Les aliments, les habitudes alimentaires et l`expérience

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Les aliments, les habitudes alimentaires et l`expérience
Les aliments, les habitudes alimentaires et l’expérience de l’immigration
Document rédigé pour le Programme du multiculturalisme, minitère du Patrimoine canadien,
à l’occasion de la conférence de la Société canadienne d’études ethniques
Halifax, novembre 2001
Ne pas utiliser sans la permission des auteurs
Mustafa Koc et Jennifer Welsh1
Centre for Studies in Food Security
Ryerson University, Toronto, Canada
2002
Résumé
Les aliments sont plus que de simples substances nutritives : ils constituent une
composante clé de notre culture, de notre sentiment d’identité. Loin d’être un ensemble de traits
sociaux bien établis, l’identité évolue dans une société donnée en fonction des expériences
individuelles et de contraintes structurelles réelles ou imaginaires. Le présent document traite des
rapports dynamiques existant entre les aliments, l’identité sociale et l’expérience de
l’immigration. En tant que phase de transition spatioculturelle, le processus de l’immigration
génère des possibilités de changement, de même qu’une résistance à de nouvelles habitudes, à de
nouveaux comportements, à de nouvelles expériences culturelles. Ces changements influent sur
la santé physique et mentale, sur la perception de soi et sur les rapports avec les autres. Dans le
présent document, nous analysons ce phénomène de transition culturelle et son incidence sur
l’identité, à la lumière des études explorant les liens entre aliments et identité. Nous examinons
également les conséquences des contraintes sociales liées à la sécurité alimentaire sur un groupe
d’immigrants de Toronto, afin d’évaluer la dynamique complexe associée à la reconstruction de
l’identité. Nous en concluons que la sécurité alimentaire chez les immigrants est liée à la fois aux
politiques d’égalité et aux politiques de reconnaissance dont ils font l’objet.
Aliments, culture et identité
Nous devons manger pour survivre. Pourtant, les aliments sont plus qu’une simple source
d’énergie et de substances nutritives indispensables à notre santé et à notre bien-être. Nos
habitudes alimentaires reflètent la complexité de caractéristiques culturelles générales touchant
la nourriture, l’organisation unique de la production alimentaire et les politiques sociales en
vigueur.
Les aliments jouent un rôle déterminant dans la socialisation humaine, dans la prise de
conscience de soi et de son corps, dans l’acquisition du langage et dans le développement de la
personnalité. Selon Barthes (1975, p. 510), les substances nutritives, les techniques de
préparation, les habitudes alimentaires participent toutes d’un système de différences de
signification, et nous-mêmes communiquons par le canal de la nourriture. À mesure que nous
apprenons quoi manger et comment manger, nous assimilons la culture, les normes, les valeurs
qui sont les nôtres et, ce faisant, nous apprenons qui nous sommes. Au début du XIXe siècle,
Jean-Anthelme Brillat-Savarin a dit « Dis-moi ce que tu manges et je te dirais qui tu es. »
Beaucoup de chercheurs ont exploré les différences socio-économique et culturelles existant
dans les habitudes alimentaires, les tendances ethnocentriques qu’elles révèlent, l’incidence des
tabous alimentaires, et la culture de l’altérité par les aliments (Avakian, 1997; Bell et Valentine,
1997; Bordo, 1993; Caplan, 1997; Fieldhouse, 1996; Gabaccia, 1998; Lupton, 1996; Mennell et
coll., 1992; Warde, 1997). Ces chercheurs examinent l’incidence de divers facteurs personnels,
culturels, historiques, sociaux et économiques sur nos choix alimentaires. D’un point de vue
sociologique, le changement et la résistance au changement dans les habitudes alimentaires
reflètent des tendances relativement à l’acculturation, à l’assimilation, à l’adaptation, à la
distanciation sociale, à l’intégration et à l’évolution - en bien ou en mal - de la qualité de vie
(Capella, 1993).
Fluidité de l’identité culturelle
1
En tant que composante essentielle de notre culture, la nourriture joue un rôle
déterminant dans notre sentiment d’identité (Fischler, 1988). Dans leurs activités quotidiennes,
les gens développent une identité propre en définissant qui ils sont et quoi faire de leur vie. La
construction de cette identité ne repose pas uniquement sur la carrière choisie, mais elle dépend
également des conditions sociales et historiques. Ces conditions structurelles n’impliquent pas
pour autant que l’identité puisse être conçue indépendamment de l’expérience vécue. C’est
pourquoi nous devons appréhender la notion d’identité comme une dynamique, non comme une
réalité statique, par laquelle le sentiment d’appartenance est reconstruit en rapport à « l’autre »
au fil des expériences quotidiennes vécues. Selon Mouffe (1992, p. 10), toutes les identités sont
des formes d’identification nécessairement précaires et instables, ce qui élimine toute possibilité
d’en atteindre l’essence même.
L’identité doit être perçue comme étant fragmentée et ambivalente, définissant la relation
à « l’autre » (Hall, 1991, p.16). En tant que relation dialogique, elle se construit constamment par
la définition de la différence. Cette interprétation de la notion d’identité met en question
l’essentialisme ainsi que la séparation artificielle de l’appartenance objective et subjective à la
communauté. L’identité n’est pas une camisole de force, même si certaines de ses
caractéristiques sont imposées de l’extérieur. L’identité est liée à l’appartenance à diverses
communautés (classe, sexe, race, ethnie, nationalité, âge, etc.).
Comme l’affirme Scott, « [...] les identités sont conférées par l’histoire, [et] ce
phénomène est ambigu »; « les sujets sont le produit d’identifications multiples, dont certaines
prédominent politiquement pendant un temps, dans certains contextes, et [...] le projet de
l’histoire est, non pas de réifier l’identité, mais de comprendre en quoi elle est le résultat d’un
processus de différenciation, sans cesse renouvelé, mais aussi [...] exposé à la redéfinition, à la
résistance et au changement (1995, p.11). Par ce processus symbolique d’identification, les
acteurs sociaux définissent leur appartenance et celle des autres de façon dynamique et articulée.
L’identité culturelle s’exprime dans diverses coutumes comme la pratique religieuse, les
rites de passage, ainsi que dans la langue, les loisirs, l’habillement, l’art, la littérature et la
musique (Bramadat, 2001; Bhugra et coll., 1999). L’observation des pratiques et des préférences
culturelles, dont les habitudes alimentaires, sont révélatrices de tendances collectives et
individuelles sur les chapitres suivants :
L’adaptation - la mesure dans laquelle les individus ou les groupes sociaux s’habituent à de
nouveaux modes de conduite culturellement déterminés et adoptent volontiers dans leur vie
quotidienne des comportements différents.
La diversité - la mesure dans laquelle la société au sens large adopte de nouveaux modes de
conduite culturellement déterminés et de nouveaux comportements dans la vie quotidienne.
L’identification - la mesure dans laquelle les membres d’un groupe ethnique donné s’identifient
et sont identifiés en tant que tels, individuellement et collectivement, par certaines pratiques
culturelles d’ordre vestimentaire, musical, alimentaire ou religieuse.
La distanciation - la mesure dans laquelle les individus veulent interagir et établir des relations
avec les membres de groupes sociaux autres que le leur.
2
L’intégration - la capacité d’un individu ou d’un groupe social de tirer parti de toutes les
dimensions de la vie économique, sociale, culturelle et politique de la société, et d’y contribuer.
Identité et habitudes alimentaires des immigrants
Le comportement des immigrants est très révélateur de la nature fluide de l’identité, et
des limites culturelles de la résistance et du changement. En tant que phase de transition
spatioculturelle, l’expérience de l’immigration est également révélatrice de la complexité des
rapports entre groupe dominant et minorités, du changement et de la résistance au changement,
de l’expérience « ethnique », du racisme et de l’identité. Les études effectuées sur
l’enculturation, la conservation de l’identité et l’incorporation de l’identité nous donnent une
idée des multiples facettes de l’ethnicité qui résultent de l’expérience de l’immigration (Breton et
coll., 1990; Isajiw, 1999; Driedger, 1996; Modood et Werbner, 1997). La nature fluide de
l’identité des immigrants a même conduit certains à évoquer les identités hybrides, créolisées
nées de la complexité de l’expérience multiculturelle (Pieterse, 1995; Hannerz, 1987).
Pourtant, la thèse tout aussi essentialiste selon laquelle les cultures « authentiques »
existent indépendamment de leur contexte sociohistorique est digne de mention (Friedman,
1995). Les habitudes alimentaires des immigrants s’inscrivent dans un contexte global dans
lequel les choix alimentaires ne sont plus dictés par les caractéristiques socioculturelles du pays
d’accueil ou du pays d’origine (Bouchet, 1995; Cook et Crank, 1996)). La modernité et la
mondialisation ont une effet homogénéisateur en transformant non seulement les conditions de
production et de consommation, mais également bon nombre des signifiants culturels utilisés
pour différencier ou authentifier les groupes ethniques (Franke, 1987). Toutefois, l’adaptation à
ces influences homogénéisatrices se fait de façon sélective et fragmentée (Harbottle, 1996 et
1997). Les identités créolisées qui en résultent incorporent un peu de tout : du local et du
mondial, de l’ancien et du moderne, du vieux et du neuf (Hall, 1992, p. 31-14).
Dans le système mondial, les signifiants culturels associés aux aliments sont souvent
fondés sur des notions contradictoires touchant la santé physique, l’esthétique, les goûts et le
prestige social, qui reflètent les conflits existant entre le secteur privé et le secteur public, et dans
les messages diffusés sur le marché. Comme les aliments, les identités sont créolisées, et
l’expérience de l’immigration reflète cette complexité. On ne peut jamais être sûr de la mesure
dans laquelle les changements qui s’opèrent dans le comportement des consommateurs résultent
de l’intégration culturelle ou de la mondialisation. À la lumière des résultats d’études sur les
consommateurs, Caglar (1995 et 1997) suggère d’examiner les rapports personne-objet et de se
concentrer sur les produits et la consommation comme moyen d’éviter de prédéfinir les
collectivités comme des cultures isolées les unes des autres :
« Un multiculturalisme de la consommation est un
multiculturalisme du marché, dans lequel les consommateurs sont
libres de définir eux-mêmes qui ils sont, indépendamment des
structures hiérarchiques imposées par l’État ou par des collectivités
fictives. » (Caglar, 1997, p. 182).
L’analyse de Caglar nous éclaire sur la relation entre habitudes de consommation et construction
3
de l’identité dans les sociétés multiculturelles.
Pourtant, la formation de l’identité ne se résume pas à une évaluation subjective de
l’appartenance, indépendamment des expériences et des réalités de la vie quotidienne. Le
sentiment d’identité et d’appartenance résulte non seulement de l’accumulation d’expériences
culturelles et d’habitudes de consommation uniques, mais également de la perception qu’ont les
autres de l’appartenance et des droits à l’identité individuelle et à la citoyenneté d’une personne
ou d’un groupe donné. L’appartenance, dans l’État-nation moderne, suppose l’inclusion, la
liberté d’action, des droits, des services ou une qualité de vie. En ce sens, l’intégration - c’est-àdire, la capacité d’un individu ou d’un groupe social de tirer parti de toutes les dimensions de la
vie économique, sociale, culturelle et politique de la société, et d’y contribuer sans se heurter à
des obstacles structurels - est une composante tout aussi importante de l’identité.
Les immigrants qui traversent une période de transition spatioculturelle radicale sont
sensibles aux réalités culturelles et aux habitudes de consommation qui leur sont familières, mais
aussi aux droits, aux choix et à la qualité de vie qu’on leur offre et qui ont des effets immédiats
sur leur santé et leur bien-être. Sur le chapitre des aliments et des habitudes alimentaires, la
familiarité mais aussi l’accessibilité entrent en jeu dans la formation de l’identité. Le sentiment
d’appartenance, ou l’identification à la société d’accueil, suppose l’intégration en tant que
citoyen à part entière (la capacité d’un individu ou d’un groupe social de tirer parti de toutes les
dimensions de la vie économique, sociale, culturelle et politique de la société, et d’y contribuer
sans se heurter à des obstacles structurels). C’est pourquoi la sécurité alimentaire, comme
d’autres droits essentiels, doit être considérée comme étant un important moyen d’évaluer
comment les immigrants perçoivent leur place dans la société, et comment ils parviennent à
reconstruire leur identité et à bien s’intégrer dans la société d’accueil.
La sécurité alimentaire et l’expérience de l’immigration
La sécurité alimentaire est assurée lorsque tous ont accès en toutes circonstances à des
aliments sains, nutritifs, convenant aux goûts de chacun et que l’on peut obtenir dans le respect
de la dignité humaine (Campbell, Katamay et Connely, 1988). La sécurité alimentaire est depuis
longtemps un problème pour les segments les plus vulnérables de la population.
Selon les résultats de l’Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP), que
Statistique Canada a rendu publics en 2001, environ 8 % des Canadiens, soit près de 2,5 millions
de personnes, ont dû faire des compromis sur la qualité ou la quantité de leur nourriture au moins
une fois en 1998-1999, par manque d’argent. Au cours de la même période, 50 000 autres
personnes craignaient de ne pas avoir assez à manger, également par manque d’argent. Au total,
environ 3 millions de Canadiens, soit 10 % de la population, ont connu « l’insécurité
alimentaire » à la maison, à un moment ou l’autre en 1998-1999.
Le rapport indiquait que les enfants âgés de 0 à 17 ans sont les plus susceptibles de
connaître l’insécurité alimentaire à la maison (14 % de la population), et que les personnes âgées
de 65 ans et plus sont les moins susceptibles de connaître l’insécurité alimentaire à la maison
(4 % de la population). Mais cela ne signifie pas nécessairement que les enfants en question
soient mal nourris à la maison : les parents ont tendance à se serrer la ceinture pour éviter que
leurs enfants ne souffrent de la faim, selon le rapport. Un tiers (32 %) des mères chefs de famille
ont connu l’insécurité alimentaire à un moment ou l’autre et 28 % ont indiqué avoir dû faire des
compromis sur leur alimentation.
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Selon le rapport, il existe une forte corrélation entre insécurité alimentaire et faible
revenu au Canada. Plus du tiers (35 %) des ménages à faible revenu ont indiqué avoir vécu une
certaine forme d’insécurité alimentaire en 1998-1999. Environ 30 % d’entre eux ont admis avoir
dû faire des compromis sur leur alimentation.
L’ENSP a révélé que l’insécurité alimentaire ne se limitait pas aux ménages à faible
revenu. En effet, environ 14 % des ménages à revenu moyen ont indiqué avoir vécu une certaine
forme d’insécurité alimentaire en 1998-1999; près de 12 % d’entre eux ont admis avoir fait des
compromis sur leur alimentation. Associée à des revenus plus élevés, l’insécurité alimentaire est
sans doute attribuable au calcul du revenu annuel comme mesure statique, mesure qui est
susceptible de ne pas refléter des fluctuations économiques soudaines entraînant une insécurité
alimentaire épisodique.
À leur arrivée au Canada, les nouveaux immigrants vivent toutes sortes de situations et
d’expériences susceptibles de compromettre leur sécurité alimentaire. Le fait que les aliments
faisant partie de leur régime habituel ne soient pas disponibles ou soient coûteux, les
changements qu'ils connaissent dans leur mode de vie et leurs conditions de travail et leurs
difficultés d’adaptation à une nouvelle culture se traduisent par un changement de régime
alimentaire, souvent nuisible pour la santé (Hung, 1995; Hrboticky et Krondl, 1984; Sudha et
coll., 1999; Yi Ling, 1999).
À l’aide d’un questionnaire d’évaluation sur la nutrition (voir l’annexe), le Centre
médico-social et communautaire a constaté que les problèmes de carence alimentaire sont plus
fréquents chez les gens vivant au Canada depuis moins de dix ans que chez ceux qui ont émigré
au pays il y a plus de 10 ans. Les résultats de cette étude indiquent que les nouveaux immigrants
prennent moins de deux repas par jour, consomment moins de fruits, de légumes et de produits
laitiers, n’ont pas toujours assez d’argent pour s’acheter de quoi manger et indiquent avoir perdu
du poids sans l'avoir souhaité (Gauthier, 1996). Gauthier (1996) souligne également que, parmi
les nouveaux immigrants, les Africains francophones représentent le groupe le plus à risque.
Des données recueillies aux États-Unis vont dans le même sens. Dans une étude effectuée
en 1998, les Médecins pour les droits de l’homme signalent un nombre alarmant de cas
d’insécurité et de carence alimentaires chez les immigrants reçus aux États-Unis. Des entrevues
effectuées dans des cliniques et centres communautaires - en Californie, au Texas et dans
l’Illinois - auprès d’immigrants reçus d’origine latinoaméricaine et asiatique révèlent que, sur les
682 foyers représentés dans l’échantillon, 79 % vivent dans l’insécurité alimentaire et souffrent
de carences alimentaires plus ou moins graves. Ces chiffres indiquent que la situation est près de
sept fois pire dans ces familles que dans la population générale des États-Unis. Plus d’un foyer
d’immigrants sur trois, parmi ceux représentés dans l’échantillon, ont dit souffrir gravement ou
modérément de la faim, les adultes comme les enfants, à cause du manque d’argent. En outre,
8,5 % des ménages d’immigrants reçus de l’échantillon ont dit souffrir gravement de la faim. soit au moins dix fois plus qu’au sein de la population générale (selon les données enregistrées
en 1995). Ce dernier groupe est particulièrement démuni parce que les enfants de ces familles se
voient forcés de sauter des repas ou de rester le ventre vide toute une journée parce que leurs
parents n’ont pas de quoi acheter à manger. L’étude a été faite en réponse aux questions
soulevées au sujet des problèmes de santé occasionnés par les réformes introduites aux
États-Unis, qui ont temporairement privé près de un million d’immigrants reçus de coupons
alimentaires. En réponse aux critiques formulées à l’endroit de ces réformes, le Congrès a voté
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une loi en 1998 pour rendre à nouveau admissibles aux coupons alimentaires fédéraux les
immigrants âgés, handicapés ou de moins de 18 ans qui vivaient aux États-Unis au moment de
l’adoption de cette loi.
Il n’existe pas de données comparatives sur la question au Canada, mais selon les
rapports publiés par l’Association canadienne des banques alimentaires, l’utilisation des banques
alimentaires a doublé au Canada dans les années 1990, surtout en Ontario, par suite d’une
réduction de près de 22 % des prestations de bien-être social. On estime que plus de 2,5 millions
de repas par an sont servis au Canada par le canal des banques alimentaires. Depuis l’ouverture
de la première banque alimentaire au Canada, en 1981, le nombre des personnes qui ont recours
à cette aide alimentaire d’urgence progresse de façon alarmante : entre mars 1989 et 2000, il est
passé à 726 902 personnes, soit une hausse de 92 %. Actuellement au Canada, au moins
615 banques alimentaires et 2 213 autres organismes ou programmes d’aide alimentaire tentent
de faire face à une demande croissante (Wilson et Steinman, 2000).
Selon les données de l’ENSP enregistrées au Canada pour la période 1998-1999, environ
11 % des nouveaux immigrants ont connu au moins un épisode d’insécurité alimentaire en
1998-1999 (Che et Chen, 2001, p.16-18). Fait intéressant à noter, ces données indiquent que,
lorsque d’autres facteurs sont pris en considération, les nouveaux immigrants sont moins
susceptibles de connaître l’insécurité alimentaire à la maison que les familles d’origine
canadienne (13 %), à commencer par les peuples autochtones (27 %).
Il a été établi que l’accès aux aliments pose un problème de santé important, et que la
nutrition est liée à plusieurs maladies chroniques dont les maladies cardio-vasculaires, certains
cancers et l’ostéoporose (Gundy, 1990; Kibayanshi et coll., 1999; McGinnis et Foege, 1993).
Comme les immigrants adoptent les habitudes alimentaires nord-américaines tout en conservant
une partie de leur régime habituel, ils ne sont pas épargnés par les maladies chroniques associées
à la surconsommation et aux régimes du monde occidental - obésité, diabète, hypertension, entre
autres (Lang, 1992; Pan et Huffman, 1999; Raj et coll., 1999). Des études menées aux États-Unis
révèlent que l’obésité à l’adolescence est nettement plus fréquente chez les immigrants de la
deuxième et de la troisième générations. Selon les résultats d’une étude effectuée par une
université de la Caroline du Nord, Chapel Hill, le nombre d’enfants obèses a doublé dans tous les
groupes d’immigrants asiatiques, à l’exception des Chinois et des Philippins, pendant la période
de transition entre l’arrivée de la première génération et la naissance de la seconde dans le pays
d’accueil. Les enfants nés outremer sont deux fois moins susceptibles d’avoir des problèmes de
poids que les enfants nés aux États-Unis. On constate une hausse presque aussi importante chez
les immigrants hispaniques, entre la première et la deuxième génération. Les chercheurs
indiquent que l’adaptation au mode de vie et au régime alimentaire nord-américains est la cause
principale de ce changement. Les études effectuées dans le passé nous éclairent sur l’incidence
du changement de régime alimentaire sur les immigrants de la première génération
(Bradby,1997; Dewey et coll., 1984; Gundy, 1990; Gupta, 1975; Williamson, 1995), mais il
faudrait faire une étude à long terme sur les conséquences pour la santé de l’adaptation et des
nouvelles habitudes alimentaires chez les « Néo-Canadiens ».
La sécurité alimentaire et l’expérience de l’immigration
Dans un projet de recherche, Welsh et coll. (1998)2 ont examiné les changements
survenus dans les habitudes alimentaires et les problèmes de sécurité alimentaire au sein de trois
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groupes ethniques différents à Toronto, soit les immigrants francophones d’origine africaine,
somalienne et vietnamienne. Ils ont également passer en revue les politiques et les services qui
favoriseraient le développement des activités communautaires, initiatives privées et pratiques
ménagères requises pour améliorer la sécurité alimentaire, la santé et le bien-être des populations
d’immigrants à Toronto.
Les conclusions du projet de recherche effectué à Toronto sont fondées sur les résultats
de dix-sept entrevues en profondeur, semi-structurées, auprès de témoins privilégiés et
d’entretiens de groupe avec des membres des trois communautés d’immigrants visées. Les
témoins privilégiés étaient des responsables d’organismes servant les immigrants ou de
programmes d’aide alimentaire, ou des diététistes travaillant auprès des immigrants. Ces
entrevues ont permis de recueillir de l’information sur les points suivants : 1) les principaux
problèmes et besoins des immigrants en matière d’alimentation; 2) les sources d’information,
données et outils que les organismes utilisent ou exigent pour évaluer les besoins alimentaires
des immigrants; 3) les différences culturelles éventuelles existant entre les groupes d’immigrants
quant à la perception des programmes d’aide alimentaire; 4) les obstacles à la participation des
immigrants à des programmes d’aide alimentaire; 5) les stratégies autres que les programmes
utilisées par les communautés d’immigrants pour répondre à leurs besoins alimentaires.
Les entretiens de groupe ont eu lieu par le canal du Centre médico-social et
communautaire (avec un groupe d’immigrants africains francophones d’Algérie et du Zaïre) et
du Regent Park Community Health Centre (avec un groupe d’immigrants d’origine somalienne
et vietnamienne). Le projet de recherche communautaire visait à élaborer, selon une approche
participative, des programmes de facilitation adaptés aux besoins de chaque groupe. Les
chercheurs ont organisé des dîners-partage pour créer un climat propice aux échanges de vue sur
les expériences et les questions alimentaires. Ils ont utilisé un questionnaire pour veiller à ce que
chaque groupe examine les mêmes questions, mais ont animé ces séances suivant les principes
de la recherche participative, où la dynamique de groupe favorise une certaine spontanéité. Une
série de 4 ou 5 dîners-partage étaient prévus, qui visaient à atteindre les objectifs suivants :
a) présenter le projet de recherche au groupe et passer en revue les habitudes alimentaires avant
l’immigration; b) examiner les changements survenus dans les habitudes alimentaires (achat des
aliments, préparation des repas, régime alimentaire, heures et composition des repas), les
perceptions, les difficultés et les expériences relatives à la nourriture à l’arrivée au Canada;
c) inventorier les problèmes rencontrés pour l’achat des aliments au Canada et les solutions
possibles; d) inventorier les stratégies faciles à mettre en pratique, les idées pour la création de
programmes et l’adaptation à l’intention des immigrants de la Nutrition Screening Initiative
américaine.
Ce projet était axé sur trois communautés d’immigrants données, mais a permis de
recueillir de l’information sur d’autres populations d’immigrants, provenant de divers pays
d’Afrique (Algérie, Somalie, Afrique occidentale, Zaïre), d’Asie du Sud (Kenya, Tanzanie,
Ouganda), des Caraïbes, de l’Amérique centrale et du Sud, de Chine et du Vietnam. Il a
également permis de recueillir de l’information sur les immigrants provenant du Bangladesh, du
Sri Lanka et d’Europe de l’Est. Les programmes d’aide alimentaire qui ont été évoqués le plus
souvant étaient les jardins communautaires, les cuisines communautaires et les banques
alimentaires.
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Résultats de recherche
La plupart des participants de notre échantillon jugent important de trouver des aliments
frais, culturellement acceptables et familiers. Souvent, des produits exotiques sont disponibles
dans les épiceries ethniques de quartier et les supermarchés de certains quartiers (où les groupes
ethniques sont représentés). En revanche, d’autres produits comme les feuilles de banane sont
difficiles à trouver. Les groupes communautaires comme l’Afri-Can Food Basket (qui alimente
les immigrants venus d’Afrique et des Caraïbes) trouvent des moyens de cultiver ou d’importer
certains des aliments désirés. Des denrées alimentaires spéciales (comme la viande halal) sont
reconnues comme étant plus coûteuses et pas toujours faciles à trouver.
Des chaînes de supermarchés ont en stock des quantités plus importantes selon la
perception qu’elles ont de la demande, d’où des différences importantes existant d’un magasin à
l’autre pour ce qui est des stocks d’aliments « ethniques », même s’il s’agit de denrées de base
pour les immigrants. Pour les produits plus spéciaux, les immigrants doivent compter sur les
détaillants « ethniques » qui sont souvent des immigrants de la première génération (De Vita,
1994). La tenue d’une épicerie, d’un service d’alimentation ou d’un restaurant a toujours
constitué une première activité économique au Canada pour les entrepreneurs en herbe. Ces
entreprises à prédominance de main-d’oeuvre, qui exigent un investissement en capitaux limité,
sont une solution de prédilection pour ceux qui désirent être « leur propre patron ». Les
« entreprises de l’enclave ethnique » appartiennent à des travailleurs autonomes membres d’un
groupe ethnique et sont gérées par elles (Isajiw, 1999, p. 119; Wang, 1999). Les réseaux
ethniques revêtent une importance vitale pour la réussite de ces entreprises, que ce soit pour
l’obtention de crédit ou l’approvisionnement, l’accès à la main-d’oeuvre ou au marché. D’où une
tendance à la concentration professionnelle ethnique. Reitz (1990), par exemple, constate que le
Chinois de sexe masculin est 5,2 fois plus susceptible que le Canadien moyen de travailler
comme cuisinier.
Les réseaux d’entreprises ethniques conduisent à la « l’intégralité institutionnelle », et en
bénéficient (Breton, 1964), en ce sens que la communauté ethnique abrite en son sein une
gamme complète d’infrastructures (économique, social, culturelle, éducative, etc.). Toutefois,
l’intégralité institutionnelle ne reflète pas la réalité de bien des communautés ethniques au
Canada, à commencer par celles qui se sont établies ces dernières années. L’adaptation de ces
groupes dépend essentiellement des programmes sociaux qui leur sont offerts.
Par ailleurs, bon nombre des immigrants de notre échantillon se sont plaints de la qualité
des produits alimentaires disponibles au Canada. En dépit du grand choix qu’il offre, le
supermarché ordinaire n’est pas la solution idéale, surtout pour ceux qui ont l’habitude d’acheter
des produits frais ou cuits au four, ou de la viande tous les jours. Citons également parmi les
principaux sujets de préoccupation la haute teneur en gras, la difficulté à trouver des fruits et des
légumes frais et mûrs, et la qualité de la viande, de la volaille et du poisson. Les participants aux
entretiens de groupe ont indiqué qu’ils mangeaient davantage de viande au Canada, tout en se
plaignant de leur haute teneur en gras. À noter toutefois que ceux dont le revenu est limité
consomment moins de viande, mais que bon nombre d’entre eux apprécient particulièrement les
plats rapides à base de viande (comme les hamburgers). La fraîcheur des aliments était au centre
des débats dans bien des groupes différents, préoccupation s’exprimant par une méconnaissance
des aliments congelés, une grande envie de fruits et de légumes plus frais et ayant plus de goût,
comme dans le pays d’origine, et la volonté d’acheter du poisson frais. Les nouveaux immigrants
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qui ne sont pas familiers avec les denrées alimentaires canadiennes réclament de l’information
plus claire, comparable et facile à interpréter sur les produits disponibles.
Les participants à l’étude se sont dits inquiets pour certains groupes à risque élevé
comme les enfants, les personnes âgées et les hommes vivant seuls. La prise de poids est souvent
un problème, particulièrement chez les femmes, qui sortent moins volontiers au Canada (à cause
de la température ou de l’isolement social). Même les habitudes d’achat sont différentes au
Canada, où les courses quotidiennes chez les commerçants du quartier sont remplacées par une
expédition à intervalles plus irréguliers en compagnie du mari. Parmi les autres problèmes de
santé évoqués, citons l’hypertension artérielle, le diabète et l’anémie. On s’inquiète également
des risques pour la santé que pose la pêche en eau douce en Ontario (particulièrement à Toronto)
et la contamination par les produits chimiques contenus dans les fruits et les légumes. Le
questionnaire d’évaluation de la nutrition utilisé dans les entretiens de groupe a permis
également de dégager d’autres facteurs de risque, comme la faible consommation de légumes et
de produits laitiers, le fait de manger seul, et l’insuffisance du revenu.
Les résultats de ce projet de recherche ne sont pas révélateurs d’un problème particulier
sur le chapitre de la disponibilité des aliments pour les immigrants. À quelques exceptions près,
les participants ont dit être capables de trouver les mêmes denrées alimentaires que dans leur
pays d’origine. En revanche, ce qui pose problème, c’est la distance à parcourir, le temps qu’il
faut et le prix à payer pour se les procurer. Il faudrait donc examiner les structures marketing et
les méthodes de vente au détail, et vérifier s’il serait faisable de produire localement certaines
des denrées alimentaires les plus populaires pour améliorer l’offre et faire baisser les prix de
détail. Les résultats de recherche indiquent que la principale préoccupation des immigrants en
matière de sécurité alimentaire est non pas la disponibilité, mais l’accessibilité des aliments, soit
plus précisément la distance à parcourir, le temps qu’il faut et le prix à payer pour se les
procurer.
Le manque d’argent est souvent un problème pour les nouveaux immigrants qui ont de la
difficulté à trouver un emploi correspondant à leurs compétences. Autrement dit, la sécurité
alimentaire, lorsqu’elle dépend du revenu, passe par l’accès au marché du travail et au logement
à prix abordable. D’autres études révèlent que les nouveaux immigrants consacrent jusqu’à
37 p. 100 de leur revenu au loyer (Isajiw, 1999, p. 100). Toutefois, beaucoup d’immigrants,
même parmi ceux dont le revenu est insuffisant, estiment que les banques alimentaires ne sont
pas la solution idéale. Pour certains (comme les Chinois ou les immigrants d’Afrique de
l’Ouest), les banques alimentaires stigmatisent leur clientèle, sont intrusives (à cause du mode de
contrôle de l’admissibilité), sans compter que la qualité n’y est pas. Il importe de noter que les
banques alimentaires intègrent de plus en plus leur service dans une structure de soutien
communautaire qui peut être définie à la fois géographiquement et ethniquement. En outre, on
constate que l’expansion des programmes offerts contribue à rendre moins pénible le recours à
une banque alimentaire. Le fait que le service de référence téléphonique « Hunger Hotline », à
Toronto, ait été rebaptisé « Food Link » témoigne de la diversité des services maintenant offerts
par les banques alimentaires et de l’expansion des programmes communautaires d’aide
alimentaire.
Parmi ces programmes, citons les jardins communautaires et les cuisines communautaires
existant dans diverses collectivités de Toronto. Les jardins communautaires sont souvent cités
comme moyen d’accéder aux denrées familières du pays d’origine (surtout les légumes). Les
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Somaliens ont commencé, avec succès, à échanger des produits. Plusieurs groupes voient les
bénéfices des jardins communautaires pour ce qui est d’atténuer l’isolement, de pratiquer son
anglais, de faire de l’exercice et d’être « en contact avec la nature ». Dans certains groupes, on
préfère le contact avec la nature en dehors de la ville. Les jardins communautaires offrent
également la possibilité d’apprendre à conserver les aliments, bien que les nouveaux immigrants
ne soient pas vraiment des amateurs de produits congelés. Par ailleurs, on constate que les
cuisines communautaires sont plus populaires auprès des immigrants d’Amérique centrale et
moins bien acceptées par les immigrants venus des Caraïbes. On a cité des exemples de cuisines
communautaires qui aident des organismes communautaires à générer des recettes.
L’appartenance à une société multiculturelle
Nos goûts alimentaires sont dictés à la fois par nos préférences personnelles et par notre
culture, notre histoire et notre situation économique. Comme diverses autres expressions et
pratiques culturelles, ils sont révélateurs de la façon dont nous nous présentons, dont nous
modelons notre identité, dont nous définissons notre appartenance à la société et dont nous
prenons nos distances vis-à-vis des autres. Les changements dans les préférences alimentaires
peuvent aussi être le résultat de changements plus globaux dans les perceptions et les pratiques
culturelles.
Les aliments sont plus que de simples substances nutritives : ils constituent une
composante clé de notre culture, de notre sentiment d’identité. Loin d’être un ensemble de traits
sociaux bien établis, l’identité évolue dans une société donnée en fonction des expériences
individuelles et de contraintes structurelles réelles ou imaginaires.
En tant que phase de transition spatioculturelle, le processus de l’immigration génère des
possibilités de changement, de même qu’une résistance à de nouvelles habitudes, à de nouveaux
comportements, à de nouvelles expériences culturelles.Ces nouveaux modes de consommation et
d’expression culturelle influent sur la santé physique et mentale, sur la perception de soi et sur
les rapports avec les autres, sur l’intégration et la réussite, particulièrement dans le cas des
nouveaux immigrants, qui ont de la difficulté à s’adapter, ou qui résistent, à ces changements.
Au sens le plus large, la sécurité alimentaire s’entend non seulement de la disponibilité
des aliments en toutes circonstances, mais également de leur accessibilité à tous. L’égalité
d’accès, les critères d’admissibilité et les droits de citoyenneté créent des obligations publiques
en matière de sécurité alimentaire. Il en résulte que les préoccupations des nouveaux immigrants
en matière de sécurité alimentaire sont liées à la fois aux politiques d’égalité et aux politiques de
reconnaissance dont ils font l’objet.
Pour les nouveaux immigrants, la sécurité alimentaire suppose avant tout qu’ils aient
accès en toutes circonstances à des aliments nutritifs et satisfaisants, tant sur le plan de la qualité
que sur celui de la quantité. La sécurité alimentaire contribue au sentiment de bien-être, au même
titre que l’accès, en toute équité, au marché du travail, au logement, aux soins de santé, à
l’enseignement public et aux services sociaux, auquel les citoyens d’un État moderne sont en
droit de s’attendre. Le sentiment d’appartenance, ou l’identification à la société d’accueil, naît
d’une interprétation subjective de la notion d’inclusion et d’admissibilité. La sécurité alimentaire
contribue à ce sentiment, au même titre que d’autres caractéristiques d’une société moderne.
Ce sentiment de bien-être résulte de la certitude d’avoir accès non seulement à des
aliments nutritifs, mais également à un régime alimentaire conforme à sa culture; de la certitude
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de se sentir bien accueilli, en théorie, en pratique et dans la symbolique de la vie quotidienne.
Les politiques de sécurité alimentaire et les politiques de citoyenneté doivent découler de
principes et de préoccupations en matière d’égalité, ainsi que de principes et de préoccupations
liées à la reconnaissance. Si d’autres partagent nos goûts, cela signifie qu’ils nous font bon
accueil. En revanche, aux yeux de certains, la nouvelle cuisine cospomopolite qui fait son
apparition dans des villes multiculturelles comme Toronto ne tient à rien d’autre qu'à une forme
de multiculturalisme folklorique et n'a aucun effet marquant sur les réalités quotidiennes. Sans
doute y a-t-il une part de vérité dans cette constatation, mais nous croyons cependant qu’une
telle approche revient à sous-estimer l’importance des cuisines d’ailleurs comme expressions
symboliques de la diversité, comme moyens de lutte contre l’ethnocentrisme, sans parler du
sentiment d’appartenance qu’elles aident à recréer en terre d’adoption. S’il est vrai que nous
sommes ce que nous mangeons, la cuisine multiculturelle ouvre la porte à l’élargissement de la
notion d’identité, de l’image de soi et du sentiment d’appartenance au Canada. C’est par de
simples gestes - manger, s’habiller, écouter de la musique - que l’on surmonte les barrières
culturelles qui font obstacle à l’intégration.
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http://www.icomm.ca/cafb/hc-2000F.pdf
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1. Nous aimerions remercier les examinateurs anonymes pour leurs précieuses suggestions.
2.Le Centre d’excellence pour la recherche en immigration et en intégration (CERIS) a financé ce
projet de recherche sur la sécurité alimentaire, la santé et l’immigration effectuée par une équipe
de chercheurs en collaboration avec le Centre for Studies in Food Security de la Ryerson
Polytechnic University, le Centre for Health Studies de l’Université York, le Centre médicosocial et communautaire et le Regent Park Community Health Centre.
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