Un toit – pour tous les cas
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Un toit – pour tous les cas
accent l Logement l Un toit – pour tous les cas Des conditions de logement sûres sont un élément essentiel de l’intégration sociale. C’est la tâche d’un service social de soutenir les bénéficiaires de l’aide sociale si nécessaire dans la recherche et la sauvegarde d’un logement. Aperçus de la pratique de la Ville de Bienne. Avec 50’000 habitants, Bienne est la plus grande ville bilingue de Suisse. Une des particularités de la ville avec ses 27’955 immeubles d’habitation réside dans la proportion élevée d’appartements locatifs, dans la proportion au-dessus de la moyenne d’appartements de 1 à 3 pièces ainsi que dans la faible proportion d’appartements de 5 pièces et plus. Après la pénurie du logement de la fin des années 80 et du début des années 90, le nombre d’appartements disponibles est à nouveau suffisant depuis un certain temps. Ceci s’explique en partie par la perte démographique à la suite du chômage élevé dont la ville a souffert pendant longtemps. Avec 2,4%, le taux de vacances est plus de deux fois plus élevé que la moyenne suisse. Vaste offre, grand potentiel d’assainissement A Bienne, les appartements sont relativement avantageux, mais leur standard d’aménagement est plutôt modeste et ne répond pas aux exigences actuelles en matière d’isolation sonore et thermique, ce qui engendre des charges élevées. L’état souvent vétuste et mal entretenu Vétuste et en mauvais état: l’espace d’habitation à Bienne. ZeSo 4/2009 de l’habitat à Bienne est confirmé par l’étude réalisée par Michael Arend à la demande des Offices fédéraux de la migration et du logement et publiée en janvier 2008 sous le titre «Integration und Quartierentwicklung in mittelgrossen und kleineren Städten der Schweiz». Ce segment du marché du logement nécessitant des assainissements comprend, en dehors des nombreux immeubles d’habitation le long des grands axes de circulation avec une forte concentration de bénéficiaires de l’aide sociale et de personnes socialement défavorisées, également les coopératives d’habitation nées dans les années d’après-guerre. Au cours de ces dernières années, de nombreux nouveaux immeubles d’habitation ont été construits, notamment des appartements en PPE et des appartements locatifs haut de gamme. Par rapport à d’autres villes, ces appartements sont eux aussi relativement avantageux. Soutien aux cas difficiles Compte tenu de l’offre quantitativement suffisante d’appartements, la recherche d’un logement ne pose pas i Logement i accent de problème particulier à la plupart des clientes et clients. Ceux-ci trouvent des appartements à des loyers qui correspondent aux normes en vigueur à Bienne et, avec de légers écarts, dans l’ensemble de la région. La plupart du temps, un soutien n’est nécessaire que lorsque la « compétence habitative » est limitée ou que la situation individuelle est particulièrement difficile. C’est souvent le cas par exemple pour les familles nombreuses du fait de l’offre insuffisante de grands appartements. Ce sont également les personnes avec une origine migratoire, notamment africaine, et les personnes qui font l’objet d’une poursuite ou qui ont des problèmes liés à des relations de location antérieures qui ont besoin d’être soutenues. Du fait qu’à Bienne, un certain nombre de bailleurs n’arrive à louer leur mauvais espace d’habitation plus qu’aux couches inférieures, à des personnes d’origine étrangère ou ayant des problèmes particuliers, même ces personnes-ci trouvent en général un appartement, m^me si c’est au prix d’un loyer trop élevé par rapport à la qualité. Offres spéciales pour personnes socialement plus faibles Le département des affaires sociales dépense environ 1,8 millions de francs par an pour les loyers de quelque 2’000 appartements. Des loyers non payés ainsi que le travail administratif et les frais qui y sont liés ont amené le service, malgré des hésitations méthodologiques, à verser les loyers directement au bailleur dans 80% des cas. L’ensemble des bénéficiaires de l’aide sociale est assuré pour responsabilité civile auprès de la même compagnie, ce qui facilite la gestion des sinistres. A quelques rares exceptions près, le service social ne se charge pas de dépôts de loyers. La collaboration avec les régies immobilières fonctionne en général bien. Des problèmes surviennent notamment lorsque des rapports locatifs se terminent sur des frais non couverts et que les bailleurs imaginent que le service social est responsable de « ses » locataires et prend les dommages non couverts en charge. Certaines régies immobilières ne louent cependant par principe pas d’appartements aux bénéficiaires de l’aide sociale, alors que d’autres les exploitent de manière éhontée en fixant des loyers qui correspondent au franc près aux montants maximaux. En dehors du marché ordinaire du logement, le département des affaires sociales peut faire appel aux offres des institutions les plus diverses qui proposent des solutions pour des groupes cibles ayant des problèmes Site typique pour les personnes socialement défavorisées: grands axes de circulation. de logement particuliers. Après la dissolution du service > Photos: Rudolf Steiner 4/2009 ZeSo accent i Logement i > municipal du logement en 2005, la Ville de Bienne a délégué la tâche d’assurer logement aux habitants socialement plus faibles à des tiers avec lesquels la collaboration est réglée par des contrats de prestation et qui, selon le mandat, sont subventionnés par le Canton de Berne ou la Ville de Bienne. Il s’agit de l’Armée du salut, du Sleep-in, de la Maison d’accueil des femmes et de la Fondation Femmes & enfants qui empêchent le manque de logements. Pour les personnes à capacité d’habitation limitée en raison de problèmes de santé, on fait appel à des institutions telles que la Fondation Foyer Schöni qui dispose de deux immeubles d’habitation avec possibilité d’occupation. Gestion immobilière a caractère social Le soutien pour assurer un logis et un appartement aux personnes socialement défavorisées et marginalisées se fait par l’Association Casanostra fondée en 1991. Celleci s’entend comme régie immobilière avec un travail social professionnel qui propose des appartements de sa propriété ou loués sur le marché privé à des personnes qui, tout en ayant une « compétence habitative », ont besoin d’un accompagnement. Au cours de ces dernières années, le besoin des services de Casanostra a augmenté sans cesse, rien qu’en 2008 de 40%. L’une des causes majeures de cette évolution réside dans les modifications intervenues en psychiatrie et dans la lutte contre la toxicomanie : le déplacement des traitements stationnaires vers les traitements ambulatoires fait que les personnes concernées ne disposent souvent pas de la structure et de l’accompagnement absolument indispensables dans le domaine du logement. En 2008, 155 parties locataires ont habité dans les 101 unités de logement de Casanostra. Ce qui est préoccupant, c’est qu’au moment de leur accueil, 60% des personnes sont déjà sans logis ou ont trouvé un refuge temporaire chez des proches, des connaissances, dans des foyers ou des abris d’urgence. En plus de l’habitation assistée, l’association propose depuis peu le service « wohnfit », une habitation assistée préventive dans des logis n’appartenant pas à Casanostra. Le but de ce service est de sauvegarder le logis pour des personnes disposant de compétences habitatives insuffisantes. «Habiter à Bienne, c’est jouir d’une qualité de vie sur le mode bilingue», écrit la Ville sur son site web. Afin que la ville puisse répondre à ce slogan, la question de la mise à disposition d’un espace d’habitation a été intégrée dans la politique du Conseil municipal pour les années 2009 à 2013. Une stratégie sur la base d’une analyse des besoins ainsi que des offres existantes doit assurer que les personnes socialement plus faibles trouvent également à l’avenir un espace d’habitation et de vie approprié à Bienne. Beatrice Reusser Responsable du département des affaires sociales de la Ville de Bienne BieNNE EN CHIFFRES Cet appartement est réservé à une personne socialement défavorisée : l’Association Casanostra offre non seulement de l’espace, mais également une habitation assistée. ZeSo 4/2009 • Langue: 60,7 % des Biennoises et Biennois sont germanophones, 39,3% francophones; 36,9% sont monolingues, 32,9% bilingues et 20,3% tri- ou plurilingues. •Etrangers: En 2008, la proportion des étrangers était de 27,8% et donc légèrement inférieure à la moyenne des dix villes les plus grandes de Suisse. •Infrastructure: La ville dispose de 13 structures d’accueil de jour pour enfants, de 10 groupes de jeu, de 50 jardins d’enfants, de 14 écoles primaires et de 6 écoles secondaires, de 4 collèges, de 6 écoles de formation professionnelle, de 6 écoles de sport et de culture, d’une école de musique et de 4 Hautes écoles. •Marché du logement: 26’167 immeubles collectifs et 1’888 maisons individuelles, ou 77,2% d’appartements locatifs, 16,4% d’appartements en PPE et 18,6% de maisons individuelles: selon le recensement des logements de l’Office fédéral de la statistique (OFS) de 2006. • Service social : Bienne compte quelque 5’000 bénéficiaires de l’aide sociale ou 3’300 cas de soutien dont 57% vivent dans des ménages d’une seule personne. interview l Ueli Tecklenburg, Secrétaire général sortant de la CSIAS l «J’ai toujours fait des efforts pour l’intégration» Au fond, son cœur bat pour la gauche, mais dans sa fonction de Secrétaire général de la CSIAS, Ueli Tecklenburg a cherché l’équilibre. A la fin de l’année, il prendra sa retraite heureux de ne plus jamais devoir faire de budget. Monsieur Tecklenburg, comment vous sentirezvous le 1er janvier 2010? Je pense que j’aurai des sentiments mitigés : d’une part, je prendrai conscience que c’est le début de mes vacances éternelles et d’une grande liberté. D’autre part, il y aura sans doute un peu de tristesse, puisque le quotidien au travail avec toutes ses activités et les contacts avec les collègues appartiendra définitivement au passé. Vous avez dirigé le Secrétariat central de la CSIAS depuis 2003. Avez-vous connu un temps particulièrement fort? Pour moi, le temps le plus fort était la révision des normes CSIAS. C’était un immense travail avec des discussions animées, parfois chargées d’émotions. Malgré des critiques justifiées, nous avons réussi à venir à bout de cette révision et à trouver un compromis bien helvétique. L’engagement en a valu la peine, puisque le résultat est important pour la politique sociale. compétition à la baisse, c’est à dire que certains cantons et villes auraient commencé à réduire les prestations et les autres les auraient suivis. Pour les bénéficiaires de l’aide sociale, cela aurait été une catastrophe. Vous est-il déjà arrivé d’avoir des nuits d’insomnie ? Oui – c’est justement dans le contexte de la révision des normes que les positions parfois fortement polarisantes au sein de l’association se sont manifestées. Réunir les différentes opinions et positions me tenait toujours énormément à cœur. Ensuite, il y avait des projets de recherche qui devaient être réalisés dans des conditions difficiles. Cela aussi m’a parfois privé de sommeil. Et puis ce cher argent: avant l’augmentation des cotisations des membres, nous devions toujours compter avec un déficit. Je me suis souvent demandé comment on pouvait gérer la „boutique“ si on était obligé de retourner trois fois chaque centime avant de le dépenser. Cela ne laisse plus de marge pour des innovations. Pourquoi ? Avant la révision, les normes CSIAS ont fait l’objet de vives attaques. Certains cantons et villes ont menacé de ne plus les appliquer ou de quitter la CSIAS. S‘ils l’avaient fait, la CSIAS aurait perdu sa crédibilité et il n’y aurait aujourd’hui plus un ensemble de règles porté par la majorité des cantons. Je pense que cela aurait provoqué une Ueli tecklenburg Ueli Tecklenburg, qui dirige le Secrétariat central de la CSIAS à Berne depuis six ans et demi, prendra sa retraite fin 2009. Il a fait des études de sociologie et d’histoire à Zurich et – après un séjour auprès d’une université chilienne – il a assumé différentes fonctions dans le domaine social en Suisse romande. Entre autres, il a travaillé auprès du service social de la Ville de Genève et ensuite, pendant 12 ans, au département des affaires sociales du Canton de Vaud. Ueli Tecklenburg a 63 ans, il est marié et père d’un fils adulte. 16 ZeSo 4/2009 Vous travaillez comme sociologue dans le domaine social depuis plus de 35 ans. Qu’est-ce qui a déterminé cet engagement ? Ces derniers temps, j’ai souvent repassé en revu mon parcours professionnel et privé et j’ai constaté que cet engagement social et politique traverse ma vie comme un fil rouge. Je suis un pur produit de 1968! Un vrai soixante-huitard? Oui, j’ai été un de ceux-là! C’est-à-dire? En 1968, j’ai participé au Globuskrawall de Zurich et ensuite, je me suis engagé au sein d’un groupe politique. A l’Uni, qui était en pleine ébullition, j’ai fait partie des étudiants progressistes et j’ai été le cofondateur d’un groupe syndical. Mais il semble que je me suis fait remarquer déjà auparavant... Au collège déjà, mon prof d’histoire – qui était d’ailleurs le père du Président de la CSIAS Walter Schmid – m’a traité de «pré-soixantehuitard“! l Ueli Tecklenburg, Secrétaire général sortant de la CSIAS l interview «Suis-je plutôt un Suisse alémanique ou plutôt un Romand?» Certains soixante-huitards changent de camp au cours de leur vie. Manifestement, ce n’est pas votre cas. J’ai une idée assez précise d’une société équitable qui donne leur place également aux plus faibles et ne connaît pas de différences sociales énormes. Mais le fait est que beaucoup de gens vivent dans l’abondance et la surabondance. Ils ont de l’argent et ainsi également du pouvoir. Ceux qui ont des moyens matériels plus modestes ont moins, voire pas de possibilités de faire respecter leurs intérêts. En 1968, nous nous sommes engagés pour une meilleure position sociale de ces gens-là. Bien sûr, nos idéaux étaient utopiques dans un sens, et au fil des années, j’au du mettre de l’eau dans mon vin... Mais dans les principes, je suis resté fidèle à moi-même. Photos: Béatrice Devènes j’ai donc appris qu’il y a des situations difficiles. Vous avez grandi dans la ville de Zurich et puis, très jeune déjà, vous êtes parti en Suisse romande – pour suivre votre cœur. C’est là que vous avez passé plus de la moitié de votre vie adulte. Etes vous davantage Romand ou Suisse allemand? Je n’aime pas cette question. Cela m’indiffère d’être perçu comme Suisse allemand ou Romand. En Suisse romande, on me dit que je suis un Romand, les Alémaniques me considèrent comme un des leurs. Au fond, j’en suis fier. J’ai toujours fait de grands efforts – également à l’étranger – pour m’intégrer dans le contexte culturel et linguistique et m’adapter à l’environnement social et politique. Vous est-il aussi arrivé d’être du mauvais côté de la vie? Cela sonne un peu cérébral. Votre cœur, il bat où ou pour qui ? J’ai grandi avec mes trois frères dans des conditions que je qualifierais de précaires. Je n’irais pas jusqu’à dire que nous étions pauvres, mais nous n’avions que très peu d’argent. Nous n’avions jamais de voiture, pas le téléphone à la maison et quant à la télévision, il ne fallait même pas y penser. Les vacances à l’étranger étaient également hors de question. Quand en été, nous allions en Suisse centrale, nous dormions dans le foin. En plus, ma mère devait soutenir sa mère à elle, c’est pourquoi elle allait travailler – derrière le dos de mon père. Si elle ne l’avait pas fait, nous ne nous en serions pas sortis. Enfant déjà, On dit que la langue dans laquelle on rêve est déterminante. Alors: je rêve et je compte en allemand! Vous vous intéressez depuis de nombreuses années à la politique des différents cantons et vous connaissez parfaitement les différentes orientations. Si vous deviez demander de l’aide sociale, dans quel canton aimeriez vous vivre? Oh là là... il faut que je réfléchisse. – Je crois que les conditions que je connais le mieux sont celles dans le canton de Vaud. Ce qui m’y plait, ce sont les efforts de > 4/2009 ZeSo 17 interview i Ueli Tecklenburg, Secrétaire général sortant de la CSIAS i > professionnalisation et de régionalisation de l’aide sociale qui ont commencé dès les années 1990. Pour un bénéficiaire de l’aide sociale, il est sans doute plus agréable de s’adresser à un service professionnalisé que de demander au secrétaire communal s’il a droit à l’aide sociale. Pendant votre mandat de Secrétaire générale de la CSIAS, le climat de politique sociale en Suisse a changé. Quelles sont les évolutions que vous avez observées? Je constate très nettement une polarisation. Tout particulièrement dans la politique sociale, les discussions sont devenues plus âpres. Les positions sont figées et on a tendance à exagérer. La discussion sur les abus en est un bon exemple. Le débat politique se focalise sur un aspect partiel et oublie le problème central, c’est-à-dire qu’il y a effectivement des hommes et des femmes pauvres dans notre pays. De manière générale, j’ai l’impression que l’échiquier politique s’est déplacé vers la droite. Les contenus idéologiques sont fortement axés sur la compétition et donc sur le principe de «la raison du plus fort ». Quelles ont été les répercussions de ces changements sur votre activité? C’est également au sein de la CSIAS que les positions polarisées ont augmenté. La CSIAS est un reflet de l’ensemble de l’échiquier politique. Y a-t-il des évolutions politiques qui vous font peur? Si la pression à l’encontre des œuvres sociales continue à augmenter et s’il devient plus difficile d’y accéder, je me demande ce qui se passera des personnes concernées. J’ai l’impression que les gens responsables de cette évolution ne se posent pas ce genre de questions et que le sort de ces personnes leur est indifférent. C’est effrayant. On part de l’idée que l’aide social s’en occupe d’une manière ou d’une autre. En même temps, l’aide sociale est attaquée pour ses dépenses trop élevées. L’exclusion de l’AI des personnes souffrant de problèmes psychiques par exemple permet peut-être de résoudre tant bien que mal un problème technique d’assurance, mais les personnes concernées n’ont toujours pas d’emploi ni de revenu provenant d’une activité lucrative. «J’ai grandi avec mes trois frères dans des contions que je qualifierais de précaires.» Avez-vous une vision de politique sociale pour la Suisse? A long terme, il faut une solution de droit fédéral en matière de couverture du minimum vital et d’intégration. Ce n’est que par cette voie que l’égalité de droit et la sécurité de droit peuvent être réglées de manière uniforme. Aujourd’hui, un tel système global devrait être une tâche de l’ensemble de la politique sociale. Personnellement, je crois de moins en moins aux mesures coercitives : l’intégration doit se faire sur une base plus ou moins volontaire. Qu’est-ce qui vous rend si sûr? 18 ZeSo 4/2009 i Ueli Tecklenburg, Secrétaire général sortant de la CSIAS i interview C’est déjà à l’époque où j’étais actif dans la politique sociale dans le canton de Vaud que j’ai constaté qu’il faut un rapport équilibré entre les droits et les devoirs. On attend des personnes concernées qu’elles remplissent leurs obligations – mais c’est aussi la collectivité publique qui a des obligations, et ceci pas uniquement en termes matériels : elle doit fournir une aide effective à l’intégration, une aide motivante et qui fonctionne. Si les gens ne sont pas motivés, la contrainte n’apporte rien. On peut imaginer qu’Ueli Tecklenburg, même retraité, continuera à participer activement à la vie politique. Aujourd’hui, on parle souvent des jeunes vieux et des seniors bon pied bon œil. Pouvez-vous vous identifier à une telle image ? Pour l’instant, pas encore ! Mais je sais ce que j’entends par là. Aujourd’hui, la situation matérielle des retraités est nettement meilleure qu’il y a 50 ans. On peut donc prendre sa retraite sans se faire trop de soucis. Et aussi sur le plan physique, de nombreuses personnes de 65 ans sont toujours en forme. Au troisième âge, on a le privilège de ne devoir faire plus que ce dont on a réellement envie! Que faut-il entendre par là? Je vais m’adonner à mon hobby, la photographie. L’année prochaine, une exposition de mes travaux est prévue à Berne. Les voyages sont également au programme, il se peut que je fasse même un voyage autour du monde. Et je pourrais imaginer suivre certains cours à l’université populaire ou du troisième âge – notamment dans le domaine de l’histoire sociale. Il y a certainement des activités qui ne manqueront pas le moins du monde au Secrétaire général retraité de la CSIAS que vous serez. Citez-en une... … Faire le budget! Ça, ça vient du fond des tripes! Je ne vous le fais pas dire ! Où en sera la CSIAS dans dix ans? Si dans dix ans, nous avons effectivement une loi fédérale cadre sur la couverture du minimum vital et l’intégration, la fonction de la CSIAS devrait en principe être reprise par un office fédéral. Ce n’est pas que je souhaite la mort à la CSIAS, mais cette évolution est indiquée – même si elle est malheureusement improbable. C’est pourquoi il y a de fortes chances pour que la CSIAS existe toujours dans dix ans. Je lui souhaite que – malgré les tendances polarisantes – qu’elle sache préserver sa cohésion. Car ce n’est que de cette manière qu’elle pourra se faire entendre et poursuivre finalement son objectif principal: soutenir les femmes et les hommes pauvres en Suisse. Propos recueillis par Monika Bachmann Walter Schmid Président de la CSIAS MERCI, Ueli Tecklenburg! C’est une chance qu’Ueli Tecklenburg se soit porté candidat pour le poste de secrétaire général de la CSIAS il y a un peu plus de six ans. D’autant plus que nous n’osions pas vraiment compter avec lui: Ueli Tecklenburg vivait à Genève, le secrétariat central de la CSIAS se trouve à Berne. Son environnement professionnel était la Suisse romande, la CSIAS travaille majoritairement en allemand. Le Comité directeur n’a pas hésité à se décider pour lui – et il ne l’a jamais regretté. Ueli Tecklenburg a repris le secrétariat en 2003 après une crise au sein de l’association. En peu de temps, il a créé un climat de confiance et réussi à faire du secrétariat central de la CSIAS une équipe qui, au cours de ces dernières années, a fourni un travail excellent. Grâce à ses relations professionnelles, il a rapidement su nouer de multiples liens avec des partenaires de la CSIAS et se faire accepter pleinement par les autorités. D’emblée, Ueli Tecklenburg a été mis à rude épreuve: les normes CSIAS devaient être soumises à une révision en profondeur. Et ceci à une époque marquée par des controverses publiques autour de l’aide sociale. Un défi énorme pour le Comité directeur, les commissions RIP/RETE et le secrétariat central. Et nous avons réussi, en peu de temps et étonnamment bien, à venir à bout de cet ouvrage de réforme et à renforcer le mandat d’intégration de l’aide sociale en introduisant des éléments axés sur la prestation. Au cœur de cette entreprise titanesque s’est tenu Ueli Tecklenburg. Comment a-il fait? Son secret, ce sont les qualités et les capacités que nous avons appris à tant apprécier au cours de ces dernières années : Ueli Tecklenburg a un grand talent analytique et un jugement très sûr. Pour la CSIAS, il a été une sorte de système d’alerte précoce; il a souvent prévu ce que l’avenir proche nous réservait. Ueli Tecklenburg s’est distingué également par son énorme capacité de travail. Jamais pour ainsi dire il ne s’est plaint de la charge de travail, parfois peut-être presque trop peu. Homme d’équipe d’un fair-play remarquable, il n’a jamais mis son ego en avant. Il a toujours fait preuve de loyauté et d’une grande fiabilité. Pour Ueli Tecklenburg, la solidarité est le noyau d’une société digne d’être vécue. C’est pourquoi la participation à la construction d’une Suisse sociale était une de ses préoccupations centrales. Les attaques contre l’Etat social et tout particulièrement contre l’aide sociale ne l’ont pas laissé indifférent. Le préambule de la Constitution fédérale qui mentionne le bien-être des faibles comme critère de la force d’un peuple n’était pas lettre morte pour lui : au cours de ces dernières années, il s’est tout particulièrement engagé dans la lutte contre la pauvreté. Nous remercions Ueli Tecklenburg du fond du cœur et nous lui souhaitons joie et bonheur pour l’avenir. Du temps aussi pour son hobby, la photographie. Ceux qui ont vu ses œuvres y reconnaissent un Ueli Tecklenburg qui sait plonger dans un univers de couleurs, de formes et de structures, de poésie, de visions et d’émotions - un univers d’une esthétique parfait. 4/2009 ZeSo 19 csias l Pratique l La franchise est-elle accordée également en cas de maladie ou d’accident? Une personne qui exerce une activité lucrative et dont le revenu est complété par des prestations d’aide sociale ne reçoit la franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative que si elle travaille effectivement. Question Monsieur H avec sa famille de quatre personnes est soutenu par l’aide sociale en complément à son salaire. En raison de son activité lucrative, il touche une franchise sur le revenu provenant de celle-ci. Puis, Monsieur H subit un grave accident à la suite duquel il est en en incapacité de travail à 100%. Après une intervention chirurgicale, on constate qu’il devra encore passer par une phase de rééducation. Son salaire continue à lui être versé à 80% dans le cadre de l’assurance accidents obligatoire. Son cas soulève les questions suivantes: 1. Monsieur H continue-t-il à avoir droit à une franchise sur le revenu pendant la période de son incapacité de travail? 2. Si oui, ce droit existe-il indépendamment de la durée de l’incapacité de travail? 3. Si non, Monsieur H reçoit-il un supplément minimal d’intégration? 4. Quelles sont les critères déterminants pour l’octroi une franchise provenant d’une activité lucrative? Bases Les normes CSIAS ne fournissent pas de réponse concrète à ces questions. Mais dans la pratique, la position qui veut que la franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative soit tout d’abord mise en relation avec le volume de l’activité lucrative s’est imposée. C’est pourquoi la plupart des cantons fixent la franchise en fonction du degré d’activité. Si la personne bénéficiaire de l’aide sociale touche des indemnités journalières de l’assurance chômage, on n’octroie en général pas de franchise sur le revenu. Ainsi, dans le sens d’une égalité de traitement, il faut une prestation effective en travail pour que la franchise puisse être octroyée. Les revenus de substitution tels que les indemnités journalières de maladie ou d’accident ou les indemnités de maternité ne remplissent pas ces conditions. Par ailleurs, les normes prévoient le respect du principe de la proportionnalité (normes CSIAS A.4.2). En vertu de celui-ci, les personnes bénéficiaires de l’aide sociale ne doivent pas être privilégiées par rapport aux 20 ZeSo 4/2009 personnes vivant dans des conditions économiques modestes. Les revenus de substitution ne représentent souvent qu’un faible pourcentage du revenu provenant d’une activité lucrative. C’est pourquoi les personnes malades ou accidentées subissent une perte sensible de revenu. Ceci concerne également les chômeurs. En raison du principe de l’égalité de traitement, le non-octroi d’une franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative pendant la période où le revenu de substitution est versé est donc proportionnel et justifié. Si, pour des raisons objectives et subjectives, la personne bénéficiaire de l’aide sociale n’est pas en mesure de fournir la contre-prestation demandée – selon les normes CSIAS -, il s’agit d’octroyer un supplément minimal d’intégration. Réponse 1. Pendant la période de son incapacité de travail, Monsieur H perd son droit à une franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative. 2. La durée de l’incapacité de travail est sans importance. Il est toutefois recommandé de ne supprimer la franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative qu’à partir d’un mois après l’incapacité de travail afin de permettre que les absences brèves dues à la maladie soient comblées de manière appropriée. Des exceptions sont toutefois réservées et peuvent être raisonnables lorsqu’une rapide reprise de l’activité lucrative est prévisible. Dans ce contexte, il est recommandé d’indiquer dès l’octroi d’un supplément d’incitation les conditions de la suppression de celui-ci. 3. Dans les cas où une contre-prestation est impossible à fournir, les normes CSIAS recommandent l’octroi d’un supplément minimal d’intégration. 4. Une franchise sur le revenu provenant d’une activité lucrative n’est octroyée que si une prestation en travail est fournie. La capacité de travail est donc une condition indispensable. Daniela Moro Membre de Rete (Groupe de travail de la Commission normes de la CSIAS) csias i Exposition itinérante i «Si jamais»: L’aide sociale part en tournée L’exposition itinérante «Si jamais», lancée par la CSIAS, prend forme. Entre avril et octobre 2010, elle sera montrée dans différentes villes et communes. En 2010, l’aide sociale sera un sujet public en vedette dans une quinzaine de villes de Suisse allemande et de Suisse romande: l’exposition itinérante « Si jamais » offre à l’aide sociale une plate-forme lui permettant de présenter son travail, d’entrer en dialogue avec les habitantes et habitants des communes et de discuter sur la pauvreté et l’exclusion sociale dans la riche Suisse. La politique pourra également prendre la parole pendant l’exposition : dans le cadre de tables rondes et d’interventions, des questions actuelles de la politique sociale seront abordées et débattues. Ce projet a été réalisé en lien avec l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale 2010. La CSIAS a saisi cette occasion pour lancer avec l’exposition itinérante « Si jamais » une campagne d’information de grande envergure. Le plus grand défi dans la création de l’exposition consiste à présenter la vie de 234’000 bénéficiaires de l’aide sociale de manière exemplaire, aussi authentique que possible et nullement tapageuse. C’est pourquoi l’exposition est réalisée en équipe entre les professionnelles de la CSIAS et les créatifs expérimentés de la société Blattwerk ainsi qu’avec d’autres expertes et experts. Mais sans le soutien actif des responsables des lieux d’exposition et des spécialistes de l’aide sociale, la réalisation de ce vaste projet ne serait pas possible. Caroline Knupfer Responsable secteur Rechercher, CSIAS Les objets d’exposition «Si jamais» montre ce que c’est d’être pauvre dans la riche Suisse. Des hommes et femmes qui vivent de l’aide sociale parlent de leurs soucis, de leurs rêves et de leurs peines. Ci-dessous, nous allons présenter trois des 15 objets clés de l’exposition. Les images que les enfants ont de la pauvreté Comment les enfants perçoivent-ils la pauvreté ? Quelles sont les images dans leurs têtes ? Où voientils les causes et que faudrait-il faire à leur avis pour réduire la pauvreté ? Les réponses à ces questions sont données à titre exemplaire par une classe d’école primaire. Un sondage-test auprès d’une 6ème classe primaire dans une région rurale fournit un large éventail de réponses étonnamment nuancées. Ainsi, un élève écrit par exemple : « La pauvreté en Suisse, c’est quand on n’a pas assez à manger. Quand la famille ne peut pas payer l’école. Quand on porte de vieux habits ou toujours la même chose. » Une autre 22 ZeSo 4/2009 i Exposition itinérante i csias «SI JAMAIS»: DATES DE LA TOURNÉE 13.04.-30.04. Berne (Kornhausforum) 07.04.-11.04. St-Gall (OFFA) 13.04.-20.04. St-Gall 26.04.-03.05. Bâle (Theaterplatz) 08.06.-12.06. Coire 15.06.-19.06. Zoug (Bundesplatz) 27.08.-03.09. Frauenfeld 01.09.-14.09. Thoune élève qualifie de pauvre quelqu’un « qui n’a pas assez d’argent pour acheter de la nourriture. Qu’on harcèle, qu’on nargue et dont on se moque à l’école. Qui n’a pas d’amis et est toujours seul. » Avec cet objet, l’approche du thème de la pauvreté est aussi dépourvue que possible de tabous. Par les yeux des enfants, il donne de l’espace également aux propositions de solutions que les adultes rejetteraient comme utopiques. Portraits vidéo de bénéficiaires de l’aide sociale Des bornes grandeur nature avec des portraits de bénéficiaires d’aide sociale créent une rencontre virtuelle entre différents mondes. Working poor, familles monoparentales, chômeurs de longue durée d’un certain âge et jeunes adultes racontent en courtes séquences vidéo pourquoi ils doivent faire appel à l’aide sociale et ce que cela signifie pour eux d’avoir besoin d’être soutenus. Des questions et des réponses au sujet de la vie quotidienne des personnes concernées montrent les choses auxquelles elles doivent renoncer, leurs rêves d’avenir ou encore leurs loisirs. Grâce au soutien actif de certains services sociaux et d’organisations privées, nous avons pu trouver plusieurs personnes acceptant de se laisser filmer ou photographier par une équipe de professionnels et d’être interrogées par une collaboratrice de la CSIAS. La plupart des gens ne savent pas combien d’argent ils dépensent par mois pour les 06.09.-22.09. 22.09.-27.09. 24.09.-03.10. 04.10.-17.10. 19.10.-31.10. Winterthur Delémont Soleure Lausanne Morges Des négociations avec d’autres villes et communes sont en cours. besoins quotidiens en nourriture, vêtements, mobilité, loisirs et sorties. Ainsi, peu d’entre eux sont conscients des dépenses qu’un ménage soutenu par l’aide sociale peut s’offrir. Un jeu informatique donne aux visiteurs et visiteuses de l’exposition une idée de ce que c’est qu’une vie aux faibles ressources. Dans une promenade à travers sept mondes de consommation (son propre appartement, un centre commercial, un restaurant, un magasin de vêtements, l’univers des loisirs, la mobilité, un institut de beauté et de santé), on peut faire des achats avec le forfait pour l’entretien. Plus d’un visiteur et plus d’une visiteuse de l’exposition seront stupéfaits de se rendre compte à quelle vitesse les moyens à disposition s’envolent. Une journée au quotidien Des bénéficiaires engagés de l’aide sociale laissent documenter leur journée. Pendant une journée tout à fait ordinaire, ils prennent une photo toutes les heures. Ces images donnent un aperçu du quotidien de personnes qui vivent de l’aide sociale. Les visiteuses et visiteurs sont invités à réfléchir aux questions suivantes : « Qu’est-ce qui me manquerait dans les journées présentées et en quoi la journée présentée se distingue-t-elle de la mienne ? Ou lui ressemble-t-elle peut-être même? » Pour plus d’infos: www.im-fall.ch 4/2009 ZeSo 23 impuls l Les révisions de l’assurance invalidité l Sans égards pour les éventuelles victimes L’assurance invalidité reste un chantier. Après la votation sur le financement additionnel, la 6ème révision est déjà à l’ordre du jour. Il s’agit de faire retourner aussi les bénéficiaires d’une rente AI sur le marché du travail. Mais y arriveront-ils ? La votation populaire sur le financement additionnel de l’assurance invalidité a heureusement eu une issue favorable. 54,47% très exactement des votantes et votants l’ont approuvé. A première vue, cela semble être une petite majorité. Mais les amis étrangers nous rendent à juste titre attentifs au fait que dans leurs pays, il ne serait guère possible de gagner une majorité du peuple à la cause d’une augmentation d’impôts en faveur d’une assurance invalidité. Apparemment, le peuple suisse juge les projets de politique sociale à vue d’œil. Le projet était associé à la promesse politique d’augmenter non seulement les moyens financiers de l’AI, mais de ré-examiner également les prestations dans le cadre de la 6ème révision de la LAI. C’est pour cette raison qu’une proposition correspondante a été envoyée en consultation dès avant la votation. 24 ZeSo 4/2009 bien éloignée de la réalité. La progression fulgurante du chômage suite à la crise financière montre clairement que toutes les personnes ne trouvent pas de travail, et de loin. Et c’est d’autant plus difficile pour les personnes à performance réduite. C’est pourquoi les futures révisions de l’AI devront se mesurer à la capacité d’accueil du marché de l’emploi. Une évolution dynamique On peut porter à l’actif du Conseil fédéral et de l’Office fédéral compétent le dynamisme avec lequel ils se sont attaqués à l’évolution de l’AI au cours de ces dernières années. Dans les années 1990, l’AI a loupé des évolutions importantes ce qui a entraîné un fort endettement. Avec les 4ème et 5ème révisions de la LAI, on a essayé entre autres de réduire l’augmentation des nouvelles rentes. Entretemps, cet objectif a été atteint dans une large mesure. Il est toutefois intéressant de constater que cette évolution a commencé déjà avant l’entrée en vigueur de la 5ème révision de la LAI. Ceci indique clairement que par le passé, les problèmes se situaient en premier lieu au niveau de l’exécution. C’est le marché de l’emploi qui détermine les chances En principe, la direction prise par la 6ème révision de la LAI dont l’objectif est la vérification régulière des rentes octroyées est juste. Si elle permet à terme de réinsérer des personnes handicapées dans la vie active, elle doit être saluée. Par le passé, les bénéficiaires de rentes AI, même jeunes, ont trop souvent été livrés à eux-mêmes pour le reste de leur vie. De telles solutions sont non seulement coûteuses, mais aussi erronées du point de vue de la dignité humaine et de la politique sociale. Mais la question se pose : est-ce que les personnes actuellement bénéficiaires d’une rente AI peuvent-elles réellement être réinsérées dans le monde du travail ? Au paravant déjà, des décisions de rentes ont pu être révisées pérriodiquement. Ainsi, une centaine de rentes par an a été annulée. Mais dorénavant, les révisions devront être menées à large échelle dans le but de supprimer 12’000 rentes en l’espace de six ans et de réduire ainsi l’effectif des rentes de 5%. Cet objectif se base sur l’exigence qu’après l’augmentation de la TVA limitée à sept ans, l’AI fonctionne sans financement additionnel. Vision et réalité La 5ème révision de la LAI mise essentiellement sur le diagnostic précoce et l’intervention précoce. Ces mesures sont reconnues de toutes parts comme importantes et pertinentes. Elles sont liées à un engagement déclaré – mais seulement facultatif - des employeurs à réserver une place dans le monde du travail aux personnes à performance réduite. A ce jour, nous ne disposons pas encore d’expériences qui prouveraient que ces promesses ont été tenues. Dans le cadre d’une initiative, les employeurs, les employé-es et l’AI professent tout de même leur vision d’un monde du travail dans lequel personne ne resterait handicapé (www.job-iv.ch). Cette vision est toutefois L’exclusion à la place de l’inclusion Une telle perspective laisse dubitatif. En effet, le risque est là que pour atteindre les objectifs financiers, l’«inclusion par la sortie de la rente » se transforme rapidement en « exclusion de la rente». Ce n’est pas le Conseil fédéral, mais ce sont le marché de l’emploi et l’évolution conjoncturelle qui décideront du nombre de réinsertions par la sortie de la rente effectivement possibles dans les années à venir. Personne ne peut avancer un chiffre fiable, à moins de refuser tout simplement la rente aux personnes concernées. En cas d’échec de la tentative d’insertion, il est tout de même prévu de réactiver la rente pendant deux ans. C’est une disposition utile, bien qu’insuffisante, en vue de motiver i Les révisions de l’assurance invalidité i impuls les gens à tenter de travailler sans les priver tout de suite de la protection de l’assurance. L’aide sociale devient une bouée de sauvetage La situation est différente pour les quelques 4’500 personnes qui, par le passé, bénéficiaient d’une rente pour cause de douleurs somatoformes, de fibromyalgie ou d’autres troubles. Pour elles, la rente est réduite ou supprimée sans filet de sauvetage. Pour ces personnes, ce ne sont pas les perspectives d’insertion objectives, mais les conditions subjectives qui sont déterminantes. Il n’y pas de doute que bon nombre de ces personnes auront tôt ou tard besoin des prestations de l’aide sociale. Elles rejoindront alors le groupe croissant de celles qui, pour des raisons diverses, difficiles à prouver, ne sont plus en mesure de s’affirmer sur le marché du travail, mais qui sont exclues d’une rente. De cette manière, l’aide sociale verra affluer une clientèle qui restera durablement dépendante d’elle. Le bien-être social pour toutes et tous L’aide sociale perdra son caractère de soutien temporaire passager. Dès lors, ce qu’il faut - plutôt que la révision de certaines branches d’assurance – c’est une vision globale du système qui analyse de manière approfondie les risques liés à la perte de l’emploi ou à l’exclusion du monde du travail. Il reste à espérer que le Conseil fédéral axera la 6ème révision de la LAI sur la réalité et la faisabilité. Et il est à souhaiter que les expériences de la 5ème révision de la LAI soient intégrées dans les réflexions sur la 6ème – tout particulièrement au regard des potentiels d’insertion offerts par le marché du travail. C’est pourquoi il serait indiqué d’attendre encore un peu avant de mettre en route la 6ème révision de la LAI. Une proposition qui repose sur des fictions et qui insécurise des milliers de personnes doit être rejetée. Il n’est pas difficile d’assainir un système d’assurance si on procèede à une définition de la rente qui jette les personnes concernées en dehors du système. L’assainissement des assurances sociales est une vision trop étriquée. Il s’agit de l’assainissement du bienêtre social dans ce pays et celui-ci inclue tous les êtres humains. Walter Schmid Président de la CSIAS 4/2009 ZeSo 25