la sous-traitance en matière de transport routier de marchandises

Transcription

la sous-traitance en matière de transport routier de marchandises
PÔLE DE DROIT DES TRANSPORTS D’AIX-MARSEILLE
FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE
CENTRE DE DROIT MARITIME ET DES TRANSPORTS
Christian SCAPEL
Directeur
LA SOUS-TRAITANCE EN
MATIÈRE DE TRANSPORT ROUTIER
DE MARCHANDISES
Réalisé par Mademoiselle DIENNET Cécile
Aix en Provence- Septembre 2006
Je tiens à remercier tout particulièrement :
Monsieur C.SCAPEL, Mademoiselle M.CHERON,
Mademoiselle S.CORMIER Monsieur D. HOENIG pour leur aide
si précieuse.
Mais aussi
Mes parents, mes grands-parents paternels et maternels,
mon frère Benoît et mes amis pour leur soutien.
2
INTRODUCTION
La sous-traitance a été dotée par la loi du 31 décembre 1975, pour la
première fois, d’un statut « général » en ce sens qu’il est applicable à
toutes les hypothèses de contrat d’entreprise. Afin d’éviter les « faillites »
en chaîne provoquées par la mise en liquidation judiciaire de
l’entrepreneur principal, ce texte a instauré des règles destinées à offrir
au sous-traitant des garanties de paiement en cas de défaillance de son
débiteur : fourniture d’une caution, agrément par le maître d’ouvrage,
paiement direct par celui-ci s’il s’agit d’une personne publique ou action
directe contre lui s’il s’agit d’une personne privée. La faible rémunération
des entreprises sous-traitantes influence évidemment les résultats
financiers de ces dernières. Mais le plus grave c'est l'effet que la soustraitance provoque sur l'ensemble des prix, tirant ces derniers à la
baisse. Économiquement, ce bas niveau des prix de la sous-traitance ne
serait pas critiquable si cette dernière ne s'effectuait pas dans des
conditions de concurrence déloyale et souvent en s'affranchissant des
règles essentielles, notamment en matière de sécurité (temps de repos,
temps de conduite, surcharge, vitesse et autres règles d'hygiène et de
sécurité).
La réalité économique s’imposant également en transport, le taux de
rentabilité est structurellement très bas dans tous les modes ; dès lors,
compte tenu des prix du marché, la marge de l'affrètement ne peut
provenir que du taux de commission. Or, cette commission ne peut être
rajoutée car les affréteurs sont, comme les autres opérateurs, confrontés
au prix du marché. Il faut donc que les transporteurs affrétés acceptent
des prix amputés pour que l'affréteur se rémunère. Une amputation qui
n'est souvent possible qu'en se dispensant de certaines règles de
concurrence. Le recours a la sous-traitance est fréquent en matière de
transport. Le phénomène est ancien.
3
Il a suscité une jurisprudence abondante, ainsi que l’adoption de divers
textes destinés à pallier les problèmes que pose son application. La
sous-traitance des opérations de transport est une réalité peu connue et
peu étudiée. Un droit « spécial » de la sous-traitance est apparu dans le
secteur des transports. Il est constitué de pratiques, de contrats et de
textes
(français,
communautaires
et
internationaux)
destinés
à
circonscrire les éventuels problèmes posés par le recours à ce
mécanisme, surtout en ce qui concerne la sécurité de l’opération de
transport, ou la protection sociale des personnes qui en sont chargées.
Certains outils juridiques ayant pour objet de régir les relations des
entreprises de transport avec leurs clients, d’autres précisent le statut de
ces entreprises et leurs relations entre elles. L‘enseignement principal du
droit des transports sur le sujet de la sous-traitance consiste à souligner
toutes les techniques utilisées pour aménager les relations entre ces
tiers que sont les contractants extrêmes. Une première technique
concerne le transporteur sous-traitant. Il bénéficie de l’action directe en
paiement de la loi de 1975 sur la sous-traitance. La sous-traitance
implique des relations spécifiques entre le sous-traitant et le donneur
d’ordre. Elle a des conséquences très importantes sur les échanges
entre les industries, à savoir :
Une spécialisation de plus en plus accrue des entreprises, une
interdépendance entre sous-traitants et donneurs d’ordres.
Cette interdépendance détermine la durée des relations entre les
entreprises. Le travail sur mesure implique de la part des sous-traitants
des investissements également sur mesure qu’ils n’accepteront
d’assumer qu’avec des engagements réciproques à long terme. Ces
relations entre entreprises impactent sensiblement sur les évolutions
économiques et commerciales.
4
Les diverses caractéristiques des entreprises- comme leur taille, leur
appartenance à un réseau- peuvent s’expliquer par le changement de
leur positionnement, les unes devenant donneurs d’ordres, les autres
sous-traitantes.
Comme
dans
d’autres
secteurs
économiques,
une
partie
de
l’augmentation de la part des services en matière de transport provient
de l’externalisation de certaines fonctions qui, auparavant, étaient
accomplies au sein de l’entreprise elle-même.
La sous-traitance apparaît justifiée par le choix de limiter les effectifs
en interne, d’extérioriser les opérations les moins rentables financièrement,
et les plus coûteuses socialement, auprès d’entreprises tierces. Plutôt que
de recruter, via des contrats de travail, la main d’œuvre nécessaire à la
satisfaction de ses besoins, un agent économique préfèrera « sous-traiter ».
De ce fait, il transfère le coût social sur le sous-traitant, puisque c’est ce
dernier qui va le plus souvent être identifié par le droit comme débiteur (en
tant qu’employeur) de l’application du statut social garanti par le droit social
au(x) salarié(s) ; et ce alors même que la sous-traitance permet
fréquemment au donneur d’ordres d’exercer, de fait (voire même de droit),
un certain pouvoir sur l’entreprise sous-traitante.
Or les sous-traitants étant généralement des PME, la garantie offerte
par ce statut sera plus fragile et plus faible.
Plus fragile en raison de la plus grande précarité économique qui est
souvent celle du sous-traitant par rapport à une grande entreprise, sa survie
étant plus difficile (plus de risque social parce que plus de risque
économique).
Plus faible en raison de la division de l’organisation productive en
unités plus petites.
5
Contrairement à certaines théories, le droit du travail astreint les PME
à moins d’obligations (et assure donc moins de garanties, et d’avantages
pour les salariés) qu’il ne le fait pour de plus grandes entreprises. Le
transfert du risque de l’emploi, et de sa gestion, est d’ailleurs un élément
déterminant de la stratégie des donneurs d’ordres. Ce faisant, la soustraitance produit un ensemble de différenciations : un même travail peut-être
accomplit avec un statut social différent.
L’opération de sous-traitance met en évidence- en matière de
transport comme dans tous les autres secteurs d’activité économique- trois
personnages, entre lesquels se tissent des relations complexes. L’ayant
droit à la marchandise est créancier du sous-traiteur, lequel est garant à son
égard des dommages qui peuvent être causés par le fait du sous-traitant,
contre qui il peut se retourner.
Le recours à la sous-traitance pose deux problèmes :l’opérateur de transport
est-il autorisé à en confier l’exécution matérielle à une autre entreprise ?
Quel est le cadre contractuel dans lequel ce recours est organisé ?
La mise en œuvre de la sous-traitance permet de nous questionner sur la
responsabilité du sous-traitant. Est-elle de nature contractuelle ou
délictuelle ? Répond-il de son seul fait ou également de celui de ses propres
substitués ?
Partant d’un examen préliminaire de la définition de la sous-traitance
et de son analyse juridique. Il convient de poursuivre la réflexion par une
première partie sur la légitimité de la sous-traitance, et d’approfondir les
modalités de la mise en œuvre de la sous-traitance dans une seconde
partie.
6
PARTIE PRÉLIMINAIRE
DEFINITIONS ET ANALYSES DE
LA SOUS-TRAITANCE
7
Section 1. Analyse de la sous-traitance
§1.Les avantages et les obstacles à la sous-traitance
Les avantages pour le donneur d’ordres consistent en une meilleure
utilisation des ressources existantes, à une recherche optimale pour une
production déterminée, à une baisse des coûts et à une orientation et
rentabilité optimale des investissements. En effet, la cession d’une partie
de
sa
production,
parallèlement
à
un
désinvestissement
ou
l’augmentation de production sans investissement nouveau amènent une
régression des frais fixes tels que les amortissements, les frais de
stockage et les frais liés à la production, ce qui se traduit souvent par un
gain, même après déduction du prix payé au sous traitant. De plus,
l’existence de tensions sur le marché de l’emploi peut constituer un
obstacle pour l’industriel qui désire étendre ses activités. Dans ce cas, la
sous-traitance sera pour lui une alternative valable. Le manque d’espace
physique pourrait dans certains cas présenter un obstacle à la
croissance d’une production :une solution pourrait également y être
apportée par la sous-traitance. Un lien de sous-traitance durable entre
unités de production complémentaires signifie donc :une meilleure
distribution du travail, une meilleure occupation du parc machines et des
prix de revient inférieurs.
Les avantages pour le sous-traitant résident dans une efficacité accrue
de la fonction « recherche et développement », dans une concentration
optimum des efforts, une création de technologie spécifique, une
modification de l’effort commercial. La concertation entre partenaires,
notamment au niveau des services de recherche, permet au soustraitant de posséder une connaissance très précise des besoins futurs
de son partenaire et de bénéficier d’une large vue sur les évolutions
possibles.Ainsi, l’entreprise sous-traitante se réserve des domaines pour
lesquels elle est structurellement la mieux adaptée.
8
En revanche, le manque de fiabilité et la mise en cause de l’emploi sont
des obstacles à la sous-traitance pour le donneur d’ordres. La décision
de supprimer la fabrication d’un élément de production pour le confier à
l’extérieur peut mettre en cause l’emploi d’une fraction du personnel et
créer des problèmes sociaux. En ce qui concerne le sous-traitant, la
spécialisation rend les entreprises vulnérables dans un univers de
marchés changeants, et il peut se placer dans une dépendance
excessive à l’égard du maître de l’ouvrage.
§2.La sous-traitance :élément de la stratégie de l’entreprise
Les moyens à mettre en œuvre par les producteurs afin de maintenir une
position favorable ou d’accroître leur part relative du marché deviennent
de plus en plus coûteux ;aussi l’expansion de la recherche de la
rentabilité débouchent-elles dans maints cas sur la sous-traitance. Celleci offre à l’entreprise le moyen de conserver une certaine souplesse tout
en évitant les dimensions trop importantes.Théoriquement, l’entreprise a
intérêt d’externaliser chaque fois qu’un investissement risque de retarder
la mise en œuvre de projets fondamentaux et spécifiques de sa vocation
ou se révèle disproportionné avec le gain qu’elle peut en retirer. Lorsqu’il
y a sous-traitance, la sensibilité de la gestion aux irrégularités des
fournisseurs est accentuée et cela souligne l’importance primordiale de
la fiabilité des sous-traitants. Si l’objectif final d’une politique de soustraitance représente l’optimalisation des coûts, elle doit s’apprécier en
termes de prix, qualité et sécurité de l’approvisionnement. En pratique,
on atteindra rarement ces trois objectifs- prix inférieurs, qualité
exceptionnelle et délais de livraison très courts- simultanément, car ces
éléments dépendent l’un de l’autre. Il faudra choisir un compromis.
§3.La sous-traitance :une notion floue
Elle peut prendre plusieurs visages : on distingue la sous-traitance de
capacité et la sous-traitance conjoncturelle, la sous-traitance industrielle
et la sous-traitance de marché.
9
Les Etats membres de la Communauté Européenne ne sont pas
parvenus à s’entendre sur une définition commune de la sous-traitance.
De plus, la sous-traitance de la prestation de transport de marchandises
est source de confusion en raison de l’existence du contrat de
commission de transport. Il existe depuis le milieu des années trente une
réglementation des conditions d’accès à la sous-traitance des transports
routiers. Le mécanisme de la sous-traitance des opérations de transport
a peu sollicité l’attention doctrinale.
Section 2 Définitions de la sous-traitance
À l’origine, la notion de sous-traitance vient du langage économique.
Au plan juridique, une loi domine la matière :la loi du 31 décembre 1975
« relative à la sous-traitance » qui a été rendue applicable, en 1998 aux
transports routiers de marchandises. Mais on ne peut pas se référer à ce
seul texte pour définir la sous-traitance. Il faut également tenir compte de
la LOTI 1 et de son décret d’application. Ainsi que de la loi du 31
décembre 1992 « relative aux relations de sous-traitance dans le secteur
du transport routier ». Chacune des lois ne donnent pas la même
définition. Il existe en parallèle du droit commun de la sous-traitance un
droit spécifique propre au secteur du transport routier 2 .
Nous examinerons deux principales approches : la loi du 31 décembre
1975 et la loi du 31 décembre 1992
Loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982
F.COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux,
ème
5
éd., 2001, n°911.
1
2
10
§1 La sous-traitance au sens de la loi du 31 décembre 1975
A. La définition
« Au sens de la présente loi, la sous-traitance est l’opération par laquelle
un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à
une autre personne appelée sous-traitant tout ou partie de l’exécution du
contrat d’entreprise ou du marché public conclu avec le maître de
l’ouvrage ».
Cette loi a institué un paiement direct à la charge du maître d’ouvrage et
prévoit, dans les autres cas, une possibilité d’action directe au profit du
sous-traitant, dont le paiement est garanti par une caution ou une
délégation.
Il en ressort que l’entrepreneur principal doit avoir fait accepter par le
maître de l’ouvrage chaque sous-traitant, et lui avoir fait agréer les
conditions de paiement.
Cette loi permet donc le paiement du sous-traitant en cas de faillite de
l’entrepreneur principal, c’est-à-dire celui qui a conclu le contrat avec la
maître d’ouvrage.
La loi du 31 décembre 1975 a été rendue applicable au transport routier
par une loi du 6 février 1998 3 .
Les caractéristiques du mécanisme législatif de protection du soustraitant mis en place en 1975 sont de deux ordres. Dans un premier
temps, la sous-traitance est une hypothèse de sous-contrat 4 .
3
4
Loi du 6 février 1998, art. 11.
J. NÉRET, le sous-contrat, n°19
11
Or l’élément principal du sous-contrat est « l’absence de convention
unissant directement les deux extrêmes, le contractant principal et le
substitut » 5 .
Dans un second temps, la loi du 31 décembre 1975 réduit la soustraitance au seul sous-contrat d’entreprise. En effet elle suppose la
conclusion de deux contrats d’entreprise successifs. La sous-traitance se
place dans un rapport tripartite dont le législateur de 1975 a régi le
paiement du sous-traitant.
B. Les incohérences
Le commissionnaire de transport (qui s’engage à faire déplacer la
marchandise) noue t il une relation de sous-traitance avec les
professionnels à qui il confie ses acheminements ?
Selon la loi de 1975, il semble que la réponse soit négative alors même
qu’en droit positif la solution contraire s’applique.
1.Inapplication de la loi de 1975 au commissionnaire de transport
Deux cas doivent être examinés :
- Le cas où le commissionnaire de transport recourt à un souscommissionnaire.
- Le cas où le commissionnaire de transport recourt à un
transporteur.
Il arrive que le commissionnaire de transport auquel s’adresse le client
se décharge de tout ou partie de sa mission sur un autre
commissionnaire. Mais dans ce cas précis le commissionnaire de
transport substitué peut-il, en cas de faillite du commissionnaire de
transport principal, demander directement paiement au client en se
prévalant des dispositions de la loi du 31 décembre 1975 ?
5
J. NÉRET, le sous-contrat, n°28
12
Au sens de la loi de 1975, cela ne constitue pas une soustraitance :celle-ci ne s’applique qu’aux seuls contrats d’entreprise.
Il en résulte que la loi du 31 décembre 1975 ne peut pas être invoquée
par le second commissionnaire de transport. Malgré ces dispositions, on
peut citer quelques décisions en sens contraire 6 .
Ensuite, il faut également s’attacher sur la problème de savoir si le
commissionnaire de transport sous-traite lorsqu’il conclut des contrats de
transport : la relation avec le transporteur, à qui il confie tout ou partie
des opérations matérielles de déplacement de la marchandise, est-elle
une relation de sous-traitance ?
Sous-traiter, c’est confier à un autre l’exécution de l’obligation que l’on a
souscrite. Or le commissionnaire de transport ne se substitue pas au
transporteur, il y a une simple exécution du contrat de commission : on
ne peut donc pas parler de sous-traitance.
Seulement, la jurisprudence a appliqué un régime original au
transporteur tenant sa mission d’un commissionnaire de transport : le
régime du voiturier «intermédiaire », qui était un régime spécifique du
transporteur sous-traitant 7 Ce régime a été abandonné. Il reste que de
nombreuses décisions de la Cour de cassation ont qualifié le
transporteur ayant contracté avec le commissionnaire de transport de
sous-traitant 8 .
Enfin, le législateur lui-même qualifie de sous-traitance la relation entre
le commissionnaire de transport et le transporteur :
Tribunal de commerce de Paris du 22 septembre 1983, Bouquerol c/ Spider
et Cour d’appel de Reims du 21 octobre 1985, Faïenceries c/ Wagner, Lamy
transport, 1988, t. 2, n°3016
7 RODIÈRE, Des commissionnaires de transports successifs : D.1958, chron.
P.217
8 CA Paris, 29 sept 1993 et 18 janvier 1995 : BTL 1993, p.791 et D. 1995, p111
6
13
« le transporteur ne peut recourir à la sous-traitance que s’il a la qualité
de
commissionnaire
de
transport
ou
dans
des
cas
exceptionnels » 9 .Selon ce texte, le transporteur qui sous-traite doit
prendre la qualité de commissionnaire de transport. Ce dernier a pour
fonction même de sous-traiter. Cette interprétation est confirmée par les
intitulés du titre 4 et de l’article 38 de l’ancien décret d’application du 14
mars 1986 10 : implicitement les opérations de commission de transport
sont des contrats de sous-traitance. Mais au contraire, dans un sens
opposé on peut retenir que la LOTI précise à l’article 33 alinéa 1er que le
transporteur qui recourt à la sous-traitance est celui « qui a passé un
contrat de transport ». On le qualifie donc de transporteur et non de
commissionnaire de transport.
Aussi, n’est-il pas sûr que ce texte soit véritablement en contradiction
avec la notion de sous-traitance au sens de la loi de 1975.
2.L’existence d’un lien contractuel entre les extrêmes.
Parfois, un lien contractuel se noue entre le sous-traitant (le transporteur
effectif) et le donneur d’ordre initial (le client du transporteur soustraiteur, ou du commissionnaire de transport).
Notamment, lorsque le sous-traitant prend la qualité de transporteur
successif ; ou bien lorsque, concluant un contrat de transport avec un
commissionnaire de transport, il se trouve du même coup lié
contractuellement au client de celui-ci en application de l’article L.132-8
du Code de commerce.
L’exécutant matériel de la prestation de déplacement « participe » au
contrat de transport conclu entre le client final et le sous-traiteur. Il n’en a
pas moins la qualité de sous-traitant au sens de la loi de 1992.
Art. 33 de la loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982.
D.du 14 mars 1986 « relatif aux transports routiers de marchandises » : JO du
18 mars 1986, remplacé par le décret du 30 août 1999
9
10
14
La loi du 31 décembre 1975 n’interdit pas en effet, qu’un lien contractuel
soit noué entre le client final et le sous-traitant.
L’arrêt Besse, dans lequel l’Assemblée plénière de la Cour de cassation
a refusé l’exercice d’une action en responsabilité contractuelle du maître
de l’ouvrage contre le sous-traitant de travaux de bâtiment. La cour
n’interdit pas davantage l’existence d’un lien contractuel direct en
énonçant que le « sous-traitant n’est pas contractuellement lié au maître
de l’ouvrage », il condamne l’application de la théorie selon laquelle des
relations directes unissent les extrêmes d’un ensemble contractuel, mais
c’est parce qu‘à la base, il constate qu’aucun contrat n’avait été conclu
en pratique entre ces personnes.
L’absence de contrat entre le client final et le sous-traitant ne constitue
pas une règle, mais une simple donnée de fait.
Le problème majeur que soulève la sous-traitance tient à la présence et
à la nature des liens qui peuvent exister entre les deux contractants qui
n’ont pas été parties à la même convention. Le paiement du sous-traitant
par le client final est incertain. On rapproche ainsi la situation du soustraitant de celle d’un cocontractant du client final, à faire « comme si » un
rapport contractuel existait entre eux. Lorsqu’un tel rapport existe le
terme utilisé est la cotraitance et non plus de sous-traitance.
Il convient maintenant de se pencher sur les dispositions de la loi du 31
décembre 1992.
§2. La sous-traitance au sens de la loi du 31 décembre 1992 relative
aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport
routier de marchandises.
Ce texte est de nature pénale dont le champ d’application est limité. Il ne
règle en aucune façon les questions de droit civil. Cette loi ne concerne
que le transport routier de marchandises. Elle a été adoptée pour lutter
contre la pratique des prix manifestement trop bas.
15
Elle érige en infraction pénale le fait pour de donneur d’ordre de
rémunérer insuffisamment son sous-traitant.
A.Commission de transport et sous-traitance
« Les contrats par lesquels un transporteur routier de marchandises ou
un commissionnaire de transport confie à un transporteur routier de
marchandises l’exécution d’une ou plusieurs opérations de transport
routier de marchandises nécessitant l’utilisation intégrale d’au moins un
véhicule » 11 .
La relation entre le commissionnaire de transport et le transporteur
routier de marchandises peut donc être qualifiée de relation de soustraitance au sens de cette loi. Mais seulement dans le cas où le
commissionnaire de transport rémunère lui-même le transporteur.
B. Location de véhicules avec chauffeur et sous-traitance
Le fait pour un transporteur de recourir à un loueur de véhicules avec
chauffeur ne constitue pas une opération de sous-traitance au sens de
la loi du 31 décembre 1975. En effet, le contrat de location n’est pas
considéré comme un contrat d’entreprise.
Pourtant, le législateur qualifie de sous-traitance la relation qui se noue
entre le loueur et le locataire de camion.
Cette solution n’est pas inscrite dans la LOTI, son décret d’application
quant à lui distingue « l’exécution des contrats de sous-traitance et des
contrats de location avec conducteur par un transporteur »
Art 1er de loi du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous-traitance
dans le domaine du transport routier de marchandises
11
16
Au contraire, cette solution est imposée par la loi du 31 décembre 1992
relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport
routier de marchandises.
De même entrent dans le champs d’application de la loi « les contrats
par lesquels un transporteur routier de marchandises ou un loueur de
véhicules confie à un loueur de véhicules industriels l’exécution d’une ou
plusieurs opérations de mise à disposition d’un véhicule avec
conducteur ».
La loi de 1992 ne concerne que les relations entre le sous-traiteur et le
sous-traitant, entre lesquels elle entend prévenir des abus en ce qui
concerne le montant du prix.
Cela permet de susciter deux observations : aucun des textes examinés
ne régit la relation entre le donneur d’ordre initial et le sous-traiteur.
Ensuite il faut souligner que chacune des lois ne recouvrent pas le
même domaine.
La loi de 1975 est limitée au seul contrat d’entreprise. Sont donc exclus
les contrats de mandat et de commission. De plus, elle n’a vocation à
s’appliquer qu’en l’absence de contrat unissant le donneur d’ordre au
sous-traitant. En cas d’existence d’un lien contractuel, en effet, il existe
un fondement à l’action et la loi est inutile.
17
PREMIERE PARTIE
LE RECOURS À LA SOUS
TRAITANCE
18
TITRE 1 LA LEGITIMITE DE LA SOUS-TRAITANCE
La question est de savoir si l’opérateur de transport est toujours autorisé
à en confier l’exécution matérielle à une autre entreprise. De même il est
important de s’interroger sur le cadre contractuel du recours à la soustraitance.
Chapitre 1 légitimité du recours à la sous-traitance
Seule la sous-traitance de la prestation de transport sera envisagée.
Section 1.Légitimité du recours à la sous-traitance lorsque le
sous-traiteur est un commissionnaire de transport
Si le sous traiteur est un commissionnaire, c’est-à-dire un organisateur
de transport, il doit sous-traiter la réalisation du transport à une
entreprise. Mais encore faut-il qu’il s’agisse d’un « organisateur » au
sens que le législateur veut lui donner.
L’article 33 alinéa 2 de la LOTI institue un « monopole » des
commissionnaires de transport pour les opérations de sous-traitance
routière : « Le transporteur routier ne peut recourir à la sous-traitance
que s’il a la qualité de commissionnaire de transport ou dans des cas
exceptionnels ». Ces derniers sont énumérés dans le décret en Conseil
d’État du 30 août 1999 « relatif au transport public de marchandises ».
Selon la LOTI le commissionnaire de transport ne peut recourir à la
sous-traitance seulement l’opération consiste à confier l’opération de
déplacement de la marchandise.
19
Le transporteur qui a passé un contrat de transport est tenu soit de
l’exécuter lui-même ; soit de la sous-traiter à une autre entreprise de
transport public, qu’il affrète à cet effet (c’est donc une opération de
transport) et qui assure le déplacement en qualité de transporteur ; soit
d’assurer le déplacement lui-même, en qualité de transporteur en soustraitant à un loueur de véhicules avec conducteurs la fourniture du
véhicule et du conducteur. Le contrat de sous-traitance intervient entre le
commissionnaire de transport (ou le transporteur sous-traiteur) et le
sous-traitant
transporteur
public
(ou
loueur
de
véhicules
avec
conducteur). La LOTI ne désigne par contrat de sous-traitance que le
seul contrat conclu avec un transporteur public. Il s’agit alors d’un pur et
simple contrat de transport, dans lequel le sous traiteur prend la qualité
d’expéditeur et le sous-traitant celui de transporteur.
Section 2.Légitimité du recours à la sous-traitance lorsque le
sous-traiteur est un transporteur
Le transporteur a pour tâche d’assurer le déplacement de la
marchandise. Sous-traiter constitue donc une anomalie en ce qui le
concerne. En effet en employant ce procédé, il ne remplit pas son
obligation dans les conditions qui avaient été prévues. Mais le
transporteur a recourt à la sous-traitance dans plusieurs hypothèses .
Or, les textes n’autorisent pas toujours le transporteur à sous-traiter la
prestation de transport ou sous certaines conditions. Celles-ci tiennent à
la réglementation dans le transport routier de marchandises.
Le recours à la sous-traitance n’est réglementé que pour les transports
routiers de marchandises. Les transporteurs n’ont pas en principe la
possibilité de sous-traiter la prestation de transport dans le cadre du
transport routier de marchandises, en dehors de cas « exceptionnels ».
20
La profession routière est composée de petites entreprises et de gros
transporteurs, lesquels ont seuls un potentiel de fret, dont ils se
déchargent sur des sous-traitants à des prix qui ne sont pas ceux
auxquels ces derniers auraient pu prétendre s’ils avaient traité en direct
avec le client. Il faut également porter une attention toute particulière au
titulaire du contrat de transport qui confie l’exécution de ce contrat à des
personnes n’ayant ni la qualité de salarié, ni celle de transporteur.
Réserver la possibilité de sous-traiter aux seuls commissionnaires de
transport peut permettre un encadrement plus strict, en faisant de la
sous-traitance l’activité d’un professionnel. Ainsi l’administration serait
plus à même d’effectuer des contrôles.
§1.La réglementation
Il faut partir du décret du 12 janvier 1939 12 . Ce texte énonce que le
simple fait de se décharger de l’opération matérielle de déplacement sur
une autre personne est analysé comme une opération de commission de
transport, et autorisé à titre exceptionnel.
La règle a été reprise par le décret du 9 décembre 1952 13 . Ce texte
prévoit une licence de commissionnaire affréteur, groupeur qui était
requise pour les opérations requises. Mais, il prévoit également deux
dérogations en faveur des entreprises de transport public routier.
La première est en faveur des exploitants des services réguliers qui ont
la possibilité « sans aucune licence réexpédier en bout de ligne ou en
cours de trajet des lots qu’elle a transporté sur des relations qu’elle est
autorisée à assurer » 14 Cette dérogation a disparu depuis.
JO 18 janvier 1939, p.905
D. n°52-1408, 19 décembre 1952, relatif aux professions auxiliaires de
transport.
14 D. 19 décembre 1952, art.4, c.
12
13
21
La seconde énonce « une entreprise de transport public peut
exceptionnellement sans aucune licence, soit remettre à un autre
transporteur public routier des envois qu’elle a elle-même transporté sur
une partie du parcours en vue de leur acheminement sur leur destination
définitive, soit affréter un véhicule exploité par un autre transporteur
public routier pour faire face à une pointe de trafic » 15 .
Selon ce texte, le fait pour un transporteur public, partie à un contrat de
transport, de remettre à un autre transporteur public des envois (qu’il a
acceptés au transport) est une activité de commissionnaire de transport.
Dans le décret du 30 juin 1961 16 , on dispense de licence les entreprises
qui exploitent des services réguliers de marchandises pour ce qui est de
« réexpédier, à leur destination finale, des marchandises dont le
transport a emprunté ces services » 17 . Les transporteurs routiers
peuvent sous-traiter l’excédent occasionnel ou l’achèvement de leur
trafic.
§2.Le principe de l’interdiction selon la LOTI
« Le transporteur ne peut recourir à la sous-traitance que s’il a la qualité
de commissionnaire de transport ou dans des cas exceptionnels » 18 .
Seul le commissionnaire de transport peut sous-traiter, l’entreprise doit
donc être inscrite au registre des commissionnaires de transport, et non
si elle est inscrite au registre des transporteurs et des loueurs.
Dans des « cas exceptionnels », le transporteur, partie au contrat de
transport, peut néanmoins sous-traiter, la sous-traitance consistant à
faire exécuter le transport
D. 19 décembre 1952, art 4, d.
D. n°61-679, 30 juin 1961, relatif aux professions auxiliaires de transport
17 D. n°61-679, 30 juin 1961, art.7, b.
18 Art. 33 §2 de la LOTI
15
16
22
§3.Cas particulier des sociétés coopératives d’entreprises de transport
routier de marchandises
Le transport routier est exercé par de nombreux petits artisans
chauffeurs ou de petites entreprises en société. De ce fait, les structures
coopératives se développent. Ainsi, l’accès au marché est direct et l’offre
des services plus importante. Il existe des sociétés coopératives de
transport routier et des sociétés coopératives d’entreprises de transport
routier. Les premières sont formées par des personnes physiques en
vue de l’exploitation en commun d’un fonds de commerce de transport
routier de marchandises 19 . Les secondes constituent chacune une
agence commune traitant avec la clientèle. Elles sont soumises à la loi
du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération20 et de son décret
d’application du 8 février 1963 relatif à la coopération dans les transports
publics routiers de marchandises.
Ces sociétés coopératives d’entreprises de transport routier de
marchandises ne peuvent pas prendre la qualité de commissionnaire de
transport. En effet, selon l’article 4 du décret du 8 février 1963 ces
sociétés ont la qualité de voituriers (au sens de l’article L. 133-1 du Code
de commerce). Elles n’ont pas d’autre alternative que d’exécuter le
contrat de transport ou de ne pas le conclure.Elles bénéficient, comme
les sociétés de transport, de la possibilité de sous-traiter dans des cas
exceptionnels.
A.Cas exceptionnels
Il faut se référer au texte d’application de la LOTI et au décret du 30 août
1999 21 .Plus précisément il faut se pencher sur l’article 15 du décret
précité.
L. n°78-763, 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières
de production.Lamy transport, t. 1, n°774
20 L. n°47-1775, 10 septembre 1947
21 D. n°99-752
19
23
B.Exceptions concernant les entreprises de transport
a.L’exception dite de « pointe de trafic »
Cette exception figurait déjà dans le décret du 12 janvier 1939. Les
entreprises peuvent avoir recours à la sous-traitance lorsque « en raison
d’une
surcharge
temporaire
d’activité,
elles
se
trouvent
dans
l’impossibilité d’exécuter les contrats de transport dont elles sont
titulaires par leurs propres moyens ». Le caractère exceptionnel du
recours à la sous-traitance est mis en évidence. Ainsi les opérations
sous-traitées ne peuvent pas excéder 15% du chiffre d’affaires annuel de
l’activité de transport routier de marchandises de l’entreprise. De plus,
deux mesures de contrôle ont été mises en place : l’enregistrement et la
déclaration
annuelle.
À
défaut,
une
amende
est
infligée.
L’enregistrement fait apparaître le prix du transport facturé au client et
celui payé au transporteur sous-traitant. La déclaration annuelle fait
ressortir le montant total des commandes sous-traitées et celui des
rémunérations versées aux sous-traitants.
b.L’exception relative à la messagerie
« Les entreprises de transport qui assurent des transports de lots
inférieurs à trois tonnes et qui, tout en conservant leur responsabilité sur
l’opération de transport, soit confient à d’autres transporteurs auxquels
elles sont liées par une convention de compte courant des lots qui leur
sont confiés, soit font exécuter par d’autres transporteurs les opérations
terminales de ramassage ou de livraison ».Ces entreprises peuvent
recourir à la sous-traitance sans être inscrites au registre des
commissionnaires de transport. Ceci est justifié par le fait que le trafic de
messagerie (envoi inférieur à trois tonnes) est exploité à partir de platesformes de regroupement, l’enlèvement et la livraison sur place étant
assurés par des sous-traitants. Seules
les opérations terminales de
ramassage ou de livraison sont sous-traitées à tout autre transporteur.
24
C. Exceptions applicables aux coopératives
Le décret du 30 août 1999 permet aux coopératives de transport routier
et les coopératives d’entreprises de transport routier de bénéficier de la
seule exception dite de pointe de trafic.
Il doit nécessairement y avoir une surcharge temporaire d’activité
(plafonnement du total des opérations sous-traitées à 15% du total du
chiffre d’affaires), un enregistrement et une déclaration annuelle. Ce
régime est applicable lorsque ces entreprises n’ont pas opté pour le
statut résultant de la loi du 20 juillet 1983 22 .Celles qui ont opté pour ce
statut peuvent librement sous-traiter « lorsqu’elles confient l’exécution
des contrats de transport routier à d’autres transporteurs publics que
leurs membres ou associés » à concurrence de 20% de leur chiffre
d’affaires. Ce plafond peut être dépassé seulement « si les comptes font
apparaître un dépassement de cette propension, la société dispose d’un
délai d’un an pour régulariser la situation » 23
Chapitre 2 les modalités de la sous-traitance
Il convient de s’attarder sur la sécurité du client final, sa liberté et
l’équilibre financier de la prestation du client final
Section 1 La lutte contre les accidents
L’entreprise sous-traitante n’est pas choisie par le client, mais elle doit
présenter à ce client des garanties minimales de sécurité.
L. n°83-657 du 20 juillet 1983 relative au développement de certaines
activités d’économie sociale
23 L. n°83-657 du 20 juillet 1983, art. 10 al.3
22
25
Il existe en matière de transport routier de marchandises une obligation
pour le transporteur qui exécute un transport routier de marchandises en
le sous-traitant à un autre transporteur de s’assurer que ce dernier « est
habilité à exécuter les opérations qui lui sont confiées » 24 .
De plus, l’accès à la profession de transporteur public est subordonné a
plusieurs conditions. Parmi celles-ci, l’aptitude technique permet de
s’assurer d’un certain niveau de sécurité. Ainsi, une garantie de sécurité
est acquise dès lors que le sous-traitant a la qualité de transporteur
public.
Section 2 Le consentement des clients face à l’entreprise
sous-traitante
En réalité ce n’est pas le consentement qui nous intéresse. L’information
du client sur le recours à la sous-traitance ainsi que l’identité du soustraitant revêt une importance pus grande. La question est de savoir si
cette information est une obligation.
Dans la loi du 31 décembre 1975, cette obligation d’information existe au
niveau de la sous-traitance :l’entrepreneur principal doit « faire accepter
chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque
contrat de sous-traitance par le maître de l’ouvrage »
Information à l’initiative du transporteur
La règle est d’informer le donneur d’ordre et non de solliciter son
consentement. Si le donneur d’ordre ne veut pas que le transport soit
sous-traité, il lui suffit de donner son consentement dans un écrit où cela
est stipulé.
À défaut d’être prévue par le contrat, l’information peut être imposée par
un texte.
24
D. 30 août 1999, art.16
26
Section 3 le problème de la sous tarification en matière de soustraitance
Ce problème est sensible en matière de transport routier de
marchandises.
« Les conditions dans lesquelles sont exécutées les opérations de
transport public, notamment la formation des prix et tarifs applicables et
les clauses ses contrats de transport, permettent une juste rémunération
du transporteur assurant la couverture des coûts réels du service rendu
dans des conditions normales d’organisation et de productivité » 25
Cette règle instituée par la LOTI s’est avérée insuffisante. Une
réglementation des prix du transport a donc été mise en place par une loi
du 31 décembre 1992. Ce texte a permis d’infliger une amende à la
charge du donneur d’ordre qui rémunère de façon insuffisante la
prestation de transport. Il se rend coupable de l’infraction de prix
manifestement trop bas.
Ensuite, la loi du 1er février 1995 a repris cette infraction en l’élargissant
« le
fait
pour
tout
prestataire
de
transport
public
routier
de
marchandises[…] d’offrir ou de pratiquer » un prix manifestement bas 26 .
Cela permet de sanctionner à la fois le donneur d’ordre et l’exécutant.
De plus, cela sanctionne les prix pratiqués entre les professionnels du
transport routier et leurs clients. Le champs de l’infraction est plus large.
Ces textes créent l’obligation de détenir une preuve de la transaction et
du prix convenu. Selon la LOTI, cette preuve peut se faire par tout
moyen et selon la loi du 1er février 1995 elle doit se faire par « un
document de suivi » accompagnant le véhicule.
Loi du 31 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, art.6 et art.8
Loi du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des
contrats et régissant diverses activités d’ordre économique et commercial.
25
26
27
Dans la pratique, l’infraction de prix manifestement trop bas ne peut être
commise qu’en cas de relation durable 27 .
TITRE 2 LA RELATION DE SOUS-TRAITANCE
L’opération de déplacement se caractérise soit par un contrat ayant pour
objet tout ou partie du déplacement lui-même, soit par un contrat ayant
pour objet la location de l’engin de transport.
Chapitre 1 l’opération de déplacement
Section 1 Mécanisme de cette opération en matière de
transport de marchandises
Le contrat de transport a pour caractéristique que le transporteur s’oblige
à prendre en charge un envoi pour le déplacer d’un point A à un point B.
La responsabilité du transporteur revêt le caractère d’ordre public :on
protège la personne qui contracte avec le transporteur.
Le contrat de transport sert de support à l’opération de sous-traitance.
Celui qui transporte ou qui fait transporter convient avec un autre
professionnel des modalités de l’opération de déplacement. Le soustraiteur est en réalité l’expéditeur, le sous-traitant devient le transporteur.
Le statut spécial du sous-traiteur en matière de transport routier de
marchandises : le commissionnaire de transport
Le commissionnaire de transport traite avec l’expéditeur puis sous-traite
la réalisation matérielle du déplacement à un transporteur 28 .
Circ. 13 juillet 1993 : BTL 1993, p.539
Le contrat type de sous-traitance routière (D. 19 juillet 2001) définit le
transporteur sous-traitant comme étant celui qui s’engage à effectuer un
transport pour le compte d’un « opérateur de transport » (art. 3.4), soit un
commissionnaire soit un transporteur public principal.
27
28
28
Le Code de commerce régit entre le commissionnaire de transport et le
transporteur. Selon ce Code, nous sommes en présence d’un contrat de
transport, dans lequel le commissionnaire de transport (s’il agit en son
propre nom) prend la qualité d’expéditeur, de donneur d’ordre au sens
du contrat type routier.
Quand c’est un transporteur qui sous-traite la prestation de transport, le
mécanisme est identique. En effet, il est lié avec l’expéditeur. Il conclut
avec le sous-traitant un second contrat de même nature. Le sous
traiteur, quant à lui s’oblige à déplacer d’un point à un autre une
marchandise déterminée, pour un prix déterminé.
En matière routière, la LOTI prévoit que le transporteur routier qui passe
un contrat de transport peut le sous-traiter à un autre transporteur
public 29 . Cette sous-traitance se fait «dans le cadre de contrats de
transport ». 30 .
Le contrat de transport est consensuel. Les textes réglementent le
document qui le constate, mais le contrat lui-même est formé par le seul
accord des parties. Ce document est la preuve du dommage en matière
de transport routier de marchandises. Le document de transport
matérialise le contrat. Sa délivrance n’est cependant pas sans
conséquences juridiques en cas de sous-traitance.
Le contrat
La relation de transport peut être ponctuelle, elle fait alors l’objet d’un
contrat de transport proprement dit. Mais le contrat de sous-traitance est
dans la plupart des cas conclu pour une certaine durée : la relation est
donc permanente, et le contrat qui s’organise relève de la catégorie des
contrats préparatoires.
Loi d’orientation des transports intérieurs, art.33
Arrêté du 19 novembre 1999 relatif à la sous-traitance dans le domaine du
transport routier de marchandises.
29
30
29
§1.Le contrat de transport
Dans les rapports entre sous-traiteur et sous-traitant et à chaque fois
que ce dernier s’oblige à prendre à son égard la marchandise, la relation
se base sur un contrat de transport. Le sous-traitant répond envers le
sous-traiteur des pertes et avaries qui lui sont imputables (sauf causes
d’exonération et retard).
Un arrêt 31 , assez curieux, illustre les rapports entre sous-traiteur et soustraitant. En l’espèce, un transporteur intervenant au bout d’une chaîne de
transporteurs successifs stipule une clause de limitation de garantie
dans le contrat conclu avec le transporteur qui lui avait remis la
marchandise. La clause est rendue inopposable au destinataire dans le
sens où l’arrêt énonce qu’ « elle ne s’impose qu’à l’expéditeur, non au
destinataire qui n’a pas été partie à ce contrat ». La principale critique
serait de dire que le destinataire devient partie au contrat en y
adhérant ! 32 . Les observations qui accompagnent l’arrêt relèvent que « la
Cour a sans doute tenu compte qu’en l’espèce il s’agissait d’une
limitation stipulée entre deux transporteurs et non pas convenue avec
l’expéditeur ». Il semble donc que la clause en question n’était pas
stipulée dans le contrat de transport auquel le destinataire était partie,
mais dans un autre contrat de transport, conclu entre le sous-traitant et
le transporteur principal-expéditeur.
Cet arrêt laisse penser qu’une relation contractuelle de transport est
admise par tous lorsque le sous-traiteur a la qualité de commissionnaire
de transport. Alors que la distinction entre le commissionnaire de
transport et le transporteur qui sous-traite est difficile.
31
32
CA Lyon, 3 mars 1983 : BT 1983, p.359
L’adhésion du destinataire au contrat de transport, J-P TOSI, Litec 1998, vol
2
30
Le contrat préparatoire
Peut-on qualifier de contrat de transport, le contrat qui a pour objet
d’organiser une relation permanente de sous-traitance ? Les points a
examinés sont le délai de prescription de l’action contre le transporteur.
Évidemment on part du principe que le sous-traitant s’oblige à intervenir
en qualité de transporteur.
Sous-traitance non exclusive
1.La sous-traitance ayant pour objet un transport de lot
Dans un arrêt 33 , le commissionnaire de transport avait confié à un
transporteur routier l’exclusivité du transport des produits du commettant,
moyennant un prix fixé à la tonne, et le transporteur agissait en
complément de prix (le jugeant trop bas par rapport à ce que le
commettant versait au commissionnaire).
Cette action relève-t-elle de l’article L. 133-6 alinéa 2 du Code de
commerce, qui soumet à une prescription d’un an les actions en
responsabilité auxquelles peut donner lieu le contrat de transport contre
le commissionnaire ?
En appel, la réponse s’est avérée négative. La Cour énonce la présence
d’un contrat d’entreprise et non d’un contrat de transport « et que
l’action, née de ce contrat, et non d’un litige sur les obligations
contractuelles
du
transporteur
vis-à-vis
de
l’expéditeur
ou
des
destinataires, échappait à la prescription invoquée ». Cette décision est
curieuse puisque le commissionnaire de transport a la qualité
d’expéditeur à l’égard du transporteur.
33
Cass. com, 8 avril 1967 : Bull.civ. III, n°132, p. 133.
31
De ce fait une cassation a été prononcée, au motif que « L’arrêt ayant
relevé
que
(y,le
commissionnaire
de
transport),
sans
lien
de
subordination, l’exclusivité des transports des produits de la société x,
que lui avait confiés cette société « expéditrice », il s’ensuivait que y était
le commissionnaire de transport au sens des articles [132-3] et suivants
du Code de commerce, contre lequel l’action du voiturier z,en paiement
du prix de transports effectués en exécution du contrat ayant pour objet
le transport de
marchandises devait, à peine d’irrecevabilité, être
introduite dans le délai d’un an prévu par l’article L.133-6 du Code de
commerce. »
La Cour de cassation ne qualifie pas expressément le contrat de soustraitance en cause de contrat de transport, alors pourtant que cela
commande la solution.
2.La sous-traitance ayant pour objet un transport de messagerie
Le trafic de messagerie ne peut se faire par véhicule entier. Il suppose
l’intervention de transporteurs successifs, les uns assurant l’enlèvement
de l’envoi chez l’expéditeur, les autres la traction du groupage de
différents envois entre les plates-formes de regroupement du trafic,
d’autres la livraison finale. Le recours à la sous-traitance est donc
indispensable. Le transporteur qui assure les ramassages et/ou les
livraisons publie un tarif par poids. Chaque « messager » dessert
quotidiennement une « zone » comportant une liste de communes
déterminées. Chaque zone est desservie par un ou deux ou plusieurs
messagers, chacun assurant les ramassages et livraisons pour des
transporteurs et commissionnaires déterminés.
Le contrat conclu entre le messager et chacune de ces entreprises a
pour objet de fixer les conditions financières des ramassages et
livraisons de colis, et d’accorder une exclusivité au messager considéré
de la part de l’entreprise.
32
Souvent le contrat est verbal sans durée déterminée. Lorsqu’il fait l’objet
d’un écrit celui-ci a pour objet de définir des normes de qualité de service
que le sous-traitant s’oblige à respecter.
Même si on est dans le cadre d’un transport routier de marchandises ce
contrat n’est pas un contrat de transport, mais un contrat de
collaboration. C’est-à-dire un contrat préparatoire.
3.Contrat de sous-traitance exclusive
C’est celui qui réserve au sous-traiteur l’exclusivité de l’usage du
véhicule aux trafics du sous-traiteur pendant toute la durée du contrat.
Il existe un modèle de ce contrat élaboré par le Conseil National des
transports. Ce contrat « de sous-traitance de transport routier de
marchandises » est conclu entre un professionnel (commissionnaire ou
transporteur principal) qui dispose de trafics routiers
dont il ne peut
assurer la réalisation par ses propres moyens et d’autre part un soustraitant capable de fournir une solution de remplacement cherchant à
assurer une activité régulière dans le cadre d’une sous-traitance de
longue durée.
On est en présence d’un modèle de contrat cadre fixant les conditions
d’exécution des contrats de transport devant intervenir entre les parties
lors de la prise en charge de chaque envoi. Un document de transport
doit être émis à chacun des envois. Le contrat de sous-traitance est un
contrat distinct du contrat principal de transport. En matière de transport
routier de marchandises, son caractère consensuel pose des problèmes
puisque « chacun des contractants doit être en mesure de produire un
document justifiant du prix conclu… ».En réalité il donne lieu à
l’établissement d’une lettre de voiture distincte, sur laquelle le soustraiteur figure en qualité d’expéditeur. La marchandise voyage avec deux
documents de transport différent.
33
Quand le transporteur sous-traitant intervient dans une chaîne de
transporteurs successifs, il peut continuer l’opération de déplacement
avec le document de transport émis par le premier transporteur.
§2.Le louage de choses : champ d’application de la sous-traitance
La location d’engins se développe. La location constitue un louage de
choses car elle est conclue sans conducteur. L’entreprise de transport
exécute elle-même la prestation de déplacement avec l’engin, sans que
le bailleur fournisse la moindre prestation de service. La situation se
complique lorsque la location se réalise avec conducteur.
La mise à disposition de l’engin de transport se double d’une prestation
de conduite : le contrat est hybride, il ressemble à la fois à un louage de
choses et en même temps à une prestation de service. Ainsi, le
transporteur externalise une partie de sa prestation, en ce sens qu’il se
décharge sur le loueur de l’exécution d’un élément de la prestation qu’il
s’est obligé à fournir au client. On est dans une certaine forme de soustraitance.
Le contrat de location de véhicules industriels avec chauffeur en
transport routier est traité par la loi du 31 décembre 1992 comme une
forme de sous-traitance 34 . Par contre, la LOTI considère ce contrat
comme une alternative. En effet, le loueur ne pouvant pas- par définition
même-
avoir
la
qualité
de
transporteur,
il
est
exclu
qu’un
commissionnaire de transport puisse avoir celle de locataire 35
Dans les deux cas, il y a sous-traitance : un transporteur ou un loueur
confie à un autre professionnel l’exécution d’une opération qu’il ne veut
pas ou ne peut pas réaliser lui-même.
Loi du 31 décembre 1992, art.1er
35 CA Paris, 5 avril 1995 : BTL 1995, p. 811
34
34
Le recours à la location constitue donc une alternative au contrat de
transport en matière de sous-traitance. Le régime juridique est différent
selon le mode transport utilisé. Le droit des transports routiers parle de
location de véhicules industriels avec conducteur 36 . On désigne le
contrat de mise à disposition d’un engin de transport avec son
conducteur dans lequel le loueur ne prend pas la marchandise en
charge. Le mécanisme de la location se distingue de celui du transport.
De plus, le transporteur qui prend la marchandise en charge, est
présumé responsable de toute perte ou avarie et ne peut s’exonérer
qu’en prouvant un vice propre de la chose ou la force majeure.
Il assure la maîtrise des opérations de conduite et de transport. Alors
que le loueur qui ne prend pas la marchandise en charge ne répond que
des dommages imputables à une faute du chauffeur dans la conduite de
l’engin de transport ou à vice de ce dernier, dont il appartient au
demandeur d’apporter la preuve 37 . Le loueur assume seulement la
maîtrise des opérations de conduite. Celles-ci se définissent, en matière
routière, comme la conduite du véhicule mais aussi la préparation
technique du véhicule, la vérification avant le départ du chargement, du
calage. Entrent dans les opérations de transport la définition de la nature
et de la qualité des marchandises, le tracé des itinéraires, la fixation des
lieux de chargement et de déchargement.
CHAPITRE 2 La relation de dépendance
Une relation de dépendance se noue entre le sous-traitant et le soustraiteur. Le sous-traitant est en position de faiblesse. Dans certains cas,
l’entreprise sous-traitante ne dépend pas du sous-traiteur.
36
37
LOTI, art.34
Art. 1721 du Code civil
35
Mais dans la plupart des cas, le transporteur sous-traitant accepte
d’intervenir, d’être tributaire du sous-traiteur pour la partie du trafic
considéré, s’il s’agit d’une sous-traitance occasionnelle ou bien pour
toute son activité s’il s’agit d’une sous-traitance permanente et exclusive.
Section 1 les sujétions
Le contrat qui lie les parties limite la liberté de chacun en créant des
obligations.
§1.Les sujétions générales
La sujétion la plus lourde est celle du prix, qui est souvent inférieur à
celui du marché.
La relation d’une relation de dépendance est marquée car les
entrepreneurs individuels n’ont pas les moyens de prospecter les clients.
En matière routière, le sous-traiteur a tendance à déléguer le fret le
moins rémunéré et le prix convenu avec le sous-traitant est
généralement faible. Une des conséquences du prix trop bas est le nonrespect par les transporteurs des réglementations sur le temps de repos
et de conduite, sur la limitation des charges utiles et sur les conditions de
sécurité.
Le délai de paiement est plus long dans les transports affrétés38 . Les
risques d’impayés sont proportionnels à la longueur du délai de
paiement, ce dernier constitue donc une sujétion importante.
Le transporteur pour être informé de manière précise sur les modalités
d’exécution, doit s’être fait précisé par le donneur d’ordre d’un maximum
de renseignements avant le départ. Le pouvoir de directive du donneur
d’ordre et le devoir d’information du sous-traitant sont étroitement liés. Le
sous-traitant doit informer le donneur d’ordre du déroulement de
l’opération
38
Etude CNR, avril 1996.
36
§2.Les sujétions particulières
La dépendance du transporteur sous traitant vis-à-vis du sous-traiteur
est accentuée en cas de sous-traitance permanente. En effet, le sous
traitant cherche à s’assurer une activité régulière dans le cadre d’une
sous-traitance de longue durée. Il permet à son donneur d’ordre
l’exclusivité des véhicules mis à sa disposition et bénéficie en retour
d’une rémunération minimale. Il renonce à sa liberté de travail en
acceptant de réserver son entière activité au donneur d’ordre. La soustraitance est un moyen pour le sous-traiteur d’externaliser ses
investissements, ce qui devient un poids pour le sous-traitant.
De même le sous-traitant ayant acheté son camion en crédit-bail,
compte sur le contrat conclu avec le fournisseur pour amortir l’achat et
dégager une marge pour lui permettre de travailler dans des conditions
normales.
Section 2. La réglementation contre les abus
§1.Mise en place d’un seuil en matière de sous tarification
La loi du 31 décembre 1992 « relative aux relations de sous-traitance
dans le domaine du transport routier de marchandises » punit d’une
amende de 600 000 francs le fait pour le donneur d’ordre de pratiquer
vis-à-vis du sous-traitant des tarifs qui ne respectent ni les règles
sociales, ni les règles de sécurité. Constitue une infraction le fait pour le
donneur d’ordre de pratiquer « un prix qui ne permet pas de couvrir à la
fois » certaines charges déterminées : celles qui sont « entraînées par
les obligations légales et réglementaires, notamment en matière sociale
et de sécurité », celles « de carburant, d’entretien et d’amortissement
des véhicules ».
37
Complétée en 1996 39 , cette liste mentionne les charges afférentes aux
« loyers » des véhicules, les frais de route des conducteurs de véhicules,
les frais de péages, et les frais de documents de transport.
Il existe donc un seuil en deçà duquel est caractérisé une infraction de
pratique de prix trop bas. Le contrôle se fait par une vérification de
nature comptable :on vérifie que les charges incompressibles sont
couvertes. L’action peut être engagée soit par le ministère public soit par
le représentant du ministre chargé de l’économie. Une action civile peut
être intentée par le transporteur ou loueur évincé du fait du prix trop bas,
et aux organisations professionnelles représentatives.
Le but est de lutter contre la sous tarification du transport de
marchandises et de protéger les concurrents. Seulement les poursuites
sont rares.
§2.Mise en place d’une responsabilisation du donneur d’ordre
Certaines pratiques engendrent insécurité, fraude ou concurrence
déloyale. Les sanctions encourues apparaissent comme insuffisantes.
En effet, la sanction ne frappe que le conducteur ou le transporteur, alors
que souvent celui-ci ne fait que se conformer aux instructions qu’il a
reçues. La LOTI permet juste d’engager la responsabilité civile du
donneur d’ordre 40 . Un texte a été adopté pour ériger en infraction le fait
pour un employeur ou un donneur d’ordre de donner des instructions
incompatibles avec le respect des réglementations du transport routier. Il
s’agit du décret du 23 juillet 1992 41 . La peine encourue est une amende
de police.
Loi n°96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion
du commerce et de l’artisanat, art.37
40 Art 9 §2
41 D. 23 juill. 1992, relatif à certaines infractions commises par les employeurs
de salariés affectés à la conduite de véhicules de transport routier de
personnes ou de marchandises et par les donneurs d’ordre aux transporteurs
routiers de marchandises.
39
38
§3.Délai de paiement
Le problème de la longueur des délais de paiement tient une importance
particulière dans le secteur des transports. Cela est dû à la sous
tarification. La loi du 31 décembre 1992 relative aux délais de paiement
entre les entreprises impose en la matière une transparence et fixe un
délai de paiement à certains producteurs, revendeurs ou prestataires de
services. Mais ce texte ne fixe rien en matière de transports routiers.
Cependant dans la réglementation sur la profession de commissionnaire
de transport, il est possible de radier temporairement ou définitivement
de l’inscription au registre lorsqu'il est constaté « des retards importants
et répétés dans le règlement des sommes dues aux transporteurs ».
Et enfin, un protocole interprofessionnel sur les délais de paiement dans
le transport routier de marchandises a été signé en juin 1992 par des
organisations professionnelles de transporteurs, de chargeurs et de
commissionnaire de transport. Un délai de paiement de 30 jours à
compter de la réception de la facture ou du relevé de factures du
transporteur est mis en place. Ce n’est pas un texte obligatoire, mais il
est considéré comme un usage de la profession. Ainsi, l’existence du
retard est appréciée, ce qui est important en matière de sous-traitance.
§4.Modèle de contrat de sous-traitance
Ces modèles de contrat de sous-traitance en transport routier de
marchandises ont été rédigés en 1991 par le Conseil national routier, en
collaboration avec la Direction des transports terrestres du ministère des
transports et en liaison avec des professionnels. Ces modèles sont
conçus pour êtres utilisés en cas de sous-traitance permanente et
exclusive.
Il ne s’agit pas de contrats types au sens de la LOTI, c’est-à-dire
supplétifs, applicables de plein droit en l’absence de convention écrite
définissant les rapports entre les parties au contrat.
39
Ils sont utilisés comme support de la convention écrite. Il existe deux
modèles de contrats selon que la sous-traitance s’effectue sous le
régime du transport ou de la location. Aujourd’hui le contrat type version
« transport » est écarté par le contrat type de sous-traitance routière.
Ces modèles sont conçus pour une sous-traitance permanente et
exclusive. Le transporteur s’oblige à mettre à la disposition de l’autre
partie un véhicule et un conducteur et de fournir les prestations
nécessaires à leur utilisation. Seulement, il en résulte une précarité des
sous-traitants permanents : ils sont exposés à un risque continu de
rupture du contrat.
En effet, le principe de droit commun est celui de la rupture unilatérale
des contrats à durée indéterminée, sauf à engager sa responsabilité en
cas de brusque rupture. Alors que, les contrats de sous-traitance des
opérations de sous-traitance sont conclus sans qu’un écrit soit rédigé. Le
terme extinctif du contrat est alors difficile à prouver. De ce fait, les
contrats de sous-traitance sont regardés comme des contrats à durée
indéterminée.
C’est pourquoi le modèle de contrat de sous-traitance prévoit que le
contrat est conclu pour une durée déterminée (au moins six mois). Les
parties au contrat sont libres de fixer le terme extinctif. Le contrat prévoit
également que le contrat est reconduit tacitement pour des périodes
successives de même durée en l’absence de dénonciation au moins
deux mois avant l’échéance par l’une des parties sous forme de lettre
recommandée.
De plus, la clause de sauvegarde permet au sous-traitant de se libérer
unilatéralement du contrat moyennant un préavis de deux mois. Un autre
problème se pose : celui du maintien du contrat lorsque le sous-traitant
s’est engagé de manière irraisonnée.
40
Le droit commun du principe de la force obligatoire du contrat l’empêche,
alors, de revenir sur son engagement. Pour le protéger, les modèles de
contrat le font bénéficier d’un délai de réflexion : quinze jours à dater de
la signature du contrat
La rémunération du sous-traitant est fondée sur trois principes :le
premier est la prise en considération du prix de revient 42 , il est suggéré
d’adopter une formule basée sur un prix au véhicule-kilomètre incluant
les déplacements à charge ou à vide. Le second principe consiste à
garantir au sous-traitant une recette minimale mensuelle indépendante
de tout trafic « en contrepartie de l’exclusivité » qu’il accorde au soustraitant.
Et enfin, le troisième principe consiste à faire évoluer la rémunération
totale en fonction de l’évolution des prix de revient, dans le but de
protéger le sous-traitant.
Pendant toute la durée du contrat et durant deux années, le sous-traitant
ne peut pas s’engager à nouer aucune relation commerciale directe ou
indirecte avec un quelconque client du sous traiteur.
L’originalité du mécanisme de la sous-traitance est la relation de
dépendance qui s’instaure entre les parties. L’opération de déplacement
permet de caractériser le sous traiteur d’expéditeur, d’affréteur ou de
locataire. Cependant la sous-traitance a provoqué l’adoption d’un droit
pénal spécial qui vise à prévenir les principaux abus.
42
Loi du 31 décembre 1982, art 6.
41
SECONDE PARTIE
LA MISE EN ŒUVRE DE LA SOUS
TRAITANCE
42
L’opération de sous-traitance met en évidence trois personnages.
L’ayant droit à la marchandise est le créancier du sous-traiteur, lequel
est garant à son égard des dommages qui peuvent être causés par le
fait du sous-traitant, contre qui il peut se retourner.
TITRE 1 L’OBLIGATION DE RÉSULTAT
Le sous-traiteur est responsable de la bonne exécution de la prestation
qu’il s’oblige à fournir. C’est une règle fondamentale qu’on va développer
dans cette seconde partie ;
Chapitre 1.En matière de transport de marchandises
Il existe deux statuts du sous-traiteur :celui du commissionnaire de
transport et celui de transporteur. En ce qui concerne la responsabilité
de la bonne exécution de la prestation par le sous-traitant, les solutions
sont proches.
Section 1 La commission de transport
Nous n’allons pas nous attarder sur les rapports de la commission de
transport (aspects juridiques) mais sur son importance en matière de
transport de marchandises. C’est un contrat ancien, issu du Code de
commerce de 1807. On le trouve dans les articles L. 132-1 L. 132-2
« commissionnaires en général » et les articles L. 132-3 et L. 132-9
« commissionnaires pour les transports ». Mais on peut aussi le qualifier
de contrat récent dans le sens où il est garant des voituriers auxquels il
confie les marchandises de son commettant. C’est là sa principale
différence avec les auxiliaires de transport. Cette règle est issue de
l’article L. 132-6 du Code de commerce. Le commissionnaire de
transport est assujetti à un double régime de responsabilité : au régime
de plein droit et au régime pour faute prouvée. Le commissionnaire de
transport est responsable à l’arrivée des marchandises en bon état et
dans le délai convenu.
43
Les seules exceptions à cette garantie sont la force majeure et la
stipulation contraire L’article L. 132-4 dispose« le commissionnaire de
transport est garant de l’arrivée des marchandises et effets dans le délai
déterminé par la lettre de voiture, hors les cas de force majeure
légalement constatée », L’article L. 132-5 ajoute «,’ il est garant des
avaries ou pertes de marchandises et effets, s’il n’y a stipulation
contraire dans la lettre de voiture, ou force majeure ».
§1. Responsabilité du fait personnel
Le doyen Rodière a défendu l’idée que le commissionnaire de transport
n’engage sa responsabilité personnelle que pour faute prouvée 43 . Cette
doctrine suscite de nombreux débats44 . Le doyen Rodière estime que les
articles L. 132-4 et L. 132-5 du Code de commerce font peser une
présomption qui est la même que celle qui pèse sur le voiturier. Il y a
donc confusion entre les notions de commissionnaire de transport et de
transporteur. Le déplacement des marchandises jusqu’à destination
n’est pas une obligation que le commissionnaire de transport doit
exécuter personnellement. Mais il n’en constitue pas moins pour lui une
obligation personnelle. Ce n’est pas parce que le commissionnaire de
transport ne promet pas un fait personnel qu’il ne s’engage pas à un
résultat dont il est garant. C’est pourquoi la loi de 1975 commence par
préciser que c’est « sous sa responsabilité » que l’entrepreneur confie
l’exécution du contrat au sous-traitant. De même, le texte sur l’accès à la
profession de commissionnaire de transport énonce de ce dernier
« organise et fait exécuter, sous sa responsabilité et en son propre nom,
un transport de marchandises selon les modes de son choix pour le
compte d’un commettant » 45
Rodière, « Traité général de droit maritime » t. 3, 1970, n°926 s., p.130 s.
P.-Y. NICOLAS, L’obligation de résultat du commissionnaire de
transport :Rev. Scapel 1994, p. 33
45 D. 5 mars 1990, relatif à l’exercice de la profession de commissionnaires de
transport, art 1er
43
44
44
§2. La responsabilité du fait d’autrui
Selon l’article L. 132-6 du Code de commerce, le commissionnaire de
transport « garant des faits du commissionnaire intermédiaire auquel il
adresse les marchandises ». Il n’est garant que des seuls fait du
commissionnaire intermédiaire, c’est à dire de celui sur qui le
commissionnaire principal s’est déchargé d’une partie de sa mission.
Cette disposition a toujours été le problème pour expliquer le statut
particulier du commissionnaire de transport. Certains admettaient que
les articles L.132-4 et L.132-5 créent une obligation de résultat. Tandis
que le doyen R.Rodière, dénie toute portée à ces dispositions. En droit
positif,
le
commissionnaire
n’est
pas
seulement
garant
du
commissionnaire de transport qu’il se substitue, il l’est de façon
beaucoup plus large de tous ses sous-traitants : transporteurs,
entrepositaires, entreprises de manutention, transitaires etc.…à qui il
s’adresse pour l’accomplissement de sa mission. Pour Rodière,
l’important est de bien distinguer commissionnaire et transporteur et qui
refuse pour cette raison de considérer que l’arrivée des marchandises à
destination est une obligation personnelle du commissionnaire.
Il faut donc considérer que ce texte en désignant le « commissionnaire
de transport intermédiaire » vise aussi le transporteur ainsi que
l’ensemble des substituts. Cependant cela engendre une confusion entre
le commissionnaire de transport et les autres prestataires services
voisins, alors que tout le problème consiste précisément à les distinguer.
Le commissionnaire de transport ne se charge pas personnellement de
l’obligation, ce n’est donc pas un responsable mais un « garant » tenu
pour autrui.
§3. Responsabilité pour faute
Dans de nombreux arrêts, la responsabilité du commissionnaire de
transport est fondée sur sa faute personnelle, sans référence aux articles
L. 132-4 et L. 132-5 du Code de commerce.
45
On peut donc penser que la doctrine de Rodière est consacrée par la
jurisprudence. Mais il faut bien noter que la faute retenue ne remet
nullement en cause l’existence d’une obligation personnelle de résultat
du commissionnaire de transport fondée sur le texte des articles L. 132-4
et L. 132-6 du Code de commerce. Dans certains arrêts, la faute retenue
contre le commissionnaire de transport sanctionne non pas un retard,
une
perte
ou
une
avarie
-
seuls
cas
de
responsabilité
du
commissionnaire de transport – mais la violation d’une obligation
d’information ou de conseil, c’est-à-dire d’une obligation de moyens
annexe à l’obligation générale de résultat. Dans d’autres arrêts le
problème n’est pas d’engager la responsabilité du commissionnaire de
transport mais de retenir une faute à sa charge afin de le priver du
bénéfice du plafond légal de responsabilité applicable au transporteur
qu’il garantit ou de celui institué par ses propres conditions générales de
transport, ou du recours dont il dispose contre ses sous-traitants 46 . La
référence à la faute du commissionnaire dans le contentieux de la
commission de transport ne contrevient pas à l’existence de l’obligation
contractuelle de résultat qui pèse sur lui de livrer les marchandises à
destination sans perte, avarie ou retard. C’est la violation de cette
obligation contractuelle dont la source se trouve dans les articles L132-4
et suivants, qui constitue le fondement de sa responsabilité. Soit la faute
modifie le régime de la responsabilité du commissionnaire (en
déplafonnant son montant ou en faisant obstacle au recours en garantie
contre le sous-traitant) soit, pour l’engager dans les cas non prévus par
les articles L 132-4 et L 132-5.
Section 2.Le statut du transporteur
La question est de savoir si le transporteur qui a recouru à la soustraitance doit répondre à l’égard de l’expéditeur des dommages causés
par le fait du sous-traitant.
46
Cass. Com, 22 octobre 1996 : Bull. civ. IV, n°258, p.221
46
Il convient de rappeler que le commissionnaire de transport s’oblige à
faire transporteur tandis que le transporteur s’oblige à transporter luimême. Mais à partir du moment où le transporteur a recours à la soustraitance, il se comporte de facto comme un commissionnaire de
transport. Les conditions dans lesquelles il engage sa responsabilité du
fait des sous-traitants ne seront donc guère différentes de celles qui sont
applicables au commissionnaire de transport.
Le commissionnaire de transport engage sa responsabilité soit pour
violation de son obligation contractuelle de résultat (livrer la marchandise
à destination sans perte, avarie ou retard) soit il répond du dommage
dans les mêmes conditions que ses sous-traitants, sauf s’il a commis
une faute. Cette dernière établit que le dommage est imputable à son fait
personnel et non à celui du sous-traitant.
En ce qui concerne le transporteur les textes mettent un résultat à sa
charge, il engage sa responsabilité en cas de perte, avarie ou retard à la
livraison. Ce n’est que récemment qu’on a pris en considération la soustraitance de la prestation du transporteur. Le droit interne français reste
muet sur le sujet pour ce qui est de la responsabilité du transporteur
sous-traiteur. La sous-traitance du transporteur s’est traduite que dans
des conventions internationales.
La responsabilité du transporteur est engagée sans faute en cas de
perte, avarie ou retard de la marchandise. Il existe, cependant quelques
cas de responsabilité pour faute. Et le fait pour le transporteur de se
décharger de tout ou partie de sa tâche matérielle sur un sous-traitant ne
modifie en rien l’application de ces mécanismes.
§1.Responsabilité en cas de perte, avarie ou retard
En cas de perte ou avarie de la marchandise, ou en cas de dommage
résultant d’un retard à la livraison, le transporteur engage sa
responsabilité de façon automatique, sans faute prouvée.
47
Pour Rodière, le transporteur n’est pas responsable de la bonne
exécution de l’obligation par le substitut, « il ne sera tenu à aucun
dommages-intérêts si quelque dommage est subi par la marchandise
entre les mains du voiturier substitué » 47 . Selon cet auteur, il n’existe pas
de responsabilité contractuelle du fait d’autrui :elle dissimule une faute de
choix ou de surveillance de celui qui exécute la prestation Il estime que
l’article L.132-6 du Code de commerce présente un caractère exorbitant
du
droit
commun,
sur
lequel
est
fondée
la
responsabilité
du
commissionnaire de transport pour les faits du transporteur. Par contre, il
admet la qualification de commissionnaire de transport et approuve les
arrêts qui retiennent la responsabilité du transporteur pour les faits du
substitué en requalifiant le transporteur en commissionnaire.
Le droit positif soumet le transporteur aux règles du droit commun de la
responsabilité contractuelle : « Le fait générateur de la responsabilité
contractuelle est l’inexécution du contrat, sans qu’il soit nécessaire que
cette inexécution soit le fait personnel du débiteur ». Le voiturier est donc
responsable par le seul fait que ce résultat n’est pas été atteint, sans qu’il
y ait à distinguer selon que l’inexécution est imputable à son fait
personnel ou à celui du sous-traitant qu’il s’est substitué. Le sous-traitant
est assimilé au débiteur lui-même.
On ne trouve pas d’arrêts exonérant le transporteur au motif qu’il a confié
à un autre transporteur l’exécution matérielle du déplacement 48 . Il en va
de même lorsque le transporteur sous-traite une prestation accessoire au
transport 49 .
Toutes les conventions internationales relatives à la responsabilité du
transporteur auxquelles la France est partie consacrent le régime des
transporteurs successifs. Il est appliqué dans tous les cas en cas de soustraitance.
RODIÈRE, Droit des transports, 2ème éd., 1977, n°366, p.427.
Cass. com., 13 avril 1976 : BT 1976, p. 257
49 CA Aix-en-Provence, 23 janvier 1991 :BTL 1991, p.703
47
48
48
L’article 34 de la CMR dispose que « si un transport régi par un contrat
unique est exécuté par des transporteurs routiers successifs, chacun de
ceux-ci assume la responsabilité de l’exécution du transport total… ».La
jurisprudence est importante pour ce qui est de l’engagement de la
responsabilité du transporteur sous-traitant. Elle l’est beaucoup moins en
ce qui concerne le transporteur sous-traiteur qui « est responsable de la
perte totale ou partielle, ou de l’avarie, qui se produit entre le moment de
la prise en charge de la marchandise et celui de la livraison, ainsi que du
retard à la livraison » 50 . En cas de perte, avarie ou dommage occasionnés
par un sous-traitant, il engage sa responsabilité.
L’article 36 de la CMR permet à l’ayant droit à la marchandise d’agir non
contre tout transporteur successif mais seulement contre le premier, le
dernier ou celui qui est à l’origine du dommage. Aucun problème ne se
pose lorsque le sous-traiteur est le transporteur initial : il est « premier
transporteur » au sens de cet article. Mais lorsque c’est un transporteur
de second rang qui sous-traite le transport dont il est chargé ? La
qualification qui doit être retenue est-elle de transporteur ou de
transporteur successif intermédiaire.
Dans un arrêt du 9 juillet 1996, la Cour de cassation énonce que dès lors
qu’un transporteur est intervenu en qualité de substitué -donc de soustraitant- d’un transporteur précédent, ce dernier engage sa responsabilité
contractuelle. Ce n’est pas en tant que transporteur successif que la
responsabilité du second transporteur est engagée, mais de sous-traiteur.
Le second transporteur a la qualité de transporteur intermédiaire.
50
CMR, Art .17
49
§2. Responsabilité en cas de faute
Le commissionnaire de transport engage sa responsabilité pour faute en
dehors des cas de perte, avarie, ou retard de la marchandise, et qu’il n’y a
pas à distinguer pour cela selon que cette faute est personnelle ou
commise par un sous-traitant. La faute du sous-traitant, de la même façon
qu’elle engage la responsabilité du commissionnaire de transport, engage
celle du transporteur sous-traiteur.
Chapitre 2. Les rapports sous-traitant/donneur d’ordre et
sous-traiteur / sous-traitant
Les contractants extrêmes sont des tiers l’un par rapport à l’autre.Une
action directe en responsabilité contractuelle de l’un par rapport à l’autre
n’est possible qu’en cas d’acquisition de la propriété d’une chose. Pour
exercer une action directe en paiement, il faut nécessairement un texte.
L’action directe est celle qui « permet à un créancier, à l’inverse de
l’action indirecte, de poursuivre en son nom et pour son propre compte le
tiers débiteur de son débiteur » 51 . En matière de sous-traitance, la loi du
31 décembre 1975 confère au sous-traitant une action directe contre le
maître de l’ouvrage. L’article 13 de cette loi précise que les obligations du
maître de l’ouvrage « sont limitées à ce qu’il doit encore à l’entrepreneur
principal à la date de la réception de la copie de la mise en demeure ».
DEBRAY, Privilèges sur les créances et action directe, thèse réalisée à Paris,
1928, p.55
51
50
Le transporteur sous-traitant doit être protégé contre le risque de ne pas
être payé. En matière de d’action en paiement, le droit des transports a dû
attendre la loi 6 février 1998 pour que soient créées trois actions directes
en paiement au profit du transporteur sous-traitant et du loueur de
véhicules industriels.
Le lien entre le sous-traitant et le maître de l’ouvrage est de nature légale.
Il se limite au paiement du sous-traitant. Ce dernier a la possibilité
d’engager sa responsabilité extracontractuelle à l’égard du maître.
Lorsque le sous-traiteur s’est obligé en qualité de transporteur, le
transporteur sous-traitant est un tiers par rapport au contrat de transport
principal. C’est le principe de l’effet relatif du contrat. Aucun texte de droit
interne français ne déroge à ce principe en matière de transport.
La question est de savoir dans quels cas le transporteur sous-traitant qui
n’a pas adhéré au contrat de transport peut néanmoins bénéficier de
l’application des conditions et limites dans lesquelles doit être engagée la
responsabilité du transporteur. La sous-traitance engendre le fait que le
commissionnaire de transport est rendu responsable dans les mêmes
termes que son sous-traitant.
La loi du 31 décembre 1975
La loi du 31 décembre 1975 est applicable à la sous-traitance par le
transporteur de la prestation de transport. Il y a bien « un entrepreneur »
qui « confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre
personne appelée sous-traitant, tout ou partie de l’exécution du contrat
d’entreprise ou du marché public conclu avec le maître de l’ouvrage.
52
.»
Dans la pratique, on se retrouve souvent en présence d’un donneur
d’ordre, d’un intermédiaire et d’un sous-traitant.
52
Loi du 31 décembre 1975, art.1er
51
Ce dernier veut se faire payer directement par le donneur d’ordre en
passant par-dessus l’intermédiaire, lequel fait l’objet d’une procédure
collective ;
or
l’intermédiaire
sera
le
plus
souvent
qualifié
de
commissionnaire de transport, ce qui exclut l’application de la loi de 1975
car le contrat de commission n’est pas un contrat d’entreprise.
Cette loi visant à améliorer les conditions d’exercice de la profession de
transporteur routier soumet les « opérations de transport » à cette
législation. « Les dispositions de la présente loi sont applicables aux
opérations de transport, le donneur d’ordre initial étant assimilé au maître
d’ouvrage, et le cocontractant du transporteur sous-traitant qui exécute
les opérations de transport étant assimilé à l’entrepreneur principal. »
Ce texte confère au sous-traitant préalablement agréé par le donneur
d’ordre initial une action directe en paiement, action subsidiaire en ce
sens qu’elle ne peut être exercée qu’en cas de défaillance de son
cocontractant. Cette action subsiste dans le cas où l’entrepreneur
principal est l’objet d’une procédure collective 53 , ce qui permet au soustraitant d’échapper au concours avec les autres créanciers de son
cocontractant. Le sous-traitant doit mettre en demeure son cocontractant
de le régler, et envoyer copie de cette mise en demeure au donneur
initial. Cela a pour effet de « geler » entre les mains de ce dernier les
sommes qu’il doit au sous-traiteur, à concurrence de la somme déclarée.
Le sous-traitant ne peut réclamer au donneur initial plus que sa créance,
plus que les prestations dont ce dernier est bénéficiaire, ou plus que le
solde du prix dont le donneur d’ordre est encore débiteur « à la date de la
réception de la copie de la mise en demeure » 54 . Le donneur d’ordre qui a
payé le transporteur principal n’est donc pas tenu de payer une seconde
fois.
53
54
Loi du 31 décembre 1975, art.12 al.3
Loi du 31 décembre 1975, art.13 al.2
52
La principale difficulté dans cette loi tient aux formalités qu’elle impose et
à leur sanction. Elle impose la rédaction d’un sous-traité écrit, puisque le
maître de l’ouvrage peut demander communication du contrat 55 . De plus,
la loi lie la validité même du sous-traité au respect par l’entrepreneur
principal des obligations qui lui sont imposées. Il doit « à peine de nullité
du sous-traité » fournir la caution d’un établissement agréé pour le
paiement des sommes dues au sous-traitant, ou bien par délégation
organiser le paiement direct du sous-traitant par le donneur d’ordre initial.
Il doit « faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de
chaque contrat de sous-traitance par le maître de l’ouvrage. La nullité
pour non-fourniture de caution est relative. Et le défaut d’agrément est
sanctionné par la possibilité pour le sous-traitant de le résilier. La
jurisprudence refuse cette action directe en paiement aux sous-traitants
non agréés lorsque le maître de l’ouvrage se prévaut du défaut
d’acceptation et d’agrément. Les lourdes formalités que la loi prévoit
peuvent être respectées en cas de sous-traitance permanente. Elles sont
inadaptées aux contraintes de la sous-traitance occasionnelle.
La relation entre extrêmes est souvent contractualisée, ce qui la fait
échapper au domaine de l’application de la loi du 31 décembre 1975lorsqu’il s’agit d’un réel lien contractuel.
Section 2. La contractualisation de cette relation directe
Le droit des transports contractualise au moins dans une certaine mesure
les rapports entre le client final et le sous-traitant, alors que l’absence de
tels liens contractuels est regardée en droit commun comme étant une
donnée fondamentale de la sous-traitance et le critère de distinction entre
celle-ci et la cotraitance.
Il faut noter que le fait pour le maître de l’ouvrage, en exécution de la loi
du 31 décembre 1975, d’accepter le sous-traitant et d’agréer ses
55
Loi du 31 décembre 1975, art.3
53
conditions de paiement n’emporte pas formation d’un lien contractuel
entre eux.
Soit c’est le donneur d’ordre initial qui devient partie au contrat principal
que conclut son cocontractant direct (le sous-traiteur) avec le soustraitant. Soit c’est ce dernier qui devient partie au contrat principal conclu
directement entre le donneur d’ordre initial et le sous-traiteur. La
contractualisation est réalisée dans le premier cas puisque le client final
devient partie à un contrat qui est conclu après coup. Et dans le second
parce que le sous-traitant s’agrège à un contrat conclu avant qu’il soit fait
appel à lui. La première hypothèse relève du mécanisme de
représentation des intérêts du commettant par le commissionnaire et la
seconde du mécanisme de substitution (substitution du sous-traitant par
le sous-traiteur).
§1. Action pour le compte d’autrui
On examine l’hypothèse selon laquelle le client final devient partie au
contrat sous-traiteur/sous-traitant. Il y a représentation de la personne
lorsque l’expéditeur conclut le contrat par l’intermédiaire d’un mandataire.
Dans ce cas, il n’y a pas sous-traitance, on se trouve dans un traitement
en direct de l’opération par le mandant. Il y a représentation de la
personne lorsque l’expéditeur traite avec un commissionnaire de transport
au nom et pour le compte du commettant. L’article L.132-1 alinéa 2 du
Code de commerce prévoit que les droits et devoirs du commissionnaire
de transport sont déterminés par le Code civil et plus précisément sur les
dispositions relatives au mandat. Mais il s’oblige personnellement à
l’égard du commettant à faire transporter la marchandise. Il en fixe le prix
et en assume la responsabilité. Le transporteur effectif n’est pas celui
avec qui le donneur d’ordre initial a traité.
54
On reste dans le champ d’application de la sous-traitance. Rares sont les
jurisprudences qui éclaire le régime applicable au commissionnaire de
transport qui agit au nom de son commettant. Selon la Cour, il n’y a pas
relation tripartite de sous-traitance, mais un simple contrat de transport
entre le commettant et le transporteur. La seule particularité est que le
commissionnaire de transport est tenu personnellement des pertes et
avaries à l’égard de son commettant.
Une autre hypothèse se présente :lorsque le commissionnaire de
transport agit en son nom et pour le compte du commettant. Cela produit
des effets dans les rapports entre commettant et tiers contractant. Le
commissionnaire de transport d’une certaine manière provoque une
contractualisation des rapports entre extrêmes dans les transports
terrestres.
L’article L132-8 du Code de commerce
Cet article dispose que « La lettre de voiture forme un contrat entre
l’expéditeur et le voiturier, ou entre l’expéditeur, le commissionnaire et le
voiturier ».Son texte est modifié par la loi du 6 février 1998 afin d’élargir
son application au destinataire
Contrairement à ce qu’indique l’article L.132-8 du Code de commerce, le
contrat de transport est consensuel et la lettre de voiture constate ce
contrat. Elle ne le forme pas. Même en l’absence d’une lettre de voiture,
l’expéditeur (commettant) et le destinataire sont « parties » au contrat de
transport conclu entre le commissionnaire et le voiturier. C’est une
exception au principe de l’effet relatif du contrat.
Cependant la solution jusqu’au XIXe siècle était différente : l’article 1382
du Code civil permettait de fonder la responsabilité de chacun des
voituriers successifs vis-à-vis de l’expéditeur et du destinataire.
55
L’article L.132-8 du Code de commerce ignore le concept de soustraitance. Le Code de commerce de 1807 refuse de traiter comme un
tiers, à l’égard du transporteur le cocontractant du commissionnaire de
transport. L’expéditeur n’est pas un tiers à l’égard du transporteur, mais
une partie au contrat de transport pour ce qui est de la responsabilité du
transporteur. Cette démarche est d’autant plus compréhensible quand le
commissionnaire agit pour le compte du commettant.
L’article L.132-8 énonce que l’expéditeur est titulaire d’un droit d’action en
responsabilité contractuelle contre le transporteur. Cela tient aussi pour le
destinataire qui a aussi la faculté d’agir contre le transporteur sous-traitant
du commissionnaire.
La loi du 6 février 1998 estime également que le destinataire ne peut pas
être partie au contrat de transport. Il reste libre de refuser le contrat de
transport. La portée de cette loi tient dans la possibilité que le destinataire
puisse ou non adhérer au contrat de transport.
Le transporteur qui a accepté du commissionnaire le déplacement peut
lui-même sous-traiter tout ou partie de sa réalisation : est- il un
transporteur ou un commissionnaire ?. IL y a contrat de transport si le
cocontractant
du
commissionnaire
s’est
engagé
à
déplacer
la
marchandise et non à la faire déplacer, qu’il ait sous-traité une partie
seulement du déplacement.
Le substitué du commissionnaire cumule les qualités de sous-traitant et
de sous traiteur. L’article L.132-8 est utilisé pour engager la responsabilité
d’un transporteur « contractuel » et non d’un transporteur effectif. Le
donneur d’ordre initial peut avoir un intérêt à agir en responsabilité contre
le sous-traitant de ce transporteur contractuel, l’action se fondera sur le
contrat expéditeur/sous-traitant.
56
Enfin, le transporteur peut se retrouver débiteur de la réparation du
dommage à la fois envers l’expéditeur que du destinataire. Il risque de
verser des dommages-intérêts à une personne qui n’a pas la qualité pour
les recevoir. Les textes 56 ne désignent pas le titulaire exclusif du droit
d’action. Le transporteur peut donc être poursuivi concurremment par
l’expéditeur et le destinataire, qui peuvent agir contre lui de façon
conjointe ou successive pour la réparation de dommages distincts. Ils ne
sont indemnisés qu’à concurrence de leur préjudice respectif, et le
plafond de responsabilité du transporteur est réparti entre eux dans cette
proportion. L’expéditeur et le destinataire qui ont un droit d’action en
responsabilité contractuelle contre le transporteur. Il leur est interdit en
application de la règle de non-cumul, de se prévaloir contre lui des règles
de la responsabilité extracontractuelle 57 . Dans les transports internes, rien
de tel n’est prévu. Une règle interdit de déplafonner la responsabilité du
transporteur routier de marchandises.
Application du régime particulier au contrat
La responsabilité du transporteur peut comporter certains aménagements.
Il peut être régi par des clauses particulières : clauses limitatives de
responsabilité,
clauses
attributives
de
compétences
ou
clauses
compromissoires. Cependant, depuis 1992 58 ces clauses ont été rendues
inapplicables au destinataire qui ne les a pas acceptées.
Le problème est de savoir si le sous-traitant peut se prévaloir des clauses
relatives à sa responsabilité civile vis-à-vis du client final. Dans les
contrats types, on trouve des limites de responsabilité opposables de
plein droit à défaut de stipulations écrites 59 .
La convention CMR
Cass. com, 11 juin 1996 :Bull. civ. IV, n°173, p. 149 à propos d’une entreprise
de manutention
58 Cass. com, 26 mai 1992 : BTL 1992, p.476
59 Contrat type général, art.21
56
57
57
Quant est-il des clauses limitatives plus avantageuses pour le
transporteur que celles du contrat type.
Lorsque le document de transport est émis du transporteur sous-traitant,
le transporteur peut opposer au client agissant directement contre lui la
limitation d’indemnité qu’il a stipulé dans le contrat de transport conclu
avec le commissionnaire. C’est l’application du principe de la force
obligatoire du contrat. Peu importe que le commettant n’ait pas eu
personnellement connaissance de la clause, dès lors qu’elle a été
acceptée par le commissionnaire de transport.
Une autre hypothèse se présente lorsque le document de transport est
émis par le commissionnaire de transport qui a la qualité d’expéditeur au
contrat de transport. Dans la réglementation des transports, le document
établi par l’expéditeur peut tenir lieu de lettre de voiture s’il comporte
toutes les énonciations requises 60 .
Le transporteur est fondé à se prévaloir de la clause limitative de
responsabilité
figurant
sur
la
lettre
de
voiture
créée
par
le
commissionnaire.Il faut mettre de côté le cas où la clause considérée ne
concerne
que
la
limitation
de
la
responsabilité
« propre »
du
commissionnaire.
L’article L. 132-8 du Code de commerce est applicable aux transports
intérieurs, mais aussi aux transports internationaux.
§2. Substitution
On se trouve dans l’hypothèse où le sous-traitant devient partie au contrat
entre le client final et le sous-traiteur. Le mécanisme est différent de celui
institué par l’article L.132-8 du Code de commerce. On parle alors de
substitution de transporteur ou de substitution de commissionnaire.
60
Lamy transport, t. 1, n°142
58
Le commissionnaire peut exécuter la mission qui lui a été confiée ou alors
se décharger de celle-ci en la confiant à un autre commissionnaire de
transport.
Dans
les
deux
cas,
il
y
a
sous-traitance.
Soit
le
commissionnaire de transport conclut les contrats pour le compte du
commettant, soit il a recours à un autre commissionnaire (son substitut).
Le cocontractant et le substitut participent à la réalisation d’un service
dont ils n’assument pas le risque économique.
Aucun texte ne régit la substitution de commissionnaire de transport. Seul
l’article L.132-6 du Code de commerce dispose que le commissionnaire
de transport « est garant des faits du commissionnaire intermédiaire
auquel il adresse les marchandises ». Les rapports entre le commettant et
le commissionnaire substitué sont régis par l’article 1994 alinéa 2 du
Code civil. Cet article dispose que « dans tous les cas le mandant peut
agir directement contre la personne que le mandataire s’est substituée ».
En matière de substitution de commissionnaire de transport, l’applicabilité
de l’article 1994 alinéa 2 du code civil dans les rapports entre un
commissionnaire substitué et le commettant du commissionnaire principal
a été posé dans un arrêt du 20 juin 1995. Cependant, sa motivation n’est
pas claire.
Un sous-commissionnaire de transport, impayé par le commissionnaire
principal, avait assigné directement en paiement le commettant de celuici.
Le juge d’appel lui avait donné raison en application de l’article 1994
alinéa 2 du Code civil et le commettant faisait grief à l’arrêt d’avoir ainsi
confondu commission et mandat.
« Selon le pourvoi, […] le commissionnaire est celui qui agit en son
propre nom ou sous un nom social pour le compte d’un commettant et
[…] les règles du mandat ne régissent les droits et obligations du
commissionnaire que lorsque celui-ci agit au nom du commettant ».
59
La Cour de cassation juge le moyen non fondé « l’arrêt retient que pareille
thèse méconnaît les termes de l’article [L. 132-1] du Code de commerce
selon lesquels les devoirs et les droits du commissionnaire qui agit au
nom du commettant sont déterminés par le Code civil, livre III, titre XIII ».
Cette solution est étrange dans le sens où, en l’espèce, personne ne
prétendait que le commissionnaire avait agi au nom du commettant. Alors
que, le pourvoi soutient le contraire : le commissionnaire avait agi en son
propre nom, et l’on ne saurait faire application des règles prévues pour le
cas où il agit au nom du commettant. En réalité il semble que la Cour
énonce qu’au terme de l’article L. 132-1 du Code de commerce, le
commissionnaire est soit celui qui agit en son propre nom, soit celui qui
agit au nom du commettant. C’est seulement dans le second cas que
s’appliquent les règles du mandat. Pour la cour il y a bien commission de
transport dans les deux cas mais le commissionnaire a agi ici en son
propre nom. On n’est pas dans l’hypothèse prévue par l’article L. 132-1
alinéa 2, donc les règles du mandat sont inapplicables, ce qui rend
l’action directe en paiement irrecevable.
Tout se passe comme si le commissionnaire de transport sous-traitant
était partie au contrat principal de commission de transport pour ce qui est
des conditions de sa responsabilité civile. Il peut agir directement en
paiement de sa prestation contre le commettant.
Substitution de transporteur
Un transporteur peut recourir
à la sous-traitance. De ce fait, il peut
conclure un sous-contrat avec un transporteur qui n’est pas lié aux termes
de celui-ci. Le sous-traitant assume la responsabilité du transport dans les
termes fixés par le contrat principal. Ceci est contraire à l’article 1165 du
Code civil et l’article 1994 du Code civil est inapplicable.
60
Les conventions internationales contiennent des règles spéciales relatives
aux transporteurs successifs, et ces règles sont appliquées au
transporteur sous-traitant. Les textes imposent la participation du soustraitant au contrat de transport principal, conclu entre l’expéditeur et le
premier transporteur « chacun des transporteurs suivants devenant, de
par leur acceptation de la marchandise et de la lettre de voiture, partie au
contrat aux conditions de la lettre de voiture ». Dans tous les cas,
l’établissement d’une relation contractuelle directe entre le client final et le
sous-traitant repose sur l’adhésion de ce dernier au contrat de transport.
Dans la CMR, le lien contractuel est marqué « chacun (des transporteurs
routiers successifs) assume la responsabilité de l’exécution du transport
total, le second transporteur et chacun des transporteurs suivants
devenant [... partie au contrat, aux conditions de la lettre de voiture. » 61
L’ayant droit à la marchandise ne peut agir en responsabilité pour avaries,
pertes ou retard que contre certains transporteurs successifs déterminés.
Seuls les premier et dernier transporteurs successifs-en dehors de cas
exceptionnels 62 - assument au niveau de la dette la responsabilité de
l’exécution du transport total, et donc celle d’un dommage qui ne leur est
pas imputable.
En pratique, il s’agit de savoir si le sous-traitant qui a accepté la
marchandise et la lettre de voiture peut se prévaloir de sa qualité de partie
au contrat pour réclamer le paiement du prix de sa prestation au donneur
d’ordre initial. Il semble qu’à ce jour, il n’y ait pas de réponse.
CMR, art. 34..
En cas de demande reconventionnelle ou dans l’hypothèse « d’une
exception formulée dans une instance relative à une demande fondé sur le
même contrat de transport »
61
62
61
Il reste que soit le sous-traitant transporteur successif est regardé comme
étant partie au contrat de transport principal, il peut donc intenter une
action en paiement contre l’expéditeur ou le destinataire ; soit il est un
tiers pour tout ce qui ne concerne pas les questions de responsabilité
civile et, dans ce cas, il peut se prévaloir contre l’ayant droit à la
marchandise de l’action directe en paiement de la loi du 31 décembre
1975.
La CMR est exigeante au niveau du formalisme : le transporteur
subséquent « qui accepte la marchandise du transporteur précédent,
remet à celui-ci un reçu daté et signé. Il doit porter son nom et son
adresse sur le deuxième exemplaire de la lettre de voiture. S’il y a lieu, il
appose sur cet exemplaire, ainsi que sur le reçu, des réserves […].
Dans la pratique, la jurisprudence est plus souple : l’important est
l’adhésion du transporteur, laquelle se marque par le fait qu’il intervient
sous le couvert de la même lettre de voiture. Cependant, l’émission d’un
titre de transport distinct est la marque de la volonté de ne pas adhérer au
contrat principal 63 .
En ce qui concerne les transports routiers intérieurs de marchandises
relevant du contrat type « général » 64 l’objectif poursuivi est de régir la
relation donneur d’ordre initial/sous-traitant. Ceci doit être appréhendé au
regard de la LOTI qui dispose que « les clauses du contrat type
s ‘appliquent de plein droit » « à défaut de convention écrite définissant
les rapports entre les parties au contrat ». Le mécanisme du contrat type
suppose donc une relation contractuelle préexistante.
63
64
T. com. Bruxelles, 23 nov. 1983 : JPA 1983-1984
D. n° 99-269 du 6 avril 1999
62
TITRE 2 RELATION ENTRE LES PARTIES AU CONTRAT DE
SOUS-TRAITANCE
La mise en œuvre de cette relation consiste à exécuter le contrat. Il
convient d’examiner les cas où la responsabilité du sous-traiteur est mise
en cause pour un fait imputable au sous-traitant. Mais également les cas
où les relations entre les parties au contrat font apparaître une soustraitance abusive. Et de ce fait doit être requalifié en relation de travail.
Chapitre 1. Le recours en garantie
C’est « sous sa responsabilité » que le sous-traiteur de la prestation de
transport a recours à la sous-traitance. Si cette responsabilité est
engagée, il peut en répercuter la charge sur le sous-traitant à qui le
dommage est matériellement imputable. Il dispose contre lui d’un recours
en garantie
Section 1. Le recours.
Le recours en garantie s’exerce soit de manière principale soit de manière
incidente, selon que le sous-traiteur indemnise son donneur d’ordre et
assigne son sous-traitant en garantie ou que le sous-traiteur appelle le
sous-traitant en garantie dans le cadre du procès en responsabilité intenté
contre lui par son propre donneur d’ordre.
§1. Le droit d’action
Il faut un intérêt à agir. Comment appréhender l’intérêt légitime en ce qui
concerne le sous-traiteur de la prestation de transport ? Le sous-traiteur a
toujours un intérêt à agir puisque c’est sous sa responsabilité que le
déplacement est sous-traité. Tout dommage engage cette responsabilité,
ce qui lui donne un intérêt à agir. La question est de savoir si l’intérêt du
sous-traiteur à agir lui donne qualité pour le faire.
63
Le recours en garantie consiste à agir en responsabilité contre le soustraitant des opérations de transport, qui a mal exécuté le contrat par
lequel il s’est obligé. Cela suppose que le recours est intenté par une
personne qui ait la qualité de contractant. La situation est simple lorsque
le défendeur à l’action en garantie est le cocontractant direct du
demandeur : l’action née du contrat qui est intentée contre lui. Par contre,
la situation se complique en cas de sous-traitance en chaîne. Chaque
opérateur peut agir en garantie contre son propre sous-traitant sur le
fondement du contrat qui les lie. Mais peut-il agir directement contre un
sous-traitant de second ou troisième rang, avec qui il n’a pas contracté ?
Il faut distinguer deux hypothèses : lorsque le sous-traiteur solvens est
intervenu en qualité de commissionnaire de transport et lorsque le soustraiteur solvens est intervenu en qualité de transporteur. Dans le premier
cas, la jurisprudence lui ouvre une action en responsabilité contractuelle
contre le transporteur final.
Dans le deuxième cas, c’est la même solution qui doit être retenue. La
CMR consacre ce résultat lorsque « le transporteur par le fait duquel le
dommage a été causé » n’est pas le sous-traitant direct du transporteur
solvens
Il faut présenter une exception, celle où le sous-traiteur a commis une
faute. Le sous-traiteur peut se retourner contre le sous-traitant de la
prestation de transport en invoquant l’obligation de résultat qui pèse sur
ce dernier : partie au contrat de transport qui les lie, il est en droit de se
prévaloir, comme tout créancier des obligations nées de ce contrat, de la
responsabilité de plein droit dont ce dernier est débiteur à son égard en
application de l’article L. 133-1 du Code de commerce. Ce recours ne
peut pas être ouvert au sous-traiteur qui a lui-même commis une faute en
relation de causalité avec le dommage.
64
La cause du dommage est connue et celui-ci ne peut donc pas être
imputé au transporteur.
§2. Les délais.
Le régime légal de responsabilité du transporteur le fait bénéficier d’un
délai de prescription bref : un an en terrestre. Il commence à courir à
compter de la livraison ou de la perte de la marchandise. Il existe une
prescription spéciale de l’action en récursoire. En effet, il peut arriver que
la victime du dommage attende le dernier jour du délai de prescription
dont elle dispose pour assigner son cocontractant direct en responsabilité.
Celui-ci n’a pas la possibilité matérielle de signifier au transporteur soustraitant un recours en garantie, et s’en trouve donc privé. Ce risque est
accru en cas de sous-traitance en chaîne, car il faut alors que chacun des
intervenants ait le temps de signifier l’assignation en garantie à son
propre sous-traitant.
Section 2. La garantie
Application du régime général de responsabilité
Le recours en garantie a pour objet d’engager la responsabilité du
défendeur à l’égard du demandeur, afin de l’obliger à payer le montant
des dommages. Le régime particulier de garantie du sous-traitant ayant
été abandonné, c’est donc le régime général de responsabilités du
transporteur ou commissionnaire sous-traitant qui s’applique. Il faut se
placer dans l’hypothèse où le sous-traiteur a confié l’exécution du
déplacement ou de sa mission propre d’organisateur à un sous-traitant.
Celui-ci agit donc en qualité de transporteur ou de commissionnaire de
transport,
et
engage
sa
responsabilité
à
ce
titre.
Qu’on
soit
commissionnaire de transport ou de transporteur, chacun de ses
opérateurs de transport est débiteur d’un résultat et la responsabilité se
trouve engagée en cas d’inexécution de ce résultat, en dehors du cas où
il a formulé des réserves au moment de la prise en charge de la
marchandise.
65
En l’absence de réserves, il est censé avoir reçu la marchandise intacte et
doit répondre du dommage, même non apparent. Si le défendeur au
recours a lui-même sous-traité tout ou partie de la prestation, il peut
également intenter un recours en garantie contre son propre sous-traitant.
La responsabilité redescend ainsi le long de la chaîne des intervenants,
jusqu’au dernier transporteur. La solution est très rigoureuse pour le
dernier intervenant, qui ne peut pas échapper à la responsabilité des
dommages non apparents antérieurs à son intervention, faute de pouvoir
formuler des réserves circonstanciées. Le système est celui du Code de
commerce.
Chapitre 2.De la déviance du système au travail clandestin
Section 1.La requalification du contrat de sous-traitance
A- La requalification en contrat de travail.
Le contrat type de sous-traitance tel que nous avons pu le voir
précédemment tente en quelque sorte d’éradiquer les pratiques
conduisant à la requalification.
1.Les critères juridiques du contrat de travail.
Le contrat de travail est un contrat qui lie deux parties l’employeur et le
salarié. Ce dernier est tenu de l’exécution d’une mission sous le contrôle
de son employeur qui a la maîtrise du travail en contrepartie d’une
rémunération.
Si la rémunération est un point commun entre le contrat de travail et le
contrat d’entreprise, il n’en reste pas moins que ces deux contrats sont
distincts. Il est intéressant d’étudier cette distinction afin de bien
comprendre comment les juges en arrivent sur des fondements pertinents
à rapprocher contrat de sous-traitance et contrat de travail.
66
Parallèle entre contrat d’entreprise et contrat de travail :
Un contrat de travail se différencie juridiquement d’un contrat d’entreprise.
Alors que le Code civil rapprochait le louage d’ouvrage et le louage de
services (art 1710 et 1779) au point de ne pas les distinguer très
nettement, le développement considérable qu’a connu le droit du travail,
et l’autonomie croissante qu’il a acquise, ont rendu fondamentale la
distinction entre le contrat d’entreprise et le contrat de travail. Le critère de
la distinction a dû être d’autant plus précisé que ses intérêts se sont
accrus. Le contrat d’entreprise est un contrat synallagmatique qui
comporte une prestation à la charge de l’entrepreneur en contrepartie
d’une rémunération.
C’est la prestation de l’entrepreneur qui en est l’élément caractéristique,
assurant le critère de distinction avec les contrats voisins. Il faut observer
que le travail de qualification juridique est souvent plus difficile du fait
même que les parties emploient elles-mêmes assez rarement le
qualificatif de contrat d’entreprise. Or, on sait que si l’intitulé donné par les
parties à leur contrat ne commande pas obligatoirement sa qualification, il
en constitue un indice important qui leur fait souvent défaut. Ce qui
précisément différencie le contrat de travail du contrat d’entreprise, c’est
le lien de subordination entre l’employeur et le préposé. En effet, le
préposé appelé plus couramment le « salarié » effectue la mission
généralement inscrite dans son contrat de travail quand celui-ci existe,
sous la responsabilité, les ordres et la surveillance de l’employeur.
Le critère qui permet de distinguer le contrat de travail du louage
d’ouvrage est le lien juridique de subordination. En effet, à la
subordination de l’employé à l’égard de l’employeur, on oppose
l’indépendance juridique de l’employeur vis-à-vis du maître d’ouvrage.
67
L’entrepreneur est tenu d’exécuter le travail mais il décide librement de la
façon dont il va procéder :alors que l’employé est sous les ordres d’un
patron, l’entrepreneur est au service d’un client et conserve une liberté qui
a pour corollaire une responsabilité.
Toutefois, le critère tiré de l’indépendance juridique n’est pas toujours
simple à appliquer. En effet, il y a des salariés qui jouissent d’une grande
liberté dans l’exécution de leur tâche, tandis qu’à l’inverse certains petits
entrepreneurs sont soumis à une surveillance étroite de clients dont ils
dépendent économiquement. Pour établir s’il y a ou non lien de
subordination, et hormis le cas où la loi elle-même prend parti, la Cour de
cassation s’attache à une accumulation d’indices dont aucun n’est à lui
seul déterminant. Ces indices sont tirés à la fois su statut personnel de
l’intéressé, de son mode de rémunération et des conditions d’exercice de
son activité.
Il faut cependant, au préalable, préciser qu’aucun de ses indices n’est à
lui seul déterminant :les juges doivent, sous le contrôle de la Cour de
cassation, procéder à une appréciation d’ensemble dans laquelle ils n’ont
pas à tenir compte de la qualification voulue par les parties mais doivent
vérifier la réalité du lien de subordination 65 .
§2.La requalification en travail déguisé
Pour des raisons économiques et de réglementation sociale, le métier de
l’affrètement s’est développé ces dernières années. La pratique
professionnelle s’est développée notamment chez les messagers. Afin
d’assurer au mieux la prestation de service certains de ces professionnels
de transport ont même fortement incité des salariés de leur entité à
s’installer à leur compte.
65
Ass. Plén. 4 mars 1983 :Bull n°3
68
Ils leur ont affecté des tournées régulières et répétitives et continuaient à
gérer les conducteurs attitrés aux tournées comme si ces derniers
faisaient encore partie du personnel de l’entreprise. Il est évident que ces
nouveaux entrepreneurs rentraient dans le cadre d’une dépendance
économique.Ainsi,
lorsque
le
transporteur
employeur
devenu
commissionnaire de transport rencontrait des difficultés économiques
telles que la perte d’un client, il pouvait mettre fin du jour au lendemain à
la prestation.
Il laissait ainsi le nouvel entrepreneur dans de grandes difficultés
économiques sans pouvoir se prévaloir des avantages de la condition de
salarié dont il bénéficiait auparavant. Devant une pratique professionnelle
se développant les sous-traitants se sont trouvés dans une situation où ils
rencontraient des risques liés à leur qualité de commerçant sans avoir la
maîtrise du travail en contrepartie.
La notion de maîtrise de travail est essentielle dans la requalification du
contrat de sous-traitance en contrat de travail, accusant ainsi le
commissionnaire de travail déguisé.
Nous rentrons alors dans le cadre du travail dissimulé. Le lien de
subordination permettant de requalifier le contrat de sous-traitance en
contrat de travail est caractérisé par les faisceaux d’indices. Lorsque le
commissionnaire de transport effectue un transport pour le compte d’un
client il recherche un sous-traitant pour effectuer le transport. Celui-ci,
décide ou non de l’accepter. Le commissionnaire de transport donne alors
un ordre de mission au sous-traitant qui l’accepte. Ce dernier a donc toute
l’autonomie pour exécuter sa mission de transport. Il remplit son
obligation d’acheminer la marchandise confiée à destination dans les
délais convenus et selon les consignes particulières éventuelles du
commissionnaire de transport.
69
Dans la pratique, et dans le cas particulier du transport dédié c’est le
commissionnaire de transport qui gère au quotidien le travail effectif des
conducteurs, affectés pratiquement toute l’année sur les mêmes tournées.
Les documents de transport qui accompagnent toute le chargement sont
mêmes édités au nom et par le commissionnaire. Voir, même c’est le
commissionnaire de transport qui surveille le matériel, voir l’entretien et la
sécurité. Il maîtrise les heures du conducteur et choisit mêmes les
itinéraires. Il faut noter que la jurisprudence reste modérée sur les
documents de transport en qualité de preuve sur le sujet de la
requalification de sous-traitance.
En effet, le contrat type de sous-traitance concernant uniquement le
transport ou plutôt son mode d’emploi annexé au décret (article 7-5)
envisage le cas précis du transport dédié et des documents de
transport : « la pratique très courante qui consiste) demander au soustraitant de n’utiliser que des documents à en-tête de l’opérateur de
transport trouve sa justification dans des relations commerciales
évidentes et ne retire rien à l’autonomie du sous-traitant. L’arrêté du 9
novembre 1999 et la circulaire n°2000-17 du 10 mars 2000 valident ces
pratiques.
Du fait de ruptures abusives de contrats du jour au lendemain, des prises
de responsabilités détournées concernant les infractions liées au respect
de la réglementation sociale, les juges ont vu apparaître ces cinq
dernières années des actions de sous-traitants en demande de
requalification des contrats en contrats de travail 66 . Il s’agit pour les juges
dans ce cas de réunir les faisceaux d’indices qui apportent le preuve :que
le sous-traitant n’a pas la maîtrise du travail, qu’il y a un lien de
subordination caractérisé et qu’il n’y a aucune autonomie ni indépendance
du sous-traitant.
66
Arrêt Villefranche sur Saône du 2 novembre 1998 :BTL novembre 1998,p.598
70
Lorsque, ces éléments sont caractérisés, non seulement le contrat de
sous-traitance est requalifié en contrat de travail, le commissionnaire de
transport qui revêt alors la qualité d’employeur, se voit accusé de travail
dissimulé et devra subir toutes les conséquences qui en découlent, celles
du travail clandestin.
Section 2. Les sanctions
A. Travail clandestin ou travail dissimulé
La loi du 3 août 1977 interdit le travail clandestin. Elle considère comme
travail clandestin :
- L’exercice à titre indépendant des activités professionnelles régies par
la loi, l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel,
ainsi qu’à certaines professions libérales, sans être en possession de
l’autorisation requise à cet effet.
-La prestation d’un travail salarié, lorsque le travailleur sait que
l’employeur ne possède pas l’autorisation requise par la loi ou lorsqu’il
sait que sa situation en qualité de salarié n’est pas régulière au regard
de la loi régissant les retenues sur salaires et traitements ou de la
législation relative à la sécurité sociale.
De même, la loi interdit d’avoir recours aux services d’une personne ou
d’un groupe de personnes pour l’exécution d’un travail clandestin.
La loi ne considère pas comme travail clandestin :
-Une activité exercée personnellement pour son propre compte et sans
l’aide d’autrui.
-Une activité occasionnelle et de moindre importance exercée pour
compte d’autrui.
-Une activité isolée exercée pour compte d’autrui lorsqu’elle n’excède
pas le cadre de l’entraide usuelle entre proches parents, amis ou voisins.
71
Autant dire que le commissionnaire de transport ne rentre pas dans le
cadre de ces exclusions de qualification en travail clandestin.
La jurisprudence Tribunal arbitral Luxembourg 18 décembre 1984
rappelle que l’interdiction du travail clandestin est subordonnée aux trois
conditions suivantes :
-Existence d’un travail clandestin, c’est-à-dire l’exécution à titre
indépendant par une personne physique ou morale de l’une des activités
professionnelles énumérées par la loi déterminant les conditions d’accès
et d’exercice de certaines professions sans être en possession de
l’autorisation prévue.
-La réalisation d’une activité professionnelle non visée par les exceptions
définies par la loi
-L’exécution d’un travail dans le but de lucre.
B. Les sanctions
La loi de 1977 contraint solidairement au paiement des cotisations dues
pour la prestation des services aux organismes de la sécurité sociale
celui sui prend recours au service d’une personne ou d’un groupe de
personnes pour l’exécution d’un travail clandestin.
Les travaux exécutés clandestinement ne peuvent bénéficier d’aucune
subvention gouvernementale ou communale.
La loi du 26 juillet 1975 autorisant le gouvernement à prendre des
mesures destinées à prévenir des licenciements pour des causes
conjoncturelles et à assurer le maintien de l’emploi, interdit tout travail
salarié lorsque celui qui s’y livre sait que l’employeur ne possède pas
l’autorisation d’établissement requise par la loi ou qu’il sait que sa
situation en qualité de salarié n’est pas régulière au regard de la
législation concernant les retenues sur salaires et traitements ou de la
législation relative à la sécurité sociale.
72
Pénalement, le travail clandestin est puni de prison et d’amendes
lourdes conformément à l’article 143-4 du Code pénal.
73
CONCLUSION
Le recours à la sous-traitance est fréquent en matière de transport. La
sous-traitance est regardée en droit commun comme étant un souscontrat
d’entreprise,
exclusif
d’un
lien
contractuel
direct
entre
contractants extrêmes. Il faut considérer, alors, qu’il y a peu de soustraitance en transport routier de marchandises. En effet, le transporteur
qui confie à un autre confrère le déplacement dont il s’est chargé est
traditionnellement qualifié de commissionnaire de transport. Mais lorsque
ce dernier contracte avec le transporteur commis, il ne sous-traite pas
mais exécute la mission qu’il a contractée.
Il n’en demeure pas moins que le législateur qualifie de sous-traitance la
relation commissionnaire / transporteur. Cela s’explique par le fait que la
notion de sous-traitance est une notion relative, qui peut avoir plusieurs
sens.
L’enseignement du droit des transports sur la sous-traitance concerne
dans un premier temps le transporteur sous-traitant. Celui-ci bénéficie de
l’action directe en paiement de la loi de 1975 sur la sous-traitance, mais
également d’un alignement de sa responsabilité sur celle du transporteur
principal. On fait application des mécanismes utilisés pour plafonner la
responsabilité du transporteur et de ses préposés. Dans un second
temps, on a supprimé la qualité de tiers en contractualisant la relation.
Cela se vérifie lorsque le donneur d’ordre initial devient partie au contrat
de sous-traitance conclu par le commissionnaire de transport . De même
lorsque le sous-traitant devient obligé dans les termes du contrat conclu
entre le donneur d’ordre initial et le sous-traiteur. La substitution de
commissionnaire de transport en est une manifestation.
74
La sous-traitance a un domaine large, elle n’est pas cantonnée au seul
contrat d’entreprise. Son régime est neutre :quelque soit le contrat de
base, le sous-traiteur et le sous-traitant se voient appliquer les mêmes
règles de responsabilité. Sa nature juridique a pour support l’action pour
le compte d’autrui ou la substitution de personne.
La sous-traitance
prend en matière de transport un sens plus large
qu’en droit commun, et révèle qu’elle n’est exclusive ni d’un lien
contractuel direct entre extrêmes, ni d’un alignement du régime de
responsabilité du sous-traitant sur celui du sous-traiteur..
75
BIBLIOGRAPHIE
I.
Ouvrages généraux
F.COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et
commerciaux, 5e éd., 2001
DUVERDY, Traité du contrat de transport, 2e éd., 1874
B. MERCADAL, Droit des transports terrestres et aériens, Dalloz,
1996- Droit des affaires, Mémento F. Lefebvre, 1998
J. NÉRET, le sous-contrat, n°19
Ph. PETEL, le contrat de mandat, Dalloz, 1994
RODIÈRE, Des commissionnaires de transports successifs : D.1958
II.
Ouvrages spéciaux
S. ALI HASSANE, La responsabilité du commissionnaire de
transport, thèse Strasbourg III, 1996, dir. M. Rèmond-Gouilloud
P. CANIN, Les actions récursoires entre coresponsables, Litec,
1996,
L. GUIGNARD, Sous-traitance et transport, Litec 2001
L.
GRAND,
La
sous-traitance
en
transport
routier
de
marchandises, éd. Celse, 1999
LAMY TRANSPORT, 2001-2002, t. 1, route ;t. 2, commission de
transport
J. NÉRET, le sous-contrat, LGDJ, Bib. Dr. Privé., 1979
76
III.
Articles, rapports et chroniques
Séminaire organisé à Liège le 18 avril 2002, La sous-traitance,
éd. Bruyant Bruxelles, 2003
B. MERCADAL, Regard sur le droit des transports, Mélanges
Rodière, Litec, 1981, p. 427
Ph. PETEL, Représentation, Rép. Dalloz droit civil, 1993
J. –P. TOSI, L’adhésion du destinataire au contrat de transport,
Mélanges christian Mouly, Litec, 1998, t. 2 p.175
77
INTRODUCTION
-PARTIE PRÉLIMINAIRE DEFINITIONS ET ANALYSES DE LA
SOUS-TRAITANCE
Section 1 Analyse de la sous-traitance
§1 – Les avantages et obstacles à la sous-traitance
§2 - La sous-traitance :élément de la stratégie de l’entreprise
§3.La sous-traitance :une notion floue
Section 2 Définitions de la sous-traitance
§1 La sous-traitance au sens de la loi du 31 décembre 1975
A.
La définition
B.
Les incohérences
1.Inapplication de la loi de 1975 au commissionnaire de transport
2.L’existence d’un lien contractuel entre les extrêmes.
78
§2. La sous-traitance au sens de la loi du 31 décembre 1992
relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du
transport routier de marchandises.
A.Commission de transport et sous-traitance
B. Location de véhicules avec chauffeur et sous-traitance
PREMIERE PARTIE
LE RECOURS A LA SOUS-TRAITANCE
TITRE 1-LA LEGITIMITE DE LA SOUS-TRAITANCE
CHAPITRE 1.- Légitimité du recours à la sous-traitance
Section 1 Légitimité du recours à la sous-traitance
lorsque le sous traiteur est un commissionnaire de transport
Section 2 Légitimité du recours à la sous-traitance
lorsque le sous traiteur est un transporteur
CHAPITRE 2- Les modalités de la sous-traitance
Section 1 La lutte contre les accidents
Section 2 Le consentement des clients face à
l’entreprise sous-traitante
Section 3 Le problème de la sous tarification en matière
de sous-traitance
TITRE 2-LA RELATION DE SOUS-TRAITANCE
CHAPITRE 1. L’opération de déplacement
Section 1 Mécanisme de cette opération en matière de
transport de marchandises
§1 – Le contrat de transport
79
1.La sous-traitance ayant pour objet un transport de lot
2.La sous-traitance ayant pour objet un transport de
messagerie
3.Contrat de sous-traitance exclusive
§2 – Le louage de choses : champ d’application de la soustraitance ?
Le contrat de location :
CHAPITRE 2. La relation de dépendance
Section 1 Les sujétions
§1 – Les sujétions générales
§2 – Les sujétions particulières
Section 2 La réglementation contre les abus
§1 – Mise en place d’un seuil en matière de sous tarification
§2 – Mise en place d’une responsabilisation du donneur d’ordre
§3 – Délai de paiement
§4 – Modèle de contrat de sous-traitance
SECONDE PARTIE
LA MISE EN ŒUVRE DE LA SOUS-TRAITANCE
TITRE 1 L’OBLIGATION DE RESULTAT
CHAPITRE 1. En matière de transport de marchandises
Section 1 La commission de transport
80
§1 – Responsabilité du fait personnel
§2 – Responsabilité du fait d’autrui
§3 – Responsabilité pour faute
CHAPITRE 2. Les rapports sous traiteur / sous-traitant
Section 1 Existence d’une relation directe
La loi du 31 décembre 1975
Section 2 La contractualisation de cette relation directe
§1 – Action pour le compte d’autrui
§2 – Substitution
TITRE 2 RELATION ENTRE LES PARTIES AU CONTRAT DE
SOUS-TRAITANCE
CHAPITRE 1. Le recours en garantie
Section 1 Le recours
§1.Le droit d’action
§2 – Les délais
Section 2 La garantie
§1 – Application du régime général de responsabilité
§2 – Le droit positif
Chapitre 2.De la déviance du système au travail clandestin
81
Section 1.La requalification du contrat de sous-traitance
A.La requalification en contrat de travail.
1.Les critères juridiques du contrat de travail.
Parallèle entre contrat d’entreprise et contrat de travail
§2.La requalification en travail déguisé
Section 2. Les sanctions
B. Les sanctions
Conclusion
Bibliographie
Annexes
82