Peut-on raisonnablement arrêter le maïs et extensifier la production
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Peut-on raisonnablement arrêter le maïs et extensifier la production
Les réseaux d’élevage vous parlent de la PAC… PEUT-ON RAISONNABLEMENT ARRETER LE MAÏS ET EXTENSIFIER LA PRODUCTION LAITIERE ? Dans les zones herbagères, avec une ressource en herbe abondante issue de prairies naturelles à caractère obligatoire, les exploitations laitières ont conservé une orientation élevage marquée. Depuis 1992, avec l’instauration des aides PAC, les éleveurs ont souvent mis en place des systèmes fourragers reposant sur un équilibre herbe – maïs permettant d’optimiser le volume de primes. Cette approche a conduit à développer des systèmes à double vitesse basés sur une intensification de la production laitière permise par l’ensilage de maïs et sur le maintien d’une bonne valorisation des surfaces en herbe excédentaires grâce à l’engraissement de bœufs. Avec le découplage, (100% des primes aux bovins mâles et de leurs compléments extensifs et 75% des primes au maïs fourrage), peut-on envisager de produire du lait uniquement à base d’herbe quitte à réduire fortement ou arrêter la production de bœufs ? Vers une re-spécialisation laitière accompagnée d’un rééquilibrage Herbe / Maïs. Le découplage des aides à l’engraissement peut remettre en cause l’intérêt de maintenir un atelier viande pour valoriser les surfaces en herbe excédentaires, surtout lorsque celui-ci se limite à la production de bœufs issus du troupeau laitier. Cette re-spécialisation de l’élevage par arrêt de l’atelier de bœufs pourrait être perçue positivement en matière de simplification et de diminution du travail d’astreinte, notamment sur la phase d’élevage des veaux sur les six premiers mois et durant la période d’hivernage. Par contre, il est impératif que cette simplification s’accompagne d’un ajustement du système fourrager. En général, les surfaces en herbe utilisées par les boeufs sont déclarées en prairies naturelles qui ne peuvent pas être mises en cultures de vente dans le nouveau contexte de conditionnalité agricole et environnementale. Elles devront alors rester en place et leur production fourragère entrera directement en concurrence avec le maïs ensilage. La surface ainsi libérée ne doit pas conduire à une sous valorisation des prairies et à un manque à gagner économique. Dans certaines situations, l’éleveur peut être amené à réduire fortement voire arrêter l’ensilage de maïs et à alimenter les vaches en hiver avec de l’herbe stockée, sous forme d’ensilage généralement. Quels résultats peut-on attendre d’une telle adaptation ? Une étude a été réalisée par le réseau d’élevage lait pour tester la crédibilité de cette orientation. L’exploitation initiale est à dominante herbagère avec une part limitée en maïs ensilage et réservée exclusivement aux vaches en hiver, tous les veaux mâles sont conservés pour la production de boeufs. La diminution du cheptel liée à l’arrêt de la production de bœufs libère des surfaces en herbe qui devront être utilisées pour l’alimentation des vaches laitières. N Les réseaux d’élevage vous parlent de la PAC… L’équilibre fourrager passe obligatoirement par une remise en cause du système en place et inévitablement de la surface en maïs ensilage. Les vaches sont nourries en hiver à l’ensilage d’herbe avec une forte proportion de céréales d’autoconsommation dans la complémentation (environ 90%). En raison de la baisse de productivité laitière (1000 L lait par an) il faudra plus de vaches pour réaliser le quota. L’allaitement des veaux au lait en poudre permet de limiter l’augmentation du troupeau laitier. L’incidence négative sur les taux induira une baisse du prix de vente du lait de 6€/1000 L. La réforme de la PAC permet d’envisager la spécialisation et l’extensification de certains systèmes herbagers en produisant du lait à l’herbe Un résultat économique affecté de seul ement 400€ , soit de 1 à 2% d’EBE. La surface initiale en maïs ensilage est convertie en cultures de vente sans incidence sur le niveau de primes perçues. Les veaux mâles sont vendus à huit jours. Avec le découplage total des aides à l'engraissement, la perte se limite aux 40% de la prime à l’abattage du lot de bœufs, soit 32€ par tête. Alors que dans le contexte PAC d’avant 2006 avec des aides liées à la production, ce type d’exploitation aurait perdu toutes les primes à l’engraissement des mâles castrés, soit 10143€ (environ 540€par tête). SAU (ha) Prairies nat.(ha) Maïs ensilage (ha) Culture de v ente (ha) Jachères QUOTA (L) Vaches Laitières Bœuf s élev és Chargement technique (UGB /ha SFP) Valorisation de l’herbe (TMS /ha herbe) 2008 sans adaptation 98 74 2008 après adaptation 98 74 11 0 10.6 21.6 2.4 2.4 304500 48 à 6800 L éco. 304500 52 à 5800 L éco 23 0 1.36 1.24 6.2 6.2 Produit Brut Exploitation 147 000 € 139 500 € Charges Opérationnelles 43 300 € 36900 € Excédent Brut Exploitation 59 500 € 59 100 € Incidence / EBE N -400 € -1% Les réseaux d’élevage vous parlent de la PAC… Dans les cas où la désintensification permet de descendre le chargement animal en dessous de 1.8 UGB / Ha de SFP Herbe, cette adaptation peut éventuellement présenter un intérêt économique supplémentaire par l’obtention d’aides du 2ème pilier de la PAC, du type « contrat agriculture durable » (CAD). En conclusion … Cette adaptation peut présenter un atout pour ces exploitations laitières qui sont souvent saturées en main d’œuvre : - Elle permet de simplifier le système avec un seul troupeau à conduire et de réduire le temps de travail d’astreinte sur l’hiver avec moins de veaux à sevrer et moins de rations à distribuer. - Avec moins de cheptel à hiverner, c’est moins de paille à récolter et stocker, c’est aussi moins d’effluents à stocker et à épandre. Mais elle présente des limites à sa mise en oeuvre : - Dans les systèmes intensifs, cette orientation sera d’autant plus difficile à mettre en place que la densité de quota par hectare de surface fourragère est importante et / ou que le potentiel laitier des vaches est élevé. - Techniquement, cette adaptation passe par une augmentation du nombre de vaches et sera donc liée à la capacité en places dans le bâtiment et du statut de l’exploitation vis-à-vis des mises aux normes. La place libérée dans le bâtiment par les bœufs n’est pas toujours convertible pour loger des vaches supplémentaires. - La faisabilité du projet est liée au parcellaire, notamment à la surface accessible au pâturage des vaches traites, mais également liée aux contraintes physiques en matière de surfaces fauchables ou de pâture obligatoire. - M ême ces conditions réunies, l’extensification de la production exigera de l’éleveur un ajustement du système fourrager qui doit être accompagné d’une bonne maîtrise en termes de gestion de pâturage, de qualité des fourrages récoltés et de suivi de l’alimentation des vaches en hiver. L’équipe des réseaux d’él evage Pour le département de la Haute-Marne - Daniel COUEFFE « Ce thèm e sera abordé à l’occasion des portes ouvertes de novembre. Rendez-vous dans un prochain numéro où nous traiterons du suj et suivant : La transform ation fromagère permet-elle de s’adapter à la réforme ?» N