chèvre et les singes.
Tænia ovis : adulte dans l’intestin du chien et des carnivores sauvages, atteint 1 à 2 m de longueur et possède un
rostre armé (tableau 1). Les métacestodes se développent dans les muscles du mouton et moins souvent de la
chèvre, atteignant 3,5 à 1 x 0,2 à 0,4 cm. Fréquemment, les cysticerques sont dégénérés avec un centre vert ou
couleur crème, de contenu caséeux ou calcifié. Un parasite similaire évolue entre chien et carnivores sauvages et
les muscles des rennes et des cerfs dans les pays du nord.
Tænia hydatigena : adulte de 1 à 5 m de longueur, observé dans l’intestin du chien et de carnivores sauvages, et
muni d’un rostre armé (tableau 1). Les métacestodes sont grands, de 1 cm jusqu’à 6 à 7 cm et le scolex a un long
cou. Ils sont trouvés fixés à l’épiploon, au mésentère et occasionnellement à la surface du foie, en particulier chez
le mouton, mais aussi chez les ruminants domestiques et sauvages et le porc. Un cycle loup et renne/cerf existe
sous des latitudes septentrionales et pour lequel le métacestode est trouvé dans le foie de l’hôte intermédiaire, le
chien étant un hôte définitif.
Tænia multiceps : adulte de 40 à 100 cm de longueur dans l’intestin des carnivores, rostre armé (tableau 1). Les
métacestodes sont des cénures, kystes de grandes dimensions, renfermant un liquide clair et plusieurs centaines
de scolex invaginés sur la paroi, en grappes. Ils atteignent 5 cm dans l’encéphale du mouton, l’encéphale et le
tissu musculaire de la chèvre et aussi dans l’encéphale du bétail, ruminants sauvages et occasionnellement de
l’homme. Dans le tissu nerveux, les kystes ne sont pas encapsulés. Ils induisent des signes nerveux qui chez le
mouton se traduisent par du « vertige », du « tournis », etc.
a)
Diagnose des parasites adultes chez l’homme ou le chien
Tout parasite ou prélèvement fécal provenant d’un homme potentiellement infesté par T. solium doit être
manipulé avec précaution et sécurité afin d’éviter toute infestation accidentelle par des œufs. Tænia
multiceps et Echinococcus spp. infestent également l’homme et, puisque les œufs chez le chien ne peuvent
être différenciés au niveau générique ou spécifique, en zone endémique, les mêmes précautions doivent
également être prises. En plus de Tænia spp., l’homme peut être infesté par Diphyllobothrium et
Hymenolepis spp., alors que 6 autres genres de cestodes sont signalés occasionnellement chez l’homme.
Ceux-ci sont décrits par Llyod (13) et peuvent être différenciés de Tænia spp. par la morphologie des
proglottis et des œufs. Néanmoins récemment, T tæniæformis avec des œufs morphologiquement
indiscernables des œufs de teniidés a été signalé chez un enfant. Chez les canidés, les œufs de
Echinococcus spp. ne peuvent être distingués de ceux de Tænia, mais la présence du précédent peut être
déterminée par les dimensions et plus récemment, un ELISA à détection d’antigène (Ag) pour
Echinococcus. Les autres vers, Dipylidium, Diplopylidium, Mesocestoides et Diphyllobothrium spp. ont des
œufs et des proglottis distinguables (13, 19).
Les cestodes adultes peuvent être expulsés de l’homme par ingestion d’un anthelminthique suivi d’un
purgatif et sont identifiés sur la base morphologique du scolex et des proglottis. Chez l’animal, une
vermifugation à base d’arécoline est utilisée ; de nouveau, les cestodes obtenus sont identifiés
morphologiquement. L’arécoline n’est plus disponible comme anthelminthique mais peut être obtenue
auprès des compagnies fournissant des produits chimiques. En raison de ses effets indésirables, les sujets
âgés, fragiles et les femelles gestantes doivent être exclus du traitement. Une dose de 4 mg/kg entraîne une
expulsion en 30 min. La marche et le massage abdominal dans les cas récalcitrants ou des lavements pour
les chiens constipés peuvent éviter le recours à une seconde dose (2 mg/kg) qui doit être prescrite
uniquement avec modération. Heureusement, la vermifugation à l’arécoline est désormais remplacée par le
test ELISA de détection d’Ag pour Echinococcus spp. et peut-être dans un futur proche, pour Tænia spp.
Verster (23) et Loos-Frank (14) ont donné des descriptions de diagnose parasitologique de tous les Tænia
spp. de l’homme et des animaux, leurs hôtes et leurs distribution géographique. Mayta et al. (15) et
Loos-Frank (14) donnent les méthodes pour monter, fixer, couper et colorer les proglottis. La technique de
coloration qui suit est celle de Loos-Frank (14). Le ver, après un bain dans l’eau, peut être coloré
directement, bien que les petits vers puissent être fixés dans l’éthanol en quelques minutes. Sinon les vers
peuvent être fixés et conservés dans l’éthanol à 70 % renfermant 10 % d’acide lactique, le scolex et le ver
étant conservés séparément. Les crochets du scolex ou du protoscolex doivent être coupés et montés dans
une solution de Berlese (obtenue par dissolution de 15 g de gomme arabique dans 20 ml d’eau distillée
additionnée de 10 ml de sirop de glucose et 5 ml d’acide acétique, le tout étant saturé avec de l’hydrate de
chloral jusqu’à 100 g). La coloration est à base d’acide lactique et carmin : 0,3 g de carmin sont dissous par
ébullition dans 42 ml d’acide lactique et 58 ml d’eau distillée, 5 ml de chlorure de fer (FeCl2, 4H2O) sont
ajoutés après refroidissement, et peut être ré-utilisé pour régénérer d’anciennes solutions. Les échantillons
sont trempés dans un flacon de colorant et, après quelques minutes, sont rincés à l’eau du robinet. Ils sont
ensuite fixés dans l’éthanol à 50 ou 70 % et déshydratés sous papier plastique. L’ester méthylé de l’acide
salicylique est utilisé comme éclaircissant.
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Quand des segments se détachent de l’extrémité du cestode, des œufs sont libérés dans l’intestin et
peuvent être trouvés dans les fèces. Des déplacements spontanés de T. saginata ou de T. s. asiatica à
partir de l’anus sont observés par les patients (> 95 %). Quand les segments se déplacent, des œufs
« collants » sont déposés en région périnéale et peuvent être détectés par application et examen d’un
papier adhésif. Ces signes sont moins visibles pour les segments de T. solium (1). Les segments des
3 espèces peuvent être observés dans les fèces, mais sont éliminés de façon intermittente. Chez le chien,
environ 50 % des segments sont expulsés spontanément par l’anus. Ces segments, quand ils tombent sur
le sol, se déplacent et libèrent des œufs. Les segments restants sont éliminés dans les fèces, mais
ordinairement, les segments migrent et évacuent la majorité de leurs œufs en traînées à la surface des
fèces et dans les zones environnantes. Même si un segment éliminé s’est vidé de tous ses œufs, il peut être
identifié comme cestode par les nombreux corpuscules calcaires concentriques de ses tissus. Les matières
fécales, après homogénéisation, peuvent être traitées pour examen des œufs. Différentes techniques sont
utilisées à travers le monde, y compris l’extraction et la flottation à l’acétate d’éthyl. Pour cette dernière,
NaNO3 ou une solution sucrée de Sheather (500 g de sucre, 6,6 ml de phénol, 360 ml d’eau), grâce à leur
forte densité respective, sont supérieurs à une solution saturée de NaCl comme solution de flottation pour
les œufs de teniidés. La flottation peut être réalisée dans des cellules de flottation qualitative ou quantitative,
commercialisées, ou après centrifugation ce qui nécessite la technique modifiée de Wisconsin (les fèces
diluées dans l’eau sont tamisées et centrifugées, le culot remis en suspension dans une solution sucrée ou
de Sheather et centrifugée à 300 g pendant 4 min). Les œufs adhérant à la lamelle couvre-objet peuvent
ainsi être observés. L’examen fécal est moins sensible pour T. solium que pour les autres espèces. La
diagnose d’espèce est impossible par la morphologie des œufs, mais les sondes ADN, l’amplification en
chaîne par polymérase (PCR) et la PCR RFLP (Polymorphisme de la longueur des fragments de restriction)
sont utilisables au laboratoire. Ceci a été largement utilisé expérimentalement pour différencier des œufs
fécaux de T. solium, T. saginata et T. s. asiatica (2, 5-7, 9). Alors que potentiellement extrapolables au
chien, ces examens n’ont pas été réalisés.
Plus aucun test ELISA pour détection des copro-antigènes de Tænia n’est disponible commercialement pour
le moment. Des informations sur sa disponibilité pour des études épidémiologiques ou une utilisation en
collaboration peuvent être obtenues auprès du Professeur P.S. Craig, OIE, Expert de référence sur
l’échinococcose (se reporter à la liste de la partie 3 de ce Manuel terrestre). Cet ELISA à détection d’Ag a
été développé expérimentalement par Allan et al. (1) pour détecter les copro-antigènes chez le chien, et
ainsi, avec des témoins appropriés, pouvait être utilisé pour la détection d’une infestation à Tænia chez
cette espèce. La technique néanmoins est seulement spécifique du genre. Ce test s’appuie sur des plaques
à micropuits recouverts d’un Anticorps monoclonal spécifique de lapin anti-Tænia (AST). La technique de
base est décrite ci-dessous :
b)
i)
Le surnageant fécal est recueilli, congelé ou formolé (formol à 5 % à 4°C) à partir des échantillons
fécaux. L’échantillon est vigoureusement agité à parts égales dans du tampon PBS (w/v 0,15 M)
contenant 0,3 % de Tween 30. Le surnageant est recueilli par centrifugation à 2 000 g pendant
30 min ;
ii)
Les segments mûrs de Tænia, hydrosolubles, sont obtenus après émulsification dans du PBS et
centrifugés ;
iii)
Le sérum hyperimmun de lapin anti-extraits solubles de proglottis est fabriqué et la fraction IgG est
isolée par passage et élution de l’IgG liée à la protéine A sur sépharose CL 4B (Pharmacia). Une partie
de ces IgG est conjuguée à la peroxydase VI (Sigma). Le sérum est aliquoté, congelé à –20°C. Il peut
être nécessaire d’absorber les sérums sur fèces de chien dans une proportion de 2 pour 1 en les
mélangeant pendant 1 h et en les récupérant par centrifugation ;
iv)
Des plaques à fond plat (Dynatech) sont remplies d’IgG de lapin anti-Tænia (titre protéique entre 5 et
25 µg/ml déterminé par spectrophotométrie à rayons UV) à raison de 100 µl/puits, l’antisérum dilué
dans un tampon 0,05 M NaHCO3/Na2CO3 à pH 9,6. Les plaques sont incubées une nuit à 4°C, les
puits rincés 3 fois avec du PBS/0,1 % de Tween, bloqués avec du PBS/0,3 % Tween pendant 1 h et
rincés de nouveau. Sont ajoutés 100 µl du surnageant fécal avec 50 % de sérum de veau fœtal, les
plaques sont incubées 1 h et rincées 3 fois. 100 µl d’IgG anti-Tænia conjuguée à la peroxydase (dilué
au 1/100 ou au 1/200) sont ajoutés, les plaques incubées 1 h avant d’être lavées 3 fois. La solution
substrat (100 µl d’acide 5-amino-salicylique [Sigma] et 0,005 % d’eau dans un tampon phosphate à
0,1 M renfermant 1 mM de Na2EDTA [ethylène diamine tétra-acétique acide] à pH 6) est ajoutée
pendant 25 min et le résultat est lu à 450 nm. La valeur seuil est la moyenne plus 3 écart-types des
valeurs de fèces de chien sain.
Diagnose des métacestodes
Chez l’animal vivant, les métacestodes de T. solium ou de T. saginata peuvent être palpés dans la langue, à
la fois chez l’animal vivant et en examen post mortem ou en inspection des viandes, la palpation de la
langue a une valeur diagnostique uniquement chez le porc et le bétail fortement infesté ; en outre, ils
peuvent être difficiles à distinguer de grands kystes à Sarcocystis.
Manuel terrestre de l’OIE 2005
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Chapitre 2.10.1. - Cysticercoses
•
Inspection des viandes — procédure diagnostique principale
Les métacestodes sont visibles d’abord comme de très petits kystes, environ 1 mm, et leur détection
requiert de fines coupes d’organes au laboratoire. La plupart des jeunes kystes sont entourés par une
couche ou capsule de cellules inflammatoires (histologiquement, les cellules mononucléées et les
éosinophiles prédominent). Plus tard, ils peuvent dégénérer mais les capacités du parasite à échapper au
système immunitaire font que, au cours de l’infection, quand les kystes mûrissent, peu de cellules
inflammatoires sont présentes à proximité du kyste et le cysticerque en localisation intermusculaire est
entouré d’une fine capsule fibreuse.
Théoriquement, les kystes peuvent être visualisés ou perçus au toucher dans des tissus comme la langue
chez des animaux fortement infestés, dès la 2e semaine après l’infestation. Les kystes sont vraiment visibles
à partir de 6 semaines, et quand ils sont mûrs, sont habituellement ovales, environ 10 x 5 mm, avec une
membrane blanche, fine, totalement transparente et une capsule provenant de l’hôte ; un liquide clair interne
est observable ainsi que le scolex, qui est visible comme une tache blanche à l’intérieur du kyste et qui est
habituellement invaginé au milieu de la paroi.
A l’inspection de la carcasse, la plupart des kystes détectés, souvent 85 %, sont morts. La proportion selon
laquelle les kystes vieillissent, meurent et ainsi dégénèrent, varie selon l’espèce parasite et aussi selon le
tissu dans lequel le kyste est enchâssé. Habituellement, la mort du kyste survient dans les 9 mois qui
suivent l’infection d’une vache adulte par T. saginata. Néanmoins, les kystes peuvent rester viables pendant
plusieurs années si de jeunes bovins sont infestés dans les premiers jours de la vie. Les kystes de
T. hydatigena dans la cavité péritonéale du mouton et ceux de T. solium survivent des années dans
l’encéphale de l’homme, et les symptômes ne s’expriment souvent que lorsque les kystes dégénèrent. En
général, les kystes meurent plus vite dans leurs sites d’élection. Il est suggéré que ceci est dû à la plus
grande vascularisation de ces muscles. A l’inverse, le niveau plus important d’activité musculaire (qui est
elle-même en relation avec une plus grande vascularisation) peut endommager le parasite, autorisant la
libération du liquide et peut-être l’incapacité du parasite à échapper à la réponse immunitaire. Des kystes à
des stades différents de viabilité et de dégénérescence peuvent être retrouvés chez le même hôte.
Les kystes en dégénérescence varient dans leur aspect. La capsule fibreuse de l’hôte s’épaissit et devient
opaque, mais le kyste à l’intérieur reste apparemment normal. Le liquide devient progressivement trouble et
envahi de cellules inflammatoires. La cavité du kyste se remplit de matériel verdâtre (éosinophilique), puis
jaune, caséeux, d’aspect repoussant, souvent de dimensions plus grandes et probablement plus facile à voir
dans la viande que le kyste originel viable. Plus tard, le kyste se calcifie. Parce que la méthode PCR a été
largement utilisée pour différencier les teniidés adultes chez l’homme, elle pourrait être appliquée pour
l’identification confirmée de métacestode.
Après le traitement de T. saginata et de T. solium chez le bétail et le porc avec des médicaments comme
l’albendazole et l’oxfendazole, les kystes peuvent perdre leur liquide et dégénérer. La lésion qui en résulte
est plus petite que celle observée après une mort naturelle. Néanmoins, les kystes morts avant le traitement
de l’animal resteront grands et visibles.
Quand des kystes très jeunes (sans scolex) ou dégénérés doivent être différenciés d’autres lésions, la
compression du kyste, le calque du contenu caséeux et l’examen histologique de lames colorées à
l’hematoxyline et l’éosine sont utilisés. L’examen microscopique peut révéler des corpuscules calcaires
(concrétions concentriques de minéraux d’environ 5 à 10 µm). Ceci indique une origine due à un cestode et
permet de différencier un kyste immature parasitaire d’un simple kyste. La présence de crochets et leur
longueur associés à l’identification de l’espèce parasitée et du tissu concerné peut aider à l’identification.
Ceci peut être très utile pour trouver un nouveau cestode chez une espèce animale ou une zone
géographique chez qui, historiquement, le parasite était absent.
Les procédures d’inspection des viandes varient avec le parasite et l’hôte impliqué, c’est à dire zoonotique
ou non, le tissu concerné et les réglementations du pays considéré. Les examens tendent à être plus
sévères avec les infestations zoonotiques à T. saginata et T. solium.
En général, les procédures d’inspection consistent à :
i)
Inspection visuelle de la carcasse, des surfaces de section, et des organes. Ceci peut révéler
T. saginata, T. solium et T. ovis dans les muscles, T. hydatigena dans le foie, le mésentère et
l’épiploon ou T. mutliceps dans l’encéphale ;
ii)
Les masseters internes et externes et les ptérygoïdiens doivent être examinés un à un et être incisés
1 ou 2 fois, les coupes devant être parallèles à l’os et perpendiculaire au muscle ;
iii)
La partie libre de la langue est examinée visuellement et par palpation ;
1098
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Chapitre 2.10.1. - Cysticercoses
iv)
Le péricarde et le cœur sont examinés visuellement. Habituellement, le cœur est incisé une fois dans
sa longueur au niveau du ventricule gauche et du septum interventriculaire, exposant ainsi les surfaces
internes et de coupe à l’examen. Les incisions vont de la base à l’apex et des réglementations peuvent
requérir parfois des incisions supplémentaires (parfois 4) profondes dans le ventricule gauche. Sinon le
cœur peut être examiné en surface puis en interne après des coupes au travers du septum
interventriculaire et une éversion ;
v)
Les muscles du diaphragme, après résection du péritoine, sont examinés et peuvent être incisés ;
vi)
L’œsophage est examiné ;
vii)
En particulier dans les pays africains, le muscle triceps du bras est incisé profondément 5 cm en
dessous du coude. Des coupes supplémentaires peuvent être faites. Le muscle droit interne peut être
également incisé parallèlement à la symphyse pubienne. Ces incisions peuvent aussi être réalisées
pour T. solium du porc. De telles incisions concernant les membres sont faites en Afrique parce que de
nombreux parasites sont soupçonnés de se loger dans ces muscles chez l’animal de travail ou de
pâturage parcourant de longues distances en relation avec un exercice et, par conséquent, un flux
sanguin augmenté pour ces masses musculaires. D’autres pays requièrent de telles incisions dans les
muscles des membres. Néanmoins, comme cela dévalue la viande, ces incisions doivent être faites
généralement une fois qu’un ou plusieurs kystes a été trouvés en un site électif signant ainsi l’étendue
de l’infestation.
L’incision initiale dans tout tissu est la plus importante, mais des incisions supplémentaires peuvent être
requises par des réglementations ou requises si des kystes sont observés à la faveur de(s) incision(s)
initiale(s).
Des procédures supplémentaires peuvent être requises pour des parasites spécifiques et l’évaluation des
carcasses, des viscères, des abats et du sang varieront selon les espèces de Tænia et les réglementations
des pays. La décision concernant les carcasses infestées sera prise selon 3 modalités : i) autorisation pour
la consommation humaine ; ii) saisie partielle et autorisation pour le reste de la carcasse, mais dans le cas
des zoonoses à T. saginata et T. solium, la carcasse, la viande et les viscères doivent être traités, iii) saisie
totale des carcasses fortement infestées ou cachectiques en raison d’autres maladies.
T. saginata : le bétail de moins de 6 semaines ou de moins de 32 kg n’est, en général, pas examiné. Les
sites électifs sont le cœur, la langue, les masséters et le diaphragme, probablement parce qu’ils reçoivent
une vascularisation importante. Néanmoins, les kystes peuvent être trouvés dans tout muscle de la
carcasse. Si la carcasse d’un lot est trouvée infestée, toutes les carcasses du même lot doivent être
conservées jusqu’à l’obtention d’une confirmation du laboratoire. Si l’infestation à T. saginata est confirmée,
des incisions complémentaires sont habituellement faites sur les carcasses du lot ; toutes les lésions
suspectes trouvées sur les autres carcasses sont considérées comme étant dues à T. saginata sans
confirmation du laboratoire. Les lésions dues à T. saginata doivent être distinguées des kystes à Sarcocystis
et des lésions d’actinobacillose.
Décision : si une carcasse est considérée comme fortement infestée, alors la carcasse, la viande, les abats
et le sang sont saisis. La description d’une forte infestation varie, mais généralement elle repose sur la
détection de kystes en 2 sites électifs ou plus de 2 sites dans les membres. Dans le cas d’une infestation
moindre, les parties infestées et les tissus environnants sont éliminés et détruits. La carcasse et les viscères
consommables doivent alors être traités ; le traitement varie avec le pays et les équipements disponibles et
comprend : i) congélation à au moins –10°C pendant 10 à 14 jours, ou au moins –7°C pendant 21 jours ;
ii) la viande désossée est congelée à au moins –10°C pour au moins 20 jours ; iii) cuite à au moins 60°C à
2
cœur ; iv) soumise à une pression de 0,49 kg/cm ; v) cuite entre 95 et 100°C pendant 30 min ; ou
vi) marinée dans le sel pendant 21 jours entre 8 et 12°C. La congélation brutale nécessite une
attention particulière ; généralement, un morceau de 30 kg requiert 2 cycles de 24 h à –30,9°C suivis d’une
conservation à –23,3°C pour tuer les scolex. Fréquemment la viande non traitée peut être exportée bien que
dans certains pays, elle ne puisse être exportée que si elle a été salée au préalable. Même si à l’inspection
seuls des kystes morts sont observés, le traitement de la carcasse est justifié parce qu’environ 10 % des
carcasses faiblement infestées sont trouvées porteuses à la dissection de kystes morts et viables.
T. solium : les sites électifs sont ceux de T. saginata bien qu’une forte prévalence soit signalée dans les
épaules et les cuisses. Habituellement une incision (ou plus) est requise à 2,5 cm au-dessus du coude. Il est
affirmé que l’on détecte ainsi 13 % des carcasses infestées qui autrement ne seraient pas repérées.
Décision : dans certains pays, tout porc fortement ou faiblement infesté ainsi que le sang et les viscères sont
saisis. Dans les zones où l’infestation est habituelle, les carcasses faiblement infestées peuvent être cuites,
marinées et occasionnellement congelées.
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Chapitre 2.10.1. - Cysticercoses
Tænia hydatigena : le parasite migrant dans le foie laisse des trajets hémorragiques qui deviennent ensuite
verts/bruns avec l’inflammation puis blancs à cause de la fibrose. Pour l’enregistrement, ils doivent être
différenciés de ceux de la grande douve, si possible, par l’identification des cysticerques ou des douves
adultes. Les taches de lait dues à l’infestation par Ascaris sont discernables car les lésions apparaissent de
couleur pâle à blanche, petites, sous forme de foyers isolés. Quelques kystes restent prisonniers sous la
capsule du foie. Ils sont habituellement petits et dégénèrent précocement puis se calcifient pour donner des
lésions en forme de chou-fleur. Tænia hydatigena est habituellement superficiel ou sous-séreux alors que
les kystes hydatiques à Echinococcus granulosus sont plus profonds dans le parenchyme. Quand ils sont
viables, le premier a un scolex unique allongé alors que le second, fertile, renferme plusieurs scolex.
L’histologie peut être requise pour la différenciation. La coloration à l’hématoxyline-éosine révèlera la
membrane germinative même sur de jeunes kystes. Sa présence ou son absence peut être confirmée par la
coloration à l’acide per-iodique de Schiff, les protéines fortement glycolysées de la membrane germinative
étant colorées en rouge. Les lésions dues à T. hydatigena chez le bétail et le porc peuvent ressembler à
celles de la tuberculose. Néanmoins, les nœuds lymphatiques satellites ne sont pas impliqués, le contenu
des kystes parasitaires sont plus facilement expulsés et des restes de crochets et de corpuscules calcaires
peuvent être observés ou, en cas de tuberculose, la coloration de Ziehl-Neelsen peut révéler des bactéries.
Décision : habituellement seuls quelques kystes ou des trajets sont présents et peuvent être bien nets. Les
foies et l’épiploon fortement infestés sont saisis. Des infestations aiguës sont rarement observées, avec de
grands nombres de parasites en migration produisant une hépatite traumatique, de l’ascite, des œdèmes,
etc., entraînant secondairement une saisie de la carcasse.
Tænia multiceps : le site de prédilection est l’encéphale et la moelle épinière.
Au début, la migration des parasites peut entraîner des trajets rougeâtres puis gris, purulents dans
l’encéphale et, lors de forte infestation, le mouton peut présenter une méningo-encéphalite. Les signes
cliniques du kyste mûr causant une atrophie par pression varient selon sa localisation dans l’encéphale et le
mouton peut progressivement être incapable de s’alimenter et devenir cachectique. Lors d’une forte
infestation, les parasites migrent et se développent dans d’autres tissus, mais meurent précocement. Ils
produisent de petites lésions de 1mm, qui renferment un kyste encapsulé, puis éosinophilique, du matériel
caséeux qui peut ensuite se calcifier.
Décision : Au départ, seule la tête est saisie et quelques kystes peuvent être retirés s’ils sont nettement
visibles dans le tissu intermusculaire ou sous-cutané. Plus tard, l’animal peut être incapable de s’alimenter
et sera saisi alors pour cachexie, etc.
Tænia ovis : les sites de prédilection sont ceux de T. saginata. Les kystes peuvent être confondus avec les
grands kystes de Sarcocystis gigantea.
Décision : habituellement, la détection jusqu’à 2 à 5 kystes entraîne une saisie partielle et le reste est
accepté. Cela ne préjuge pas de la présence inesthétique de parasites vivants ou dégénérés dans d’autres
tissus. Les ultrasons et les rayons X ont été testés pour leur détection. Lors de fortes infestations, la
carcasse est saisie.
Les procédures d’inspection des viandes permettent la détection d’environ 50 % des animaux
réellement infestés. Les infestations modérées passent aisément à côté de la palpation et de l’inspection de
la viande – dans une étude, 78 % des carcasses infestées avec plus de 20 kystes sont détectées alors que
seulement 31 % de celles avec peu de kystes le sont (24). L’efficacité de l’inspection des viandes varie avec
le nombre et la localisation des incisions. Par exemple, au Zimbabwe, 58 % du bétail ne présente des
lésions qu’au niveau de la tête, 20 % seulement au niveau des épaules, 8 % seulement dans le cœur, alors
que 81 % sont considérés comme infestés si on inclut les 3 organes. Walther & Koste (24) au Kenya
trouvent également que les sites de prédilection ne sont pas nécessairement infestés dans 57 % des
carcasses considérées comme positives à la dissection. Ils confirment l’importance des incisions des
épaules dans la détection en Afrique puisque 20 % du bétail est confirmé comme infesté uniquement par
inspection des épaules.
Chez l’homme, le signe le plus habituel de l’infestation cérébrale par T. solium est la crise d’épilepsie suivie
par des céphalées, mais un plusieurs signes comme des vomissements, des psychoses, etc., sont observés
selon le nombre, la localisation, la viabilité ou le niveau de dégénérescence des cysticerques (viable, en
dégénérescence, calcification) (3, 12). Chez l’homme, l’évaluation clinique et soit la tomodensitométrie
(le mieux pour les kystes calcifiés), soit l’imagerie par résonance magnétique (détection de kystes à la fois
en localisation parenchymateuse ou non, et suivi de l’évolution de la lésion) sont utilisés pour la détection
des localisations exactes et la viabilité des métacestodes de T. solium et T. multiceps. Ceci reste le moyen
le plus efficace pour le diagnostic, mais l’accès aux équipements d’imagerie peut ne pas être disponible en
zones d’endémie. Les kystes calcifiés sont détectés par radiographie.
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Chapitre 2.10.1. - Cysticercoses
2.
Épreuves sérologiques
Le développement d’une épreuve de diagnostic sensible, spécifique et automatisable réduirait grandement le coût
de dépréciation de la carcasse et aussi le coût des manipulations. Les épreuves sérologiques pour animal n’ont
pas atteint le stade où la commercialisation pour un diagnostic individuel ou à grande échelle de carcasses
infestées à l’abattoir serait possible. Toutes les méthodes testées – Ag-ELISA, Anticorps-ELISA, et EITB
(Enzyme-linked Immunoelectro Transfer Blot) et inspection de la langue – montrent une faible sensibilité chez le
porc fermier infesté naturellement et faiblement par T. solium (18). Ceci est en contradiction avec la forte
sensibilité et spécificité du test appliqué commercialement aux porcs élevés à l’abri de l’infestation et aux porcs
expérimentalement infestés par T. solium (17, 18). Ce fait est également vérifié pour les infestations du bétail
avec T. saginata (16, 22). Ainsi, seul un faible pourcentage (13 à 22 %) du bétail hébergeant moins de 30 à
50 cysticerques viables est détecté par Ag-ELISA. A l’inverse, les anticorps se révèlent plus utiles pour la
détection des kystes qui ne sont plus viables. Néanmoins, les Ag-ELISA sont utiles dans des études
épidémiologiques de terrain pour révéler la transmission. Par exemple, la détection d’infestation viable chez le
bétail ou le porc indiquerait la source de l’infestation, la saison de la transmission et l’âge des animaux à risques.
L’EITB pour T. solium (utilisé pour la détection des anticorps dirigé contre le complexe des glycoprotéines
lentille-lectine, dans le liquide céphalorachidien ou le sérum) est largement utilisé chez l’homme (20, 21) dans de
nombreux laboratoires et est aussi disponible commercialement (Immunetics, Cambridge, Massachusetts, USA).
Un Ag-ELISA utilisant des anticorps polyclonaux ou monoclonaux (pour la détection d’Ag dans le liquide
céphalorachidien) a une spécificité et une sensibilité pouvant atteindre 86 % chez des patients sélectionnés
(8). La spécificité de ces tests tend à être très haute, mais la sensibilité très basse, ceci est en partie en relation
avec le nombre de kystes. La hiérarchie des symptômes, des études d’imagerie et des méthodes sérologiques a
été présentée par del Brutto et al. (4).
C. SPÉCIFICATIONS APPLICABLES AUX VACCINS ET AUX PRODUITS
BIOLOGIQUES À USAGE DIAGNOSTIQUE
L’identification immunochimique des Ag vaccinaux et leur production par la technologie utilisant l’ADN
recombinant ont été exceptionnellement concluantes pour les teniidés par comparaison avec d’autres eucaryotes
et sont décrits par Lightowlers & Gauci (11). La vaccination avec les produits cités a été très efficace. Toutes ces
réussites ont pu être réalisées grâce au fait qu’une forte immunité protectrice apparaît après une infestation
naturelle, que de hauts niveaux d’immunité sont obtenus par les Ag d’extraits d’oncosphères, qu’il y a une bonne
immunité croisée entre les espèces de Tænia, et que l’immunité est de nature essentiellement humorale comme
le prouve le transfert passif d’immunité de la mère de sorte que les Ac pourraient être utilisés comme sonde de
détection des Ag protecteurs. Le premier vaccin développé a été le vaccin contre T. ovis. L’Ag 45W de T. solium
a été isolé comme protéine recombinante à partir de E. coli. L’Ag associé à la protéine glutathion-S-transférase
est très efficace, mais il ne l’est pas si associé à la beta-galactosidase. Le contrôle se fait par Ag-ELISA et
l’immunogénicité in vivo, et le vaccin a donné une protection d’au moins 1 an dans des essais de terrain. Deux
autres antigènes (To16K et To18K) ont été isolés et clonés et chacune de ces protéines est immunogène.
En utilisant les bénéfices d’une immunité croisée et en travaillant avec l’ADNc de T. ovis, TSA9 et
TSA18, équivalents à To45W et To18, ont été identifiés dans l’ADN de T. saginata puis clonés à partir de l’ARNm
de l’oncosphère de T. saginata. A l’inverse des Ag individuels de T. ovis, l’immunisation avec les 2 Ag de
T. saginata se révèlent nécessaires pour produire un haut niveau de protection. Les ADNc de T. ovis 45W et 18K
sont également utilisés pour cloner les Ag équivalents TSO45 et TSOL18 de T. solium. Les 2 vaccins T. ovis et
T. saginata donnent respectivement plus de 94 % et 98 % de protection chez le mouton et les bovins. Le vaccin
contre T. ovis a été enregistré en 1994 par l’Animal Remedies Board de Nouvelle-Zélande. Néanmoins, en raison
des changements du marché néo-zélandais, le vaccin n’est pas disponible commercialement. Le coût d’une
production à grande échelle des antigènes, les conditions de production et les variations potentielles dans les
antigènes exprimés ont été exposés brièvement par Lightowlers & Gauci (11). Des peptides synthétiques à partir
des séquences de ces antigènes de teniidés induisent l’apparition d’anticorps mais pas de protection, indiquant
ainsi que les épitopes protecteurs reposent sur une conformation moléculaire. Néanmoins, récemment, des
niveaux raisonnables de protection ont été obtenus expérimentalement chez des porcelets exposés à une
épreuve naturelle de T. solium, en utilisant des peptides synthétiques issus de la séquence protéique du parasite
murin T. crassiceps (10). Il est possible que les analyses coût-bénéfices concernant l’utilisation du vaccin contre
T. saginata devancent son utilisation dans de nombreux pays puisque le coût du vaccin est très élevé dans
l’économie du bétail. L’importance de T. solium chez l’homme augmente le coût de la maladie, mais il reste à
déterminer si l’importance de la maladie en zone d’endémie sera suffisante pour favoriser la production
commerciale du vaccin et son utilisation chez le bétail.
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