La tuberculose chez l`homme et chez l`animal
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La tuberculose chez l`homme et chez l`animal
INT J TUBERC LUNG DIS 14(9):1075–1078 © 2010 The Union SERIE DIDACTIQUE: MYCOBACTERIUM BOVIS ARTICLE DE SÉRIE La tuberculose : une affection en recrudescence chez l’animal et chez l’homme NUMÉRO 1 DE LA SÉRIE Cet article est le début d’une série sur l’affection animale due à Mycobacterium bovis et sur ses implications pour la lutte contre la tuberculose dans les populations humaines. Nous présentons cette série comme un rappel du fait que la tuberculose est une maladie comportant un réservoir animal et que, pour cette raison, son éradication ultime doit prendre en compte ce réservoir animal et incorporer des stratégies pour l’aborder dans la stratégie mondiale de lutte et d’élimination de la tuberculose chez l’homme. Nous pensons que ce fait a été négligé dans la stratégie actuelle, et qu’il doit être reconnu et être incorporé, fut-ce de façon minimale, dans les Révisions ultérieures de la stratégie mondiale. —Les auteurs La tuberculose chez l’homme et chez l’animal : vue d’ensemble P. A. LoBue,* D. A. Enarson,† C. O. Thoen‡ * Field Service and Evaluation Branch, Division of Tuberculosis Elimination, Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, Georgia, États-Unis ; † Union Internationale Contre la Tuberculose et les Maladies Respiratoires, Paris, France ; ‡ Department of Veterinary Medicine, Iowa State University, Ames, Iowa, États-Unis RÉSUMÉ La tuberculose (TB) est une maladie importante tant pour les humains que pour les animaux. La sensibilité à l’égard de Mycobacterium tuberculosis est relativement élevée chez l’homme, chez d’autres primates et chez les cobayes. Le bétail, les lapins et les chats sont sensibles à l’infection par Mycobacterium bovis, mais très résistants à M. tuberculosis. Le bétail élevé en liberté est généralement sensible à M. bovis, mais on ne dispose que de peu de publications sur l’isolement de M. tuberculosis. Les cochons et les chiens sont sensibles à la fois à M. bovis et à M. tuberculosis. M. bovis ne rend compte que d’un petit pourcentage seulement des cas de TB signalés chez l’homme ; toutefois, c’est un pathogène d’une importance économique significative chez les animaux sauvages et domestiques partout dans le monde, particulièrement dans les pays où l’on ne dispose que de peu d’informations sur l’incidence de l’infection à M. bovis chez les hommes. A l’opposé de la transmission de M. bovis du bétail vers l’homme, le rôle de la transmission d’homme à homme par voie aérienne dans la dispersion de M. bovis est resté quelque peu controversé. Des investigations sont nécessaires pour élucider l’importance relative de M. bovis dans l’incidence de la TB chez l’homme, particulièrement dans les pays en développement. Il y aurait lieu de concentrer les efforts sur les pays où l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est fréquente car les sujets infectés par le VIH sont plus sensibles à l’égard des maladies mycobactériennes. L’éradication de M. bovis dans le bétail et la pasteurisation des produits laitiers sont les pierres angulaires de la prévention de la maladie chez l’homme. M O T S - C L É S : Mycobacterium bovis ; tuberculose ; zoonose ; transmission LA TUBERCULOSE (TB), une affection remontant à l’antiquité, est importante au niveau mondial tant chez l’homme que chez l’animal. On estime que le baSérialisation de l’article Thoen C O, LoBue P A, Enarson D A, Kaneene J B, de Kantor I N. Tuberculosis: a re-emerging disease in animals and humans. In: Kaplan B, Kahn L H, Monath T P, ed. ‘One Health One Medicine’: linking human, animal and environmental health. [Special Issue] Vet Ital 2009; 45: 135–181. cille tuberculeux infecte deux milliards de personnes, soit approximativement un tiers de la population mondiale, et l’on estime que 1,5 million à 2 millions de personnes décèdent chaque année des suites de la TB.1 Quatre-vingt-dix pour cent des cas surviennent dans les pays en développement. La TB est une des causes principales de décès lié à des maladies infectieuses au niveau mondial. Le genre Mycobacterium Auteur pour correspondance : Donald A Enarson, Scientific Activities Unit, International Union Against Tuberculosis and Lung Disease, 68 bd Saint Michel, Paris 75006, France. Tel : (+33) 1 44 32 03 60. Fax : (+33) 1 43 29 90 87. e-mail : [email protected] [Traduction de l’article : « Tuberculosis in humans and animals: an overview » Int J Tuberc Lung Dis 2010; 14(9): 1075–1078] 2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease comporte différentes espèces qui provoquent la maladie TB chez l’homme et chez d’autres espèces animales. Le complexe Mycobacterium tuberculosis comporte M. tuberculosis, M. cannettii, M. africanum, M. bovis, M. pinnipedii, M. caprae et M. microti. Dans les pays industrialisés, des progrès significatifs ont été faits vers l’élimination de la TB causée par le complexe M. tuberculosis en provenance d’humains.2 Toutefois, dans de nombreux pays où les programmes TB n’ont été instaurés que récemment, les progrès vers la maîtrise de la maladie ne sont encore que limités. Le développement des souches résistantes aux médicaments (multirésistantes et ultrarésistantes) a compromis l’efficacité du traitement de la TB chez l’homme et a accru de façon considérable les coûts liés à l’utilisation de multiples médicaments.3 De plus, la sensibilité des individus infectés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) à l’égard du complexe M. tuberculosis constitue un souci majeur pour les agents officiels de santé publique dans les pays en développement, où se déchaîne le syndrome de l’immunodéficience acquise.4 M. bovis n’est responsable que d’un petit pourcentage seulement des cas déclarés de TB chez l’homme ; toutefois, c’est un pathogène d’importance économique significative chez l’animal sauvage et chez les animaux domestiques tout autour du globe, particulièrement dans les pays où peu d’informations sont disponibles sur l’incidence de l’infection par M. bovis chez l’homme.5–7 Le bacille tuberculeux a été identifié il y a plus de 120 ans. Toutefois, une compréhension définitive de la pathogénie de la maladie causée par le complexe M. tuberculosis fait encore défaut.8,9 Le bacille tuberculeux pénètre dans le macrophage en se fixant aux molécules de la surface moléculaire du phagocyte. L’ingestion des bacilles tuberculeux par les phagocytes au sein du phagosome ou de la vacuole intracytoplasmique protège ce germe des défenses naturelles présentes dans le sérum. A la suite de l’ingestion du bacille, les lysosomes fusionnent avec le phagosome pour former des phagolysosomes, et c’est alors que les phagocytes tentent de détruire le bacille.10 Toutefois, des bacilles virulents ont la possibilité d’échapper à ce processus destructif. Les mycobactéries virulentes survivent à l’intérieur du phagocyte mononucléaire en inhibant la fusion du phagosome avec les lysosomes préformés, ce qui limite ainsi l’acidification. On a suggéré que le caractère pathogène du complexe M. tuberculosis constitue un phénomène multifactoriel. Toutefois, dans les cas où la réponse de l’hôte est incapable de détruire le bacille en raison de conditions compromettant la fonction immunitaire, avec des cellules T CD4+, telle que l’immunodépression due à la chimiothérapie, au stress ou au VIH, la réactivation peut survenir, ce qui entraîne la libération de bacilles et la transmission de l’infection. La sensibilité des différentes espèces-hôte varie à l’égard du complexe M. tuberculosis, en fonction de la voie de pénétration, de la dose d’organismes et de la virulence de la souche.11 Les hommes, les primates non humains et les cobayes sont très sensibles à l’égard de M. tuberculosis. Le bétail, les lapins et les chats sont sensibles à M. bovis et très résistants à M. tuberculosis. Le cheptel sauvage ongulé est généralement sensible à M. bovis, mais on ne dispose que d’un petit nombre de rapports sur l’isolement de M. tuberculosis chez ces animaux.12–14 Les cochons et les chiens sont sensibles à la fois à M. bovis et à M. tuberculosis.15 Chez l’homme, la TB est une maladie pulmonaire systémique provoquée par les espèces du complexe M. tuberculosis et principalement par M. tuberculosis. Les infections TB surviennent lorsque les individus sensibles inhalent les noyaux de gouttelettes contenant les bacilles tuberculeux et lorsque les noyaux de gouttelettes atteignent les alvéoles pulmonaires. Les bacilles tuberculeux qui atteignent les alvéoles sont ingérés par les macrophages alvéolaires et la majorité de ces bacilles sont détruits ou inhibés. Un petit nombre d’entre eux se multiplient à l’intérieur des cellules et sont libérés au moment de la mort des macrophages. Lorsqu’ils sont vivants, ces bacilles peuvent se disperser par la voie lymphatique ou sanguine vers des tissus ou organes plus éloignés, y compris les zones dans lesquelles la maladie TB est la plus susceptible de se développer : les sommets pulmonaires, les reins, le cerveau et les os et via le système lymphatique vers les ganglions lymphatiques régionaux. Le processus de dissémination stimule le système immunitaire à provoquer des réponses systémiques. En raison de la stimulation du système immunitaire, les bacilles extracellulaires attirent les macrophages et d’autres cellules immunologiquement actives. La réponse immunitaire détruit la plupart des bacilles et les bacilles restants sont confinés grâce à la formation de granulomes. A ce moment, l’infection tuberculeuse latente (ITBL) est bien établie, ce qui peut être détecté par le test cutané tuberculinique de Mantoux ou le test de libération de l’interférongamma. Dans les semaines qui font suite à l’infection, le système immunitaire est habituellement capable d’arrêter la multiplication des bacilles tuberculeux, ce qui évite une progression ultérieure. Chez certains individus, les bacilles tuberculeux surmontent les défenses du système immunitaire et commencent à se multiplier, ce qui entraîne la progression de l’ITBL vers la maladie TB. Ce processus peut survenir peu après l’infection ou après de nombreuses années. Sauf s’ils sont traités, approximativement 3% à 5% des individus infectés par M. tuberculosis développeront la maladie TB dans les deux premières années après l’infection, et 2% à 5% de plus la développeront à un moment donné plus tard au cours de la vie. Donc, approximativement 5% à 10% des individus dont les systèmes immunitaires sont normaux et qui ont été infectés par M. tuberculosis Vue d’ensemble de la TB zoonotique développeront la maladie TB à un moment donné de leur existence. Le risque de progression de l’infection vers la maladie est beaucoup plus élevé chez les sujets immunodéprimés. Par exemple, chez les sujets infectés par le VIH et ne bénéficiant pas d’un traitement antirétroviral, le risque annuel de progression s’élève à 8%.16 La TB reste une maladie importante tant chez l’homme que chez les animaux. Elle entraîne une morbidité, une mortalité et des pertes économiques substantielles au niveau mondial. De grandes variations existent sur la manière dont les différents organismes du complexe M. tuberculosis atteignent des animaux spécifiques, y compris l’homme. Toutefois, il existe également d’importantes interrelations entre les hommes et les animaux en ce qui concerne la TB. Le meilleur exemple à ce sujet est peut être l’apparition d’infections par M. bovis chez les hommes et chez les animaux domestiques et sauvages. M. bovis persiste chez l’homme et y cause une maladie pulmonaire et extrapulmonaire. A l’opposé de la transmission de M. bovis depuis le bétail vers l’homme, le rôle de la transmission aérienne d’homme à homme dans la dispersion de M. bovis a été quelque peu controversé.17 La vue prédominante etait que la transmission d’homme à homme était un événement rare et qu’elle n’était susceptible de survenir que dans les populations particulièrement sensibles à la TB (par exemple, les sujets infectés par le VIH). Toutefois, on a signalé des grappes de cas comportant des liens épidémiologiques sociaux et moléculaires concernant des patients atteints d’infection M. bovis pulmonaire, ce qui suggère que la transmission d’homme à homme existe vraiment, même chez les sujets immunocompétents.18 Des investigations s’imposent pour élucider l’importance relative de M. bovis en ce qui concerne l’incidence de la TB chez l’homme, particulièrement dans les pays en développement.1 Il y aurait lieu de concentrer les efforts sur les pays où l’infection par le VIH est répandue, puisque les individus infectés par le VIH sont plus susceptibles à l’égard des maladies mycobactériennes. L’éradication de M. bovis dans le bétail et la pasteurisation des produits laitiers sont les pierres angulaires de la prévention de la maladie chez l’homme.19 Les mesures standard de santé publique utilisées pour prendre en charge les patients dont la TB due à M. tuberculosis est contagieuse doivent être appliquées aux patients contagieux atteints d’une infection par M. bovis, de manière à arrêter la transmission de personne à personne. Finalement, il y aurait lieu d’élaborer des mesures pour identifier et contrôler l’infection par M. bovis chez les animaux sauvages, puisque ces animaux peuvent constituer d’importants réservoirs d’infection pour les animaux domestiques destinés à l’alimentation. Il est important d’insister sur le fait qu’une large variété d’hôtes accueillent les bacilles tuberculeux pa- 3 thogènes ; différentes espèces du genre Mycobacterium infectent les hommes aussi bien que les animaux sauvages et domestiques. Il est dès lors nécessaire que les professionnels des secteurs médical et vétérinaire coopèrent en cas de micro-épidémie de la maladie.20 Ce concept a été défendu antérieurement.21 Toutefois, son importance est croissante pour la lutte antituberculeuse au 21ème siècle en raison de l’apparition de souches du complexe M. tuberculosis résistantes aux médicaments et en raison de l’immunodépression des réponses de l’hôte provenant de causes multiples, qui entraîne de son côté une sensibilité accrue à l’égard des bacilles tuberculeux. Références 1 World Health Organization. Global tuberculosis control 2009: epidemiology, strategy, financing. WHO/HTM/TB/2009.411. Geneva, Switzerland: WHO, 2009. 2 Enarson D A, Rieder H L. The importance of Mycobacterium bovis to the tuberculosis epidemic in humans. In: Thoen C O, Steele J H, eds. Mycobacterium bovis infection in animals and humans. 1st ed. 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