Accident du travail

Transcription

Accident du travail
Accident de travail et de trajet (droit privé)
Fondamentaux

Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait
ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque
lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise (art. L411-1 du code de la
sécurité sociale).

Trois critères doivent être réunis pour retenir la qualification d’accident du travail :
-
le caractère soudain de l’événement (coupure, brûlure, chute…) ou l’apparition soudaine d’une
lésion (douleur lombaire à l’occasion d’une manutention, infarctus…). Ce critère de soudaineté
distingue l’accident de la maladie, laquelle apparaît de façon lente et progressive ;
-
l’existence d’une lésion, quelle que soit sa forme physique ou psychique, et quelle que soit son
importance ;
-
le caractère professionnel de l’accident : Il faut que l’accident survienne au lieu et au temps de
travail, c’est-à-dire lorsque le salarié est sous l’autorité et la surveillance de l’employeur : accident
dans l’atelier, le bureau, l’escalier de l’entreprise, dans certaines circonstances au cours de la
pause de midi, dans la cour de l’usine ou à l’occasion de déplacements pour le compte de
l’employeur.

Exemples illustrant ces critères dans des cas délicats à apprécier :
-
La qualification d’accident du travail peut être retenue dans le cas où, par l’effet du travail, un état
pathologique préexistant s’est aggravé ou révélé. Il en est ainsi pour des hernies (cass. soc. 9
avril 1970, BC V n° 237) ou un infarctus (cass. soc. 12 octobre 1983, BC V n° 489).
-
En revanche, l’accident du travail n’est pas caractérisé en cas d’aboutissement d’un processus
évolutif ou lorsque le travail n’a joué aucun rôle dans la survenance de l’accident et qu’il a pour
cause l’état pathologique préexistant (cass. soc. 1er décembre 1993, n° 3886 D).

Constitue un accident de travail :

l’accident survenu lors d’une collecte de sang organisée dans l’entreprise (cass. soc. 11 juillet
1991, BC V n° 363) ;

l’accident survenu lors d’une rixe entre salariés intervenue au temps et au lieu de travail (cass.
soc. 20 février 1980, BC V n° 163 et 23 mai 1996, BC V n° 206).

l’accident survenu lors de la pause déjeuner alors que le salarié circulait dans le magasin qui
l’employait, avec l’autorisation de l’employeur pour faire des achats destinés à son déjeuner en
vue de prendre ensuite son repas dans le réfectoire de l’entreprise (cass. soc. 10 décembre
1998, n° 5129 D) ;

le suicide d’un salarié ayant pour origine un syndrome dépressif consécutif à un accident de la
circulation survenu dans l’exercice de ses fonctions peut être pris en charge au titre de la
législation sur les accidents du travail (cass. soc. 15 février 2001, n° 703 FS-D) ;

tout accident qui se produit durant une mission, à condition qu’au moment de l’accident, le salarié
n’ait pas recouvré son indépendance ou interrompu sa mission pour un motif indépendant de
l’emploi est considéré comme accident du travail ;

l’accident d’un représentant du personnel dans l’exercice de son mandat.
Fiches formation CHSCT CEDAET -
Page 1 sur 5

Ne constituent pas un accident du travail :

les accidents qui surviennent hors de l’enceinte de l’entreprise pendant la pause déjeuner, ou à
l’occasion d’une absence, même autorisée, mais pour des raisons personnelles ;

les accidents qui se produisent au cours d’une suspension du contrat de travail (grève, maladie,
congés, mise à pied) ou lorsque le salarié s’est soustrait à l’autorité de l’employeur (pour
accomplir un travail personnel par exemple) ou après la rupture du contrat de travail.

Exception : lorsque le salarié, pendant la suspension du contrat, se place sous la subordination
de l’employeur. Tel est le cas d’un gardien d’immeuble (en congé au moment de l’accident)
intervenant suite à l’appel d’un copropriétaire consécutif à une panne d’électricité (cass. soc. 30
avril 1997, BC V n° 157)

Preuve de l’accident du travail :
-
Tout accident qui se produit au temps et au lieu de travail étant présumé accident du travail, la
victime doit seulement établir par tous moyens la preuve de la matérialité de la lésion.
-
Cette présomption simple peut être écartée par la preuve contraire (exemple : preuve d’un état
pathologique préexistant non aggravé par les conditions de travail, cause totalement étrangère
au travail).

Accident de trajet assimilé à un accident du travail pour sa prise en charge par la sécurité
sociale : L’accident de trajet est celui dont un salarié est victime au cours du trajet normal aller ou
retour entre son lieu de travail et (code de la séc. soc. art. L411-2) :
-
sa résidence (y compris secondaire si celle-ci présente un caractère de stabilité) ou tout autre
lieu où il se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial ;
-
le lieu où il prend habituellement ses repas.

Conditions :

L’accident doit survenir pendant le temps normal du trajet, compte tenu des horaires habituels du
salarié et des nécessités de l’emploi qu’il occupe.

Le trajet à retenir est, en principe, l’itinéraire le plus direct (ou le plus aisé, même s’il est plus long
que l’itinéraire direct). Toutefois, le détour ou l’interruption de trajet peuvent être admis lorsqu’ils
répondent aux nécessités essentielles de la vie courante ou de l’emploi (et non au seul intérêt
personnel) (acheter du pain, effectuer une démarche administrative, accompagner un enfant), ou
de l’emploi (chercher un vêtement destiné à une cérémonie professionnelle, déposer un collègue
dans le cadre d’un covoiturage régulier pour aller et revenir du lieu de travail). À noter. L’accident
survenu dans les dépendances de l’habitation n’est pas un accident de trajet. Tel est le cas, par
exemple, d’un accident survenu dans le garage situé au sous-sol de la maison d’un salarié (cass.
soc. 23 mai 1997, n° 2114 D).
-
Preuve : Il appartient à la victime d’apporter la preuve que l’accident s’est produit sur le lieu et au
temps du trajet et que celui-ci n’a pas été détourné ou interrompu pour un motif d’intérêt
personnel.

Déclaration de l’accident du travail ou de trajet :
-
Déclaration par le salarié :

La victime d’un accident du travail doit prévenir ou faire prévenir son employeur ou l’un de ses
préposés dans la journée où l’accident s’est produit ou, au plus tard, dans les vingt-quatre
heures, sauf cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motifs légitimes (code de la séc.
soc. art. L. 441-1 et R. 441-2).

La victime doit préciser le lieu, les circonstances de l'accident et l'identité du ou des témoins
éventuels. En cas de lésions, la victime doit consulter rapidement un médecin qui établira un
certificat médical initial.

Si la déclaration n’a pas été faite verbalement sur les lieux de l’accident, elle doit être adressée à
l’employeur par lettre recommandée dans les vingt-quatre heures (code de la séc. soc. art. R.
Accident de travail et de trajet (droit privé)
441-2). C’est cette procédure qu’il conviendra de suivre, par exemple, en cas d’accident de trajet
ou d’accident survenant au cours d’une mission, dans la mesure où l’accident se produit alors à
l’extérieur de l’entreprise.

Lorsque la victime ne peut procéder elle-même à la déclaration du fait des lésions subies, un
collègue de travail ou un membre de sa famille peut valablement s’en charger.

L’obligation pour la victime d’avertir son employeur dans un délai de vingt-quatre heures n’est
assortie par la loi d’aucune sanction. Selon la Cour de cassation, le fait pour le salarié de ne pas
avoir déclaré l’accident dans ce délai ne peut notamment avoir pour effet de l’obliger à faire la
preuve de l’imputabilité de la lésion au travail.
-
Déclaration par l’employeur :

À partir du moment où il en a eu connaissance, l’employeur ou l’un de ses préposés doit déclarer
l’accident du travail ou de trajet dans les quarante-huit heures à la caisse primaire d’assurance
maladie dont relève la victime par lettre recommandée avec accusé de réception (imprimé
S6200) ou sur Internet. Il doit préciser les lieux, circonstances et l'identité des témoins éventuels.
L’employeur doit remettre immédiatement au salarié une feuille d'accident (S6201) qui lui permet
de bénéficier du remboursement à 100 % des frais médicaux liés à l'accident du travail (sur la
base et dans la limite des tarifs de base de l'Assurance Maladie) sans avance de frais.


Possibilité pour l’employeur ou la CPAM de contester le caractère professionnel de l’accident :
-
La déclaration est obligatoire : l’employeur ne saurait se dispenser de l’effectuer et n’a pas à se
faire juge du caractère professionnel de l’accident.
-
Si l’employeur a des doutes sur le caractère professionnel ou la matérialité de l’accident, il peut
formuler des réserves dans la déclaration elle-même ou dans une lettre annexe.

Déclaration sur un registre spécial en cas d’accidents bénins :
-
L’employeur doit déclarer tous les accidents dont il a connaissance, même ceux qui n’entraînent
pas d’arrêt de travail ou paraissent bénins.
-
Il peut cependant être autorisé par la caisse régionale d’assurance maladie à remplacer la
déclaration des accidents du travail n’entraînant ni arrêt de travail ni soins médicaux par une
inscription dans les quarante-huit heures sur un registre spécial (CERFA 60-3764). Il doit alors en
aviser le CHSCT. Mais si l’état de la victime vient à s’aggraver et nécessite l’intervention de la
caisse, l’employeur doit en faire la déclaration à la caisse primaire d’assurance maladie dans les
48 heures suivant cette nouvelle circonstance (code de la séc. soc. art. L441-4, R441-5 et D4411).

Carence de l’employeur :
-
Le salarié peut, en cas de carence de l’employeur, effectuer la déclaration auprès de la caisse
primaire d’assurance maladie, dans un délai de deux ans suivant l’accident.
-
Des peines d’amende sont prévues en cas de non-déclaration (ou de déclaration tardive) d’un
accident du travail, de déclaration frauduleuse ou de non-remise d’une feuille d’accident à la
victime d’un accident du travail (code de la séc. soc. art. L471-3 et R471-3).
-
En outre, les caisses de sécurité sociale peuvent demander à l’employeur le remboursement de
la totalité des dépenses faites à l’occasion d’un accident qui n’a pas été déclaré ou l’a été
tardivement. Il en est de même si l’employeur a omis de délivrer une feuille d’accident à la victime
(code de la séc. soc. art. L471-1).
-
Ce recours peut également être dirigé contre l’entreprise utilisatrice qui a négligé d’informer
l’entreprise de travail temporaire de l’accident survenu au travailleur mis à sa disposition (code de
la séc. soc. art. L412-5).
Fiches formation CHSCT CEDAET -
Page 3 sur 5

Autres formalités administratives :
-
L’employeur doit remettre au salarié une feuille d’accident (feuille de soins que la victime
présentera au médecin).
-
Si l’accident entraîne un arrêt de travail, l’employeur adresse à la caisse primaire d’assurance
maladie une attestation de salaire indiquant notamment la période de travail ainsi que le nombre
de jours et d’heures correspondant à la période de prise en compte pour le calcul des indemnités
journalières (code de la séc. soc. art. R. 441-4).
CHSCT et Accident de travail et de trajet

Le CHSCT doit être informé en cas d’accident du travail quelle que soit sa gravité. Il peut
consulter les déclarations d’accident du travail et le registre des accidents bénins s’il existe dans
l’entreprise.

Dans le cas d’un accident du travail grave ou d’un accident révélateur d’un risque grave, le
CHSCT doit obligatoirement être convoqué d’urgence, y compris dans le cas où les
conséquences graves ont pu être évitées (art. L4614-10).

Dans tous les cas, s’il y a un accident, ou presque-accident, c’est qu’il y a eu exposition à un
danger. Il convient donc de lutter contre ce risque.

Le CHSCT peut décider de réaliser une enquête à la suite d’un accident, quelle qu’en soit la
gravité afin d’en étudier les causes dans une optique de prévention des risques et d’amélioration
des conditions de travail. Dans le cas d’un accident du travail grave ou d’incidents répétés
révélateurs d’un risque grave, le temps passé à l’enquête n’est pas décompté du crédit d’heures
de délégation (art. L.4614-6).

Face à la tendance des employeurs et de CPAM à contester le caractère professionnel de
l’accident
-
Il importe que le CHSCT soit vigilant face au risque de déni et de sous-estimation d’un danger
réel dans l’entreprise.
-
Le CHSCT ne doit pas hésiter à mobiliser ses moyens, notamment d’enquête, en vue non pas de
rechercher des coupables, ce qui n’est pas son rôle, mais d’analyser les risques et leurs causes
en profondeur.
-
Il convient en effet de ne pas négliger les facteurs de risques moins apparents ou situés en
amont du processus accidentel, notamment organisationnels, et le rôle essentiel qu’ils ont pu
jouer dans la survenue de l’accident.

Comme le stipule l’article L4131-4, le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur prévue à
l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale est de droit pour le travailleur victime d’un
accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors que le risque qui s’est matérialisé avait
été signalé par le travailleur ou un représentant du personnel au CHSCT.

Les accidents de trajet méritent une attention particulière dans le cadre plus large de la
prévention du risque routier, première cause de mortalité parmi les risques professionnels. La
mise en place d’un plan d’action n’est pas obligatoire mais fortement recommandée.

Les presque-accidents méritent également la plus grande attention, car c’est en les analysant
qu’on pourra empêcher un accident, plutôt que d’attendre sa survenue pour empêcher son
renouvellement.

Les représentants du personnel mettent souvent en avant le coût social et financier des
accidents du travail pour tenter de convaincre l’employeur d’engager des actions de prévention.
Une étude récente de l’OPPBTP apporte d’autres arguments utiles à connaître face à de
nombreux employeurs pour qui ces actions sont perçues comme un coût. Cette étude démontre,
exemples concrets et chiffres à l’appui, que les actions de prévention s’avèrent un facteur positif
de productivité, avec un taux de rendement moyen supérieur à 2 et un retour sur investissement
très rapide (18 mois en moyenne).
Accident de travail et de trajet (droit privé)
Modèle de demande de réunion extraordinaire motivée par un événement
grave
La demande doit être faite par au moins deux représentants du personnel au CHSCT.
En tête (nom des deux membres du CHSCT) - Remis en main propre le ... (date à préciser)
M. le président du CHSCT de …
Nous demandons, par la présente, que soit organisée une réunion extraordinaire du CHSCT, comme
nous le permet l'article L. 4614-10 du Code du travail.
Cette demande est motivée par l'événement grave suivant :... (à préciser ; accident du travail de M. ...
survenu le ... (date) / ou : déclaration de maladie professionnelle de M. ... / incident grave - indication
sommaire des circonstances - survenu au service ... le ... / ou : résultats du diagnostic amiante dans
l'établissement / etc.).
Cette réunion n'est pas soumise au délai ordinaire de quinze jours entre sa convocation et sa tenue,
conformément à l'article R. 4614-3 du Code du travail. Vous voudrez donc bien prendre les dispositions
nécessaires pour qu'elle puisse se tenir dans les plus brefs délais. Nous vous proposons d'ores et déjà la
date du ... (indiquer la proposition de date).
Dans l'attente de cette réunion, nous vous prions d'agréer, M. ..., nos salutations distinguées.
À ..., le ...
(signatures)
Pour aller plus loin

CHSCT, repères pour agir sur les conditions de travail et les risques professionnels, ANACT,
2012.

« Dossier : la prévention, une affaire rentable », Prévention BTP, n° 161, février 2013.

Site Internet du Ministère du travail, fiches pratiques du droit du travail.
Fiches formation CHSCT CEDAET -
Page 5 sur 5