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Canepari, Eleonora: Rezension über: Bertrand Forclaz, La famille
Borghese et ses fiefs. L’autorité négociée dans l’État pontifical
d’Ancien Régime, Rome: École Française de Rome, 2006, in:
Annales, 2008, 5.2 - Pouvoirs, S. 1062-1063,
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COMPTES RENDUS
le modèle théologique de l’Eucharistie lié au
règne personnel de Louis XIV. En toute
rigueur, il aurait fallu élaborer pour l’Espagne
une étude de la théorie du signe au temps de
Philippe II pour jeter des éclairages sur les
« pouvoirs de l’image » et sur les différences
et les complémentarités entre image textuelle et
iconographique. L’ouvrage n’en reste pas moins
une entrée utile dans l’imaginaire politique
de Philippe II, riche en illustrations et en
analyses fines.
HÉLOÏSE HERMANT
Bertrand Forclaz
La famille Borghese et ses fiefs.
L’autorité négociée dans l’État pontifical
d’Ancien Régime
Rome, École française de Rome, 2006,
418 p.
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L’exercice du pouvoir seigneurial dans l’État
pontifical est au cœur de l’ouvrage de Bertrand
Forclaz sur la famille Borghese aux XVIIe et
e
XVIII siècles. La question de l’autorité seigneuriale concerne un problème central de
l’historiographie d’Ancien Régime, c’est-àdire la formation de l’État moderne et le
processus de centralisation administrative.
L’efficacité de ce processus dans l’État pontifical a été mise en question par plusieurs
recherches, qui ont notamment souligné le
caractère de compromis de la politique centralisatrice des papes.
B. Forclaz s’insère dans ce débat à travers
une étude qui vise à décrire l’exercice de l’autorité seigneuriale dans les fiefs – en particulier
dans ses aspects sociaux et politiques – avec
une attention constante et particulière pour les
formes relationnelles nouées par les acteurs.
La démarche suivie par l’auteur se fonde sur
la micro-histoire – en tirant profit surtout de la
variation de l’échelle d’analyse et des réflexions
sur les échanges mutuels entre centre et périphéries des États –, sur le concept de configuration de Norbert Elias, ainsi que sur l’analyse
de réseaux. La juridiction, l’autorité exercée
sur les communautés et les relations entre les
différents acteurs (le seigneur, les notables
locaux, les vassaux – habitants des fiefs – et
les autorités extérieures) sont les axes autour
desquels la recherche se développe.
Le choix de la famille Borghese comme
sujet de l’analyse relève de sa position au sein
de la noblesse romaine : elle est la famille du
pape Paul V (1605-1621), propriétaire d’un des
plus importants patrimoines fonciers jusqu’à la
fin du XVIIIe siècle. Suite à la vente forcée de
biens nobiliaires, à la fin du XVI e siècle, on
assiste à l’ascension de certaines familles qui
profitent de la situation pour se créer d’importants patrimoines fonciers. Parmi elles, les
Borghese ont l’une des réussites les plus évidentes : ils arrivent à accumuler 31 fiefs à la fin
du XVIIIe siècle, composant ainsi des domaines
compacts dans le Latium méridional et la
Sabine. Dans le parcours d’ascension de la
famille, les relations avec l’autorité pontificale
sont un véritable atout qui lui permet de
constituer le premier noyau du patrimoine.
Fondé sur une utilisation intensive et avisée des archives familiales des Borghese (atti di
famiglia, livres de comptes, correspondances,
actes de procès criminels), des archives des
autorités extérieures dont la compétence s’étendait aux fiefs (Congregazione della Sacra Consulta,
Congregazione del Buon Governo et Tribunal du
Gouverneur) et des archives locales, l’ouvrage
est divisé en deux parties, consacrées l’une à
la juridiction seigneuriale et l’autre à l’exercice
de l’autorité dans les communautés.
La recherche s’intéresse d’abord aux acteurs
impliqués dans l’administration des fiefs – le
seigneur, les gouverneurs, les officiers communaux –, en soulignant l’importance de l’exercice des droits par le feudataire. Ensuite,
l’enquête analyse les pouvoirs juridictionnels
comme éléments clefs de la domination du seigneur, en tenant compte de l’identité entre
gouvernement et justice typique d’Ancien
Régime. On découvre ainsi que les Borghese
jouissent d’une ample autonomie juridictionnelle dans leurs fiefs, et qu’ils mettent en
œuvre à leur tour une politique centralisatrice,
ce qui montre que la pluralité des centres de
pouvoir est un concept opérationnel. En accord
avec la leçon micro-historique, B. Forclaz
complète la première partie en adoptant le
point de vue des autres acteurs, en déplaçant
l’analyse au niveau des gouverneurs – dont il
considère les carrières et les graves problèmes
COMPTES RENDUS
dans l’imposition de leur autorité – et ensuite
« au ras du sol », afin de s’intéresser aux relations
complexes entre les vassaux et le seigneur.
Celles-là sont considérées à partir de l’ample
recours fait par les vassaux à la justice seigneuriale, dont tirent autant profit le seigneur que
les suppliants.
La deuxième partie de l’ouvrage s’occupe
des « configurations variables » constituées par
le seigneur, les notables et les prélats. La
mobilité des configurations est évidente lors
de conflits de juridiction (du seigneur, ecclésiastique, des magistratures publiques, etc.) :
selon les cas et les enjeux, l’opposition entre
les autorités concurrentes peut laisser la place
à la collaboration. Les différentes autorités
sont présentes dans les fiefs à travers les
notables locaux, clients des Borghese, qui ont
un rôle de médiateurs, de brokers, puisqu’ils
mettent en contact les villages avec le contexte
plus ample de l’État pontifical. En tant que
clients, les notables sont pour le seigneur un
véritable instrument de gouvernement, qui lui
permet de garder la prise sur le territoire
malgré son absence. Néanmoins, les réseaux
des notables ne se concentrent pas sur la seule
administration centrale des Borghese ; au
contraire, le rôle de médiateur des élites
locales est d’autant plus efficace que celles-ci
mettent en œuvre des stratégies de différenciation des partenaires, à savoir les différentes
autorités. Celles-ci constituent l’un des éléments autour desquels la lutte politique locale
s’organise : l’alternance entre les factions est
étroitement liée à la capacité des notables de
manipuler les autorités extérieures et de jouir
des superpositions des différentes institutions.
La lutte de factions montre d’ailleurs la fragilité du contrôle politique exercé par les
Borghese sur leurs fiefs, due à la centralité des
acteurs locaux – responsables de la mise en
œuvre des ordres provenant de Rome – et à
leur capacité de tisser des relations avec tous
les sujets institutionnels impliqués.
Le dernier chapitre se concentre sur le
déclin de l’autorité seigneuriale dans les fiefs
au cours du XVIIIe siècle. Malgré les nombreux
problèmes d’administration qui fragilisent leur
prise sur les fiefs, au cours du XVIIe siècle la
famille Borghese dispose d’une ample autonomie juridictionnelle et demeure l’interlocu-
trice principale des communautés inféodées.
Cette situation change de façon drastique au
début du XVIIIe siècle, lorsque les fiefs passent
sous la juridiction de la Congregazione del Buon
Governo – la congrégation pontificale créée afin
d’exercer un contrôle administratif sur les
finances des communautés. Cela entraîne un
considérable affaiblissement du pouvoir seigneurial et la remise en cause de ses droits et
prérogatives. Il importe de remarquer que la
pénétration du Buon Governo dans les territoires des Borghese fut possible grâce aux
recours intentés lors des conflits entre notables,
selon cette dynamique d’instrumentalisation
réciproque qui est centrale tout au long de
l’ouvrage.
À travers une exposition claire et prenante,
B. Forclaz met en évidence le caractère négocié de l’autorité seigneuriale, ainsi que les
interdépendances et les instrumentalisations
mises en acte par les différents acteurs. Grâce
au changement continuel de point de vue
adopté (à la fois du seigneur, des médiateurs, des vassaux, des autorités extérieures),
l’auteur montre que l’exercice de l’autorité
s’effectue à travers les usages que les acteurs
en font et que le « bas » et le « haut », éléments
de la configuration liés par les interdépendances
réciproques, sont les deux pôles d’un échange
continuel.
ELEONORA CANEPARI
Caroline Castiglione
Patrons and adversaries: Nobles
and villagers in Italian politics, 1640-1760
Oxford, Oxford University Press, 2005,
XII-254 p.
Avec cet ouvrage, Caroline Castiglione apporte
une contribution majeure à l’histoire sociale et
politique des campagnes italiennes et à l’étude
de la formation de l’État à l’époque moderne.
Elle a choisi comme objet un terrain encore
en grande partie inexploré, soit les droits seigneuriaux exercés par la noblesse romaine
dans l’État pontifical aux XVIIe et XVIIIe siècles.
Les historiens ont longtemps opposé l’absentéisme supposé des seigneurs romains à l’efficacité de la centralisation administrative mise
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