En préambule à mes propos, je tiens avant tout à

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En préambule à mes propos, je tiens avant tout à
En préambule à mes propos, je tiens avant tout à vous
présenter tous mes meilleurs voeux pour cette année 2015, et
tout particulièrement au personnel de greffe sans lequel le
Conseil ne pourrait fonctionner. Je tiens à le remercier pour le
travail accompli avec sérieux et compétence.
J'ai également une pensée toute particulière en ce moment
précis pour Hubert Prieur, conseiller salarié de la section
encadrement, qui aurait dû prendre place aujourd'hui à cette
tribune et qui a disparu brutalement il y a quelques semaines,
une pensée également pour Mylvia Houguet, conseillère
salarié de la section Activités Diverses, qui vient de perdre de
manière dramatique son conjoint ce jeudi 7 janvier 2015 et qui
se retrouve seul avec son fils de 8 ans, et enfin une pensée
pour tous ceux qui ont été froidement abattus lors de la
fusillade de Charlie Hebdo ce mercredi 6 janvier 2015 et, avec
le président du Conseil, nous avons pensé qu’annuler le buffet
de ce jour comme préconisé par la chancellerie n’aurait pas du
tout correspondu à l’état d’esprit de ces malheureux disparus.
Je tiens à remercier très sincèrement tous les conseillers
salariés qui m'ont élu Vice Président du Conseil de
prud'hommes de Montpellier ainsi que mon organisation
syndicale pour son entier soutien.
Merci également à toutes les personnalités, Chefs de Cour,
bâtonnier, élus, magistrats et avocats présents à cette audience
solennelle. Votre présence témoigne de l'intérêt que vous
portez à notre juridiction, et elle a plus que jamais besoin de
votre entier soutien.
Dans le droit social français, quand un employeur décide de se
séparer d’un salarié, il doit motiver le ou les différents griefs à
son encontre dans la lettre de licenciement, conformément à
l’article 158 de l’Organisation Internationale du Travail. Les
pouvoirs publics, lorsqu’ils veulent démanteler notre
juridiction prud'homale, font de même en présentant différents
griefs prétendant démontrer ses insuffisances. Quels sont ces
griefs?
1er grief : La juridiction prud'homale est une justice
trop lente et la justice professionnelle est plus rapide
Cela est faux même si, pour les justiciables, la réponse à
leurs différentes demandes ne sera jamais assez rapide, et
cela se comprend aisément. Dans la réalité, au niveau
national, une affaire sans demande de renvoi des parties
et sans recours au juge départiteur et à la Cour d'Appel
est évacuée en 15,9 mois. Dans notre Conseil de
prud’hommes de Montpellier, ce délai d’évacuation est
de 15,4 mois. Ces délais sont raisonnables.
Ce qui allonge les délais de jugement, ce sont les
multiples demandes de renvoi des parties devant le
bureau de jugement, la plupart du temps pour des pièces
et conclusions échangées parfois la veille ou l’avantveille, et certaines affaires font l’objet de plusieurs
renvois. Devant notre Conseil de prud’hommes, le taux
de renvoi est d'environ 30 %. La juridiction prud'homale
est-elle responsable de cet état de fait ? Nous disons
NON.
Il est faux de dire que la justice professionnelle est une justice
plus rapide :
En effet :
. L’article L 1454-2 du Code du travail dispose qu’une affaire
envoyée en départage doit être entendue dans le mois qui suit
le prononcé du bureau de jugement. Qu’en est-il réellement ?
Dans notre Conseil de prud’hommes, c’est + d’1 an après ce
prononcé.
. Une affaire envoyée devant la Cour d’Appel de Montpellier
est entendue plus de 2 ans après sa saisine, et cette même
Cour d’Appel de Montpellier proroge même sans date fixe des
prononcés de jugement et a actuellement plus de 4 000 affaires
en souffrance !!!
Comment peut-on faire croire alors que la justice
professionnelle, si elle était instaurée dans les Conseils de
prud’hommes, par l’échevinage, rendrait subitement ses
décisions dans des délais raisonnables alors qu’elle est
incapable de les respecter aujourd'hui ?
2e
grief : Les taux de conciliation sont trop bas
Les conseillers prud’hommes sont-ils responsables du fait
que les parties ne viennent le plus souvent devant le
bureau de conciliation que pour se voir attribuer une date
devant le bureau de jugement ? Et les conseillers se
voient opposer tellement de résistances lorsqu’ils ont la
volonté de remplir leur mission correctement, en
nommant par exemple dès le bureau de conciliation des
missions de conseillers rapporteurs, qu’ils finissent par y
renoncer !!!
Pourtant les textes législatifs existants donnent de réels
pouvoirs aux conseillers dès la phase de conciliation mais
encore faut-il que les conseillers des 2 collèges soient
correctement formés et aient la volonté de s'en emparer !
D’autre part, une analyse sérieuse des taux de
conciliation devrait prendre en compte les affaires qui
sont envoyées de bureau de conciliation en bureau de
jugement et qui n’arrivent jamais devant ce dernier, un
accord ayant eu lieu entre les parties auparavant. C’est le
plus souvent la phase de conciliation qui, en permettant
aux parties de se rapprocher, leur a permis d’aboutir à un
règlement de leur litige.
3e
grief : Les taux d’appel des jugements prud’homaux
sont trop importants :
Au niveau national, les taux d’appel des décisions
prud’homales sont de 66,2 % et, au niveau de notre
Conseil de prud’hommes de Montpellier, ils sont de 25,1
%, référés compris. Mais ces appels sont inhérents à une
1ère instance où les justiciables, demandeurs ou
défendeurs, ne s’estiment jamais remplis complètement
de leurs droits. Et l’instauration de l’échevinage n’y
changerait rien, preuve en est du taux d’appel sur les
décisions du juge départiteur qui est de 31,8 %.
Ces griefs à l'encontre de la justice prud'homale ne sont
donc ni réels ni sérieux et les responsables de ce projet de
réforme feraient bien d'écouter davantage les arguments
apportés par les juges du terrain pour une vraie
amélioration de la justice du peuple.
Concernant les élections prud'homales, dire que le fort taux
d'abstention et leur coût trop important sont des arguments
objectifs pour les supprimer est une aberration, ou alors il faut
également supprimer les élections cantonales, européennes,
qui mobilisent peu d’électeurs et qui coûtent plus que les
élections prud’homales. La démocratie a un coût qu’il faut
savoir assumer.
Mettre en place la désignation des conseillers prud’hommes en
fonction de la représentativité syndicale obtenue lors des
élections professionnelles va contribuer à exclure plusieurs
millions de salariés qui ne peuvent pas se prononcer, soit car
ils sont privés d’emploi soit car aucune instance représentative
du personnel n’est présente dans leur entreprise. Et cette
représentativité syndicale, si elle peut s’appliquer aux
conseillers du collège salarié, ne peut s’appliquer aux
conseillers du collège employeur, cette représentativité
n’ayant pas été mesurée pour eux. Que devient alors la parité
si chère à la justice prud’homale?
Concernant le rapport Lacabarats soumis à
l'avis du Conseil Supérieur de la Prud'homie
(CSP):
Sur la conciliation et les nouveaux pouvoirs qui seraient
donnés à ce bureau, le ver est dans le fruit, l'échevinage
rampant est organisé dès la conciliation.
La procédure telle qu'elle est proposée en conciliation ne
répond pas à la volonté maintes fois exprimée d'améliorer le
taux de conciliation, pire, elle supprime les missions dévolues
au conseiller rapporteur en les faisant disparaître à ce stade de
la procédure.
Il nous aurait paru de bon sens que, dans le cadre d'une
conciliation, les deux parties soient présentes, d'où notre
proposition de restreindre les cas où le motif légitime
d'absence serait invoqué par l'employeur pour ne pas venir
devant le bureau de conciliation, et donc rendre la conciliation
plus difficile.
Le projet n'aborde pas la question à moins qu'il n'y ait un autre
rapport, voire d'autres propositions tant il est vrai qu'on ne sait
plus qui fait exactement quoi dans ce dossier, le Travail, la
Justice, ou les Finances !
Instaurer dès la conciliation deux voies supplémentaires
au simple renvoi devant le Bureau de Jugement (BJ) ne
va pas servir à clarifier la procédure, si tant est que les
Conseils de prud'hommes disposent de moyens pour les
mettre en place. La question qui demeure est: - que
reste-t-il de la procédure normale, c'est à dire renvoi au
bureau de jugement composé de 4 conseillers?
Première proposition du rapport :
Le Bureau de Conciliation (BC) peut, avec l'accord
des parties, en raison de la nature de l'affaire, la
renvoyer devant le BJ en formation restreinte,
composé de deux conseillers prud'hommes, un
employeur et un salarié.
Ce BJ statue dans un délai de 3 mois (voilà un
nouveau délai dont on connaît l'efficacité textuelle
au regard du mois jamais tenu, prévu pour
l'audience de départage!!)
En cas de partage sur cette proposition, renvoi
devant le juge départiteur
Plus qu'une question de procédure, c'est le fond de
cette proposition qui pose problème, avec le
renvoi devant un bureau de jugement composé
uniquement de deux membres dont on ne saisit
pas la pertinence juridique, sauf à considérer que
l'on veut amoindrir le débat démocratique dans le
cadre d'un délibéré, et le possible renvoi devant le
juge départiteur, tout cela conduisant à une source
éventuelle de conflit entre les conseillers et donc
aboutissant à un échevinage un peu plus présent.
Deuxième proposition du rapport :
Le Bureau de Conciliation peut d'office, en raison
de la nature du litige, renvoyer l'affaire devant le
juge départiteur, (mais qui a-t-il à départager à ce
stade ?)
Renvoi de plein droit si les parties le demandent
Renvoi de plein droit en cas de partage sur cette
demande
Le renvoi devant le bureau de jugement «normal»
deviendrait donc exceptionnel. En réalité, ce
projet concernant la conciliation n'apporte aucune
amélioration,
complexifie
volontairement
la
procédure, et lance un ballon d'essai de
l'échevinage.
Nous nous opposons fermement à cette
procédure et demandons que soit étudié ce
qui renforcerait la présence effective des
parties en conciliation.
Sur le regroupement des affaires :
Des affaires similaires portées devant plusieurs Conseils de
prud'hommes relevant de la même Cour d'Appel pourraient être
regroupées sur un seul Conseil afin d'être jugés ensemble par les
mêmes juges, lorsque cela apparaît nécessaire.
Ce projet comporte trop trop d'incertitudes, trop d'à peu
près, et délègue trop de pouvoirs à celui qui décide du
CPH compétent, et surtout remet en cause le choix du
justiciable quant à son juge, qui pourrait, de fait, être
très éloigné du domicile du salarié, et donc remettre en
cause son accessibilité.
Sur le rôle du juge départiteur:
Concernant le rôle accru du juge professionnel
(départiteur) au-delà du rôle qui lui est dévolu
dans ce rapport dès la conciliation, les dispositions
le concernant ne sont pas de celles qui vont
mettre de l'huile dans les rouages.
Ainsi, c’est lui qui convoquera les présidents de la juridiction, qui
devront déférer à la convocation, tout ceci en parfaite méconnaissance
des relations entre responsables de la juridiction et juge départiteur.
Cette proposition est une nouvelle démonstration du désir d'ôter à la
justice prud'homale toute son autorité, et s'il fallait une justification
supplémentaire à l'entrée de l'échevinage on la retrouve dans ce projet
pour faire respecter les droits des salariés.
Sur la formation des conseillers:
En l'absence d'éléments, il est difficile de donner une appréciation sur
la formation des conseillers, surtout si elle est calquée sur le rapport
Lacabarats.
La notion de formation initiale nous est familière, c'est ce que nous
demandons lors de chaque scrutin, pour former nos candidats, et que
l'on nous refuse. Le caractère obligatoire peut rencontrer notre
approbation, mais trop d'interrogations demeurent: - Quelle place
auront les organisations syndicales dans cette formation? - Confiera-ton la formation à d'autres ? - Avec quel contenu ? - Par collège ou
tous collèges confondus? Autant de questions qui, à la lecture du
rapport Lacabarats, ne peuvent que susciter l'inquiétude sur cette
formation.
Est évoqué dans la dernière mouture du rapport 5
jours de formation initiale aux conseillers
prud'hommes, mais cela entraîne les mêmes
interrogations: - A quel moment cette formation
interviendrait-elle?
- Avant ou après la prise
de fonction ?
Les propositions qui sont faites dans ce rapport,
vous l'avez compris, ne peuvent recevoir notre
approbation, soit parce qu'elles manquent de
précisions, je pense notamment à la formation
des conseillers, soit parce qu'elles introduisent de
fait l'échevinage dès la conciliation, donnant au
juge départiteur un pouvoir sur les présidents et
vice-présidents de la juridiction. En réalité, ce
rapport transpire l'échevinage. Ce que le
gouvernement ne peut pas faire rentrer par la
porte, il tente de le faire rentrer par la fenêtre, et
cela est inacceptable ! Nous devons rassembler
toutes nos forces pour que cette réforme telle
qu'elle est envisagée, que l'on veut nous imposer,
sans écouter nos propositions, ne puisse pas se
mettre en place.
Concernant notre Conseil de prud'hommes de Montpellier, les
prorogés successifs de notre mandat entraînent des démissions
dues à la lassitude d'un mandat trop long : nous débutons en
2015 notre 7e année de mandat et il nous en restera encore 2 à
accomplir. Cela n'est pas responsable de la part des décideurs
politiques mais contribue à leur apporter des arguments
supplémentaires pour démontrer que la justice prud'homale
dysfonctionne.
Dans son ensemble, notre Conseil rend des
décisions dans des délais raisonnables, une
affaire sans renvoi, ni départage ni appel
étant évacuée en 15,4 mois, comme déjà dit
précédemment. Cependant, nous ne pouvons
passer sous silence le dysfonctionnement
important de la section encadrement, et cela
depuis plusieurs années. Cette section doit
impérativement
reprendre
un
fonctionnement
adapté
et
j'appelle
solennellement les conseillers employeurs
de cette section à remplir les devoirs de leur
charge, en respectant notamment les
dispositions du Règlement Intérieur de notre
Conseil de prud'hommes sur les audiences
réglementaires
à
tenir.
Il
n'est
pas
envisageable de déporter des affaires de la
section Encadrement
sections.
vers
d'autres
Merci de votre attention.
Je passe maintenant la parole au président du Conseil