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actifs 10 Cas pratique semaine du 3 au 9 juin 2011 - n°496 www.agefiactifs.com Owner buy-out Une alternative à la vente au service du dirigeant-actionnaire u L’OBO peut constituer une alternative à la vente de la société, en particulier dans un climat économique tendu où les repreneurs industriels se raréfient u Il faut cependant veiller à trouver un équilibre entre les aspects stratégiques, patrimoniaux, financiers, fiscaux et juridiques P renons la situation d’un dirigeant application et de trouver un équilibre enet actionnaire (le « fondateur ») tre les aspects stratégiques, patrimoniaux, d’une PME prospère et en pleine financiers, fiscaux et juridiques. croissance, qui n’envisage pas de prendre sa retraite dans un proche aveLES PRINCIPAUX LEVIERS nir, mais souhaite néanmoins, après des années d’efforts consacrées au développeLe principe de l’OBO permet d'endetter ment de son entreprise, à la fois réaliser une société « holding » (holding de repriune partie de son actif professionnel pour se) créée pour l'occasion afin d'acquérir la sécuriser sa situation patrimoniale per- société, que l'on appellera « société cible » sonnelle, encourager la montée en puis- (voir le graphique p. 11). sance d’une équipe de cadres dirigeants et doter sa société Exemple. Prenons de moyens finanl’exemple d’une ciers et humains société réalisant un nouveaux en vue de résultat avant imPour un dirigeant, l’« owner buy-out » pôt de 7 millions consolider sa posipeut avoir comme objectifs majeurs tion dans son secd’euros valorisée de réaliser une partie de son actif 5 0 m i l l i o n s ( 7 x teur d’activité. professionnel pour sécuriser sa situation La cession imméEbit). Le fondateur patrimoniale et encourager la montée en diate de la société, envisage de réalipuissance d’une équipe de cadres dirigeants. dans une telle situaser son actif à hauLorsqu’il n’envisage pas de prendre teur de 20 millions tion, constituerait à sa retraite, cette solution est plus pertinente l’évidence une réd’euros (cash-out), que la cession de la société, à condition soit 40 % du capital ponse inappropriée d’instaurer un rapport de partenariat entre car prématurée. de sa société. Un lui-même, les managers et les investisseurs. partenaire finanCependant, l’opération devra être étudiée Cadre d’un OBO. cier, intéressé pour de manière approfondie au cas par cas A l t e r n a t i v e m e n t, entrer au capital de sous tous ses aspects, et notamment le fondateur pourcette société, se dédans ses implications patrimoniales et fiscales. ra alors envisager clare prêt à investir d’ouvrir le capital 11 millions d’euros. de sa société, tout en demeurant l’action- Une banque accepte de prêter le solde de naire majoritaire, à ceux des cadres de la 9 millions. société identifiés comme « hommes clés » Le fondateur apportera à la holding de et à des investisseurs en capital (« parte- reprise le solde des actions qu’il détient pour naires financiers ») qui vont lui permettre une valeur de 30 millions. Parallèlement, un de capitaliser sur son actif et vont l’accom- schéma juridique sera mis au point pour pagner dans le développement futur de permettre aux cadres dirigeants d’accéder sa société dans le cadre d’une opération au capital de la holding de reprise. d’OBO (owner buy-out). L’OBO est l’une Dans cet exemple, le capital de la holdes nombreuses formes de LBO (leveraged ding de reprise (41 millions d’euros) sera buy-out), mise ici au service du dirigeant détenu à 73,2 % par le fondateur et à 26,8 % par le partenaire financier. Le cashet actionnaire. Comme dans tout LBO, l’OBO mettra out de 20 millions réalisé par le fondateur en présence quatre acteurs principaux : sera financé à hauteur de 11 millions par le - le fondateur (dirigeant et actionnaire ma- partenaire financier et de 9 millions par la joritaire de la cible) ; dette bancaire. - le partenaire financier (investisseur en Cette opération permet au fondateur capital) ; de céder 40 % du capital de sa société tout - les cadres dirigeants ; en restant actionnaire à plus de 73 % de la - la banque prêteuse. holding de reprise. Si, de prime abord, il n’est pas évident que les intérêts propres de chacun de ces Trois effets de levier. L’effet de levier (« leveintervenants se rejoignent, il se trouve rage ») lié à la dette bancaire est ici de trois que la France offre (encore) un environ- ordres : nement juridique et fiscal qui permet de - le levier financier : le partenaire financier a faire converger les intérêts des uns et des pu acquérir 26,8 % du capital d’une société autres, sous réserve d’en faire une juste valorisée 50 millions d’euros en n’appor- Points clés tant que 11 millions. Pour la même somme investie dans la cible, sans endettement bancaire, le partenaire financier n’aurait acquis que 21,5 % de la cible. Le levier financier est ici très prudent (une dette de 9 millions pour un Ebit de 7 millions) et pourrait être amélioré sans prendre de risque inconsidéré. - le levier juridique : le fondateur continuera de détenir une forte majorité au capital de la holding de reprise (73,2 %) alors qu’il a cédé 40 % du capital de la cible. Le pourcentage de participation du fondateur à la holding de reprise sera, le cas échéant, réduit à concurrence de l’entrée au capital des cadres dirigeants. - le levier fiscal : l’option pour l’intégration fiscale entre la holding de reprise et la cible qu’il détient à 100 % permettra de compenser les intérêts sur la dette bancaire et les résultats bénéficiaires de la cible (sous réserve de l’application de l’amendement « Charasse », lire ci-après). LES CLÉS DU SUCCÈS Il est nécessaire d’avoir un projet d’entreprise partagé entre le fondateur, les managers et les investisseurs pour instaurer un véritable rapport de partenariat. Partenariat stratégique. Développement de nouveaux produits, recherche et développement, ouverture sur de nouveaux marchés, marketing, investissements significatifs, opérations de croissance externe… Si, de prime abord, il n’est pas évident que les intérêts propres de chacun de ces intervenants se rejoignent, il se trouve que la France offre (encore) un environnement juridique et fiscal qui permet de faire converger les intérêts des uns et des autres, sous réserve d’en faire une juste application Partenariat humain. Définition d’un nouvel équilibre au sein de l’équipe dirigeante présentant des compétences en adéquation avec le projet d’entreprise. L’OBO sera le L'expert Joris Chaumont, avocat, spécialiste en droit fiscal, Fidufrance Avocats plus souvent une étape dans la vie de l’entreprise permettant aux cadres de l’entreprise d’accéder au capital soit immédiatement (apports en capital rémunérés par des titres de la holding), soit de manière différée (attribution de bons de souscriptions d’actions, de bons de créateurs d’entreprise, attribution de stock-options ou d’actions gratuites). L’OBO sera alors envisagé comme un moyen d’assurer la transition entre l’actuel dirigeant et la montée en puissance d’une nouvelle équipe dirigeante, en mesure de prendre sa succession lorsque le dirigeant actuel décidera de se retirer (par exemple à la sortie de l’OBO). Définition des rôles respectifs du fondateur, des managers et des investisseurs : l’arbitrage retenu déterminera en premier lieu la forme sociale du holding de reprise (SA ou SAS) et l’organisation du pouvoir (système moniste ou bicéphale, droits de véto…). Les statuts seront nécessairement complétés par un pacte d’actionnaires qui aura pour objet de fixer non seulement les règles de gouvernance, mais aussi les règles de sortie de l’OBO (clauses de cession libre et d’incessibilité, clause antidilution, pouvoir d’initier la cession future du contrôle de la société, droit de préemption, clause de sortie conjointe ou « tag along », obligation de sortie conjointe ou « drag long », clause de liquidité, clauses de « good » et « badleaver » …). Cible bénéficiaire. La société cible doit bien entendu être une société bénéficiaire mais, au-delà, elle doit aussi recéler une réserve de croissance à moyen terme pour offrir à l’investisseur financier la perspective d’un rendement supérieur aux taux bancaires. Partenariat financier : choix de participer à une opération que les investisseurs jugent rentable en prenant un risque maîtrisé, actifs 11 semaine du 3 au 9 juin 2011 - n°496 dans laquelle le projet d’entreprise continue d’être porté par le dirigeant actuel (spécialisation des investisseurs par secteurs d’activité). LA FISCALITÉ DE L’OBO Conséquences fiscales immédiates. - Titres cédés. La cession des titres de la cible par le fondateur entraînera l’imposition de la plus-value ainsi réalisée à l’impôt sur le revenu au taux de 19 %, à laquelle s’ajouteront les prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement social) au taux de 12,3 %, soit un taux global de prélèvements de 31,3 %. - Titres apportés. La plus-value attachée aux titres de la cible apportés à la holding de reprise bénéficie d’un sursis automatique d’imposition (art. 150-0B du CGI). En contrepartie, le fondateur devra ultérieurement calculer la plus-value de cession des titres de la holding de reprise et acquitter l’impôt correspondant par différence avec la valeur qu’avaient les titres de la cible à la date de réalisation de l’OBO. - Donation de titres. A l’occasion d’un OBO, le fondateur pourra saisir l’opportunité qui lui est ainsi donnée de transmettre une partie de son patrimoine à ses enfants en effectuant des donations de titres, sans aucune fiscalité si la valeur des titres donnés n’excède pas le montant de l’abattement applicable sur les donations en ligne directe, soit 159.325 euros par enfant en 2011. Il privilégiera la donation de titres de la cible (préalablement à l’OBO) à ses en- www.agefiactifs.com de la validité de la donation par l’administration fiscale. Par ailleurs, la donation suppose une réelle intention libérale, qui interdit tout mécanisme qui permettrait au donateur de se réapproprier ultérieurement le produit de la vente des titres donnés. Conséquences fiscales pour le groupe formé par la holding et la cible. - Intégration fiscale. La holding de reprise détenant 100 % du capital de la cible peut valablement opter pour le régime de l’intégration fiscale. Dans ce régime, où les sociétés membres sont vues comme une seule entité fiscale au regard de l’impôt sur les sociétés, les déficits de la holding liés aux intérêts sur la dette d’acquisition vont être compensés avec les profits de la cible, limitant ainsi la charge fiscale du groupe. Les effets de l’intégration fiscale sont cependant atténués dans le cadre d’un OBO en application d’un dispositif antiabus connu sous le nom « d’amendement Charasse », qui interdit la déduction des intérêts du groupe pendant neuf ans lorsque la société a été acquise auprès des actionnaires qui contrôlent le groupe (hypothèse du « rachat à soi-même »), ce qui est précisément la situation dans un OBO où le fondateur demeure majoritaire. Il faut cependant observer que les effets du dispositif anti-abus sont eux-mêmes atténués à concurrence du cash apporté en capital par le partenaire financier. - Exonération des dividendes versés à la holding. Le remboursement de la dette bancaire logée dans la holding de reprise sera Le principe de l'« owner buy-out » Point de départ Après OBO Fondateur Cible Cadres Apport + cession des titres de la cible principalement assuré par les dividendes mis en distribution par la cible. Ces dividendes seront (à condition que les titres soient conservés au moins deux ans par la holding) exonérés d’impôt sur les sociétés en application du régime mère-fille, seule une quote-part forfaitairement fixée à 5 % du dividende reçu demeurant imposable à l’impôt sur les sociétés, soit un taux effectif d’impôt de l’ordre de 1,7 %. - « Activation » de la holding de reprise. La mise en œuvre du LBO induira nécessairement des frais correspondant principalement aux honoraires de conseils (avocats, intermédiaires ayant permis la mise en relation entre le fondateur et le partenaire financier…), honoraires du commissaire aux apports…, qui vont être facturés à la holding de reprise. Ces frais seront facturés par les différents prestataires avec de la TVA. Cette TVA ne pourra être récupérée par la holding que si celle-ci exerce une activité assujettie à la TVA. Il conviendra en conséquence, et dans la mesure du possible, de doter la holding de reprise d’une Capital Investisseurs Dette Holding de reprise 100 % Dividendes Cible Source : Fidufrance Avocats activité consistant dans la fourniture à la cible de prestations de services (assistance administrative, financière, comptable, ressources humaines…). - Sécurisation de l’outil de travail au regard de l’ISF. Si la holding est destinée, comme dans la plupart des LBO, à accueillir et à rémunérer l’équipe dirigeante (le fondateur, les cadres de direction et le partenaire financier), la préservation de l’exonération d’ISF du fondateur au titre de l’outil de travail impliquera que la holding assume un rôle d’animation de sa filiale (et, le cas échéant, des nouvelles filiales qui viendraient à être créées ou acquises). Ce rôle trouvera sa traduction dans la conclusion d’une convention d’animation dans laquelle sera précisément définie la nature A l’occasion d’un OBO, le fondateur pourra saisir l’opportunité qui lui est ainsi donnée de transmettre une partie de son patrimoine à ses enfants en effectuant des donations de titres, sans aucune fiscalité si la valeur des titres donnés n’excède pas le montant de l’abattement applicable sur les donations en ligne directe, soit 159.325 euros par enfant en 2011 fants majeurs. Les titres reçus seront cédés par les enfants à la holding de reprise, leur permettant ainsi d’appréhender immédiatement une partie du cash-out. En présence d’enfants mineurs pour qui l’appréhension immédiate du cash semble moins opportune, le fondateur pourra opter pour la donation de titres de la holding de reprise (postérieurement à l’OBO), sous réserve que cette faculté ait été acceptée par le partenaire financier. Cette donation aura pour effet de « purger » la plus-value en sursis d’imposition constatée lors de l’apport des titres de la cible à la holding de reprise. La donation des titres de la holding pourra en outre, si la durée de vie envisagée de l’OBO est d’au moins six ans, être consentie dans le cadre d’un engagement collectif de conservation des titres (« pacte Dutreil »), et ainsi bénéficier d’un abattement supplémentaire de 75 % sur la valeur de la donation. Lorsque les titres donnés sont ceux de la cible, la donation devra intervenir en amont de tout accord ferme et définitif sur la vente des titres pour éviter toute remise en cause Fondateur des prestations fournies par la holding à sa/ses filiale(s) et par la facturation de prestations de management à ces dernières (« management fees »). - Taxe sur les salaires. Cette taxe est due par les sociétés dont au moins 90 % du chiffre d’affaires n’est pas assujetti à la TVA, comme ce sera le plus souvent le cas de la holding de reprise. En effet, les recettes de la holding assujetties à la TVA (prestations de services) représenteront la plupart du temps une part marginale en comparaison des produits situés hors du champ d’application de la TVA (dividendes). Si cette problématique mérite un examen approfondi au cas par cas, il convient d’observer que le meilleur moyen de limiter le coût de la taxe sur les salaires demeure à ce jour la constitution de secteurs distincts d’activité, un secteur « financier » pour la perception des dividendes et un secteur « commercial » correspondant aux prestations de services, chacun des deux secteurs se voyant doter de moyens humains spécifiques. Dans un tel cas de figure, seules les rémunérations versées au personnel affecté au secteur financier seront assujetties à la taxe sur les salaires, tandis que les rémunérations versées au personnel affecté au secteur commercial (équipe dirigeante) y échapperont. Voici en synthèse les principales problématiques fiscales soulevées à l’occasion d’un OBO. Chacune d’entre elles et d’autres, non évoquées ici, devront bien entendu faire l’objet d’un examen approfondi au cas par cas, en fonction des accords conclus entre les parties (contrat de cession d’actions, garantie d’actif et passif consentie par le fondateur sur les titres cédés à la holding, pacte d’actionnaires, contrat de prêt…). Conclusion. L’OBO peut constituer une alternative à la vente de la société, en particulier dans un climat économique tendu où les repreneurs industriels se raréfient, sous réserve cependant d’en prévoir une juste application, c’est-à-dire de trouver un équilibre entre les aspects stratégiques, patrimoniaux, financiers, fiscaux et juridiques. L’OBO n’est qu’une étape dans la vie de la société cible, appelée à durer entre trois et sept ans selon la croissance de la société et les opportunités de cession futures. Les clauses de liquidité prévues dans le pacte d’actionnaire des partenaires financiers ne doivent pas entraîner la mise en vente obligatoire de l’entreprise à un moment que le fondateur ne jugerait pas opportun. A l’issue de l’OBO, la société doit en ressortir au moins aussi forte qu’à l’entrée. En aucun cas l’OBO ne doit se faire au détriment du développement de l’entreprise. Il devra au contraire avoir permis d’en renforcer la croissance. Dans ces circonstances, la sortie de l’OBO offrira au fondateur le choix entre plusieurs voies : la cession de la totalité de sa participation en même temps que son partenaire financier pour réinvestir le produit de la vente dans de nouvelles activités ou pour en jouir à titre personnel s’il décide de prendre sa retraite, le rachat de la participation de son partenaire s’il décide de poursuivre seul, ou bien encore la participation à un OBO « secondaire » avec un nouveau partenaire traduisant une volonté plus affirmée de désengagement du fondateur au profit de l’équipe dirigeante dont il aura favorisé l’accession au capital. n