Les principes de territorialité de l`ISF
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Les principes de territorialité de l`ISF
Synthèse // Réflexion // Une entreprise/un homme // Références droit fiscal Les principes de territorialité de l’ISF Par Patrick VIAULT, avocat spécialiste en droit fiscal, docteur en droit Conformément aux dispositions de l’article 885 A du CGI, sont soumises à l’ISF les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France à raison de l’ensemble de leurs biens, ainsi que les personnes physiques n’ayant pas leur domicile en France à raison de leurs biens situés en France. Ainsi, la portée de l’obligation fiscale des contribuables soumis à l’ISF diffère selon qu’ils ont ou non leur domicile fiscal en France. Toutefois, un dispositif dérogatoire a été institué au profit des impatriés. Par ailleurs, il convient également de prendre en considération l’incidence des conventions internationales sur les dispositions internes. Contribuables domiciliés en France Les personnes physiques qui ont leur domicile fiscal en France ont une obligation fiscale illimitée. Elles sont imposables en France sur l’ensemble de leur patrimoine mondial, c’est-à-dire sur les biens meubles ou immeubles situés en France ou à l’étranger et possédés au 1er janvier de l’année d’imposition. Pour l’application de l’ISF, le domicile fiscal est défini, comme en matière d’impôt sur le revenu, par l’article 4 B du CGI et par les conventions internationales. La France s’entend de la France continentale, de la Corse, et des départements d’outre-mer 1. Elle ne comprend pas les territoires et collectivités d’outre-mer. En l’absence de convention internationale, le contribuable domicilié en France s’expose à une double imposition portant sur les biens situés à l’étranger. Dans cette situation, le droit interne a prévu la neutralisation de cette double imposition en permettant au redevable de l’ISF d’imputer les impôts sur la fortune acquittés à raison des biens situés hors de France sur l’impôt français dû sur ces mêmes biens. Il convient de préciser que l’imputation concerne uniquement les impôts étrangers de même nature que l’ISF et dans la limite d’un montant d’ISF dû en France au titre des biens situés hors de France 2. Incitation au transfert de domicile en France La loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 a modifié l’article 885 A du CGI en instituant une incitation temporaire en faveur des personnes physiques qui transfèrent leur domicile fiscal en France. Ainsi, sous certaines conditions, ces personnes ne sont imposables que sur leurs biens situés en France au titre de chacune des années où le contribuable conserve terme, des bons et titres de même nature, des obligations, actions et droits sociaux. Incidence des conventions internationales Les personnes physiques qui ont leur domicile fiscal à l’étranger sont soumises à l’ISF uniquement sur leurs biens français. Les biens français correspondent notamment à ceux qui ont une assiette matérielle en France métropolitaine ou dans les départements d’outre-mer, et aux biens incorporels français, c’est-à-dire aux créances détenues sur un débiteur français, aux valeurs mobilières émises par l’Etat français, une personne morale de droit public français ou une société ayant en France son siège, ainsi qu’aux brevets d’invention et marques de fabrique concédés ou exploités en France. Toutefois, l’article 885 L du CGI prévoit une importante exception afin d’inciter les non-résidents à détenir des placements financiers en France. Ainsi, sont exonérés d’ISF les placements effectués en France par les non-résidents et dont les produits relèvent de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Il s’agit essentiellement des dépôts à vue ou à Les conventions internationales permettent, comme en matière d’impôt sur le revenu, de résoudre les difficultés liées à la détermination de la résidence fiscale. Par ailleurs, elles apportent également des dérogations aux dispositions internes dans la mesure où elles visent expressément l’ISF ou lorsqu’elles contiennent des dispositions suffisamment précises relatives à l’imposition de la fortune. Ainsi, pour certains biens, celles-ci prévoient que le droit d’imposer est partagé entre les deux Etats, alors que pour d’autres, il est attribué exclusivement soit à l’Etat de résidence du propriétaire, soit à l’Etat où les biens sont situés. En cas de partage du droit d’imposer, la convention internationale indique le mécanisme retenu afin d’éliminer la double imposition. Concernant les biens immobiliers, l’imposition est en principe partagée entre l’Etat du lieu de situation de l’immeuble et celui du lieu de résidence du propriétaire. Toutefois, le droit d’imposer est parfois attribué exclusivement à l’Etat du lieu de situation de l’immeuble. Pour les autres biens, l’imposition est réservée à l’Etat de résidence du contribuable, sous réserve de quelques dérogations. Lorsque l’imposition des biens est réservée à l’Etat de situation du bien, certaines conventions prévoient l’application de la règle du taux effectif : il est ainsi tenu compte des biens imposés à l’étranger pour déterminer le taux d’imposition de l’ISF applicable sur les biens imposables au lieu du domicile et ainsi préserver la progressivité de l’ISF. Toutefois, lorsque les biens sont imposés à la fois dans l’Etat où ils sont situés et dans l’Etat de la résidence du propriétaire, la double imposition est évitée par l’octroi d’un crédit d’impôt par l’Etat de la résidence. Ce crédit d’impôt est, en principe, égal à l’impôt sur la fortune payé à l’étranger, mais il est limité au montant de l’impôt français qui serait dû sur ces biens situés hors de France. 1. Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion. Pour en savoir plus son domicile en France et jusqu’au 31 décembre de la 5e année suivant celle de l’établissement du domicile en France. Ainsi, les impatriés sont temporairement assimilés à des non-résidents. Ce dispositif est toutefois réservé aux personnes qui transfèrent leur domicile en France après avoir été fiscalement domiciliées à l’étranger pendant les 5 années civiles précédant ce transfert, cette condition étant appréciée au regard des critères du domicile fixés à l’article 4 B du CGI ou par la convention fiscale applicable. Contribuables domiciliés hors de France 2. L’excédent d’impôt acquitté à l’étranger n’est pas restituable. Frédéric Douet, Précis de droit fiscal de la famille, 9e édition, collection Litec Fiscal. Revue Française de Comptabilité // N°437 Novembre 2010 // 7