Les invités - Harmonia Mundi

Transcription

Les invités - Harmonia Mundi
harmonia mundi
HIVER 2006 - N°10 /
g r at u i t
magazine
Les invités
Le label Mirare
Anne Queffélec
et Pierre Hantaï
harmonia mundi
»
HIVER 2006 - N°10 /
Photo : Dahmane
éditorial
J
»
e veux saluer ici la
douzième édition de
la Folle Journée de
Nantes déclinée cette année
sur le thème “l’Harmonie des
Nations, l‘Europe Baroque”.
Je veux saluer la remarquable
organisation qu’a su mettre
en place René Martin qui, non
content de ce succès, réédite
cette Folle Journée à Lisbonne, Bilbao et à Tokyo. Je
veux saluer l’importance de ces manifestations qui
démontrent qu’un public nombreux et enthousiaste
s’intéresse encore aujourd’hui à la musique classique.
Cette expérience unique, qui ne cède en rien à la
facilité, est un encouragement très fort pour les
éditeurs que nous sommes, en une période où trop
de gens annoncent le manque d’intérêt pour la musique
classique et la disparition du disque. Bravo Monsieur
Martin !
sommaire
»
Introduction à
Bernard Coutaz
Président Directeur Général
g R at u I t
magazine
Les invités
Le label Mirare
Anne Queffélec
et Pierre Hantaï
Introduction à L’Europe Baroque............................... 3
Jean-Sébastien Bach : musique instrumentale
et concertante......................................................... 4
La musique sacrée de J.S. Bach.............................. 6
Bach et la rhétorique musicale
par Philippe Herreweghe. ......................................... 8
Antonio de Almeida & François Couperin................... 9
Georg Friedrich Haendel......................................... 10
Henry Purcell........................................................ 12
Jean-Philippe Rameau............................................ 13
harmonia mundi magazine
Directeur de la Publication : Bernard Coutaz
Maquette : Atelier harmonia mundi Arles
Responsable de la Rédaction : Judith Grandclément
Avec la participation de Mirare
Remerciement à René Martin et François-René Martin
Couverture : Orazio Samacchini, Mercure ordonne à Énée d’abandonner Didon
Huile sur toile. Paris, Musée du Louvre
Textes © harmonia mundi et Mirare
Photo Réunion des Musées Nationaux - ©Jean-Gilles Berizzi
Photos non contractuelles - Reproduction interdite - Imprimé en France
Alessandro & Domenico Scarlatti........................... 14
Georg Philipp Telemann.......................................... 15
Antonio Vivaldi....................................................... 16
Anne Queffélec joue Haendel.................................. 17
Pierre Hantaï, à propos de Scarlatti. ...................... 18
Mirare.................................................................. 19
l’Europe Baroque
M
arquées par de nombreuses querelles
esthétiques et de profondes mutations, les
années 1650- 1750 voient s’affirmer les
écoles régionales autour des grandes Nations qui,
de l’Allemagne à la péninsule ibérique, de l’Italie à la
France et à l’Angleterre, se partagent l’intérêt pour
la musique.
À cette époque où l’on assiste à une prise de conscience
des styles nationaux, hommes et œuvres circulent à
travers le continent et des contacts étroits se nouent
entre les compositeurs des provinces européennes.
Profondément français, Rameau qui, tout jeune,
entreprend un voyage éclair à Milan, gardera toujours
un intérêt particulier pour la musique ultramontaine.
En Allemagne, Bach qui ne quittera jamais son pays s’est
imprégné de la musique française et des concertos de
Vivaldi (imprimés à Amsterdam !) pour les intégrer à
la tradition luthérienne ; il écrit des suites anglaises et
françaises et un concerto dans le style italien.
En Angleterre, après Purcell qui emprunte à la France
et à l’Italie tout en restant spécifiquement britannique,
Haendel, imprégné d’art italien, crée l’oratorio anglais.
Les écoles espagnole et portugaise cultivent à leur tour
leurs relations avec le monde étranger : le napolitain
Scarlatti règne sur le clavecin à Lisbonne et à Madrid,
tandis que le portugais Almeida part étudier en Italie où
Vivaldi fait triompher le concerto.
L’idée de Nation poursuit son chemin sous la plume de
Telemann qui rend hommage aux victimes du tremblement
de terre de Lisbonne et signe une ouverture des Nations
anciennes et modernes, et sous celle de Couperin, auteur
de sonates en trio parues sous le titre des Nations, dans
lesquelles il “réunit” les goûts français et italien.
D’autre part, la victoire de la tonalité sur la modalité et
l’adoption de la basse continue annoncent le débat qui
s’amorce autour des vertus respectives de l’harmonie
et de la mélodie.
La mélodie “n’imite pas seulement, elle parle”, écrivait
Rousseau, à quoi Rameau répondit : “C’est à l’harmonie
seulement qu’il appartient de remuer les passions”.
© Mirare, Adelaïde de Place
Le disque officiel
de la Folle Journée
Bach & Haendel
Cantates
Nuria Rial, soprano
Giovanna Pessi, harpe
Patrick Beaugirard, hautbois
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
A la tête du Ricercar Consort, Philippe Pierlot a développé
un jeu à l’écoute du chant et de la respiration humaine,
le résultat est fascinant : l’osmose est totale entre les
instruments et la voix.
BBC Magazine
MIR009
Bach
Jean-Sébastien
(1685 – 1750)
J
ean-Sébastien Bach est issu d’une lignée de musiciens impressionnante qui fut sans conteste pour lui un formidable
tremplin. Son père, violoniste et musicien de ville à Eisenach, lui enseigne dès l’enfance les instruments à cordes. Son
oncle, Johann Christoph, compositeur et organiste, lui enseigne l’orgue. Mais à neuf ans, coup sur coup, il se trouve
orphelin de père et de mère. A quinze ans, il se lance seul sur les routes d’Allemagne et débarque en 1708 à Weimar
où sa réputation d’organiste l’a précédé. Son séjour lui apporte un enrichissement musical important. En 1717, il quitte
Weimar pour la cour du prince Leopold d’Anhalt-Cöthen. Ces années seront probablement les plus heureuses de sa vie, au
cours desquelles il livra une abondante production.
En 1723, il obtient le poste de cantor à Leipzig. Bach connaît une vitalité créatrice (quarante-huit cantates pour la seule
année 1723). Peu à peu, alors que la musique évolue et que le style “galant” s’impose, Bach ne change pas, au contraire de
Telemann. Non seulement Bach domine les dernières décennies du baroque, mais il sera une importante source d’inspiration
pour de nombreux compositeurs ultérieurs.
»Musique instrumentale
et concertante
Ce qui frappe, c’est son art d’embrasser toutes les facettes
d’un genre ou d’un style, qu’il s’agisse du contrepoint dans
le Clavier bien tempéré, de la musique instrumentale
(Sonates, Suites pour violoncelle seul, Variations Goldberg),
de la musique concertante avec de fameux Concertos
brandebourgeois (d’une richesse et d’une diversité dans
les formes et les distributions instrumentales qui font
exploser les normes du concerto à l’italienne), ou encore
de la musique orchestrale avec les suites pour orchestre,
synthèse exceptionnelle des styles français et italien.
kademie für
»AAlte
Musik Berlin
Concertos brandebourgeois
Akademie für Alte Musik Berlin
Photo Peter Witt
HMX 2901634.35
»Alexandre Tharaud
“Autour du Concerto italien, qui est la colonne vertébrale de ce programme,
j’ai souhaité mettre en miroir des concertos d’après Marcello et Vivaldi,
peu enregistrés et qui révèlent un Bach différent, très éloigné des œuvres
que l’on entend habituellement au piano. Ces concertos, plus que des
transcriptions, ont été totalement réinventés par Bach. Le son du piano
leur donne d’ailleurs une couleur singulière. Si les clavecinistes connaissent
bien ce répertoire, il n’en existe pratiquement aucun enregistrement au
piano. Le Concerto BWV 981 d’après Marcello est à ma connaissance
une première.
[…] J’ai voulu ouvrir et clôturer ce disque de manière personnelle par deux
courtes pièces : tout d’abord la Sicilienne extraite du Concerto BWV 596
d’après Vivaldi écrit pour l’orgue, et dont la version originale, privilégiant
un registre aigu et sans pédalier, est déjà très pianistique. D’autre part,
j’ai voulu conclure dans le recueillement avec l’Andante du Concerto BWV
979 d’après un compositeur anonyme, probablement italien, auquel j’ai
voulu donner une couleur proche du Concerto BWV 1065 d’après Vivaldi
pour quatre pianos et orchestre.”
© harmonia mundi
Concertos italiens
BWV 973, 975 (d’après Vivaldi)
BWV 974, 978 (d’après Marcello)
Alexandre Tharaud, piano
HMC 901871
Variations Goldberg
Le Clavier bien tempéré
Voir les disques Mirare
en pages 18 et 19
Sonates pour viole de gambe
et clavecin
BWV 1019, 1027-1029
Juan Manuel Quintana, viole de gambe
Céline Frisch, clavecin
HMA 1951712
Suites pour violoncelle seul
Jaap ter Linden, violoncelle baroque
Photo Éric Manas
HMX 2907346.47
»L a musique sacrée
de Jean-Sébastien Bach
On ne peut qu’être frappé par l’abondance de la musique religieuse chez Bach. On pourrait même
penser que l’ensemble de son œuvre semble relever d’un “propos spirituel” : n’avait-il pas pris
l’habitude d’écrire, à la fin de chacune de ses partitions, S.D.G. (Soli Deo Gloria), c’est-à-dire
“à la seule gloire de Dieu” ?
Des cantates pour le dimanche
De son arrivée à Leipzig en 1723 jusqu’à sa mort, Bach
composa pas moins de 300 cantates, dont près de 200
nous sont parvenues. Elles sont d’une extrême diversité,
tant formelle que stylistique. Bach établit très tôt les
formes définitives de ses cantates sacrées : mouvement
choral introductif, alternance de récitatifs, d’arias et de
duos virtuoses, et un bref choral final. Il existe bien sûr de
nombreuses cantates n’appartenant pas aux cinq cycles
des dimanches, qui furent écrites pour des circonstances
particulières.
Cantates pour alto
BWV 35, 54, 170
Actus Tragicus
Cantates
Cantates
“Ich hatte viel Bekümmernis”
Andreas Scholl, contre-ténor
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
Cantus Cölln
Konrad Junghänel
La Chapelle Royale
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
HMC 901694
HMA 1951328
HMC 901644
BWV 4, 12, 106, 196
Des oratorios pour les fêtes
A l’occasion des fêtes de Noël, Pâques et de l’Ascension, Bach composa des
oratorios plutôt que des cantates. Du point de vue musical et structurel, ces
oratorios se distinguent peu des cantates sacrées et ne s’apparentent en
rien aux oratorios contemporains de Haendel destinés, eux, au théâtre plutôt
qu’au service liturgique. Toutefois, l’organisation textuelle est différente ; alors
que les cantates présentaient une approche contemplative, les oratorios se
distinguaient par leurs aspects narratifs.
Messe en si
et Magnificat
Bach composa deux versions du Magnificat, la première
pour la fête de Noël (en mi bémol, BWV 243a), la seconde
pour toute liturgie des vêpres (en ré majeur, BWV 243).
Sans doute l’œuvre chorale de Bach la plus souvent
exécutée aujourd’hui, elle se distingue des cantates par
son texte latin, mais aussi par l’absence des récitatifs et
par la reprise du matériel thématique d’ouverture dans le
chœur final.
La Messe en si mineur quant à elle consacre toute une
vie : entamée en 1733 à des fins “diplomatiques”, elle fut
complétée par Bach dans ses toutes dernières années,
alors qu’il était devenu presque aveugle. Cette œuvre
monumentale représente la synthèse de tout ce que
Bach a pu apporter à la musique sur le plan stylistique et
technique ; mais c’est aussi, surtout, la plus fantastique
rencontre spirituelle entre le monde de la glorification
catholique et le culte de la croix luthérien. Aucune messe,
aucun requiem n’a pu atteindre d’aussi hautes cimes par la
suite : profitant de son hétérogénéité au lieu d’en souffrir, la
Messe en si constitue l’expression ultime et parfaite d’une
forme architecturale “rêvée, imaginée et enfin, réalisée”
(A. Basso).
Magnificat
Cantate BWV 80
B. Schlick, A. Mellon
G. Lesne, H. Crook, P. Kooy
Collegium Vocale Gent, La Chapelle Royale
Philippe Herreweghe
HMC 901326
Messe en si mineur
J. Zomer, V. Gens, A. Scholl, C. Prégardien
P. Kooy, H. Müller–Brachmann
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
HMC 901614.15
Oratorio de Noël
Oratorio de Pâques
Oratorio de l’Ascension
D. Röschmann, A. Scholl
W. Güra, K. Häger
RIAS-Kammerchor
Akademie für Alte Musik Berlin
René Jacobs
B. Schlick, K. Wessel, J. Taylor, P. Kooy
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
B. Schlick, C. Patriasz
C. Prégardien, P. Kooy
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
HMX 2901630.31
Edition Livre-disque
HMC 901513
HMC 901479
Des Passions pour la semaine sainte
L’exécution des Passions remonte à une ancienne
tradition luthérienne allemande dans laquelle on
distingue plusieurs genres. Il ne nous reste
aujourd’hui que deux Passions de Bach, de genre
“liturgique”, selon saint Jean BWV 245 et selon
saint Matthieu BWV 244. Narré par l’Evangéliste
(récitatifs du ténor), les personnages principaux
(Jésus, Pilate…) et la foule (le chœur), le texte
original est parsemé de poésies madrigalesques
contemplatives, chantées dans les différentes
arias accompagnées d’instruments solistes
ou de l’orchestre entier, ainsi que de chorals
liturgiques, offrant ainsi une grande variété
musicale.
Passion selon saint Matthieu
I. Bostridge, F.-J. Selig, S. Rubens
A. Scholl, W. Güra, D. Henschel
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
Passion selon saint Jean
HMC 901676.78
HMC 901748.49
S. Rubens, A. Scholl, M. Padmore
S. Noak, M. Volle
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
Bach et la rhétorique
musicale par
Philippe Herreweghe
© harmonia mundi, Extrait du livret La Passion selon saint Matthieu
Photo Eric Larrayadieu
“La musique vocale de J.S. Bach ne fonctionne que dans un rapport
très serré entre la musique et le texte. Son œuvre constitue à
ce titre l’apogée de la pensée rhétorique dans notre musique
occidentale. […] Toute rhétorique s’appuie sur la théorie des affetti.
La “musica rhetorica” veut émouvoir, déstabiliser celui qui l’écoute,
dans le but plus ou moins avoué de le rendre plus vulnérable, donc
plus réceptif à la séduction d’un message. Le compositeur baroque ne
se préoccupe nullement de décrire son état subjectif, mais il cherche
à provoquer chez l’auditeur un ébranlement affectif temporaire, une
succession d’états émotionnels dont il maîtrise parfaitement les causes
et les effets. Le compositeur aborde donc sa composition exactement
comme l’orateur concevra son discours. […]
En ce qui concerne la Passion selon saint Matthieu, cette démarche est
parfois évidente comme c’est le cas du récitatif de l’air de la flagellation, où
les cordes suggèrent cruellement les coups du bourreau. Souvent, elle ne
livre son secret qu’après réflexion, comme dans le premier air de soprano
où les notes pointées, inlassablement répétées, symbolisent les gouttes de
sang. La volonté d’être signifiant est constamment présente. C’est également
dans ce cadre que le compositeur décide de la forme d’une pièce, de son
caractère rythmique, de son tempo et de sa tonalité. […]
Les éléments définis, l’œuvre musicale se coule dans le schéma du discours
classique : introduction, exposé des données du problème, thèse, contrearguments, renforcement de la thèse, conclusion. Si la musique de J.S. Bach
paraît tellement évidente, c’est que l’organisation coïncide avec l’articulation du
discours parlé, donc avec notre façon de penser.
Puis le compositeur empruntera des artifices, les figures rhétoriques, afin que son
message soit aussi saisissant et efficace que possible. Laborieusement cataloguées,
nous les retrouvons abondamment dans la Passion selon saint Matthieu : l’exclamatio,
la suspiratio, la parenthesis, l’anaphora, etc… A chacun de ces termes correspond
un procédé musical bien précis. […]
Aborder la Passion dans la perspective rhétorique, c’est lui rendre sa véritable
dimension, qui est d’être avant tout l’amplification de la parole, dont la moindre inflexion
est exaltée par la musique.”
»Almeida
Francisco António de
(1702 – 1755)
L
a vie de ce compositeur et organiste portugais reste très mal
connue. Titulaire d’une bourse accordée par le roi João V, il est
envoyé à Rome aux alentours de 1720 où il étudie peut-être avec
Alessandro Scarlatti. Plusieurs de ses oratorios y seront exécutés,
dont cet oratorio peu ordinaire, La Giuditta, consacré à un haut fait
biblique parmi les plus sanguinaires : la décapitation du général assyrien
Holopherne par Judith, épisode célèbre de la lutte entre le peuple juif
et Nabuchodonosor (588 av. J.-C.).
De retour à Lisbonne, Almeida est maître de chapelle à la cour jusqu’en
1752. Sa musique tant sacrée que profane est très influencée par
l’Italie, en particulier par l’opéra buffa napolitain.
La Giuditta
Lena Lootens, Francesca Congiu
Axel Köhler, Martyn Hill
Concerto Köln
René Jacobs
»Couperin
HMX 2901411.12
François
(1668 – 1733)
F
rançois Couperin, dit Le Grand en raison de sa maîtrise
exceptionnelle de l’orgue, fut longtemps la figure la plus
importante du paysage musical français, entre Lully
et Rameau. Issu d’une famille de musiciens dont il est le
membre le plus illustre, enfant prodige, il cumule les plus
hautes charges ; organiste de la Chapelle du Roi, maître
de clavecin des Enfants de France, notamment du Duc de
Bourgogne, il jouit de la faveur de Louis XIV pour lequel il
anime chaque dimanche les concerts de la cour. Il est un
artiste heureux au succès brillant, un improvisateur de
génie, et un compositeur incroyablement prolixe.
L’Apothéose de Lully
William Christie, Christophe Rousset,
clavecins
HMA 1951269
Son œuvre pour le clavecin - son instrument de prédilection
- compte quelque 252 pièces réunies en quatre livres ;
partisan des “goûts réunis”, il se nourrit des influences
rigoureuses du baroque français et les agrémente de la
fantaisie mélodique des Italiens.
Les trois Leçons de Ténèbres pour le mercredy sont
les seules que nous ait laissées François Couperin ; ces
“récitations” étaient destinées à accompagner l’Office des
Ténèbres durant une nuit de la semaine sainte. Dans cet
exercice mêlant la virtuosité vocale à un profond sentiment
religieux, Couperin fait figure de maître incontesté.
Pièces de clavecin
Ordres 4, 6, 11, 13, 18, 25, 27
Leçons de Ténèbres
Christophe Rousset
Alfred Deller, Philip Todd
Raphaël Perulli, Michel Chapuis
HMX 2901885.86
HMA 195210
»Haendel Georg Friedrich
(1685 – 1759)
L
orsque Haendel naît à Halle en Allemagne en 1685,
rien dans la tradition familiale ne le prédispose à devenir
musicien, contrairement à ses contemporains D. Scarlatti
et J.S. Bach nés la même année. Il débute véritablement sa
carrière de musicien aux orgues de la cathédrale de Halle,
mais très vite, il part pour un voyage d’études de trois ans en
Italie, qui s’achève avec le succès triomphal d’Agrippina en
1709 à Venise. De retour en Allemagne, il est kapellmeister
de la cour de Hanovre, puis rejoint Londres, première ville du
monde à l’époque. Là, Haendel fait découvrir aux Anglais une
musique qu’ils ignorent encore : Rinaldo remporte un immense
succès, le 24 février 1711. En 1719, il est nommé directeur
de la Royal Academy of Music installée au King’s Theater. Va
suivre une période faste de neuf ans pendant laquelle Haendel
offre au public anglais quatorze opéras, dont Giulio Cesare
considéré comme le type le plus parfait de l’opéra à la manière
Sonates pour violon (intégrale)
Concerti grossi op.6
Andrew Manze, violon
Richard Egarr, clavecin
Les Arts Florissants
William Christie
HMX 2907259
HMA 1951507
italienne. Alors que tout semble aller pour le mieux dans la
vie de Haendel, le théâtre qu’il dirige connaît de très grosses
difficultés financières ; il décide de reprendre l’affaire à son
compte. Dès lors, pendant huit ans, il va mener un combat
perdu d’avance, ce qui ne l’empêchera pas de donner au
public encore dix-sept nouveaux opéras. En 1737, au bord de
la ruine et paralysé du bras droit, il rebondit néanmoins, plein
de ressources, en faisant de l’oratorio le nouvel instrument
de son succès, par lequel il reconquiert la faveur du public. Le
malheur rattrape cependant le vieil homme qui devient aveugle
suite à une opération manquée et meurt en 1759.
Haendel peut être considéré comme le parfait musicien
européen avant la lettre. Il a fait siennes les principales
composantes des styles français, allemand et italien de son
siècle.
Ombra mai fu
Airs et Ouvertures d’opéras
Extraits de Giulio Cesare, Admeto
Radamisto, Rodelinda, Serse, Alcina
Andreas Scholl, contre-ténor
Akademie für Alte Musik Berlin
HMC 901685
Giulio Cesare
J. Larmore, B. Schlick, B. Fink
M. Rørholm, D. Lee Ragin, F. Zanasi
D. Visse, O. Lalouette
Concerto Köln
René Jacobs
Saül
HMC 901385.87
2 CD HMC 901877.78
2 SACD HMC 801877.78
10
R. Joshua, E. Bell, L. Zazzo
J. Ovenden, G. Saks, M. Slatter
F. Bjarnason, H. Waddington
RIAS Kammerchor, Concerto Köln
dir. René Jacobs
Messiah
A. Scholl, B. Schlick, S. Piau
M. Padmore, N. Berg
Les Arts Florissants
William Christie
HML 5901498.99
Edition livre disque
Voir l’interview d’Anne
Queffélec en page 17
V. Genaux, M. Persson, I. Kalna, L. Zazzo
J. Rutherford, C. Dumaux, D. Visse
Freiburger Barockorchester
René Jacobs
HMC 901796.98
Photo Alvaro Yañez
A propos de Rinaldo
René Jacobs
Rinaldo
harmonia mundi : En 1711, Rinaldo était créé à Londres au Queen’s Theater
in the Haymarket. Avec cet opéra, Haendel souhaitait s’imposer sur la scène
londonienne et séduire ses contemporains, non seulement par une orchestration
inouïe, mais aussi par des effets de scène tirant parti des nombreuses ressources
du Queen’s Theater. Qu’est-ce qui vous a séduit dans cet opéra ?
René Jacobs : Un opéra magique fait une grande place à la magie, pas seulement
sur la scène, mais aussi dans la fosse. Haendel misait sur un maximum d’effets.
Aucun de ses opéras ultérieurs ne présente une orchestration aussi colorée, aussi
diversifiée, aussi spectaculaire. Et aucune des partitions futures ne comportera
autant de pièces instrumentales - elles accompagnent ici les métamorphoses, se
font musique de marche ou de bataille. Si le chef et ses complices jouent jusqu’au
bout le jeu des effets, ils n’y mettent aucune affectation. Dans Rinaldo, les effets
contrastent avec les affects : les lamentos touchants de Rinaldo (Cara sposa) et
d’Armide (l’air le plus poignant de l’opéra, Ah ! Crudel) forcent la compassion, et
quand Almirène chante son envoûtant lamento Lascia ch’io pianga, nous tombons
immédiatement amoureux d’elle.
Rinaldo est un divertissement dans le meilleur sens du terme. L’histoire sert de
prétexte à des numéros de virtuosité vocale, à des effets scéniques spectaculaires,
à de brillantes pièces orwchestrales - le tout aussi bigarré que possible et,
au besoin, sciemment incohérent. L’opéra n’était-il pas la drogue irrationnelle
d’un siècle épris de rationalité ? Si Armide est une magicienne, Haendel est un
magicien : pour peu que le prélude du premier acte soit joué avec esprit (presto
comme Haendel le demande, mais avec un decrescendo saisissant dans la reprise),
on voit Almirène, kidnappée, s’évanouir dans les airs. La sinfonia du troisième
acte, accompagne comme une musique de film la destruction de la terrifiante
montagne magique, à condition que les interprètes fassent entendre la signification
théâtrale des deux silences dans la partie rapide : horreur et tension.
© harmonia mundi
11
»Purcell Henry
(1659 – 1695)
N
é en 1659, Purcell connut très jeune la célébrité
et mourut dans la fleur de l’âge, dans sa trentesixième année, entouré de l’admiration de ses
contemporains. Ses funérailles solennelles furent célébrées
à l’abbaye de Westminster, dont il tint les orgues dès 1679
à la suite de Blow, avant de rejoindre la Chapelle royale en
1682. Organiste chargé de l’entretien des instruments
de musique de la cour, “compositeur ordinaire pour les
violons du roi”, Purcell trouva le temps de composer une
œuvre gigantesque dans laquelle il se révéla un mélodiste
original et un maître de la forme et de l’harmonie : parmi
ses œuvres instrumentales, de remarquables fantaisies
pour violes et des sonates en trios.
Mais c’est peut-être dans la musique vocale que Purcell
dévoila son plus grand génie. Homme de théâtre, il écrivit
Didon et Enée (1689), le premier grand opéra anglais ; cet
ouvrage met en évidence l’extraordinaire sens dramatique
de Purcell, qui transpose dans sa musique le mélange
savoureux de comique et de tragique propre au théâtre
anglais depuis la fin du xvie siècle. Avec le semi-opéra The
Fairy Queen, il porta à la scène le Songe d’une nuit d’été de
Shakespeare. Il composa également quelques très belles
pages de musique sacrée, et de nombreuses songs et
anthems. Curieusement, la musique de clavier de Purcell,
organiste et claveciniste de métier, ne représente qu’une
partie infime de son œuvre.
Musique funèbre pour la Reine Mary
Anthems, Te Deum
Music for a while
O Solitude
Collegium Vocale Gent
Philippe Herreweghe
Alfred Deller, Wieland Kuijken
William Christie
HMC 901462
HMC 90249
The Fairy Queen
Dido & Aeneas
Les Arts Florissants
William Christie
L. Dawson, R. Joshua, G. Finley
The Orchestra of the Age of Enlightenment
René Jacobs
HMC 901308.09
HMC 901683
King Arthur
Deller Consort, The King’s Musick
Alfred Deller
HMC 90252.53
Anthem : motet religieux anglican,
peut être full anthem (entièrement
choral) ou verse anthem (alternant
les voix solistes accompagnées par
l’orgue et le chœur).
Song : brève composition pour
voix seule et un instrument, genre
cultivé par les compositeurs anglais
à partir du xvie siècle.
12
Rameau Jean-Philippe
»
(1683 – 1764)
R
ameau, contemporain de Bach, Haendel
et Scarlatti (tous trois nés en 1685),
représente le classicisme français à son
apogée. Plus grand musicien du xviiie siècle, il
occupe plusieurs postes d’organiste en province
avant de se fixer définitivement à Paris en 1723.
Pendant 25 ans, il est soutenu par un généreux
mécène, le fermier général de La Pouplinière.
Mais ce n’est qu’en 1733, à l’âge de 50 ans,
que Rameau peut enfin affirmer totalement
la force convaincante de son génie créateur
en faisant représenter à l’Académie royale de
musique son opéra Hippolyte et Aricie.
Va suivre une étonnante floraison d’ouvrages
lyriques. Entre 1733 et 1745, paraissent
plusieurs chefs-d’œuvre parmi lesquels l’opéra
ballet Les Indes galantes (1733), la tragédie
lyrique Castor et Pollux (1737), Dardanus
(1739) et Platée (1745). Rameau est
également l’auteur d’une importante œuvre
pour clavecin qui comprend essentiellement
trois livres de pièces publiés à Paris entre 1706
et 1728. A sa mort, Rameau laisse derrière lui
la réputation d’un être sec, égoïste et taciturne,
notamment due à son engagement dans la
“Querelle des bouffons”. En réalité, il- cachait
une âme sensible et un goût exquis liés à une
grande intelligence. Comment imaginer qu’il
en fut autrement de celui qui écrivit : “La vraie
musique est le langage du cœur” ?
Nouvelles suites
Alexandre Tharaud, piano
HMC 901754
Pièces de clavecin en concerts
C. Rousset, clavecin
R. Terakado, violon
K. Uemura, viole de gambe
HMA 1951418
Les Indes Galantes
Les grands motets
C. McFadden, S. Piau, I. Poulenard
N. Rime, M. Ruggieri, H. Crook
J.-P. Fouchécourt, J. Corréas
B. Deletré, N. Rivenq
Les Arts Florissants
William Christie
La Chapelle Royale
Philippe Herreweghe
HMA 1951078
HMC 901367.69
Le grand motet ou motet versaillais est composé d’une
ouverture, d’un grand et d’un petit chœur entrecoupés de
préludes et interludes instru­mentaux, alors que le petit
motet est de formation plus réduite (une à trois voix et
basse continue).
La suite : parfois intitulée Ordre, Concert ou Sonade,
elle peut comporter de nombreuses danses, souvent
des rondeaux et des chaconnes, parfois des pièces de
caractère.
Castor & Pollux
H. Crook, J. Corréas, A. Mellon, V. Gens
Les Arts Florissants
William Christie
HMC 901435.37
13
Alessandro (1660-1725) - Domenico
(1685-1757)
Scarlatti
A
lessandro Scarlatti commença sa carrière
de compositeur à Rome en faisant représenter
son premier opéra, Gli Evoqui nel sembiante. En
1684, il s’établit à Naples où il composa 35 opéras et
une infinités d’œuvres de commande. Il se rendit ensuite
à Florence, Rome et Venise, pour s’installer à nouveau à
Naples en 1722. On le considère comme le plus grand
représentant de l’école napolitaine, il domina l’opéra et
la cantate de chambre à l’époque de leur plus grande
floraison, mais laissa une trace profonde également
dans la musique sacrée et instrumentale. Ses opéras
sont remarquables spécialement dans le traitement de
l’aria da capo – que l’on retrouvera dans les composition
vocales du début xviiie siècle dans l’opéra, l’oratorio
et les cantates. La Griselda est la dernière œuvre
lyrique de Scarlatti. Dans le domaine de la cantate de
chambre, il fut un compositeur insurpassable et fournit
bien des exemples à Haendel, qui écrivit des cantates
italiennes, ainsi qu’à Bach qui adopta souvent l’aria de
Scarlatti.
Formé au clavecin par son père, Domenico Scarlatti
reflète un goût prononcé pour les voyages au cours
desquels il exerce au service des cours princières et
aristocratiques : à Rome, chez la Reine Maria Camira
de Pologne, puis chez l’ambassadeur portugais à
la Cappella Giulia. Après un mariage en Italie, il est
nommé maître de la chapelle patriarcale à Lisbonne et
enseigne la musique à l’Infante Maria Barbara, fille du
roi João V. En 1728, cette dernière épouse le prince
espagnol Fernando et s’installe à Madrid. Scarlatti la
suit et y reste jusqu’à la fin de sa vie. Lorsque Maria
Barbara devient reine, il est nommé maître de chapelle.
Pendant sa longue carrière espagnole, malgré des
difficultés matérielles dues à sa passion pour le jeu,
il semble s’être consacré presque exclusivement à la
composition pour le clavecin – il écrivit 555 sonates !
Reflet de sa curiosité insatiable, son œuvre évoque une
merveilleuse diversité.
Il primio omicidio
B. Fink, G. Oddone
D. Röschmann, R. Croft
R. Jacobs, A. Abete
Akademie für Alte Musik Berlin
René Jacobs
HMC 901649.50
Griselda
D. Röschmann, L. Zazzo
V. Cangemi, B. Fink
S. Tro Santafé, K. van Rensburg
Akademie für Alte Musik Berlin
René Jacobs
HMC 901805.07
Essercizi musicali K.1-30
Alain Planès, pianoforte Schantz
HMC 901838.39
Sonates
Voir les disques Mirare en pages 18 & 19
»Maria Cristina Kiehr
Ces trois cantates nous content les amours contrariées de l’être délaissé ou
séparé par la mort - Chloris pleure Philène, Orphée a perdu son Eurydice,
Daliso déplore le départ d’Eurilla. Sur des textes d’une poésie raffinée,
Scarlatti développe une écriture élégante.
“Je privilégie la musique sacrée vénitienne du temps de Monteverdi et
les cantates peu connues d’Alessandro Scarlatti. Je suis sensible à ces
nombreuses déplorations et lamentations qui parcourent plusieurs siècles.
Tous ces compositeurs ont été, j’en suis persuadée, fascinés par le texte, le
poème, avant de composer. Chacun a voulu, à sa façon, mettre en musique
le rythme déjà présent. Comme interprète, moi aussi, je m’attache d’abord
au texte… Rares sont les compositeurs de mon répertoire qui n’ont pas
écrit de lamentations où la mort ne se manifeste pas, même si l’“excuse”
passe par le sentiment amoureux.” Extrait de l’interview de M.-C. Kiehr, Le
Monde de la Musique, février 2003
Cantates
Maria Cristina Kiehr,
soprano
Concerto Soave
Jean-Marc Aymes
Photo Alvaro Yañez
HMC 901725
14
»Telemann
Georg Philipp
(1681 – 1767)
A
Suites pour orchestre
La Bizarre, Ouverture
“Les Nations”
Concerto pour violon
Suites pour orchestre
La Chasse, Ouverture de l’Amiral
La Musette, Suite Tragi-comique
Midori Seiler, violon
Akademie für Alte Musik Berlin
HMC 901654
Quatuors parisiens n° 1-6
Freiburger BarockConsort
HMC 901787
»Konrad Junghänel
La cantate sacrée ou d’église est un genre qui se
développa surtout en Allemagne luthérienne vers la fin
du xviie siècle. Elle emprunte la forme de base de la
cantate profane italienne, née en 1620 avec Alessandro
Grandi. Les compositeurs y ajoutèrent des chorals
et des sections pour chœur, ils agrandirent le petit
groupe instrumental jusqu’à un orchestre complet, avec
instruments “obligés” ou solistes pour certains airs.
Aujourd’hui, la cantate d’église allemande de la première
moitié du xviiie siècle est devenue en quelque sorte la
référence de la cantate en général. Elle trouve ses plus
grands représentants avec Buxtehude, Telemann, et
culmine avec J. S. Bach.
On peut supposer que la plupart des œuvres réunies
dans cet enregistrement datent des années d’études
à Hildesheim et Leipzig ; seule l’une d’entre elles est
manifestement un peu plus tardive. Leur style les
situe à la charnière entre la forme ancienne de la
cantate et sa forme moderne ; certains mouvements
sont encore totalement inféodés au concert spirituel
tandis que d’autres s’essaient timidement à l’aria. Des
développements magistraux côtoient des passages
encore maladroits. Mais on retrouve partout ce sûr
instinct des lignes mélodiques et des effets de timbre,
signes distinctifs d’un compositeur pour qui le chant était
“le fondement de la musique en toutes choses”.
© Peter Wollny
Akademie für Alte Musik Berlin
Fantaisies pour violon seul
Suite “Gulliver” pour deux violons
Andrew Manze, violon
Caroline Balding, violon
HMU 907137
Trauer-Actus
Cantates
Cantus Cölln
Konrad Junghänel
HMC 901768
Photo Alvaro Yañez
Admiré dans toute l’Europe à l’époque, Telemann
a tenu dans la vie musicale d’Allemagne une place
prépondérante, et occupé des postes d’une grande
importance. Après des études de droit, il se tourne
définitivement vers la musique en prenant la direction de
l’Opéra de Leipzig. Il y fonde le Collegium Musicum, qui
organise des concerts publics et dont Bach s’occupera
plus tard lors de son arrivée dans la ville. A partir de
1721, il est directeur de la musique de la ville de
Hambourg. Il y restera jusqu’à sa mort, non sans avoir
brigué contre Bach la succession de Kuhnau à Leipzig
en 1722… A Hambourg, il compose pour toutes les
institutions musicales de la ville (musique sacrée, opéras,
musique de concert…), et crée également la première
revue musicale allemande “Le maître de musique fidèle”.
Il s’est intéressé à toutes les musiques, fréquentant le
répertoire français, les musiques populaires slaves, le
style italien, le contrepoint…
D’une productivité et d’une énergie incroyables, Telemann
a touché à tous les genres, à toutes les formations,
et laisse un catalogue de plus de six mille œuvres.
Telemann était connu comme le compositeur ayant
insufflé un esprit de légèreté dans la musique allemande.
Cet apport ne lui a pas toujours valu les éloges de ses
compatriotes. L’humour, la fantaisie et la malicieuse
gaieté de ses suites par exemple révèlent l’art d’un
compositeur qui savait aussi écrire à contre-courant.
15
Sonate a tre “La Follia”
Chiara Banchini, Véronique Méjean
Käthi Gohl, Jesper Christensen
Photo Saskia Vanderstichele
Antonio
Vivaldi
(1678 – 1741)
F
ils d’un violoniste, c’est avec lui et
avec le professeur Legrenzi (Maître de
chapelle à Saint-Marc) qu’Antonio Vivaldi
s’initie au violon. De vocation religieuse, il
est ordonné prêtre en 1703, d’où son
surnom de “Prete rosso” (“Prêtre roux”,
allusion à sa couleur de cheveux). Affecté
toute sa vie par une maladie mystérieuse, il
ne sera jamais au comble de ses capacités
créatrices. Il dispense notamment son
enseignement dans un hôpital de jeunes
filles orphelines ou abandonnées, le
Seminario musicale dell’Ospedale della
Pietà, qui produit des concerts de qualité.
Sa réputation constituée, admiré par
l’Europe entière, Vivaldi “l’impétueux”
voyage, exerce à Mantoue, à Rome où
il fait représenter ses opéras devant le
Pape ; il se déplace en Italie et à l’étranger
comme impresario de ses propres opéras,
ou comme violoniste talentueux.
Son apport musical est considérable, il
définit et impose la forme du concerto
classique qui contribuera à l’évolution de la
symphonie. Il a laissé une œuvre énorme :
près de six cent cinquante compositions
instrumentales, plus de cinquante opéras,
quatre oratorios, six sérénades, trente
cantates de chambre et une soixantaine
d’œuvres sacrées, dont un Stabat Mater
qui figure parmi les sommets vivaldiens.
Concertos
pour violoncelle
Roel Dieltiens, violoncelle
Ensemble Explorations
HMC 901655 & HMC 901745
HMC 901366
Stabat Mater
Andreas Scholl, contre-ténor
Ensemble 415
Chiara banchini
HMC 901571
Concertos pour l’Empereur
The English Concert
Andrew Manze
HMU 907332
La Folia : Créé au Portugal à la fin du xve siècle, l’air de “la Folia”
(folie, mais aussi amusement débridé en Portugais) était un air de
danse au rythme endiablé. Il inspira de nombreux compositeurs
pendant toute la période baroque, et donna lieu à véritables
chef-d’œuvres, en particulier la Sonate op.1 n°12 de Vivaldi et la
Sonate op.5 n°12 de Corelli.
16
»Roel Dieltiens
Au début du xviiie siècle, la “fièvre vivaldienne” s’est
répandue de Venise à travers toute l’Europe. Vivaldi mit
à la mode des concertos où un ou plusieurs instruments
se produisaient en soliste devant l’orchestre comme les
chanteurs à l’opéra. La manière dont Vivaldi ensorcela son
auditoire lorsque lui-même jouait du violon a ainsi traversé
les âges et continue d’ensorceler le public d’aujourd’hui.
“Non, Vivaldi n’a pas composé six cents fois le même
concerto”, affirme Roel Dieltiens, “et sa musique n’est
pas destinée aux ascenseurs et aux supermarchés !”*.
Avec les concertos pour violoncelle, Roel Dieltiens nous fait
entendre avec son Ensemble Explorations un Vivaldi plutôt
inattendu, intime, loin de l’exercice de style. “Les œuvres
pour le violoncelle sont très différentes de celles, beaucoup
plus célèbres, pour le violon. Lui-même violoniste virtuose,
il poussait son instrument jusqu’à ses dernières extrémités
[...] Avec le violoncelle, il se comporte moins en diva. Il lui
destine une musique plus intime, plus émouvante.”
*Propos recueillis par François Lafon, Le Monde de la
Musique, mars 2002
»
Anne
Queffélec
joue Haendel
Anne Queffélec : Je garde une tendresse particulière pour
Scarlatti que j’ai eu grand bonheur à enregistrer à vingt ans.
Ce premier disque a connu une belle carrière, il reparaît
régulièrement. Je n’ai jamais cessé, depuis, de jouer en
concert Scarlatti dont la clarté, la technique, l’esprit peuvent
se rapprocher de Mozart. Le répertoire pianistique, d’une
richesse infinie, fait voyager les interprètes dans de multiples
univers qui s’enrichissent les uns les autres. Je n’ai jamais
cherché à me spécialiser dans un domaine précis même si,
bien sûr, je me sens des affinités avec certaines œuvres en
particulier. C’est René Martin qui m’a proposé d’enregistrer
pour Mirare des suites de Haendel. Je les écoutais souvent
dans ma jeunesse, elles m’enchantaient déjà !
“ J’ai été émerveillée par la générosité
du monde de Haendel, sa jubilation
solaire, sa profondeur tragique,
sa délicatesse, sa poésie.”
Photo Vincent Garnier
harmonia mundi : Vous avez enregistré Scarlatti au piano au
début de votre carrière, puis on vous a connu dans Mozart,
Beethoven, Liszt ou encore Satie. Qu’est-ce qui vous a amené
à revenir au répertoire baroque et vous tourner aujourd’hui
vers Haendel ?
aimé qu’on les joue au piano ! Cela dit, j’ai pris conseil
auprès d’amis clavecinistes, qui approuvaient ce projet et ne
montraient aucune défiance envers l’animal piano !
h.m. : Le choix de l’instrument a-t-il important dans ce
projet ?
A.Q. : Le choix de l’instrument est toujours important,
quelque soit le répertoire abordé. J’ai eu la chance de trouver,
pour ce disque, un piano magnifique de subtilité, au clavier
léger, d’une grande égalité de son, chantant et rayonnant.
Cela représente, naturellement, un atout considérable lors
d’un enregistrement. Avoir confiance en l’instrument est
source d’inspiration, une complicité mystérieuse s’installe,
qui s’entend. C’est ce que j’espère !
© propos recueillis pour harmonia mundi, décembre 2005
h.m. : On découvre dans ce disque des œuvres peu
enregistrées. D’une certaine manière, on y retrouve aussi
toute l’Europe de cette époque. Comment avez-vous conçu
ce programme ?
A. Q. : En effet, Haendel, compositeur allemand né en 1685, la
même année que J.S. Bach et D. Scarlatti, Anglais d’adoption
par ailleurs, représente la synthèse de plusieurs courants
musicaux, alliant la puissance de Bach, sa connaissance du
contrepoint et la vitalité étincelante, ensoleillée de l’Italien
Scarlatti qui lui-même avait subi l’influence de la musique
espagnole et vécu au Portugal ! J’ai conçu ce programme
en cherchant à rassembler des pièces (suites ou extraits)
très variées dans leur caractère et leur écriture (variations,
fugues ou danses, gigues allemandes, sarabandes, etc…).
J’ai été émerveillée au fur et à mesure de mon parcours par
la générosité du monde de Haendel, sa jubilation solaire (par
exemple, la chaconne en sol Majeur), sa profondeur tragique
(suite en fa dièse mineur), sa délicatesse, sa poésie.
h.m. : Comment ressentez-vous le fait de jouer au piano
des œuvres écrites pour le clavecin ?
Nouveauté
Haendel
Œuvres pour piano
Anne Quéffelec, piano
MIR010
A.Q. : Très bien … ! L’esprit baroque est esprit de liberté. Je
suis bien certaine que les trois “grands” de 1685 auraient
17
Mirare
Conversation avec Pierre
sur la musique de Scarlatti
Quelle est la singularité de la musique de
Scarlatti selon vous ?
Pierre Hantaï : Lorsque l’on parle de Scarlatti,
on évoque toujours en premier lieu l’influence
que la musique populaire a eue sur lui et il est
évident que, dans son cas, cet apport a été
déterminant. En ce qui me concerne, ce côté
folklorique n’est pas ce qui constitue l’aspect
le plus singulier chez lui. Le plus curieux,
le plus éminemment personnel, c’est cette
manière de brosser des petits tableaux, de
rendre des climats variés par la répétition de
courts motifs tournants sur eux-mêmes et
enchaînés sans transition les uns aux autres,
sans beaucoup d’intérêt pour le détail.
Comment expliquez-vous sa marginalité ?
Photo Franck Ferville
P. H. : C’est en fait le destin même de
Scarlatti qui est singulier. Jeune homme,
c’est un musicien bien conventionnel, il ne
fait que suivre des chemins maintes fois
empruntés. Un peu d’Alessandro Scarlatti,
un peu de Vivaldi, son style n’a rien de
18
Hantaï
personnel ni de particulier. C’est ce qui
apparaît encore dans ce qui semble être ses
premières sonates. Il est impossible de dire
ce que fut l’étincelle qui, chez lui, provoqua
la naissance d’une inspiration aussi riche,
individuelle, que tardive : la mort de son père,
la musique populaire espagnole, l’arrivée d’un
nouvel instrument (le pianoforte), un mariage
heureux, l’utilisation du tempérament égal…
Votre amour pour cette musique vous amènerat-il vers une intégrale discographique ?
P. H. : Surtout pas. […] Les intégrales
sont un cadeau empoisonné que l’on fait
aux compositeurs, en rendant l’écoute de
leur musique fastidieuse, voire impossible.
L’interprète doit choisir, et choisir le meilleur.
Et accepter qu’on ne peut obtenir l’excellence
en tout.
© Mirare, propos recueillis par Christophe
Robert (extraits du livret du disque Scarlatti,
Sonates vol.3 MIR007)
D. Scarlatti
D. Scarlatti
D. Scarlatti
Sonates vol.1
Sonates vol.2
Sonates vol.3
Pierre Hantaï, clavecin
Pierre Hantaï, clavecin
Pierre Hantaï, clavecin
MIR9918
MIR9920
MIR007
Offre exceptionnelle
sur le catalogue baroque mirare 35%
du 19 janvier au 31 mars 2006
O
n connaît les talents de René Martin comme organisateur de concerts et pour la complicité qu’il entretient
avec les artistes. Du Festival International de Piano de la Roque d’Anthéron à la Folle Journée de Nantes, il
développe des programmations originales et audacieuses. En 2001, il se lance dans l’édition phonographique
en créant Mirare ; là, le projet artistique est roi, chaque production relève de l’aventure et de la passion musicale
et humaine. Les musiciens prennent le temps de repenser, peaufiner, recommencer s’il le faut, ciseler leur
travail pour le mener à un aboutissement et une exigence de perfection uniques.
J.S. Bach
Variations Goldberg
Nouveauté
Pierre Hantaï, clavecin
Telemann
Concertos
MIR9945
Stradivaria
Daniel Cuiller
MIR011
J.S. Bach
Pergolesi
Actus Tragicus
Stabat mater
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
Carlos Mena, Nuria Rial
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
MIR002
MIR006
A. Bertali
A.Vivaldi
Sonates
Stabat mater
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
Carlos Mena
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
MIR9969
MIR9968
F. Couperin
De Aeternitate
Concerts Royaux
Carlos Mena
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
Stradivaria
Daniel Cuiller
MIR005
MIR9911
J.S. Bach
Sopra la rosa
le clavier bien tempéré I
Ariana Savall
Ricercar Consort
Philippe Pierlot
Pierre Hantaï, clavecin
MIR9930
MIR9931
19
E
T
U
E
R
IÈ
N
I
M
N
R
E
D
harmonia mundi
2006
classical label of the year
En 2006, redécouvrez chaque mois des enregistrements essentiels du
catalogue harmonia mundi à moitié prix (Coffrets 2 CDs pour le prix d’1).
Bach Sonates pour violon • Bach concertos pour clavecin • Bach Cantates à Leipzig • Bach Albachisches
Archiv Bach Messe en si • Bach Passion St Jean • Caldara Maddalena ai piedi di Cristo • Corelli Sonates op.5
Geminiani Concerti grossi • Gluck Orfeo e Euridice • Haendel Concerti op.6 • Haendel Siroe • Literes Jupiter e
Semelé • Lully Armide • Mendelssohn Paulus • Monteverdi Madrigaux Livre VIII • Monteverdi Orfeo • Purcell King
Arthur • Purcell Fairy Queen • Ravel l’œuvre pour piano • Scarlatti Il primio omicidio • Schütz Psaumes de David
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(colisage 50 exemplaires)
w w w. h a r m o n i a m u n d i . c o m / E - m a i l : i n f o . a r l e s @ h a r m o n i a m u n d i . c o m
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