DOC 20130201 Génération Y_Approche générationnelle de la

Transcription

DOC 20130201 Génération Y_Approche générationnelle de la
 Lʼappartenance à une génération donnée est lʼune des dimensions qui permet de mieux
comprendre un individu, ce qui le caractérise et le met en mouvement. Cʼest donc lʼun des
critères pertinents. Cependant, toute approche générationnelle, à la fois globale et partielle,
ne saurait à ce titre suffire à identifier les leviers motivationnels que peuvent actionner les
entreprises pour attirer, mobiliser et retenir les talents.
Dans la famille « Générations Alphabet », je voudrais la Génération Y… Bonne pioche !
La génération Y est le sujet à la mode, si lʼon en croît la profusion dʼarticles, ouvrages et
conférences qui lui sont consacrés.
Inventée en 1993 par le magazine américain Ad Age, lʼexpression « Génération Y » désigne
ceux et celles (les « Y ») dont la date de naissance se situe entre 1978 et 1994.
Logiquement, elle fait suite à sa grande sœur, la génération X, peuplée des personnes nées
entre 1965 et 1977.
Cette génération Y se différencie de ses aînées par quelques grands traits :
Février
2013
La quête de sens et le rapport à lʼautorité
La génération Y est la génération « Pourquoi ? ». Le besoin de comprendre, la recherche de
sens sont très présents dans son processus décisionnel et motivationnel. Il nʼy a pas
dʼengagement sans compréhension de lʼobjectif recherché, sans validation de sa pertinence
intrinsèque.
De facto, le rapport que cette génération entretient à lʼautorité est très différent de celui de
ses ainées. A lʼautorité hiérarchique, cʼest-à-dire celle qui sʼexerce par le seul fait de la
position que lʼon occupe (prestige, pouvoir, capacité à contraindre) se substitue une autorité
fondée sur la compétence. Comme le souligne Michel Serres, Académicien et Professeur,
« celui qui a autorité sur moi doit augmenter mes connaissances, mon bonheur, mon travail,
ma sécurité, il a une fonction de croissance. La véritable autorité est celle qui grandit
l'autre. » La génération Y ne fonde pas ex-abrupto la légitimité de lʼautorité sur le seul
organigramme. De plus, elle attend des responsables, auxquels elle reconnaît préalablement
une compétence certaine, la transmission dʼun apprentissage.
Difficile dans un tel contexte dʼattendre dʼelle un dévouement aveugle à la cause ou le
comportement dʼun bon petit soldat.
Manager la génération Y ne peut dès lors sʼenvisager selon les seuls schémas plus
traditionnels de management paternalistes ou autoritaristes, du type « donneurs dʼordres ».
Un besoin de réalisation de soi
Dans la hiérarchie des besoins identifiés par Abraham Maslow, la réalisation de soi culmine
au sommet. Elle se comprend comme ce désir de devenir de plus en plus ce que lʼon est, ce
que lʼon est capable dʼêtre, « devenir le meilleur de soi-même ».
Par essence, lʼaccomplissement de soi est holistique, global, touche aux différents aspects
de la personnalité, à lʼensemble des dimensions de la vie de lʼindividu.
En quoi cela concerne-t-il les entreprises ? Très certainement, attirer, motiver et retenir les
talents nʼemprunte plus le seul chemin professionnel. Sphères privée et professionnelle ne
sont plus séparées de manière aussi étanche que par le passé. Comment, à supposer quʼils
le doivent ou le veuillent, les managers peuvent-ils intégrer cette nouvelle attente, voire
exigence, de leurs collaborateurs ?
Un rapport étroit avec les technologies de lʼinformation et de la communication (TIC)
La génération Y est la génération de la télévision, de lʼordinateur, des consoles de jeux, des
smartphones et de lʼinternet. A lʼère du numérique, les « Y » ont intégré les nouvelles
technologies dans tous les aspects de leur quotidien. Le numérique est pour eux un lieu de
socialisation, rencontres, échanges et partages (réseaux sociaux, téléphones portables,
emails), de loisirs et de création (sites dédiés, jeux en ligne, consoles), dʼapprentissage (elearning), de culture et dʼinformation (sites spécialisées, blogs, e-presse), de consommation
(e-commerce).
Et pourtant, sont-ils pour autant formés aux applications bureautiques et autres logiciels
professionnels ? Si leur connaissance des TIC est réelle, en quoi est-elle compatible avec
les besoins de lʼentreprise ?
Une culture de lʼinstantanéité et du multitasking
« Julyan, 20 ans, assis à table à un dîner de famille, publie sur son blog à lʼaide de sa
tablette (nouvellement acquise sur internet) la photo de sa sœur tournoyant au son de la
musique, un IPOD suspendu à son cou. Un ami lui envoie un SMS pour lui suggérer de
regarder le dernier clip dʼun groupe de musique sur YouTube. Séduit, il sʼempresse de poser
un Tweet pour partager ses impressions et télécharge dans la foulée lʼalbum sur son compte
ITunes. Son iPhone « vissé » à la main, il rejoint la famille devant la WII pour un cours
collectif de Zumba, sʼauto-filme et partage tout en dansant ses exploits sur Facebook. »
Février
2013
Le rapport au temps de la génération Y est très influencé par lʼutilisation quasi constante des
TIC. Les Y travaillent depuis chez eux et socialisent ou se divertissent sur leur lieu de travail.
Dès lors, quelle est la pertinence dʼun management qui valorise le temps de présence au
sein de lʼorganisation ? En quoi ce rapport au temps spécifique influe-t-il sur la manière
dʼévaluer le travail des salariés ?
A cela sʼajoute une culture de lʼinstantanéité qui nʼest pas nécessairement en phase avec le
temps de lʼentreprise.
Une approche mondialisée et mobile
La génération Y, virtuellement ou réellement, voyage dans le monde entier. Ayant accès à
une offre pléthorique, elle navigue dʼun lieu à lʼautre, dʼun fournisseur à lʼautre, au gré de ses
envies et des opportunités. Comment fidéliser cette population de travailleurs mobiles,
volatils, qui déclarent majoritairement ne pas envisager de mener leur carrière au sein dʼune
seule entreprise ? Quid de la stabilité de la relation employeur-employé, vecteur
dʼincrémentation des compétences des collaborateurs, de leur intégration et de leur adhésion
à la culture et aux valeurs de lʼentreprise ?
Un goût pour le ludique
Enfin, cette génération joue beaucoup. La place du divertissement dans lʼoccupation de son
temps est conséquente. Qui-plus-est, nombre dʼactivités, y compris professionnelles, se
doivent de présenter une dimension ludique pour être engagées, investies et poursuivies.
Quelles sont les entreprises qui font une place au ludique ? Comment concilier les exigences
de la rigueur professionnelle avec les besoins de distraction ?
On le voit, la dimension générationnelle, comme tout autre aspect culturel (nationalité, culture
métier, origine sociale …), porte en elle des clés de compréhension de cette catégorie de
collaborateurs qui ont aujourdʼhui entre 18 et 35 ans. Permettant de définir une série de
facteurs identitaires communs, lʼapproche générationnelle confère un premier niveau
dʼanalyse et de connaissance et par suite des pistes dʼaction et dʼadaptation des modes de
management.
Et pourtant… Au risque dʼenfoncer une porte ouverte, il nous semble évident quʼil y a
potentiellement autant de différences entre deux individus de cette génération quʼentre « un
Y » et « un X », par exemple. Qui plus est, certains lecteurs « X » auront pu se reconnaître,
totalement ou partiellement, dans la description de la génération Y ci-dessus, et des « Y » ne
pas sʼy retrouver.
Dès lors, est-il efficace, pertinent de sʼen tenir à la seule analyse générationnelle pour définir
et implémenter les ajustements managériaux à même de favoriser une meilleure mobilisation
et un plus grand engagement de lʼensemble des salariés ? Aborder la question du
recrutement, de lʼintégration et de la coexistence des talents dans lʼentreprise sous le seul
angle générationnel nous paraît non seulement réducteur mais aussi voué à se priver de
toute une autre série de leviers motivationnels plus spécifiques, comme par exemple ceux
liés aux personnalités.
« Attirer, retenir et faire coexister les talents au sein de lʼentreprise » est un défi qui
nécessite de sʼintéresser aux facteurs de motivation de chaque membre de lʼorganisation et
implique une mise en perspective des besoins de chaque génération en présence. Dans ce
domaine, lʼentreprise se doit dʼassurer la cohérence des réponses apportées.
Gaetana Butera & Bénédicte Rousseau
Février 2013
Février
2013